VĂN MIẾU QUỐC TỬ GIÁM - Vietnam mon pays natal. Terre des

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VĂN MIẾU QUỐC TỬ GIÁM - Vietnam mon pays natal. Terre des
Hiền tài là nguyên khí của quốc gia.
Nguyên khí thịnh thì thế nước mạnh. Nguyên khí suy thì nước yếu
Le talent est la source de vie d’une nation.
Une source jaillissante fait la force d’un pays. Une source tarissant
l’affaiblit.
VĂN MIẾU QUỐC TỬ GIÁM
Temple de la littérature
La première Université Nationale du Vietnam, QUỐC TỬ GIÁM, fêtera en
2006 ses 930 ans d’existence. Son origine n’est pas loin de se confondre
avec celle de Hanoi. Elle peut s’enorgueillir d’avoir précédé d’un bon
siècle les anciennes et prestigieuses universités occidentales de Bologne,
Oxford et Paris. Erigée six ans après le VĂN MIẾU, le Temple de la
Littérature dédié à Confucius, dans la même enceinte, elle compte
parmi les monuments de la capitale ayant surmonté dix siècles de
tourmentes, d’invasions, de guerres civiles. Elle est contemporaine des
pagodes Trần Quốc, Một Cột, Lang et Kim Lien. Le complexe
architectural imposant et bien conservé en plein cœur d’Hanoi renferme
des parties très anciennes qui portent la couleur du temps et les valeurs
d’un passé aussi riche que méconnu.
CONSOLIDATION DE LA NATION VIETNAMIENNE
C’est en 1076 que fut créé le Collège des fils de la Nation, QUỐC TỬ
GIÁM par le roi LÝ NHÂN TÔNG, de la grande dynastie des LY
postérieurs. Depuis la reconquête de l’indépendance en 939, la tâche qui
s’imposait aux souverains vietnamiens était immense et ardue. Les
dynasties précédentes des Ngô, des Ðinh et des Lê antérieurs s’étaient
épuisées dans les divisions intestines et dans des guerres de conquête au
début de la marche victorieuse vers le sud. Au début du 11ème siècle, le
Viêtnam, alors rebaptisé ÐẠI VIỆT, était une nation de culture originale
ancienne dans un Etat jeune. A l’intérieur de frontières encore mal
établies au Sud, il restait à fortifier l’unité nationale et à dominer les
rivalités de grandes familles qui menaçaient de déchirer le pays. A
l’extérieur, il fallait maintenir de bonnes relations de vassalité avec le
puissant voisin chinois. Les LÝ se montrèrent à la hauteur de ces défis. La
construction de digues pour remédier aux crues du Fleuve Rouge permit
de fixer la population et favorisa l’essor de l’agriculture.
www.vietnammonpaysnatal.fr L’achat et la vente des terres furent réglementées, ce qui entraîna
l’apparition d’une classe de petits propriétaires terriens à côté des
grands seigneurs féodaux. L’artisanat se développa (tissage,
orfèvrerie, poterie, porcelaine), et par voie de conséquence, le
commerce.
Vietnamiens très tôt, probablement dès le XIIe siècle, se servirent d’une
écriture iconographique spéciale, le nôm, pour transcrire la langue
nationale populaire, le kinh.
Sur le conseil d’administrateurs confucéens compétents, les LÝ
parvinrent à mettre en place un gouvernement centralisé fort et purent
donner à l’élite dirigeante une légitimité. S’inspirant du modèle
administratif chinois, le roi LÝ NHÂN TÔNG organisa en 1075 le premier
concours pour recruter les mandarins qui allaient exercer le pouvoir.
L’année suivante, il adjoignait au VAN MIEU une école supérieure pour y
former les hauts fonctionnaires, le QUỐC TỰ GIÁM. L’établissement
d’enseignement, dans ce pays de tolérance, exista sans heurt juste à
côté du lieu de culte. Regroupant un temple dédié à Confucius et un lieu
d’enseignement en un seul ensemble, cette construction est une œuvre
unique qui souligne l’originalité du Vietnam par rapport à la Chine.
L’Université Nationale, à ses débuts, formait uniquement des fils
recrutés dans la famille royale et parmi les grands mandarins, tout
comme les dynasties antérieures s’appuyaient sur la noblesse.
L’introduction du mode de sélection par concours présenta un
changement significatif : par le biais d’examens difficiles,
l’administration se fondait sur le talent, sur la compétence et sur
l’engagement loyal envers le pouvoir impérial. Et celui-ci évitait l’écueil
de voir se constituer des grandes familles nobles susceptibles de lui
contester l’autorité.
ESSOR D’UNE CULTURE NATIONALE
Durant presque dix siècles de colonisation chinoise, les Vietnamiens
avaient sauvegardé leur originalité culturelle et assimilé une large part
de la culture chinoise. Le Collège des fils de la nation diffusa donc les
humanités confucéennes : les classiques confucéens, philosophie,
littérature, histoire et politique. Les candidats brillants apprenaient par
cœur les Quatre livres du Confucianisme, mais aussi l’histoire du
Vietnam et de la Chine. Ils étudiaient en outre les règles de la
composition poétique, ils apprenaient à préparer toutes sortes de
documents : édits royaux, discours, rapports de missions, analyses,
essais. La langue en usage était certes le chinois ou hán, cependant les
L'autel de Chu Van
An à l'intérieur du
temple
Sous la férule chinoise, les Vietnamiens
avaient appris juste ce qui était
nécessaire pour devenir de bons
serviteurs. Jusqu’au dixième siècle, il n’y
a aucune trace de littérature
vietnamienne. Seules les légendes ont
peut-être cristallisé la mémoire collective,
empêchée de s’exprimer librement sous
la pression de l’occupant. L’écriture nôm
dérivée de l’écriture idéographique
chinoise représenta une réaction
nationale et populaire face à une
domination culturelle étrangère. « L’âme
d’un peuple vit dans sa langue » disait
Goethe. Ceci est un fait patent au
Vietnam. La langue transcrite en nôm
connut un essor vigoureux chaque fois
que le mouvement national et populaire
prenait de l’ampleur. Après que le grand
NGUYỄN TRÃI au 14ème siècle eut écrit
ses poèmes en nôm, l’écriture démotique
conquit ses lettres de noblesse et plus
aucun lettré ne dédaigna d’écrire en
nôm. Une autre grande figure
vietnamienne, NGUYỄN HUỆ, accomplit
une véritable révolution en imposant
durant son règne, à la fin du XVIIIe
siècle, le nôm comme langue officielle
dans l’administration et dans les concours
mandarinaux.
Les concours royaux ont donné une impulsion décisive à l’enseignement
dans le pays tout entier. L’Université Nationale devint pour longtemps la
clé de voûte du système éducatif Des écoles se créèrent pour préparer
les candidats aux concours mandarinaux. A côté des grands domaines
seigneuriaux existait un système bien organisé de communes rurales.
Dans nombre d’entre elles il y avait une école privée à côté des écoles
publiques, tant au niveau national que provincial et local. Les maîtres
étaient des hommes instruits qui avaient échoué aux concours, ou bien
encore les titulaires d’un baccalauréat, d’une licence, et les lauréats
docteurs qui n’avaient pas voulu devenir mandarins ou qui étaient
dégoûtés de la politique. Le prestige du savoir, le respect des maîtres et
du talent s’était répandu au fil des siècles jusque dans la paysannerie la
plus pauvre. Quelle mère ne rêvait pas de voir ses fils un jour se
présenter aux difficiles concours.
LE PARCOURS SEME D’OBSTACLES D’ UN CANDIDAT
AUX EXAMENS ROYAUX
Le dicton populaire était bien ancré dans les mentalités :
« Sans un maître, je te défie d’arriver à quelque chose. »
“Không thầy, đố mầy làm nên”
Littérature et service public n’étaient pas distincts dans le système
éducatif traditionnel vietnamien. Les poètes contribuaient à la vie
économique de leur pays. Parmi les hommes d’Etat et les stratèges les
plus brillants, un bon nombre était des poètes. Les plus célèbres d’entre
eux, révérés comme des héros dans la population toute entière, furent :
TRẦN HƯNG ÐẠO (1213-1300) qui a triomphé des Mongols en
défaisant Kubilai Khan
NGUYỄN TRÃI (1380 – 1442), grand poète et homme d’Etat qui
mit un terme à une nouvelle occupation chinoise des Ming.
NGUYỄN DU, diplomate sous le règne de Gia Long, qui avec son
roman en vers, le Kiều, porta le nôm à la perfection.
Ces deux derniers sont inscrits par l’UNESCO au Panthéon des hommes
de culture de l’humanité.
Initialement, les concours nationaux se
déroulaient selon une périodicité irrégulière,
en fonction des besoins de l’administration
impériale. A partir de 1434, jusqu’en 1919,
date de la dernière session, ils eurent lieu
tous les trois ans. Lorsque le roi Lê Thần Tông
redéfinit les règles au 14ème siècle, l’examen
se déroula à deux niveaux successifs :
régional, puis national, chacun en quatre
phases qui pouvaient au total durer plusieurs
mois. Il fallait franchir avec succès chaque
étape afin de se qualifier pour la suivante.
L’ultime épreuve se déroulait au palais
impérial devant le roi qui examinait en
personne le dernier lot des futurs docteurs.
Quelques chiffres donnent un aperçu éloquent des exigences et de
l’importance des concours royaux :
En moyenne, 70 000 à 80 000 candidats disputaient les compétitions
régionales.
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De 450 à 6000 candidats étaient sélectionnés parmi ceux-ci pour
prendre part à Hanoi à l’examen national. Ils s’installaient pour la durée
des épreuves sur le campus universitaire du centre ville avec leur lit de
bambou, leurs pinceaux, leur encrier.
En 1777, l’Université Nationale et le Quartier Doctoral étaient devenus
une institution imposante comprenant 300 salles de classes, une
immense bibliothèque et une maison d’édition. Ce vaste complexe fut
détruit par la guerre en 1946.
A l’issue de l’examen final au palais impérial, seulement 15 candidats se
voyaient décerner le titre de Docteur ( tiến sĩ ), avec une moyenne d’âge
de 32 ans.
Entre 1076 et 1779, date de la dernière session tenue à Thăng Long
(Hanoi), 2313 candidats ont reçu le titre de Docteur.
1306 d’entre eux ont leur nom et grade gravés en caractères chinois
sur les 82 stèles (41 de chaque côté ) du troisième espace du Văn Miếu
Quốc Tự Giám à Hanoi. Ces 82 stèles conservent la mémoire des
lauréats reçus entre 1442 et 1779. C’est le roi Lê Thánh Tông qui prit
l’initiative de rendre ainsi hommage aux grands serviteurs du pays. 116
examens nationaux eurent lieu durant cette période, cela signifie qu’il
manque 34 stèles dont on ignore les raisons pour lesquelles elles n’ont
pas été érigées ou ont disparu.
A partir de 1802, avec le règne de Gia Long, les examens triennaux se
déroulèrent à Hué jusqu’à leur abolition en 1919. Le QUỐC TỰ GIÁM
redevint le VĂN MIẾU, Temple de la Littérature, mais fut préservé. La
tradition d’inscrire les Docteurs de la Nation au tableau d’honneur fut
également conservée. A la Cité Interdite de Hué, au premier étage de la
Porte NGỌ MÔN, leurs noms sont mentionnés très lisiblement sur un
grand tableau de marbre noir, avec leur village et leur province
d’origine.
Les examens de capacité se doublaient d’une redoutable épreuve
physique pour les provinciaux. Le chemin à parcourir pour se rendre
dans la capitale était semé de dangers. Venant d’une lointaine province,
les futurs diplômés devaient parfois parcourir jusqu’à 300 km ou plus,
emmenant avec eux la nourriture, la tente, l’étroit lit de bambou et de
quoi écrire. En cours de route, ils avaient à redouter aussi bien les
bandits de grand chemin que l’attaque des tigres et les morsures de
serpents. S’ils parvenaient à triompher de tous ces obstacles, la plupart
d’entre eux préféraient rester quelques années sur place pour étudier,
afin s’assurer les meilleures chances de succès.
L’imagerie populaire a souvent peint le retour triomphal des docteurs
dans leur village natal, annoncés par une procession de bannières et
d’oriflammes, de palanquins, d’objets de cérémonie, précédés par la
famille et les amis. Tout au long du parcours retentissaient les tambours
marquant l’arrivée de l’enfant du pays qui rapportait, en même temps
que le certificat doctoral délivré par le roi, la gloire à tout le village.
Celui-ci se voyait désormais distingué comme « une terre de
littérature » đất văn chương. Ensuite le lauréat ne manquait pas de
s’incliner devant l’autel des ancêtres et de Confucius, avant de convier
tout le monde à un banquet parfois ruineux.
Au cours du deuxième millénaire AC de l’histoire du Vietnam, l’élite
intellectuelle issue des concours nationaux, produisit, à côté de brillants
stratèges, mathématiciens, hommes d’Etat, philosophes, hommes de
lettres, son lot de simples bureaucrates et de mandarins corrompus.
Selon la tradition confucéenne, aucune femme n’avait accès à
l’enseignement officiel. Une seule eut l’audace de braver l’interdit. Elle
se présenta aux examens royaux, déguisée en homme. Cela se passait
sous la dynastie des Mạc, au 16ème siècle. Elle s’appelle Nguyễn Thị
Duệ ; obstinée, intelligente, elle mena ses études à leur terme et obtint
le titre de docteur. Elle est une de ces femmes vietnamiennes de
caractère exceptionnel qui ont contribué à alimenter la source vive du
talent et fait la vertu de cette nation.
LE QUOC TU GIAM A TRAVERS LES VICISSITUDES DE
L’HISTOIRE
Le bel ensemble architectural qui s’étend entre les rues QUOC
TU GIÁM et NGUYỄN THÁI HỌC comprend des monuments
érigés principalement aux 17ème et 18ème siècles. La toute
récente restauration du Temple de la Littérature remonte aux
dernières années du 20ème siècle. Quant à la reconstruction de
l’Université Nationale, elle date de l’an 2000 et marqua le
990ème anniversaire de THANG LONG (Hanoi). Les artisans
recoururent à des techniques anciennes afin de restituer à ce
haut lieu un caractère d’authenticité. Toutefois il leur était
impossible de reconstruire cet édifice à l’identique. Toute cette
partie avait trop souffert des destructions infligées par la
nature et encore plus par les hommes durant la présence
française au 19ème siècle, et les croquis de l’architecture
originale avaient été perdus. En 1946, la guerre avait porté un
coup fatal au QUOC TU GIAM.
L’un des épisodes probablement les plus dramatiques se situe
en 1903, quand une épidémie foudroyante frappa la ville
d’Hanoi. Les malades étaient si nombreux que l’hôpital PHU
DOAN (l’actuel hôpital germano-vietnamien ) fut bientôt
débordé. Il s’installa dans l’enceinte du VĂN MIẾU QUỐC TỬ
GIÁM dont les remparts représentaient un barrage à la
contagion. La maladie fut jugulée grâce à un vaccin mis au
point par le Docteur Yersin et au dévouement des médecins.
Mais le Temple était dans un tel état que les autorités
françaises décidèrent de le transformer en hôpital. Ils se
mirent en quête d’un nouvel endroit pour y construire le
nouvel édifice. Conscient de s’attaquer au Saint Siège de la
culture vietnamienne, le représentant du Gouverneur Général
de l’Indochine, Pasquier, consulta préalablement un éminent
érudit, et la conclusion de ce dernier fut sans appel : « Les
circonstances contraires ont souillé les stèles et font saigner le
cœur du peuple. Les NGUYEN, en transférant la capitale à Hué,
ont respecté l’intégrité du Temple. Si vous voulez le déplacer,
la population se révoltera. » Quelques jours plus tard, le
Gouvernement français allouait une somme de 20 000 piastres
afin de rendre le Temple à son état initial.
La population d’Hanoi avait à d’autres moments de son histoire
troublée manifesté son attachement pour ce monument,
symbole de sa curiosité intellectuelle, de sa passion pour
l’étude, de sa créativité, notamment à l’époque des guerres
fratricides entre les Trịnh et les Nguyễn. Néanmoins, dans son
état actuel, Le Temple de la Littérature occupe un espace plus
restreint qu’à son apogée. Le lac Van et quelques hectares de
terres arables qui accueillaient les étudiants de province ont
cédé à la pression démographique et immobilière.
VISITE SUBJECTIVE DE CE BEL ENSEMBLE
Les Asiatiques de même culture que les Vietnamiens
s’attardent bien plus longuement, et on les comprend, que les
Occidentaux dans la visite de ces lieux. Ils y perçoivent non
seulement l’émotion qui émane d’objets chargés d’histoire et
de beauté. Ils se laissent pénétrer aussi par une spiritualité qui
nous demeure étrangère. Ils sont sensibles à la symbolique
des lieux et des chiffres, partout présente. Le VĂN MIẾU QUỐC
TƯ GIÁM est orienté nord-sud parce que, selon la tradition
confucéenne, le sage se tourne vers le sud pour gouverner.
Les portiques ou pavillons magnifiquement ornés qui séparent
les cinq cours fermées figurent la progression dans la
recherche de la connaissance et de la vertu. Le chiffre cinq est
lui-même structurant, en relation avec la composition de
l’univers. Le gouvernement du pays devait être confié à des
hommes inspirés par le bien dans l’intérêt supérieur du peuple
tout entier. La troisième cour retient toute notre attention à
cause des stèles posées chacune sur un piédestal sculpté en
forme de tortue. Dans la cosmogonie est asiatique, la tortue
est chargée de symbolique, elle signifie la pérennité ;son dos
figure le ciel et son ventre la terre. Mais cet animal est si
populaire au Vietnam qu’il doit avoir pour ce peuple, jusque
dans son inconscient collectif, une signification culturelle
encore plus profonde. Il n’est pas un village qui n’abrite, dans
la maison communale ( ou ÐÌNH ) une grue fièrement dressée
sur une tortue. L’un et l’autre de ces animaux ont été
retrouvés dans des sites archéologiques très anciens. La tortue
accompagne depuis des temps immémoriaux la vie des
Vietnamiens, elle est présente dans de nombreuses légendes,
associée aux périodes cruciales de ses révoltes contre le
puissant envahisseur. Le petit lac de Hanoi, HOÀN KIẾM, est
VĂN MIẾU QUỐC TỬ GIÁM habité par la légende, habité également par une tortue géante
qui vient périodiquement respirer à la surface. En mars 2005,
l’occasion nous fut donnée de l’apercevoir émergeant au milieu
du lac.
Les stèles rectangulaires sont de trois hauteurs différentes,
selon l’époque de leur construction, et couronnées d’une
sculpture en demi-cercle représentant classiquement deux
dragons qui s’inclinent vers la lune. Leurs proportions diffèrent
elles aussi selon les époques. Il faut être initié pour percevoir
la subtile harmonie de cet espace remarquable. Les 82 stèles
latérales bordent un vaste bassin carré, le Puits de la Clarté
Céleste ( Thiên Quang Tinh ) qui reflète l’ouverture ronde de la
troisième porte, le Pavillon de la Constellation des Lettres (
Khuê Văn Các ). On y retrouve la permanence de la
combinaison du Yin correspondant au cercle et du Yang
associé au carré évoquant la terre. C’est depuis le balcon du
deuxième étage du Pavillon de la Constellation des Lettres que
les lettrés déclamaient leurs poèmes lors des concours de
poésie.
Les espaces suivants, imposants par leurs dimensions,
impressionnants de beauté, mènent au sanctuaire proprement
dit, via la Porte de la Grande Synthèse ( Ðại Thành Môn ) et la
Salle des prosternations rituelles ( Bái Ðường ). La dernière
cour dallée est ceinte de trois bâtiments disposés en fer à
cheval. Le bâtiment central renferme un triple autel. Au
centre, le tabernacle est dominé par une grande et belle statue
de Confucius surmontée de l’inscription : « Le très saint maître
Confucius », à sa droite et à sa gauche sont honorés ses
quatre meilleurs disciples.
Ici encore, les Vietnamiens affirment leur personnalité propre.
L’un des bâtiments latéraux est consacré à CHU VĂN AN, qui
fut un sage, et le plus célèbre professeur de l’Université du
QUOC TU GIAM, né en 1292, sous une autre grande dynastie,
celle des TRẦN. Ayant refusé un poste de mandarin, il rentra
dans son village où il fonda une école réputée. Lorsque le roi
entendit parler de son talent, il l’appela à Hanoi et lui proposa
le poste de vice recteur de l’Université Nationale. Mais Chu Van
An ne pouvait supporter la corruption qui sévissait autour de
lui. Il finit par retourner dans son village. Dans une pétition
qu’il adressa au roi, il lui demanda de faire décapiter pour
l’exemple sept mandarins corrompus. Le refus du souverain
signifia sa retraite définitive. Néanmoins, le nouveau roi l’invita
à son couronnement. Chu Văn An vint à Hanoi, puis s’en
retourna. A sa mort, le roi lui rendit hommage en lui conférant
un titre royal et dépêcha sept mandarins pour assister à ses
funérailles. Depuis lors, sa mémoire est vénérée dans le
Temple de la Littérature.
La vie de CHU VĂN AN suffirait à elle seule à illustrer les vertus
et les faiblesses d'un millénaire de l’histoire du Vietnam riche
en événements et en hommes exceptionnels, vécus et portés
par un peuple de paysans féru de connaissance, ami de la
littérature et de la poésie. Derrière ses hauts murs, le VAN
MIEU QUOC TU GIAM, si apprécié des Vietnamiens, rappelle
aux visiteurs du monde que le Vietnam peut être cité en
exemple en matière d’éducation. Aussi n’est-il pas étonnant de
voir que les héritiers d’une grande tradition demeurée si
vivante restent ouverts à tous les domaines de la pensée et de
la création.
Claire Tạ
Ouvrages de référence :
Thi cữ nho giáo - Royal exams de Hữu Ngọc et Lady Burton aux
Editions THẾ GIỚI, Hanoi 2004
Mille ans de littérature vietnamienne de Nguyễn Khắc Viện et Hữu
Ngọc aux Editions Picquier,
ViŒt-Nam mon pays natal. Terre des dragons et des légendes.
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