Chimiothérapie néoadjuvante des cancers de vessie par MVAC : la
Transcription
Chimiothérapie néoadjuvante des cancers de vessie par MVAC : la
Progrès en urologie (2015) 25, 1171—1172 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com COMMENTAIRE À. . . Chimiothérapie néoadjuvante des cancers de vessie par MVAC : la faisabilité est-elle vraiment établie ? À propos de : Benadiba et al. : Chimiothérapie néoadjuvante dans le cancer de vessie infiltrant le muscle : complications et conséquences sur la réalisation de la cystectomie, Pr Urol 2015; 25: 549—554 Neoadjuvant chemotherapy with MVAC in bladder carcinoma: Is the feasibility really established? Of: Benadiba et al.: Neoadjuvant chemotherapy in muscular invasive bladder cancer: Complications and consequences on cystectomy, Pr Urol 2015; 25: 549—554 R. Coquard Centre oncologie radiothérapie Bayard, 44, avenue Condorcet, 69100 Villeurbanne, France Disponible sur Internet le 26 septembre 2015 La chimiothérapie préopératoire des cancers de la vessie est une approche thérapeutique déjà ancienne. L’association association de méthotrexate, vinblastine, doxorubicine et cisplatine (MVAC) a été utilisée dès le début des années 1980 [1]. Pourtant il a fallu attendre les années 2000 pour que le bien-fondé d’une chimiothérapie néoadjuvante soit étayé par des essais randomisés, en particulier l’étude SWOG 8710 [2]. Malgré ces essais randomisés, en 2015, DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.purol. 2015.04.004. Adresse e-mail : [email protected] http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2015.07.008 1166-7087/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. la faisabilité de cette chimiothérapie néoadjuvante reste controversée comme le montre l’étude récente de Benadiba et al. [3]. Dans cette contribution, les auteurs ont étudié les complications d’une chimiothérapie néoadjuvante par MVAC accéléré et son impact sur l’opérabilité. La toxicité a été acceptable. Quatre patients sur 32 n’ont pas été opérés, proportion observée dans la littérature [2]. En somme, la chimiothérapie néoadjuvante serait applicable dans la pratique clinique, y compris avec un MVAC intensifié. Certains éléments nous semblent au contraire de nature à tempérer cet optimisme. 1172 Si l’étude présentée est détaillée quant aux complications postopératoires, les conditions de la chimiothérapie sont moins décrites. L’importance des adaptations de dose et les reports de cures ne sont pas précisés. Cela est d’autant plus gênant que le schéma de chimiothérapie se caractérise par une recherche de la dose-intensité. En outre les traitements de support n’ont pas été décrits. Les complications sont rapportées par grade, mais pas par nature et par organe. Y a-t-il eu des aplasies fébriles nécessitant une hospitalisation ? Le deuxième point à souligner tient aux effectifs de cette étude. Quatre institutions ont collaboré à ce travail sur une période de 3 ans et seulement une trentaine de patients a bénéficié de chimiothérapie néoadjuvante. Il aurait été intéressant de savoir combien de patients ont eu, pendant la même période, une cystectomie radicale pour cancer dans les mêmes établissements, et quelles motivations ont conduit à indiquer la chimiothérapie dans certains cas et à la réfuter pour d’autres. À ce propos il faut rappeler que l’essai SWOG 8710 [2] a connu une genèse difficile. Il a été activé en 1987 et publié seulement en 2003. En dépit du rayonnement du groupe coopérateur qui conduisait l’étude, il a fallu 11 ans d’inclusion pour recruter 317 patients. . . En résumé, s’il est certain que la chimothérapie néoadjuvante permet de réduire le risque de décès d’environ 5 % en valeur absolue [4], cette chimiothérapie, si elle fait appel au MVAC, ne semble applicable qu’à une population de patients sélectionnés. Que faire pour les patients en état général moyen ? Aujourd’hui, dans la pratique quotidienne, l’association gemcitabine—cisplatine est couramment utilisée. Moins toxique que le MVAC, elle donne, en situation métastatique des résultats à peu près similaires. En situation néoadjuvante, elle permet un taux de stérilisation tumorale de l’ordre de 25 % [5]. Mais son efficacité à réduire les récidives R. Coquard et les décès par cancer n’est encore pas connue. Il faudra attendre les résultats de l’étude VESPER pour connaître son bénéfice en survie sans récidive. Cette étude, qui compare le MVAC à l’association gemcitabine—cisplatine, ne résoudra cependant pas le dilemme du clinicien confronté à une fonction rénale altérée et tentée de substituer le carboplatine au cisplatine. Déclaration d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Sternberg CN, Yagoda A, Scher HI, Watson RC, Ahmed T, Weiselberg LR, et al. Preliminary results of MVAC (methotrexate, vinblastine, doxorubicin and cisplatin) for transitional cell carcinoma of the urothelium. J Urol 1985;133(3):403—7. [2] Grossman HD, Natale RB, Tangen CM, Speights VO, Vogelzang NJ, Trump DL, et al. Neoadjuvant chemotherapy plus cystectomy compared with cystectomy alone for locally advanced bladder cancer. N Engl J Med 2003;349:859—66. [3] Benadida S, Gauthier H, Ploussard G, Mongiat-Artus P, Froger L, Basset V, et al. Chimiothérapie néoadjuvante dans le cancer de vessie infiltrant le muscle : complications et conséquences sur la réalisation de la cystectomie. Prog Urol 2015;23:549—54. [4] Advanced Bladder Cancer (ABC) Meta-analysis Collaboration. Neoadjuvant chemotherapy in invasive bladder cancer: update of a systematic review and meta-analysis of individual patient data advanced bladder cancer (ABC) meta-analysis collaboration. Eur Urol 2005;48(2):189—99. [5] Yuh BE, Ruel N, Wilson TG, Vogelzang N, Pal SK. Pooled analysis of clinical outcomes with neoadjuvant cisplatin and gemcitabine chemotherapy for muscle invasive bladder cancer. J Urol 2013;189(5):1682—6.