APPROCHE CLINIQUE DES ALOPECIES NON
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APPROCHE CLINIQUE DES ALOPECIES NON
APPROCHE CLINIQUE DES ALOPECIES NON-INFLAMMATOIRES Manon Paradis Department of clinical sciences, Faculté de Médecine Vétérinaire, Université de Montréal, St-Hyacinthe, Québec, Canada. Introduction Les causes d’alopécie sont nombreuses chez le chien. On y retrouve les infections (dermatophytoses, démodécies, folliculites bactériennes, leishmaniose), les pertes de poils auto-infligées (à cause d’hypersensibilités ou de parasitisme), les maladies autoimmunes (adénites sébacées, dermatomyosite, alopecia areata), les endocrinopathies, les dysplasies folliculaires etc. La croissance du poil est influencée, entre autres, par les hormones gonadiques, surrénales, thyroïdiennes, hypothalamiques et hypophysaires. Les excès, les carences et les déséquilibres hormonaux ont été incriminés dans une myriade de syndromes cliniques chez le chien. Dans certaines endocrinopathies (par exemple l’hypothyroïdie, l’hyperadrénocorticisme, l’hyperoestrogénisme et le nanisme hypophysaire), l’implication hormonale est bien comprise et ces maladies sont assez bien caractérisées cliniquement. Cependant, il existe d’autres alopécies qui ressemblent cliniquement à des maladies endocriniennes (comme l’alopécie canine récurrente des flancs, l’alopécie-X, l’alopécie des robes diluées et les autres dysplasies folliculaires) et dans de nombreux cas, le diagnostic final peut s’avérer difficile à établir. Le but de cette présentation est de fournir au praticien les clés d’une approche clinique méthodique pour aborder les pertes de poils symétriques, non-prurigineuses, noninflammatoires chez le chien. Signalement et anamnèse Lorsqu’on se retrouve face à un chien présentant une alopécie, il faut commencer par obtenir une anamnèse fouillée et réaliser un examen clinique complet afin de détecter d’éventuelles anomalies dans d’autres organes. Des commémoratifs de polyuriepolydipsie, la présence d’un abdomen pendulaire ou d’anomalies des organes génitaux (asymétrie testiculaire, cryptorchidie ou hypertrophie de la vulve) vont influencer fortement la nature des tests secondaires à pratiquer. L’anamnèse et l’examen dermatologique doivent permettre au praticien de confirmer ou d’infirmer la présence de prurit. S’il est significatif, il doit faire l’objet des premières investigations. S’il est absent ou minime, il faut déterminer les caractéristiques de la perte de poil : focale, symétrique ou diffuse. En plus, il faut rechercher la présence éventuelle d’une inflammation et/ou de lésions primaires comme des papules ou des pustules. Des raclages cutanés, une cytologie et/ou une culture de dermatophytes sont souvent indiqués en présence de telles lésions sur la peau. Si on ne trouve ni prurit, ni inflammation, ni lésion primaire, l’étape diagnostique suivante sera déterminée par l’âge d’apparition, la race et le statut sexuel du chien. Age et moment d’apparition. Il faut toujours mettre en relation l’alopécie avec l’âge du chien mais aussi tout évènement physiologique et/ou pathologique, changement de mode de vie ou traitement. Une alopécie se produit parfois quelques semaines après des évènements physiologiques, comme une gestation ou une lactation, ou pathologiques tels une maladie systémique grave, un choc ou une intervention chirurgicale (effluvium télogène). Des poils qui ne repoussent pas après la tonte sont évocateurs d’une hypothyroïdie, d’un hyperadrénocorticisme ou d’une alopécie-X. Ce phénomène est fréquent dans les races nordiques parce le cycle folliculaire est plus long chez ce type de chiens que chez les autres. Beaucoup de troubles ont un âge d’apparition qui est assez prévisible. L’alopécie congénitale est présente à la naissance ; l’alopécie « en patron » apparaît entre l’âge de 6 et 12 mois et la démodécie se produit souvent avant l’âge d’un an. Les signes cliniques liés à l’hypothyroïdie apparaissent typiquement entre l’âge de 3 et 6 ans et l’hyperadrénocorticisme spontané se développe chez les chiens d’âge moyen ou avancé. Race. Certaines races sont prédisposées à des affections alopéciques comme l’alopécie-X (chez le Pomeranien, le Keeshond, le Malamute, le Caniche nain), l’alopécie en patron (chez le Teckel et le Chihuahua) et l’alopécie récurrente des flancs (chez le Boxer ou l’Airedale). Couleur du poil. La couleur du poil peut apporter des informations utiles pour le diagnostic des alopécies liées à la couleur de la robe comme la dysplasie folliculaire des poils noirs, l’alopécie des robes diluées ou la lipidose folliculaire. Statut sexuel. L’hyperoestrogénisme dû aux tumeurs des cellules de Sertoli ou aux kystes et tumeurs des ovaires peut provoquer une alopécie. On peut observer un oestrus prolongé chez les chiennes atteintes d’hyperoestrogénisme tandis que les chiennes atteintes d’hyperadrénocorticisme ou d’hypothyroïdie se retrouveront en anaestrus. Rémission spontanée. Une rémission spontanée peut se produire lors d’alopécie récurrente des flancs, d’effluvium anagène et télogène ou d’alopécie consécutive à une tonte non liée à une endocrinopathie. Il peut également arriver qu’une alopecia areata guérisse spontanément et elle est souvent associée à une repousse de poils blancs (leucotrichie). On constate parfois une rémission spontanée dans les formes localisées de démodécie et de dermatophytose ; dans ces cas toutefois, on pourra observer une inflammation et des squames. Evolution. Une alopécie qui évolue lentement signe souvent un problème systémique (par exemple une endocrinopathie). En présence d’une saisonnalité, il faudra envisager une alopécie récurrente des flancs ou une dermatite par allergie aux puces. Symptômes de maladie interne. Les propriétaires de chiens atteints d’hyperadrénocorticisme rapportent souvent de la polyurie, polydipsie ou polyphagie. Dans le cas de l’hypothyroïdie canine, on constatera souvent un ralentissement du métabolisme avec léthargie, intolérance au froid et gain de poids. Traitements précédents. L’administration de corticoïdes topiques ou endogènes est bien connue pour provoquer un syndrome de Cushing. Il ne faut pas non plus sous-estimer leur influence sur la croissance des poils (même lors d’une simple administration topique localisée comme sur les yeux) mais aussi sur les taux de phosphatases alcalines et d’hormones thyroïdiennes. Une alopécie focale peut aussi apparaitre aux endroits d’injection, surtout après un vaccin antirabique. Examen physique Un abdomen pendulaire et une hépatomégalie sont souvent observés lors d’hyperadrénocorticisme. Les ganglions lymphatiques peuvent être hypertrophies lors de leishmaniose. En cas d’hyperoestrogénisme, des anomalies seront visibles au niveau des organes génitaux (par exemple: gynécomastie, asymétrie testiculaire ou cryptorchidie). Examen dermatologique L’alopécie peut être la caractéristique d’une myriade d’affections dermatologiques. C’est pourquoi un examen soigneux de la peau et du pelage est très important. La présence de lésions cutanées primaires ou secondaires (par exemple des papules, pustules, squames, croûtes), manchons folliculaires (en cas de démodécie ou d’adénite sébacée), l’épaisseur de la peau, l’aspect des poils (cassés ou pas) sont des quelques-unes des observations qui peuvent s’avérer fort utiles et orienter vers un diagnostic plus spécifique. Un érythème, des papules, des pustules, une lichénification, des lésions auto-induites (reconnaissables à des poils cassés ou des excoriations) sont des éléments indicateurs de prurit et d’un processus inflammatoire. Une peau fine avec des vaisseaux sanguins proéminents (phlébectasie) et une calcinose cutanée sont pathognomoniques d’un hyperadrénocorticisme alors qu’en cas d’hypothyroïdie, la peau sera épaisse et hyperpigmentée mais non-enflammée, sauf si une infection bactérienne secondaire s’est développée. Lors d’alopécie récurrente des flancs, les zones dépilées sont clairement bien délimitées et hyperpigmentées. Changement de la couleur des poils et de la peau. Des changements dans la couleur de la robe (décoloration rouge - brunâtre), surtout chez des chiens à poils blancs sont des indicateurs de léchage intensif. Des poils préalablement pigmentés qui repoussent blancs sont eux évocateurs d’une alopecia areata. On remarque une hyperpigmentation marquée des zones alopéciques chez les chiens qui présentent une alopécie récurrente des flancs ou une alopécie-X. Cependant, l’hyperpigmentation est également la réponse de la peau à un processus inflammatoire. Alopécie en patron. La distribution de la dépilation (par exemple focale, multifocale, d’aspect mité, asymétrique, symétrique ou diffuse) doit être évaluée et renseignée. Les alopécies de nature infectieuse ont généralement une distribution asymétrique, multifocale, parfois d’aspect mité tandis que les alopécies d’origine endocrinienne ou liées à des anomalies du cycle pilaire prennent un aspect plus symétrique. Les allergies peuvent aussi engendrer des alopécies symétriques bilatérales mais dans ce cas, l’anamnèse révèlera que le chien se gratte au niveau des zones affectées. L’alopécie canine dite “en patron” (CPA pour l’anglais Canine Pattern Alopecia) suit, comme le nom l’indique, une distribution prédéterminée. Elle débute en général vers l’âge de 6 mois. Dans cette affection, l’alopécie se développe au niveau de la face ventrale du cou, de la poitrine et de l’abdomen, touche la partie médio-postérieure des cuisses, le périnée et aussi les tempes et la partie convexe du pavillon auriculaire. Dans la forme auriculaire de cette affection, parfois appelée “syndrome de l’oreille de cuir”, l’alopécie concerne l’entièreté de la face externe du pavillon auriculaire. Examens complémentaires Si malgré les résultats des différents examens mentionnés ci-dessus, il s’avère impossible de poser un diagnostic définitif, il faudra poursuivre les investigations. Les procédures diagnostiques devront être sélectionnées selon un indice de suspicion. Ainsi, un examen microscopique des raclages cutanés, un trichogramme, un examen à la lampe de Wood (+/- culture fongique) et une évaluation cytologique de calques cutanés ou d’écouvillons pourront être nécessaires si on constate la présence de lésions primaires ou secondaires de types papules, pustules, érythème, squames, croûtes ou manchons folliculaires. Un bilan hématologique, biochimique et une analyse urinaire sont utiles pour évaluer l’état de santé général d’un chien adulte qui présente une alopécie non-inflammatoire mais aussi si on soupçonne la présence d’une maladie systémique qui pourrait être responsable de cette alopécie. Des tests hormonaux (profil d’hormones thyroïdiennes, test de stimulation à l’ACTH, test de freinage à la dexaméthasone à dose faible) doivent être réalisés si les signes cliniques, les résultats sanguins ou urinaires sont évocateurs d’une endocrinopathie. En revanche, les biopsies cutanées sont le seul et unique moyen de confirmer un diagnostic de suspicion d’adénite sébacée. Références choisies 1. Gortel K. Canine alopecia. Clinical Veterinary Advisor. 3rd edition. St Louis: Elsevier, 2015; 47-49. 2. Mecklenburg L, Linek M, Tobin DJ, eds. Hair Loss Disorders in Domestic Animals. Ames, IA: Wiley-Blackwell, 2009. 3. Miller WH Jr, Griffin CE, Campbell KL. Muller & Kirk’s Small Animal Dermatology. 7th edition. St. Louis: Elsevier Mosby, 2013. 4. Paradis M. An approach to symmetrical alopecia in the dog. In: Jackson H, Marsella R, eds. BSAVA Manual of Canine and Feline Dermatology 3rd edition. Gloucester, UK: BSAVA, 2012; 91–102. 5. Rees C. An approach to canine focal and multifocal alopecia. In: Jackson H, Marsella R, eds. BSAVA Manual of Canine and Feline Dermatology. 3rd edition. Gloucester, UK: BSAVA, 2012; 86–90. ALOPECIE CANINE Races “nues” • Chien nu chinois à crête • Chien nu mexicain • Chien nu péruvien Autres Dysplasie ectodermique liée à l’X Hypotrichose/alopécie congénitale Hypersensibilités • Dermatite atopique • Hypersensibilité alimentaire •Hypersensibilité aux piqûres de puces • Parasites (ex : Sarcoptes) Congénitale? Acquise Oui Non Auto-infligée? Non Oui Alopécie symétrique/diffuse Alopécie focale/multifocale Cytologie, raclages cutanés, trichogramme, biopsie cutanée Infections • Staphylococci • Demodex • Dermatophytes • Malassezia • Leishmania Numération formule, profil biochimique, urologique, imagerie médicale, bilan hormonal et/ou biopsie cutanée Divers • Effluvium télogène • Effluvium anagène • Alopécie en patron • Type auriculaire • Type ventral • Alopécia néoplasique (ex: lymphoma épithéliotropique) Endocrinopathies • Hypothyroïdie • Hyperadrénocorticisme • Hyperoestrogénisme • Nanimse hypophysaire A mediation immune (inflammation microscopique) • Adénite sébacée • Dermatomyosite • Alopécie après injection (vaccin antirabique) • Dermatopathie ischémique généralisée chez l’adulte (suite à un vaccin antirabique ou idiopathique) • Vasculite • Alopecia areata (pelade) • Pseudopelade • Eosinophile mucineuse • Folliculite murale dégénerative granulomateuse Dysplasies folliculaires Liée à la couleur de la robe Oui • Alopécie des robes diluées • Dysplasie folliculaire des poils noirs • Dysplasies folliculaires associées à la race • DF du Doberman noir ou feu DF du Braque de Weimar • Lipidose folliculaire du Rottweiler Non • Alopécie-X • Alopécie récidivante des flancs • Dysplasies folliculaires associées à la race • Chien d’eau portugais • Epagneul d’eau irlandais • Retriever de la baie de Chesapeake • Epagneul de Pont Audemer Adapté de Manon Paradis, Clinical Veterinary Advisor 3rd ed. E. Coté ed. 2014