Je ne suis pas un vrai Libanais!» | La Liberté

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Je ne suis pas un vrai Libanais!» | La Liberté
Le film «Et maintenant on va où?», de la Libanaise Nadine Labaki, met en scène les
stratagèmes des femmes face aux violences. dr
26/03/2012
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«Je ne suis pas un vrai Libanais!»
interview • Le dessinateur de presse Patrick Chappatte inaugure la section «Diaspora» avec une sélection
de films sur le Liban, la patrie de sa mère. Plongée dans un cinéma de l’exil.
Le mal du pays se décline-t-il sur grand écran? Assurément! C’est même le ressort de la nouvelle section
«Diaspora» du Festival de films de Fribourg. Le principe: demander à une personnalité bien connue des Suisses de
sélectionner les films qu’aiment regarder les membres d’une communauté avec leurs enfants, pour penser à leur
pays d’origine. Cette année, Patrick Chappatte inaugure le genre avec une série consacrée au Liban. Né en 1967 à
Karachi au Pakistan, installé aujourd’hui à Genève, le dessinateur du «Temps», de la «NZZ am Sonntag» et de
l’«International Herald Tribune» est en effet originaire du Jura par son père, et de Beyrouth par sa mère.
Pour mettre en images cette patrie où il n’a pas grandi, Chappatte a sélectionné six films. «Caramel» (2007) et «Et
maintenant on va où?» (2011), deux fictions de la Libanaise Nadine Labaki, mettent les femmes au premier plan,
tandis que «West Beyrouth» (1998), de Ziad Doueiri, suit Tarek le musulman et May la chrétienne dans une
capitale divisée. Au rayon documentaires, deux dessins animés: «Valse avec Bachir» (2008), de l’Israélien Ari
Folman, qui revient sur le massacre de Sabra et Chatila, et «La mort est dans le champ» (2011), court-métrage sur
les bombes à sous-munitions dessiné par... Chappatte. Enfin, dans le docu-fiction «Scent of an Angel» (2011)
Khalil Dreifus Zaarour donne la parole aux proches de six Libanais disparus pendant la guerre – et jamais
retrouvés. Entretien.
Vous signez la sélection Diaspora. Mais le Liban, vous n’y avez jamais vécu?
Patrick Chappatte: C’est vrai: le Liban est le pays de ma mère, mais je n’y ai jamais vécu, et les vrais Libanais ne
me voient pas du tout comme un des leurs. Elle est intéressante, cette question des origines: quand Thierry Jobin
m’a demandé de diriger cette section, je me suis mis sur les pattes arrière. Parce que je ne suis pas un membre de
la diaspora, c’est-à-dire un exilé:je suis plus un secundo. En fait, cette section devrait peut-être s’appeler Racines,
plutôt que Diaspora.
Etre Libanais, c’est partager une cuisine, une musique... et surtout le vécu d’une guerre?
Complètement. J’ai commencé à me poser des questions sur cette identité à l’adolescence. D’un côté il y avait
cette guerre spectaculaire, dramatique, et de l’autre des aînés qui parlaient du Liban comme d’un paradis. Pour un
ado, c’est assez fort, cette idée romantique d’un paradis perdu, d’un pays d’origine inaccessible et ravagé par une
guerre civile, fratricide.
Quand avez-vous vu le Liban réel?
Enfant, je n’y avais pas accès, à cause de la guerre. J’ai failli y aller plus tard, lors d’un voyage à Chypre avec des
copains. Je leur ai proposé d’aller faire un saut en ferry à Beyrouth, qui était alors coupé en deux. Ils n’ont pas du
tout aimé... J’ai dû attendre les accords de Taëf, en 1990, pour enfin voir le Liban, et découvrir toute une partie de
la famille de ma mère qui était restée à Beyrouth. J’avais 23 ans.
L’importance de la guerre est frappante dans votre sélection: c’est le thème de cinq films sur six.
Le cinéma libanais n’existait pas vraiment – même dans l’esprit des Libanais. Pendant la guerre on n’en faisait pas,
on voyait plutôt des documentaires, avec ces hôtels du front de mer ravagés par les impacts. C’était ça, l’imagerie
du Liban: la zone verte, un centre-ville complètement détruit. Aujourd’hui, il y a un cinéma libanais assez récent,
dont une grande partie parle en effet de la guerre, on le voit dans la sélection. Et puis il y a cette jeune réalisatrice,
Nadine Labaki, dont un film au moins ne traite à aucun moment de la guerre.
Une réalisatrice femme qui met les femmes au premier plan. Pas anodin, ça!
En effet! La femme est une clé de lecture intéressante de ces sociétés multiconfessionnelles et compliquées, à la
fois traditionnelles et modernes. Au Liban, vous verrez des femmes très voilées et des filles en minijupe. Partout
dans le monde, on se pose la question de la cohabitation. Et c’est toujours à travers les femmes que ces
thématiques sont les plus visibles et les plus intéressantes. De plus, dans les guerres, ce sont les femmes qui font
tourner la machine quand les hommes sont arrêtés ou obligés de se battre. Ce sont elles qui ont la distance, elles
qui portent la vie et qui gardent une société saine d’esprit.
Et dans votre vie aussi, le Liban est une affaire de femmes...
Oui, par ma mère, et à travers ma tante Sousou, dont j’ai fait le portrait dans le reportage BD «Ma tante de
Beyrouth». C’était une figure connue de tous, elle tenait une librairie français-anglais dans la rue Hamra, les
Champs-Elysées de Beyrouth. Elle n’a jamais fermé pendant toute la guerre. Célibataire, têtue, elle incarnait ces
femmes incroyables qui se fichent des lignes. Face aux hommes surarmés qui venaient l’intimider, elle n’a jamais
montré sa peur. Elle les remettait à leur place de petit garçon. Si elle avait été un homme, elle se serait fait tuer dix
fois... Je devrais en parler à Nadine Labaki: ma tante, c’est un personnage de film! I
> Débat public avec Patrick Chappatte, demain à 20h30 à Cap’Ciné 5.
CÉRÉMONIE D'OUVERTURE
Alain Berset coupe le ruban rouge
SJ
Ce n’est pas tous les jours qu’un conseiller fédéral inaugure le Festival international de films de Fribourg (FIFF). De
surcroît un Fribourgeois et qui plus est, ministre de la culture. En poste depuis deux mois et demi, Alain Berset
(Photo Alain Wicht) a honoré la manifestation culturelle de sa présence samedi soir, à Cap Ciné à Fribourg. «Quel
plaisir d’être aujourd’hui avec vous.» C’est ainsi qu’a sobrement commencé son discours le socialiste, en tenue
décontractée, sans cravate. Devant une salle comble, emballée. «Seuls 3 à 4% des films exploités en Suisse ne
proviennent pas des USA ou de l’Europe de l’Ouest. Le FIFF a l’immense mérite de rectifier le tir», a relevé Alain
Berset. Selon ce dernier, le cinéma présenté au FIFF permet d’assouvir la soif que les Suisses ont du monde. «Le
festival a un rôle de passeur de culture. Il a aussi pour mission de remettre nos certitudes en question.» Le
directeur du FIFF Thierry Jobin a poursuivi sur la lancée en faisant un vibrant plaidoyer pour la défense de la
diversité cinématographique en Suisse. «Je me réjouis de faire découvrir aux festivaliers plus de 120 films. Des
films qui sont un peu mes enfants.» Samedi soir, c’est l’un de ses rejetons préférés, «Salt», du Chilien Diego
Rougier qui a officiellement ouvert le festival. Un western décalé qui a partagé la salle en deux. A l’exemple de la
famille Berset. Le ministre a apprécié, alors que sa maman Solange n’a, de loin, pas été emballée.
annick monod
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