PR - Chamber Judgment

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PR - Chamber Judgment
du Greffier de la Cour
CEDH 345 (2014)
26.11.2014
La Cour européenne des droits de l’homme est saisie d’affaires concernant la
Crimée et l’Est de l’Ukraine
Le 25 novembre 2014, la Cour européenne des droits de l'homme a invité le gouvernement russe à
soumettre ses observations sur la recevabilité de deux requêtes interétatiques introduites par le
gouvernement ukrainien contre la Fédération de Russie en vertu de l'article 33 (affaires
interétatiques) de la Convention européenne des droits de l'homme.
La première requête concerne les événements en Crimée à compter de mars 2014 et la situation
dans les régions de l'Est de l'Ukraine ; la deuxième requête a trait à l'enlèvement allégué de trois
groupes d’enfants dans l'Est de l’Ukraine et leur transfert temporaire en Russie à trois occasions
entre juin et août 2014.
Une mesure provisoire appliquée par la Cour dans la première affaire, appelant tant la Russie que
l’Ukraine à s’abstenir de prendre toute mesure de nature à conduire à des violations des droits de la
population civile au titre de la Convention, en particulier de son article 2 (droit à la vie) et de son
article 3 (interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants), est toujours en
vigueur.
Outre les deux requêtes interétatiques, la Cour a été saisie de plus de 160 requêtes individuelles
dirigées contre l'Ukraine, contre la Russie ou contre les deux États. Une vingtaine d’entre elles
concernent les événements en Crimée, le reste portant sur la situation dans l'Est de l'Ukraine.
L’affaire Ukraine c. Russie (requête n° 20958/14) a été introduite le 13 mars 2014. Elle a trait aux
événements ayant abouti et faisant suite à la prise de contrôle de la péninsule de Crimée par la
Fédération de Russie ainsi qu’aux développements ultérieurs dans l'Est de l'Ukraine.
Selon le gouvernement ukrainien, à compter du 27 février 2014, la Russie – par sa mainmise
effective sur la République autonome de Crimée, qui fait partie intégrante de l'Ukraine, et par son
contrôle sur les séparatistes et sur les groupes armés opérant dans l'Est de l’Ukraine – a exercé sa
juridiction sur une situation qui a donné lieu à de nombreuses violations de la Convention
européenne des droits de l'homme. Le gouvernement ukrainien invoque les articles 2 (droit à la vie),
3 (interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants), 5 (droit à la liberté et à la
sûreté), 6 (droit à un procès équitable), 8 (droit au respect de la vie privée), 9 (liberté de religion), 10
(liberté d'expression), 11 (liberté de réunion et d'association), 13 (droit à un recours effectif) et 14
(interdiction de la discrimination) de la Convention ainsi que l'article 1 du Protocole n° 1 (protection
de la propriété) et l'article 2 du Protocole n° 4 (liberté de circulation) à la Convention.
En particulier, selon les observations du gouvernement ukrainien, entre mars et septembre 2014,
des militaires, des membres des forces de l'ordre et des civils ukrainiens ont été tués en
conséquence de l'annexion illégale de la Crimée et du soutien de la Russie à des groupes séparatistes
armés dans l'Est de l'Ukraine, ce qui s'analyserait en une pratique répandue et systématique. Le
gouvernement ukrainien évoque également des cas de torture ou d’autres formes de mauvais
traitements infligés à des civils, ainsi que des privations arbitraires de liberté. Un certain nombre de
Tatars de Crimée auraient subi des mauvais traitements en raison de leur origine ethnique ou de
leurs tentatives de protéger les symboles nationaux ukrainiens. Les ressortissants ukrainiens résidant
en Crimée et à Sébastopol auraient été automatiquement reconnus comme des ressortissants russes
et des pressions auraient été exercées sur ceux qui exprimaient le souhait de conserver la nationalité
ukrainienne. Des journalistes auraient fait l’objet, dans le cadre de leur travail, d’agressions,
d’enlèvements, de mauvais traitements et de mesures de harcèlement. Les autorités
autoproclamées de la République de Crimée se seraient illégalement approprié des biens
appartenant à des entités juridiques ukrainiennes, ces appropriations illégales ayant été par la suite
validées par la législation russe. Enfin, le gouvernement requérant soutient qu'en raison de la
nouvelle frontière entre la Crimée et l'Ukraine, l'entrée en Crimée des ressortissants ukrainiens est
soumise à des restrictions illégales.
À la suite de l'introduction de la requête le 13 mars 2014, la Cour a décidé d'appliquer l'article 39 de
son règlement (mesures provisoires), appelant la Russie et l'Ukraine à s'abstenir de prendre toute
mesure, en particulier de nature militaire, qui pourrait donner lieu à des violations des droits de la
population civile au titre de la Convention, en particulier des articles 2 et 3 de celle-ci. Cette mesure
provisoire est toujours en vigueur.
L’affaire Ukraine c. Russie II (n° 43800/14) a été introduite le 13 juin 2014. Elle porte sur
l'enlèvement de trois groupes d'orphelins ukrainiens et d’enfants ukrainiens sans protection
parentale, ainsi que de plusieurs adultes qui les accompagnaient. Ces groupes auraient été enlevés
par des représentants armés des forces séparatistes dans l'Est de l'Ukraine, à trois occasions, en juin,
juillet et août 2014 respectivement, puis transférés en Russie. Dans chaque cas, à la suite des efforts
diplomatiques des autorités ukrainiennes en coordination avec les autorités russes, les enfants et les
adultes ont été ramenés sur le territoire ukrainien le lendemain de leur enlèvement ou, dans la
troisième affaire, cinq jours après leur kidnapping.
Une mesure provisoire appliquée par la Cour européenne des droits de l'homme en vertu de
l'article 39 de son règlement à la suite de l'introduction de l'affaire après le premier incident – selon
laquelle la Cour indiquait au gouvernement russe qu'il devait assurer le respect des droits reconnus
par la Convention aux personnes kidnappées et garantir leur retour immédiat en Ukraine – a été
levée après que le groupe eut été ramené sur le sol ukrainien.
Le gouvernement ukrainien se plaint que les enlèvements et les franchissements illégaux de
frontières ont emporté violation des articles 2 (droit à la vie), 3 (interdiction de la torture et des
traitements inhumains ou dégradants), 5 (droit à la liberté et à la sûreté), 8 (droit au respect de la vie
privée) ainsi que de l'article 2 du Protocole n° 4 (liberté de circulation) à la Convention.
La Cour européenne des droits de l'homme a invité le gouvernement russe à soumettre ses
observations sur la recevabilité des deux requêtes (Ukraine c. Russie (20958/14) et Ukraine c.
Russie II (43800/14)), dans un délai de 16 semaines, et de répondre en particulier aux questions de
savoir si les violations alléguées de la Convention relevaient de la juridiction de la Fédération de
Russie au sens de l'article 1 de la Convention (obligation des États de respecter les droits garantis par
la Convention), quels étaient les recours juridiques dont disposaient les personnes concernées par
les violations alléguées de la Convention et si ces recours étaient accessibles et effectifs.
Outre ces deux requêtes interétatiques, la Cour a été saisie, dans le même contexte, de plus de 160
requêtes individuelles dirigées contre l’Ukraine, contre la Russie ou contre les deux États. Une
vingtaine de ces requêtes concernent les événements en Crimée et soulèvent des griefs relatifs à des
privations de liberté, à l’impact de la prise de contrôle de la Crimée par la Fédération de Russie sur le
droit des requérants au respect de leur vie privée, sur leur droit au respect de leur propriété, sur leur
liberté de circulation, ou à divers aspects de procédures pénales reprises par les autorités de la
Fédération de Russie en Crimée.
Plus de 140 des requêtes individuelles ont trait à la situation dans l’Est de l’Ukraine. La plupart
d’entre elles sont dirigées à la fois contre l’Ukraine et contre la Russie et soulèvent des griefs relatifs
à diverses formes de mauvais traitement et à des privations illégales de liberté. Elles comprennent
également des cas de violations alléguées de l’article 2 (droit à la vie), et des allégations de blessures
et de disparitions. Un plus petit nombre de requêtes a trait à la destruction de biens et à l’impact des
hostilités sur les droits des requérants au titre de l’article 8 (droit au respect de sa vie privée).
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Dans 104 requêtes individuelles, la Cour a appliqué des mesures provisoires en vertu de l’article 39
de son règlement, dans lesquelles elle invite le(s) Gouvernement(s) concerné(s) – russe et/ou
ukrainien – à garantir le respect des droits au titre de la Convention des personnes privées de liberté
ou de celles dont le sort n’est pas connu. Dans 14 de ces affaires, les personnes concernées ont été
libérées et la mesure provisoire correspondante a été ultérieurement levée.
Rédigé par le greffe, le présent communiqué ne lie pas la Cour. Les décisions et arrêts rendus par la
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Conseil de l’Europe en 1959 pour connaître des allégations de violation de la Convention
européenne des droits de l’homme de 1950.
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