Découvrir et développer son style oratoire

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Découvrir et développer son style oratoire
Le feed-back en communication
Qu’est-ce que le feed-back ?
Le terme feed-back vient de la cybernétique et de son inventeur Norbert Wiener. dans
les années quarante, des chercheurs de nombreux pays se réunirent aux USA (conférences
Macy) et travaillèrent sur le moyen de développer l’efficacité des défenses anti-aériennes. Ils
mirent en évidence les phénomènes à causalité circulaire dans le cadre de recherche sur les
missiles à tête chercheuse.
Pour mieux comprendre ces recherches, on peut imaginer un tireur avec un canon qui
vise une cible. Au premier tire, il rate la cible. Il va alors estimer de combien il l’a raté et
corriger son tire pour faire mieux. Au second tire, il se rapproche de la cible mais la rate à
nouveau. Il va encore corriger son tire pour finalement se rapprocher de plus en plus de la
cible et l’atteindre. Il va donc réguler son tire au moyen des informations dont il disposes afin
d’aboutir à son objectif. Dans le cadre des missiles à tête chercheuse, un dispositif va être
adapté sur le missile, donnant des informations en temps réel sur la position du missile par
rapport à la cible. Ces informations sont transmises à un autre dispositif se trouvant à distance
et qui en temps réel va corriger la trajectoire, pour atteindre la cible du premier coup. Il existe
donc un échange d’informations circulaire entre le missile et la base de lancement.
Ces systèmes de régulation par le feed-back font aujourd’hui parti de notre quotidien.
Le chauffage à thermostat en est un exemple : le système est réglé pour une certaine
température et des capteurs enregistrent la température de la pièce. Lorsque la température
tombe un degré plus bas que la température voulue, le chauffage se met en route, lorsqu’elle
monte un degré plus haut, il s’arrête. Il existe bien une communication circulaire entre le
chauffage et les capteurs.
Mais l’homme n’a en fait pas inventé le système lui-même puisqu’il existe depuis
toujours dans la nature : le corps humain en est un exemple frappant. Lorsque la température
du corps augmente, des capteurs l’indiquent au système nerveux central qui va réguler, par
exemple en déclenchant une transpiration plus abondante. Lorsqu’une infection se déclare,
encore une fois des capteurs l’indiquent au système nerveux central qui va réguler au moyen
d’anticorps.
Nos mouvements sont aussi dirigés par un système à causalité circulaire : lorsque je
me lève pour aller prendre un verre sur une table, une analyse en temps réelle est faite par
mon système nerveux qui va corriger ma trajectoire et me permettre d’atteindre mon objectif.
Les chercheurs de l’époque sont en fait partis d’observation de phénomènes existants
et les ont transposés à d’autres domaines. Parmi ses observations, on peut noter celles de
Grégory Bateson, anthropologue, qui étudia de nombreuses tribus à travers le monde. Parmi
celles-ci, il étudia les Thatmul et certains de leurs rites. Il se rendit compte que lors de
certaines cérémonies, les hommes dansaient devant les femmes et, selon des rites précis,
celles-ci réagissaient soit par des encouragements, soit par du désintérêt. Les hommes
réagissaient alors à ces comportements et plus ils réagissaient, plus les femmes consolidaient
leur propre comportement jusqu’à arriver au paroxysme du rite. Il se produisait bien alors une
interaction entre les deux groupes qui visaient progressivement à se synchroniser par le
moyen d’une communication circulaire et du feed-back
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Feed-back négatif et positif
Le feed-back négatif tend à réduire l’écart : c’est la cas par exemple du missile à tête
chercheuse ou du système nerveux qui règle mes mouvements. Le feed-back négatif affine les
possibilités et en supprime donc de plus en plus : il tend vers la stabilité.
Le feed-back positif tend à augmenter l’écart : un exemple frappant est celui de
l’évolution d’une espèce qui va s’adapter en ouvrant de nouvelles possibilités. Le feed-back
positif ouvre toujours vers davantage de solutions : il tend vers le changement et à son
paroxysme vers le chaos.
Je vais reprendre le cas de l’évolution d’une espèce pour mieux comprendre la
différence entre feed-back négatif et positif (n’y voir surtout aucune connotation qualitative) :
imaginons une espèce qui vive dans un certain milieu. Peu à peu le milieu change, par
exemple la température augmente. Certains membres de l’espèce vont réagir en essayant de
continuer à fonctionner comme ils en ont l’habitude mais la température va les obliger à
réduire leurs activités. Progressivement, ils ne pourront plus assumer leur survie : plus il fera
chaud et plus ils vont réguler en diminuant leurs possibilités, jusqu’à la mort. On peut dire
qu’ils ont choisis une régulation par feed-back négatif. D’autres membres vont réagir
différemment : il vont tenter de trouver de nouvelles solutions pour s’adapter à la température,
mais sans diminuer leurs activités. Au contraire, ils vont développer de nouvelles activités
plus adaptés et leur permettant de survivre dans ce nouveau milieu. Ils vont ouvrir leurs
possibilités et donc s’enrichir de nouveaux savoirs : ils ont choisis un mode de régulation par
feed-back positif.
Dans ce cas bien sûr, le feed-back positif était plus adapté, mais dans d’autres cas,
c’est le contraire, comme par exemple pour les mouvements du corps humain (encore que trop
de feed-back négatif entraînerait un sur-contôle qui bloquerait le mouvement).
Le feed-back positif tend donc à ouvrir des possibilités et amorce des changements
alors que le feed-back négatif réduit les possibilités mais il est la clef de l’autorégulation, de la
stabilité et de l’atteinte d’un objectif.
Ce qui semble important, c’est l’équilibre qui va se jouer entre les deux manières de
tenir compte du feed-back : dans une situation donnée, il est important de tenir compte à
certains moments de l’un et à d’autres de l’autre et on va voir maintenant les applications
possibles dans le domaine de la communication et l’énorme champs de possibilités que cette
approche peut ouvrir.
Feed-back et communication
En terme de communication, qu’on en soit conscient ou non, nous recherchons
toujours à atteindre au moins un objectif, parfois plusieurs dont un certain nombre au niveau
inconscient. Nous allons nous intéresser ici à l’objectif conscient.
J’anime par exemple une formation et mon objectif est donc que vous repartiez de
cette formation avec des connaissances nouvelles. J’ai bien préparé mon intervention, elle est
structurée, claire pour moi et je me lance dans mon exposé. Il se trouve que la veille vous
avez organisé une fête et que vous êtes tous très fatigués et peu concentrés. Votre attitude est
un feed-back que je peux interpréter de plusieurs manières : soit je me dis que mon argument
ne vous intéresse pas et que peut-être je ne suis pas assez précis. Je vous donne alors des
informations de plus en plus précises, ce qui vous ennuie de plus en plus. Je redouble alors
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d’effort et vous vous endormez ! Une autre manière de faire aurait été d’envisager des
possibilités plus ouvertes quand au feed-back que vous me faites et d’essayer de nouvelles
solutions : par exemple, vous proposer un exercice pratique plutôt ludique qui,
vraisemblablement, est plus adapté dans ce contexte. Je vais alors, en ouvrant une autre
possibilité à ma manière habituelle de faire ma présentation, capter votre attention et je
pourrais alors sûrement, plus tard, lorsque votre attitude me montrera que vous êtes plus
attentifs, retourner à mon mode de présentation habituel et atteindre mon objectif.
On voit dans cet exemple en quoi l’écoute du feed-back est importante mais également
son analyse et surtout les solutions que l’on va mettre en place. Ceci ouvre sur la
communication circulaire, l’interaction et la régulation en temps réel que je peux mettre en
place dans ces interactions. En terme de communication, le feed-back et le curseur qui va me
permettre de prendre conscience de l’effet produit par ce que je dis sur mes interlocuteurs qui
a leur tours verront l’effet qu’ils produisent sur moi par le feed-back que je leur renvoie. On
ne peut pas ne pas faire de feed-back, de même que l’on ne peut pas ne pas communiquer.
Vouloir ne pas communiquer est déjà communiquer quelque-chose. Utiliser le feed-back et
réguler ses interventions en fonction est une ouverture vers de nouvelles possibilités afin
d’atteindre plus sûrement ses objectifs. On voit là en quoi on peut tout d’abord en
communication se servir d’un feed-back positif (ouverture de nouvelles possibilités) avant de
recentrer vers un feed-back négatif (objectif).
L’utilisation du feed-back en temps réel et de manière consciente demande cependant
une certaine habitude et un certain entraînement. En effet, pour y parvenir, il est nécessaire
d’être à la fois acteur de la scène mais aussi spectateur. On dit qu’on se met en meta-position
par rapport à la situation. Dans une situation de communication, le feed-back se fait
principalement par la voie du langage non verbal et il est parfois nécessaire d’oublier le
contenu de ce qui nous est dit pour nous attacher davantage au processus par lequel le
message est véhiculé. C’est le processus qui nous donnera les indications les plus pertinentes
sur le feed-back que nous renvoie nos interlocuteurs et sur la manière de réguler. Une bonne
régulation devrait ensuite se faire par petite touche, en essayant de nouvelles approches,
jusqu’à ce que l’on sente que le feed-back évolue vers ce que l’on pouvait en attendre. On
peut alors progressivement devenir un communicant davantage conscient et stratégique et, de
ce fait, influencer. Il s’agit bien là d’influence et non de manipulation. Je préfère le préciser
car ce mot fait parfois peur. L’influence se fait dans le plus total respect de l’autre et de la
relation. De plus, n’oublions pas que notre interlocuteur nous influence également. La
communication peut ainsi devenir un jeu à deux ou à plusieurs ou plutôt une danse, chaque
partenaire tours à tours dirigeant, influençant, ou ne laissant diriger, influencer. Le feed-back,
et la régulation qui en découle, n’est qu’un de ces pas de danse que nous pratiquons en
communication mais il nous amène sûrement vers des différences qui feront des différences,
vers du changement et l’atteinte de nos objectifs.
Pour ceux qui souhaitent approfondir cette question du feed-back et d’une
communication circulaire, je suggère le livre « L’Homme relationnel » de Jean-Jacques
Wittezaele, aux Editions Seuil.
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