Le cinéma français face à l`univers concentrationnaire

Transcription

Le cinéma français face à l`univers concentrationnaire
Le cin€ma fran•ais face ‚ l'univers concentrationnaire et au g€nocide.
Sylvie Lindeperg, professeure d’Histoire, Paris I.
1 : QUELQUES REMARQUES ET COMMENTAIRES SUR SES TRAVAUX
RECENTS :
- Les Ecrans de l’ombre. La Seconde Guerre mondiale dans le cin€ma fran•ais (19441969), Coll. CNRS histoire. CNRS €ditions, Paris, 1997, 443 p.
-Nuit et Brouillard, Un film dans l'histoire Editions Odile Jacob janvier 2007
in : Clioweb.free.fr:
Message pour la liste H-Fran€ais, 05/02/2007
• Nuit et brouillard, un film dans l’histoire ‚
Attention, ceci n’est pas un compte rendu.:
Pour parodier Pierre Bayard (Co mment parler des livres qu’on n’a pas lus), juste une forte incitation :
il faut feu illeter chez votre libraire, parcourir, acheter, faire acheter en b iblioth„que,
lire l’excellent ouvrage de Sylvie Lindeperg.
Surtout, si vous continuez … explo iter en classe ce film qui a durablement influenc† notre vision de l’h istoire de
la d†portation.
D’abord pour €viter les approxi mati ons.
Ainsi, le film a eu un double parrainage, celui d’associations comme le Co mit† d’histoire de la 2GM ET le
R†seau du souvenir). Avec le soutien financier du MEN et des Anciens combattants (R Triboulet exige une •
vision h†ro‡que ‚)…
Pour €carter la mauvaise foi et les faux proc‚s anachroni ques.
Les n†gationnistes peuvent se gausser des • 9 millions de mo rts ‚ , de l’allusion … la marque des ongles dans le
b†ton dans les chambres … gaz ou de la mention du • savon ‚ …
A l’oppos†, ceux qui ne jurent que par • Shoah ‚ brocardent le silence de Jean Cayrol … propos de la
destruction des Juifs (• Stern, †tudiant juif d’A msterdam ‚ p 79). Co mme si les images ne parlaient pas d’ellesm‰mes (le d†part du convoi de Westerbork, le tournage … Birkenau ou … Majdanek, les monceau x d’objets
accumul†s par les nazis …).
Cette accusation est contredite par le fait que l’œuvre de Resnais a †t† convoqu†e … plusieurs reprises dans la
lutte contre l’antis†mitis me (en France lors de l’attentat de la rue Copern ic, lors des †v†nements de
Carpentras…, … Berlin en 1960 … la suite d’incidents antis†mites de No‹l 1959)
Le film est bien sŒr le fruit de son temps ; il est marqu† par la personnalit† de ceu x qui l’ont con€u, par la
connaissance des archives en 1955 et par les conditions du tournage. SL souligne la qualit† de la recherche
documentaire, dans un film qui prend la suite de l’exposition • R†sistance, Lib†ration, D†portation ‚ qui a eu
lieu au Mus†e p†dagogique, rue d’Ulm.
Une s†quence peut servir d’†tude de cas :
celle du train quittant Westerbork le 19 mai 1944.
Alain Resnais l’a trouv†e … l’Institut n†erlandais de documentation de guerre (Amsterdam) o• il s’est rendu faute
d’avoir des r†ponses satisfaisantes du SCA (Service cin†matographique de l’arm†e). Il y a 2 raisons probables …
ce blocage : les militaires avaient leur conception de ce qu’il fallait montrer … la population (cf le k†pi) ; le
Resnais du film • Les statues meurent aussi ‚ a pu les inco mmoder.
Le d†part du train a †t† film† … • l’initiat ive des bourreaux ‚, il a †t† • mis en sc„ne ‚ sur ordre du commandnt
Gemmeker et veut • donner l’apparence de la tranquillit† ‚ .
Alain Resnais y ins„re le plan du vieil ho mme avan€ant sur le quai avec ses 3 petits enfants ; il ajoute le p lan
d’Anna Maria (Settela) Steinbach, une fillette t zigane assassin•e par les nazis dans la nuit du 1er au 2 ao‚t 1944,
et dont la trace a •t• retrouv•e par le journaliste Aad Wagenar (p 63).
SL remet aussi en contexte l’image du jeune garƒon aux mains lev•es, extraite d’une photo nazie montrant
l’arrestation en 1943 d’une quinzaine de personnes („ la fin des ann•es 80, … des utilisateurs peu scrupuleux ont
jug• bon d’ajouter une •toile jaune sur le petit manteau † ( p 64-65).
SL consacre plusieurs chapitres au parcours du film. Ainsi en RFA, le film est montr• en Westphalie du Nord,
mais il se heurte au x critiques de certains parents en Bavi‡re ou en Bade-Wurtemberg.
Aujourd’hui, il est conseill• par la Bundeszentrale fur politische Bildung, avec 35 autres films,
pour son int•rˆt cin•matographique…
En France, le film a •t• projet• „ de no mbreuses reprises par la TV. 5000 copies VHS ont •t• distribu•es dans
les •tablissements en 1992. Rares doivent ˆtre les coll‡gues d’histoire qui ne l’ont pas vu lorsqu’ils •taient
•l‡ves ou •tudiants.
Par exp•rience personnelle, l’acc‡s au num•rique et au vid•oprojecteur a totalement chang• la donne par rapport
au temps du 16 mm ou de la cassette vid•o. L’image est excellente en taille et en qualit•.
Pour tous ceux qui ne se contentent pas d’une vid•o presse-bouton, il existe une importante documentation
historique (voir le travail de Diapofilm, les fiches du CNDP).
Ainsi, tout ceci permet d’exp loiter des •l•ments du film dans le chapitre sur … histoire et m•mo ire de la 2GM †,
avec des arrˆts sur image efficaces, pas seulement sur le k•p i du gendarme…
Un mot sur 2 exemp les de censure :
au Japon, les douaniers ont bloqu• le film : ils estimaient que la v iolence pourrait choquer les spectateurs
nippons (les anciens combattants nippons ??)…
En Grande-Bretagne, en 1956, les censeurs ont pris pr•texte d’un cadavre f•min in port• par un gardien vers la
fosse commune „ Bergen-Belsen pour refuser le film.
Alors que cette mˆme image avait •t• pourtant •t• montr•e au public sans aucune censure en 1945,
„ un mo ment oŠ la pudibonderie comptait mo ins que la mise en accusation des dirigeants hitl•riens.
.
- Univers concentrationnaire et g€nocide , Sylvie Lindeperg et Annette Wieviorka, †dition
Mille et une nuits, avril 2008.
L'ouvrage vient de 3 conf€rences au Coll„ge de France :
1 - Premi‚re €critures de l'histoire : L€on Poliakov et Olga Wormser-Migot
2 - Monuments et inscriptions : Le mus€e d' Auschwitz, Nuit et Brouillard, le Tombeau du martyr jui f
inconnu
3 - Filmer le proc‚s Eichmann
• p 24-25 : "En France, l'h istoire du g†nocide est une histoire qui a †t† †crite par des marg inau x (Olga
Jungelson (Wormser-M igot), L†on Poliakov) … la p†riph†rie de la co mmunaut† ju ive organis†e, ignor†e de
l'Universit† et qui fut le fait d'autodidactes passionn†s apprenant le m†tier sur le tas en se pliant avec bonheur …
la discip line rigoureuse de l'†criture de l'histoire".
p 29 : "Au d†but des ann†es 1950, le contraste est saisissant entre les avanc†es pr†coces de l'histoire du g†nocide
(...) et celles balbutiantes de la d†portation et du syst„me concentrationnaire, alors que les victimes juives sont
invisibles et que domine encore, dans les comm†morat ions et les discours officiels, la figure du d†port† r†sistant
c†l†br† en h†ros. Osons l'hypoth„se que le faib le int†r‰t rencontr† par cette histoire (y co mpris dans le monde
juif) fut peut-‰tre l'une des conditions de son †laboration diligente. Il m†nage en effet la libert† totale des
chercheurs, libert† sans laquelle rien n'est possible".
p 39. " La m†mo ire de la d†portation r†sistante est pr†sente d„s l'apr„s-guerre et le pro jet d'en †crire l'histoire
b†n†ficie du soutien des pouvoirs publics et mobilise les meilleurs esprits. Pourtant cette histoire ne peut alors
s'†crire. Peut-‰tre parce que les historiens de renom qui veillent sur ce chantier sont eux-m‰mes des d†port†s. En
revanche, la destruction des Juifs d'Europe int†resse des marginau x qu i ont †chapp† … la d†portation. Elle n'est
gu„re pr†sente dans l'espace public. Mais le rassemblement des traces a †t† une obsession d„s la p†riode de la
guerre et son histoire s'†crit d†j…" ‚ Clioweb.
- documentaire, Face aux fant„mes, 2009, de Jean Louis Comolli et Sylvie Lindeberg,
Argos film.
• En 2007, Sy lvie Lindeperg publiait • Nuits et Brouillard : un film dans l’histoire †, aboutissement d’une
longue r•flexion sur l’œuvre de Resnais. Dans ce film co mme dans son livre, mais cette fois au moyen des
images et des sons, Sylvie Lindeperg interroge les influences complexes qui ont conduit „ la r•alisation de € Nuit
et Brouillard ‚ et ont pes† sur son destin. Dans ce film, nous avons voulu actualiser le geste et le regard
historiens. Les filmer ici et maintenant. Les images d’archive des camps de concentration et des centres de mise
… mort reprises dans le film d’Alain Resnais pose toujours les questions de leur l†gitimit†, de la souffrance
qu’elles portent, du d†fi qu’elles pr†sentent aux d†sirs comme au x possibilit†s de voir. S’agissant de la
destruction des juifs d’Europe, ces questions sont brŒlantes ‚
2 : COMPTE-RENDU DE SON INTERVENTION AU CHRD Le 23 mars 2010 :
Le 8 avril 1944, 1„res images a†riennes d’Auschwitz prises par les Am†ricains pour des
raisons strat†giques li†es … l’industrie, mais ce n’est qu’au bout de 33 ans que l’on inscrit sur
ces photos a†riennes le nom de • chambres … gaz ‚ ou • potence ‚… Il y a eu tout un travail
de r†-exhumation des images. En 1977, un pilote am†ricain se dit que si on a pris les photos
des usines IG Farben, on doit †galement voir des images du camp, que l’on n’avait pas
cherch† … l’†poque. Donc, les images n’ont jamais un sens stabilis† et leur interpr†tation
change avec le savoir scientifique.
Ce travail appartient … un contexte, celui des ann†es 1970 lorsque la M†moire change face … la
D†portation : c’est le film documentaire, le Chagrin et la Piti• en 1971 en France et le
t†l†film Holocauste aux Etats-Unis en 1978, qui conduisent au basculement.
1 : Quelques rep‚res sur les images de la lib€ ration des camps :
Les 1„res images de la lib†ration des camps sont celles prises … Ma‡danek et … Auschwitz,
pour les autres centres de mise … mort, pas d’images car effacement des traces par les nazis.
Quand les Sovi†tiques arrivent … Auschwitz, il n’y a • plus grand chose ‚ … filmer : les 7 000
survivants ont †t† d†plac†s lors des marches de la mort les conduisant dans des camps …
l’Ouest. Ce qui entraŽne d’ailleurs un brouillage lors du retour des d†port†s entre le d†port†
r†sistant et les juifs survivants. (A. Wievorka)
Les Sovi†tiques filment les baraquements, l’ext†rieur des blocs et quelques charniers et les
rares survivants pr†sents, qui sont dans des †tats de sant† d†plorables. Les Sovi†tiques n’ont
pas de projecteurs donc filment seulement des plans d’ext†rieur. Ils tournent … diff†rentes
dates : f†vrier, mars 45. En mars, ils filment des fun†railles pour la commission d’enqu‰te
dans le but de mettre en accusation les industriels allemands.
En avril: 1„res images de plan travelling qui suit les d†port†s derri„re les barbel†s mais ce ne
sont pas des images du 27 janvier car les d†port†s ont d†j… retrouv† quelques cheveux,
paraissent moins faibles.
Les Sovi†tiques tournent aussi un film de fiction qui reconstitue leur arriv†e: cet †v†nement
†tait tellement improbable et diff†rent de ce … quoi ils s’attendaient, qu’ils †prouvent le besoin
de le tourner … nouveau ! En m‰me temps, ce moment co‡ncide avec l’ouverture des camps …
l’Ouest 5LES Alli2s ont d†cid† de • m†diatiser ‚ l’ouverture des camps ‚), donc mise en r†cit
des Sovi†tiques pour rench†rir par rapport aux anglo-am†ricains. (A.Wievorka)
V†ritable paradoxe de ces images, qui sont certes terribles, mais sans commune mesure avec
celles tourn†es … l’Ouest, et ce sont donc celles de Bergen-belsen qui sont devenus le
symbole de l’extermination (or il n’existe pas d’images de corps gaz†s … Auschwitz).
Les op†rateurs am†ricains ont †galement tourn† des image … Dachau, Buchenwald et les ont
montr†s … Nuremberg lors du proc„s: Pourquoi ? c’est … partir de la visite d’Eisenhower en
Allemagne (avril 1945), les Am†ricains lancent une campagne, avec 3 objectifs :
- maintenant on sait pourquoi on s’est battu
- seules les images pourront prouver ce qui s’est pass† : car peur de l’incr†dulit† des
opinions publiques occidentales face au r†cit oral. Opposer les images … la rumeur.
- Les spectateurs allemands qui voudraient nier ne le peuvent car on les contraint … les
regarder : sous forme d’actualit†s ou par le film Death Mills ou les moulins de la mort
de Billy Wilder en 1945. Enfin … destination des dignitaires nazis, lors des proc„s de
Lunebourg et de Nuremberg. Mais, on est dans une logique de guerre froide, donc on
ne va pas condamner un peuple dans sa totalit† ; il ne s’agit pas de faire basculer les
peuples dans le communisme.
Les Britanniques font tourner un film … Bergen-Belsen en pr†sence de juifs survivants venus
d’Auschwitz. A cette date, surpopulation dans le camp, terreur pour les Britanniques car
†pid†mie de typhus entraŽnant une surmortalit† : les images sont donc effroyables car on se
souvient tous des bulldozers qui poussent les cadavres dans les fosses or ici on fixe un
imaginaire des camps : on attribue souvent ces images … la barbarie nazie (dans Nuit et
Brouillard, entre autre) or ce sont des images des lib†rateurs qui sont devenues des symboles
de l’extermination.
Autre particularit† : on pr†pare le tournage en amont dans le cadre de relever des preuves : il
s’agit d’assurer aux images ce statut de preuve : consignes furent donn†es aux op†rateurs
comme Sidney Bernstein aid† par Hitchcock de filmer des plans longs, ou plan s†quence
car la v†rit† est dans le plan et le mensonge est dans le montage : donc tout garder, ne rien
couper, ne rien monter (idem pour Fuller).Il s’agit pour les r†alisateurs d’une nouvelle fa€on
de travailler : Hitchcock fera la corde par la suite dans cet esprit.
Le 1er montage de ces images dans les actualit†s fran€aises :
C’est en mai 45, tardivement, par rapport … la lib†ration et bri„vement que l’on montre des
images des camps de l’ouest. Elles sont mises au service d’un discours sur la comm†moration
h†ro‡que. On confond alors toutes les images dans celle du d†port† patriote r†sistant : on
occulte le sort des juifs. Ces images vont contribuer … fixer un imaginaire des camps et de la
d†portation. L’occultation de l’extermination juive est
un ph†nom„ne quasi-europ†en;
exception en RDA et EU, mais faiblement.
Au milieu des ann†es 50, avec Nuit et Brouillard de Resnais, il y a la r†v†lation de
l’†v†nement mais sans en avoir r†ellement conscience; mais c’est le proc„s Eichmann en
1961 en Isra‹l qui va avoir des effets consid†rables sur la vision de ce que fut la d†portation
des juifs.
2 : Nuit et brouillard de Resnais, sorti en 1956:
Il s’agit d’un film de commande faite par le minist‡re de l’Education Nationale, c’est une
œuvre d’art et une œuvre intemporelle. Cette commande fut lanc•e conjointement par le
comit• d’histoire de la Seconde Guerre mondiale et par le … R•seau du souvenir †(constitu•
par d’anciens R•sistants) en 1952. Ce sont d’anciens r•sistants qui ont cr•• la journ•e du
souvenir des D•port•s fin avril, le m•morial sur l’Œle de la cit• „ Paris , et en 1954, organise
l’exposition , rue d’Ulm, sur R•sistance et D•portation. Cette exposition servira de fonds
documentaire au film. Id•e : toucher la jeune g•n•ration donc faire un film de court- m•trage.
Il s’agit d’un rapport complexe entre Histoire et M•moire car celui-ci est port• par des
d•port•s r•sistants et par des historiens : Olga Wormser et Henri Michel. Il y a une
conception mus•ographique de l’art dans le film de Resnais, il va donc, d•tourner, un peu, la
commande. Le producteur est Anatole Domand qui apporte la dimension artistique : il veut
une haute ambition artistique „ ce film : c’est la 1„re fois que l’on •voque la puissance
artistique pour port•e un tel •v•nement : on fait appel „ Resnais or en 1953, son film politique
fait avec Chris Marker, les statues meurent aussi, est interdit par la censure car consid†r†
comme un pamphlet anticolonialiste!
A.Resnais va alors travailler selon 3 composantes :
- montage d’archives
- utiliser des objets ayant appartenu … des d†port†s, ceux de l’exposition
- tourner in-situ, dans les camps du Struthof, Mauthausen, Maidanek et AuschwitzBirkenau.
Ce qu’apporte Resnais : la couleur car veut montrer la diff†rence entre la beaut† des lieux et
l’horreur de ces lieux, de ce qui s’est pass†.
C’est aux Pays-Bas qu’il trouve les contre-types des plans tourn†s … Bergen-Belsen car
l’arm†e fran€aise lui refuse l’acc„s aux archives. Il y d†couvre un film in†dit sur le camp de
transit de Westerbork o• furent film†es les seules images que l’on ait du d†part d’un convoi
de juifs et Tsiganes, celui du 19 mai 1944. A ces images, de propagande command†e par les
SS et • jou† ‚ par les juifs, il ajoute 2 plans au montage, eux, tourn†s en Pologne, afin de
rendre ces images plus inqui†tantes car celles de Westerbork semblent dire que le voyage est
accept† par les d†port†s presque contents de partir pour l’Est.
Par cet ajout, Resnais ouvre en fait son film … l’extermination or ce n’†tait pas le but de sa
commande. Cependant, ces images sont l… mais sont muettes : aucun commentaire de Cayrol
ne les accompagne.
Le 1er Sch•ma synopsis qui devait ˆtre le parcours d’un d•port• depuis la France jusqu’„ la
Lib•ration est de fait •toff• car il y joint une vision artistique et une description du syst‡me
concentrationnaire.
Le tournant de 1942, „ savoir la visite du camp d’Auschwitz par Himmler est pr•sent
•galement : il y a croisement entre les images d’Himmler venant voir les usines d’IG.Farben
et celles oŠ il visite Birkenau : ces photos sont d•couvertes en Pologne, mais au montage, le
rapprochement entre la s•lection des d•port•s pour le travail et celle pour l’extermination
disparaŒt au montage.
Autre singularit• au milieu des ann•es 1950: l’histoire de la d•portation n’est pas encore
•crite, ni celle de Vichy (on oblige Resnais „ retirer la photo du gendarme, Resnais ne fera
que masquer par un gros trait noir le k•pi du gendarme qui garde le camp de Pithiviers), donc
le film de Resnais est le brouillon d’une œuvre d’historiens „ venir, car il porte les 1ers
travaux et la difficult• „ penser ces 2 axes de recherche.
Resnais •crit un sc•nario puis va „ Auschwitz et est saisi : Birkenau est la m•taphore vive de
l’oubli, car tout est en d•composition. Or, son film doit ˆtre un moyen d’ouvrir les yeux, de
regarder vers l’avenir. La fin est tourn•e „ Birkenau, et on ne ressort pas du camp „ la fin du
film car l’histoire n’est pas finie. Les images en noir et blanc sont celles des objets, des
cheveux film•s au mus•e d’Auschwitz : ces •l•ments renvoient au pass•, au c•t•
mus•ographique ; les ext•rieurs sont en couleur.
Le commentaire est de Jean Cayrol, ancien d†port† : au d†but il est incapable d’†crire sur les
images, on observe des d†faillances dans son 1er texte : re€oit l’aide de Chris Marker qui va
l’influencer. La musique est compos† par Hanns Eisler (qui vit … Berlin Est, anti- nazi qui
v†cut aux Eu et fut contraint de partir lors du maccarthysme). Il †crit une musique dissonante,
m†lancolique, pour le passage des images de Westerbork, il d†construit l’hymne national
allemand ; allusion non comprise en France, mais en RDA, le son sera †limin† ! M‰me chose
pour l’†pilogue, en Rda on change le texte final (il y a encore des camps dans le monde
communiste !). Resnais lui fait allusion … la barbarie des Fran€ais dans la guerre d’Alg†rie.
€ Qui de nous veille de cet •trange observatoire, pour nous avertir de la venue
des nouveaux bourreaux ? Ont-ils vraiment un autre visage que le n‚tre ?
Quelque part parmi nous il reste des kapos chanceux, des chefs r•cup•r•s, des
d•nonciateurs inconnus … Il y a tous ceux qui n’y croyaient pas, ou seulement
de temps en temps. Il y a nous qui regardons sinc…rement ces ruines comme si
le vieux monstre concentrationnaire •tait mort sous les d•combres, qui
feignons de reprendre espoir devant cette image qui s'•loigne, comme si on
gu•rissait de la peste concentrationnaire, nous qui feignons de croire que tout
cela est d’un seul temps et d’un seul pays, et qui ne pensons pas † regarder
autour de nous, et qui n’entendons pas qu’on crie sans fin. ‚
Enfin, dans la version ouest-allemande, on rajoute un passage sur l’extermination car
arrestation d’Eichmann.
A partir de 1961, on entre dans l’„re des t†moins, le film de Resnais est montr† lors du proc„s
d’Eichmann, mais son statut de film sur le g†nocide tombe et va ‰tre fortement critiqu† dans
les ann†es 80, car le mot juif n’est cit† qu’une seule fois ; il y a amalgame. Or d„s les ann†es
70, on d†tache l’extermination des juifs du reste : on introduit la parole du t†moin : cf l’•re
du t‚moin ou le temps du ghetto de Rossif en 1961 : film mont† … partir des images tourn†es
par les nazis avec des t†moignages de rescap†s.
En 1969 : le chagrin et la piti• : rupture : la question juive vient au centre du sujet, c’est la
vague • r†tro ‚ au cin†ma.
En 1979 : Holocauste : un dossier de l’•cran lui est consacr• : t•l•film populaire qui va placer
de mani‡re central l’extermination.
En 1985 : Shoah de Lanzman : 1er film centr† sur la chronologie et sur le gazage donc le film
commence … Chelmno, puis arpentage. Il pose radicalement la question de la quasi-absence
des images de l’extermination. Il a donc une influence consid†rable sur ce que doit ‰tre la
m†moire et dans les d†bats autour de l’image.
Conclusion :
Des films de fiction parlent des juifs et de l’extermination: Les guichets du Louvre, Monsieur
Klein (sur la rafle du Vel d’Hiv), et La Rafle en mars 2010.