Evaluation médicale du patient candidat à la chirurgie

Transcription

Evaluation médicale du patient candidat à la chirurgie
Evaluation médicale du patient candidat à la chirurgie
OBJECTIFS
- Connaître les buts de l’évaluation préanesthésique du futur opéré
- Définir la stratégie de prescription des examens complémentaires préopératoires
(RMO)
- Connaître la classification ASA
- Connaître les textes réglementaires à propos de la consultation préanesthésique
EVALUATION MEDICALE DU PATIENT CANDIDAT
A LA CHIRURGIE
A. Steib
OBJECTIFS
Connaître les buts de l'évaluation préanesthésique du futur opéré
Définir la stratégie de prescription des examens complémentaires préopératoires (RMO)
Connaître la classification ASA
Connaître les textes réglementaires à propos de la consultation préanesthésique
L'évaluation médicale du patient candidat à la chirurgie représente la première étape de la prise en
charge anesthésique
BUTS
Les objectifs sont multiples :
→ Contact, réduction de l'anxiété
→ Appréciation de l'état clinique permettant
•
l'évaluation du risque (morbidité, mortalité)
•
le choix du monitorage
•
le niveau de prise en charge
préparation préopératoire
surveillance postopératoire : soins intensifs, réanimation
→Le contexte de la chirurgie réglée est différent du cadre de l'urgence
ASPECT MEDICOLEGAL
La consultation d'anesthésie (décret 5 décembre 1994) est obligatoire pour tout acte programmé.
Elle doit avoir lieu "quelques jours avant l'acte". Elle est effectuée par un médecin anesthésisteréanimateur.
L'interrogatoire et l'examen clinique représentent la seule obligation contractuelle.
Les examens complémentaires sont prescrits selon les données précédentes : il n'y a pas d'obligation
de prescription systématique.
Les RMO (références médicales opposables) fixent les indications d'examens dans certaines
circonstances (cf. infra).
DONNEES INTERROGATOIRE
L'interrogatoire s'attache à déterminer les différents antécédents :
- Antécédents médicaux
cardiovasculaires
respiratoires
neurologiques
⇒
état actuel de la maladie
-
-
-
dernière évaluation par les spécialistes
traitement en cours
stabilité de la pathologie
Antécédents chirurgicaux
Antécédents anesthésiques
types : ALR, AG, sédation
accidents, incidents personnels ou familiaux (choc allergique, retard réveil, hyperthermie
maligne, porphyrie…)
Antécédents allergiques
médicaments (antibiotiques, antalgiques, curares), aliments
terrain atopique (asthme, rhinite, eczéma)
allergie au latex (responsable de 20% des chocs graves en France)
La qualité de l'hémostase sera recherchée : notion de saignement aN si coupure, brossage des
dents, rasage, prise de médicaments interférant avec l'hémostase (AINS, aspirine, Ticlopidine,
AVK, héparine)
DONNES EXAMEN CLINIQUE
L'examen clinique est orienté vers certains points particuliers
-
Poids, taille, état nutritionnel
Etat veineux :
accès pour perfusion
varices : risque thromboembolique
- Difficulté prévisible d'intubation suspectée devant
un cou court, une malformation cervicofaciale
une ouverture de bouche limitée
un score de Mallampati de 3 ou 4 (représentation des stades de Mallampati : cf. cours
sur l'intubation)
- L'état dentaire sera consigné : prothèse, dents mobiles
- L'évaluation des grandes fonctions porte sur les appareils
cardiovasculaire : pouls, TA, auscultation cœur, carotides
pulmonaire : auscultation
neurologique : atteinte musculaire, fonctions cognitives
⇒ L'ensemble des données est consigné par écrit sur la feuille d'anesthésie.
QUELS EXAMENS COMPLEMENTAIRES ?
Différentes catégories peuvent être individualisées
- certains sont justifiés par l'existence d'une maladie connue, stabilisée ou évolutive
- d'autres servent de tests de référence pour une comparaison entre l'état préopératoire et l'état
postopératoire
- les derniers sont des tests de dépistage d'affections asymptomatiques sur le plan clinique =
examens routine comportant :
groupe sanguin, agglutinines, ECG, Rx thorax, ionogramme sanguine, minicrase, NFS,
plaquettes
L'intérêt de ces tests apparaît à la lumière des exemples suivants :
1er cas : patient ayant une affection médicale connue
Les examens complémentaires permettent une réalisation d'un "état des lieux" et l'évaluation des
répercussions du traitement
Ex. : affectation cardiovasculair e (coronarographie, insuffisance cardiaque…)
ECG, Rx thorax
Echographie cardiaque
Epreuve d'effort
Scintigraphie myocardique
Ventriculographie
Coronarographie
Ionogramme si diurétiques
Créatinine si digitaliques, IEC
Hémostase si anticoagulants : TQ : AVK
TCA-TT : Héparine
TS : aspirine, Ticlopidine
Ex : affection pulmonaire (BPCO)
Rx Thorax – ECG
Gazométrie : pCO2-pO2
EFR :
∈ restrictif
∈ obstructif
réversibilité β+
Théophyllinémie…
2e cas : test de référence préopératoire
Rx du thorax avant une chirurgie digestive majeure
Bilan d'hémostase avant une hépatectomie
3e cas : interrogatoire + examen clinique = sp
La question que l'on se pose est de savoir si dans ce cas la réalisation d'examens de routine
est indispensable et s'ils vont influencer la décision médicale. Il s'avère que dans la plupart des cas
la réponse est négative ce qui a conduit à l'élaboration des RMO (références médicales opposables).
Les RMO sont définies pour des patients entre 3 et 55 ans qui doivent bénéficie r d'une
chirurgie mineure, n'ayant pas d'incidence sur grandes fonctions (ce qui exclut la neurochirurgie, la
chirurgie thoracique, abdominale, rénale …), en dehors d'un contexte d'urgence, en l'absence
d'antécédents et d'anomalie à l'examen clinique.
Sous ces conditions, il n'y a pas lieu de faire :
- une Rx du thorax systématique
- un ECG chez l'homme avant 40 ans
chez la femme avant 50 ans
- un ionogramme sanguin
- des dosages du cholestérol, triglycérides, phosphatases alcalines, gamma GT
- une fibrinémie, un dosage d'ATIII.
Concernant les autres paramètres, les règles sont plus floues
NFS : la fréquence d'anémie = 18‰
+ fréquente chez la femme, le patient âgé, les migrants (SE Asie, Antilles, Afrique)
Le bilan d'hémostase est inutile si l'interrogatoire est négatif
Cependant beaucoup d'anesthésistes souhaitent en disposer avant la réalisation d'une ALR
Le groupe sanguin + RAI sera demandé en cas de chirurgie à risque hémorragique
Au total, la prescription raisonnée des examens complémentaires permet une ↓ coût.
CONSEQUENCE DE L'EVALUATION
1. Evaluation risque
Plusieurs classifications ont été établies à partir des données précédentes pour quantifier le
risque anesthésique. La plus connue est la classification ASA (American Society of
Anesthesiologists)
Elle classe les patients en 5 catégories de risque croissant
ASA 1
ASA 2
ASA 3
ASA 4
ASA 5
: Patient n'ayant pas d'affection autre que celle qui nécessite l'opération projetée
: Perturbation modérée d'une grande fonction
: Perturbation grave d'une grande fonction
: Risque vital imminent
: Moribond
2. Le choix de la technique d'anesthésie et du monitorage
Dépend du type de chirurgie (mineure ou lourde, hémorragique ou non), de son siège, et de l'état
du patient.
L'évaluation préopératoire permet de déterminer la stratégie anesthésique
- prémédication
anxiolytique : si anxiété, appréhension,
antihistaminique : si terrain allergique
- type d'anesthésie : AG ou ALR ou sédation
- monitorage : KT artériel, KT veineux central, Swan Ganz
- intubation : si une difficulté est prévisible ⇒ préparation d'un matériel spécifique
- protocole d'analgésie postopératoire (médicaments, anesthésie péridurale, analgésie
contrôlée par le patient : PCA).
Le patient est informé des complications propres à la technique et des feuilles d'information ont
été rédigées par les sociétés savantes. Elles sont fournies au malade lors de la consultation.
3. Stratégies particulières
La consultation permet également de programmer des stratégies particulières.
- transfusion autologue programmée (TAP) pour des chirurgies hémorragiques (orthopédie) en
l'absence d'anémie, de cancer, de maladie virale évolutive. Plusieurs poches de sang sont
prélevées au CTS dans le mois qui précède l'intervention. Elles serviront à compenser
particulièrement ou totalement les pertes hémorragiques périopératoires.
- l'anesthésie ambulatoire qui permet au patient de regagner son domicile le jour où l'acte est
effectué tend à se développer. Elle obéit à des critères de sélection stricts en terme de type et
durée d'acte, de conditions environnementales (distance domicile-hôpital, personne
accompagnante) qu'il importe de vérifier lors de cette phase d'évaluation préopératoire.
4. Préparation
Un report d'intervention est quelquefois nécessaire
- pour rééquilibrer une maladie instable (ex. : HTA, coronaropathie) avec réévaluation et
ajustement thérapeutique
- pour corriger des désordres nutritionnels (renutrition), améliorer la fonction respiratoire
(kinésithérapie respiratoire), arrêter ou effectuer le relais de certains médicaments :
arrêt ticlopidine, clopidogrel 8-10 J avant l'opération
arrêt aspirine 8-10 J dans beaucoup de cas
relais AVK → Héparine
arrêt INH
arrêt biguanides 48 h préOP, ± relais insuline
L'ensemble de ces mesures ne pénalisera ni le patient ni le chirurgien dans sa programmation si la
consultation a lieu à distance "raisonnable" de l'acte. Un délai de 8 jours semble répondre à ce
critère.
CONCLUSION :
La consultation préanesthésique fait partie intégrante du concept de "sécurité anesthésique". Les
années qui viennent devraient permettre d'objectiver une amélioration de la prise en charge en terme
de sécurité et de qualité.