Le syndicalisme autonome réduit à la clandestinité

Transcription

Le syndicalisme autonome réduit à la clandestinité
RÉPRESSION ANTISYNDICALE EN ALGÉRIE
P
endant plus de trente ans,
il n’a existé qu’une seule
confédération intersectorielle des syndicats algériens :
l’Union Générale des Travailleurs d’Algérie, liée au parti
unique, le FLN. Ce n’est donc qu’en
marge de l’UGTA, et dans la continuité des mouvements sociaux des
années 80 et 90, qu’ont pu émerger des syndicats indépendants du
pouvoir. Dans le secteur éducatif, le
SATEF est ainsi le premier à avoir
obtenu l’autorisation du gouvernement suite à la reconnaissance du
pluralisme politique et syndical par la
nouvelle constitution de 1989. Mais
les événements du début des années
90, et la guerre civile à partir de 92,
ont sonné le glas de cette période
de démocratisation. L’instauration
de l’état d’urgence, toujours en
vigueur aujourd’hui, permet de briser tous les mouvements sociaux.
Car, bien que constitutionnels, ils
sont déclarés illégaux en tant que
menaces pour l’ordre public !
Dans le secteur de l’éducation, de
nombreux mouvements ont néanmoins eu lieu depuis les années 90.
Mais c’est en 2003 et 2004 qu’ils
ont connu leur apogée. Les revendications portaient sur les salaires
Le syndicalisme autonome
réduit à la clandestinité
L’invitation de nos camarades du SNAPAP [1] a permis à la délégation de
l’union syndicale Solidaires de se rendre compte de la gravité des entraves
à la liberté syndicale en Algérie. Un constat accablant, confirmé par les
responsables des syndicats autonomes de notre secteur professionnel [2].
[3] et les conditions de travail mais
aussi sur la reconnaissance de la
représentativité des syndicats autonomes, qui conditionne l’autorisation de se réunir et de lancer des
préavis de grèves. Cette représentativité est réelle. En 2003, quand
les autonomes entamèrent leur
mouvement, le CLA et le CNAPEST
estiment que 94% des enseignants
du secondaire se sont mobilisés à
Alger. Les autonomes sont maintenant présents sur tout le territoire
national et ont étendu les coordinations, au départ informelles, à
l’ensemble des villes du pays.
En retour, la répression a pris de
multiples formes : suspensions sans
traitement des responsables syndicaux, et ce depuis plusieurs années
pour certains ; procès prolongés le
plus longtemps possible, avec les
frais de défense que cela implique ;
gardes à vues, menaces physiques et
harcèlement moral par les hommes
du gouvernement mais aussi par les
gros bras de l’UGTA qui n’entend
pas se laisser dépouiller de ses privilèges (bien que certains autonomes affirment qu’il existe des
franges non inféodées et militantes
dans cette fédération, point qui ne
fait pas consensus entre eux…).
Le gouvernement fait également
traîner l’examen des dossiers de
représentativité et s’efforce de corrompre les membres des bureaux
des autonomes. Quand il ne peut
les contrôler, il favorise la création de
bureaux parallèles afin de discréditer ces syndicats et d’empêcher leur
développement. Certains se sont vu
retirer leurs locaux alors que toute
réunion dans les lieux publics leur
est interdite ! Les autonomes doivent fonctionner sans moyens, ce
qui ne représente pas le moindre
des handicaps quand il faut faire
face au harcèlement judiciaire.
Enfin, pour exemple, quand la délégation Solidaires est arrivée dans
les locaux quasi-clandestins du
SNAPAP, les lignes téléphoniques
ont soudainement rencontré des
«dérangements temporaires»… ce
qui semble absurde dans la mesure
où leurs membres communiquent
par portables. Tous les moyens sont
bons, donc, pour rappeler l’omniprésente surveillance de la police.
La demande de solidarité internationale est très forte chez nos camarades algériens, car elle permettrait
certainement de limiter les ardeurs
antisyndicales du pouvoir. C’est ce
que nous ont confirmé les journalistes indépendants d’El Khabar [4]
et d’El Watan, dont la vigilance
constitue aujourd’hui la seule protection des syndicalistes contre l’aggravation de la répression.
Nous saluons le courage de nos
camarades autonomes algériens,
et nous les assurons de notre soutien. Il va de soi que ces premières
rencontres seront suivies d’efforts
pour consolider les liens qui ont
été noués. Le système éducatif
algérien, semblable au nôtre, est
également en proie à un démantèlement libéral, comme en
témoigne le transfert des secteurs
de la formation vers le privé prévu
dans les semaines à venir. Il y a fort
à parier que cela serve de test pour
l’application de ce projet de l’autre
côté de la méditerranée…
Commission fédérale International
[1] Syndicat National Autonome des Personnels de l’Administration Publique
[2] Les 28 et 29 novembre 2006, à Alger, le
délégué de Sud éducation s’est entretenu avec les représentants des syndicats suivants : Conseil National Autonome des Personnels de l’Enseignement
Secondaire et Technique, Conseil des
Lycées d’Alger, Syndicat National des
Travailleurs de l’Education, Syndicat
Autonome des Travailleurs de l’Education
et de la Formation, Conseil National de
l’Enseignement Supérieur et BCN CNES
(administration et résidences universitaires) ainsi qu’avec d’autres syndicats
du secteur de la formation, notamment
dans le domaine du paramédical.
[3] Un enseignant gagne environ 200 euros
par mois après une dizaine d’années
d’exercice alors que le niveau de vie à
Alger est presque l’équivalent de celui
de Marseille.
[4] 500000 exemplaires dans tout le
Maghreb.
Solidarité universitaire avec les étudiants sans-papiers
A
International
u mois de novembre 2006,
la préfecture de ClermontFerrand remettait une Invitation à Quitter le Territoire
à 26 étudiants étrangers
venus faire renouveler leur carte
d’étudiant, alors qu’ils avaient payé
les frais d’inscription. Pour chacun
d’eux, la préfecture invoquait le
manque de sérieux et d’assiduité
dans leurs études.
Avec le Réseau Universités Sans
Frontières (RUSF 63), les enseignants, les personnels de l’Université, les étudiants et les militants de
RESF 63, ont rapidement organisé
une mobilisation à la fac (lettres de
soutien, certificats d’assiduité, lettres
Clermont-Ferrand, à l’Université et
au Conseil National de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.
La mobilisation paye puisque 12 des
17 étudiants ayant déposé un recours
gracieux à la préfecture ont, à ce jour,
reçu une réponse favorable.
La lutte n’est pas finie pour
autant, car c’est la régularisation de tous les étudiants menacés d’expulsion qu’il faut obtenir.
Sud éducation Puy-de-Dôme
Motion adoptée au CNESER
par 26 votes favorables et 2 abstentions
Le Conseil National de l’Eenseignement Supérieur et de la Recherche, réuni le 18
décembre 2006,
◆ récuse l’ingérence de services dépendant du Ministère de l’Intérieur dans l’appréciation du cursus des étudiants, quels qu’ils soient. Seules les équipes pédagogiques
et les autorités universitaires, non consultées dans le cas de ces étudiants, sont à
même d’évaluer la progression réelle des étudiants ou la pertinence des orientations
et réorientations choisies.
◆ souligne le caractère discriminatoire des critères utilisés, qui aboutissent à pénaliser
gravement des étudiants étrangers dont le parcours universitaire n’est pas différent
de certains étudiants français.
◆ dénonce la brutalité d’une mesure qui frappe des étudiants en cours d’année universitaire, sans leur laisser le temps d’achever l’année entreprise.
Le CNESER rappelle son attachement au développement des échanges universitaires
et demande que la volonté affirmée par le gouvernement d’un accroissement de l’attractivité internationale des universités françaises se traduise par une augmentation
des moyens permettant l’accueil d’un nombre plus important de jeunes étrangers, et
non par des sanctions à l’encontre de ceux qui rencontrent des difficultés.
Le CNESER estime que les mesures telles que celles prises à l’encontre de ces étudiants
portent gravement atteinte à l’image du système universitaire français à l’étranger. Il
invite de manière pressante le Ministre de l’Éducation nationale à intervenir en urgence
pour obtenir l’abandon des procédures engagées par la Préfecture de la Région Auvergne
contre ces étudiants et, plus largement, le respect des compétences pédagogiques
des équipes enseignantes.
Joignez/re-joignez nous
8
de protestation, entrevues à la préfecture, manifestations, pétitions,
parrainages républicains…) afin que
tous puissent continuer leurs
études. Pour obtenir l’annulation
de ces mesures discriminatoires, les
enseignants de l’Université ont
rédigé des motions qui ont été
votées au Conseil Municipal de
éducation / Le journal / numéro 22 / mars 2007
Fédération des syndicats Sud éducation :
17, bd de la Libération 93200 Saint-Denis
Téléphone : 01 42 43 90 09 - Fax : 01 42 43 90 32
e-mail : [email protected]
Prenez contact avec votre syndicat local
ou avec la fédération sur notre site :
www.sudeducation.org
Imprimerie Rotographie, Montreuil