Quel contenu pour quelles conséquences

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Quel contenu pour quelles conséquences
"LA LOI SUR LA PROTECTION DE L'ENFANCE :
QUEL CONTENU POUR QUELLES CONSEQUENCES ?"
LE RAPPORTEUR :
LA PRESIDENTE :
LES VICE-PRESIDENTS :
M. JACQUES BERRIN
MME SIMONE BOURRELLY
M. FABRICE AUBERT
M. JACQUES BERRIN
Séance Plénière du Jeudi 15 avril 2010
PREAMBULE
Ce rapport définitif que je vous présente aujourd’hui, s’inscrit dans le cadre d’une saisine du
Président du Conseil Général.
Il s’agit là en effet d’un des enjeux prioritaires des politiques publiques que l’Assemblée
départementale conduit dans le champ de ses compétences obligatoires en matière sociale
définies par les premières lois de décentralisation de 1983.
Intitulé « La loi sur la protection de l’enfance, quel contenu pour quelles conséquences ? »
cette saisine a pour but de mesurer l’impact de cette loi de réforme de la Protection de
l’enfance sur les services du Conseil Général et en terme de prospective de s’interroger sur
les nouvelles évolutions possibles.
Tels seront les axes essentiels de ce rapport.
I INTRODUCTION
La mission de protection de l’enfance relève au sein du CG13 de la Direction Générale
Adjointe à la Solidarité (DGAS), mais aussi s’agissant d’une politique publique transversale
de la Direction de l’éducation, de celle des sports et de la jeunesse.
Mais c’est la Direction de l’enfance qui en est « le chef de file », en coordination avec la
Direction de l’Action sociale et celle de la Protection Maternelle et Infantile (PMI).
Cette mission s’exerce aussi avec de nombreuses autres institutions publiques, comme
l’éducation Nationale, la justice (les tribunaux, la protection judiciaire de la jeunesse) et en
partenariat étroit avec les associations spécialisées exerçant dans le champ du social et de
l’enfance.
C’est dire que le nombre important d’acteurs concernés impose une recherche de consensus,
et ce au-delà des clivages idéologiques ou professionnels.
Il faut indiquer que la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection de l’enfance n’a
pas suscité « d’agitation » ou de prise de position partisane comme celle relative à la
prévention de la délinquance, pour une raison simple : elle n’a pas constitué une rupture,
mais plutôt une prise en compte des initiatives déjà mises en œuvre sur les territoires par les
acteurs sociaux. Notamment dans le département des Bouches-du-Rhône.
Elle est ainsi une évolution, actant « des bonnes pratiques » déjà exercées, et ayant donné des
résultats positifs.
Dans les Bouches-du-Rhône, le Conseil Général était déjà fortement investi dans le domaine
de la protection de l’enfance avant même la loi du 5 mars 2007.
C’est pourquoi la prise en compte de la réforme a été faite sans grande modification, et sans
ressources nouvelles car les financements supplémentaires annoncés par la loi (article 27,
créant un fonds national de financement de la protection de l’enfance après la publication
d’un décret non encore publié à ce jour) n’ont toujours pas été versés au Conseil Général.
Ce qui revient à dire que les nouvelles orientations, les charges, et les activités
supplémentaires prévues par la loi auront un impact non négligeable sur le budget
départemental.
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Pour éclairer ce rapport la commission jeunesse a pu entendre successivement les principaux
responsables des services du Conseil Général concernés, répondant à notre invitation :
- Le jeudi 15 mai 2008, M. le Docteur Jacques COLLOMB, Directeur de la Protection
Maternelle et Infantile et de la Santé (PMIS), Madame Danièle PERROT, Directrice
de l’Enfance, Madame Annie RICCIO, Directrice de l’Action Sociale de l’Accueil et
de la Coordination (DASAC), (aujourd’hui Directrice de la Cohésion Sociale, (DCS)),
et Monsieur Georges PRIORESCHI, Directeur des Maisons de l’Enfance et de la
Famille (DIMEF).
Cette réunion s’était d’ailleurs déroulée sous la Présidence du Docteur Michel
AMIEL, Vice-président du Conseil Général délégué à la Protection de l’Enfance et à
la Protection Maternelle et Infantile, et en présence de Monsieur Jehan-Noël
FILATRIAU, Directeur Général Adjoint de la solidarité (DGAS).
-
Le jeudi 8 juillet 2009, Mme Danièle PERROT est venue à nouveau nous informer de
l’avancement de la mise en œuvre des dispositifs prévus par la loi (notamment
l’installation de l’observatoire départemental de l’enfance et la préparation du
nouveau schéma départemental (2010/2014)).
A noter aussi que, la Commission jeunesse avait déjà auparavant invité le Docteur Guillaume
BRONSARD, Directeur de « La Maison Départementale de l’Adolescent », qui le 14 avril
2005 nous avait présenté ce service innovant dont s’est doté le Conseil Général de façon
volontariste et exemplaire.
Par ailleurs notre commission s’était rendue en 2004, peu après son inauguration dans les
locaux de la Pouponnière départementale, et dans ceux d’un foyer (MECS) à Mazargues que
nous avions visités.
Je tiens à les remercier tous chaleureusement de leur présence à nos côtés, de leur aide et de
leur accueil pour effectuer ce rapport, destiné essentiellement à informer les membres du
Conseil Départemental de Concertation sur la protection de l’enfance, et mieux mesurer les
enjeux qu’elle représente dans le département des Bouches-du-Rhône.
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*
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En qualité de 1er Vice-président de l’Association Départementale pour le développement
d’actions de prévention (ADDAP/13) association qui exerce pour le compte du CG/13 la
prévention spécialisée dans le département des Bouches-du-Rhône, je vous indiquerai la part
que ses quelques 180 éducateurs exercent dans le cadre de la protection de l’enfance. Et
notamment depuis près d’un an d’une nouvelle mission de prise en charge en grande soirée
des mineurs étrangers non accompagnés à Marseille.
Enfin pour finaliser ce rapport, je le présenterai en mars 2010, au nom de notre commission
jeunesse, devant l’Assemblée Plénière du CDC.
Je vous remercie d’ores et déjà de vos observations, contributions et propositions qui
m’auront permis de lui apporter l’éclairage consensuel que les questions sociales rendent
indispensable.
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II LES CONSIDERANTS
Considérant n°1 :
Considérant le contexte démographique et la situation sociale et économique du département
des Bouches-du-Rhône (Etat des lieux et diagnostic)
Avec plus d’1,9 million d’habitants fin 2006 le département connait un dynamisme
démographique de 0,64% par an sur la période 2000/2006 (1).
Il s’inscrit dans la moyenne nationale (0,65%) sur la même période, et se situe parmi les plus
peuplés de la France métropolitaine (Paris 2,167 millions, le Nord 2,583 millions, et le Rhône
1,667 millions).
S’agissant des indicateurs démographiques, l’INSEE indique qu’entre 2004 et 2007
l’évolution du nombre des naissances (environ 24 000/an) a connu dans les Bouches-duRhône une augmentation supérieure à la moyenne nationale avec 4%, contre 2,3% en France
métropolitaine.
Enfin en moyenne fin 2006 plus d’une personne sur 4 dans les Bouches-du-Rhône a moins de
21 ans, avec 499 650 personnes, dont 119 650 sont âgées de moins de 4 ans, et 422 000 de
moins de 18 ans.
Selon l’INSEE, toujours fin 2006, la part des familles monoparentales varie assez
sensiblement entre les 7 secteurs (2) du département :
AIX
ARLES
ISTRES
13,3%
12,4%
14,1%
HUVEAUNE MARSEILLE MARSEILLE MARSEILLE
SUD
CENTRE
NORD
19,9%
18,3%
20,4%
21,4%
S’agissant du contexte socio-économique.
Au 1er janvier 2007 le département connaissait encore un taux très important d’allocataires
du RMI, avec plus de 65 000 personnes, même si il est en forte diminution grâce à une action
très ciblée des services de la Direction de l’Insertion du Conseil général (plus de 70 000 en
2004).
Quant aux revenus concernant l’indice de précarité, en 2009 à Marseille près d’un tiers de la
population vit au dessous du seuil de pauvreté, (871 euros/mois en 2007) et parfois même
plus de 50% dans certains quartiers du secteur Nord, ou des 2ème et 3ème arrondissements de
la ville.
C’est dire la situation extrêmement difficile en matière sociale que connaissent fin 2009 des
familles, encore plus touchées par la crise économique, dont une violence sans précédent est
venue alourdir leurs difficultés, renforçant les menaces de chômage de précarité et
d’exclusion.
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(1)La Ville de Marseille, avec 860 360 habitants au 1er janvier 2007 connait une progression de plus de 53 000
habitants par rapport au recensement de 1999, qui s’établissait à 807 070 habitants.
(2)L’action sociale du CG/13 s’organise selon le découpage en 7 secteurs ASE : 3 à Marseille, 4 HorsMarseille.
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Ainsi le taux de chômage qui était fin juin 2009 dans le département de 11,1%(supérieur à la
moyenne nationale établie à 9,1% à la même période) est bien au dessus dans les Zones
Urbaines Sensibles (ZUS) et chez les populations les plus fragilisées, notamment pour les
jeunes de 18 à 25 ans en difficulté d’insertion (près de 20 à 25% de chômage).
Le dernier rapport (Novembre 2009) de l’observatoire National des zones urbaines sensibles
(751 au plan national) fait ainsi état des difficultés très aigues des 4,5 millions d’habitants de
ces territoires.
Dans les Bouches-du-Rhône où l’on recense quelque 24 ZUS, plus de 350 000 habitants sont
touchés par cette « surexposition » aux difficultés sociales.
Considérant n°2 :
Considérant les moyens mis en œuvre par le Conseil Général des Bouches-du-Rhône « chef
de file » pour la protection de l’enfance.
Ainsi il a globalement consacré en 2008 183 millions d’euros pour financer la protection de
l’enfance. Ce budget est en forte progression depuis 5 ans (141 millions en 2003, soit +30%
environ). Plus de 1 100 agents de tout grade y sont affectés (600 à la DASAC, au sein des
MDS, 400 chargés de la PMI et de la santé des 24 000 naissances annuelles dans le
département, et environ une centaine à l’ASE) sans compter les personnels des associations
spécialisées (foyers, ADDAP/13).
Considérant n°3 :
Considérant le mode opératoire, et les services du Conseil Général mobilisés :
En premier lieu il doit être informé de la situation
La mission de protection de l’enfance a été confiée par l’Etat aux Conseils Généraux lors des
premières lois de décentralisation (1983/1986). Ainsi lorsqu’une situation de mise en danger
d’un enfant est avérée (3) les Service du Conseil Général peuvent intervenir afin qu’il puisse
être accueilli dans un établissement spécialisé ou chez une assistante familiale.
Dans tous les cas les personnels du Conseil général s’efforcent d’être à l’écoute de l’enfant,
de satisfaire ses besoins en trouvant une solution personnalisée. Mais avant il faut que le
Conseil général soit mobilisé.
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(3)Définition de l’enfance en danger :
- enfant maltraité : enfant victime de violences physiques, cruauté mentale, abus sexuel, négligences lourdes,
ces faits ayant des conséquences graves sur son développement physique et psychologique.
- enfant en risque : enfant qui connait des conditions d’existence qui risquent de mettre en danger sa santé, sa
sécurité, sa moralité, son éducation, mais qui n’est pas pour autant maltraité.
- enfant en danger : ensemble des enfants maltraités et des enfants en risque pris en charge dans le cadre de
l’Aide Sociale à l’enfance.
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L’information (dont disposent les services du Conseil Général, souvent appelée
improprement signalement) provient soit du voisinage (4), des associations, des familles, de
l’enfant lui-même, des services ou intervenants médicaux sociaux ou éducatifs en contact
avec l’enfant ou sa famille.
Le signalement, document écrit établi après évaluation interdisciplinaire et de préférence
pluri-institutionnelle d’une information. Ce document fait état de la situation de l’enfant et de
la famille, des mesures préconisées, de type « administratifs » ou « judiciaires » et de tous les
éléments permettant l’entrée dans le dispositif d’observation.
L’évaluation, regroupement des informations connues par au moins deux professionnels ou
au moins deux institutions afin d’apprécier la réalité du danger encouru par l’enfant, la
capacité d’adhésion de la famille à un projet d’aide, et de faire des propositions de protection
immédiate ou de prévention. Cette évaluation se fait généralement dans la Maison
Départementale de la Solidarité (MDS). Mais elle peut aussi être faite directement au sein
d’une équipe hospitalière ou éducative, c’est grâce à cette évaluation que l’on va pouvoir
distinguer « les enfants en risque » des « enfants maltraités ».
Une fois informé le Conseil Général peut agir en mobilisant ses services chargés de la
protection de l’enfance notamment :
a) La pouponnière et les maisons d’enfants
L’accueil d’urgence des enfants en danger s’effectue suite à une procédure administrative ou
judiciaire à la pouponnière départementale de Montolivet (13012 Marseille) pour les bébés
de 0 à 3 ans, ou dans l’une des 13 maisons d’enfants de la Direction des Maisons de
l’Enfance et de la Famille (DIMEF).
Cela représente en 2009 une capacité d’accueil au total de près de 250 places. Après un
accueil d’urgence d’une durée maximum de 6 mois, les enfants sont ensuite éventuellement
orientés en vue d’un placement plus durable auprès des 670 familles d’accueil ou dans l’une
des 35 maisons d’enfants à caractère social (MECS) (5).
Ainsi fin 2006, 3 630 enfants faisaient l’objet d’une mesure d’assistance éducative à domicile
et 3 459 étaient placés.
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(4)Pour l’enfance en danger, le Conseil Général a mis en place un numéro vert gratuit, accessible à tout
moment : 0800051013 (ou 119, numéro national). Au bout du fil des professionnels écoutent, informent et
orientent le correspondant 24h/24h et 7j/7j.
(5) située à Marseille, la DRAILLE est une MECS qui a le particularisme d’accueillir ensemble les mères et
leurs enfants « qui sont à la rue ». Car habituellement les enfants sont placés en foyer pour enfants, et leurs
mères en foyer pour femmes. C’est une séparation parfois difficile pour celles qui cherchent à échapper à des
violences conjugales ou à une crise provisoire (chômage etc.). A la DRAILLE, le personnel (Education
spécialisé, assistante sociale, conseillère en économie sociale et familiales) s’efforce de trouver avec la mère des
solutions pour éviter le placement de l’enfant dans les services de l’ASE.
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b) Les Maisons Départementales de la Solidarité (MDS), et leurs 600 agents qui
relèvent de la Direction de la Cohésion Sociale (DCS)
Les 27 Maisons Départementales de la Solidarité (dont 13 à Marseille) se partagent le
territoire départemental en assurant un maillage social pertinent pour organiser le plus en
amont la mission de prévention et le signalement des situations à risques pour les mineurs.
Lieu d’accueil et de conseil pour les parents les MDS par leur proximité sont au centre des
politiques de prévention en matière d’hygiène, de sécurité et de bien être des enfants.
Les MDS permettent de déployer sur tout le département un réseau de professionnels autour
de la petite enfance (jusqu’à 6 ans) dans le cadre de la Protection Maternelle et Infantile
(PMI).
C’est au sein de la MDS du domicile habituel du mineur concerné que s’effectue le recueil
des informations « préoccupantes » le concernant. Le responsable du secteur effectue alors la
coordination des informations recoupées avec celles des professionnels des autres institutions
(enseignants, service social scolaire, services de pédiatrie etc.).
Ensuite « la cellule opérationnelle de recueil, de traitement et d’évaluation » (CORTE) est le
niveau opérationnel prévu par la loi du 5 mars 2007. Elle se réunit en urgence au sein de la
MDS dans l’heure ou sous 24 heures pour analyser les éléments et fixer la forme et les
modalités de rencontre avec les parents et les mineurs.
« L’évaluation » faite par les professionnels se mène à son terme par des propositions d’aide
adaptées à la situation de l’enfant et à celle de ses parents.
Si la vie d’un mineur, ou son intégrité physique est menacée, et lorsque les faits sont de
nature pénale, dans ce cas l’autorité judiciaire est avertie sans délai (le Procureur de la
république et/ou en cas d’extrême urgence les forces de police ou de gendarmerie).
c) L’Observatoire Départemental de la Protection de l’Enfance (ODPE) (cf. Annexe2).
Toute information préoccupante donne lieu à une fiche de suivi adressée à l’ODPE qui
transmet une fois par an de façon anonyme des données à l’Observatoire National de
l’Enfance en Danger (ONED) « afin d’effectuer un recueil statistique des données relatives
aux mineurs en danger ou en risque de danger ».
« Une cellule de veille départementale », émanation de l’ODPE constituée d’un groupe
technique permanent a pour mission le suivi du dispositif.
Considérant n°4 :
Considérant le rôle des associations spécialisées et de l’ADDAP/13.
Il est difficile ici de toutes les citer, mais il convient de souligner combien leur rôle est majeur
dans la prise en charge en milieu ouvert des enfants qu’elles recueillent en liaison avec les
familles.
L’Association Départementale pour le Développement des Actions de Prévention
(ADDAP/13) exerce, dans le cadre de la convention qui la lie avec le CG13 et au travers de
la logique de l’Aide sociale à l’enfance, une démarche d’assistance et d’accompagnement des
jeunes de 12 à 21 ans les plus fragiles du département.
Acteur de prévention spécialisée, l’ADDAP utilise l’action éducative face aux dangers que
rencontrent les adolescents et jeunes adultes, en partenariat avec les autres institutions
présentes dans les quartiers (ASE, centres sociaux…).
Les 180 éducateurs de rue qu’elle emploie sont déployés sur 21 communes (Aix-en-Provence,
Allauch, Arles, Aubagne, Chateaurenard, Gardanne, Istres, La Ciotat, Marignane, Marseille,
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Martigues, Miramas, les Pennes-Mirabeau, Plan-de-Cuques, Port-Saint-Louis du Rhône,
Saint Martin de Crau, Salon, Septèmes, Tarascon et Vitrolles) dans plus de 80 quartiers
sensibles, points de travail où ils sont présents.
L’action de l’ADDAP (voir annexe II) s’exerce en respectant la libre adhésion du jeune et de
sa famille, en agissant en respectant son anonymat.
Cela se traduit par des actions dans les domaines :
-
De la scolarité et de l’absentéisme, et des fugues,
-
De la santé (conduites addictives, alcool…), et de la prévention du suicide,
-
De la recherche d’emploi et de formation notamment (à travers des chantiers
éducatifs de découverte du travail),
-
De la lutte contre l’exclusion et toutes les discriminations,
-
Du logement.
En fait, le rôle de l’éducateur est d’aider le jeune repéré en difficulté, ou marginalisé à se
resocialiser en construisant avec lui un parcours d’insertion sociale et en l’accompagnant
dans son accession à la citoyenneté.
Environ 7000 jeunes en 2009 ont fait l’objet grâce à l’ADDAP d’un accompagnant éducatif,
et 2 500 familles y sont associées.
L’association est par convention financée par le Conseil Général à 90 % de son budget (plus
de 10 millions d’euros en 2010). C’est la plus importante association de prévention
spécialisée en France.
Face à une problématique assez récurrente de l’errance des mineurs à Marseille, l’ADDAP
répondant à une demande du Président du Conseil Général 13, vient depuis janvier 2008 de
mettre en œuvre un service de nuit dédié à la prise en charge des mineurs errants non
accompagnés. Il s’agit de jeunes mineurs étrangers isolés, souvent originaires des pays de
l’Est et du Maghreb, « en recherche d’une vie meilleure », venus en France clandestinement
en bateau, et qui vivent dans des squats.
Plus rarement, il y a aussi des mineurs en fugue originaires d’autres villes de France, qu’il
s’agit d’aider à retrouver leurs repères et de faciliter leur retour dans leurs familles. Cette
situation qui concerne une centaine de jeunes enfants ou adolescents, voire même de jeunes
adultes (-21 ans) a posé la question de leur prise en charge face aux dangers qu’ils encourent
la nuit dans le centre ville de Marseille et des déviances susceptibles de se produire
(prostitution, délinquance…).
L’ADDAP pour apporter une réponse opérationnelle a mobilisé la création d’un nouveau
service de 7 éducateurs spécialisés, disponibles en grande soirée, tous les jours, en liaison
avec les services sociaux, de la police et de la justice.
D’ores et déjà, au terme d’une période de diagnostic et d’expérimentation de plus d’un an, sa
mise en service opérationnelle en janvier 2008 dans l’hyper centre de Marseille (1er, 2ème et
3ème arrondissements, secteur du Panier, joliette, Vieux-Port, Gare Saint Charles, Noailles…)
a démontré la nécessité d’une présence éducative spécialisée en début de nuit (jusqu’à
00h30).
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Depuis fin 2009, le dispositif va désormais pour mieux garder le contact avec les 400 jeunes
rencontrés la nuit, devoir s’articuler en faisant le lien entre le service de jour du secteur, et
celui de « grande soirée » pour mieux assurer le suivi des jeunes pris en charge, et dont les
problématiques exigent un accompagnement plus régulier (santé, etc.).
Aujourd’hui, la pertinence d’un tel dispositif n’est plus à démontrer avec quelques 100 à 150
mineurs étrangers isolés à Marseille pris en charge par le Conseil général dans le cadre de
l’ASE.
Car avant leur majorité, ces mineurs selon la Convention Internationale des Droits de
l’Enfant (CIDE) de 1989 ne sont pas expulsables et doivent être protégés (article 375 du code
civil qui prévoit un devoir de protection des mineurs en danger et une prise en charge dans le
cadre de l’ASE).
Pour déterminer son âge, tout mineur étranger isolé peut être poursuivi pour infraction à la
législation des étrangers, placé en rétention et soumis à une radiographie de l’âge osseux. Si
cet examen, pourtant controversé, conclut à la majorité du jeune, il peut être sujet à une
injonction à quitter le territoire national.
C’est dire la difficulté d’une telle problématique, et le rôle majeur exercé par l’ADDAP.
Considérant n°5 :
Considérant la préparation du schéma départemental 2010/2014 pour l’enfance et la famille
(cf. Annexe 2)
Succédant à celui de 2005/2009, le futur schéma, destiné à prendre en compte la loi de la
protection de l’enfance du 5 mars 2007 aura vocation à finaliser le rôle des différents acteurs
institutionnels (services déconcentrés de l’Etat, Justice, Education Nationale) et celui du
secteur associatif. L’esprit du projet de schéma sera de privilégier davantage la prévention,
et le maintien de l’enfant avec sa famille, pour éviter autant que faire se peut le placement du
mineur.
Le futur schéma portera également ses efforts vers une plus grande transversalité en faisant
entrer la protection maternelle infantile (PMI) dans le dispositif, pour mieux travailler en
amont avec les familles. Il s’agit en effet « d’arriver avant le signalement », en travaillant
davantage avec les écoles, et en proposant des solutions alternatives au placement plus
adaptées, notamment la création d’accueil mères/enfants.
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Donc en fait, même si la loi du 5 mars 2007 n’a pas bouleversé l’organisation des services de
l’enfance du Conseil Général des Bouches-du-Rhône, il convient toutefois de mieux structurer
le dispositif de signalement, et d’envisager la création d’une cellule départementale d’écoute
et d’appréciation des situations.
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III LES PROPOSITIONS
Depuis plus de vingt ans, ainsi bien avant la loi du 5 mars 2007, le Conseil Général des
Bouches-du-Rhône s’est largement engagé dans une politique publique de prévention au
profit de l’enfance et des familles.
En effet, c’est lors des premières lois de décentralisation (1983/1986) que les services du
Conseil général de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) ont privilégié les actions de proximité et
le développement d’une large diversification des modes de prise en charge des enfants
présentant des risques de danger.
Depuis lors c’est vers une telle orientation que tous les efforts ont été mis en œuvre.
C’est pourquoi l’impact de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance n’a été
que très limité dans le département au sein des services de la DGAS, car déjà fortement
impliqués en matière d’accompagnement des familles en difficulté, et de prise en charge de
leurs enfants le plus en amont possible, dès qu’ « une information préoccupante » les
concernant est recueillie par un des acteur du réseau de professionnels concernés.
En conséquence nos propositions ont pour objet de s’inscrire dans le souci de la continuité.
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Ainsi le Conseil Départemental de Concertation propose au Conseil général des Bouches-duRhône :
Proposition n°1 : de la protection à la prévention
De poursuivre et de renforcer la politique publique de prévention qu’il exerce depuis de
nombreuses années en matière d’Aide Sociale à l’Enfance, dans le cadre désormais de la
nouvelle loi.
Car il s’agit là d’une action prioritaire majeure dans un département où, déjà bien
avant la crise sociale actuelle, les familles connaissaient souvent de lourdes
difficultés, les plaçant de plus en plus dans une situation de précarité et d’exclusion
qui menacent gravement la santé, l’épanouissement et l’équilibre psychique et éducatif
de leurs enfants.
Notamment les familles monoparentales dont le nombre en 2008/2009 ne cesse de
croître (plus de 20% de l’ensemble des familles à Marseille en 2008).
Proposition n°2 : maintenir l’exigence de priorité d’une telle politique publique
De maintenir une telle exigence malgré le projet de loi de réforme des collectivités
territoriales, en raison de l’importance de la famille et de l’enfance qu’une société moderne
et humaniste se doit de privilégier.
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Proposition n°3 : se préoccuper aussi des autres difficultés de la famille (notamment le
logement)
Il est extrêmement difficile de bien appréhender la protection de l’enfance si de façon
concomitante les questions de la santé et du logement ne sont pas examinées. Pour ce qui
concerne le logement il est donc nécessaire que les services de l’enfance et de la famille
puissent travailler avec ceux du logement, tant en interne au Conseil général qu’avec ceux
des organismes externes publics et privés.
Notamment en privilégiant le projet socio-professionnel des jeunes adultes (16-21 ans) et leur
logement dans un foyer de jeunes travailleurs (FJT), lieu de mixité sociale qui propose en
plus du logement un accompagnement administratif, des bureaux d’informations jeunesse et
des espaces multi-média pour permettre aux jeunes de s’accomplir et de se développer.
Proposition n°4 : Optimiser la prise en charge et la gestion des situations difficiles
De se doter davantage encore de structures d’accueil adaptées spécifiques aux enfants et
adolescents difficiles et aux situations violentes. Le but étant d’exercer pour eux une prise en
charge éducative et médicale (psychologique ou psychiatrique) destinée à permettre à ces
enfants ou jeunes adolescents de retrouver à terme un équilibre satisfaisant et un
épanouissement en lien avec leur famille.
En effet de plus en plus souvent les travailleurs sociaux et personnels chargés de
l’accueil sont confrontés à des enfants de plus en plus perturbés (« les incasables »,
selon l’ONED).
Cela conduit le Conseil général à revoir l’organisation des moyens dans un processus
de concertation avec les partenaires institutionnels et associatifs pour redéfinir les
modes d’intervention. Notamment en ce qui concerne la prise en charge en urgence de
jeunes adolescents subissant des situations de violences sociales, physiques ou
psychologiques qui entrainent chez eux des troubles psychiatriques. Cela rend aussi
nécessaire de former les personnels à ces situations très difficiles, afin qu’ils puissent
y faire face sans se mettre en danger.
S’agissant des modes de garde et des lieux d’accueil destinés aux situations difficiles,
et dans le respect de la nécessaire proximité avec les familles, il conviendrait d’en
disposer d’un à Marseille et d’un ou deux autres dans le département.
Proposition n°5 : développer la formation des personnels
De développer et de multiplier les formations interdisciplinaires des personnels chargés de la
protection de l’enfance (ASE, DCS, etc.) avec ceux de l’Education Nationale, de la Justice,
des services de police et de gendarmerie sans oublier ceux des Centres Communaux d’Action
Sociale (CCAS) et des associations spécialisées (ADDAP/13 etc.), dans un objectif de
« culture partagée ».
Au-delà de « la reconnaissance » que les actions de formation professionnelle
apportent aux agents qui en bénéficient, cela permet surtout aux personnels des
différentes institutions confrontées aux mêmes problématiques de confronter leurs
pratiques et leurs modes opératoires, et de mesurer les limites d’intervention de
chaque institution.
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C’est notamment le Code de l’Action Sociale et des familles qui prévoit (Art. D 226-1-2)
le contenu de la formation des cadres territoriaux de la protection de l’enfance, qu’un
Arrêté du 25 septembre 2008 est venu préciser.
C’est par exemple dans les rencontres, et séminaires organisés par le Centre National de
la Fonction Publique Territoriale (CNFPT) que sont abordées les questions relatives à
l’éthique et au secret professionnel, ainsi qu’aux méthodes d’animation lors des prises en
charge, l’accent y est aussi porté sur les outils d’observation (observatoire, cellule de
recueil d’informations, schémas départementaux) et d’évaluation des résultats.
Proposition n°6 : De soutenir et optimiser le renouvellement et l’adaptation des ressources
humaines
D’envisager et de préparer le renouvellement et l’adaptation des personnels des différents
établissements chargés de la protection de l’enfance, ou des familles d’accueils dont un grand
nombre, au delà du « turn-over » traditionnel des métiers difficiles, va partir à la retraite dans
les toutes prochaines années.
Il s’agit là d’un problème majeur qui touche le secteur médico-social et éducatif, qui ne
parait pas actuellement susciter beaucoup de vocation chez les jeunes en recherche
d’emploi, quelque soit leur niveau de qualification.
En effet cette filière est encore peu attractive, par ses faibles rémunérations et la
difficulté des métiers qu’elle offre. Seules une revalorisation nationale de ces métiers et
une forte promotion auprès des jeunes sont de nature à favoriser un tel engagement.
Proposition n°7 : pour les mineurs étrangers « isolés » envisager une coopération avec les pays
d’origine
Au-delà des mesures prises ces derniers mois à Marseille par la plate-forme départementale
pour la protection des mineurs étrangers isolés pour assurer leur prise en charge, il parait utile
d’envisager un partenariat entre le Conseil Général et les pays du Maghreb (notamment le
Maroc) et certains pays de l’Est, dont sont originaires le plus souvent ces mineurs isolés.
Par exemple, par un partenariat en matière de formation de leurs éducateurs et d’actions
éducatives pour les jeunes. Ces deux volets tiendront compte des expériences et besoins
respectifs de notre département et du pays d’origine.
Proposition n°8 : mieux sensibiliser l’opinion sur les enjeux
Afin de mieux faire connaître le rôle du Conseil Général en matière de protection de l’enfance, il
conviendrait d’organiser au deuxième semestre 2010, à Marseille et dans les grandes villes du
département, en partenariat avec les Maires, l’Education Nationale, la Justice, l’ordre des
avocats et les Associations spécialisées, des « Forums de l’enfance » destinés à sensibiliser
davantage sur les enjeux et les défis qu’elle représente face aux différentes crises qu’elle
connait, plus de 20 ans après « la Convention Internationale des Droits de l’Enfant » (CIDE)
signée le 20 novembre 1989 par les 191 Etats membres de l’ONU.
Ces forums feraient ainsi écho aux « Assises Nationales de l’enfance » qui se
dérouleront fin juin 2010 à Marseille.
12/12