une fille très nature - Bien Boire en Beaujolais

Transcription

une fille très nature - Bien Boire en Beaujolais
Balagny
une fille très nature
3,5 ha en Fleurie
70 % de vieilles vignes de 50 à 90 ans
Rendement de 29 hl/ha
Label « Nature & Progrès »
Signe particulier : la seule à produire « En Rémont »
S
es amis la trouvent « fonceuse » et c’est rien de le
dire. Car il en faut de la volonté pour s’installer en
pleine crise viticole. « Pour vivre heureux, vivons
cachés » pourrait être sa devise. Ce petit bout de femme
à l’énergie communicante a choisi les hauts de Poncié sur
la commune escarpée de Fleurie comme bout du monde.
Elle est heureuse Julie, d’avoir épousé ce pays Beaujolais
d’où parfois elle caresse du regard la chaîne des Alpes
et son Mont Blanc. Son regard bleu brille de sincérité
quand elle vous parle de sa région d’adoption. Elle assume complètement le fait d’être une femme vigneronne
indépendante.
Ses vingt premières années seront parisiennes. Mais la
campagne l’attire. Fortement. Si au départ, et après une
année de prépa, elle voulait faire psychomotricienne, elle
passera finalement en apprentissage un BTS en viticulture-œnologie dans un grand domaine des PyrénéesOrientales qui travaille avec beaucoup de chimie. Juste à
côté, il y a une petite ferme en bio, on lui fait goûter… une
tomate. Ce sera le déclic qui lui donnera l’envie de faire
du bio. Elle commence la « bio » en 2004 sur un domaine
des Costières de Nîmes où elle apprendra la vigne, la cave,
jusqu’à la commercialisation. Après onze années passées
dans le sud de la France, elle cherche des vignes dans le
Beaujolais ou dans le Jura, « par affinité gustative » selon
ses termes. Lors d’une dégustation de vins qu’elle organise
sur Nîmes, elle rencontre Yvon Métras, vigneron de Fleurie. Elle lui fait part de son désir de trouver des vignes.
Quelques temps plus tard, il la rappelle et lui propose de
reprendre en location trois hectares de bois qui serviront
au chauffage de la maison mais surtout une grande parcelle, 3,2 hectares en appellation Fleurie. Ce sera un nouveau départ, de zéro sans aucun emprunt.
De son cru, naissent 12 000 bouteilles avec un rendement
moyen de 29 hectolitres par hectares car ce mini domaine
est composé à 70 % de vignes âgées de 50 à 90 ans. Fait
rare en Beaujolais, elle vend 90 % à l’export : Japon, Australie, Québec et États-Unis. Et tout cela sans jamais y
avoir posé ses bottes ! Les pays européens sont aussi servis. « Les 10 % restants passent en consommation personnelle », dit-elle en rigolant, et un peu pour les clients
français, bien sûr. Selon elle, « la bio, c’est comme une
crème de jour. C’est un soin apporté à la vigne et donc au
vin. Je suis contre les chapelles mais je respecte les convictions de chacun ». Elle est déjà sous label avec « Nature
et Progrès » et elle aura la certification Bio en 2012 mais
elle ne mettra jamais son label Bio car elle pense que ça la
regarde, elle et seulement elle. « Je travaille en vendanges
entières avec une macération traditionnelle beaujolaise
mais à froid », précise-t-elle. La cuverie et son fameux
pressoir en bois à cliquet sont installés à dix minutes de
sa maison. À chaque pressée, des vieux vignerons du pays
viennent goûter le paradis et se remémorent le temps
d’une vie passée au rythme de la vigne.
En 2009, l’année de son lancement, sa vigne sera grêlée à
60 %. Elle comprend que la nature la guide vers d’autres
chemins. Sa première cuvée se fera avec ce qui n’a pas
été grêlé. En 2010, avec 25 hectolitres, elle peut enfin
différencier deux cuvées entre ses jeunes ceps et ses très
vieilles vignes. Elle est par ailleurs la seule à produire une
cuvée « En Rémont » sur Fleurie.
« Pour moi, le vin c’était à la messe quand je demandais
à mon père “qu’est-ce qu’il boit le monsieur ?” ». Les
repas de son enfance lui reviennent en mémoire quand
elle évoque la bouteille du dimanche qui supplantait la
cuisine et tous les préparatifs du dîner. Maintenant c’est
elle qui les prépare. « Ce soir, c’est mon Allemand qui débarque » lance-t-elle goguenarde. Chez Julie, il n’y a pas
de télévision mais il y a toujours quelqu’un de passage.
« Si j’ai des enfants, ils feront ce qu’il voudront. Le vin, s’est
ma passion. Pas celle de tout le monde. Mais je ne voudrais pas qu’ils fassent un métier sans passion ». À bon
entendeur… Son projet de cœur serait d’installer, à son
tour, un jeune en mettant son matériel à disposition. Vous
avez dit fonceuse ?
f leu r i e
julie
5
«
La bio, c’est comme une
crème de jour. C’est un
soin apporté à la vigne
et donc au vin.
»