Manger pour se consoler - Eki-Lib
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Manger pour se consoler - Eki-Lib
Manger pour se consoler Chacun sait bien la tendance naturelle qu’ont les amoureux déçus à se venger de leur déception sur la nourriture. Qui n’a pas dans ses connaissances une personne au moins « ayant beaucoup grossi à la suite d’un chagrin d’amour »? Ce « réflexe alimentaire » peut-être en lui-même un excellent remède, physiologique et efficace, du dépit amoureux qui l’a provoqué à l’origine. Une des premières raisons qui nous pousse à manger et à grignoter après un échec ou une rupture amoureuse, c’est notre instinct de conservation. Celui-ci, lors des événements stressants qui nous vivons, tend à nous faire régresser vers l’enfance, vers un stade de notre existence où nous étions cajolés, bercés, protégés, caressés, bref, où l’on nous témoignait les marques de ce dont nous avons le plus besoin et de ce que nous réclamons le plus, l’amour. Cette attitude instinctive de refuge dans l’enfance nous incite alors à retrouver le plaisir le plus fréquent et le plus puissant, pendant les premières années de notre vie : le plaisir oral, celui que nous procure la bouche. MANGER POUR RETROUVER SON ENFANCE Nous savons que dès son premier jour jusqu’au moins le début de sa deuxième années, un bébé va découvrir le monde qui l’entoure en grande partie grâce à sa bouche et à ses lèvres : c’est ainsi qu’il va y porter tout ce qu’il touchera, le lécher, le sucer, etc. Les premiers plaisirs qu’il va ressentir et surtout les premières satisfactions de ce besoin primordial, essentiel : la faim, lui seront apportées par ce que sa mère lui donnera à manger et avant tout par les aliments sucrés. Le sucré exerce en effet un attrait irrésistible sur les petits enfants, beaucoup plus puissant que les trois autres saveurs que sont goût (et non son odorat) lui permet de reconnaître pourtant dès le début, le salé, l’acide et l’amer bien évidemment. L’important, pour notre système nerveux mis à mal ou pour notre équilibre affectif en déroute, c’est de retrouver la sensation de sécurité et de bien-être que nous ressentions tout enfant lorsque nous avions en bouche le sein de notre mère, la tétine du biberon… ou notre pouce. Toutes habitudes dont il a bien fallu que nous nous déprenions avec les années (hélas! Diront certains). Ce qui compte au moment où nous mangeons, lorsque nous sommes désorientés, désappointés ou malheureux, ce n’est pas ce que nous mangeons, c’est le fait même de manger, d’en sentir le goût et la saveur, de l’avaler, puis… de recommencer et de recommencer encore, pour nous consoler, comme l’on nous consolait quand, enfants, nous éprouvions un chagrin ou versions quelques pleurs (« tiens, prend un bonbon pour ne plus avoir de peine… »). Étonnez-vous après cela, que les chagrins fassent grossir! C’est pourquoi nous recherchons pendant tout le reste de notre vie, dès que nous sommes en phase de stress, et d’autant plus que le stress est prononcé, à nous sécuriser en mangeant un aliment, si possible sucré. L’appétit n’est pour rien dans l’affaire, ni la quantité de calories intégrées, ni même la qualité culinaire. LE LANGAGE DES ALIMENTS De la même façon que les fleurs ont un langage, les aliments possèdent une signification symbolique. L’imaginaire, les fantasmes, jouent un grand rôle dans nos habitudes alimentaires… et dans ce que nous offrons à manger et à boire à nos invités ou aux personnes que nous voulons séduire. Les publicitaires le savent bien. Le vin, et avec lui l’alcool, a revêtu dans nos pays latins en particulier, une image de vigueur et de virilité, due en grande partie à l’assimilation dans la religion chrétienne du vin et du sang, sources de vie. Les boissons alcoolisées sont donc devenues et restent un symbole de puissance et de masculinité, en même temps que d’échange et de convivialité. Le lait représente aussi un aspect symbolique de l’enfance et du sein maternel, de l’innocence et de la pudeur virginale. C’est pourquoi les adolescents le refusent souvent au profit de boisson plus « sexualisées ». La viande, au contraire se trouve très fortement valorisée à partir de la puberté. Symbole de force et de virilité. De la proie abattue et ramenée au camp par le chasseur, le protecteur de la famille, de la tribu, ce n’est pas par hasard que la coutume veut que ce soit le père, le maître de la maisonnée qui découpe la viande à table et l’offre aux invités. La seconde raison qui nous pousse à manger plus que de raison après un chagrin d’amour est que nous cherchons dans notre alimentation les moyens de combattre l’état dans lequel nous a plongés notre déception. Le sucre et toutes les confiseries sont synonymes de la fête, mais aussi de l’enfance et avec elles du plaisir oral. Ce n’est pas sans raison, que nous suçons volontiers des sucreries lorsque nous sommes tristes. À l’inverse du vin, le sucre apparaît beaucoup plus comme un symbole féminin, voire maternel : n’offrons-nous pas souvent des bonbons à celui ou celles que nous aimons, ou voudrions serrer dans nos bras? Sentiment de solitude, tristesse, ennui, langueur, impression de fatigue extrême, de vide intérieur et de lassitude : nous avons besoin de stimulants pour combattre tout cela. C’est pourquoi nous nous rabattons, faute d’excitants amoureux, sur ce que les aliments peuvent nous apporter. Un chagrin d’amour peut engendrer la boulimie.