Etude des intérêts professionnels chez les élèves à haut potentiel
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Etude des intérêts professionnels chez les élèves à haut potentiel
Université de Provence UFR « Psychologie, sciences de l’éducation » Département de psychologie développementale et différentielle Travail d’étude et de recherche Présenté pour l’obtention du Decop ETUDE DES INTERETS PROFESSIONNELS CHEZ LES ELEVES A HAUT POTENTIEL INTELLECTUEL Par Florence Manfé Mario Garcia Sous la direction de Pierre-Yves Gilles Professeur Année universitaire 2007-2008 29 avenue Robert Schuman 13621 Aix-en-Provence CEDEX 1 REMERCIEMENTS Nous remercions : Monsieur Michel Garot, chef d’établissement du lycée privé Saint Joseph à Avignon, pour nous avoir permis d’effectuer notre recherche auprès des élèves de seconde ; Les parents d’élèves qui nous ont accordé leur autorisation pour la participation de leurs enfants et à ces derniers qui ont permis à leur manière à ce travail d’exister ; Madame Marie Savornin, responsable du suivi des élèves à haut potentiel intellectuel pour son accueil, son contact chaleureux et sa disponibilité ; Monsieur Pierre-Yves Gilles, Professeur de psychologie, pour son aide et ses conseils précieux tout au long de la réalisation de ce travail. SOMMAIRE INTRODUCTION………………………………………………………………………... 1 I- CADRE THEORIQUE………………………………………………………………... 3 A- Le haut potentiel intellectuel……………………………………………….... 3 1- Terminologie……………………………………………………………. 3 2- Historique……………………………………………………………….. 4 B- Caractéristiques générales des enfants à haut potentiel intellectuel…….... 6 1- Le haut potentiel intellectuel (HPI) et la mesure du quotient intellectuel. 6 2- Les caractéristiques précoces des hauts potentiels intellectuels……….... 8 3- Le fonctionnement intellectuel des hauts potentiels intellectuels et les difficultés scolaires……………………………………………………... 9 C- Les intérêts professionnels…………………………………………………... 11 1- La notion d’intérêt………………………………………………………. 11 2- Le développement des intérêts professionnels………………………….. 13 3- Le modèle de Holland…………………………………………………... 14 4- L’intelligence et les intérêts professionnels…………………………….. 15 II- PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES………………………………………….. 17 A- Problématique………………………………………………………………... 17 B- Hypothèses…………………………………………………………………..... 18 1- Hypothèse générale……………………………………………………… 18 2-Hypothèses opérationnelles……………………………………………… 18 III- METHODOLOGIE…………………………………………………………………. 19 A- Participants…………………………………………………………………... 19 B- Matériel………………………………………………………………………. 20 1- L’épreuve des dominos…………………………………………………. 20 2- Le questionnaire d’intérêts Hexa 3D…………………………………… 20 C- Procédure……………………………………………………………………... 21 IV- RÉSULTATS………………………………………………………………………... 23 A - Épreuve des dominos………………………………………………………... 23 B- Questionnaire d’intérêts professionnels Hexa 3D…………………………. 25 1- Hypothèse 1 : les HPI ont des intérêts plus différenciés que les non HPI 25 2- Hypothèse 2 : les HPI présentent des intérêts plus consistants que les Non HPI…………………………………………………………………. 26 3- Hypothèse 3 : les HPI présentent des intérêts plus cohérents entre les les domaines (activités, qualités, professions) que les non HPI………… 27 C- Comparaison des scores des deux groupes (HPI et non HPI) à l’épreuve des dominos et aux six types de profil (RIASEC)………………………….. 27 D- Organisation intragroupe des différents types du RIASEC……………..... 30 E- Profils hexagonaux…………………………………………………………… 32 1- Les différents profils types de Holland…………………………………. 32 2- Les profils du groupe HPI par domaine et globalement………………… 33 3- Les profils du groupe non HPI par domaine et globalement……………. 34 4- Les profils superposés des HPI et non HPI par domaine et globalement.. 35 F- Le prestige et le genre………………………………………………………... 36 V- DISCUSSION…………………………………………………………………………. 36 A- Observations générales………………………………………………………. 36 B- Le haut potentiel et la stabilité des choix d’intérêts professionnels………. 37 C- Niveau d’intelligence générale et profils RIASEC…………………………. 38 D- L’influence d’autres variables sur le choix des intérêts professionnels…. 40 E- Apport de notre étude à la pratique du Conseiller d’Orientation Psychologue (COP)………………………………………………................... 41 CONCLUSION…………………………………………………………………………… 43 BIBLIOGRAPHIE……………………………………………………………………….. 44 ANNEXES………………………………………………………………………………… 50 1 INTRODUCTION Dans sa pratique auprès des établissements scolaires, le conseiller d’orientation psychologue accompagne les élèves dans la construction de leur projet personnel et professionnel. A ce titre, les questionnaires d’intérêts sont un des outils les plus utilisés. Il effectue également des bilans psychologiques, servant entre autres à mesurer l'efficience intellectuelle et à détecter le niveau d’un élève dans sa classe d’âge. Ce niveau sert d’indicateur de retard ou d’avance intellectuelle (précocité). Dans le premier cas, l’élève est orienté vers une Section d' Enseignement Général et Professionnel Adapté (SEGPA), une Unité Pédagogique d' Intégration (UPI), un Institut Médico-Éducatif (IME) ou un Service d’Éducation et de Soin Spécialisés A Domicile (SESSAD) adaptés, avec l’objectif d’obtenir un diplôme de niveau V. Ce dernier bénéficie d'enseignements pratiques (travaux en ateliers, stages) qui lui permettent de définir ou d'affiner son projet professionnel. Dans le second cas, l’élève et sa famille sont confrontés au manque de dispositifs ou de structures spécifiques, malgré les difficultés d’adaptation, voire l’échec scolaire. C’est cette population d’élèves appelés « précoces » ou « surdoués » dans le langage courant qui nous a interpellés et conduits à mener notre recherche sur les intérêts professionnels en lien avec la précocité intellectuelle. A cet effet, nous nous appuyons sur les travaux de Lubinski et de ses collaborateurs (Lubinski, Benbow & Ryan, 1995), publiés suite aux recherches menées aux Etats-Unis dans le cadre du programme « Study of Mathematically Precocious Youth » (SMPY) de l’université John Hopkins. Il s'agit d'une étude longitudinale concernant des jeunes à haut 2 potentiel dont l’objectif est de vérifier les hypothèses sur la précocité d'apparition d'intérêts professionnels et la stabilité des choix vocationnels. Partant de ces résultats, nous nous intéressons aux différences intergroupes, avec constitution d'un groupe contrôle (ce qui n'est pas le cas dans l'étude de Lubinski), afin de vérifier l'hypothèse de précocité d'apparition d'intérêts professionnels auprès d'une population française. En somme, il s'agit de voir si la précocité intellectuelle s'accompagne de précocité vocationnelle. A la différence de Lubinski et al. (1995), notre étude est une approche comparative. Mais avant cela, nous allons aborder quelques points théoriques à l’aide de travaux d’auteurs sur la précocité intellectuelle et les intérêts professionnels. 3 I- CADRE THEORIQUE A- Le haut potentiel intellectuel 1- Terminologie Précocité intellectuelle, haut potentiel intellectuel, surdoué, génie… sont quelques uns des termes utilisés pour désigner les personnes qui manifestent des capacités intellectuelles exceptionnelles. La terminologie diffère suivant les continents, les chercheurs et les auteurs. Dans la littérature américaine, c’est le qualificatif gifted qui est utilisé et qui peut se traduire par « doué ». Cette signification reflète l’idée, depuis l’antiquité et jusqu’à une période récente de l’histoire, que les talents exceptionnels sont un don des dieux, une grâce. Au Canada et dans les pays francophones on parle de gifteness, c’est-à-dire de « douance ». En Europe, c’est l’expression high ability qui veut dire « aptitude élevée » et désigne des dispositions investies dans un domaine d'expertise particulier, ce qui n’est pas le cas de « haut potentiel » qui renvoie plutôt à des dispositions intellectuelles générales (par exemple un QI élevé). La « précocité » est un terme plus neutre et renvoie à l’avance observée dans le développement, sans préjuger de l’origine de cette avance. Elle suggère toutefois que les performances exceptionnelles ne le sont pas que par l’âge auquel elles apparaissent. Dans la langue française, « surdoué » est le terme le plus utilisé, aussi bien par le grand public que par les média; il est la traduction du terme anglo-saxon gifted ou supergifted ; « précoce » est souvent utilisé à propos des enfants et parfois « talent », qui renvoie à des productions exceptionnelles dans un domaine d’expertise particulier : littérature, musique, sport ou autre domaine d'excellence. Au regard de cette abondance de qualificatifs, on peut alors se demander lequel caractérise de façon la plus exacte ces personnes, puisque tous renvoient à tel ou tel aspect de 4 capacités cognitives exceptionnelles. Cette question renvoie aux différences interindividuelles et au fait que chacune de ces personnes est un individu unique qui ne peut être assimilé à un autre qu’au regard de sa précocité intellectuelle. Dans notre recherche, nous avons choisi d’utiliser l’expression « haut potentiel intellectuel » (HPI) pour qualifier les élèves qui constituent notre population expérimentale. 2- Historique Les travaux et écrits pionniers sur les enfants surdoués relèvent plus du domaine de la psychiatrie que de la psychologie ou de la pédagogie (Terrassier, 1981), pourtant ils concernent l’inadaptation de cette population au système scolaire normalisant. Parmi les auteurs de ces œuvres, nous pouvons citer Binet (1909) qui parle d'écoliers "trop intelligents" qui ne profitent pas de l'enseignement tel qu'il est imposé. En 1920, Claparède s'indigne d'une école qui ne veut répondre qu'aux besoins de l'élève moyen et qui malmène les autres. Le professeur Lafon, psychiatre infantile, suite à une expérience avec 15 enfants présentant des "troubles psychiques déterminés par le développement précoce et inégal des aptitudes" note une évolution harmonieuse de ces enfants grâce à un enseignement adapté (Lafon, 1950). Lubart (2006) cite les travaux d’autres psychiatres, comme Kohler (1963) et De Ajuriaguerra (1970), qui se sont également intéressés aux enfants à haut potentiel intellectuel et qui ont produit des écrits sur les psychopathologies liées à l’intelligence élevée. D’après Kohler, le taux de troubles psychiques, voire psychiatriques, serait moindre dans cette population, mais dans le même temps, ils consultent moins et ont probablement de meilleures capacités à gérer ces difficultés psychologiques. Pour De Ajuriaguerra, c’est le contraire : il y aurait des troubles psychiques spécifiques. 5 En 1971, Terrassier fonde l' Association Nationale Pour les Enfants Intellectuellement Précoces (A.N.P.E.I.P) pour une meilleure connaissance de l'enfant surdoué et de ses besoins, auprès du grand public, des enseignants et du Ministère de l'Education. Une autre association est créée en 1981: l'Association nationale et internationale de Loisirs, Rencontres et d'Education pour les enfants et adolescents Précoces (A.L.R.E.P), agréée par le Ministère de la Jeunesse et des sports. Par la suite, plusieurs autres associations telles que l’Association Française pour les Enfants Précoces (AFEP), l’Institut du Surdouement, Formation, Education, Recherche (ISFER) voient le jour. Dans la continuité des innovations en faveur d'une meilleure intégration et réussite scolaires de ces enfants, Delaubier (2002) émet un rapport à la demande du Ministre de l'Education Nationale, J. Lang. Divers rapports et études sur la situation française ont été publiés à cette occasion tel que celui de Vrignaud et Bonora (2000). Mais les premières recherches scientifiques en France sur la précocité intellectuelle sont menées par l’équipe « cognition et différenciation » du laboratoire « cognition et développement » de l’université René Descartes-Paris V sous la coordination de Lautrey (2004). Les travaux consacrés à la question étaient jusqu’alors presque inexistants. Dans les bibliothèques françaises, ne figurait aucune des revues scientifiques internationales consacrées à ce thème. Selon l’équipe de recherche, une des raisons de cette absence d’intérêt tient à l’idée fausse et assez répandue selon laquelle les enfants à haut potentiel intellectuel ne rencontreraient pas de difficultés d’adaptation scolaire ou sociale. Pourtant, dans les faits, on sait qu’une proportion non négligeable d’entre eux est en réel échec scolaire (Delaubier, 2002). On constate ainsi une demande d’information scientifique sur la précocité intellectuelle par les familles confrontées à ces situations, par les psychologues praticiens exposés aux demandes des familles et qui n’ont pas reçu de formation leur permettant d’y répondre, ainsi que de la part des enseignants, désemparés le plus souvent par le comportement de ces élèves. Par rapport aux problèmes que 6 posent ces élèves, un bulletin officiel récent (BOEN N° 38 du 25/10/2007, circulaire N°2007158 du 17-10-2007) consacré à la scolarisation des enfants précoces est publié par l’Education Nationale ; ce qui laisse penser que la question de la précocité est en train de trouver une place importante dans le système scolaire. Si le seul indice communément admis pour repérer des enfants précoces est le quotient intellectuel élevé (QI ≥ 130), déterminé par le WISC (Wechsler Intelligence Scale for Children), d’autres critères sont décrits par un certain nombre d’auteurs que nous allons maintenant examiner. B- Caractéristiques générales des enfants à haut potentiel intellectuel 1- Le haut potentiel intellectuel (HPI) et la mesure du quotient intellectuel L’intelligence se définit comme la capacité d’adaptation à des situations nouvelles. Si cette définition est consensuelle, la conception de l’intelligence a évolué au fil du temps et a eu de ce fait une répercussion sur la définition du « haut potentiel intellectuel ». De la conception globale, partagée Binet et Simon (1905) et Wechsler (1956), on est passé à la conception pluraliste de l’intelligence (grâce à l’analyse factorielle), défendue par Spearman (1904), qui a mis en évidence le facteur g (conception bi factorielle) ; Horn et Cattell (1966) parlent d’intelligence fluide et cristallisée et Carroll (1993), du modèle hiérarchique. Ainsi, l’identification des personnes à haut potentiel ne peut être abordée de la même manière selon que l’on cible une intelligence considérée comme unitaire, générale, mesurée par le QI ou par le score dans un test de facteur général, ou des formes différentes d’intelligence (Gardner, 1996), relativement indépendantes, dont chacune requiert une forme d’évaluation différente. Ces différentes conceptions impliquent qu’un consensus ne peut être trouvé que sur une définition minimale de la précocité. En l’occurrence, on considère 7 qu’un enfant à haut niveau intellectuel se caractérise avant tout par sa capacité à réaliser dans un certain nombre d’activités intellectuelles des performances que ne parviennent pas à accomplir la plupart des enfants de son âge. Cette diversité de travaux montre ainsi que le concept de l’intelligence ne se limite pas à l’aspect psychométrique, plutôt centré sur les aspects les plus impliqués dans l’apprentissage scolaire, mais ils tendent à l’élargir en intégrant des aspects de l’adaptation cognitive, comme la connaissance de soi et des autres (intelligence sociale, émotionnelle), qui n’était pas prise en compte dans les tests classiques. Si le nombre de formes d’intelligence distinguées augmente, le facteur g reste le meilleur prédicteur de la réussite scolaire; cependant, il demeure un facteur parmi d’autres. Tout ceci n’est pas sans conséquence sur la définition du haut potentiel intellectuel. Actuellement, le test le plus utilisé pour déterminer les potentialités intellectuelles d’un sujet est la Wechsler Scale for Children (WISC IV, 2005), construite sur le même principe que la Wechsler Adult Intelligence Scale (WAIS), qui est la quatrième version révisée, adaptée à l'examen des enfants de 6 à 16 ans. Pour les enfants d’âge préscolaire, une échelle a été construite, toujours selon le même principe et éditée en 1967: la Wechsler Preschool and Primary Scale of Intelligence (WPPSI). Ces outils permettent de donner le QI (quotient intellectuel) et donc de situer un sujet dans la population parente. Ainsi, un QI est dit normal lorsqu’il est compris entre 85 et 115 ; un enfant est « précoce ou surdoué » lorsqu’il a un QI ≥ 130, c’est-à-dire à 2 écarts types au dessus de la moyenne, qui est 100. Les enfants « précoces » représentent 2,28 % de la population, soit un enfant sur quarante. Si le QI est un indicateur incontournable de la précocité, il ne saurait en lui seul suffire à élucider toutes les questions que suscitent les hauts potentiels intellectuels. C’est pourquoi nous avons cherché à en savoir davantage en nous dirigeant vers un certain nombre d’études développementales concernant ces sujets. 8 2- Les caractéristiques précoces des hauts potentiels intellectuels Dans une étude développementale du comportement néo-natal, en lien avec les premières années de vie, Vaivre-Douret (2003) décrit les caractéristiques précoces des enfants à hautes potentialités. L’étude porte sur 60 enfants suivis depuis leur naissance (tirés au sort), testés à l’âge scolaire (entre 4 et 7ans) avec un QI d’au moins 130 et qui n’ont pas présenté de problème particulier au cours de leur développement avant 3 ans. Ses résultats montrent que les enfants à « hautes potentialités » auraient un développement maturatif qui leur est propre. Ces enfants présentent dès la naissance une mobilité d’exploration très active, par le regard. Apparaissent en moyenne : « la tenue de la tête à 4 semaines ; une préhension volontaire acquise à 3 mois ; la tenue assise autour de 6 mois ; la faculté de se mettre assis vers 7 mois ; le quatre-pattes vers 8 mois… ; les premiers mots apparaissent autour de 9 mois et le « je » vers 2 ans et demi ». La confrontation de ces données aux échelles d’évaluation développementale de Brunet et Lézine (1997) et à celle du développement moteur fonctionnel de Vaivre-Douret (1997, 1999) met en évidence une précocité de la motricité, avec respectivement une avance moyenne d’au moins 1 à 2 mois et 1 à 2 écarts types par rapport à la moyenne. Sur le plan psycho-affectif, les étapes du développement, en référence aux stades freudiens, se succèdent rapidement, avec une certaine avance. Des questions existentielles sur la vie et la mort, la sexualité, préoccupent ces enfants et peuvent conduire à de l’anxiété et « engendrer des affects dépressifs ou un déni de ses propres sentiments » (Vaivre-Douret, 2003, p. 34). Chez ces derniers, toutes les sensorialités et les perceptions (épidermiques, tactiles, gustatives, olfactives, auditives et visuelles) sont très développées (à fleur de peau), ce qui entraîne une réactivité sensitive émotionnelle et affective, ainsi qu’un sens de l’intuition comme un sixième sens. « Un état d’alerte continu, une quête du monde environnant de façon très soutenue, captivante, s’organise en activités de 9 type attentionnel dès le début de la vie. « Mémoire d’éléphant » et « œil de lynx », ils présentent des aptitudes au raisonnement, s’appuyant sur de hautes capacités de traitement de l’information (détection, discrimination perceptive, stockage et rappel) » (Vaivre-Douret, 2003, p. 34). Ces caractéristiques précoces ne peuvent être bénéfiques que si elles se développent dans un environnement favorable. Sinon, on peut s’attendre à des difficultés d’apprentissage à l’âge scolaire. Après cette brève description du développement psychomoteur de l’enfant à haut potentiel intellectuel, nous allons voir quelle est la spécificité de son mode de raisonnement et les difficultés que cela peut engendrer au cours de la scolarité. 3- Le fonctionnement intellectuel des hauts potentiels intellectuels et les difficultés scolaires « Dans ma tête j’ai un arbre généalogique de mes problèmes ». Par cette jolie expression d’un enfant de neuf ans, Siaud-Facchin (2004) montre une représentation très imagée et très précise du foisonnement de la pensée de l’enfant « surdoué ». Elle explique que la pensée de cet enfant « s’organise en arborescence, chaque idée, chaque concept, chaque donnée, se divisant et se subdivisant en nouvelles idées, associations d’idées, analogies, etc. ». La pensée est construite en réseau et le traitement de l’information ne s’effectue pas sur un mode linéaire : de l’input (entrée des données dans le système) à l’output (production du résultat). Entre les deux pôles, le processus s’active en intégrant les unes après les autres les données nécessaires à la construction de la pensée et à la production de la réponse (Grégoire, 2000). L’enfant « surdoué » active simultanément plusieurs réseaux qui fonctionnent en parallèle, ce qui entraîne une forte production d’informations et de données qui se déploient à grande vitesse. « De multiples liens sont ainsi activés et disponibles simultanément et 10 s’associent avec des acquisitions et des connaissances antérieures qui se trouvent elles aussi disponibles dans le même espace temps. Cette particularité de fonctionnement de la pensée ouvre la voie à la créativité, aux idées « géniales » qui émergent de ces connexions multiples » (Siaud-Facchin, 2004, p. 144). Le traitement simultané est privilégié par rapport au traitement séquentiel. Ceci est confirmé par les tests psychométriques qui s’appuient sur ce modèle, en particulier le K-ABC (Huteau & Lautrey, 1999). Le traitement séquentiel implique une analyse des stimuli les uns à la suite des autres, traite chaque détail indépendamment du suivant, analyse méthodiquement chaque élément. Le traitement simultané s’intéresse aux propriétés globales du stimulus, privilégie le sens, traite le pattern sur un modèle visuospatial. Si le fonctionnement linéaire de la pensée semble moins propice à la créativité, parce qu’il se réduit à une seule donnée à chaque étape de la pensée, il est beaucoup plus efficace dans le cadre scolaire. L’enfant « surdoué » ignore souvent tout des procédures métacognitives, des opérations mentales qui sous-tendent la pensée, l’élaboration d’un raisonnement, un processus de réponse : « il sait ou il ne sait pas », c‘est tout (Siaud-Facchin, 2004), l’absence de la possibilité de régulation métacognitive chez l’enfant « surdoué » est un déficit de procédures cognitives qui le pénalisent dans un grand nombre d’apprentissages. La suractivation des réseaux associatifs chez l’enfant « surdoué » rend difficile la sélection de l’information pertinente. Ceci explique également son incapacité à produire un devoir structuré dans le temps imparti (production de brouillon, mal rédigé, souvent incompréhensible…). Les travaux que nous venons d’exposer concernant les hauts potentiels nous aident à améliorer partiellement la compréhension de leur « fonctionnement ». Nous nous intéressons cependant, comme nous l’avons souligné dans l’introduction, à la relation entre le choix 11 vocationnel, par l’étude des intérêts professionnels, et la précocité intellectuelle, ce qui nous amène à présent à aborder le champ d’étude des intérêts (professionnels) et en particulier les outils utilisés pour les évaluer. C- Les intérêts professionnels 1- La notion d’intérêt L’étude des intérêts professionnels est à ramener dans un premier temps à la définition de l'intérêt, qui évoque un attrait ou un penchant du sujet à l'égard d'un objet ou d'une activité. L'intérêt (du latin interest = il importe) désigne également la qualité particulière d'un objet qui prend de la valeur pour un sujet : ainsi, tous deux sont liés par une relation qu'il s'agira de révéler d'une manière ou d'une autre. Selon Dupont, Gendre, Berthoud et Descombes (1979, p. 11), « les intérêts correspondent à des tendances ou dispositions relativement stables ou durables (et dont le développement semble associé à celui de l'image de soi) orientés vers différents domaines d'objets ou, plus exactement, vers différents domaines d'activités et d'expériences vécues, dans un milieu culturel donné; ces tendances seraient également conditionnées par les pressions plus ou moins fortes définissant les rôles dévolus aux deux sexes ». Ces définitions font émerger l’idée d’une relation entre un sujet et un objet, une activité ou une expérience vécue. Pour Holland (1973), ce sont les expériences vécues par les individus qui déterminent les intérêts. C'est aux Etats-Unis que la psychologie des intérêts fait son apparition avec Strong (1927) et Kuder (1936) qui y construisent leurs premiers outils. D’autres chercheurs comme Super (1964) et Crites (1999) ont apporté des contributions significatives à l’essor de la psychologie des intérêts. Leurs travaux sont relatés dans le numéro 1 de la revue 12 Carriérologie (2005) : ils ont identifié quatre méthodes pour évaluer et définir les intérêts professionnels de façon opérationnelle : 1) les intérêts exprimés (qui sont ceux que la personne dit être les siens en réponse à des questions orales ou écrites), 2) les intérêts manifestés (observés dans le comportement quotidien et qui s’expriment par les activités telles que les loisirs, le bénévolat, l’emploi), 3) les intérêts inventoriés au moyen de questionnaires, appelés inventaires (qui sollicitent l’expression subjective d’intérêts et permettent d’établir le profil des préférences du sujet à l’aide d’une notation objective), 4) les intérêts testés (par des épreuves objectives d’attention et de rappel). De ces quatre définitions, celle des intérêts inventoriés a fait l’objet de recherches exhaustives (Crites, 1999). Selon Super (1964), ce courant de recherche a permis le maintien de la psychologie des intérêts. Sous l'influence de la mesure des aptitudes et de la naissance de l'orientation scolaire et professionnelle, Strong élabore, à partir des années 20, l’échelle de mesure des intérêts professionnels : l’Inventaire Strong d’intérêts professionnels (Strong Vocational Interest Blank). D’autres inventaires d’intérêts ont été conçus ensuite : on peut mentionner ceux de Kuder ( Kuder & Zytowski, 1991; Zytowski, 2001), et de Holland (1966), qui ont été traduits et adaptés en plusieurs langues, dont le français. C’est le cas de l’Inventaire Personnel de Holland (IPH, Dupont, 1979) et de l’Inventaire de Rothwell -Miller Revisé (IRMR, Bernaud & Priou, 1994) . On note cependant que le modèle théorique qui a donné lieu au plus grand nombre d'échelles et de travaux est celui de Holland (1966): le RIASEC (R = Réaliste ; I = 13 Investigateur ; A = Artistique ; S = Social ; E = Entreprenant ; C = Conventionnel) ou « hexagone » (cf. définition des types en annexe I.4). L’outil que nous utilisons dans notre recherche, l’Hexa 3D, mis au point par Vrignaud et Cuvillier (2006), s’appuie sur le modèle de Holland. Avant de décrire le modèle de Holland et l’Hexa 3D, et le lien avec l’intelligence, nous allons brièvement exposer la formation des intérêts professionnels au cours du développement de la personnalité. 2- Le développement des intérêts professionnels De nombreux auteurs ont décrit les étapes de construction des intérêts professionnels, correspondant à certaines périodes de la vie et ce, au travers du choix vocationnel. A chaque phase correspondent des aptitudes à établir des préférences et à se définir soi-même par rapport à des activités. A ce propos, Guichard et Huteau (2006) citent les travaux de Gottfredson (1981), qui stipulent que le sujet construit progressivement une carte mentale des professions selon les axes du genre et du prestige (principe de circonscription), puis il effectue des choix parmi ces professions selon sa probabilité subjective de réalisation (principe de compromis). Le croisement de ses travaux avec ceux de Holland a permis de situer les types RIASEC sur son modèle et l'on constate que le type Investigateur est le plus prestigieux et presque le plus masculin ; à l'opposé du prestige, on trouve le type Réaliste, situé au maximum du masculin ; les types Conventionnel et Social sont médians en prestige mais beaucoup plus féminins ; Artistique est médian pour les 2 axes. Munoz-Sastre (1994) et Guichard (2001) soulignent cependant les limites du modèle de Gottfredson, notamment le nombre de variables (d'autres sont à l'œuvre) et la pertinence du genre (elle est liée à la familiarité, donc à l'environnement). Le prestige a fait l'objet d'une étude solide par Huteau 14 (1972) qui confirme la bonne capacité des sujets à hiérarchiser les professions selon cette variable. Huteau (1979, 1982) précise que le choix vocationnel est basé sur les comparaisons effectuées par le sujet entre représentations de soi et représentations des professions, lui permettant d'établir un choix consonnant (à rapprocher de la recherche de congruence de Holland, comme indiqué par Huteau). 3- Le modèle de Holland Le modèle développé par Holland (1966) s'inscrit dans la continuité des travaux effectués à partir des modèles de Strong (1927) et de Kuder (1936), visant à simplifier et clarifier les nombreuses dimensions des intérêts. Il propose en outre des propriétés complémentaires, telles que la congruence et la consistance, qui facilitent l'interprétation des résultats. Holland a élaboré son modèle sur plusieurs dizaines d'années (de 1966 à 1992) en ayant le souci de la simplicité d'utilisation et d'appropriation par le sujet et le conseiller. Comme nous l’avons évoqué plus haut, il décrit 6 types de personnalité, caractérisés par des intérêts spécifiques, qui correspondent à 6 types d'environnements professionnels: modèle dit RIASEC. Il a donné lieu à la construction de plusieurs inventaires d'intérêts, dont l'IPH (1979) et l'IRMR (1994). Son modèle stipule que les individus caractérisés par un certain type d'intérêt recherchent des environnements du même type (composés de personnes ayant le même type d'intérêt et d'activités correspondantes). Chacun recherche donc à être congruent avec son environnement afin d'en éprouver de la satisfaction et de s’y sentir efficace. Holland a défini plusieurs indices permettant d'apprécier le degré de structuration ou de clarté de la personnalité: la cohérence, la différenciation et l'identité. La personnalité sera d'autant plus différenciée qu'il y aura un écart important entre le point le plus haut et le point 15 le plus bas du profil. L'identité vocationnelle est définie par la conscience qu'a le sujet de ses intérêts, de ses caractéristiques personnelles, de ses atouts et de ses buts, et par sa capacité à les spécifier (Guichard & Huteau, 2006). Ainsi à partir d’une étude réalisée auprès d’adolescents âgés de 11 à 16 ans, Huteau (1979, 1982) montre que les descripteurs des professions évoluent vers plus d'abstraction (vision sociale et abstraite des métiers: relations interpersonnelles, statut social, secteur d'activité, exigences requises) et que les représentations de soi évoluent de manière similaire aux représentations des professions : les adolescents prennent en compte des descripteurs personnels plus abstraits et mieux structurés. Ces descripteurs de soi ont une valeur cognitive et évaluative car ils permettent l'émergence de préférences par comparaison afin de réduire la dissonance cognitive. Selon Holland (1997), le niveau de maturité vocationnelle, c’est-à-dire la stabilité des choix, leur affirmation, sont fonction de trois paramètres que sont la cohérence, la différenciation et l’identité. Dans le questionnaire d’intérêts professionnels Hexa 3D, la stabilité des intérêts est également appréhendée par les variables « différenciation » et « cohérence » et une troisième qui est la « consistance ». Pour certains chercheurs (Gottfredson, 1981 ; Lubinski et al., 1995 ; Sparfeldt, 2007), la stabilité vocationnelle serait en lien avec le potentiel intellectuel. Nous allons les aborder dans la partie qui suit et nous allons également exposer brièvement la recherche de Lubinski et al. (1995), puisque notre étude en est le prolongement. 4- L’intelligence et les intérêts professionnels Au terme de cette revue théorique, nous constatons que peu d’auteurs se sont consacrés à l’étude du lien entre intelligence et intérêts professionnels. A ce propos, Proyer (2006) dans son étude concernant les relations entre ces deux variables fait référence aux travaux de 16 Randhal (1991), d’Ackerman et Heggestad (1997) et de Bergmann et Eder (2005) et montre, comme ces derniers, que les corrélations entre intelligence et intérêts professionnels sont modérées. Par exemple, les résultats obtenus par les deux derniers auteurs donnent les corrélations suivantes : - .27 ≤ r ≤ - .19 pour le type R, r = .29 pour le type I et r = .22 pour le type A. Ce thème de recherche chez les sujets à haut potentiel intellectuel est rare et quasi absent dans les études françaises. Sparfeldt (2007), dans une étude auprès d’étudiants HPI et non présélectionnés (N= 106, QI moyen= 136), montre que chez les adolescents HPI le type Investigateur (modèle de Holland) est plus élevé et que le type Social l’est moins. Une analyse complémentaire, sur la partie de l’échantillon qui atteint le plus haut niveau d’études, révèle un type Réaliste plus élevé et un type Entreprenant moins élevé. Sa recherche évite également le biais d’échantillonnage, souvent présent lors de la formation des groupes expérimentaux sur le haut potentiel intellectuel (élèves recrutés pour un programme spécifique, comme pour le SMPY, par exemple), qui peut produire des résultats controversés. Sparfeldt (2007) cite également les travaux de Gottfredson (1997) et de Jensen (1998) selon lesquels les aptitudes intellectuelles sont un prédicteur indiscutable de la réussite scolaire et professionnelle. Les résultats de l’étude de Schmidt et Hunter (2004) vont dans le même sens. Ils soulignent que l’intelligence est un meilleur prédicteur du niveau professionnel atteint et de la performance dans un métier choisi que d’autres variables, comme l’expérience professionnelle. Cependant, Sparfeldt (2007) suggère qu’il est important de considérer d’autres variables qui peuvent être pertinentes concernant le succès des choix vocationnels. A ce propos, il cite Lubinski (2000). En effet, la plupart des études concernant la précocité intellectuelle et les intérêts professionnels relèvent des travaux de ce dernier, qui est la référence essentielle de notre recherche. Par exemple, en 1995, il publie les résultats de 17 son étude concernant la stabilité des intérêts professionnels chez les élèves à haut potentiel intellectuel. Il a proposé le questionnaire d’intérêts (Strong-Campbell) à un échantillon d’élèves de 13 ans (N = 162), repérés comme « surdoués ». Le même protocole a été appliqué à cet échantillon, 15 ans plus tard, et les résultats montrent une très grande stabilité des intérêts ; certaines corrélations étant plus élevées pour plusieurs types du RIASEC (pour S : r = 0,52 ; pour R : r = 0,51 ; pour A : r = 0,48 et pour C : r = 0,44). N’ayant pas constitué de groupe témoin, Lubinski et al. ont comparé les résultats de leur échantillon à l’étalonnage du Strong-Campbell et indiquent qu’on peut parler de « précocité vocationnelle » à propos de cette population car ils montrent une importante stabilité de leurs intérêts professionnels, et qu’il est possible de mesurer ces intérêts à 13 ans, dans leur cas précis. II PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES A- Problématique Cherchant à mieux comprendre et définir ce qu’est la précocité intellectuelle, nous avons recherché dans la littérature les travaux traitant de la question. Comme nous l’avons dit dans le cadre théorique, les études pionnières sur ce thème sont issues des champs de la psychiatrie ou de la psychologie clinique. En France, ce n’est que depuis 2004, date de parution d’un état de la recherche sur le haut potentiel intellectuel, qu’on peut s’appuyer sur des éléments quantitatifs couvrant plusieurs champs et problématiques. Sur la base des travaux de Lubinski et al. (1995), notre démarche a consisté à étudier la population des élèves HPI, et ce au travers des intérêts professionnels qu’ils expriment. Nous avons voulu comparer leurs profils d’intérêts à ceux d’élèves non HPI, en utilisant le questionnaire Hexa 3D. 18 B- Hypothèses 1- Hypothèse générale Le haut potentiel intellectuel s’accompagne d’une précocité vocationnelle. 2- Hypothèses opérationnelles La précocité vocationnelle se traduit par une stabilité des intérêts professionnels, qui elle-même se caractérise par : 2-1- une forte différenciation des intérêts : les HPI ont des intérêts plus différenciés que les non HPI. On considère que les intérêts chez un sujet sont différenciés (intérêts hiérarchisés) lorsque les écarts entre ses notes pour les 6 types du RIASEC sont suffisamment importants. 2-2- une forte consistance des intérêts : les HPI ont des intérêts plus consistants que les non HPI. On considère que les intérêts chez un sujet sont consistants lorsque les profils au RIASEC sont constitués de types dominants proches (par exemple le profil Réaliste/Investigateur), car, par définition, ces types partagent des points communs. Les profils constitués de types opposés sur l’hexagone sont inconsistants puisqu’ils s’opposent sur un ensemble de traits. 2-3- une forte cohérence entre représentations de soi et représentations des professions : les HPI ont des intérêts plus cohérents que les non HPI. 19 La cohérence correspond à l’attrait pour les types et à leur rejet par le sujet en fonction des stimuli utilisés dans chacun des domaines (activités/qualités/professions). Chacun des 3 types de stimuli renvoie à des représentations différentes. La cohérence implique l’homogénéité des réponses du sujet dans les 3 domaines (cohérence interdomaines). Un profil cohérent présente un hexagone de même forme dans les 3 domaines. En résumé, on s’attend à ce que les HPI aient des intérêts plus différenciés, plus consistants et plus cohérents que les non HPI. III METHODOLOGIE A- Participants Pour effectuer cette étude, nous sommes intervenus auprès d’élèves de classes de 2e, scolarisés dans un établissement privé sous contrat et payant de la ville d’Avignon qui a mis en place des dispositifs pour accueillir les élèves précoces. Cinquante-deux élèves ont participé dont 19 détectés comme étant précoces à l’aide du WISC R (dont un élève testé à 6 ans), 7 par le WISC III et un par le WISC IV. Pour les autres, nous n'avons pas eu d'information. Les 33 non précoces n’ont pas fait l’objet d’une évaluation du niveau intellectuel: ils constituent notre groupe contrôle. Pour préserver l’anonymat des participants nous avons codé chaque participant (1 pour les HPI et 2 pour les non HPI). L’âge moyen des sujets est de 15 ans et 5 mois chez les HPI (3 sont redoublants) et de 15 ans et 4 mois chez les non HPI. 20 B- Matériel Nous avons utilisé une version adaptée de l’épreuve des dominos (Rémy, 1998) et un questionnaire d'intérêts professionnels : Hexa 3D (Vrignaud & Cuvillier, 2006). 1- L’épreuve des dominos Nous avons utilisée cette épreuve pour vérifier l’homogénéité du groupe des non HPI concernant le potentiel intellectuel. Elle est mise au point par Ludovic Rémy (1998). Une de ses particularités est l’identification objective de la stratégie utilisée pour chaque item résolu. L’épreuve de type papier-crayon se compose de 34 items dont chacun d’eux admet deux solutions correctes et différentes. L’une des solutions est obtenue par l’utilisation d’une stratégie spatiale et l’autre par une stratégie numérique. Cette version est une révision du D70 qui est une adaptation française du test des dominos créé par Anstey en 1944. Cette épreuve permet de mesurer le facteur g et de comparer les 2 groupes sans équivoque. L’épreuve commence par la résolution de deux items présentés à titre d’exemples (cf. annexe I.1). 2- Le questionnaire d’intérêts professionnels Hexa 3D Mis au point par Vrignaud et Cuvillier (2006), il repose sur le modèle hexagonal de Holland. L’Hexa 3D est basé sur un questionnaire construit antérieurement par les auteurs : la « Station Spatiale » (Cuvillier, Delattre, Tandeau & Vrignaud, 1999). L’Hexa 3D s’adresse à un public plus large (élèves du second degré et adultes) que la « Station Spatiale » (collégiens). Il évalue les intérêts en utilisant 3 domaines de description: les activités, les qualités et les professions. Les domaines des activités et des qualités comprennent chacun sept séries de six activités et de six qualités. Quant au domaine des professions, il est composé de 21 quatorze séries de six professions. Il permet d’étudier le profil du sujet par le calcul d’indices : différenciation, consistance, cohérence, prestige et genre. Nous avons choisi cet outil pour les raisons suivantes : - il s’appuie explicitement sur le modèle de Holland et il est construit dans le contexte culturel français, ce qui répond à l’une des préoccupations de notre recherche ; - il permet la vérification de notre hypothèse générale par un calcul plus facile des indices de différenciation, de consistance et de cohérence des intérêts. - il mesure les intérêts au travers des 3 domaines cités plus haut, contrairement à l’IRMR qui ne concerne que les professions. Le questionnaire commence par un exemple d’une série de chaque domaine (cf. consigne, annexe I.3). C- Procédure Nous avons pris contact avec deux chefs d’établissement privés sous contrat qui ont engagé une politique pédagogique envers les HPI (un collège et un lycée). Nous avons ainsi rencontré les responsables des HPI en octobre et novembre 2007 pour présenter notre recherche et dans le but d’obtenir un accord quant à notre intervention dans leurs établissements. Nous avons obtenu une réponse favorable pour intervenir au lycée ; quant au collège, notre demande est restée sans suite. Nous avons également rencontré Mme SiaudFacchin, directrice du centre Cogito’z, qui intervient dans ces établissements pour le suivi des HPI, pour également présenter notre recherche afin d’éviter toute ambiguïté quant à l’objectif de notre travail. Comme il est d’usage, une autorisation parentale a été demandée. 22 Les deux épreuves se déroulent sur une heure, dont 15 minutes environ pour les dominos (12 pour la passation). Les élèves sont répartis en deux groupes: HPI et non HPI (parmi lesquels 4 HPI). Cette répartition nous a été proposée par la responsable. Après nous être brièvement présentés, nous expliquons aux élèves que nous cherchons à étudier les intérêts professionnels des élèves de 2e en soulignant que cela n’a aucun rapport et n’aura aucune influence sur leur orientation. Nous distribuons ensuite les cahiers de dominos puis nous leur expliquons à l’aide des exemples comment les résoudre. Nous précisons que si la valeur à écrire est 0, il faut écrire 0 et de ne pas laisser un espace vide. Nous leur précisons que la case vide représente le 0 et qu’ils ont 12 minutes pour résoudre l’épreuve (cf. consigne, annexe I.2). Le questionnaire d’intérêts professionnels Hexa 3D est rempli après l’épreuve des dominos (cf. consigne, annexe I.3). Une professeure principale de 2nde et la responsable des HPI ont assisté à la passation des tests. 23 IV- RESULTATS En préalable au test des hypothèses, nous avons considéré les formes des distributions de nos variables. Elles suivent la loi normale. Tableau 1 : Moyenne, écart type, minimum et maximum des distributions Scores Variables dépendantes Moyenne Ecart type Minimum Maximum 26,83 6,31 4 33 23,11 8,12 3 32 15,16 5,81 3,5 27,5 7,71 2,48 1 10 37,98 2,61 18,25 8,12 5 46 28,08 9,18 8 47 26,98 12,80 2 50 27,17 9,80 4 46 22,85 9,32 2 47 20,29 8,84 5 39 score total dominos score spatial dominos indice de différenciation indice de consistance indice de cohérence R I A S E C A- Épreuve des dominos Comme nous l’avons souligné plus haut, cette version de l’épreuve des dominos est celle mise au point par L. Rémy. La correction des items de cette épreuve nous permet de donner les moyennes et les écarts types des deux groupes par rapport à la stratégie utilisée. Cependant, la stratégie n’est pas une variable prise en compte dans la vérification de nos hypothèses. 24 Tableau 2 : Moyenne, écart type des scores aux dominos pour les HPI et les non HPI et comparaison des moyennes Scores Moyenne Ecart type T- test HPI (N = 19) 26,68 6,65 t 50 = - 0,12 Non HPI (N = 33) 26,91 6,22 p = 0,90 Sujets Les résultats montrent qu’il n’y a pas de différence significative (t50 = -0,12, p > .05) entre la moyenne des items réussis des HPI (M = 26,68) et des non HPI (M = 26,91). Les non HPI réussissent en moyenne aussi bien l’épreuve que les HPI, dans le temps qui leur est imparti. Tableau 3 : Pourcentage moyen d’utilisation de la stratégie spatiale aux dominos pour les HPI, les non HPI et l’ensemble des sujets et comparaison des pourcentages moyens entre les HPI et les non HPI. HPI (N = 19) 67,98 % T- test non HPI (N = 33) 65,24 % t 50 = 1,09 Tous (N = 52) 67,98 % p = 0,27 On constate que la stratégie spatiale est la plus utilisée par l’ensemble des sujets (67,98 %) mais elle l’est davantage chez les HPI (72,75 %) que chez les non HPI (65,24 %) et 25 confirment ainsi l’hypothèse de Ludovic Rémy selon laquelle l’utilisation de la stratégie spatiale par les HPI est dominante. Nous allons à présent vérifier notre hypothèse générale, construite à partir des travaux de Lubinski et al. (1995) sur la stabilité des intérêts professionnels chez des sujets intellectuellement précoces, qui est la suivante : le haut potentiel intellectuel s’accompagne d’une précocité vocationnelle qui se traduit par intérêts professionnels plus différenciés, plus consistants et plus cohérents chez les HPI que chez les non HPI. B- Questionnaire d’intérêts professionnels Hexa 3D 1- Hypothèse 1 : les HPI ont des intérêts plus différenciés que les non HPI. Tableau 4 : Moyennes et écart-types des scores des HPI et des non HPI à l’indice de différenciation Différenciation Sujets Activités Qualités Professions Globale HPI M = 5,08 M = 4,74 M =7,58 M =14,79 ET = 2,15 ET=1,84 ET = 2,89 ET= 5,54 M = 5,23 M = 4,89 M = 8,39 M =15,38 ET =1,97 ET=1,63 ET= 4,34 ET= 6,04 t 49 = 0,06 t 50 = 0,31 t 50 = 0,72 t 50 = 0,34 p = 0,95 p = 0,75 p = 0,46 p = 0,72 (N = 19) non HPI (N = 33) T-test On observe sur le tableau ci-dessus que les intérêts des HPI ne sont pas plus différenciés que ceux des non HPI de manière globale (t 50 = -0,34; p > .05) et dans chaque 26 domaine : activités (t 49 = 0,06; p > .05) ; qualités (t 50 = 0,31; p > .05) ; professions (t 50 = 0,72; p > .05). Ceci signifie que les intérêts professionnels chez les HPI ne sont pas plus hiérarchisés que chez les non HPI. Dans le domaine des activités, un des sujets n’a pas répondu aux questions, d'où le ddl = 49. 2- Hypothèse 2 : les HPI présentent des intérêts professionnels plus consistants que les non HPI. Tableau 5 : Moyennes et écart-types des scores des HPI et des non HPI à l’indice de consistance Consistance Sujets Activités Qualités Professions Globale HPI M =6,05 M =7,16 M =7,84 M = 8,10 (N = 19) ET = 2,75 ET = 3,27 ET = 2,34 ET = 2,68 non HPI M = 8,09 M = 6,66 M = 7,27 M = 7,48 (N = 33) ET = 1,89 ET = 2,92 ET= 2,50 ET= 2,37 T-test t 49 = 3,11 t 50 = 0,55 t 50 = 0,80 t 50 = 0,86 p = 0,003 p = 0,57 p = 0,42 p = 0,39 Comme pour l’indice de différenciation, nous constatons que la différence à l'indice de consistance des intérêts des deux groupes de sujets (HPI et non HPI) n’est pas significative de manière globale (t 50 = 0,86; p > .05) et respectivement dans les domaines : qualités (t 50 = 0,55; p > .05) et professions (t 50 = 0,80; p > .05). Par contre, dans le domaine des activités, il y aurait une différence significative (t 49 = 3,11; p < .05) : les non HPI semblent avoir des 27 intérêts plus consistants que les HPI, c’est-à-dire une plus grande proximité des intérêts dominants. Nous faisons remarquer à nouveau que le ddl = 49 correspond à l'absence de réponse du sujet cité précédemment. 3- Hypothèse 3 : les HPI présentent des intérêts professionnels plus cohérents entre les domaines (activités, qualités et professions) que les non HPI. Tableau 6 : Moyennes et écart-types des HPI et des non HPI à l’indice de cohérence Cohérence Activités/Qualités Activités/Professions Qualités/Professions Interdomaine Profils HPI M = 10,29 M = 12,23 M = 14,79 M = 37,31 RIASEC ET = 2,34 ET = 0,34 ET = 2,78 ET = 2,26 M = 6,09 M = 10,53 M = 37,98 non HPI M = 10,68 RIASEC ET = 1,73 ET = 0,47 ET = 2,61 ET = 2,61 T- test t 10 = 0,05 t 10 = 4,32 t 10 = 0,46 t 4 = 1,68 p = 0,96 p = 0,002 p = 0,66 p = 0,16 De manière générale, les résultats observés montrent que la cohérence des intérêts professionnels entre les différents domaines n’est pas plus forte chez les HPI que chez les non HPI (t 4 = 1,68; p > .05). Cette constatation équivaut pour les domaines des activités/qualités (t 10 = 0,96; p > .05) ; qualités/professions (t 10 = 1,68; p > .05) ; Par contre la cohérence entre les activités et les professions est forte (t 10 = 0,46; p < .05). 28 Les HPI présentent des intérêts moins cohérents (M= 12,23) entre les domaines des activités et des professions que les non HPI (M= 6,09). On peut supposer que cet écart entre ces deux domaines chez les HPI renvoie à des difficultés à se projeter dans des professions qui pour eux n'évoquent pas grand chose, ou seulement des réponses stéréotypées. En résumé, les résultats ne confirment pas notre hypothèse sur l'indice de différenciation. Par contre, en ce qui concerne les indices de consistance et de cohérence, contrairement à nos hypothèses, les HPI expriment des intérêts professionnels moins consistants dans le domaine des activités que les non HPI, et moins cohérents entre les domaines des activités et des professions que les non HPI. Par conséquent, notre hypothèse générale, qui est que le haut potentiel intellectuel s'accompagne d'une précocité vocationnelle, n'est pas vérifiée. Toutefois, on note que cette quasi absence de différence significative dans les trois domaines (différenciation, consistance et cohérence) corrobore l'absence de différence significative entre les scores des HPI et non HPI à l'épreuve des dominos. Ceci nous amène à nous interroger sur les caractéristiques de nos échantillons, d’autant que les informations concernant les HPI ne nous ont pas été communiquées complètement, notamment la version du WISC (III ou IV) utilisé pour les détecter, les QIT, QIV, QIP ou les indices (ICV, IRP, IMT, IVT) et éventuellement les types de difficultés rencontrées par ces élèves. 29 C- Comparaison des scores des deux groupes (HPI et non HPI) à l’épreuve des dominos et aux six types de profil (RIASEC) Tableau 7 : Corrélations entre le score aux dominos (DT) et les types RIASEC pour les HPI, les non HPI et l’ensemble des sujets Sujets Types TOUS Non HPI HPI R 0,081 0,154 0,127 I -0,013 -0,074 0,019 A -0,123 -0,178 -0,157 S -0,16 -0,221 -0,169 E 0,017 0,051 0,056 C 0,112 0,123 0,068 *:p<0.05 - **:p<0.01 On observe sur ce tableau qu’il n’y a pas de corrélation entre les scores aux dominos et les différents profils (RIASEC) de manière générale et pour chacun des groupes (HPI et non HPI). 30 D- Organisation intragroupe des différents types du RIASEC Corrélations entre les domaines pour chaque type du RIASEC chez les HPI et les non HPI (cf. tableau des corrélations en annexe II.1) : R1 .15 .38 I1 .71 .44 R3 .09 .21 - .17 .69 R2 .61 .77 S3 .51 .37 .18 .68 I3 S1 A1 .78 .85 I2 .61 .52 A3 E1 .42 .68 .19 .56 S2 .63 .59 E3 .74 .53 A2 C1 .32 .62 .21 .35 E2 .61 .65 C3 .23 .24 .10 .36 C2 Légende : HPI : en gras, non HPI : en normal Domaine des activités = R1, I1, A1, S1, E1, C1 Domaine des qualités = R2, I2, A2, S2, E2, C2 Domaine des professions = R3, I3, A3, S3, E3, C3 On observe sur ces figures que les corrélations entre les domaines : - des activités et des professions sont fortes chez les HPI dans les types I (r = .69), A (r = .85), S (r = .77) et C (r = .65) et chez les non HPI dans les types A (r = .78), S (r = .61), E 31 (r = .63) et C (r = .61) ; la corrélation la plus élevée se trouve sur le type A pour les HPI (r = .85) comme pour les non HPI (r = .78). Cela suppose que ces 2 domaines activent les mêmes représentations chez les sujets pour ces types. - des qualités et des professions sont également élevées chez les HPI dans les types I (r = .68) et chez les non HPI dans le type A (r = .61) ; l’appariement entre les qualités, qui renvoient aux représentations de soi, et les professions à celles des métiers, n’est constaté que dans ces 2 types. - des activités et des qualités sont plus élevées chez les HPI dans les types S (r = .68) et E (r = .62) et chez les non HPI dans les types R (r = .71) et A (r = .74) ; on peut dire que la représentation des métiers par des verbes d’action (activités) et la représentation de soi (qualités) sont corrélées. Afin de visualiser les résultats, nous avons établi les profils de chaque groupe de sujets HPI et non HPI) dans chaque domaine : activités, qualités et professions. 32 E- Profils hexagonaux 1- Les différents profils types de Holland Seront collés les profils types de Holland 33 2- les profils du groupe HPI par domaine et globalement HEXAGONE ACTIVITES HPI R1 10 C1 5 HEXAGONE QUALITES I1 C2 0 E1 E2 HEXAGONE PROFESSIONS HEXAGONE GLOBAL HPI R3 15 HPI R 40 30 10 I3 C 5 I 20 10 0 0 A3 S3 A2 S2 S1 E3 I2 5 0 A1 C3 HPI R2 10 E A S 34 3- les profils du groupe non HPI par domaine et globalement HEXAGONE ACTIVITES Non HPI R1 10 C1 5 HEXAGONE QUALITES Non HPI R2 15 10 I1 C2 I2 5 0 E1 0 A1 E2 S2 S1 HEXAGONE PROFESSIONS 5 HEXAGONE GLOBAL Non HPI R3 10 C3 A2 Non HPI R 30 I3 20 C I 10 0 E3 0 A3 S3 E A S Lorsqu’on observe les hexagones respectifs, on constate que : - le profil dominant chez les HPI est IAE dans les activités, SIA dans les qualités, IAS dans les professions et IAS globalement (activités + qualités + professions). Chez les non HPI, le profil dominant est IAS dans les activités, SCA dans les qualités, AIS dans les professions et SIA globalement. - respectivement, chaque groupe de sujets (HPI et non HPI) présentent également des profils peu différenciés et peu consistants. − la superposition des profils des HPI et des non HPI de manière globale (IAS + SIA), et en particulier dans les domaines des activités (IAE + IAS) et des qualités (SIA + SCA), ressemble plus au modèle du profil peu différencié et inconsistant. Dans le domaine des 35 professions (IAS + AIS), les profils semblent plutôt correspondre au modèle du profil peu différencié mais avec une consistance moyenne. 4- Les profils superposés des HPI et non HPI par domaine et globalement HEXAGONE ACTIVITES HEXAGONE QUALITES HPI C1 5 HPI Non HPI R1 10 Non HPI R2 15 10 I1 C2 I2 5 0 E1 0 A1 E2 A2 S1 S2 HEXAGONE PROFESSIONS HEXAGONE GLOBAL HPI HPI Non HPI R3 15 40 30 10 C3 I3 C 5 0 A3 S3 La I 20 10 0 E3 Non HPI R E A S superposition des profils illustre cette absence de différence significative démontrée par le traitement statistique. Les profils peu différenciés et inconsistants dénotent que les HPI et les non HPI ont du mal à hiérarchiser leurs intérêts professionnels et à concilier des intérêts opposés. Cela peut induire de l’insatisfaction, voire de l’instabilité dans leur choix d’orientation. Nous pouvons faire le 36 lien avec l'indécision vocationnelle qui peut être induite par plusieurs facteurs dont l'anxiété, le manque de confiance en soi ou une image de soi peu différenciée, peu stabilisée. F- Le prestige et le genre Les moyennes des scores des sujets à ces 2 indices sont données pour information. A titre exploratoire, ces données offrent un aperçu complet des choix d’intérêts professionnels des sujets sur l’ensemble de l’Hexa 3D. Les résultats ne mettent en évidence aucune différence significative entre les HPI et les non HPI, tant sur le genre que sur le prestige des professions choisies. Cependant, on observe que les professions masculines sont plus choisies que les féminines (M = 16,9 contre M = 6,8 pour les HPI; M = 16,6 contre M = 7,3 pour les non HPI) et que les professions à prestige élevé sont nettement plus choisies que celles à faible prestige (M = 25,5 contre M = 8,2 pour les HPI; M = 21,4 contre M = 8,3 pour les non HPI). V- DISCUSSION A- Observations générales Les contraintes du terrain telles que : - le petit nombre de participants, en particulier les HPI, - la constitution des deux groupes proposée par la coordinatrice de l’équipe pédagogique des HPI, - Le manque d’informations, notamment celles relatives aux mesures du WISC pour détecter la précocité, nous amènent à considérer avec précaution nos résultats et les conclusions que nous en tirons. 37 B- Le haut potentiel intellectuel et la stabilité des choix d’intérêts professionnels Les résultats au questionnaire d’intérêts professionnels Hexa 3D des 2 groupes de participants (HPI et non HPI) à notre recherche montre que notre hypothèse générale sur le lien entre la précocité vocationnelle et le haut potentiel intellectuel n’est pas confirmée. Ce qui signifie que les HPI n’expriment pas des intérêts professionnels plus différenciés (hiérarchisés) ni plus consistants (grande proximité des intérêts dominants) et plus cohérents entre les 3 domaines (activités, qualités et professions) que ceux exprimés par les non HPI. De ce fait, ils ne sont pas plus stables chez les HPI que chez les non HPI. Par conséquent, les conclusions à notre étude ne vont pas le sens de celles de la recherche de Lubinski et al. (1995) qui montrent une précocité vocationnelle chez les HPI. Cependant, comme nous l’avons souligné, leur étude est longitudinale (quinze ans d’intervalle entre la première et la dernière phase de leur recherche) alors que la nôtre est comparative. Les contraintes du terrain auxquelles nous avons été confrontés ne nous permettent pas de généraliser nos résultats à l’ensemble de la population d’enfants à haut potentiel intellectuel, ni de contredire les conclusions de la recherche de Lubinski et de ses collaborateurs. Sparfeldt (2007) met en évidence l’importance de l’influence du biais d’échantillonnage (la constitution des groupes de sujets) sur les résultats des études concernant les HPI. Dans le cas de notre recherche, ce facteur que nous n’avons pas pu contrôler peut expliquer entre autres l’absence de différence significative aux résultats de manière générale et en particulier au test des dominos entre les deux groupes. Sachant que le test des dominos est censé mesurer le facteur g, permettant de donner un niveau d’intelligence générale, nous pouvons émettre comme piste explicative que parmi les non HPI, il y a des HPI. Par contre, en ce qui concerne les HPI, leur scolarisation dans cet établissement privé, avec un accompagnement adapté, fait suite à des difficultés d’ordres différents, vécus dans des établissements publics qui ne disposent pas de telles possibilités 38 d'accueil. Ce qui nous laisse penser que les difficultés que rencontrent ces HPI peuvent influer sur la stabilité de leurs choix d’intérêts professionnels et peuvent conduire à une instabilité dans leur choix d’orientation, c'est-à-dire à une indécision vocationnelle. Un des facteurs qui explique cette indécision peut être l'anxiété pathologique, sachant que la responsable du suivi de ces élèves nous a fait part des difficultés psychologiques vécues par certains HPI. Quant à l’étude de Lubinski et al. (1995), les HPI sont sélectionnés et suivent un programme spécifique, contrairement à la situation des HPI en France, où la prise en charge reste timide. On peut supposer que ces sujets américains ne vivent pas une instabilité, comme les participants HPI de notre recherche. C- Niveau d’intelligence générale et profils RIASEC Proyer (2006), Bergmann et Eder (2005) par des études chez des sujets tout venant trouvent une corrélation modérée entre l’intelligence générale et les intérêts professionnels. Les résultats de notre étude montrent qu’il n’y a pas de corrélation entre le niveau d’intelligence générale (scores à l’épreuve des dominos) et les profils RIASEC (scores au questionnaire d’intérêts Hexa 3D) chez l’ensemble des sujets et respectivement chez les HPI et les non HPI (cf. tableau 7, page 29). Si le type Investigateur est le plus souvent cité comme dominant chez les HPI, c’est le cas dans l’étude de Lubinski et al. (1995), de Sparfeldt 2007), etc.... Dans notre étude, on observe que pour ce type, la corrélation est élevée entre les domaines des activités et des professions (r = .69) et entre les domaines des qualités et des professions (r = .68). Ce qui laisse supposer que pour cette dimension de la personnalité chez les HPI, les items des activités et ceux des professions actives des représentations similaires et que la représentation qu’ils ont d’eux-mêmes corrèle avec celle des professions qui les intéresse. Par contre la faible corrélation entre le domaine des 39 qualités et celui des professions chez les non HPI peut être interprétée comme le signe d’une immaturité vocationnelle ; c’est-à-dire que les sujets ont du mal à faire le lien entre leurs qualités personnelles et les caractéristiques et les exigences des professions qui leurs sont proposées. Il n’ y a pas de congruence entre la représentation qu’ils ont d’eux-mêmes et les environnements professionnels. A ce propos, Huteau souligne dans une de ses études que l’évolution du système représentatif passe par un processus de décentration qui prend en compte dans la représentation d’une profession, la dimension sociale, les notions de secteur d’activité, et de catégories sociales hiérarchisées… et que cela est loin d’être complète même en classe de terminale. On peut donc dire que nos participants quelque soit leur QI n’ont pas encore atteint le niveau de décentration et d’abstraction dont parle Huteau. Mais comme nous l’avons déjà fait remarqué, le petit nombre de participants à notre recherche est une des limites de nos conclusions. Nous avons également constaté que le type Conventionnel est moins fréquent chez les HPI que chez les non HPI, surtout dans le domaine des qualités (cf. tableau ANOVA, annexe II.2). L'absence de corrélation dans notre étude entre le niveau d’intelligence générale et les types de profils RIASEC nous renvoie au débat initial sur la notion de précocité et en particulier à l’idée que si le QI est l’élément de consensus pour repérer la précocité, il ne saurait en lui seul suffire à tout expliquer d’un individu détecté comme un HPI. Le sujet vit dans un environnement avec lequel il interagit et, comme l’a souligné Vaivre-Douret (2003), la précocité ne préjuge pas du devenir de ces enfants, tout façonnage ou inadéquation de l’environnement (famille, crèche, pairs) étant possible. Ainsi, il est nécessaire d'explorer d'autres variables pouvant expliquer le choix vocationnel. 40 D- L’influence d’autres variables sur le choix des intérêts professionnels Le questionnaire d’intérêts professionnels Hexa 3D que nous avons utilisé concerne les domaines des activités, des qualités, et des professions, et constitue le point fort de notre étude. On peut supposer que des représentations différentes sont activées lors de la passation du questionnaire par les différents stimuli de chaque domaine ; à la différence du Strong utilisé par Lubinski et al. (1995) dans leur étude, qui ne présente que les professions. L’utilisation de noms de métiers a fait l’objet de critiques. Kuder, par exemple, trouve paradoxal de demander à des sujets d’exprimer leurs préférences professionnelles alors que ces variables sont justement l’objet de leur interrogation. D’autres critiques portent sur le fait que les professions proposées parmi les items ne sont pas suffisamment connues par les jeunes. Ces derniers risquent de donner des réponses à partir d’une représentation erronée, voire d’une absence de représentation. L’Hexa 3D permet au sujet d’avoir d’autres représentations que celle des professions : le domaine des qualités, dont les items sont des adjectifs, évoque des traits décrivant les personnes. Chacun de ces adjectifs représente l’un des types de Holland et sont ainsi une expression globale de la personnalité. L’utilisation d’adjectifs de description de soi s’inscrit pleinement dans le cadre des modèles du choix professionnel, comme celui proposé par Huteau (1982), qui explique le choix professionnel à partir d’une mise en relation de représentation de soi et de représentation des professions. Quant au domaine des activités, les verbes choisis sont des verbes d’action. Cette variété qu’offre l’Hexa 3D est un des éléments qui nous a conduits à son utilisation. Enfin, d’autres études ont montré que les liens entre les aptitudes et les intérêts sont modérés, voire faibles (Ackerman & Heggestad, 1997). Il semble qu'un lien plus élevé existe entre intérêts et sentiment d'efficacité (r = .50), et que le sentiment de compétence a un effet direct sur les choix professionnels et un effet indirect, plus marqué, via les intérêts (Lent, Brown & Hackett, 1994). Ce sentiment de compétence serait donc meilleur prédicteur de la 41 cristallisation des intérêts, c'est-à-dire de leur stabilisation. Par ailleurs, Huteau (Vrignaud & Bernaud, 2005), qui situe les intérêts dans le domaine des études sur la motivation. Ainsi, dans notre échantillon HPI, on peut penser que le niveau de motivation varie d'un sujet à l'autre, et qu'ils ne partagent pas tous le même sentiment de compétence, malgré leur QI élevé. Cette hétérogénéité motivationnelle pourrait constituer un facteur modérateur de la précocité vocationnelle et expliquer en partie nos résultats. E- Apport de notre étude à la pratique du Conseiller d’Orientation Psychologue (COP) Les résultats de notre recherche nous amènent à considérer avec précaution dans notre pratique de COP, le cas des élèves qui après un examen psychologique présentent un QI ≥ 130, les situant ainsi dans la catégorie des hauts potentiels intellectuels. En effet, l’absence de différence significative entre les scores du groupe des HPI et celui des non HPI à l’épreuve des dominos et au questionnaire d’intérêts professionnels hexa 3D incite à prendre en compte l’effet d’autres variables notamment psychologiques, familiales, physiologiques, etc... et donc à relativiser la part du QI. On sait que le QI tel qu’il est évalué porte sur l’intelligence académique. Bien entendu, elle est un aspect important de l’intelligence, surtout dans une société comme la nôtre, qui donne un tel poids à la réussite scolaire et qui la considère comme la clé de la réussite sociale. Cependant le développement intellectuel est multidimensionnel et donc il existe d’autres formes de précocité et cela nous renvoie aux intelligences multiples de Gardner. Le haut potentiel intellectuel n’implique pas une avance dans tous les domaines, notamment dans celui du choix vocationnel, c’est-à-dire que la stabilité des intérêts professionnels suppose une stabilité de la personnalité toute entière. Si le questionnaire d’intérêts professionnels Hexa 3D, comme d’autres, permet au COP une passation collective, chaque élève est un cas unique et les résultats au WISC sont un élément important parmi 42 d’autres à considérer lors de l’entretien individuel afin d’amener l’élève à mieux se connaître et à faire un choix éclairé. On ne peut ainsi envisager la même solution sur le plan scolaire pour tout élève repéré comme un haut potentiel intellectuel. Et pourtant, on constate le plus souvent que le « saut de classe » est la solution la plus adoptée pour des raisons telles que l’ennui éprouvé par l’élève, les cours perturbés par ce dernier, etc… Le rapport Delaubier cite d’autres solutions possibles telles que le regroupement des élèves, l’adaptation des contenus ou des rythmes d’apprentissage, l’adaptation des méthodes pédagogiques. Si ces solutions sont envisageables, leur mise en application nécessite une volonté et des moyens conséquents. Jusqu’alors, les établissements privés sont pratiquement les seuls qui adoptent une politique pédagogique spécifique aux hauts potentiels intellectuels. En ce qui concerne les établissements publics, l’Education Nationale, par la circulaire du 25 octobre 2007, commence à prendre en considération cette population d’élèves qui ont une avance intellectuelle mais qui connaissent souvent des difficultés, voire l’échec scolaire. Paradoxalement, le nombre de COP est en nette diminution alors qu’ils possèdent les compétences pour repérer et faire une analyse approfondie des situations et des propositions d’aménagement pour ces élèves. C’est regrettable car, en tant que COP, le suivi des élèves que nous repérons comme HPI peut nous permettre de mener une réflexion au sein de nos équipes de travail sur la conception, la mise en place et l’évaluation de dispositifs spécifiques à cette population. Pour finir, la question qui nous vient à l’idée est celle-ci : par rapport au principe d’égalité des chances et à l’importance accordée au QI dans la réussite scolaire, deux élèves repérés comme HPI et ayant le même QI, l’un issu de milieu défavorisé et scolarisé dans un établissement public et l’autre de milieu favorisé et scolarisé dans un établissement privé doté de dispositifs spécifiques pour les HPI, ont-ils les mêmes probabilités de réussite ? 43 CONCLUSION Au terme de notre étude, les résultats que nous avons obtenus à l’épreuve des dominos et au questionnaires d’intérêts Hexa 3D n’ont pas permis une différenciation significative du groupes des HPI et celui des non HPI de manière globale. Cependant, chez les HPI, les intérêts professionnels sont moins consistants dans le domaine des activités et moins cohérents entre les domaines des activités et des professions que chez les non HPI. Les résultats dénotent un manque de stabilité des intérêts, donc une absence de précocité vocationnelle chez les HPI. Cette quasi absence de différence significative entre les scores des 2 groupes de sujets (HPI et non HPI) peut s'expliquer par: − les contraintes du terrain (faible nombre de participants, biais d'échantillonnage), ce qui nous a révélé la complexité du travail auprès de cette population; − d'autres variables d'ordre psychologique (motivation, troubles psychiques), ce qui montre qu'on ne peut réduire la précocité intellectuelle au seul QI et qu'il existe une grande variabilité inter et intra individuelle chez les HPI. Par rapport aux travaux de Lubinski et al. (1995) qui ont constitué la référence essentielle de notre recherche, cette quasi absence de différence significative entre groupes HPI et non HPI ne va pas dans le même sens que leur conclusion, qui est que les HPI expriment des intérêts professionnels stables plus précocement. Notre étude est une ébauche d'une recherche du lien entre le potentiel intellectuel et les intérêts professionnels et mériterait d'être approfondie par une étude ultérieure, tenant compte des contraintes décrites et du biais d'échantillonnage. 44 BIBLIOGRAPHIE ACKERMAN, P.L., & HEGGESTAD, E.D. (1997). Intelligence, Personnality, and Interests : Evidence for Overlapping Traits. Psychological Bulletin, 121, 219-245. BERGMANN, C., & EDER, F. (2005). Allgemeiner Interessen-Struktur-Test mit UmweltStruktur-Test (UST-R) (General Interest-Struture-Test and Environment-Structure-Test). Göttinngen, Germany : Beltz. BERNAUD, J.L., & PRIOU, P. (1994). Inventaire d’Intérêts Professionnels de RothwellMiller forme révisée, IRMR. Issy-les-Moulineaux: établissements d’Applications Psychotechniques (E.A.P.). BINET, A. (1909). Idées modernes sur les enfants. Paris : Flammarion. BINET, A., & SIMON. T. (1905). Méthodes nouvelles pour le diagnostic du niveau intellectuel des anormaux. 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Kuder Career Search with person match : Career assessment for the 21st century. Journal of Career Assessment, 9 (3), 229-241. Résumé L’objectif de ce travail est d’étudier le lien entre la précocité intellectuelle et la précocité de la stabilité dans le choix des intérêts professionnels, en référence à une des études de Lubinski et al. (1995) sur ce thème. Pour ce faire, nous avons utilisé auprès de 52 élèves de seconde dont 19 HPI et 33 non HPI (groupe contrôle) : - un test de facteur g (test de dominos) qui nous a permis d’évaluer le niveau d’intelligence générale pour tous les participants de notre recherche ; - le questionnaire d’intérêts professionnels Hexa 3D construit sur la base du modèle du RIASEC de Holland, nous permet d’apprécier la stabilité du choix des intérêts professionnels à travers les indices de différenciation, de consistance et de cohérence dans trois domaines (activités, qualités, professions). Les résultats obtenus montrent de manière générale : - qu’il n’ y a pas de corrélation entre le niveau d’intelligence générale et la stabilité du choix des intérêts professionnels, - que le groupe des élèves HPI n’exprime pas des intérêts professionnels significativement plus différenciés, ni plus consistant ou plus cohérents que le groupe des élèves non HPI. Si le petit nombre de participants, nous incite à la prudence quant aux conclusions que nous tirons de nos résultats, l’absence de différence significative constatée entre les scores des deux groupes de participants (HPI et non HPI), nous renvoie au débat sur la signification de la précocité. Ainsi par ra rapport à la pratique du Conseiller d’Orientation Psychologue, lorsque le quotient intellectuel d’un élève le situe dans la tranche de la population de son âge correspondant au haut potentiel intellectuel, d’autres facteurs sont à considérés pour expliquer les difficultés rencontrées et pour mettre en place des aménagements spécifiques. MOTS CLÉS : Précocité ; Haut potentiel intellectuel ; Intérêts professionnels ; RIASEC ; Différenciation ; Consistance ; Cohérence.