13. Santé reproductive

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13. Santé reproductive
Les données de l'IBGE : "Interface Santé et Environnement"
13. SANTÉ
REPRODUCTIVE
Février 2000
-
FERTILITÉ
1.Introduction
L’infertilité touche 10 à 15 % des couples désirant une grossesse et est d’origine masculine dans environ la
moitié des cas (1) .
Nous abordons dans cette fiche les problèmes de fertilité à la fois chez l'homme et chez la femme afin
d'avoir une vue globale des déterminants qui les influencent, même si la problématique de la femme est
mieux détaillée dans la fiche sur les dysfonctionnements hormonaux.
2.Définition
Si la fertilité représente une potentialité, c’est à dire la capacité d'un couple à concevoir, seulement
mesurable sur une population ou un échantillon, la fécondité représente, elle, un état, le fait d'avoir obtenu
une grossesse. L'infécondité, son contraire, correspond à l'absence de grossesse.
La stérilité masculine est donc l'impossibilité pour un homme de procréer. Longtemps méconnue, sa
fréquence est importante puisqu'elle représente 30 à 40 % des stérilités conjugales.
La stérilité féminine consiste en une probabilité de conception nulle. L’hypofertilité est définie comme des
problèmes de fécondité après un an de rapports réguliers.
.2.1.Symptomatologie
Un couple doit envisager un bilan de stérilité si, après deux ans de rapports réguliers, la femme n'est pas
enceinte. En général, dès la fin de la première année, il paraît légitime de mener des explorations afin de
déterminer l'origine du problème.
.2.2.Diagnostic
La mise au point d'une stérilité de couple se fait par des examens réalisés chez les deux partenaires afin
d'identifier la ou les cause(s) d'impossibilité pour ce couple de procréer. Celle-ci peut résulter de causes
multiples.
Pour l'instant, l'infertilité masculine se mesure à l'aide d'un spermogramme. Selon les normes de
l'Organisation Mondiale de la Santé, un homme est considéré comme infertile si son spermogramme indique
moins de 20 millions de spermatozoïdes par millilitre (la norme est supérieure à 40 millions par ml) de
sperme. Cependant, de nombreux hommes qui présentent un spermogramme normal ne réussissent pas à
féconder.
D'autres tests peuvent également être effectués tels une spermoculture, le dosage du taux de fructose
dans le sperme, les dosages hormonaux et parfois une biopsie testiculaire.
Chez la femme, une série de tests seront nécessaires afin d'identifier quel(s) secteur(s) de l'appareil
génital est(sont) responsable(s) de la stérilité. Ce sont l'examen de la courbe thermique, de la glaire
cervicale, les dosages hormonaux, l'échographie pelvienne, la cœlioscopie, l'hystérosalpingographie et
éventuellement une biopsie de l'endomètre (5) .
.2.3.Prévention et traitement
S’il est possible d’agir préventivement sur l'hygiène de vie (maladies infectieuses, consommation de tabac,
d'alcool, de certaines graisses) grâce à une information correcte sur les risques, ces modifications de
comportement restent en partie du ressort de chaque personne individuelle.
En ce qui concerne les polluants incriminés dans la genèse des troubles de la reproduction, il faudrait
favoriser la modération dans l'utilisation de certains produits et emballages par les particuliers et espérer
un changement radical, entre autres, dans certaines pratiques industrielles et dans l'agriculture grâce à une
modification en profondeur des modes de production et de consommation de nos sociétés (6) .
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Le traitement de la stérilité masculine est essentiellement la procréation assistée (insémination artificielle
et fécondité in vitro). L'insémination artificielle (de sperme frais ou congelé) consiste en l'introduction du
sperme par le médecin directement au niveau de l'orifice cervical de la femme. La fécondation in vitro est
utilisée avec succès en cas d'oligospermie, d'autoanticorps antispermatozoïdes masculins et dans certains
cas d'utilisation de sperme de donneurs. Les traitements hormonaux et chirurgicaux sont exceptionnels.
Ces derniers ne trouvent une indication formelle que dans les cures de varicocèles.
En fonction des anomalies identifiées, le traitement de la stérilité chez la femme se fera soit par des
agents inducteurs de l'ovulation, soit par une cure chirurgicale, soit par les techniques de reproduction
artificielle (fécondation in vitro, transfert d'embryons, transfert intratubaire de gamètes) (7) .L’ensemble
de ces techniques, relativement nouvelles, relève du domaine récent de la «procréatique ».
Les techniques de procréation médicalement assistée se sont diversifiées au cours des 10 dernières années,
et leurs résultats s’en sont trouvés profondément améliorés. Les cliniciens peuvent aujourd’hui proposer des
techniques adaptées à la plupart des problèmes de stérilité, qui comportent peu de risque de complication
médicale (8) .
3.Etiologie
Les facteurs influençant la qualité de la spermatogenèse chez l'homme et la fertilité chez la femme sont
différents, même si l'on constate de plus en plus des déterminants environnementaux communs.
.3.1.1. Chez l'homme :
•
Les anomalies génétiques: suite à des anomalies au sein de certains chromosomes (délétion au niveau
du chromosome Y, translocation). Cette étiologie est bien connue et ne fait l'objet d'aucune
controverse (9) . Ce sont par exemple les malformations congénitales de type syndrome de Klinfelter
et l’agénésie des canaux déférents (déplacement du méat urétral).
•
Le mode de vie :
L'abus d'alcool: de façon chronique, évoluant vers une cirrhose du foie, altère les capacités de
reproduction de l'homme.
Le tabagisme: même s'il n'y a pas unanimité des études par rapport à ce facteur de risque, la
consommation chronique de tabac altérerait la spermatogenèse de l'homme. Les fumeuses sont
exposées à un risque accru de ménopause prématurée et à une baisse de fécondité. Le risque de
cancer du col est également accru. De plus, le fait de fumer pendant la grossesse expose également
l'enfant à naître à des risques graves. Le tabagisme a un impact direct sur le poids du nouveau-né et,
par conséquent, sur sa survie. Les enfants nés de mères qui ont fumé pendant leur grossesse pèsent
en moyenne de 200 à 300 grammes de moins que les autres. La croissance fœtale est retardée
principalement par le monoxyde de carbone et par la nicotine contenus dans les cigarettes fumées par
la mère.
L'ingestion de nourriture mal équilibrée: les carences alimentaires ainsi que l'abus de certaines
graisses influenceraient péjorativement la spermatogenèse.
la chaleur: la formation des spermatozoïdes dans les testicules se fait à une température de 35°C, ce
qui correspond au fait que les testicules se trouvent dans les bourses à l’extérieur du corps, la
température interne du corps étant de 37°C. A long terme, une chaleur supérieure à 35°C aurait pour
effet de diminuer la production de spermatozoïdes (cryptorchidie, conduite prolongée dans des
véhicules surchauffés, …). Toutefois, parce qu’un bain, même très chaud, n’expose les testicules à une
température élevée que pendant un temps limité, il n’influence pas la fertilité de l’homme.
Autres facteurs: tels la position assise prolongée (plus de 4 heures par jour) et le stress excessif
sont incriminés dans une baisse de la fertilité masculine.
L'exposition à des substances toxiques dans l'environnement ou au travail : un certain nombre de
substances utilisées dans divers domaines sont capables d'entraîner une réponse similaire à celle des
œstrogènes naturels (2) . Les œstrogènes étrangers imitant les effets des œstrogènes naturels dans
le corps sont appelés "xéno-oestrogènes" (voir les fiches cancers du sein et dysfonctionnements
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hormonaux). Ces œstrogènes étrangers pourraient fort bien expliquer certains troubles de la
reproduction, en augmentant le capital œstrogénique ou par perturbation hormonale, affectant la
façon dont le corps produit ou métabolise l'œstrogène. Les principales substances incriminées à
l'heure actuelle sont les produits phytosanitaires (10) tels les herbicides, fongicides et insecticides
comme la vinclozoline, le DDT, l'endosulfan, le dieldrine, le metoxychlor, le toxaphene, le chlordane, le
lindane et l'atrazine ; les formulations organochloride (tel le PCB) ou organobromide ; les composés du
plastic comme les akyl phénols, le bisphenol-A (utilisé pour le revêtement des boîtes de conserve) et
les phtalates ; les dioxines, les styrènes, le mercure, le plomb et le cadmium ; des dérivés de produits
d'usage domestique courant comme les cosmétiques, les lubrifiants, les détergents (alkylphénols) (11).
•
L'environnement nucléaire jouerait aussi un rôle très néfaste. Certains travaux portant sur les
conséquences de contaminations nucléaires accidentelles ont amené à envisager l'influence sur la
fertilité masculine d'expositions répétées et/ou chroniques à de faibles doses radioactives (12) .
•
Certaines pathologies :
Le varicocèle: est une dilatation du réseau veineux péri-testiculaire, donnant la sensation de « paquet
de vers », perceptible en position debout pour disparaître en position allongée. Dans cette affection,
les altérations du spermogramme sont caractéristiques. La cure chirurgicale peut être indiquée dans
le cadre du traitement d'une stérilité ou si le varicocèle est gênant (5) .
Les infections des glandes annexes (prostate, vésicules séminales, épididyme): de type aiguë ou
chronique doivent être évoquées si le nombre de leucocytes dans le sperme dépasse 500.000/ml.
Le traumatisme ou la torsion testiculaire: peuvent entraîner des lésions irréversibles et l’atrophie des
testicules, donc une diminution des capacités de formation des spermatozoïdes.
La cryptorchidie: est une ectopie testiculaire due à une migration incomplète ou aberrante d'un ou
des deux testicules. A défaut de migration normale du testicule, il apparaît une insuffisance
progressive de la spermatogenèse. L'ectopie est corrigée spontanément ou après cure médicale ou
chirurgicale mais l'oligospermie est souvent irréductible (5) .
La déficience protéique: joue un rôle très important dans le cas de l'infertilité masculine. C'est la
déficience des spermatozoïdes en protéines P34H qui empêcherait un spermatozoïde de pénétrer
dans l'ovule. Cette déficience est de mieux en mieux documentée à l'heure actuelle et fait l'objet de
différentes recherches, entre autres au Québec.
Les problèmes psychologiques: ont été évoqués comme ayant des répercussions sur les capacités de
reproduction de l'homme et de la femme, mais cela reste très peu documenté dans la littérature.
L’auto-immunisation: c'est à dire la présence d'anticorps antispermatozoïdes. On recherchera alors
toujours une lésion inflammatoire ou un antécédent de traumatisme.
Les causes hormonales: sont peu fréquentes.
10 à 30 % des stérilités masculines restent totalement inexpliquées après investigations complètes.
.3.1.2. Chez la femme :
La stérilité féminine est due aux affections des organes reproducteurs : ovaires, trompes de Fallope, utérus
et col (vaginites, maladies sexuellement transmissibles). Les autres facteurs possibles sont les troubles
endocriniens, les maladies systémiques, les désordres génétiques et les causes immunologiques (7) .
Une endométriose modérée ou sévère peut causer l'infertilité chez la femme. Les tissus endométriaux
peuvent perturber le bon fonctionnement anatomique de la femme. Il peut y avoir obstruction tubaire
(blocage des trompes de Fallope) et/ou ovarienne pouvant empêcher la conception. Plusieurs facteurs
entrent en ligne de compte. Bien que l'endométriose soit fréquemment diagnostiquée chez les femmes
infertiles, le lien entre endométriose et infertilité n'est toujours pas clairement défini (voir fiche sur les
dysfonctionnements hormonaux).
.3.2.Synergies
Parmi les étiologies responsables d'une baisse de la fertilité masculine (et peut-être aussi féminine), c'est
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essentiellement les interactions de plusieurs facteurs qui entraînent de réelles manifestations cliniques.
Une spermatogenèse anormale peut être le résultat final d’une multitude de causes, telles une maladie
systémique, une malnutrition, des désordres endocriniens, une obstruction anatomique au passage de
spermatozoïdes, des infections, des toxines environnementales et des défauts génétiques (13) . Les
problèmes de fertilité doivent donc être vus globalement et de manière interactive.
L'âge et l’origine ethnique peuvent intervenir dans le risque de stérilité féminine. Parmi les femmes de 35 à
44 ans, ce risque est le double de celui observé entre 30 et 34 ans. Le risque est 1,5 fois plus élevé chez les
femmes noires que chez les femmes blanches (5) .
4.Importance à Bruxelles
Le problème de la fertilité, principalement masculine, ne prend pas en Belgique l'importance qu'elle a ailleurs
dans d'autres pays occidentaux en terme de problème prioritaire et de recherche scientifique (notamment
en crédits de recherche). Il existe cependant des différences régionales puisqu'une commission du
Parlement flamand se préoccupe du problème de la fertilité masculine (6) . Cette initiative ne se retrouve
pas dans les deux autres régions du pays.
.4.1.Prévalence
Une étude en Flandre (9) a montré, sur une période de 20 ans, que la proportion d'homme avec une qualité de
sperme sous-optimale était passée de 5 à 45 %. Le pourcentage d'hommes dont le sperme était franchement
infertile avait quintuplé de 1,6 % à 9 %. Cette dernière valeur corrobore les 15 % de couples infertiles et les
hommes seraient responsables pour environ la moitié de ces couples (ce qui donne un taux d'infertilité
masculine calculée de 7,5 à 8 %). Ces résultats cadrent avec d'autres études menées en Europe sur la même
période. Certaines de ces études montrent aussi des différences régionales (14-15) qui peuvent être dues à
des facteurs environnementaux (en Belgique il n'y a pas d'étude qui compare les régions).
5.Ressources
Services ou associations spécialisées dans le dépistage et le soutien aux malades
•
Services de gynécologie/obstétrique des grands hôpitaux bruxellois possèdent tous une section
traitant des problèmes de fertilité.
•
Centre des nouvelles parentalités, rue Crickx 48/1, 1060 Bruxelles, tél. 02/538.61.05
Document pratiques pour médecins :
•
- Santé Conjuguée n° 9 de juillet 1999 sur l'Environnement et la Santé.
6.Conclusion
Les causes environnementales agissant sur la fertilité masculine et féminine sont à l'heure actuelle au
centre des débats scientifiques et de nombreuses recherches tentent de documenter l'effet des
œstrogènes présents dans l'environnement sous de multiples formes.
De plus il faut associer ces observations à d'autres anomalies de la fonction reproductive masculine qui
augmentent de façon linéaire ces dernières décennies dans de nombreux pays occidentaux (excepté en
Finlande) et qui pourraient donc être expliqués par des facteurs environnementaux. Dans ce contexte, le
recrutement de donneurs pour la procréation médicalement assistée pourrait aussi poser problème.
La baisse progressive de la fertilité chez l'homme est donc un problème important à prendre en compte
dans nos sociétés industrialisées. C'est par des concertations urgentes entre les scientifiques et les
politiques et par une meilleure information des individus sur le risque individuel qu'il faudra envisager la
modification de certains modes de production et de consommation et financer des études qui puissent suivre
l'évolution du phénomène.
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BOULAND Catherine
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