Métiers individuels

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Métiers individuels
Métiers
Quand les coopératives s’ouvrent
aux métiers individuels
Photographes, coiffeurs à domicile, biographes publics… Ces professions s’exercent
majoritairement en entreprise individuelle. Mais elles commencent à entrer dans
le giron coopératif grâce aux coopératives d’activités et d’emploi, qui permettent
de tester son projet grandeur nature.
A
u troisième trimestre 2004, parmi
les personnes accompagnées par
les coopératives d’activités et
d’emploi (CAE), 24 % exerçaient dans les
services aux particuliers et 23 % dans l’artisanat. Service aux particuliers et artisanat sont les activités les plus répandues
dans les CAE, structures particulièrement
adaptées aux projets de métiers individuels tels que photographe ou créateur
de meubles (voir encadrés). « Les CAE
allient une démarche individuelle à un cadre
collectif dans lequel les entrepreneurs
peuvent mutualiser un certain nombre de
choses, telles que la formation ou l’échange
d’information », précise Elisabeth Bost,
déléguée générale du réseau Coopérer
pour entreprendre. De ce fait, les métiers
d’aide à la personne sont relativement
répandus dans les CAE, allant de l’accompagnement scolaire à la relaxation, en
passant par la bio-esthétique. « Des professions telles que chercheur généalogique,
relookeur ou professeur de repassage se
positionnent dans une niche. Du coup, si
cela fonctionne, l’activité marche particulièrement bien », témoigne Denis Morin,
créateur et associé de Régate, CAE basée
à Castres.
Des métiers originaux
Des métiers originaux qui nécessitent un
minimum de vigilance. Régate est en train
de mettre en place des jalons pour encadrer ces professions. « Il peut y avoir des
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Clair-Obscur
Les coopératives d’activités
sont des structures
particulièrement adaptées
à des projets de métiers individuels.
Marion Clair-Bastiani, entrepreneur-salariée à Rennes.
Photos à domicile
La lumière est un de ses outils de travail
principaux. Elle a d’ailleurs baptisé son
studio Clair-Obscur. Marion Clair-Bastiani
développe son projet de photographie
à domicile avec la coopérative d’activités
et d’emploi rennaise Elan créateur,
où elle est entrepreneur-salariée depuis
juillet 2004, sur la base de 10 heures
par mois. « Cette structure correspondait
à ce dont j’avais besoin : une souplesse
administrative et un cadre dans lequel
développer mon projet. »Portraits, photos
pour des castings, restauration de vieux
clichés ou reportages de mariage sont
les prestations essentielles de Marion
Clair-Bastiani. Pour se faire connaître,
elle expose dans divers lieux publics.
Elle a présenté une série de portraits
et de paysages à la médiathèque de Guer
(Morbihan) et une nouvelle exposition
est en préparation sur les thèmes
de la gestuelle, comme la danse
et le langage des signes.
Tél. : 06 64 82 83 77.
Courriel : [email protected]
Métiers
(voir encadré). Sans oublier le secteur phare des Scop : le BTP. Si 32 % des salariés des
Scop se situent dans le BTP, on en compte
encore très peu dans les coopératives d’activités. « Le BTP nécessite des investissements importants, qui sont à la charge des
personnes accompagnées », explique
Sandrine Barrière, d’Appuy créateurs, en
Auvergne. De plus, les activités de BTP
demandent une main-d’œuvre souvent
importante, que peut difficilement fournir
un entrepreneur individuel et qui nécessite une assurance que la CAE ne peut
prendre en charge. Solution : regrouper
les futurs entrepreneurs-salariés du BTP
dans des CAE spécialisées. Il en existe
aujourd’hui deux : Cabestan, à Grenoble,
et Coop’action, près de Toulouse.
risques de proximité avec des sectes, par
exemple », explique Denis Morin. Des
risques à prendre d’autant plus en compte
que la coopérative est responsable juridiquement des activités de l’entrepreneur.
Régate est en train d’élaborer une charte
de déontologie en collaboration avec la
Direction des affaires sanitaires et sociales
(Dass). Elle exige notamment que les personnes accompagnées aient un diplôme
adéquat ou une habilitation d’une fédération pour les activités sportives. A terme,
les activités médicales et paramédicales
ainsi que les massages ne seront plus
acceptés par Régate, de même que
des activités exercées auprès d’un public
mineur. Cette charte doit être signée par
toutes les personnes qui se dirigent vers
des professions d’aide à la personne et
peut leur être opposée en cas de litige.
CLAIRE ALET-RINGENBACH
Des CAE spécialisées par métier
« J’ai toujours bricolé du mobilier, même
dans ma chambre d’étudiant. Et j’ai eu
envie d’en vivre », raconte Olivier Poussin
Courmontagne. C’est par un article
dans un journal local qu’il a eu vent,
il y a cinq ans, de l’existence à Marseille
de la coopérative d’activités et d’emploi
Energies alternatives, dont il est devenu
entrepreneur-salarié. Pendant trois ans,
Olivier Poussin Courmontagne
a développé son entreprise de création
de mobilier Wunderbar !, essentiellement
à travers du mobilier de bureautique
et de stand d’exposition. A l’issue
de ces trois années, il est devenu associé
d’Energies alternatives. Olivier Poussin
Courmontagne a récemment réalisé
une cloison aménagée dans un atelier
d’artistes. Le mobilier des boutiques
de surf et de skate représente également
une part importante de son activité
et des projets sont en cours avec
des cabinets d’architectes.
Tél. : 06 86 41 01 92,
courriel : [email protected],
site : www.wdbr.net
Olivier Poussin Courmontagne,
entrepreneur-salarié à Marseille.
Jean-Guillaume Testard
Les CAE n’accueillent pas uniquement des
professions atypiques. Les créateurs de
sites Internet ou les coiffeuses à domicile,
par exemple, sont légion. Les coopératives
d’activités s’intéressent de plus en plus aux
métiers de la culture et proposent une
alternative au statut d’intermittents. La
coopérative Artenréel, créée en juillet
2004 à Strasbourg, est spécialisée dans
le domaine des projets culturels, en partenariat avec l’Ogaca, une agence conseil
auprès des entreprises culturelles.
Les CAE ouvrent également l’univers Scop
aux métiers agricoles en réfléchissant à la
façon dont des agriculteurs pourraient
exploiter ensemble une même parcelle
Du mobilier sur mesure
+ sur le web
Téléchargez cet article et retrouvez
un dossier complet sur les coopératives
d’activités et d’emploi sur le site
www.scop.coop
Une autre agriculture
Que ce soit dans son métier de socio-éducateur ou d’agriculteur,
Fabien Bertrand a toujours eu à cœur de travailler collectivement.
C’est pour cette raison qu’il a choisi de vendre sa production
de fruits et légumes dans le cadre d’une association pour
le maintien d’une agriculture paysanne (Amap) à Pantin,
en Seine-Saint-Denis, et d’exercer cette activité dans le cadre
coopératif offert par Coopaname, la CAE de Paris.
« Un des objectifs des Amap est de permettre aux consommateurs
d’acheter leurs produits à la ferme », explique Fabien Bertrand.
Ces consommateurs s’engagent financièrement à se fournir
pendant six mois auprès d’un agriculteur en achetant des paniers
de saison. Ils partagent ainsi les risques et établissent une relation
directe avec le producteur. Mais « le terrain sur lequel je travaille
dans le Val-d’Oise est trop loin du local de distribution à Pantin »,
raconte Fabien Bertrand. D’où son nouveau projet : trouver
des partenaires au sein de Coopaname avec qui il partagerait
les outils de travail, du terrain à la chambre froide, en passant
par les engrais. Une configuration différente des coopératives
agricoles telles qu’elles existent aujourd’hui. Celles-ci regroupent
uniquement la gestion de la production et le matériel d’agriculteurs
qui travaillent individuellement sur leur champ. « Partager un
terrain en Ile-de-France est impératif, vu la pression immobilière »,
souligne Fabien Bertrand. Toujours dans le cadre de Coopaname,
il catalyse une réflexion sur la création d’une structure permettant
à de petits agriculteurs de se regrouper pour mutualiser
leurs moyens de production, terrain inclus.
Tél. : 06 13 33 76 36,
courriel : [email protected]
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