Quand le PC prend la température

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Quand le PC prend la température
Solutions
MESURE DE TEMPÉRATURE
Quand le PC prend
la température
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Faut-il encore faire l’éloge du PC? Pour la configuration des capteurs, la visualisation et l’exploitation des données, il apporte sa puissance et sa rapidité d’exécution. National Instruments présente ici ses solutions d’instrumentation sur PC,
particulièrement pour les mesures de température. Le centre d’études du groupe
PSA Peugeot Citroën de La Garenne-Colombes nous apporte son témoignage sur
un banc de test embarqué. Encombrement, nombre de voies, fréquence d’échantillonnage, exploitation en temps réel, le PC l’emporte sur la centrale d’acquisition,
mais pas forcément pour la qualité métrologique.
U
ne centrale d’acquisition de
300 voies rentrerait à peine
dans le coffre d’une 406. C’est
tout d’abord pour une raison
d’encombrement que le centre d’études du
groupe PSA Peugeot Citroën de La GarenneColombes s’est penché pour ses essais
embarqués sur l’intérêt d’une solution d’acquisition sur PC. Sur ce site, spécialisé dans
l’évaluation du confort thermique de l’habitacle d’un véhicule, 90 % des essais sur
route sont aujourd’hui réalisés avec une solution d’acquisition sur PC proposée par National Instruments.A peine 10 % se font encore sur
des centrales d’acquisition classiques. « Nous
avons conservé les centrales d’acquisition quand nous sommes
appelés pour des applications
L’essentiel
ponctuelles avec un nombre
Une instrumentation sur PC
limité de voies,d’une quinzaiautorise un nombre quasi illine au maximum, explique
mité de voies
Laurent Laguerre, res Le logiciel peut traiter et
ponsable du service
visualiser plusieurs applicad’expertise thermique
tions en même temps et en
“Habitacle”. Dans ces castemps réel
là,elles gardent l’avantage d’être
Pour les mesures de tempéplus petites et plus faciles à utirature, l’acquisition n’est pas
très complexe. La qualité de
liser ».
la mesure porte surtout sur le
Mais quelle est la difféchoix du capteur et du condirence entre une mesutionnement
re de température sur
Il existe différentes configuPC et une mesure via
rations possibles, non figées
une centrale? Il y a touet extensibles
jours un capteur qui
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fournit un signal brut, un conditionneur qui
prend ce signal et lui fait subir différentes
opérations pour le mettre en forme. Il y a
toujours une carte d’acquisition qui numérise le signal ainsi traité. Il y a toujours un
logiciel qui permet de visualiser et d’exploiter
ses données.Après, c’est une question d’architecture ou de répartition des tâches. Une
centrale peut embarquer le conditionnement
du signal ou récupérer les données mises en
forme par un conditionneur déporté au plus
près du capteur. Pour le PC, c’est un peu la
même chose : il comporte une carte d’acquisition qui peut aussi faire du conditionnement ou recevoir des signaux mis en forme par des modules externes.
Visualiser et traiter en temps réel
La grande différence porte sur le logiciel en
charge du traitement et de la visualisation
des données. « Le logiciel sur PC bénéficie de la puissance des disques durs d’aujourd’hui pour le traitement
et bien sûr de l’écran pour la visualisation, souligne
Sophie Galisson, ingénieur marketing Produits chez National Instruments. Les données peuvent
ensuite être stockées dans des bases de données avec des
mémoires sur disque dur quasi illimitées ».
Certaines centrales offrent des fonctions très
voisines de celles d’un PC. Certaines sont
dotées d’une petite console qui leur permet
de visualiser en temps réel l’évolution de plusieurs voies et de réaliser un premier traitement. Malgré tout, elles n’offrent pas les
mêmes capacités. Classiquement, une centrale stocke les données qui peuvent ensuite
être déchargées sur un PC (pour y être traitées
et archivées). Pour une dizaine de voies, l’opération n’est pas très longue. « Quand on compte
en centaines de voies,le temps de déchargement est rédhibitoire », souligne M. Laguerre.
De plus, sur PC, le dépouillement des résultats est réalisé en temps réel. « Dans la demiheure qui suit les essais, poursuit M. Laguerre, on
peut déjà établir une étude comparative à partir d’essais réalisés sur cinq ou six voitures.Avec une centrale, il nous
fallait deux à trois semaines ».
Grâce à différents écrans de visualisation, il est
possible de suivre en temps réel différentes
applications. « On peut ainsi visualiser en cours d’essai le régime de rotation des ventilateurs ou le régime du
moteur.Si on observe une défaillance,on arrête le test,ce
n’est pas la peine d’aller plus loin.Là encore,on gagne du
temps ». D’une manière plus automatisée, le
logiciel suit des seuils qui lui sont préalablement définis. « Dès qu’il détecte un écart de 10 °C,
il avertit l’opérateur ».
Autre avantage qui a retenu l’attention du
constructeur automobile : la fréquence
d’échantillonnage. Des modules de conditionnement externes SCXI (de National Instruments) associés à une carte d’acquisition dans
un PC portable a permis l’acquisition de plus
de cent voies à une fréquence de
1000 éch./s. Ce qui, pour des phénomènes
qui varient relativement lentement comme la
température, est largement suffisant. En effet,
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Solutions
Les 4 solutions de National Instruments
Exemple d’application
Solution préconisée par le fournisseur
Configuration n° 1
« Je n’utilise pas beaucoup de capteurs, juste
2 thermocouples et 3 RTD. J’utilise un PC portable.
Je suis à la recherche d’une solution économique, rapide
et peu encombrante. Éventuellement, j’aimerais aussi
pouvoir utiliser mes deux jauges de contrainte
et mon accéléromètre. »
Configuration n° 2
« Je souhaite une solution clef en mains pour mesurer
uniquement la température avec un minimum
de manipulations »
La solution SCC : “Conditionnement externe, numérisation dans le PC” (faible nombre de voies)
- Il s’agit d’un boîtier dans lequel on vient insérer des modules de conditionnement
(20 au maximum).
- Le boîtier est relié à une carte d’acquisition.
- Les modules sont dédiés à un type de capteurs (thermocouples, RTD, jauges…)
ou de fonctions (filtrage, atténuation…). 1 ou 2 voies par module
(possibilité de cascader les modules)
Cartes “température” : “Conditionnement et numérisation dans le PC”
- cartes de conditionnement et d’acquisition dédiées à la température
- mesure de thermocouples, de RTD, tension, basse fréquence...
- 6 entrées thermocouples (format PCMCIA), 14 entrées (format PCI,
ISA, PXI/CompactPCI, USB)
- pour les thermocouples : intègre un capteur de compensation de soudure froide.
La compensation se fait par logiciel. Détection de thermocouple ouvert
- pour les RTD et thermistances : la carte fournit un courant
d’excitation. 6 gammes de mesure proposées
Configuration n° 3
« Dans le cadre d’un projet de tests, j’utilise plus de
200 capteurs de température. Ce nombre n’est pas figé
et peut encore augmenter »
La solution SCXI : “Conditionnement externe, numérisation dans le PC” (nombre de capteurs illimités)
- solution standard pour conditionner jusqu’à plusieurs milliers de capteurs
- différents modules selon les capteurs et le signaux (ex. : module de
thermocouples avec 32 voies)
- présentation sous forme de châssis (4 ou 8 emplacements
pouvant être cascadés (jusqu’à 12 fois)
- multiplexage des voies vers une seule carte d’acquisition
La solution FieldPoint : “conditionnement et numérisation externes, en réseau”
- pas de carte d’acquisition dans le PC
- une trentaine de modules d’entrées/sorties répartis sur un réseau (Ethernet, RS 232,
485, FF-H1) chargée du conditionnement et de l’acquisition temps réel
- données récupérées sur un serveur OPC
Configuration n° 4
« Je voudrais instrumenter une ligne de production
comportant des automates. J’ai besoin de connaître
la température en une quinzaine de points sur la
ligne. Je voudrais pouvoir la superviser à partir de mon PC,
dans mon bureau ».
Le fournisseur propose le même logiciel de configuration Max pour les trois premières solutions et le logiciel FieldPoint Explorer pour les modules d’entrées/sorties déportés.
L’exploitation, la visualisation et l’enregistrement des données se font sous les environnements de développement LabView ou LabWindows/CVI.
la température est un phénomène physique
qui a généralement une inertie importante.
« A l’exception de certaines réactions chimiques, il est
rare qu’un milieu voit sa température s’élever de plusieurs
centaines de degrés en quelques microsecondes, indique
Mme Galisson.A priori,cela n’a pas vraiment d’intérêt d’échantillonner un signal de température à
100 éch/s ».
Mixer les applications
Les autres arguments d’une instrumentation
sur PC portent davantage sur la flexibilité
d’une telle solution. Pour l’application du
constructeur automobile, qui vise à relier les
sensations perçues par un conducteur ou un
passager aux paramètres d’ambiance thermique, il y a évidemment beaucoup de capteurs de température. Mais il y a aussi des
anémomètres pour mesurer la vitesse d’air
ou des pyranomètres pour évaluer le rayonnement solaire dans l’habitacle. D’autres capteurs sont placés dans le compartiment
moteur pour enregistrer le régime du
moteur, le régime de rotation des ventilateurs ou bien encore les températures et pressions des fluides tels que l’eau, l’huile et le
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Banc de test embarqué dans le coffre d’une 406,chez PSA Peugeot
Citroën.
réfrigérant. « Une solution sur PC apporte ainsi une
grande flexibilité pour mixer différents types de capteurs »,
indique M. Laguerre. « Surtout, aucune solution
n’est figée, surenchérit Mme Galisson (National
Instruments). On peut ajouter,soustraire,changer de capteurs avec beaucoup plus de souplesse qu’avec une centrale ».
Au centre de la Garenne-Colombes, les essais
pratiqués requièrent en moyenne 150 voies.
Certains demandent près de 300 voies.
Il est possible également de mixer différents types de matériels. Ainsi, en ajoutant
une carte de traitement d’image dans le PC,
le même logiciel exploite des données de
température provenant d’un thermocouple
et des données fournies par une caméra
infrarouge.
C’est ainsi que le centre d’étude de PSA Peugeot Citroën suit sous un même environnement logiciel des signaux en provenance
de différentes applications. Les signaux des
capteurs répartis dans le véhicule pour définir ses caractéristiques climatiques sont
rapatriés via des modules de National Instruments et une carte d’acquisition PCMCIA.
Les mesures de vitesse d’air ou de rayonnement solaire prises sur le mannequin
sont envoyées via une liaison RS232.
D’autres passent par un réseau Ethernet.
« Toutes ces données sont traitées en même temps par
le logiciel et nous permettent d’établir très rapidement
les effets des variations climatiques d’un habitacle sur
le confort thermique du passager », explique
M. Laguerre.
Et pour la qualité de la mesure ?
Quant aux qualités métrologiques, une
mesure sur PC ne fait pas forcément mieux
qu’une centrale. Peut-être même un peu
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Solutions
A chaque capteur, son conditionnement
Type de capteur
Thermocouples
Lorsque deux fils de métal sont
joints, le point de contact produit
une tension, fonction de la
température
Sondes à résistance platine
Capteurs dont la résistance varie
avec la température. La plus
commune est la sonde platine
Pt100 (résistance nominale
de 100 ohms à 0 °C)
Thermistances
2 types de capteurs :
- NTC : la résistance du capteur
diminue quand la température
augmente
- PTC : la résistance du
capteur augmente quand la
température augmente
Caractéristiques
Types de conditionnement
- Tension très faible
(quelques µV/°C)
- Signal non linéaire
- Ne nécessite pas
d’excitation (capteur actif)
- Amplification
- Référence à la masse
- Compensation de soudure froide1
- Linéarisation
- Détection de thermocouple ouvert2
- Résistance assez faible
(0,4 Ω/°C pour une Pt100)
- Signal linéaire3 (2, 4 fils)
- Signal non linéaire3 (3 fils)
- Excitation en courant (risque
d’échauffement et d’erreur sur la mesure)
- Amplification
- Pour une configuration 3 fils, la
chaîne de mesure doit comporter un
pont de Wheatstone
- Linéarisation (RTD 3 fils)
- Très forte sensibilité (une
thermistance de 2252 Ω a
une sensibilité de 100 Ω/°C
à température ambiante)
- Résistance élevée
(résistances parasites
négligeables)
- signal non linéaire
- Excitation en courant ou en tension
(risque d’échauffement et d’erreur
sur la mesure)
- Linéarisation
A ces différents conditionnements, d’autres s’ajoutent, plus standards, comme le filtrage des signaux pour diminuer le bruit ou encore l’isolation
pour éliminer les problèmes de masse et garantir la protection du système
1 - Compensation de soudure froide, matérielle ou logicielle
Les deux fils d’un thermocouple sont connectés à des fils de cuivre qui les relient au système de mesure. Ce circuit contient alors trois jonctions qui génèrent
trois tensions : la tension proportionnelle à la température T1 que l’on souhaite connaître (soudure chaude) et les deux autres, proportionnelles à la température au niveau des connexions au système de mesure (soudures “froides”). Afin de s’affranchir des tensions de soudures froides (qui varient avec la température ambiante), il faut réaliser une compensation. Pour cela, on a besoin d’une température de référence (Tref), qui est fixée, dans les tables, à 0 °C (autrefois,
les soudures “froides” étaient mises dans un bain de glace d’où leur nom et la référence à 0 °C).
Si la mesure de température est supérieure à 0 °C, le thermocouple a une sortie positive. Si elle est en dessous, il a une sortie négative. Quand la jonction de
référence et la jonction de mesure sont à la même température, la tension lue est nulle. Il est possible aussi de créer une région isotherme au niveau des
connexions au système de mesure. En connaissant la tension globale mesurée et cette température Tref, on peut en déduire T1. Il est donc nécessaire de
mesurer cette température de référence (par un capteur à circuit intégré ou par une thermistance) et de prévoir une seconde voie dédiée à la mesure de Tref.
Cette correction de compensation de soudure froide peut être réalisée par logiciel ou à l’aide d’une électronique spécialisée.
2 - Détection de thermocouple ouvert
Pour s’assurer de l’intégrité d’un thermocouple, la plupart des systèmes de mesure injectent un courant faible. Ce courant n’a normalement aucune influence sur la mesure. Cependant, lorsque le thermocouple est ouvert, ce courant charge une capacité parasite. Ainsi, le système de mesure lit une tension plus
forte que la tension normale et détecte que le thermocouple est cassé.
3 - RTD 2, 3 ou 4 fils
Les sondes à résistance (RTD) sont des capteurs résistifs : on fait circuler un courant et on vient lire la tension générée. Chaque fil reliant la RTD au système
de mesure ajoute des erreurs dues à la résistance des fils. Pour compenser ces résistances de ligne, la meilleure méthode est l’utilisation d’une RTD à 4 fils.
On sépare alors les fils d’excitation et les fils de mesure. Comme le courant qui circule sur les fils de mesure est négligeable, la résistance sur ces fils sera elle
aussi négligeable. Le grand avantage de cette méthode est que le conditionnement conserve la linéarité (la loi d’Ohm). Pour réduire les coûts, on peut aussi
utiliser une RTD à 3 fils dans un pont de Wheatstone. Les résistances des deux fils opposés s’annulent, celle du troisième fil est considérée comme négligeable.
L’insertion de la RTD dans un pont de Wheatstone induit une non linéarité du signal.
moins bien. « De ce point de vue, les centrales
d’acquisition sont infaillibles. Nous n’avons jamais
observé de dérives,précise M. Laguerre. Pour une
instrumentation sur PC, les caractéristiques annoncées dans les fiches techniques restent dans l’absolu un
peu moins bonnes ». Pour ses essais, il a donc
pris toutes les précautions, en fonction de
la précision recherchée. Pour des mesures
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à ± 2 °C, le centre d’essais se contente
d’étalonner le système tous les 2 à 3 mois.
En revanche, si les tests imposent des
mesures qui approchent une incertitude
de ± 0,3 °C avec des sondes platine, le
technicien réalisera un étalonnage avant et
un autre après l’essai.
En réalité, quand on parle de qualité métro-
logique, c’est toute la chaîne qui est
concernée. En tout premier lieu, la nature et la qualité du capteur. Quel capteur ?
Un thermocouple ? Si oui, quel thermocouple ? Une sonde à résistance platine ?
Une thermistance? « C’est la question que l’utilisateur se pose en premier », souligne
Mme Galisson.
Tout aussi crucial, le conditionnement des
signaux doit être choisi avec soin et en fonction de la nature du capteur. Il y a les fonctions générales de conditionnement, comme l’amplification du signal, le filtrage pour
éliminer le bruit, le multiplexage pour que
plusieurs capteurs puissent profiter du même
circuit de mesure. Il y a aussi des fonctions
qui sont spécifiques à un type de capteur.
C’est notamment le cas de la compensation en soudure froide pour un thermocouple. Pour une RTD, le signal sera linéaire pour un capteur 4 fils, non linéaire
pour un 3 fils. Des “petites choses” qu’il
est bon quand même de ne pas oublier
(voir encadré).
Avec le bon capteur et le bon conditionnement, la mesure de température sur PC, pour
Mme Galisson, peut être aussi précise, voire
plus précise, qu’avec des centrales d’acquisition : « Cela s’explique par la technologie des cartes
d’acquisition de données,en constante évolution d’un point
de vue du nombre de bits de résolution (12,16, 24...)
mais aussi des composants sur la carte toujours plus puissants :asics propriétaires,convertisseurs...». Pour choisir la carte d’acquisition, les critères à prendre
en compte sont la connexion et le type du
signal. Ce deuxième point conditionne les
caractéristiques de la carte comme la résolution, la gamme ou le gain. Pour les mesures
de température, la fonction d’acquisition reste simple. Comme on l’a déjà dit, le signal
est généralement lent. On a besoin simplement de mesurer son niveau (une amplitude) et non pas sa forme. « Il est bien plus facile
de mesurer un signal continu qui varie lentement qu’un
signal alternatif qui varie très vite, souligne
Mme Galisson.On peut se contenter d’une carte d’acquisition avec entrée DC (courant continu) ». La tâche
du convertisseur analogique/numérique
s’en trouve aussi facilitée et la fréquence
d’échantillonnage est un critère peu important.Après, tout dépend du nombre de voies
et de la fréquence des mesures recherchés. Il
y a toujours un compromis à trouver entre
une solution “multiplexage + convertisseur
(rapide)” et la solution “un convertisseur
(lent) par voie”.
MPVP
National Instruments
Tél. : 01 48 14 24 24
www.ni.com.france
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