Mairie de Maubeuge

Transcription

Mairie de Maubeuge
P r o c è s “ D r oit d e cu issag e à la mairie”
Causette
définitivement
tirée d’affaire !
Causette a gagné face au député du Nord et maire (PS) de Maubeuge, Rémi Pauvros, celui-ci n’ayant pas fait
appel du jugement que le tribunal d’Avesnes-sur-Helpe (59) a rendu le 19 décembre dernier. Sur toute la ligne,
Rémi Pauvros a perdu. Et pas à moitié. Parfois, il vaut mieux réfléchir avant de jouer les vertueux offensés.
D
urant le procès du 24 octobre – auquel M. ­Pauvros
n’a pas daigné assister –, la vice-procureure affirmait déjà que, « à partir du moment où les faits mentionnés dans l’article sont exacts, on [pourrait] difficilement entrer en
voie de condamnation ». Pour rappel, dans le cadre d’une enquête
intitulée « Droit de cuissage à la mairie » (voir Causette #23),
nous racontions comment, dans plusieurs mairies ainsi qu’à
l’Assemblée nationale, des femmes se plaignant de harcèlement sexuel et même de viols avaient vu leurs accusations
étouffées en interne, et surtout pas dénoncées au parquet.
Plus précisément, Causette rapportait que Rémi Pauvros
n’avait pas alerté le ministère public – ce qui est pourtant une
obligation légale­ – après qu’une de ses employées s’était
plainte d’avoir été violée à plusieurs reprises par quatre
membres du PS (parmi lesquels des élus, un directeur de cabinet et un salarié de la fédération du Nord). À la barre,
Me Simoneau, l’avocat du maire de Maubeuge, a tenté de faire
valoir que notre « relatation des faits [était] extrêmement violente et
diffamatoire ». Avant d’ajouter : « Nous sommes victimes d’imputation de faits qui porte atteinte à notre honneur. » Ah bon ?
Pourtant, dans notre article, la première adjointe de M. ­Pauvros
nous avait confié, sans rire : « N’oubliez pas que ces gens [les violeurs présumés, ndlr] sont mariés. Comprenez, on ne peut pas porter
des accusations quand il y a des familles derrière. » Un argument
repris par le conseil de M. Pauvros pendant l’audience :
« En France, on ne dénonce pas comme ça ! » s’était-il cru malin de
plaider. Reprenant les conclusions de notre avocate, Me Nadia
Benarfa, les juges ont finalement déclaré que Causette n’avait
pas diffamé Rémi Pauvros :
« [...] Si Rémi Pauvros estime que les références à une affaire
cachée de viols en Mairie de Maubeuge et d’omerta, concluant
que le Maire de Maubeuge a commis une entorse à la loi en
ne faisant rien, favorisant ainsi la perpétration de l’horreur
pendant 5 ans, et la dissimulation de faits à la Justice, portent
gravement atteinte à son honneur, à sa considération et à sa
réputation, il convient de faire le constat qu’il s’agit là d’une
interprétation de l’article paru, au travers d’une réduction de
celui-ci à quelques mots alors qu’il s’agissait en réalité du
paragraphe suivant : “Alors, pourquoi ne pas avoir alerté la justice ?
‘Anna a bien précisé que son but n’était pas de déstabiliser la mairie,
répond l’adjointe. Loin d’elle l’idée de créer un remous terrible […]
Donc, on s’est dit qu’on allait respecter sa volonté.’ Voilà comment la
mairie de Maubeuge justifie son entorse à la loi. Car c’en est une : Rémi
Pauvros, maire, membre du Conseil national PS et aspirant député, est
tenu d’avertir sans délai le procureur dans les cas où il acquiert
la connaissance d’un crime ou d’un délit. Il ne l’a pas fait”.[...] »
Nous sommes aujourd’hui choquées de nous rendre compte
que, définitivement, le viol est toujours considéré comme un
sous-crime (voir Causette #29). Allez, sous le tapis, réglons ça
entre nous et n’en parlons plus, ces gens ont des familles, vous
savez… C’est exactement ce qu’a fait Rémi Pauvros. Les juges
ne s’y sont pas trompés, et ont percé à jour ce que notre avocate a qualifié de « vaste entreprise de communication du candidat à
la députation, s’estimant à tort diffamé en pleine période électorale ».
Nous nous réjouissons de l’issue de ce procès, et Causette
continue plus que jamais de rester vigilante. Quant à l’information judiciaire sur les viols dont Anna 1 affirme avoir été
victime en mairie de Maubeuge, elle est toujours en cours.
Nous vous tiendrons informées de ses suites.
Merci encore pour vos nombreux soutiens.
Grégory LASSUS-DEBAT
à lire Notre dossier « Droit de cuissage à la mairie », en accès libre
sur Causette.fr
1. Le prénom a été modifié.
CAUSETTE #32 • 30