Bacs blancs

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Bacs blancs
3 Le théâtre : texte et représentation
2 . Enjeux de la représentation dans le théâtre baro qu e
et le drame romantiqu e
BACBLANC
B ◗ Le drame romantique
! page 193 du manuel
Questions
1. Théâtre baroque et drame romantique présentent bien des similitudes :
• Une même esthétique de l’excès (outrance des personnages et des situations)
– excès des sentiments, souffrance de Sigismond (Calderón), souffrance de Chatterton (Vigny)
– excès de violence, Sigismond « devenu un volcan, un Etna », « arracher de ma poitrine des lambeaux de mon
cœur » (l. 26-27), Lorenzo (Musset) « je te saignerai pourceau » (l. 8), « ouvre-lui les entrailles » (l. 9)
– excès des situations choisies, mage et illusion pour Corneille.
Tous les choix se déterminent comme des ultimatums (Calderón, Vigny)
•Une même liberté et une même richesse d’écriture
– langage métaphorique, emphatique (Calderón, Corneille, Musset)
– méfiance envers la vraisemblance (Hugo, Corneille) et la bienséance (Hugo, Corneille, Musset).
2. La réponse est subjective, cependant, le personnage de Sigismond dans La vie est un songe de Calderón, est
un personnage émouvant car il souffre et laisse libre cours aux épanchements de son cœur, enfermé depuis toujours dans une tour, loin des regards et de l’humanité : « quel crime j’ai commis contre vous en naissant » (l 2-3).
Seul contre tous, au-delà de sa douleur, apparaissent les notions d’injustice et d’infortune liées à tout homme sur
terre (« Quelle loi, quelle justice, quelle raison permet de refuser à un homme le charmant privilège, le droit précieux que Dieu accorde… ») à la nature tout entière (l. 27-28). Comparant la nature à son être déchiré, il la prend
pour exemple et revendique au même titre que ses hôtes « oiseau », « bête sauvage », « poisson », le droit
d’être libre : « Et moi doué de plus de vie, dois-je avoir moins de liberté ? » (l.25).
Travaux d’écriture
1. Dissertation
La problématique qui se dégage du sujet est la suivante :
Puisque l’on parle de représentation, il s’agit bien de définir si le spectateur est en position de croire ou de ne
pas croire à ce qu’il voit ?
I. LA REPRÉSENTATION EST UNE FORCE, UN ATOUT, LE SPECTATEUR EST EN POSITION D’ADHÉRER.
1. L’histoire authentifie
La mise en scène de situations historiques (Musset, Florence au XVIe siècle, la famille Médicis).
2. Le costume atteste
Costumes et indications sur les caractères sont le désir d’inscrire le personnage dans une réalité historique et
psychologique (Vigny).
3. L’acteur incarne
Bien vivant, il crédibilise l’action et la pièce, il s’inspire de son vécu (Calderón)
4. La scène rapproche
La proximité scène-public laisse davantage passer l’émotion que l’écran télévisé. Le spectateur n’est pas insensible à des sentiments universels comme l’amour, la haine, la passion, le sentiment d’injustice…
3. Le théâtre : texte et représentation 1
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E N J E U X D E L A R E P R É S E N TAT I O N D A N S L E T H É Â T R E B A R O Q U E E T L E D R A M E R O M A N T I Q U E
B. Le drame romantique
II. LA REPRÉSENTATION EST UN OBSTACLE, LE SPECTATEUR N’OUBLIE JAMAIS QU’IL EST AU SPECTACLE.
1. Langage codé (règles, genres, registres), vers (Corneille), langage métaphorique (Vigny, Corneille).
2. Situations extrêmes, intrigues compliquées ( Musset).
3. Artifice des moyens (décors, lumières)
III. LE THÉÂTRE NE SE POSE PAS LA QUESTION DE LA VRAISEMBLANCE
1. Il obéit à des conventions ou les fait voler en éclat (Hugo dénonçant les classiques).
2. Il sert le texte comme il l’entend (Vigny auteur et déjà metteur en scène ; décalage, contre-emploi et
anachronismes souhaités par un metteur en scène).
3. Il laisse le spectateur choisir ce qu’il voit, réinventer sa propre histoire, tout est permis y compris les
confusions (L’Illusion comique de Corneille).
2. Commentaire
Le monologue de Sigismond dans La vie est un songe est un monologue de la démesure propre à l’esthétique
baroque. Du néant de sa vie, de ce dont la fatalité le vide, Sigismond sécrète un trop plein.
I. UN « JE » BAROQUE
1. Un monologue à plusieurs voix
Sigismond est partout et ne s’adresse qu’à lui-même, les autres ne lui servent qu’à se comparer.
– Prolifération de l’ego
« je » (12 occurrences), « moi » ( 5 occurrences), Sigismond parle de lui à la 3e personne « Hélas ! malheureux !
hélas infortuné ! » (l. 1). Il se compare aux autres « Les autres ne sont-ils pas nés comme moi ? » (l. 7). Il invoque
le ciel « Ô ciel » ( l. 2-6).
2. Une plainte mise en scène
– Une souffrance musicale
La plainte ne s’exprime que sous la forme lyrique, alexandrin « quel crime j’ai commis contre vous en naissant »
(l. 2), leitmotiv, refrain « Et moi » (l. 16-20-24)
– Une souffrance qui cherche à séduire
Par les exemples, « bête sauvage », « poisson », « ruisseau », « oiseau ».
Par le lexique enrubanné « beauté suprême » (l.9), « plumes » (l.10), « cristal » (l. 29)…
3. Le théâtre : texte et représentation
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II. UNE ESTHÉTIQUE DE LA DÉMESURE
1. Un éclairage tragique
– Vie placée sous le signe de la fatalité, de l’injustice, de la solitude « malheur » (l. 6) « malheureux » (l. 1) « infortuné » (l. 1) « crime […] d’être né » (l. 5).
– Vision manichéenne du monde, antithèses contenues dans les exemples choisis, vision d’un monde juste et
injuste, bon et mauvais.
2. Des émotions qui submergent
Ponctuation, multiplicité des exclamations et des questions rhétoriques.
Métaphores aquatiques : poisson « avorton des vagues et des algues marines » (l.17), « bateau revêtu d’écailles »
(l.18).
3. Un discours précieux
Métaphores multiples « fleur qui a des plumes », « bouquet qui a des ailes » (l. 10), « il fend les plaines de l’air »
(l. 11), « serpent d’argent » (l. 22).
Lexique recherché « châtier » (l. 7), « hardie » (l. 15), « embaumé » (l. 23)….
Redondances « couleuvre » (l. 21) « serpent » (l. 22), « volcan » « Etna » (l. 26).
Accumulation l. 27 à 29
Répétitions multiples de « Et moi […] dois-je avoir moins de liberté ? » (l. 12-16-21-25)
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3. Écriture d’invention
Pistes de réponse :
• Lieu : une tour perdue dans la nature, loin de toute vie, description attendue de la tour, délabrée…
• Lumières : sombres, atmosphère pesante, étouffante.
Sigismond :
• Son costume est important car il caractérise le personnage, en haillons, sale, amaigri .
• Sa voix doit témoigner de la douleur, tonalité changeante.
• Ses déplacements et ses gestes doivent être précisés.
Pistes d’évaluation :
• On évaluera la qualité d’écriture, la richesse stylistique.
• L’imagination et la cohérence seront privilégiées.
• On tiendra compte de l’argumentation de l’élève pour justifier ses choix.
• Les anachronismes seront tolérés s’ils sont justifiés et présentés comme un ressort, un éclairage différent,
une efficacité dramatique.
• On sanctionnera la pauvreté de l’argumentation
3. Le théâtre : texte et représentation 3