Éditorial

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Éditorial
Éditorial
Épanouissement, audace et innovation
René Jancovici et
Patrick DonzeauGouge, présidents
du 68e Congrès
SFCTCV
Pour le 68e congrès de la SFCTCV, le conseil d’administration a choisi pour la première fois des présidents
qui ne sont pas membres d’une université. Évoluant l’un comme l’autre dans le monde libéral, nous sommes
particulièrement conscients de l’honneur et de la confiance qui nous ont été témoignés.
Tous les deux passionnés par la mer, nous avons été attirés par Marseille. Nous sommes heureux de vous
accueillir dans cette ville de contraste et de lumière, cette cité méditerranéenne largement ouverte sur
l’Outre-Mer, célèbre pour ce « melting-pot » de populations, pour son port, dont l’histoire n’est plus à
écrire, mais aussi pour son université et sa faculté de médecine souvent innovantes.
Parce qu’« aucun de nous ne sait ce que nous savons tous ensemble », nous souhaitons avant tout que ce
congrès soit un moment d’échanges d’expériences et de savoirs. C’est ensemble que nous avons élaboré
les thèmes des deux séances communes entre les spécialités cardiaque et thoracique.
Le premier sujet retenu concerne la chirurgie cardio-thoracique exercée en milieux hostiles. Chaque année,
des médecins partent hors de nos frontières porter assistance à des patients ou à des blessés démunis,
soit dans un cadre humanitaire (souvent bénévolement), soit dans un but de soutien des forces armées.
En chirurgie cardiaque, les équipes humanitaires, souvent « tout terrain », doivent adapter des techniques
conventionnelles « lourdes » à des milieux hostiles, car ne pratiquant pas cette chirurgie. Cela suppose la
résolution de problèmes logistiques, stratégiques et économiques. Ce sont les éléments de cette adaptation
qui seront exposés sous l’angle du chirurgien, de l’anesthésiste-réanimateur, du perfusionniste et de l’infirmière de bloc opératoire. Les conditions d’exercice, que ce soit en Asie, en Afrique, au Moyen-Orient ou
récemment en Europe, sont souvent précaires, voire dangereuses. Nos collègues du Service de santé des
Armées peuvent rencontrer des situations à haut risque en intervenant sur des théâtres d’opérations exposés. Le « Thorax ou poumon hostile » sera une passionnante occasion pour les équipes médico-chirurgicales cardiaques ou thoraciques exposées à de telles conditions de fonctionnement de rapporter leurs
expériences et leurs conseils. La devise à jamais inoubliable de l’École de santé navale de Bordeaux résume
parfaitement l’implication de ces équipes partant exercer dans ces territoires : « à la Mer, au-delà des Mers,
toujours au service des hommes ».
« L’Opéré cardio-thoracique, avant et après l’intervention », second grand sujet commun, devrait nous permettre d’appréhender, grâce à la participation de praticiens et de personnels paramédicaux rompus à ces
pathologies spécifiques, la préparation ambulatoire à des actes chirurgicaux lourds. Ils nous exposeront
comment des patients jugés initialement inopérables, peuvent le devenir. Ces mêmes équipes offriront
en postopératoire une possibilité de réhabilitation ambulatoire, voire une assistance cardiaque réalisée à
domicile chez certains opérés développant des suites complexes. Les soins infirmiers lourds pratiqués hors
centre hospitalier, parfois à domicile, éviteront ainsi de longs séjours en dehors du milieu familial. L’aide à la
réinsertion dans la vie active, la réadaptation physiologique par le sport apportent de nouveaux espoirs chez
ces patients agressés par des « suites » parfois longues et douloureuses.
Les trois séances thématiques de chirurgie cardiaque adulte aborderont des sujets d’actualité de chirurgie
valvulaire.
La séance « TAVI » réunira chirurgiens et cardiologues interventionnels sur un sujet en continuelle évolution
tant dans ses indications que dans ses techniques. Après avoir fait le point sur la situation du TAVI en 2015,
on verra si les inconvénients de cette technique ont trouvé des solutions, puis si la technique « valve dans
valve » va entraîner la fin des réinterventions pour dégénérescence des bioprothèses. Ensuite, un débat
abordera les indications du TAVI en 2015 chez les patients à risque intermédiaire.
La séance consacrée à la chirurgie valvulaire conventionnelle abordera des sujets d’actualité sous l’angle
des techniques : chirurgie mitrale vidéo-assistée, résultats à 15 ans des plasties mitrales selon la technique
« bord à bord » (Alfieri) ainsi qu’une évaluation en 2015 des bioprothèses sans suture (sutureless). Actualité,
aussi, sous l’angle des indications (chirurgie tricuspide) ainsi que sur des sujets connexes comme les traitements antithrombotiques et les prothèses valvulaires, la sinistralité dans la chirurgie valvulaire ainsi que
l’incidence du TAVI sur la pratique de la chirurgie valvulaire conventionnelle d’après le registre Epicard®.
La séance commune avec la Société Française de Cardiologie sera consacrée à l’endocardite valvulaire dans
l’attente de nouvelles recommandations, sous l’angle des nouveautés dans le diagnostic, du timing de la
chirurgie cardiaque en fonction des complications neurologiques, de celui de la chirurgie dentaire avant ou
après la chirurgie valvulaire et aussi des possibilités chirurgicales dans les endocardites extensives.
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Un passionnant programme, très médico-chirurgical, sera traité en ce qui concerne les cardiopathies
congénitales et pédiatriques. Notons deux belles communications sur la revalvulation pulmonaire et des
séances thématiques consacrées à des mises au point sur le Fontan « dépassé » (Failing Fontan) ainsi que
sur l’assistance circulatoire dans les cardiopathies univentriculaires.
Le premier thème spécifique de la chirurgie thoracique sera la problématique de la chirurgie mini-invasive
d’exérèse. La véritable explosion d’innovations des techniques opératoires concernant la chirurgie thoracique vidéo-assistée a débuté en France en 1990, à la suite de la cure chirurgicale du premier pneumothorax réalisée par nos camarades Jean-François Lévy et Philippe Kleinmann à l’hôpital Laennec. Dès lors,
en métropole mais également dans le monde, les chirurgiens, les anesthésistes, les personnels de bloc
et surtout les industriels se sont rués dans une quête de l’élargissement de l’amélioration des matériels
et surtout des possibilités opératoires mini-invasives. En France, le « Groupe Thorax », puis « Génération
Thorax » et l’ensemble des spécialistes en chirurgie thoracique n’ont eu de cesse que de progresser dans
cette voie afin d’offrir aux patients une simplification des voies d’abord du thorax. Parallèlement, l’ensemble
des praticiens internationaux développaient le matériel et osaient certains gestes dont les exérèses pulmonaires vidéo-assistées. En France, et plus précisément à Marseille, l’un des promoteurs de cette technique,
Roger Giudicelli, a sillonné le monde afin d’en démontrer la faisabilité. En 2015, la lobectomie vidéo-assistée
semble une technique avérée. Cependant, comme toujours dans les avancées, il faut analyser et prendre du
recul afin de « cibler » au mieux les indications et surtout il faut comprendre et tenter de limiter les incidents
ou accidents parfois gravissimes en découlant. Par ailleurs, concernant la place de la chirurgie robot-assistée, « mythe ou réalité ? », c’est ainsi que nous développerons le sujet. L’intérêt marketing inéluctable sera
abordé, les coûts, voire les surcoûts seront évalués.
Le second thème retenu en chirurgie thoracique concerne une mise au point des techniques proposables
dans le cadre des déformations congénitales du thorax. Que ce soit le Pectus Excavatum, le Pectus Carinatum, le Pectus Arcuatum, l’ensemble de ces dysmorphies a depuis longtemps interpellé des chirurgiens (peu
en opèrent), qu’ils soient thoraciques ou orthopédistes infantiles. Dans un climat de sérénité, les intervenants tenteront de nous démontrer au travers de leurs expériences personnelles les avancées, les évolutions
les difficultés de cette prise en charge thérapeutique, ici plus particulièrement du Pectus Excavatum, qui
concerne « grands et petits ». L’importance de l’impact psychologique sera abordée.
Nous avons tenu à inviter pour les conférences princeps deux « illustres personnalités ». La première, et cela
ne devrait surprendre personne, est un marin. L’Amiral Édouard Guillaud, ancien « pacha » du porte-avions
Charles-de-Gaulle, ancien chef d’état-major particulier des Présidents Chirac et Sarkozy avant de devenir,
pendant quatre ans, chef d’état-major des Armées, nous exposera un sujet de géopolitique : « La France :
une puissance moyenne au 21e siècle ? » Il est à noter que l’Amiral Guillaud s’était largement impliqué, il
y a une dizaine d’années, dans un projet porté en commun par le Service de santé des Armées et l’Institut
Montsouris, à propos de la réalisation de chirurgie robot-assistée par voie satellitaire. Cette innovation permettant d’assister « à la Mer et au-delà des Mers » une équipe chirurgicale à partir d’un centre hospitalier
métropolitain.
La seconde personnalité est le paléontologue Michel Brunet, professeur au Collège de France. Michel Brunet, après avoir obtenu un doctorat de Paléontologie à la Sorbonne, a étudié à Poitiers les mammifères du
paléogène. Après un doctorat d’État de Sciences naturelles, il est devenu professeur titulaire de Paléontologie en 1989. Après des recherches sur les hominidés fossiles en Afghanistan et en Irak, ses recherches
l’ont conduit en Afrique de l’Ouest dans le désert du Djourad, au Tchad, où il a découvert en 1995 un nouvel
hominidé daté de 3,5 millions d’années surnommé Abel, premier australopithèque décrit à l’Ouest du grand
Rift africain remettant en question la théorie dite de l’East Side Story. Puis en 2002 et 2005, il publie, dans
la revue Nature, des articles au sujet d’un crâne de 7 millions d’années, le plus ancien représentant connu
à ce jour de la famille humaine, surnommé Toumaï, qui signifie « espoir de vie » en Goran, la langue locale.
Actuellement, Michel Brunet est professeur émérite, chaire de Paléontologie du Collège de France et professeur associé à l’Institut international de paléoprimatologie et paléontologie humaine. Il nous fera partager sa passion de « Nomade, chercheur d’os ».
Enfin,ce 68e congrès s’achèvera avec la Matinée du Collège et les approches endovasculaires en chirurgie
cardio-vasculaire, la chirurgie de la trachée et les rapports du chirurgien thoracique et cardio-vasculaire
avec la littérature scientifique.
Au total, ce programme étonnant et le site exceptionnel que représente Marseille, au mois de juin, devraient
permettre à l’ensemble de notre communauté chirurgicale, médicale et paramédicale, un épanouissement
scientifique, culturel et un divertissement peu commun. Nous ne pouvons bien sûr pas omettre d’y associer,
pour les en remercier chaleureusement, nos partenaires de l’Industrie et du Médicament sans qui rien ne
serait possible !
Et enfin nous adressons nos remerciements les plus vifs et les plus chaleureux à Mesdames Anne-Marie
Spinosi et Anne Boutet pour le constant soutien trouvé tout au long de la préparation de ce considérable
événement, qui, nous l’espérons, répondra à vos attentes.
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