Le métier est déstabilisé - Haut-Rhin
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Le métier est déstabilisé - Haut-Rhin
Région Q MERCREDI 27 JANVIER 2016 11 SAPEURS-POMPIERS Q Confronté aux mêmes contraintes budgétaires que dans le Bas-Rhin, le Service d’incendie et de secours du Haut-Rhin a entamé sa cure pour économiser 1,5 million d’€. Page 14 SOCIAL fonction publique L’expression d’un malaise À l’appel à la grève dans la fonction publique lancée par une intersyndicale, près de 1 200 fonctionnaires, 800 à Strasbourg et 400 à Mulhouse, ont manifesté hier contre l’austérité. Mais il n’est pas facile de se priver d’une journée de salaire. PRÈS DE 400 MANIFESTANTS À MULHOUSE Dans le Haut-Rhin, les manifestants se sont retrouvés à 10h30 square de la Bourse à Mulhouse. Lorsqu’ils ont commencé à défiler, ils étaient environ 400 « pour une augmentation urgente des salaires, pour le développement de l’emploi statutaire, pour l’abrogation de la réforme du collège et contre la réforme territoriale ». Les enseignants, s’ils avaient leurs propres revendications concernant la réforme du collège, ont partagé les demandes de tous les fonctionnaires : « le dégel de la valeur du point d’indice, indique la CGT. Elle est bloquée depuis juillet 2010 et nous avons perdu 10 % de notre pouvoir d’achat ». Les syndicats du Haut-Rhin demandent l’abrogation de toutes les lois territoriales. La FSU prévoit « une rentrée catastrophique pour l’Éducation nationale ». Selon le rectorat, 24 écoles étaient fermées hier dans le département. Le Snes avance le Près de 800 manifestants ont défilé hier matin entre la place de la Bourse et la place Broglie à Strasbourg. PHOTO DNA - CHRISTIAN LUTZ-SORG «A vec le gel du point d’indice depuis 2010, les gens ont de plus en plus de mal à joindre les deux bouts », rapporte Giovanni Corrato, secrétaire général CGT de la fonction publique dans le Bas-Rhin. Puis d’ajouter : « On est méprisé… que ce soit par les gouvernements de droite ou de gauche ». Cependant, les deux cortèges alsaciens n’ont pas réuni la grande foule, que ce soit à Strasbourg, où l’on dénombrait 800 manifestants, ou bien à Mulhouse où ils étaient 400. Mais il n’est « pas facile de perdre une journée de salaire en période d’austérité ». En outre plusieurs syndicats bien implantés dans la fonc- tion publique, comme l’Unsa, la CFDT…, ne se sont pas associés à ce mouvement de grève lancé par l’intersyndicale CGT, FO, FSU, SUD, Solidaires, Snfolc, Snalc… Au bout du compte, le mouvement n’a pas été bien suivi. Dans l’Éducation nationale, le taux de participation est de 9,40 %, selon les estimations du rectorat de l’académie de Strasbourg (contre 11,44 % au niveau national selon le ministère), dont 8,61 % dans le premier degré, 20,86 % en collège, 7,03 % en lycée et 2,42 % pour les personnels non enseignants. Cependant, la mobilisation varie selon les établissements scolaires. Dans le premier degré, sur les 1 498 écoles de l’aca- démie, plus d’une centaine sont restées fermées. Mais surtout 20 % des professeurs de collège, beaucoup plus selon les syndicats, se sont mis en grève. Cette mobilisation traduit un malaise lié notamment à la réforme du collège. Dans la catégorie « des travailleurs pauvres » Mais pas seulement. « Il y a de bonnes idées dans la réforme, mais les moyens ne sont pas adaptés aux besoins du collège et il a trop d’élèves par classe », explique cet enseignant d’un collège de Marckolsheim qui affirme que 60 % des professeurs de son établissement sont en grève. Un peu plus loin, ce professeur du collège Pfeffel à Colmar témoigne « du stress des enseignants » et déplore « un relâchement de l’autorité. Les professeurs se sentent impuissants, même la hiérarchie ». Un malaise également exprimé par Claudine Giorgi, secrétaire générale CGT des Hôpitaux universitaire de Strasbourg (HUS). « Les personnels sont épuisés. Nous faisons des efforts depuis 2010, nous sommes rappelés sur nos congés, nos RTT. Suite aux attentats, nous sommes venus spontanément au travail et on se moque de nous avec des salaires de misère, notamment pour les catégories C qui sont entrées dans la catégorie des travailleurs pauvres. On ne pensait pas en arriver là ». Puis de poursuivre : « Les hôpitaux sont gérés de la même manière que les cliniques privées alors que nous faisons des soins et de la recherche. Veulent-ils la fin du service public ? ». Parmi les nombreux manifestants FO se trouvent des syndicalistes venus du secteur privé : « Je viens pour défendre la Pour la CGT, comme les autres syndicats, la priorité reste le dégel du point d’indice. PHOTO DNA - KARINE DAUTEL chiffre de 50 % de grévistes dans les collèges, avec des pics élevés dans certains établissements. fonction publique », explique ce militant de FO métaux. « Les gens n’apprécient pas toujours les fonctionnaires, mais il en faut. Ils sont payés au lance-pierre. Nous sommes sur le même bateau ». J.F.C. R Seize vols annulés Le mouvement de grève des contrôleurs aériens a eu hier des incidences sur le trafic des deux aéroports alsaciens. À Bâle-Mulhouse, huit vols de et vers Orly, Londres et Roissy (sur un total de 119) ont été annulés et quatre ont été retardés entre 15 minutes et une heure. À Strasbourg-Entzheim, il y a également eu hier huit vols de et vers Orly, Lille et Bordeaux annulés (sur un total de 52). STRASBOURG Mobilisation des taxis « Le métier est déstabilisé ! » Ni grève, ni blocage : pour protester contre la concurrence des véhicules de transport avec chauffeur (VTC), certains taxis strasbourgeois avaient choisi hier de charger gratuitement les passagers se déplaçant au centre-ville. ALORS QU’UNE TRENTAINE de chauffeurs strasbourgeois ont pris la route lundi soir pour participer aux rassemblements organisés hier à Paris (lire dans le premier cahier), un grand nombre de leurs collègues exerçant dans l’Eurométropole ont choisi d’exprimer leur colère d’une manière originale : comme suggéré par l’ensemble des centrales et syndicats, tout au long de la journée, ils ont offert de transporter gratuitement les clients dont la course ne dépassait pas les limites du centre-ville, quartiers de la Neustadt inclus. Brièvement arrêté à la station de la place de la République sur les coups de onze heures, Oguz, artisan-taxi depuis dixhuit mois, confie avoir fait deux courses gratuites depuis l’entame de son service à 8 h 30 : « L’une entre le nouvel hôpital civil et la gare, l’autre entre la gare et la place Kléber. À chaque fois les clients ont tenu à me laisser un pourboire ! » Un collègue, arrêté devant lui, déclare également avoir effectué plusieurs cour- ses non rémunérées. À tous les clients transportés il n’a pas manqué non plus, dit-il, de remettre un tract intersyndical expliquant les motifs de « la mobilisation des taxis de France ». « Nous ne sommes pas contre la concurrence dès lors qu’elle reste loyale. À Strasbourg comme ailleurs, il y a des VTC qui font de la maraude électronique, ce qui leur est interdit par la loi », explique pour sa part un artisan adhérent de la centrale Taxistrass, en attente à la station place de la Gare, après pas moins de quatre courses gratuites. « Il ne faut pas oublier que nous sommes une profession soumise à des règles. La libéralisation voulue par le gouvernement se fait en vrac. Elle déshabille Paul pour habiller Jacques. Les licences chèrement acquises se dévalorisent. Le métier est complètement déstabilisé ! », poursuit-il. « Mêmes charges et mêmes règles pour tous ! » « Je ne sais pas où on va », affirme Germain, chauffeur en activité dans l’agglomération depuis 28 ans, stationné plus loin dans la file. « Nous devons faire face à des concurrents qui ne respectent pas la loi sur les VTC, ne paient pas les mêmes charges que nous et qui cassent les tarifs ! En deux ans j’ai perdu 50 % de mon chiffre d’affaires et ce n’est pas terminé ! » Un grand nombre de taxis strasbourgeois a participé à l’opération gratuité imaginée par les centrales et les syndicats locaux. PHOTO DNA - CHRISTIAN LUTZ-SORG Président de Taxi 13, la principale association strasbourgeoise (210 adhérents), Hafid Ahrouille avait hier, comme d’autres, bien mis en évidence son autocollant « Taxi intra-muros gratuit » sur le pare-brise de sa berline : « Plutôt que de manifester et de bloquer la circulation nous avons ainsi fait le choix de bien traiter notre clientèle et les autres usagers de la route », a-t-il souligné avant de rappeler que son association partageait les revendications des organisations pro- fessionnelles reçues hier par le Premier ministre. « On demande que la loi Thévenoud s’applique. Sinon que les VTC soient alignés sur les taxis avec les mêmes charges et les mêmes règles pour tous ». X.T. R