des moteurs électriques plus efficaces

Transcription

des moteurs électriques plus efficaces
S olutions
ABB
ENTR A Î N E M E N T
Des moteurs électriques
plus efficaces

Améliorer le rendement des moteurs électriques pour diminuer la consommation
dans l’industrie : c’est l’objet du règlement CE N° 640/2009 voté le 22 juillet 2009
par le Parlement européen. Il n’autorisera en effet à partir du 16 juin 2011 que la
commercialisation des moteurs à haut rendement, équivalent aux modèles
EFF1 d’aujourd’hui, et à partir de 2015 les moteurs à très haut rendement dits
“premium”. Une mesure qui devrait permettre de réduire de 12 % la consommation électrique industrielle sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne.
20
un nouveau règlement concernant les moteurs asynchrones triphasés à cage, qui constituent le gros du parc européen. Ce texte
imposera, en Europe dès 2011, la commercialisation de moteurs haut rendement et, à
Leroy-Somer
I
ls sont partout. Dans les pompes, les
élévateurs, les compresseurs, les convoyeurs, les ventilateurs, les fraiseuses,
les découpeuses… Rien qu’en France,
on dénombre 12 millions, 12 millions de
laborieux qui font tourner l’industrie. Eux,
ce sont les moteurs électriques. En échange
de leurs précieux services,
ils engloutissent
L’essentiel
près de 70 % de
l’électricité consom Le règlement européen
du 22 juillet 2009 fixe
mée par le secteur. Et
des échéances pour
toutes les études sur la
le marquage des moteurs
question arrivent à la
électriques selon
même conclusion : le
les nouvelles classes
parc français est
de rendement IE et pour
vieillissant et peu effil’interdiction de commercace. Surdimensionnés
cialisation des moteurs aux
ou à bas rendement,
rendements les plus faibles.
quand ce n’est pas les
 A l’échelle européenne,
deux à la fois, ils sont
la consommation annuelle
la source d’un énorme
d’électricité s’élève à
gaspillage d’énergie.
1067 TWh, soit 427 millions
Pour juguler la dilapide tonnes d’émissions
dation de l’électricité
de CO2 (chiffres 2005)
et diminuer les rejets
 Son application vise à
des émissions de CO2,
réduire cette consommation
de 135 TWh/an d’ici à 2020.
le Parlement européen a voté en juillet
compter de 2015, de celle des moteurs à très
haut rendement dit “premium” en deux
étapes (cf. encadré 1). L’objectif annoncé est
d’économiser 135 TWh/an d’ici à 2020 en
Europe, soit l’équivalent de la consommation de la Suède, et de réduire chaque année
les émissions de CO2 de 63 millions de tonnes. La mise en application de ce nouveau
règlement devrait donner un coup de vert
au monde industriel. Mais cette petite révolution ne se fera pas sans mal et ne résoudra
pas tous les problèmes.
Les moteurs électriques se déclinent en
deux familles : les moteurs à courant continu et les moteurs à courant alternatif. Les
premiers sont nettement en déclin en
Europe. La technologie est ancienne et il
leur est communément reproché la lourdeur de la maintenance. Selon des chiffres
issus d’un rapport de l’Energy Using
Product, plus de 96 % des ventes en
Europe en 2003 concernaient des moteurs à courant alternatif. Et parmi eux, les
moteurs asynchrones triphasés consti-
Les variateurs
sont des dispositifs
électroniques
capables
de commander
la vitesse
d’un moteur
électrique.
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tuent 87 % du marché. Pas étonnant que
l’Union européenne se soit penchée depuis des années sur leurs rendements.
Depuis 1998 en effet, la plupart des appareils de ce type vendus en Europe sont
soumis à une classification issue d’une collaboration du CEMEP (Comité européen
de constructeurs de machines électriques
et électroniques de puissance) et de la
Commission européenne : la classification
EFF. Elle définit trois classes : EFF1, correspondant aux plus hauts rendements, EFF2
et EFF3. Aujourd’hui encore, seuls les moteurs asynchrones triphasés 400V/50 Hz
dont la puissance va de 1,1 à 90 kW sont
concernés par le label EFF.
Les moteurs électriques sont partout : de l’industrie de la pâte à papier jusqu’ à la pétrochimie.
pour Weg France. Selon un document de travail de la Commission européenne datant
Une succession de textes
de 2009, cette directive concernerait un voréglementaires
lume de 10,3 millions de moteurs par an
Pourquoi pas les puissances plus élevées ? représentant un chiffre d’affaire de plus de
« Parce que les gros moteurs, moins répandus, ont par 2,5 milliards d’euros. De fait, quelques
nature des rendements plus élevés que les petits », ex- pourcentages gagnés sur le rendement des
plique Christian Sibileau, responsable com- moteurs de plus fortes puissances permetmercial chez Sew-Usocome France. Le rende- traient de limiter significativement la facture
ment est en effet le rapport entre l’énergie électrique. De plus, la classification EFF s’aprestituée et l’énergie consommée. « Or, un puie sur une méthode de calcul définie dans
certain nombre de pertes sont indépendantes de la taille la norme EN/CEI 60034-2 + A1 (1996) +
du moteur : leur part est donc plus importante dans les A2 (1996). Pour obtenir le rendement d’un
moteurs de faible puissance », continue-t-il. Mais moteur, il faut retrancher à la puissance condepuis dix ans, le monde des moteurs a sommée la totalité des pertes subies dans le
connu un certain nombre de remous, et la stator comme dans le rotor. Dans le premier,
classification EFF s’est vite avérée trop limi- une partie de la puissance est dissipée dans
tée. « Depuis l’entrée en vigueur du protocole de Kyoto, le bobinage sous forme de chaleur (pertes
l’Europe entend bien mener une politique volontariste joules stator) et une autre à cause du cycle
en matière environnementale. C’est dans cette lignée d’hystérésis et des courants de Foucault dans
qu’est parue, le 6 juillet 2005, la directive 2005/32/ les tôles magnétiques (pertes fer stator).
CE, qui établit un cadre pour la fixation d’exigences en Dans le rotor, on perd encore de l’énergie
matière d’écoconception applicables aux produits con- sous forme de chaleur (pertes joules rotor),
sommateurs d’énergie (EuP). » décrypte Yves par frottement et par ventilation (pertes méJamet, responsable du service affaires projets caniques) et à cause des imperfections méMESURES 822 - FÉVRIER 2010 - www.mesures.com
caniques et des fuites de champs magnétiques (pertes supplémentaires). Ces dernières
sont difficiles à mesurer, si bien que la
norme EN/CEI 60034-2 + A1 (1996) + A2
(1996) les estimait automatiquement à
0,5 % de la puissance absorbée. Or cette
valeur est souvent trop favorable.
En 2007 apparaît donc une norme corrigée,
nommée EN/CEI 60034-2-1 qui prend en
compte dans le calcul la juste valeur de ces
pertes supplémentaires. Estimées ou mesurées selon cette nouvelle méthode, elles peuvent atteindre 2,5 %. « C’est d’ailleurs cette
procédure que prend en compte la norme NEMA en
vigueur aux Etats-Unis. Sans compter que la classification américaine comptait déjà à l’époque un
label plus performant que l’EFF1, nommé “premium”. Et puis l’échelle EFF est fermée : pas facile
d’inventer des nouveaux noms de classes pour les
moteurs les plus performants », ajoute Michel
Metzger, responsable marketing moteurs,
variateurs, basse tension chez Siemens. Après
un éventuel EFF0, on peut en effet se demander quels noms auraient imaginé les rédacteurs des nouvelles normes…
➜
21
Solutions
Solutions
de rendements
Tableau comparatif EFF/IE/NEMA
CEMEP
EUA (Etats-Unis)
EN/CEI 60034-30
Rendement “super premium”
IE4 (à l’étude)
Rendement “premium”
Haut rendement
EFF1
Rendement standard
EFF2
Rendement faible
EFF3
NEMA premium
IE3
EPAct
IE2
IE1
Performances du moteur W22 de Weg à 3000 t/mn et à 50 Hz
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en
Comment améliorer le rendement d’un moteur ?
Pour booster le rendement d’un moteur, rien ne doit être laissé au hasard.
L’optimisation du design
des paliers ainsi que
la qualité des roulements
permettent de réduire
les pertes par frottement.
Un ventilateur efficace réduit
les pertes dues à la ventilation.
Une augmentation du flux
d’air réduit les pertes
mécaniques.
L’utilisation de tôles
magnétiques de haute qualité
réduit les pertes en fer
et notamment celles dues
au cycle d’hystérésis.
Source :Yves Jamet,Weg France SAS
22
L’augmentation du cuivre
et des sections des bobines
permettent la diminution
des pertes statoriques
par effet joule.
La qualité des matériaux
et les sections utilisées dans
les anneaux de court circuitage
et les barres permettent
de réduire les pertes rotoriques.
Un stator de grande
longueur permet
de diminuer les densités
de champ magnétique,
améliorant la capacité
de refroidissement
du moteur. Réduction
des pertes magnétiques
en charge.
Un bon dimensionnement
des encoches permet
de diminuer les pertes
magnétiques et l’utilisation
de spires de plus grand
diamètre.
En octobre 2008, une nouvelle norme européenne, EN/CEI 60034-30, est donc venue
enrichir la littérature sur les moteurs. Son but
est d’harmoniser un nouveau système international de rendements. Elle définit par la
même occasion de nouveaux standards : IE1,
ou rendement standard qui correspond au
EFF2, IE2 ou haut rendement équivalent au
EFF1 et IE3, une nouvelle classe aux rendements encore optimisés, équivalent au premium américain. (cf. tableau) Le calcul des
rendements se fait alors selon la méthode
normalisée pour la détermination plus précise des pertes et du rendement à partir d’essais (EN/CEI 60034-2-1). Mais jusqu’à cette
année, rien n’obligeait les fabricants à plaquer leurs moteurs avec les nouvelles classes,
et rien non plus ne conditionnait leur mise
sur le marché. Il a fallu attendre le 22 juillet
2009 pour fixer des échéances. Ce jour-là, le
Parlement européen signait un nouveau règlement autorisant la commercialisation de
moteurs plaqués du code IE à condition
qu’ils soient conformes à cette fameuse
norme. Il interdit en outre à partir du
16 juin 2011 la commercialisation des moteurs affichant un rendement inférieur à IE2
dans toute l’Europe et ceux inférieur à IE3 à
partir de 2015/2017. Il faut noter qu’à partir de ces dates, les moteurs IE2 pourront
encore être vendus s’ils sont associés à un
variateur de vitesse.
La nouvelle est loin d’être anodine quand on
sait que l’écrasante majorité des moteurs
vendus à ce jour en Union européenne sont
plaqués EFF2 et que seuls un dixième d’entre eux environ sont classés EFF1, l’équivalent de IE2. Mais le règlement ne dit rien des
moteurs qui se trouvent déjà dans les circuits
de distribution. « Il ne précise pas si l’échéance
du 16 juin 2011 concerne seulement la mise sur
le marché, qui ne touche que les constructeurs, ou si
elle s’applique aussi à la mise en service. Dans ce
cas, il faudra une prise de position claire sur le devenir des moteurs stockés chez les bobiniers et les
revendeurs » développe Michel Metzger
(Siemens).
La durée de vie moyenne d’un moteur se
situe, selon les appareils, autour de 15 ou
20 ans. Si l’on prend comme hypothèse que
les moteurs déjà installés seront utilisés jusqu’à la fin de leur vie et que les petits circuits
de distribution pourront encore écouler leur
stock après la mise en application du règlement, on peut estimer à une vingtaine d’années la durée nécessaire avant que le parc
français ne soit entièrement renouvelé par
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des moteurs à plus haut rendement. Cela peut
paraître long, mais c’est finalement court par
rapport à ce que cette durée aurait pu être.
« Certains de nos clients voient les exigences de ce
nouveau règlement comme un argument de vente.
Mais la majorité d’entre eux l’appliqueront parce
que c’est obligatoire, et ne l’auraient probablement
pas fait dans les mêmes délais s’ils n’y étaient contraints », explique Jean-François Soguel, responsable marketing moteurs à haut rendement chez Leroy-Somer. L’annonce n’est pas
nouvelle : les industriels, en particulier les
grands groupes, peinent à intégrer de leur
propre initiative la problématique d’une
meilleure efficacité énergétique. Et pour
cause ! l’économie a… un prix. A l’achat, un
moteur IE1 coûtera environ 15 % moins cher
qu’un moteur IE2, qui vaudra lui même
15 % moins cher qu’un moteur IE3. Car
pour améliorer le rendement d’un moteur, il
faut optimiser chacun de ses constituants, et
cela passe en particulier par l’utilisation de
matériaux de plus grande qualité et en plus
grande quantité. (cf. infographie). Pourtant,
tous les fabricants s’accordent à penser que
ne tenir compte que du prix à l’achat n’est
pas représentatif, surtout en France où l’électricité est parmi les moins chère en Europe.
« Il est crucial pour nos clients de raisonner en terme
de prix global et de calculer dans quel délai ils observeront un retour sur investissement », illustre
Philippe Faye, responsable de la communication chez Leroy-Somer. Selon les estimations
courantes, le coût à l’achat ne représenterait
pas plus de 2 % du coût du moteur sur toute
sa durée de vie alors que la consommation
électrique en engloutit 95 %. Plusieurs fabricants ont d’ores et déjà pris le parti de sensibiliser leurs clients. C’est ainsi le cas de Weg,
qui effectue le rapide calcul suivant. Prenons
l’exemple de 40 moteurs de 2,2 kWh fonctionnant 24 heures sur 24, 350 jours par an
(soit 8 400 heures). En estimant à 0,07 euro
le coût moyen d’un kilowattheure l’électricité
et en faisant un bilan sur 10 ans, passer d’un
moteur IE1 à un moteur IE2 réduirait de plus
de 35 000 euros la facture énergétique.
Un règlement crucial
du point de vue des fabricants
Leur point de vue est pertinent, mais dans
les faits, cette notion de coût global ne parle
pas à tout le monde. La plupart des acheteurs
de moteurs sont en effet des intégrateurs, pas
les utilisateurs finaux. Ils raisonnent donc sur
des prix de vente et ne se soucient pas toujours du cycle de vie complet du moteur. Et
même lorsque le client des fabricants est
l’utilisateur, il peut négliger cet aspect. Ce
peut, par exemple, être le cas lorsque le ser-
La norme et le règlement européen en clair
La norme EN/CEI 60034-30, définissant les classes IE1, IE2, IE3,
a un domaine d’application plus vaste que le label CEMEP
de rendements EFF. Elle concerne les moteurs asynchrones à
induction triphasés à cage (moteur seul, moto réducteur ou moteur
frein) dont la tension n’excède pas 1 000 V et dont la puissance va
de 0,75 kW à 375 kW ; 50 ou 60 Hz ; 2, 4 ou 6 pôles ; en service
de fonctionnement S1 (permanent) ou S3 (périodique intermittent)
Somer
Leroyavec un facteur de service de 80 % et plus. En sont exclus les moteurs
Certains constructeurs,
intégrés à une machine et ne pouvant être testés indépendamment comme Leroy-Somer, ont déjà plaqué
d’elle et les moteurs de conception spécifique pour la vitesse variable leurs gammes correspondantes
(norme EN/CEI 60034-25). Certains moteurs sont couverts, mais il est avec le code IE mentionné
admis qu’il ne puisse atteindre le niveau IE3. C’est le cas des moteurs dans le règlement du 22 juillet 2009.
de zone dangereuse (accord de l’IEC 60079-0), avec mode
de refroidissement particulier, à carcasse réduite, soumis à des exigences spécifiques, du réseau
d’alimentation ou de la machine entraînée, ou encore environnementales (altitude élevée, haute
et basse température). Le règlement européen du 22 juillet 2009 offre, à partir de la date
de sa signature, la possibilité de plaquer les moteurs avec le code IE s’ils respectent la norme CEI
60034-30. Il impose à partir du 16 juin 2011 le marquage des moteurs concernés avec le code IE
et interdit la commercialisation des moteurs de classes inférieures à IE2. A partir du 1er janvier 2015,
l’interdiction est élargie aux moteurs dont la puissance va de 7,5 à 375 kW et de classe inférieure
ou égale à IE2. Et à partir du 1er janvier 2017, tous les moteurs devront afficher un rendement au moins
supérieur à celui prévu par la classe IE3. A ces deux dernières échéances, les IE2 pourront encore être
commercialisés si et seulement s’ils sont associés à un variateur de vitesse.
vice qui achète le matériel n’est pas celui qui
règle les factures d’électricité… Dans ces
conditions, pas évident pour les constructeurs de faire passer un message clair sur les
nouvelles normes et directives. « Tout arrive un
peu en même temps, à peine dix ans après la mise
en place du label EFF. Entre la nouvelle norme sur
le calcul, celle qui définit les nouvelles classes et les
échéances prévues par le règlement du 22 juillet, nos
clients peuvent vite se perdre ! » compatit Régis
Buchmann, responsable de l’activité moteurs
basse tension pour ABB France.
Pour autant, il était crucial du point de vue
des fabricants que le parlement vote un tel
règlement. « Tout ce qui tend à améliorer la fiabilité sur les valeurs électriques fournis par les constructeurs est bénéfique. Sans les obligations prévues
par le règlement, aucun d’entre nous n’aurait couru
le risque de se tirer une balle dans le pied en appliquant des méthodes de calcul et des classifications
trop exigeantes par rapport à ses concurrents » explique Régis Buchmann (ABB). Les constructeurs ont une autre raison de se réjouir
du vote du nouveau règlement européen.
Son application devrait en effet permettre
d’assainir le marché. Certains estiment
même que la directive EuP et son règlement
ne vont pas assez loin. « Nous regrettons que
certains types de moteurs, et en particulier ceux qui
sont certifiés ATEX, soient exclus du règlement CE
N° 640/2009. La norme CEI couvre ces moteurs,
tout en précisant que, de par les contraintes de conception inhérentes aux moteurs antidéflagrants, il
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est concevable que ces derniers ne puissent pas forcément atteindre la plus haute classe de rendement
IE3. Rien ne justifie d’un point de vue technologique
l’exclusion de cette famille de moteur du règlement
EuP : Weg en fait la preuve en proposant une
gamme ATEX de classe IE2. C’est d’autant plus
dommage car ces appareils sont souvent utilisés en
pétrochimie des milliers d’heures par an, en fonctionnement continu, sur des pompes, des ventilateurs.
Avec, dans ce cas, un temps de retour sur investissement court pour l’exploitant », déplore Yves
Jamet (Weg France). ABB, qui propose aussi
une gamme de moteurs ATEX et EFF1 a le
même regret : « Les moteurs utilisés en environnement gaz ou poussière représentent un large marché et sont aussi vieillissants. Nos clients auraient ➜
Siemens
➜ De nouveaux standards
Les moteurs à rendement EFF1 (futur IE2), à l’instar de la gamme 1LE1 de Siemens,
représentent aujourd‘hui en France 10 % du marché, bien moins qu’au Royaume-Uni
où l‘électricité est plus chère.
23
Solutions
Vers une classe IE4 ?
Sew-Usocome
La norme EN/CEI 60034-30 ne va jusque-là, mais des discussions se tiennent actuellement
pour définir une nouvelle classe qui porterait le nom de “high premium”.
D’après les chiffres les plus vraisemblables, ses seuils de rendements seraient 15 % meilleurs
que ceux de l’IE3 - avec un coût à l’achat qui risque lui aussi d’être très élevé. Mais les moteurs
asynchrones atteindront vraisemblablement leurs performances maximales avec l’IE3. Il faudra miser
sur d’autres technologies, comme les moteurs à aimants permanents, pour améliorer encore
les rendements. Certains fabricants proposent d’ores et déjà des appareils aux rendements très
élevés, qui répondraient à ce que pourrait être la classe IE4. C’est par exemple le cas
de Sew-Usocome. La société propose pour certaines puissances son unité mécatronique Movigear,
qui réunit en un même carter le réducteur, le moteur et l’électronique appropriée. Elle annonce
que « le rendement moteur de l’unité est déjà largement supérieur au seuil défini par la classe
de rendement IE4 (Super Premium Efficiency), classe actuellement encore
au stade de projet au sein de la Commission électronique internationale ».
De son côté, Leroy-Somer a développé la gamme de motovariateurs
Dyneo, des moteurs synchrones à aimants équipés de variateurs,
dont le rendement serait « largement au-delà des seuils prévus pour IE4 ».
Des prototypes de moteurs utilisant la même technologie sont à l’étude
chez ABB. La course aux innovations est lancée.
De nouvelles technologies permettront d’atteindre des seuils
de rendements encore meilleurs que l’IE3 : c’est ce que propose déjà
Sew-Usocome à travers sa gamme Movigear utilisables sur les convoyeurs.
Sew-Usocome
➜ profité du remplacement de leurs vieux moteurs
par des nouveaux, certifiés ATEX, pour acquérir un
système à haut rendement ». L’heure est à la saine
compétition… Mais tous les fabricants s’inquiètent d’un flou dans le règlement qui ne
résout pas totalement la question. Le texte
indique dans son article 5, “Procédure de
vérification aux fins de la surveillance du
marché”, « Lorsqu’elles procèdent aux contrôles
dans le cadre de la surveillance du marché visée à
l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2005/32/
CE, les autorités des états membres appliquent la
procédure de vérification fixée à l’annexe III du
présent règlement. ». La procédure en question
se devra d’être fiable, précise et reproductible
et tiendra compte de l’état de l’art en la matière, afin d’assurer la comparabilité des mesures et une concurrence loyale. Mais toute
l’ambiguïté de l’article 5 repose sur l’expression « les autorités des états membres ». Les fabricants devront-ils se charger eux-mêmes
de certifier leurs appareils ? Ou bien des laboratoires indépendants seront-ils mandatés
pour tester les produits ? Dans un cas comme
dans l’autre, des questions demeurent.
Prenons l’exemple d’un moteur français
vendu en Italie. « Serait-ce à la France ou à l’Italie de s’assurer de la conformité du lot aux exigences du règlement ? Et s’il s’agissait d’un moteur
asiatique, aux frais de qui cette procédure serait-elle
suivie ? », s’interroge Jean-François Soguel
(Leroy-Somer). Selon le document de travail
de la Commission européenne, l’importation
extra-européenne pèserait pour 15 à 20 %
du chiffre d’affaires concerné par la directive
EuP. Pour les plus grands fabricants présents
en France, la certification en externe reste la
meilleure solution et ils attendent que la
phrase quelque peu sibylline du règlement
soit précisée par une future norme harmonisée. Mais quelle que soit l’option choisie,
l’application du règlement aura un coût certain. . La plupart des constructeurs ont
aujourd’hui une gamme EFF1, équivalent
IE2, qui est appelée à disparaître. Lancer une
nouvelle gamme nécessite naturellement des
études préalables ainsi que des tests pour s’assurer qu’elle correspond bien à la classe à
laquelle elle prétend. Sans compter les frais
de communication auprès des clients, ainsi
Le rendement d’un moteur peut être amélioré
en utilisant des rotors en cuivre,
comme sur ce moteur conçu par Sew-Usocome.
24
que les formations des forces de vente, réparateurs et distributeurs. Leroy-Somer estime
ainsi à quelques millions d’euros les investissements déjà engagés pour anticiper l’application du règlement européen. Naturellement,
les plus gros groupes, en particulier ceux qui
ont l’habitude de renouveler leurs gammes
régulièrement, feront aisément face. Mais
même si les échéances prévues ont été définies pour laisser à tous, petits et grands, le
temps de se conformer à la norme, il y a fort
à parier que les plus fragiles d’entre eux
auront, dans un premier temps au moins, des
difficultés à suivre la cadence.
Les constructeurs de variateurs, qui sont parfois aussi fabricants de moteurs, ont quant à
eux toutes les raisons de se réjouir du vote
du nouveau règlement. Le marché a en effet
la capacité de s’élargir : aujourd’hui, seuls 15
à 20 % du parc sont équipés de variateurs.
« La précédente norme date de 1999 : tout le monde
ne sera pas prêt à intégrer des moteurs premium d’ici
à 2015. Et comme cette échéance permet d’utiliser
des moteurs IE2 avec des variateurs, il semble probable que nous en vendions plus dans les années à
venir », explique Jean-Michel Cosquer, expert
mécatronique chez Schneider Electric.
Mais si les regards sont aujourd’hui braqués
sur les fabricants de moteurs, ils pourraient
bientôt se tourner vers les intégrateurs. Car
optimiser le rendement d’un moteur n’a de
sens, en terme d’économie d’énergie, que
s’il est correctement dimensionné. Un moteur avec un rendement nominal excellent,
et fonctionnant en permanence en sous
charge, dégrade son rendement, son facteur
de puissance et alourdit la consommation
électrique globale du système au lieu de l’alléger. L’adjonction d’un variateur, si l’ensemble de la chaîne n’est pas optimisée, ne résorbera pas tous les gaspillages. « La première
des questions à se poser lorsqu’on intègre des moteurs
est : quelle est la puissance dont j’ai besoin ? Si tous
les intégrateurs y répondaient précisément, nous
mettrions le doigt sur un gros gisement d’économie » illustre Christian Sibileau, Sew-Usocome.
Chaque acteur de la chaîne ayant tendance à
prendre de larges marges d’erreur, le surdimensionnement peut être très significatif.
Autour du moteur, d’autres sources d’économie sont identifiables. Revoir la transmission de puissance, mieux lubrifier les paliers
et les roulements, colmater les fuites dans les
circuits à air comprimer ou encore éviter les
ponts thermiques : voilà autant d’actions qui
limiteraient au final la consommation électrique des systèmes industries.
De gré ou de force, tout le monde devra finalement mettre la main à la pâte.
Anne Orliac
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