Osez redécouvrir les

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Osez redécouvrir les
VOYAGES
Osez redécouvrir les
D
U SOLEIL à longueur d’année, de longues plages, des paysages magnifiques,
une population accueillante, le tout à
quelques heures de vol de la France : dans l’absolu, l’Algérie ne manque pas d’atouts pour séduire les touristes. Jusqu’à la fin des années
1980, plusieurs dizaines de milliers de visiteurs
français visitaient l’Algérie. L’histoire récente
de ce pays et ses violences ont pendant
quelque temps totalement fait disparaître les
voyages d’agrément vers cette destination.
Aujourd’hui, retour au calme aidant, la situation bouge à grande vitesse. Inspirée par
l’exemple des ses voisins tunisien, marocain et
même libyen, qui misent à fond sur le tourisme, l’Algérie nous tend à nouveau les bras.
« C’est un pays incroyable pour séduire les
Français, assure Chantal Mortier, directrice de
production Afrique-Moyen-Orient chez le
tour-opérateur Terres d’aventure. La desserte
aérienne est très bonne, y compris en direction
des villes du désert comme Tamanrasset ou
In Salah. Les prix des billets restent intéressants
et ne bougent pas, puisque les compagnies
font leur plein dans le pays, producteur de pétrole. Ensuite, les Français peuvent venir avec
leurs euros et trouveront toujours quelqu’un
qui parle leur langue, cela compte. »
« La situation
est désormais calme »
Pour nombre d’amateurs du désert, l’Algérie
constitue, avec le Niger, un « must ». « C’est l’un
des derniers pays à avoir su garder une tradition de nomadisme, reprend Chantal Mortier.
C’est pour cela que les voyagistes sont en mesure de leur proposer l’hébergement chez les
Touareg ou de leur faire goûter la cuisine locale. » Nicolas Loizillon, installé dans le pays
depuis 1974 et propriétaire du relais d’Outoul,
à une vingtaine de kilomètres au sud de Tamanrasset, lève les yeux au ciel : « Les touristes
reviennent à un rythme à peine croyable. Ces
jours derniers, j’ai vu passer une croisière de
2 CV et les 4 x 4 d’un voyagiste allemand qui
n’avait pas mis les pieds en Algérie depuis au
moins dix ans. Même les Russes s’y mettent :
j’en ai vu démarcher le secteur. » Quelle que
soit leur nationalité, les visiteurs ne manqueront en tout cas pas d’hébergement, à en juger
par le nombre d’hôtels, de campings et d’auberges en construction dans les environs…
Hors du Sahara, l’Algérie restera cependant,
encore pour quelque temps, une contrée inexplorée pour les étrangers. Peut-être plus pour
très longtemps. Le groupe Accor s’intéresse de
nouveau au pays : « Nous n’avons jamais fermé
notre Sofitel d’Alger, ni le Mercure de l’aéroport, même au plus fort de la crise, explique le
groupe hôtelier. Et nous avons des projets dans
d’autres villes, même si rien n’est signé. »
D’autre part, Plein Cap, un voyagiste du sud de
la France, propose de son côté des croisières
qui débuteront dès mars (lire page de droite).
Reste que personne n’élude le problème important de la sécurité : « La situation est désormais calme, assure Mokhtar Badjouda, patron
d’Ahnet Voyages, qui travaille avec des professionnels français. De plus, l’Algérie est un pays
très étendu. Le Sud, pour tous les amateurs de
randonnée, n’a jamais connu les troubles du
Nord. Hormis les touristes allemands enlevés
durant plusieurs semaines il y a deux ans, aucun visiteur n’y a jamais été inquiété. »
Michel Vale ntin
A la recherche
des dunes perdues
d’Oulahoun
ESP.
Alger
MAROC
Oran
TUN.
ALGERIE
MAURITANIE
Oulahoum
MALI
Tamanrasset
LIBYE
NIGER
Erg Medjehebat (Algerie)
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL
Q
UOI DE PLUS désagréable
que de partir dans le désert
pour y trouver le calme et de
croiser d’autres touristes ?
Le Sahara algérien est si vaste que ce
désagrément se produit peu fréquemment. Mais si vous ne voulez
absolument pas croiser âme occidentale qui vive, rendez-vous dans
l’erg Medjehebat, un secteur situé au
nord de Tamanrasset. A condition
de ne pas oublier son chapeau et
beaucoup d’eau, on peut lors d’une
marche sans grande difficulté, au
cours d’une même journée, y découvrir des spectacles bien différents.
Le tassili Tin Meskis abrite ainsi
dans l’oued d’In Ana des peintures
rupestres datant du néolithique, cachées dans des anfractuosités des
rochers. Dans un coin, quelques
crottes de mouflon attestent que les
animaux eux aussi apprécient
l’ombre du lieu tandis que, tendue à
même la pierre, une magnifique toile
d’araignée attend l’insecte maladroit.
Nul n’a le vertige
Pour compléter ce bestiaire, avec un
peu de chance, une antilope déboulera soudain de nulle part pour repartir à fond de train vers le néant.
« Dans ces cas-là, il faut calmer nos
accompagnateurs touareg, qui raffolent de sa viande et seraient presque
prêts à tout laisser pour partir en
chasse », s’amuse Laurent Boiveau,
guide chez Terres d’aventure.
SAHARA ALGERIEN, ERG MEHEDJEBAT. Dans ce secteur situé au nord de Tamanrasset, les marcheurs,
en quête de calme, ont plus de chance de croiser une antilope qu’un autre groupe de touristes. (GIL GUIGLIO.)
Tout aussi impressionnante, la
montée des dunes, par exemple du
côté d’Oulahoun. C’est là que vos
chaussures de marche feront la différence sur le sable brûlant par rapport
« Un soir, on a chanté avec les Touareg »
PIERRE ET DELPHINE, de retour d’un trekking dans le désert du Hoggar
De leur périple, Pierre et Delphine retiennent avant
tout des paysages extrêmement variés. (GIL GIUGLIO.)
Tamanrasset (Algerie)
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL
L
E HOGGAR, les tassilis, Tamanrasset… Des noms
mythiques qui font briller les yeux de Delphine et
Pierre, tout juste arrivés au terme de leur randonnée de
deux semaines à travers les immensités désolées du Sahara algérien. Fourbus mais heureux, les deux voyageurs
nous racontent leur périple, assis en tailleur autour de la
table basse d’un campement, quelques heures avant de
reprendre l’avion pour Paris.
16
« Avant d’aller dans le Hoggar, j’avais déjà des images
dans la tête, raconte Delphine, 37 ans, maquettiste dans
la capitale, cheveux coupés ras et muscles apparents
sous le débardeur. Ce que j’ai vu correspondait à mon
imaginaire, en mieux ! Bien sûr, il y a des moments difficiles, avoue la jeune femme, qui pratique pourtant le marathon. Arriver jusqu’en haut du plateau de l’Assekrem
(NDLR : où se trouvait l’ermitage du père Foucauld) ou du
mont Tahat, ce n’est pas gagné d’avance. Mais une fois
qu’on est installé au sommet et qu’on regarde le coucher
du soleil, c’est la plus belle récompense. »
Pierre, 41 ans, commerçant à Bruxelles, insiste, lui, sur
le côté humain. « J’ai déjà parcouru le désert, par exemple
en Mauritanie. Mais c’est la première fois que je m’immerge autant avec les populations locales. L’avantage de
cette randonnée, c’était de vivre vraiment avec les Touareg, de pouvoir parler avec eux, de manger avec eux. Le
soir, on s’est même retrouvés à chanter ensemble, ou à
écouter leurs contes. »
Tous les deux s’accordent sur une chose, la variété des
paysages : « On traverse des oueds, on escalade des montagnes, on découvre des peintures rupestres, cela change
tous les jours », assure Pierre. « Ne croyez pas que le Hoggar, ce n’est que du sable, reprend Delphine. Au contraire,
ce sont des hauteurs et de la rocaille. Voila pourquoi on a
bien besoin de deux semaines pour le parcourir. Plus
court, ce serait dommage. » « Et pour le tarif, environ
1 300 " par personne, c’est vraiment un bon rapport qualité/prix », conclut Pierre.
aux baskets ou aux sandales ! Quel
que soit l’équipement, la grimpette
demande du temps. A chacun de
cheminer à son rythme et une fois au
sommet, quelle vue ! Et quel plaisir
de continuer sur la crête immaculée
où, même si son sommet culmine à
plus de 200 m, nul n’a le vertige.
Plus loin, au fond de ce qui était
encore, il y a quelques millions d’années, un lac, ne vous agrippez pas
trop à cette petite falaise, elle s’effrite
littéralement sous vos mains. La
faute aux diatomées, des algues fossilisées, qui constituent la matière de
ce mur, au pied duquel abondent les
bifaces, des silex sculptés par des
chasseurs préhistoriques. Une fois
de retour à la civilisation, à Tamanrasset, ville qui malgré son nom mythique ne présente en fait que peu
d’intérêt, les visiteurs pourront faire
un saut dans le fort où fut assassiné
le père Foucauld, béatifié la semaine
dernière au Vatican.
M.V.
PRATIQUE
I Se renseigner : l’Algérie ne possède pas d’office de tourisme en
France. On peut en revanche consulter le site du ministère du Tourisme, wwwalgeriantourismcom.
I A savoir : le visa est obligatoire pour se rendre en Algérie. Il est délivré par les 18 consulats présents en France, et coûte 33 ". Attention, la
liste des documents nécessaires peut varier d’un consulat à l’autre, et
également en fonction de l’état des relations avec notre pays. Se renseigner auprès du personnel diplomatique, bien rodé.
I Argent : la monnaie officielle est le dinar (1 " égale 87 dinars, pas
simple pour le calcul mental !). Mais on peut très souvent payer, même
dans les villes du désert, en euros. Ne comptez pas sur votre carte de
crédit, les distributeurs automatiques ne la prennent pas.
I S’y rendre : de nombreux voyagistes desservent l’Algérie. Pour une
randonnée dans le désert, Terres d’aventure (en agences de voyages, au
0.825.847.800, wwwterdavcom) propose plusieurs forfaits. Le grand
classique, la traversée du Hoggar, dure seize jours et s’affiche à partir de
995 ". Nouveau produit dans un secteur encore peu fréquenté, l’erg
Mehedjebat se découvre en neuf jours, compter à partir de 685 ". Côté
croisières, seul Plein Cap (tél. 04.93.20.21.20, wwwplein-capcom,
également revendu en agences, ou par des voyagistes comme Kuoni,
Terre entière ou le site Internet AB Croisières) occupe le terrain, avec
des formules de onze jours à partir de 1 400 ".
I A lire : beaucoup de beaux livres sur le pays, mais peu de guides
pratiques. Signalons néanmoins un « Petit Futé » très étoffé dont la première édition est sortie en 2005, et qui vient d’être réactualisé (18 ").
M.V.
M.V.
DIMANCHE 20 NOVEM