discours d`hommage - Ensemble pour Montreuil

Transcription

discours d`hommage - Ensemble pour Montreuil
Discours d’Ibrahim Dufriche Soilihi, Premier Adjoint, à l’inauguration de la stèle en
hommage aux victimes civiles et militaires de la Guerre d’Algérie, Maroc et Tunisie.
Monsieur le député,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Maire Honoraire,
Monsieur le Président de la maison des combattants et de la Mémoire,
Mmes et Messieurs les responsables d’associations et notamment de la FNACA,
Chers Montreuillois,
Je dois tout d’abord vous prier d’excuser Patrice Bessac, maire de Montreuil, qui ne pouvait
être là ce matin et qui m’a donc demandé de le représenter.
Le 18 mars 1962 à Evian, les délégations française et algérienne aboutissaient à un accord,
et le 19 mars le général Ailleret, commandant en chef en Algérie, ordonnait le cessez le feu.
Pour les militaires du contingent, cela signifiait le retour prochain dans la famille. Certains
avaient passé 27 mois sur la terre algérienne. Certains revinrent blessés, et nombreux,
traumatisés.
Depuis le début des combats, 30.000 soldats français, 400 000 civils avaient perdu la vie, et
parmi eux 28 jeunes montreuillois.
1962 marque bien une rupture profonde dans l’histoire de France, la fin d’une grande
guerre, d’une sale guerre aussi, la dernière guerre coloniale française. Ces événements sont
toujours au cœur de la relation très complexe qu’entretiennent la France et l’Algérie, une
relation faite d’ombre et de lumière.
Il fallut attendre 1999, pour qu’une loi accepte le terme de « Guerre d’Algérie », et le 6
décembre 2012 pour que le Parlement reconnaisse, après des années d’atermoiements, que
le 19 mars était bien la journée nationale en mémoire des victimes civiles et militaires de la
guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc.
L’édification de cette stèle, est le fruit de la volonté commune de rendre hommage à toutes
les victimes, civiles et militaires, volonté que vous avez porté avec ardeur cher président
Michel Nicolas, avec le soutien de Dominique Voynet et de Razzy Hammadi. Cette stèle est la
marque décisive d’une volonté profonde qui vous anime, celle de la paix. Soyez en remercié.
Car rendre hommage aux victimes n’est pas seulement une reconnaissance pour toutes
celles et ceux qui ont payé le prix de leur vie, c’est aussi une pierre indispensable à l’édifice
de la mémoire collective, et un chemin pour la réconciliation.
Respecter toutes les mémoires, sans en détruire aucune.
Car trop d’années se sont écoulées au cours desquelles l’occultation a prévalu. Trop
d’années durant laquelle perçaient régulièrement et qui ressurgissent encore parfois,
ressentiments et rancœurs.
La guerre a marqué au fer rouge tous ceux qui, sur les deux rives, y prirent part. Bien
qu’aucun bilan chiffré ne puisse encore aujourd’hui être complètement vérifié, comment ne
pas citer les centaines de milliers de morts, les milliers de villages rasés, l’horreur de la
torture, et un traumatisme durable. Mais cette guerre a été atroce aussi pour les harkis,
dont plusieurs dizaines de milliers ont été massacrés à l’issue du conflit. Elle l’a été enfin
pour les civils européens, dont des milliers ont été tués, et des dizaines de milliers d’autres
arrachés à la seule terre qui leur ait été un jour familière.
Toutes les victimes de ce conflit injuste, sans distinction, méritent aujourd’hui les honneurs
de notre mémoire. Tous les crimes commis, quels qu’en aient été les auteurs, exigent
aujourd’hui la transparence et le souvenir. Toutes les personnes qui ont gardé de cette
tragédie un traumatisme profond méritent notre compassion.
Le 19 mars, en tant que date symbolique de la fin de ce conflit, doit tous nous appeler à un
recueillement et à un souvenir partagés et digne.
Bien sûr, il y eut encore des violences après le 19 mars 1962. Des crimes ont été perpétrés
au-delà de cette date. Et nous pensons aussi aujourd’hui aux trop nombreux hommes et
femmes qui sont tombés après cette fin officielle du conflit.
L’heure est aujourd’hui venue de la reconnaissance historique objective, transparente et
intransigeante des crimes de l’Histoire, elle nous ouvre à tous le chemin de l’apaisement et
de la paix. La guerre d’Algérie est officiellement terminée depuis 52 ans, plus d’un demi de
siècle, et c’est bien connu, souvent la mémoire s’efface à mesure que les années passent. Il
nous appartient désormais d’y faire une large place, pour les générations futures, dans les
programmes d’enseignement et les manuels scolaires.
L’heure nous engage à en tirer les leçons pour bâtir désormais une relation de paix, d’égal
respect et de solidarité sincère.
Car comme l’écrivait Albert Camus « Seule la vérité peut affronter l'injustice. Si l'homme
échoue à concilier la justice et la liberté, alors il échoue à tout. »