Diagnostic de la filière vanille en Guadeloupe. Mission

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Diagnostic de la filière vanille en Guadeloupe. Mission
DIAGNOSTIC DE LA FILIERE VANILLE
EN GUADELOUPE
Mission du 8 au 20 octobre 2001
Note de synthèse
Bertrand CÔME (PROVANILLE)
Octobre 2001
Diagnostic de la filière vanille en Guadeloupe
Mission du 8 au 20 Octobre 2001
Bertrand CÔME
Note de synthèse
La production de vanille en Guadeloupe est très réduite (moins d’une tonne de vanilles
vertes collectée chaque année) et ce depuis près d’un demi siècle. Elle fait partie des cultures
laissées pour compte. Quelques producteurs courageux sont parvenus à sauvegarder la culture
mais livrés à eux même et faute d’encadrement technique, ils ont perdu les principes de base de
la culture. Les pratiques culturales développées sont inadaptées à la plante et l’effet s’en fait
cruellement ressentir sur la production, les rendements avoisinant les 10 kg/ha. Le procédé de
transformation utilisé est unique au monde (scarification manuelle des gousses) mais
excessivement gourmand en main d’œuvre. Le produit final est de qualité médiocre (desséché à
l’excès) et assez éloigné des standards du marché mondial (1,17% de vanilline au lieu de 1,8%).
Deux espèces de vanille sont cultivées en Guadeloupe : Vanilla fragrans et Vanilla
pompona. Cette dernière est présente à l’état de « relique ». Elle est disséminée dans les
parcelles et sa production n’excède pas quelques kilos par an. Vanilla fragrans fourni le gros de
la production. Le marché export étant hors de portée Le marché local est évalué à 2,5 tonnes
par an (vanilles d’importation) et comprend trois composantes : les industriels, les GMS et le
marché touristique. Les deux premiers sont difficilement accessibles à la production locale pour
des questions de prix, de présentation (extrait), et de régularité dans l’approvisionnement. Seul
le marché touristique représente un réel débouché pour les vanilles guadeloupéennes mais il
n’est pas encore suffisamment développé (manque de structures d’accueil) et se limite au
marché forain et à la vente directe aux particuliers.
Les objectifs de la profession sont de produire 5 à 7 tonnes de vanilles vertes pour
garantir la fourniture du marché touristique potentiel, cette vanille devant se substituer à la
vanille d’importation. Pour y parvenir, les professionnels envisagent notamment d’améliorer la
qualité de leur produit et d’identifier l’origine de leur production par la mise en place d’un label.
Un certain nombre d’obstacles rendent ces objectifs difficilement accessibles. La faiblesse des
rendements marginalise la production que sorte que les agriculteurs, notamment les jeunes, ne
s’y intéressent plus. La relève n’est donc plus assurée. L’encadrement technique est inexistant
et les références bibliographies réduites à leur plus simple expression, de sorte qu’il n’existe
pas réellement de dynamique au sein de la filière (hormis parmi les administrateurs du
SYAPROVAG). L’absence de maîtrise du foncier (indivision) n’incite pas les producteurs à se
lancer plus avant dans la culture et les difficultés d’accès à la terre rebutent les jeunes
exploitants. Enfin, les prix pratiqués, de l’ordre de 3.000 francs/kg, n’incitent pas les
producteurs, détenteurs d’une parcelle de savoir, à la transmettre à d’autres.
Pour dynamiser la filière et intensifier la production, il convient avant tout de
s’entendre sur le schéma de développement que les producteurs souhaitent mettre en place
en Guadeloupe. Compte tenu du contexte local (activité économique réduite), le schéma
d’intensification de la culture doit consister en une amélioration du système traditionnel
existant (destiné au plus grand nombre et à forte connotation environnementale) et non pas en
une intensification « type ombrière » à destination de quelques uns. Partant de ce constat, il
faut en premier lieu proposer aux producteurs un itinéraire technique attractif et simple
garantissant une augmentation significative du rendement, sans engendrer de surcroît de
travail, ni de surcoût d’exploitation. Pour ce faire, il convient de réduire les surfaces exploitées
et d’augmenter la densité de plantation, tout en appliquant de nouvelles techniques culturales
plus favorables au bon développement du vanillier. L’implantation de quelques parcelles de plein
champ pourra également être proposée aux producteurs de la côte au vent (où les conditions
climatiques sont plus favorables à ce type de culture). Il faudra ensuite former les producteurs
à ces nouvelles techniques et mettre à leur disposition un encadrement de qualité pour les
accompagner sur le terrain. Enfin, il faudra assurer la relève en facilitant l’accès à la terre aux
jeunes, avec deux pistes : les actions de l’OGAF et les concessions ONF).
Les actions à engager pour atteindre les objectifs fixés concernent en premier lieu la
production. Il importe de créer un fonds documentaire sur la vanille de manière à permettre
aux dirigeants de la filière ainsi qu’aux producteurs de mieux appréhender la culture
(connaissances sur ce qui se fait ailleurs, données sur le marché mondial, dernières avancées
techniques etc…). Puis, il faudra rédiger un guide pratique auquel les producteurs pourront se
référer ; chaque producteur devant en être destinataire. La formation du technicien en charge
de la filière sera capitale pour la réussite du plan de relance de la culture. C’est en effet ce
dernier qui aura en charge la formation des producteurs et le suivi des parcelles sur le terrain.
Une formation du technicien à la Réunion, en contact avec des producteurs expérimentés, lui
permettra d’acquérir le savoir faire indispensable à sa mission. Ces conditions étant réunies, le
plan de relance proprement dit pourra s’engager. Celui-ci doit s’articuler autour de deux axes
principaux : l’intensification des productions traditionnelles de sous bois (réhabilitation de
parcelles existantes : 40 ha et création de nouvelles plantations : 10 ha) et l’implantation de
quelques parcelles de plein champ (une dizaine) situées sur le côte au vent (où les conditions
climatiques sont plus favorables à ce type de culture). L’approvisionnement en boutures pourra
s’effectuer par des prélèvements en forêt, d’importants gisements existant en forêt domaniale
(avec l’accord de l’ONF). Enfin, il conviendra de mettre en place un CTE vanille pour venir
compléter les mesures du programme sectoriel, le CTE traitant davantage de l’aspect
agroenvironnemental de la culture. Il conviendrait de traiter le cas de Vanilla pompona au
travers du CTE. La pérennisation de cette espèce pourrait s’inscrire parmi les mesures types,
au titre de la sauvegarde de la biodiversité du genre Vanilla et du patrimoine historique de l’île.
Les actions à mener en second lieu concernent la transformation et la commercialisation
de la vanille ainsi que l’organisation de la filière. L’augmentation de production générée par le
plan de relance conduira inévitablement à un changement de technique de préparation (la
pratique actuelle étant trop exigeante en main d’œuvre pour une qualité finale médiocre). Mais
plus que le changement de technique, il faudra impérativement regrouper les productions pour
procéder à une transformation centralisée des gousses, une corrélation existant entre la
quantité traitée et la qualité finale du produit. La commercialisation devra également être
regroupée au sein d’un site touristique spécialement aménagé, capable d’accueillir 40.000
touristes par an et de leur proposer un itinéraire de visite documenté et attractif. L’atelier de
transformation et l’unité de commercialisation pourraient être crée et gérée par une structure
de type coopérative, émanation du SYAPROVAG. Enfin, il importe d’identifier l’origine de la
production locale. Compte tenu du volume collecté, il n’est pas envisageable de prétendre à une
AOC voire même à une IGP. Par contre, il serait possible de faire bénéficier la production locale
du logo des régions ultra-périphériques. Il est clair que ce second volet sera plus difficile à
concrétiser que le premier mais c’est seulement à cette condition que les producteurs
assureront la pérennité de la filière vanille en Guadeloupe.