cardinal de granvelle - Koninklijke Commissie voor Geschiedenis

Transcription

cardinal de granvelle - Koninklijke Commissie voor Geschiedenis
CORRESPONDANCE
Dll
CARDINAL DE GRANVELLE,
1565 — f583,
PU B LIÉ E PAR
M.
CHARLES
PIOT,
ARCHIVISTE GÉNÉRAL DU ROYAUM E, MEMBRE DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES
ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE, MEMBRE DE LA COMMISSION ROYALE D'HISTOIRE.
FAISANT SUITE AUX
PAPIEIiS D’ ETAT DU CARDINAL DE G R A N V E L L E .
PUBLIÉS
DANS
LA COLLECTION
DE
DOCUMENTS INÉDITS SUR L’HISTOIRE DE FRANCE.
BRUXELLES,
K. MAYEZ, IMPRIMEUR DE L’ACADÉMIE ROYALE.
1886
PRÉFACE.
I.
L’édition du tome V de la Correspondance de Granvelle, à laquelle nous
avons mis la main en 1885, comprend les lettres des années 1574 et 1575.
Elles sont au nom bre de cent quatorze, se décomposant comme suit :
trois lettres du cardinal au roi; deux lettres de celui-ci au cardinal; une
lettre de l’em pereur Maximilien II; deux lettres de l’impératrice Marie; une
lettre d ’Anne, princesse de Pologne; une lettre de l’archiduc Charles
d’Autriche; quatre lettres de Guillaume, prince de Bavière; une lettre du
prince deClèves et de Juliers; une lettre de Don Ferdinand de Lannoy; une
lettre de B erlaym ont; une lettre du cardinal Alciat; quatre lettres de
Yiron; une lettre à Anne, princesse de Pologne; une lettre à l’archiduc
Charles; une lettre au duc de Soria; quatre lettres au duc d ’U rb in ; une
lettre à Marguerite de P arm e; trois lettres à D o n 'Ju an de Çuniga; quatre
lettres au prieur de Bellefontaine ; une lettre à] François d ’Achey; une
lettre au secrétaire ldiaquez; soixante-jieuf lettres de Morillon; instruc­
tions données à Don Pedro d ’Avila, marquis de Las Navas, et au licencié
Don FYancisco de Vera. envoyés à Rome par le roi Philippe II. A la
rigueur, ce docum ent n’aurait pas dû figurer dans notre volume, confor­
mément aux principes émis dans la préface d u 'to m e IV. Cependant nous
avons cru devoir le publier à cause des renseignements q u ’il renferme sur
T omf. V.
t
PRÉFACE.
II
la nature des relations si intimes entre le roi et le S^Siège, relations qui
intéressent à la fois l’Espagne, l’Italie et notre pays.
Toutes ces missives ne traitent pas des événements politiques du temps.
Sous ce rapport les lettres au roi, celles que ce monarque adressait au
cardinal, les lettres à Çuniga et celles de Morillon ont seules un intérêt
incontestable. Les autres dépêches renferm ent des recommandations, des
renseignements sur la famille et les affaires particulières de Granvelle.
Elles appartiennent toutes à l’époque pendant laquelle le cardinal résidait
en Italie. Dans quelques-unes de ces missives on voit poindre l’idée de
faire bientôt passer le cardinal à la cour de Philippe; mais rien n’est encore
lixé sur ce point.
A l’appendice figurent cent septante et une lettres, extraits de lettres ou
documents se rapportant aux années 4574 et 157o. Ce sont des correspon­
dances et des rapports adressés à Requesens sur les événements du jo u r ;
des lettres de celui-ci au roi, au Sr d ’Hierges, au duc de Lorraine, à Gérard
de Groesbeek, évêque de Eiège, au magistrat de Gand, aux États de
Namur, au comte de Berlaymont, au marquis d’Havré, aux bourgmestres
d ’Amsterdam, au duc d’Aerschot; des représentations des États de diverses
provinces; des lettres d’Hopperus au ro i; des rapports nom breux sur les
mouvements des Huguenots en France, en Allemagne, en Suisse et sur les
frontières de Bourgogne.
Ces documents expliquent et complètent la correspondance de Granvelle.
II.
Philippe II est, pendant les années 1574 et 1575, tel que nous l’avons
décrit dans notre volume précédent.
Toujours mal conseillé, constamment mal inspiré, il persiste dans l’idée
de réduire les provinces insurgées par la force, il veut bien admettre jus-
PR ÉF AC E.
ni
q u ’à un certain point l’abus de la trop grande violence exercée p a r le duc
d’AIbe, il désire y substituer un régime moins despotique; mais l’emploi
de la force armée lui semble toujours le moyen le plus pratique. Jamais lo
roi n’a pu com prendre le caractère du Néerlandais, ennemi du despotisme,
adversaire déclaré de tout gouvernement autoritaire. A toutes les époques
celui-ci a voulu être conduit par la persuasion et d ’une manière pater­
nelle. La force et la violence lui répugnent; elles l’irritent.
En dépit de l’insuccès du gouvernement despotique inauguré par le duc
d’Albe dans nos provinces, le conseil du roi à Madrid ne veut essayer
d ’autres moyens pour arrêter l’insurrection aux Pays-Bas (p. 29). C’est une
idée fixe profondément enracinée en Espagne. « Quand les Espagnols, dit
Morillon, se m ettent quelque choseen tête, ils ne veullent en dém ordre et
prennent en suspicion ceux qui leur donnent un bon conseil (p. 21). »
Plus loin , il ajoute encore : « Ceux d ’Espagne sont si écervelés q u ’ils
disent q u ’il vaut mieux perdre les Etats du roi que d’avoir recours à la
clémence (p. 45). »
Selon ce prélat le mal est « que le roi demande et prend avis de tous
cotés et de toute part, sans les suivre. Les Espagnols lui dissimulent tout,
et par leurs dissimulations ils ont alïblé les sujets; et eux n’y gagnent
guère. Ils ont perdu tout crédit par suite de leurs stratagèmes et de leurs
boutades; le roi lui-mêm e en est moins estimé. »
Morillon pense aussi que Philippe est, à la vérité, plus ou moins obligé
de s u i\re les avis de son conseil; mais il devrait examiner de qui il les
prend (p 253).
C’était précisément celle perspicacité qui laisail souvent défaut au roi.
Quand il s apercevait, un peu trop tard, du mauvais succès des affaires,
il en accusait son conseil. Ce qui fait dire par Morillon : « L’on prétend
q u ’il remet souvent sur le tranchoir de son conseil les mauvais avis q u il
lui donne, et q u ’il a suivis malgré lui et contre son opinion. »
Point de doule : si Philippe était parfois en désaccord avec ses conseillers,
PRÉF AC E.
IV
il ne suivait pas moins leur opinion parce q u e lle émanait d ’Espagnols
ou des gens de leur bord. « Il me souvient, dit Morillon, que le feu empe­
reur, excellent appréciateur du caractère des Espagnols, les avait tenus en
bride; et au moment d ’abdiquer le trône en faveur de son fils, l’Espagne
dressa immédiatement les cornes, en disant que son tour était venu de
s’emparer du gouvernement. Ce q u ’elle mit à exécution maqno suo el
nostro malo. » L’idée des Espagnols, continue-t-il,était celle de réduire les
Pays-Bas en province. L ’évêque de Cuença. si dévoué à notre pays, avait
beau rappeler au duc d’Albe ce q u ’il lui avait prédit sur le résultat de sa
conduite, sur l’impossibilité de pouvoir réussir dans ses vues, sur le
péril dans lequel il mettait la royauté; tous ces arguments ne produi­
sirent aucun résultat. Le parti pris de combattre à outrance les insurgés
par la force armée était tellement enraciné
à la cour de Philippe
malgré les conseils de Granvelle et de l’évéque de Cuença, que celui-ci
résolut de quitter le roi. Le secrétaire Çayas l’ayant interrogé sur les
motifs d’une semblable résolution, le vénérable prélat, ami de la paix et
de la clémence, déclara q u ’à la cour on ne « traitait un seul mot d’équité,
ni de vérité (p. 599). »
Malgré le désir de suivre l’exemple du duc d ’A lbe, Uequesens finit par
insister auprès du roi sur la nécessité de publier une amnistie nouvelle. Il
ne put rien obtenir. Au dire du Grand-Commandeur, plusieurs personnes
prétendaient que le roi ne voulait pas se presser pour souscrire à un pareil
acte; il désirait d’abord connaître le résultat de l’attaque projetée par mer
contre les rebelles '. Si la victoire appartenait aux Espagnols « tous nous
devons désirer que l’on traitât les sujets virga ferrea (p. 55). »
Ce n’était pas seulement l’espoir d’une victoire future à rem porter par la
flotte espagnole qui empêchait Philippe de publier un acte de clémence;
1 Voir, s u r
P a ris,
t. I I ,
l ’a r m e m e n t
p. M o ,
et
de
la
(lotte
espagnole,
G acuard,
U opperi E p islo lœ a d V iy liu m , p. 5 9 4 .
B ibliothèque natio n a le des m a n u sc rits à
PREFACE.
v
les succès éphémères de l’armée du roi au W alerland l’arrêtèrent dans la
bonne intention d ’avoir recours à la générosité : Çayas annonçait même que
la dépêche en était prête. Du moment où le roi apprit ces événements, tout
fut arrêté (p. 400). Au mois de février 1575 le vent était, d’après de
S t-G ouard, à l’am nistie; mais la prise de quelques villes arrêta cet élan
de générosité '. Morillon n’en était pas étonné. Il l’avait prédit lorsque la
nouvelle de ces succès lui parvint. Il avait compris que la clémence aux
yeux du roi était un pis-aller, jamais un mouvement spontané parti du
cœur.
Ces retards étaient en général très mal vus. « El ce n’est pas à croire, dit
Morillon, combien les bons sujets et ceux qui ont à perdre sont malcontents
et atterrés pour l’opinion q u ’ils ont tous en général que le roi est malcon­
tent et défiant d ’eux, et que partout il les met en proie, et que la promesse
d’abolir le dixième denier est vaine (p. 45). » Puis il ajoute: Si le roi tenait
le pays en paix et en repos, comme le faisait son père, il commanderait au
lieu que l’on veut lui com m ander actuellement (p. 4a).
Ces lenteurs et ces tergiversations, un des caractères distinctifs de
Philippe, continuèrent toujours en ce qui concerne l’expédition
des
affaires. Elles prenaient leurs sources des avis différents donnés par scs
conseillers et par les partis qui se disputaient la prépondérance à la cour.
Le G rand-C om m andeur se plaignait am èrement tle ces retards. 11 avait
envoyé au roi six ou sept courriers, et du 7 ju in au 9 août 1574, il n’avait
pas reçu de réponse (p. 101).
Sans doute, les relations du roi avec le S‘-Siège étaient une des causes de
ces lenteurs. Aimant à suivre les inspirations de Rome, si elles s’accordaient
avec sa manière de voir, il attendait ses résolutions. Malheureusement, les
affaires à la cour de Rome ne m archaient jamais avec précipitation. Les in­
structions données à Don Pedro de Avila, m arquis de Las Navas, et à Don
1 Ib id ., t. Il, p. 44-0. Voi r aussi C orrespondance de P h ilip p e / / , t. III, pp. 54t>, 5G7.
PR ÉFACE.
VI
Francisco Vera fournissent des renseignements très précis sur ce point et
sur les relations du pape et de Philippe (p. 104).
Ces retards, ces tergiversations avaient encore un autre inconvénient. Le
public s’en entretenait. Il en concluait que le roi ne s’occupait plus du pays.
Aldana, malgré sa qualité d’Espagnol, allait ju sq u ’à dire ouvertement que
le roi ne se « souciait d ’un tronc de cheveux de ces pays » (p. t2(>). Ce qui
était loin d’être vrai ; mais ces bruits ne rabaissaient pas moins le roi dans
l'opinion publique. S il avait l’air de négliger les affaires du pays, c’est parce
q u ’il se trouvait lui-méme dans des circonstances bien difficiles. Mal servi
par son entourage, trahi par ses secrétaires
il était souvent dans la néces­
sité d ’examiner par lui-mém e toutes les affaires. « Le roi, disait Morillon,
est long dans ses déterminations; ce qui me fait croire q u ’il les résout seul
sans prendre avis, dont le défaut de gens peut être cause, se trouvant quasi
de tous côtés très mal servi et de bourdes qui se découvrent avec le temps:
mais il est très souvent tard pour y pourvoir (p. 344). » Méticuleux cl
soupçonneux, non sans motifs plausibles, il voulait suffire à tout; il centra­
lisait volontiers les affaires. La voix du peuple, manifestée par ses repré­
sentants, ne pouvant arriver ju sq u ’à lui, il ne décidait pas les questions en
temps voulu.
Une des affaires sur lesquelles il ne pouvait prendre de décision,
c’était son voyage aux Pays-Bas, tant de fois promis, jamais réalisé, malgré
les sollicitations réitérées des Etats (p. 249). Ceux-ci se promettaient les
meilleurs résultats de ce voyage. Ils pensaient q u ’en voyant de ses propres
yeux la situation ilu pays, les misères affreuses du peuple, les excès de la
soldatesque, la violation ouverte des droits et privilèges, il y porterait
remède *. C’était un leurre.
1 Vuir, au su je t «le la c o n d u i t e d u se c ré ta ir e Pfintzig, n o t r e to m e IV, p. 4 0.
*
Les A rch iv es d u r o y a u m e à B ru x elles r e n f e r m e n t u n v o l u m e c o n t e n a n t la co pie des r e p r é s e n t a ­
tio n s faites p a r les E ta ts d e B r a b a n t a u g o u v e r n e m e n t à p a r t i r d e 1 5 6 6 j u s q u ’e n 1 5 7 8 . Il p r o v i e n t
d u collège des J é s u i t e s à B r u x e l l e s , fu t en lev é p a r l’A u tr ic h e et r e s t i t u e p a r elle en 181)5. J,a r e m o n -
PREPACK.
Vil
Dans son propre pays, le roi était en présence de graves difficultés. « En
Espagne, dit Morillon, il y a du mécontentement et danger de révolte à
cause des nouveaux impôts (p. 3(5) » Plus loin il ajoute : « Il y a des altéra­
tions en Aragon, en Valence, en Catalogne; il s’y couve quelque chose...
Villa Hermosa en serait le chef (p.
» Ce n’était pas le seul obstacle au
\oyage du monarque. Un autre événement l’arrêtait. Selon l’auteur de la
vie de Charles IX « une chose admirable était arrivée au Roi Catholique: il
avait découvert l’entreprise que les hérétiques brassaient sur sa vie et ses
Etals par le moyen de son propre fils légitime et naturel; finalement le fit
garder étroitement et priver de tout ornement et service de prince '. » Don
Carlos était accusé de haute trahison.
Philippe avait aussi sur certains points des idées préconçues que rien ne
pouvait changer, si ce n’est la dure nécessité. Il repoussait de parti pris tout
moyen de conciliation qui, à son avis, pourrait porter atteinte à ses droits
<le souveraineté. Par exemple, lorsque l’em pereur Maximilien II, désireux
de pacifier les Pays-Bas, eut envoyé à Philippe un ambassadeur chargé de
l’engager à faire des concessions, il répudia toute intervention de la part
d ’un souverain étranger (p. 203). A cette occasion Morillon assure « que
l’em pereur avait envoyé lin ambassadeur pou r l’engager à se prêter à une
pacification, afin que les voisins ne s’en mêlassent sous prétexte de faire
renaître le commerce. Et le syndic de la Hanse est allé seulement en Anglet r a n c e d e s É ta ts de B r a b a n t q u e T h i c r r i Van Hicllc d e v a i t p r é s e n t e r a u ro i
M a d rid s u r ce p o i n t et
d ’a u t r e s faits y es t é g a l e m e n t t r a n s c r i t e . A la s u i t e d e cet acte se t r o u v e la le t t re q u e V an Hielle a d r e s s a
d e M a d r i d , le 18 s e p t e m b r e 1 8 7 4 , à Corn eille W e e l e m a n s , greffier o u p e n s i o n n a i r e des E ta ts . Il fait
c o n n a î t r e so n a r r i v é e d a n s la c a p i t a l e d e l’E sp ag n e e t à la C o u r le 17 d u m ê m e m ois. E n su ite il s ’es t
p r é s e n t é à I l o p p e r u s , q u i l ’a , d i t - i l , b ien r e ç u e t en é c r i v i t i m m é d i a t e m e n t à P h ilip p e . Le m o n a r q u e
f e ra it c o n n a î t r e à son co n s e ille r le j o u r a u q u e l il p o u r r a i t r e c e v o ir la r e q u ê t e d es E ta ts à p r é s e n t e r
p a r Van Hielle. La le t t re d e I l o p p e r u s (p. 50 0) e x p liq u e c o m m e n t cette a u d i e n c e n ’e u t p a s lieu. V o i r
en c o r e , a u s u j e t d e V an Hielle, p p . 2 0 0 , 2 5 3 .
1 Vie
de Charles
IX ,
p a r S o rb in , d a n s les
A rchives curieuses,
t.
V III,
p.
521.
‘
VIII
PRÉFACE.
(erre pour y traiter quelque chose de semblable. Il est chargé, à son retour,
de parler de la part des villes hanséatiques à S. E. Ce sont toutes choses qui
me plaisent peu, parce que c’est exciter le peuple et les États, qui dem an­
dent une convocation générale pou r conférer ensemble; quod non expedil »
(p . 202).
Avant l’arrivée en Espagne de Rumpff, chargé au nom de Maximilien II
d’engager le roi à pacifier les Pays-Bas, l’em pereur avait déjà commencé
les négociations par écrit sur ce point. Il avait beau faire crier à iMadrid,
selon l’expression de S‘-Gouard, que l’austérité du roi compromettait toute
la maison d’Autriche '; la reine, les membres de la famille impériale
avaient beau insister, de leur côté, sur la nécessité d’un arrangem ent ’, rien
n’y fit. Le parti de la guerre, à la tête duquel se trouvait le duc d ’Albe,
voulait le contraire.
Granvelle et Morillon désiraient sans doute substituer la clémence à la
force brutale; mais ils n’entendaient pas laisser intervenir l’Allemagne
dans ces débats « Ce serait chose mauvaise, d’après l’opinion de plusieurs
personnes, si S. M. se laissait com mander par les Allemands, et le conseil
d’Espagne ne trouvera pas le moyen convenable. En tout cas il est néces­
saire de par tous les moyens possibles mettre fin à cette cruelle guerre
(p. 221). » Granvelle ne s’en était pas caché au roi, en disant : L’emploi des
moyens de douceur produira plus d'effet que la force ouverte; il faut éviter
surtout de laisser au prince d’Orange et aux Allemands l’honneur d’avoir
obtenu, par leurs négociations, ce dont les populations devraient être rede­
vables à la bonté du roi (p. 302). Philippe tint bonne note de la première
partie de celle recommandation. Il en oublia ou repoussa la seconde.
Le 22 octobre 4574, le roi avait écrit à Requesens : Comme rien n’a réussi
ju s q u ’ici et que telle semble être la volonté de Dieu (dont ils ont tous mérité
la colère), il a paru convenable d’en venir à l’application du dernier et
' / iibliolhcquc n a tio n a le J e P a r i s , t. I l , p p . 4 4 7 , 4 5 i , 4H5.
• Ibid., pp. 4Î5I à 4 S 5 .
PRÉFACE.
IX
rigoureux châtiment q u ’on pourrait leur infliger d’une de ces deux façons :
ou en submergeant tous leurs villages et le plat pays, ou en y mettant le feu.
C’était à peu près l’idée émise plus tard par Louis XIV pour se débarrasser
de la Hollande. Ensuile, Philippe entre froidement dans le détail de la mise
à exécution de ces moyens '. rJ elle fut en ce moment sa réponse aux pro­
positions d’arrangements.
D’autres revers et les efforts faits par le comte de S ch w artzem bo urg,
envoyé par Maximilien II aux Pays-Bas, opérèrent un revirement complet.
De nouveau il fut question de négociations avec les rebelles. A cette fin, il
y eut à Breda une assemblée des deux partis dans le but de rétablir la paix.
Leurs intentions étaient-elles bien sincères de part et d’autre? Il y a lieu
d’en douter. Rien ne fut décidé dans ces conférences. La question de la
liberté de conscience, à laquelle Philippe II déclara d’avance ne jamais
vouloir souscrire, arrêta toute transaction. Nous comprenons même diffi­
cilement comment les Hollandais, prévenus de l’intention formelle du roi
de ne rien céder en matière de religion, aient pu se rendre à une réunion
condamnée d’avance (pp. 55t), 580, 589). Philippe lui-même semblait ne
pas atlacher une bien grande importance à ces négociations, s’il faut en
croire une leltreque Requesens lui adressa à ce sujet. Le Grand-Comman­
deur s v plaint de ne pas avoir reçu la moindre communication au sujet
de rafla ire de Breda (p. 593). D’après une autre lettre au roi du 10 sep­
tembre 1575, l’entourage de Philippe reprochait au G rand-Com m andeur
d avoir entamé ces négociations \ Leoninus, chargé d’aplanir toutes les
difficultés surgies à ce p rop os, avait-il tort de dire q u ’il a réussi à bien
mener l’affaire de l’accord, mais que l’on n’en veut point, et que « nostre
bravesse » devait tout perd re (p. 209)?
Pareil résultat s’explique en partie par les soucis que causait au roi la
politique de la France.
* Correspondance de l ’Itilippe 11, t. I I I , j>. 175.
* Ib id ., p. 5C3.
Tome V.
s
PRÉFACE.
X
La Saint-Barlhélemy n’avait pas résolu toutes les difficultés soulevées
entre les dynasties de France et d ’Espagne. Loin de là. Si la coalition de
l’Angleterre et de la Fiance était momentanément anéantie par suite du
massacre des protestants dans le second de ces pays; si Coligny, le prom o­
teur ardent de la guerre contre l’Espagne, avait disparu, la sourde inimitié
entre les deux cours de Madrid et de Paris n’en continuait pas moins '. En
ce qui concerne spécialement les Pays-Bas, Philippe se trouvait toujours
dans la position la plus grave *. Selon de Sl-Gouard, le roi et ses ministres
craignaient une nouvelle alliance de la France et de l’Angleterre; ils redou­
taient la protection accordée par ces deux États aux rebelles des Pays-Bas
Malgré les assurances contraires données sur ce point par l’ambassadeur
français, Philippe ne cachait pas à cet agent les informations qui lui élaienl
parvenues au sujet de l’entrée aux Pays-Bas d’un grand nombre de F ra n ­
çais, en dépit des avertissements donnés au roi de France sur ces ém igra­
tions arm ées3. Mme Duplessis-Mornay n’a-l-elle pas dit dans ses Mémoires
que son mari se rendit aux Pays-Bas, où il explora l’état de ces provinces,
et trouva moyen d’entrer dans « les châteaux et garnisons, etc., parce qu’il
sembloit que le roi Charles vouloit faire la guerre au roi d’Espagne * ? »
Lorsque le duc d Alençon se décida à quitter la cour de Paris, DuplessisMornay ne fut-il pas chargé par ce prince d ’engager, en 1574, Louis de
iNassau d amener ses troupes en F r a n c e 8? L’alliance entre les insurgés et
1 Voir, il ce s u j e t, d a n s la B ibliothèque de l’Ecole des C h a rte* , 5 e s é r i e , t. I I I , pp. 1 et suiv .,
le
trav ail <lc M. H o u t a r i c , i n t i t u l é : L a S t- iïa r th c le m i, d ’a p r è s les ar c h iv e s d u Vatican.
* D isc ou rs a u ro i C h a rles IX p o u r e n t r e p r e n d r e la g u e r r e c o n t r e (’E sp agnol ès P a y s - B a s , d a n s le
tom e II, p. 2 0 , des M ém o ir es d e M““e D u p les sis-M o rnay, e t M ém oires de G uillaum e de S a u lx , 1 " p a r t i e ,
p. iO I ; 2 ' p a r t i e , p. 84.
’ /iibliothèque n a tio n a le de P a r is , t. Il, p. 4-41.
4 M ém oires de D u p lessis-M o rn a y, t. I, p. ôfi.
* Jbid., p 7fi. Voir a u s s i : P ro c ès c r im in e l c o n t r e La Mote, P o ço n as , etc., où se t r o u v e n t d e s r e n ­
s e ig n e m e n ts s u r les r e la tio n s d es H u g u e n o ts e t de L ouis d e Nassa u.
curieuses, t. V III, pp. 155, 15b.)
(C imber
et
D anjou,
A rc h iv e s
PRÉFACE.
\i
la cour de France conlinuait toujours , malgré les assurances contraires
données par celle-ci. Ce qui engageait les Espagnols à déclarer ouverte­
ment qu ils se repentaient d’avoir agi « trop modestement » à l’égard du
roi de France '. Et cependant le gouvernement français ne cessait de p ro ­
tester de ses bonnes intentions en faveur de l’Espagne. Celle-ci en fit autant
de son c ô t é ’, protestations et assurances mensongères que les deux parlis
violaient trop souvent par leurs intrigues.
Philippe redoutait surtout l’action des Huguenots, peu importe s’ils
agissaient en leur propre nom ou en celui du roi de France, ou de concert
avec ce monarque. Si ce parti, si remuant, si actif, venait à triom pher,
c’en était fait des Pays-lias. Il y fournissait immédiatement et ouvertement
des secours aux insurgés, bien plus confiants dans l’aide de la France
que dans celle de l’A n g leterre3. Au surplus, les Protestants allemands,
anglais, français et néerlandais se donnèrent constamment la main *. Très
volontiers le parti Huguenot aurait voulu mettre les circonstances à profit,
pour prendre possession de l’île de Walcheren en Zélande (p. 580); mais,
dit Morillon, l’on commence a y haïr les Français et les Gascons, pour
être trop insolents et insupportables (p 40.’»).
Une autre pensée non moins inquiétante préoccupait Philippe. Si la cour
de France parvenait à vaincre les dissensions intestines chez elle, ne met­
trait—
elle pas ces circonstances à profit pour attaquer nos provinces n’im­
porte sous quel prétexte? Ce serait peut-être le seul moyen d’étouffer chez
elle la guerre civile, le seul expédient possible pour u n ir tous les partis*.
1 K ililiolhèque n a tio n a le tic P a r is , lue. cit., p. 1 4 ; M ém oires de G u illa u m e de S n u ljc, 2 e p a r l i e ,
p 84 , o ù se t r o u v e la n o m e n c l a t u r e dn s forces dont les in su r g é s n é e r l a n d a i s c o m p t a i e n t d is p o s e r p o u r
fav oriser l’a t t a q u e d es H u g u e n o t s e o n l r e l’E spagne.
* lltid ., p. 446.
5 flibliothèque de l’É c o le d rs C harles, loc. cit., p. îf.
* Ib id ., p. 73.
5 Dup lessis-M o rn ay d isa it à C h a rles IX : . l / I t a l i e n , l’A lle m a n d , le Suiss e, la p aix faite, r e t o u r n e à
XII
PRE FAC E.
« Il y a nouvelles, dit un jo u r Morillon à Granvelle, que le roi serait d’ac­
cord avec les Huguenots, leur ayant concédé tout ce q u ’ils ont demandé, et
q u ’il avait licencié les gens de guerre q u ’il avait levés pour sa garde. Il est
à craindre que tous ensemble conspireraient notre ruine, s’ils n’étaient si
bas (pp. 55, 58, 506, 572y\ » Les troupes licenciées par le roi étaient immé­
diatement engagées par un inconnu, comme au moment du siège de Mons
(p. 58', et. dans le but de trom per les Huguenots, Marie de Médici leur
avait promis la guerre contre le roi d’Espagne pour recouvrer Us PaysBas ‘
Heureusement pour l’Espagne, la guerre était déclarée aux Huguenots
en France (pp. 572, 57 j , 588). Force leur fut de se réunir près des fro n ­
tières pour y attendre les secours amenés d’Allemagne par le prince de
Condé (p. 28!)) *. Chez nos gouvernants, l’effroi au sujet de ces réunions
était grand. Des bruits sinistres d’invasion se répandaient partout. Rassenghien avait informé Requesens de tout ce qui avait été débité à propos du
projet d’enlèvement de Charles IX par les Huguenots et des empêchements
portés à la réunion des Etats. Ce qui est certain, ajoute Rassenghien, il se
prépare et couve quelque chose entre eux ou contre nous tj). 1G). Puis il
entre dans le détail concernant les dispositions prises par les commandants
des places fortes sises sur les frontières de notre pays, dans le but de se tenir
prêts à agir. Entre Doullens, Amiens et Abbeville il y avait des vagabonds
et env iron 200 soldats licenciés, non reconnus par personne et redoutés par
tout le monde. La contrée était envahie par des mendiants venus de tous les
pays, qui en cas de refus de secours faisaient des menaces et exécutaient
des brigandages. Selon de Rassenghien il est nécessaire de se tenir en garde
son m c s ti c r ; le F ra n ç o i s , d e s p r i s a n t lou s a u t r e s m estiers, d e m e u r e so ld a t; et p a r fa ultc d e p l u s c o m ­
m od e exer cice, p l u s i e u r s a i m e n t m ie u x ou c h e r c h e r la g u e r r e a u loin ou la faire a u x pas san ts p a r les
c h e m in s q u e de r e p o s e r ch ez cu lx. « ( M ém oires cites, t. II, p. 2 1 . )
1 Vie de C a th e ri n e de Médici d a n s les A rch ives curieuses de F rance, t. IX, p. S I .
* Voir au ssi D up lessis-M o rn ay , t. I, p. 2 S 5.
PREFACE.
X III
contre les Français « nos anchiens ennemis; leur foi doit être toujours
suspecte; sachant bien que plusieurs personnes du Conseil de France ne
tâchent à autre chose que d’accorder là pour jeter la guerre et toute la
vermine sur nous; il convient grandem ent qu’à toutes heures soyons sur
nostre garde et aviser à réparer les places-frontières, principalement Hesdin et Bapaume (pp. 442, 445). »
Le gouvernement des Pays-Bas avait constamment l’œil ouvert sur tous
les mouvements des Huguenots. Des émissaires le tenaient au courant de
tout ce qui se passait dans leur camp, de tous leurs mouvements (pp. 588,
444, 41 5, 456 , 605, 611, 650, 659, 642, 645). Au pays de Luxem bourg,
le gouverneur général lit amasser des troupes prêtes à agir contre les
Huguenots rassemblés sur les frontières de ce duché. Fin septembre 1574,
ils s’étaient réunis au nom bre d’environ 1,500 hommes près de iWontmédy,
sans doute dans le but de surprendre une place quelconque (p. 505). En
même temps ils s’étaient installés à Crecy. Arcy et Crepy, où ils com met­
taient de nom breux maraudages, tandis que les paysans coupaient la gorge
à ceux q u ’ils rencontraient isolés dans les champs. En Champagne, ils
étaient très nom breux (p. 525). Près de Sedan, ville qui depuis la mort
de Charles IX servait de séjour à plusieurs familles huguenotes
ils se
massaient en vue de faire une entreprise sur Verdun, tandis que le duc
de Guise se dirigeait vers la Bourgogne (p. 41 i).
Les recrutements faits en Allemagne pour le compte des Huguenots,
sans avoir une grande importance, ne faisaient pas moins de bruit (pp. 44.
405, 458, 547). Requesens était spécialement informé par de Vergy de
tout ce qui se passait, sous le rapport des armements, en Allemagne, en
Suisse et à Strasbourg.
A Bâle s’étaient réunis le prince de Condé, de Thoré et plusieurs autres
FFuguenots, au nom bre de 700 à 800 hommes, qui allaient et venaient,
1 D u p l c s s i s - M o r n a y , t. I, pp. 8 1 , 84.
IMŒFAŒ.
XI V
s’armaient et s’équipaient, sans cependant compter sur les secours de
l’Allemagne; « car l’on ne veut croire que les Huguenots soient fournis
d’argent, sans lequel il est bien difficile à recouvrer secours en Allemagne
(pp. 5*5, 550, 873). « Le comte Charles de Mansfeld, accompagné de 25
à 30 reiters, arriva néanmoins à lia le pour présenter ses services au prince
de Condé. qui, après les avoir remerciés de leur bonne intention, les gra­
tifia chacun d’un écu pour retourner là d’où ils étaient venus.
Des Français, des Lorrains et d’autres étrangers passaient et repassaient
par Ylontbéliard, par Bâle. par Strasbourg et d’autres localités, dans les­
quelles se trouvaient des armes et des objets d’équipement 'pp. 555, 550}
Le magistrat de Bàle. prévenu par ceux de Bourgogne, ne semblait nulle­
ment disposé à permettre au prince de Condé le passage de ses troupes des­
tinées à les attaquer fpp. 35(i, ()40\
A Berne, les deux partis, les Huguenots et les partisans des Espagnols,
firent auprès du magistrat des efforts afin de l’engager à se mettre dans
leurs intérêts. Condé demandait à être protégé contre l’action du gouver­
nement français
De leur côté, le comte de Champlilte et le parlement de
Dole envoyaient au magistral de Bàle îles agents dans le but de l’attacher
à leur cause 'p. 596) et d’empêcher une invasion de l’armée huguenote
dans les possessions du roi d’Espagne.
A Strasbourg, le comte de Clervant recevait, depuis quelque temps, des
nouvelles et des instructions du prince de Condé, pendant le séjour de
celui-ci en Allemagne. Clervant y était particulièrement surveillé par des
.igents du parti espagnol (pp. 597 et suiv.). Strasbourg fournissait de l’ar­
gent à 2.000 cavaliers huguenots. Condé demandait à pouvoir faire passer
ses forces par Zabern (p. CIO).
-
Toujours aux aguets, le comte de Champlilte reçut, en septembre 1575,
des nouvelles sur la marche d’une troupe de reiters qui, au nombre de
1 C o m te Delà h orde, F ra n ço is d e C h a ti l l o n , com te d e Colignv , pp. 120. 4-Ô0.
PltÊFACE.
XV
(>,600 hommes, s’étaient mis en marche en Allemagne. Des arquebusiers
se dirigèrent vers le comté de Monlbéliard. Champlitle fournit sur tous
ces mouvements des Huguenots les renseignements les plus circonstanciés
(pp. 600, 601, 602, 610, 612, 617, 621 et suiv ).
De son côté, Pierre-Ernest, comte de Mansfeld, en faisait autant sur ce
qui se passait dans les environs du duché de Luxem bourg (pp. 614. 616).
I
ous ces renseignements, tous ces rapports dém ontrent combien le
gouvernement des P ajs-B as s’inquiétait grandem ent de ce qui se passait
en France
Philippe ne s en préoccupait pas moins. Granvelle, malgré
son éloignement du centre du mouvement huguenot, les suivait avec
inquiétude '.
Dans la lettre citée en note, Granvelle se préoccupe spécialement de ce
qui concernait la Franche-Com lé. Le 21 ju in 1575, une troupe d'aventu­
riers, pour la p lupart Huguenots chassés de Besançon pour affaires de
religion, su rp rit celle ville, sous le commandement du capitaine Beaujeux. Bon nom bre de Huguenots allemands et français les accompagnaient.
Kepoussés par les bourgeois et par les gens du gouverneur, les uns furent
tués pendant la bagarre, les autres faits prisonniers (p. 256). puis exécutés *.
Par suite de ces exécutions, les Bourguignons redoutaient des invasions
nouvelles. Dans le bu t de les prévenir, ils envoyèrent en Suisse les agents
dont nous venons de parler plus haut.
Les relations de Philippe et de la reine d’Angleterre /l’étaient pas meil­
leures que celles de la France. C elaient de part et d’autre des assurances
d’amitié, une guerre sourde menée par les intrigues, le désir de se faire
1 Voir à cc s u je l la le t t re q u ’il é c r i v i t de G a ë l e , le 10 ao û t 1573, à F ra n ç o is d ’Aeliey, b a r o n (le T h o raise, b ailli d ’A m o n t, g o u v e r n e u r e t c a p ita in e de Dole. Cette lettre é t a n t im p r i m é e , t. I, p. 4 1 4 , des
M ém oires et do cu m en ts in é d its p o u r se rvir à l’histoire de la F ra n ch e-C o m té, o u v r a g e t r è s r é p a n d u ,
n o u s n ’av o n s pas c r u d e v o i r l’i n s é r e r d a n s la C o r r e s p o n d a n c e d u c a r d i n a l .
*
Voir les d iffé ren tes r e l a t i o n s de cette a t t a q u e d a n s le to m e I d e s M ém oires et docum ents p o u r ser­
v ir à l ’h istoire de la F ra n ch e-C o m lé, et le to m e IX, p. 1 S7, d e s A rc h iv e s curieuses de F rance.
XVI
PREFACE.
mutuellement tort autant que possible. Notre volume en donne ^p. 35;
un excellent tableau à propos du retour aux Pays-Bas de Gilles de Lens,
baron d’Aubigny, envoyé par le G rand-C om m andeur à la reine Elisabeth.
Ce personnage, né en Bourgogne, ancien page de Marie, reine d ’Angleterre,
parlant très bien la langue de ce pays, était arrivé à Londres (14 janvier
1374; dans le but de contrecarrer le mariage d’Elisabeth avec le duc
d’Alençon. Après avoir été admis pendant cinq jours à la Cour, où il fut
festoyé d ’une manière extraordinaire, il obtint d’Elisabeth deux audiences
et des réponses aux lettres dont il avait été chargé de la part du duc d’Albe,
de Requesens et des Etats de Flandre. Enfin il fut favorablement licencié
En rentrant chez lui, d’Aubigny rapporta beaucoup de belles paroles de
la part de la reine, plus une chaîne d ’or et 500 écus, avec l’assurance de
bonne amitié. Elisabeth déclara néanmoins q u ’elle était obligée de donner
aide, secours et faveur au prince d’Orange par suite d ’engagements déjà
p ris, et quelle ferait auprès du roi des démarches afin de faire rentrer le
Taciturne dans ses biens. D’Aubigny eut l’occasion, pendant son séjour à
Londres, de pouvoir attester la vérité de ce que la reine lui avait dit. On y
battait dans les rues le tam bour pour faire des enrôlements au nom du
prince d ’Orange. Six cents Ecossais et trois cents Anglais s’y em barquèrent
et arrivèrent bientôt à Briel. D ’Aubigny, en prenant congé de la reine, reçut
la recommandation de dire au Comm andeur q u ’elle le priait de « faire meil­
leur service en ce gouvernem ent que n’avait fait le duc d’Albe au roy son
maistre » A ussi, ajoute ledit b a r o n , « les Espaignols sont pis voulus en
Angleterre que nulle autre part » (p. 35). Quant à la recommandation de la
reine en ce qui concerne le duc d’Albe, elle était peu fondée. Si le duc
d’Albe avait agi avec rigueur à l’égard des Anglais, c’était par représailles.
Mais la reine oubliait que le gouverneur général avait outre-passé ses pou­
1 Correspondance d ip lo m a tiq u e de la M ol/te F é n é lo n , I. V I, pp. I I , I S , 18. En ce q u i c o n c e r n e la
m ission des a u t r e s ag en ts q u i a u r a i e n t d û a c c o m p a g n e r d ’A u b ign y, v o i r ibid., p . 45.
PRÉFACE.
XVI I
voirs lorsqu’il accorda aux marchands anglais des avantages non compris
dans ses pleins pouvoirs de 1568.
Une des grandes causes des dissensions entre les cours de Londres et
de Madrid était la question des réfugiés politiques des deux pays. Boisschot,
envoyé en Angleterre dans le b ut d ’obtenir certains avantages en faveur
de la marine espagnole, éprouva sous ce rapp ort les difficultés les plus
graves par suite de ces différends. La mission du sire de Zweveghem eut
le même résultat (pp. 594, 6o2, 6(58). En toute circonstance, Élisabelh fit
assez com prendre qu’elle était décidée à soutenir le prince d’Orange contre
Philippe II. Elle voulait aussi rester fidèle à la politique anglaise, celle de
diviser les Pays-Bas q u i, étant unis, pourraient un jo u r porter ombrage
au commerce et à l’industrie de l'Angleterre. Sous ce rapport, elle avait
un intérêt identique à celui de la France.
Constamment préoccupée de ses affaires et de celles de son pays, Elisabeth
envoya à Bruxelles, vers la fin de novembre 1574, le docteur Wilson, dans
le but de traiter les points suivants : 1° la permission aux navires anglais
d ’arriver à Anvers, malgré la défense faite par le gouverneur général;
2° l’expulsion des rebelles anglais, réfugiés dans nos provinces, et dont il
donne la liste; 3° l’obligation de faire reconnaître, par les réfugiés pour
cause de religion, les droits de la reine au trône d’Angleterre. Le premier
point fut accordé, les deux autres furent refusés (p. 283).
III.
L e d u c d ’Albe avait complètement échoué dans sa mission aux Pays-Bas
par l’emploi de la force et de la violence. Il fallait l’y rem placera tout prix.
Dans ce but le roi avait jeté les yeux sur Don Louis de Kequesensy Çuniga,
G rand-C om m andeur de Castille, gouverneur du Milanais, etc. Arrivé à
Bruxelles le 17 novembre 1575, celui-ci prêta, vers la fin du même mois, le
serment de gouverneur général des Pays-Bas.
T ome V .
s
PRÉFACE.
XVIII
Cette nomination satisfit tout le monde; le peuple en attendait le meil­
leur résultat (p. 64). Granvelle lui-même, si prudent et si circonspect, en
augurait bien. Il avait la meilleure opinion du Grand-Commandeur. « V. S. I.,
lui dit [Morillon, a eu raison d’extoller le Grand-Commandeur, puisque le
roi l’avait choisi, et a examiné ce q u ’il y a de bon et de mauvais chez lui ;
et certes je le liens pour avoir bonne volonté et être très zélé au service du
roi et du repos public; mais il trouve difficiles tous les moyens propres
à y parvenir, étant les pertes de son prédécesseur trop grandes et le pays
trop appauvri, q u ’il n’est possible d ’y trouver deniers (p 161). »
Philippe II avait mis dans Requesens toute sa confiance et, malgré les
excuses que celui-ci faisait valoir pour ne pas devoir accepter une pareille
charge, le roi tenait à l’envoyer aux Pays-Bas dans l’espoir d’y sauver une
situation très compromise. Les antécédents du Grand-Commandeur sem­
blaient parler en sa faveur. 11 avait été ambassadeur à Rom e; le roi l’avait
nommé son lieutenant sur m er; il avait pris part à la guerre contre les
Maures; à Lépante il était à côté de Don Juan. Ces faits et surtout la posi­
tion si élevée de sa famille lui avaient valu d ’abord le gouvernement du
Milanais
Sans avoir complètement réussi dans ces fonctions, il s’en était
assez bien acquitté, malgré certaines difficultés surgies entre lui et CharlesBorroinée. Il avait en outre des qualités qui, aux yeux du roi, devaient
primer toute autre considération, lin dévouement sans bornes à la religion
catholique, un attachement inébranlable à son souverain l’avaient fait
constamment rem arquer pendant son gouvernement du Milanais. La ma­
ladie chronique dont il était atteint et une santé par trop affaiblie ne lui
perm irent guère de mener une vie très active. Ce qui a fait dire par
de Vivonne, Sr de S*“Gouard, ambassadeur du roi de France à Madrid :
Il est assez mal habilité et disposé de sa personne pour prendre le travail
requis en si grandes affaires.... Je le tiens pour un homme qui ne s’accom1 M endoça,
C o m m e n ta ire s, t. II, p. 171.
PR ÉFACE.
XI X
modéra pas mieu lx que le duc (d’Albe) : il est en réputation de meilleur
négociateur que de grand soldat; et avec tout cela il est plein de fumée et
présomption, et pense que nul aultre ne le vaille
Une autre fois, le même
agent disait : Requesens est assez mal habitué et disposé de sa personne
pour prendre le travail requis en si grandes affaires, comme celui qui porte
pour les mauvaises humeurs, deux fontaines, l’une à un bras et l’autre à une
jam be *.
■
Le jugement porté par de S1-Couard sur Requesens n’est que trop fondé
s’il faut s’en rapporter à plusieurs lettres reproduites dans notre volume.
Peu de temps après son arrivée aux Pays-Bas, il voulait, avant toute autre
mesure, prendre des précautions contre une invasion de la France dans
nos provinces (p. 2'. Ensuite il fit arm er à Anvers une flotte destinée à
combattre les insurgés de Zélande (p. 3 . Il n’avait pas à cet effet les fonds
nécessaires (pp. 8,19 7); tout le monde était unanim e sur ce point(pp 61,65).
Dans le but de se procurer des ressources pécunières, il vendit des lettres
de légitimation à raison de 1000 florins (p. 374), leva des contributions dans
les villages (p. 578) et employa à cela certains agents espagnols, contre
lesquels les Etats de Brabant firent des dénonciations parfaitem ent justifiées
vp. 359). De cette manière il voulait faire face aux frais de l’Etat, montant
mensuellement à 750,000florins, que le roi ne pouvait fournir. Ces dépenses
exorbitantes lui arrachaient des exclamations à propos des dissipations faites
par le duc d’Albe « auquel je liens, dit Morillon, q u ’il a procuré l’ignominie
que lui fait le roi (p. i44). »
D’autre part, Requesens autorisait des dépenses excessives pour l’en­
tretien de sa garde (p. 440).
L’absence complète de légalité dans la manière d ’agir du nouveau gou­
verneur pour se procurer des fonds finit par irriter tout le monde, à tel
1 B a ro n
K ervvn de I.k tt e n h o v e ,
L es H uguenots et les G u e u x , t.
’ B ibliothèque n a tio n a le d is M S S . à P a ris, I. I I , p. 4 3 0 .
III,
p. 2 0 2 .
PR ÉFA CE .
XX
point que le peuple l’accusa de s’inspirer d’instructions émanées du duc
d’Albe. Tout le m onde, dit Granvelle, prétend q u ’il gouverne ainsi par
suite de renseignements fournis par le duc (p. 70). Il fait sem blant, ajoute
l\lorillon, de « ne rétracter aucune chose de ce que le duc d ’Albe et les
siens ont fait (p. 10). »
Point de doute, il y avait du vrai dans ces affirmations. En écrivant à
Requesens, le duc d’Albe lui recommandait deux points qui, à son avis,
étaient d’une grande importance. Le prem ier consistait à donner tout son
temps, tous ses soins aux affaires de guerre.C’était, selon sa manière de voir,
le droit chemin à suivre, soit que l’on veuille pacifier le pays par la force1
soit que l’on ait recours aux négociations. El à ce propos il engagea le
Grand-Commandeur à ne parler, ni laisser parler d’arrangement avec les
rebelles. Le second point était de ne pas se laisser induire à changer, sans
examen, l’ordre établi par le duc, dans le but de captiver la bienveillance
des habitants. Avant tout, il devait se méfier des rapports et des proposi­
tions q u ’il recevrait
Pareilles recommandations devaient nécessairement
exercer une grande influence sur Requesens.
En consultant parfois le seigneur de Champagney, « il fut très étonné de
ce qu’on lui a dit (p. 10); mais ces avertissements ne le corrigèrent pas : il
suivit pas à pas la mauvaise voie tracée par son prédécesseur » (p. 15).
« Berlaymont et Viglius, les Estais et tous les gens de bien, dit Morillon,
sont d’avis q u ’il suit les traces de son prédécesseur; et pour dire la vérité,
de ce veoyt-on plus d’apparences que d’aullre chose. Et ainsy l’entendent
ceulx de Flandre et de Brabant, que je crains dresseront les cornes; car ils
parlent déjà entre les dents et feront davantage, puisque avons le vent au
visage. » En matière de finances, Requesens voulait absolument en venir
aux mesures préconisées par le duc d ’Albe (p. 22). Celui-ci le lui avait
spécialement recommandé. En dépit des faits contraires, constatés par
‘ C orrespondance de P h ilip p e / / , t. I I I , pp. 1 cl 2.
PRÉFACE.
XXI
Medina Celi et par les représentations des Etats, d’Albe affirmait, à propos
du 14ïe denier, que jamais aucun impôt n’avait été plus librement consenti '.
Quand les États faisaient des représentations sur les affaires du gouver­
nem ent, le Grand-Commandeur les accueillait parfois très bien: mais en
ce qui concernait l abolition des dixième et vingtième deniers, la suppres­
sion du Conseil des Troubles, la restitution des privilèges, la défense de
confier des fonctions à des étrangers et de nomm er ceux-ci à des com m an­
dements de places fortes, de leur remettre le maniement des deniers «le
l’Etat et d ’arrêter les excès de la soldatesque, sur tous ces points il était eu
désaccord complet avec les Etats (p. 53). Cette mésintelligence était la suite
nécessaire des recommandations du duc d’Albe.
E n février 1574, Requesens avait déjà perdu tout crédit. « estant en aussi
mauvaise opinion comme son prédécesseur. Il at avallé la responso des
Estais doulcement, mais il n’en pense pas moins (p. 43). »
Dans l’esprit de Viglius, le Grand-Commandeur avait aussi grandem ent
baissé. « Ainsi jusques ores, que sont plus de trois mois qu’il est au gou­
vernement, il ne fait chose que vaille. Il s'enferme deux ou trois heures
avec gens de peu, discerne et jaise comme une pie borgne, .serf inlril sequituv.
Il a quatre ou cinq marmotelz (petits singes) desquelz il fait sa marotte •>
(p. 44). Albornoz, l’ancien secrétaire duc d’Albe. Del Rio et Roda, membres
du Conseil des Troubles, Arias Montanus, l’ami du duc d ’Albe, étaient ses
uniques conseillers. Les trois premiers n ’en devenaient que plus insolents
(p. 44). Roda poussa l’audace ju sq u ’à se « fourrer » dans la maison d ’Egm ont
q u ’il avait fait restaurer et arranger aux frais de S. 31.
Le Commandeur, continue Morillon, a beau se plaindre des gens d’ici, il
n’entend pas les employer : Roda est son cœur. Ce qui fait enrager Del
Rio. Celui-ci fait accroire que le gouverneur général l’affectionne et q u ’il lui
indique comment il doit se conduire dans son gouvernement. T out ceci,
1 C orrespondance de P h ilip p e H , pp. 2 et 5.
XXI I
PRÉFACE.
ajoute iMorillon, sont des « baies »> (mensonges, tromperies). Continuant
toujours sur le même to n , le correspondant de Granvelle ajoute en co re:
« Puisque l’Espagne veult tout faire, il faut lesser convenir. Il (Requesens)
n’a pas mesme la bonne volonté de négocier avec les insurgés, disant que
ce n’est pas le duc d’Albe qui a picqué lesdits pays de se révolter, ni le
i0e, mais l’hérésie, et q u ’il se repenl de l’avoir escript aultrem ent à S. M.
Et certes, il est en pire estime que ne fut oncques ledit duc (p. 190''. » Ses
propres amis n’ont plus aucun respect pour lui, et ses ennemis le tiennent
pour le plus « fin furet que sortist jamais du pays dont il est (p. 17a). »
Plus loin, Morillon ajoute encore: « Jam ais ne fut tant abhoré le duc
d’Albe comme le Commandeur, estant en opinion d’estre preceps, es Ire
estourdi et à sa teste... El à la lin le Comm andeur s’enveloppera tant qu'il
ne saura de quel coslel se tourner (p. 176). »
En parlant des Etals, dans un langage peu digne, à table el en présence
des pages, Requesens disait « q u ’il arrachera des deniers hors des Irippes
des Estais (p. 17(i). « Les personnes qui lui dem andaient audience de la
part des Etats ou de l’armée n’oblenaient pas l’autorisation de s’approcher
de lui (p. 171,. Défense avait été faite d’ouvrir la porte à qui que ce fut,
sauf à Roda « parce que ledit com m andador escrivoit à S. M. par ung paige;
de sorte qu’on dit m aintenant pour ung proverbe que les paiges sont du
conseil (p 197). » Un autre jo u r les Etats de Flandre furent traités par lui
de veillacos (vilains, hommes de rien), épithèle grossière que l’on avait
déjà atlribuée à tort au duc d’Albe (p. 529'. Rerty assure néanmoins que
ce mot a été prononcé par Requesens, et q u ’il avait encore dit pis des
députés de (îand et de Bruges (pp. 553, 540'. Rerty répétait aussi à qui
voulait l’entendre que « sous la cape du ciel il n’y a pas chose plus
inepte el stupide et moins convenable au gouvernement que lui (Requesens :
il n’entend rien aux affaires de guerre; il n’a aucune prévoyance; et quand
il se niellait en campagne il était en pauvre équipage, comme il y avait
envoyé d’Hierges. sans argent, sans artillerie, sans munitions, ni vivres; de
PR ÉFA C E
XXIII
manière que cet officier lui signifia l’intenfion d’abandonner tout, s’il ne lui
procurait le nécessaire. » Plus loin (p. 35S) Morillon ajoute encore : Il n’y a
ni rime ni raison en lui; il procède tout à rebours el comme un so t, un
insensé, ne tenant regard à justice et à équité, ainsi q u ’il parait par la réduc­
tion des rentes d’Anvers. Selon Berty, il pourrait convenir à une ambassade
« pou r bien avertir et diligem ment, q u ’il est pour la conversation, mais
point pour grandes affaires; q u ’il est avare et minchon (pingre) jusques à
tout; ce q u ’il démonstre veuillant vendre, comme l’a dit Viglius, les a n ­
ciennes tapisseries de la cour, que ne se debvoient aliéner po ur l’antiquilé
et histoire des faiclz des seigneurs de Bourgogne. Et certes l’on en m u r­
m urerat fort; car il semble que, puisque fous les meubles du roy se
vendent, q u ’il veuille quicter le pays, et ce q u ’en viendrat ne vault la
peine (p. 333). »
Les Belges en général lui répugnaient tant q u ’il avouait à d’Assonlevillu
« combien il serait heureux de voir occuper le pays par jes Français, plutôt
que par cette canaille qui y est aprésent (p. 338). » Il haïssait Champagney
surtout (p. 252). Un jo u r il traita de traîtres les membres du magistrat
d’Anvers (p. 360). Le clergé belge lui semblait aussi entaché d’hérésie;
il le dénonça comme tel au roi, parce que les évêques s’étaient prononcés en
faveur d ’une certaine tolérance en matière religieuse (p. 382).
En dépit des recommandations du duc
entamer des négociations
d ’Albe, Requesens voulait
avec les villes révoltées en Hollande, par
l’intermédiaire de Don Ferdinand de Lannoy, beau-frère du cardinal de
Granvelle (p. lti). Voyant l’impossibilité de réussir p a r c e moyen,il résolut
d’em ployer l’expédient tant recommandé par d’Albe : la force. La flotte
armée à Anvers, dont nous avons dit un mot plus haut, leva enfin l’ancre
pour faire la conquête de la Zeelande; Davila la commandait. Il alla
rejoindre la flottille équipée à Berg-op-Zoom par Julien Romero, auquel
le G rand-C om m andeur donna les instructions nécessaires. Romero oublia
tout, fit avancer la flotte ju sq ue vis-à-vis de Romerswaal, y jeta les ancres,
XXIV
HŒEACE
sans prendre aucune mesure pour former le corps de bataille. L’ennemi
mit à profit celte négligence. Toute la (lotte des Espagnols fut battue, leurs
bateaux détruits ou mis en fuite '. Tel est le récit que Requesens adressa
au roi sur ce désastre. Dans le public on disait au contraire que Romero
avait fait tout ce qui lui était possible — ce qui était vrai - et on prétendait
que le Commandeur avait été « trop chauld, faisant partir trop tost les neuf
bataulx pour découvrir, que furent accablés des ennemiz avant que Julien
(Romero), qu’estoit une lieue en arrière, y peult arriverlpp. 42, 43). » Dans
son récit de ce fait d’armes, Mendoça rapporte en effet que Romero, agissant
d’après les ordres de Requesens, livra bataille au moment où les vaisseaux
de l’ennemi étaient en vue. L’avant-garde de la flotte espagnole commandée
par de Glymes fut immédiatement détruite. Romero fit tous ses efforts pour
lui porter secours; Osorio de Angelo en fit au tan t, mais en vain J. Reque­
sens, dans sa lettre au roi, jette tout le blâme sur Romero, et ne parle n ul­
lement des ordres par trop précipités q u ’il lui aurait donnés. Cette défaite
était un coup mortel pour le G rand-Commandeur. Morillon lui-m èm e, si
animé contre lui, en eut piété « ayant receu ung si coulp de b a s to n , et le
trouvant sans argent, mal adsisté de conseil et de gens (du roy). » En An­
gleterre, la joie causée par la défaite des Espagnols était grande 3.
En cas de grandes contrariétés, le gouverneur général était agité,nerveux,
colère, au point de se livrer à des excentricités, résultat nécessaire de la
maladie qui le minait. Lors de la délivrance de Leiden, il courut le malin
« à voir quelque église; étant dans sa cham bre il siffla q u ’on l’entendait
presque dans la salle, ce q u ’il n’a jamais fait; ce n’est pas à croire combien
il a été affecté de cet événement; car il avait fort assuré le roi du recouvre­
ment de la ville et plutôt par force et famine que par accord... et se plaint
' C orrespondance de P h ilip p e I I , t. III, |). 15.
'
M endoça,
C om m entaires, t. II, p. 18 1 .
• Correspondance d ip lo m a tiq u e de la M olle le n é lo n , t. VI, p. 31.
PRÉFACE.
XXV
que le prince d’Orange n’a pas défaut de conseil et de bonnes tètes, mais
que le roi n’en peut avoir. Sur quoy l’on pourrait répondre q u ’il y
en a assez si 011 voulait les entendre, mais l’on ne veut se fier à eux
(pp. 261, 262). »
Tant de revers l’avaient enfin rendu plus circonspect. Depuis ce moment,
il appela constamment au conseil d ’État le seigneur de Champagney.
Celui-ci lui ouvrit les yeux et lui fit com prendre combien le duc d’Albe
et ses adhérents l’avaient induit en erreur. D’Assonleville y contribua pour
sa part (p. 4-6).
La position la plus difficile et incontestablement la plus épineuse dans
laquelle le G rand-C om m andeur se soit trouvé aux Pays-Bas, est celle que
lui firent les soldats mutinés à Anvers. Morillon trace de leurs saturnales
un tableau navrant (p. 82). Par suite de cet événement, qui fut le résultat de
la bataille de iMook, Requesens perdit tout crédit. Il fut même accusé d ’être
de mauvaise foi et de connivence avec les mutins. « L’on tient, dit Morillon,
que comme il est fin, que avec ceste conjoncture de la victoire (celle de
Mook), il a volu monstrer aux Estais q u ’il sçait moiens à trouver deniers
et que à ceste occasion il liât lieu intelligence avec Sancho Davila et Mondragon; n’estant croiable q u ’ilz heussent tant osé, s’ilz ne fussent estés du
Comm andador major advoués et autorisés. Mais le tout pourroil lui couster
chier et à nous tous. Tant y at q u ’il est en pire opinion que
11 e
fut oncques
le duc d’Albe et tenu pour legier, précipité et subit, s’esbahissants plusieurs
principaulx de ce que Vostre III. Srie l’a tant estimé par ses lettres et que
Hopperus, par charge du roy, l’at exhalté si haut (pp. 89,90). » Pareilles
accusations sembleraient de prime abord assez fondées, si tout ce que Moril­
lon rapporte à ce sujet était vrai. D’après les renseignements fournis par ce
prélat, Champagney, gouverneur d’Anvers, avait prévenu le Grand Comman­
deur trois jo u rs avant l’événement de ce qui se tramait dans l’armée espa­
gnole contre Anvers. Requesens n’arriva en celte ville que le 24 avril.
Il exigea immédiatement du magistrat 200,000 écus destinés au payement
T ome V.
1
XXVI
PRÉFACE.
des soldats. Comme celui-ci s’excusait de ne pouvoir fournir la somme
demandée, Requesens répliqua q u ’il les fallait à toute force, quand même
le magistrat devrait livrer « vaiselle et cliaisncs. » Lorsque les mutins
approchaient de la ville, Champagney demanda à Requesens s’il fallait
ouvrir les portes q u ’il tenait fermées depuis trois jours. Pendant ces
pourparlers les soldats m utinés, conduits, dit-on, par Sancho Davila,
passèrent un fossé mis à sec à point donné, et dans lequel avaient été
descendus des chariots couverts de planches afin de faciliter le passage
entre le château et la ville. Personne ne fit mine de leur couper le chemin.
En les voyant arriver en ville, Champagney demanda au gouverneur
général l’autorisation de les repousser par les forces dont il disposait, par
ceux de l’amman et du lieutenant-colonel Claude de Vers. Champagney
voulait aussi improviser des retranchements dans la ville au moyen de
sacs à laine et les arm er de canons retirés des navires. De leur côté les
bourgeois étaient disposés à lui prêter main-forte. Toutes ces mesures
furent repoussées systématiquement par Requesens. O rdre fut donné à
de Champagney de se retirer avec ses forces dans la nouvelle ville (p. 83).
Cette manière d’agir peut-elle être qualifiée de fourberie, de duplicité et
de finesse, selon l’opinion du public? Sans doute, Sancho Davila était
« l a vraie source de la m utin erie» Morillon le constate; Davila con­
duisit lui-même les soldats à Anvers (p. 160); le Commandeur ne voulut
pas même le punir, ni le faire pu nir en le privant de sa position sous pré­
texte « que plustôt le rov perdra ces pays, que mectre aultre chastelain que
d ’Espaigne (à Anvers) (ibid.). » Tout ceci est vrai ; mais cette conduite ne
doit-elle pas être atlribuée plutôt à la faiblesse de caractère, au m anque de
volonté du Com m andeur? Nous l’avons vu plus haut, il se laissait influencer
tantôt par le duc d’Albe, tanlôt par les amis de celui-ci, lantôl par ses enne­
mis. L’inconséquence était parfois si grande chez lui q u ’il haïssait le duc
d’Albe parce q u ’il lui avait donné de mauvais conseils (p. 28); il recon­
naissait un instant q u ’il fallait s u b s t i t u e r a douceur à la force (p. 29), puis
PRÉFACE.
XX V I I
il faisait le contraire. La faiblesse nous semble mieux admissible en pré­
sence des lettres que Requesens adressa au roi au sujet de cet événement.
Il y déplore am èrement ces excès, qui l'empêchèrent de mettre à profit la
victoire de IVIook pour envahir les provinces insurgées et y frapper un coup
décisif. La mutinerie d’Anvers arrêta tout. Une conspiration générale dans
l’armée espagnole paralysa tous ses efforts. C’était le désespoir du GrandC o m m a n d e u r'. De même que celui-ci, le roi souffrait de ces mutineries
(p. 204): j ’entends, écrit Morillon à Granvelle, que Requesens voudrait pour
la moitié de son bien que ceci n’eût pas eu lieu, « dont ne suys esbahi;
et n’est à croire ce que MM. d’Arschot et Lallaing dient en pleine table
(p. 90,. »
Dans cette lettre Morillon assure, à propos du retard mis à la publication
d’une nouvelle amnistie, que personne ne s’y fierait « attendu que le Com­
m andeur en fit une en Grenade, q u ’il a violée le premier (p. 90). »
Si Requesens ne réussissait pas, ce n’était pas faute de bons conseils.
Granvelle lui en donnait volontiers (p. 103); mais il n’avait pas le tact
pour choisir entre les avis si différents q u ’il recevait. Il paraît même, d’après
une lettre de Morillon, que le G rand-C om m andeur n’était pas libre dans
ses actions. « Je crains, dit-il, que toutes les bonnes résolutions de Hop­
perus et préconisées par lui viendront trop lard. Plusieurs personnes pen­
sent que le Conseil d ’Espagne empêchera le roi de prêter l’oreille à de
pareils moyens. Le protonolaire Caslillo raconta à Morillon, d ’après des
informations fournies par son frère, que le Comm andeur ne ferait rien de
mieux que le duc d’Albe, et que ledit Conseil entendait réduire le pays
en servitude fp. 29).
Une autre circonstance contribuait encore à m ettre Requesens mal avec
les habitants de nos provinces. Ne connaissant aucune des deux langues en
usage aux Pays-Bas, il parlait un langage impossible (p. 177) Pour le com1 C orrespondance de P h ilip p e I I , t. III, pp. 5 4 et suiv.
XXVIII
PRÉ FAC E.
prendro, Morillon était obligé de lui adresser la parole en latin. Ce qui obli­
geait le Commandeur à parler lentement, de manière à pouvoir saisir ses
phrases. Toutes ses lettres, tous ses écrits étaient rédigés en langue espa­
gnole. Trois ou quatre secrétaires tenaient constamment la plume et luimême écrivait autant que ces personnages réunis. Il écrivit toujours « sou­
vent enterré avec Gonzaga, Roda et Vargas, dont plusieurs font meilleur
proulfict (p. 474) » Un « c le rc » , petit bossu au service de P rals, avait
plus de crédit que son chef. « Celui-ci se tue et a perdu toute autorité et
la fait perdre à ceux qui l’ont tant loué (p. 105). »
La bataille de Mook, l’expédition contre les iles de Duiveland et de
Schouwen sont certainement les deux faits d’armes les plus importants de
l’armée espagnole sous le gouvernement de Requesens. L’expédition contre
ces deux iles zeelandaises est d’une hardiesse, nous dirons même d’une
audace extraordinaire. Cet épisode, auquel Requesens prit une part active,
est raconté en détail par Morillon (pp. 407 et suiv., 427, 435). A celle rela­
tion nous eu ajoutons une aulre encore plus circonstanciée (p. 644). Par
contre, les mésaventures de la flolte espagnole expédiée de Laredo portèrent
un grand coup aux succès des Espagnols dans les provinces insurgées.
Toutes ces contrariétés avaient singulièrement découragé Requesens. Dès
le mois de septembre 1574, dit Morillon, il faisait semblant d’avoir écrit au
roi dans le b u t d’avoir un successeur au gouvernement (p. 210). Ce que
Morillon suppose être un semblant était une réalité Dès le 15 septem­
bre 1574, il fit connaître à Philippe le désir exprimé par les Etats de le voir
arriver aux Pays-Bas et d’y envoyer un gouverneur de sang royal. Requesens
avoua que la présence du roi serait le remède le plus efficace aux maux
existants; tout ne serait pas pacifié par renvoi d’un gouverneur de sang
royal; mais le Grand-Commandeur exprimait le désir que l’essai en fût
fait
Ce n’était plus un semblant, mais un désir bien clairement exprimé
1 Correspondance de P h ilip p e H , t. III, p. 151.
.
i
PRÉFACE.
XXIX
p ar lui de se retirer du gouvernement des Pays-Bas. Dès ce moment il est
souvent question dans notre volume de la retraite de Requesens (p 232,
311). Il était malade et devenait hydropique; il avait des plaies aux jambes;
il était désespéré de ne pouvoir porter remède à la situation des affaires.
Morillon disait : « il s’en tirera plus mal que le duc d’Albe (p. 558 . »
N’oublions pas que dès le mois de juin Philippe 11 songeait sérieusement à
le remplacer par Don Juan '.
IV.
Les bonnes relations entre Don Juan et (iranvelle, constatées par diffé­
rents passages de notre volume précédent, continuent en 1574 et 1575
(p. 500). Bien souvent le cardinal le guidait en véritable mentor, li se per­
mettait de lui faire des observations au sujet de sa conduite, qui n’était pas
toujours exemplaire. Morillon constate que Granvelle indiquait au prince
« c e qui lui convient pour son bien; mais la jeunesse lui tient les yeux b an ­
dés; il connailra plus tard le bon conseil qui lui est donné présentement; le
danger est que ce ne soit trop tard (pp. 5, 8). »
Dans notre nouveau volume nous assistons aux derniers faits d ’armes du
vainqueur de Lépante contre les Turcs. S’il n’y réussit pas complète­
ment, le mauvais succès doit en être attribué à Philippe II, très peu disposé
à lui fournir les secours nécessaires. Dès ce moment aussi le règne de
l’hspagne dans les Etats Barbaresques décline rapidement. Les Turcs
triom phent au grand désespoir du pape (p. 280). Philippe va même ju s ­
q u ’à obliger son frère naturel de résider à Naples pendant l’hiver de 1574
(p. 281). Les vues du roi sur Don Juan, ses soupçons au sujet de son am bi­
tion ne sont pas étrangers, parait-il, à cette mesure.
Néanmoins dès l’année 1575 il était déjà question à Madrid de l’envoyer
' ( j a c h a k i ) , L a B ibliothèque natio n a le à P a ris, t. II, p. 4 4 7 .
XXX
aux Pays-Bas
PREFACK
En 1574, ce bruit prit de la consistance. Le prince, disait-
on, devait arriver dans nos provinces à la tête d’une armée considérable. Sa
mère, Anne Blomberg, le proclamait avec jo ie; « mais, dit Morillon, il y a
lieu de craindre q u ’il ne la relègue dans un monastère pour rompre ses
relations avec un de ces Anglais qui ont tant de succès ici (p. 102). » D’Assonleville avait la conviction intime que Don Juan obtiendrait, sans aucun
doute, le gouvernement des Pays-Bas (pp. 338, 340, 341) Il fut mêmequestion de lui adjoindre Granvelle (p. 54i).
Pareille combinaison n’allait pas au cardinal. Mieux valait, à son avis,
mettre à la tête du gouvernem ent une princesse, soit Marguerite de Parme,
soit Elisabeth d’Autriche, veuve de Charles IX (p. 31)8). Il avait la certi­
tude que la douceur d ’une femme conduirait mieux les Néerlandais que la
violence et l’autocratie d'un gouverneur espagnol. Ceux d ’Espagne, dit
Morillon, ne sont pas pour gouverner, sinon chez eux (p. 387).
Malgré la préférence manifestée par Granvelle en faveur de ces p rin ­
cesses, Don Juan arrivera au pouvoir. Nous le verrons dans le volume
suivant.
V
Dès q u ’il fut question de rappeler Requesens, il fut question aussi de
faire revenir aux Pays-Bas Marguerite de Parme (p. 222). Le Comman­
deur voulait se retirer bon gré, mal gré, sans se soucier le moins du monde
de son successeur vp. 51)8). Cependant Granvelle avait des doutes su r ce
dernier point. Il craignait de voir Requesens mettre en avant un person­
nage « dont on luy sçauroit peu de gré cy-après. Il vad bien que le Sr Don
Ju an entend q u ’il ne luy convient, et comme vous dictes Me de Parme
seroit plus à propoz, ou la veuve de France, moiennant q u ’elles gardissent
la condition adjoustée prudem m ent par V. I. S.; et Me de Parm e sçait
' M a n u sc rits de la B ibliothèque n a tio n a le à P a r is , t. II, p. 4 5 8 .
PRÉFACE.
XXXI
combien q u ’il luy couste de ne l’avoir gardé, et at de l’expérience et
cognoist le pays po ur ém ender les faultes passées. La tentative itérative
que vous cognoissez me feroit penser que l’on se vouldroit résout dre sur
l’une desdictes dames; car l’on peu11 bien penser que V. I. S. ne vouldroit
servir soubz hommes. Si elle revenoit. l’on verroit bien tost grand change­
ment des cœ urs; car il n’est plus question de la religion, non plus q u ’en
France; car bons et maulvais, soulz de tant de m aux, ne demandent que
paix, redressement de la justice et des commerces et que les élrangiers
sortent (p. 398'. » Les États désiraient le retour de Marguerite à condi­
tion que Granvelle lui fût adjoint, « estimantz q u ’elle cognoist la faulte
q u ’elle fit depuis son parlement, qu’est de plus en plus regretté des gens de
bien, qui ont ferme opinion que si V. I. S. retournoit, elle redresserait les
affaires. Ce que jamais aultre ne fera, et moingz ceulx d’Espaigne que n’en
ont la volonté (p. 265). » En ce moment comme toujours, le roi ne put se
résoudre. « Le roy, dit Morillon, est long en ses déterminations. . . . Il est
lors aulcune fois tard pour y pourveoir... mais vous avez grande raison de
ne vouloir entrer au gouvernement avec le Sr Don J u a n , ou aultre qui
vouldroit g o u v e rn e ra sa teste, et serait mieulx avec MB de Parme ou la
roy ne blanche (p. 344), Élisabelh d’Autriche, veuve de Charles IX. Si polrions avoir la fille de France ou Me de Parme pour gouvernante, et q u ’elles
suivissent le conseil que l’on leur donnerait, fierenl aurea secula (p. 392). »
VI.
La noblesse belge ne s’était pas mieux amendée que celle des autres pays,
malgré les graves événements dont l’Europe fut le théâtre au XVIe siècle.
Morillon constate q u ’en général les nobles de notre pays étaient vicieux
(p. 104) et pauvres au point de ne pouvoir remonter leurs bandes d’ordon­
nances (p. 361). Il en était à peu près de même partout. Granvelle constate
(p. 55) q u ’en Italie les nobles devaient presque tout autant q u ’ils possé-
XXXII
PU E FACE.
daient. Et cependant, dit Morillon, les jeunes seigneurs belges trouvaient
moyen d’aller voir Paprès-dîner les galoises ou femmes perdues de mœurs.
Ce n'étaient pas seulement les galoises qui se livraient à ces débordem ents;
des dames de haut parage s’oubliaient également à celte époque.
Personne n’ignore les écarts d ’Anne de Saxe et ceux d’autres dames de
la classe élevée. La belle Simone, femme de Philippe Van der Linden,
seigneur de Marneffe, grand forestier de Brabanl, a tenu également une
conduite très singulière, dévoilée par Morillon (pp. 4 , 407). Montaigne, le
généreux Monlaigne, si droit, si juste et tant vilipendé en France, n’a-t-il
pas dit : le XVIe siècle est un temps bien malade. Rien de plus vrai.
Il a fallu, pour porter remède à celle gangrène, les rudes épreuves par les­
quelles rhum anité a passé à cette époque pour guérir les plaies d’une
société si corrompue Elles n’ont pas fait défaut en Belgique. La correspon­
dance de Granvelle en fail foi
Selon Morillon, les nobles menaient généralement une vie débauchée,
s’adonnaient volontiers à la boisson, se querellaient enlre eux. Après avoir
terminé leur partie de gobelet, ils finissaient parfois par s’allaquer les armes
à la main. Robert de Melun, rapporte Morillon, donna pendant une de
ces querelles à Philippe de Mansfeld un coup de poignard dont il mourut.
Ce personnage appartenant à une des premières familles du pays était, de
l’aveu de tout le monde, un querelleur de profession, un viveur sans égal
(pp. 100, 101). A table, les seigneurs disaient merveille (p. 433). Celait
loul Dans les camps, ils lâchaient la bride aux insolences el à l’esprit desIructeur des soldats (ib.). Ils étaient jaloux des Espagnols (p. D), enra­
geaient contre Roda à cause de son
influence au Conseil d ’Elat, se
jalousaient même enlre eux (pp. 265, 358. 413). Selon Morillon, ils do r­
maient ou conspiraient. Un jour, le comle de Berlaymont disait au seigneur
de Champagney, adversaire avoué des Espagnols, q u ’il devrait quitter le
pays avec ces étrangers. Champagney n’en fut pas décontenancé. En avouant
q u ’il n’étail pas né aux Pays-Bas, il ajoutait « q u ’il n’y avait autre chose
PRÉFACE.
XXXIII
de commun que la naissance el que son bien était en Bourgogne, qui avait
passé à la maison d’Autriche avant les Pays-Bas (p. 335). » C’est bien par
ces jalousies, ajoute Morillon, que la noblesse se formalisait contre le roi,
parce qu'il employait Granvelle (p. 187). Mais, dit-il plus loin, l’ingratitude
des seigneurs a toujours été grande (p. 325). Ils sont, ajoute-t-il, enclins
pour la plupart à se m utiner en cachette et à m urm u rer (p. 175). » C’était
la vérité. Le motif de cette conduite est facile à expliquer. Ruinés, endettés,
prodigues, les nobles en voulaient à un gouvernement qui les répudiait
pour la plupart. Montesquieu l’a dit : abolissez dans une monarchie les
privilèges de la noblesse, du clergé et des villes, l’Etat devient despotique.
Dans ce cas, la ruine de ces trois Etats est imminente '. La noblesse, le clergé
et les villes des Pays-Bas se trouvaient précisément dans cette situation
sous le règne de Philippe IL
Au nombre des grands seigneurs belges du XVIe siècle figurait Philippe
de Croy, duc d’Aerschot. Selon Morillon, il réunissait en lui tous les défauts
dont nous venons de parler. Jaloux des Espagnols, jaloux de ses s e m ­
blables, jaloux de Requesens, jaloux de tout le monde, il en voulait singu­
lièrement au seigneur de Champagney, frère de Granvelle. Il dédirait le
faire disparaître du gouvernement de la ville d’Anvers (pp. 140, 144).
malgré les services personnels q u ’il lui avait rendus (p 554). Si le duc dé­
testait beaucoup tous les Espagnols en général, il en voulait particulière­
ment à Roda, puis à Requesens (p. 100). Roda lui avait donné une assigna­
tion de 6,000 floi ins sur les biens confisqués. Ensuite, le même personnage
fit auprès du gouverneur général des démarches pour q u ’il ne payât rien au
duc (pp. 40, 41). En parlant du Commandeur, Morillon d it : MM. d’Arschot
et Lalaing en (lient en pleine table devant les pages et valets, v t cousueverunl, post pocula (p. 90). Esprit léger el inconstant, « le duc d’Aerschol, qui
s’appelle bourgmestre de Bruxelles, ne fait que rire et broccarder, sans
1 De l'esp rit iles lo is, liv. Il, clinp. IV.
T
ome
V.
5
XXXIV
PRÉFACE.
trailer aucune chose sérieuse, parlant de fil el d’aiguille à table et à faire
raison (p. 100). » Sur la G rand’place de Bruxelles, il allait jouer à la balle,
au grand étonnement de plusieurs personnes, qui disaient q u ’il se souciait
uniquement de ses plaisirs (p. 101).
Malgré tous ces défauts, exposés peut-être d’une manière trop mordante
par Morillon, el en dépit du peu de respect que le duc portait au gouver­
neur g én éra l, celui-ci voulait se l’attacher en considération de sa position.
JN’avait-il pas été un des premiers nobles à se détacher de la ligue contre
le roi? N’avait-il pas l’air de s’être franchement rallié au parti royaliste?
A ce litre, le G rand-Com m andeur crut devoir le favoriser, malgré leurs
différends, et lui m ontrer une certaine confiance (p. 88). Requesens le
nomma gouverneur de Bruxelles (p. 57). Requesens le chargea d’aller
complimenter Henri 111, roi de France, et de l’inviter à passer par la
Franche-Comté au moment de son retour (pp. 167, 211). Requesens le
mêla aussi plus ou moins aux négociations de Breda (p. 528). Et cependant
de profondes divisions existaient entre eux. Le gouverneur général finit
par ne plus convoquer le duc aux séances du Conseil d ’E la l, après avoir
compris q u ’il lui était impossible de le satisfaire. Un jour, le Grand-Com­
mandeur lui écrivit une lettre pleine de colère et de menaces (p. 354) Une
autre fois, il parla au duc d’une manière telle que celui-ci se mit à pleurer,
mais une dem i-heure plus lard il élail pire que jamais.
Tel est le portrait que Morillon trace du duc d’Aerschot.
VII.
Christophe d ’A ssonleville, appartenant à une famille originaire du
Cambrésis, naquit à Arras el fut considéré à ce litre comme Belge. Appelé
à siéger au Conseil Privé et au Conseil d’Élat, il eut l’occasion de faire
valoir auprès du gouvernement des Pays-Bas ses talents et ses connais­
sances en fait d ’administration et de politique. Il sut aussi se rendre utile
PRÉF AC E
xxw
à la cause de Philippe II, sans cependant se m ontrer grand partisan de l’in­
fluence espagnole dans les affaires de notre pays. Il ne s’cn cachait à per­
sonne et voulait faire procéder le gouvernement par la douceur (p. 28).
Vivement contrarié de la manière d’agir d ’Allonzo L'Iloa et d’un petit
bossu employé de Prats, qui se permettaient d’ouvrir les dépêches adres­
sées au Conseil d ’Etat, il en fit des plaintes parfaitement fondées. Lorsque
ces deux personnages avaient rendu leur avis su r les affaires, Requesens
envoyait les lettres décachetées à d’Assonleville et à Berlhy, très scandalisés
d’une pareille manière d’agir de la part du Comm andeur (p. 3-4). Son aver­
sion des Espagnols était, du reste, très justifiée, s’il faut en croire .Morillon.
En écrivant au cardinal de Granvelle au sujet de d ’Assonleville, celui-ci dit:
«Je ne sçay s’il emendra cestuy qui voulut hier battre feminect enfants d ’im­
patience d’avoir à beaux dets (dés' perdu 8,000 florins contre le nopveux de
Chiappin Vitelli, sur lequel, venant icy en barq ue, il avait gaigné 6,000
florins. Et ceulx-ci nous gouvernent! >. Le cestuy signalé par Morillon était
Davila (p. 339), un des personnages les plus influents du parti espagnol à
cette époque. Il était du nom bre des hommes avides désignés dans les
papiers de Granvelle par des jeux de mois très significatifs tels que :
Armenteros, Argetderos, Albornos, A l p o r nos (tout pour nous), Zavale
Tout s ’avale, etc. (p. 25). Ces plaisanteries d’un goût plus que douteux ne
dém ontrent pas moins l’animosilé des deux partis. A titre d ’ennemi des
Espagnols, d’Assonleville devait élre à plus forte raison l’antagoniste décidé
du duc d’Albe; partant il devait en vouloir beaucoup aussi à Roda
(p. 203).
Lorsqu’au commencement de son gouvernement Requesens voulait
suivre les errements de son prédécesseur, d’Assonleville aida le seigneur
de Champagney à lui dém ontrer combien il avait tort sous ce rapport. Le
Gi and-Commandeur voulait bien faire croire à un certain repentir (p. 46),
mais il se montrait toujours esclave des Espagnols. Dès lors, il ne devait pas
voir d’Assonleville de bon œil. C’était sans doute par suite de ces préven­
XXXVI
PRÉFACE.
tions que depuis son arrivée à Anvers Requesens « n’at poinct faict grande
presse ny à M. le Président (Viglius), ny à Barlaymont, ny à d’Assonlcville
que sous escripl (p. 100) », pendant que les Espagnols et leurs partisans
dirigeaient tout le gouvernement.
Selon Morillon, d’Assonleville n’était pas toujours adroit dans les affaires.
Scharemberger, secrétaire d ’Etat, chargé spécialement des correspondances
avec l’Allemagne, se désespérait parfois de l’intervention maladroite de
d’Assonleville qui « s’en mesle et n’y entend rien » (p. 164). Dans le public,
il passait pour un homme léger et agissant avec trop de précipitation
(pp. 100, 281 .
Très communicatif, il mettait Morillon au courant de tout ce qui se
passait dans le gouvernement. Il lui faisait des confidences concernant la
manière de voir de Requesens, de sa conduite, de l’état de sa santé, au sujet
de l’arrivée prochaine de Don Juan (p. 558). Cependant, ajoute Morillon,
d’Assonleville n’a pas toujours les nouvelles les plus sûres (p. 572). Mais il
était honnête homme avant tout, qualité que Morillon lui reconnaît volon­
tiers.
VIII.
Charles, comte de Berlaymont, autre personnage im portant de l arislocratie belge au XVIe siècle, est loin d’avoir les sympathies de Morillon,
nous l’avons fait observer dans le volume précédent Au dire de ce prélat,
il est toujours égoïste, constamment préoccupé de ses intérêts et de ceux de
ses enfants. Lorsqu’il écrit à Granvelle (p. 277), c’est dans le but d’obtenir
des'faveurs du roi pour lui et sa famille. « II hoigne merveilleusement sui­
tes cent ducats deniembrés de Hal (p. 52i). » Il aime l’argent (pp. 101, 145).
Il veut que tout se fasse pour lui, sans vouloir rien faire en faveur d ’aulrui;
son fils cadet, jeune homme sans aucune expérience, a été nommé colonel,
grâce à ses démarches. Et cependant, ajoute Morillon, l’ingratitude de ce
PltÉFACK
XXXV11
seigneur esl grande. C’est à peine s’il le voit « ayant longtemps apperçu
que le particulier luy vad plus à cœur que le général, et q u ’il al beaucoup
de semblables (p. 31'.»} Viglius (lisait aussi à qui voulait l’entendre que
Berlaymont veut tout cl que, par suite de ses prétentions, il s’est rendu
odieux à tout le monde. Morillon passerait volontiers sur toutes ces mau­
vaises qualités, si pour parvenir à son but « il ne laissoil de en plusieurs
choses faire son devoir p. 237). » Le comte avait encore un autre défaut,
selon Morillon, celui d ’aimer la table. Il étail « gouteux et roigneulx à cause
de ses excès aux lieux où il est allé renouveller loix », mission facile confiée
par le gouvernem ent à des personnages importants, dans le b u t de leur
accorder certains avantages pécuniaires '.
Malgré tous les défauts de Berlaymont signalés par Morillon, il ne faut
pas perdre de vue ses bonnes qualités. Il était doué d une certaine perspi­
cacité,qu’il serait difficile de nier sans être injuste à son égard. Par exemple,
il prévit parfaitement bien, lorsque personne n’y songeait encore, la mal­
heureuse issue des négociations de paix entamées, en 1575, avec les
insurgés sous les auspices d ’un délégué de l’empereur. Il comprit parfaite­
ment que Schwarzembourg, l’homme de confiance de Maximilien IL n’ob­
tiendrait sous ce rapport aucun résultat. De l’avis de Berlaymont, il fallait
un tout autre élément d’intervention. Il fallait avant lout s’entendre avec
les États (p. 297). En ce point il avait certainement raison. Aussi longtemps
(jue les représentants du peuple — ou les nomm erait ainsi de nos jours —
faisaient de l’opposition au gouvernement, il n’y avait pas à s’attendre à une
réconciliation complète entre le roi et les provinces insurgées, pas même
entre le gouvernem ent et les populations encore obéissantes. L’opinion
' Scion u n e p c t i l e c h r o n i q u e h é r a l d i q u e in sé rée au to m e X I V des M a n u scrits de L e fo r t, a u x A rch iv es
d e l’È la t à Liège, B e r l a y m o n t était u n p e r so n n a g e 1res s i n g u lie r . L’a u t e u r d e ce lle c h r o n i q u e y d o n n e
des d é ta ils c u r i e u x , d e s h isto r ic ité s p i q u a n t e s , m ê m e m é c h a n t e s , s u r h
se ig n e u rs d e ce t em p s. Il est p a r t i c u l iè r e m e n t vio len t
B ormans,
T a b lts de L e fo r t ,
2e
p a r t i e , p.
7.)
à
façon de v iv r e des g r a n d s
l’ég ard d e la fam ille de B e rla y m o n t.
(Stanislas
XXXVI I I
PKKFAŒ
des États a été en tout temps, dans notre pays, la boussole de l’opinion
publique.
IX.
Un autre membre de la noblesse belge, très en vue pendant le XVl®siècle
et appartenant au parti royaliste, était Philippe de Sainte-Aldegonde, soi­
gneur de Noircarmes. Nous l’avons déjà vu figurer dans les volumes précé­
dents.
Pendant l’année 1574, il était chargé en Hollande de négocier la paix
avec les insurgés par l’intermédiaire de Marnix, fait prisonnier à Maassluis
et dont Noircarmes «lisait : Si cet homme ne fait tout son possible pour que
le pays se redresse sous l’obéissance de l’Eglise et du roi, je n’y cognois
rien (p. G). Don Ferdinand de Lannoy, qui devait l’aider dans cette mis­
sion (p. 7), fut nommé en sa place gouverneur d’Utrechl, de Hollande et
de Zeelande (p. II). Une maladie bien cruelle, un cancer à la bouche
(pp. G, H , 15), ne lui permit guère de s’occuper beaucoup des affaires. Les
habitants de Gouda lui envoyèrent des députés chargés de faire connaître
leur intention; ils voulaient se rendre à condition d’obtenir grâce (pp. 12,
15). Rien ne se fit. Noircarmes était trop malade. Selon Morillon, il allait
au galop ; son médecin assura q u ’il ne reven ait plus jamais son pays; c’est
un corps exténué; il a fait tout ce qu’il pouvait faire (p. 15). Le 5 mars
1574. il expirait à Utrecht.
Morillon nous laisse de son caractère un triste témoignage. Loin d ’être
modeste, « il a voulu enjamber sur tout, ce qui lui devait coûter cher; et
Dieu sait ce que l'on a dit de son ambition (p. 24). » Jamais il n'a voulu
quitter son traitement de 700 écus par mois que Berlaymont lui enviait
(p. 242), ni résigner ses fonctions ju sq u ’au jo u r de sa mort « qui le p rin tà
limproviste, n’aiant encore pourvu à ses affaires, paroles dont Requesens
était scandalisé; car à vrai dire il avait esté assez longtemps malade et bas
PREFACE.
xxxix
pour y aviser. Jamais homme ne fut si peu plaint. Ses propres parents en
ont dit du mal depuis sa mort (p. 78)
»
X
Dans ce volume, comme dans les précédents. Granvelle se m ontre con­
stamment l’antagoniste décidé du duc d’Albe. Il le condam ne; il flétrit sa
manière d’agir avec un esprit d’indépendance remarquable. A chaque
occasion, il ne cesse de répéter que le duc a perdu le pays et la cause du roi
par sa tyrannie, par ses excès, par ses exploitations, par l’insolence et les
désordres de la soldatesque (p. 72).
Au moment du départ d’Albe, Granvelle, si grave et si réfléchi, a l’air de
vouloir faire passer son voyage comme la continuation de sa conduite aux
Pays-Bas. En écrivant de Naples, le 5 janvier iS 7 4 , il s’informe ironi­
quem ent auprès du prieur de Bellefontaine des faits et gestes du duc :
« Mr le duc d’Albe aura déjà, dit-il, fait son passage, qui n’aura pas été.
sans doute, sans fouille, en m enant si grande suite : car je me doute bien
que le payem ent que aucuns auront fait sera maigre. On l’attend à Gènes,
où déjà doit se trouver M. le cardinal de Pacheco et autres qui sont allés
à sa rencontre (p. 26). »
En s’exprim ant ainsi sur le compte du représentant du roi, Granvelle
devait être irrité contre lui au suprême degré, et non sans motifs. Bien des
fois, il avait cru devoir engager le duc, dans l’intérêt du pays, à conserver
la forme établie du gouvernement, à ne pas se m ontrer par trop sévère, à
se contenter de faire disparaître les abus. Jamais le duc ne lui répondit. Il
avait, dit Granvelle, trop de présomption, et on a mal agi en faisant accroire
au roi q u ’il avait grand intérêt à confisquer les biens, que par ce moyen le
pays aurait suffisamment produit de fonds pour faire face aux dépenses de
la guerre contre la France, et le duc n’a pas pu s’y prendre d’une manière
PREFACE.
XL
convenable pour mettre cette idée à exécution. Sa pensée, continue-t-il, de
faire passer son fils au gouvernement après son départ, a etc fatale au
pays. Il s’en est mal tiré. Entretemps, les excès et les désordres ont irrité le
peuple qui, dans son désespoir, est devenu l’ennemi du roi. parce qu il
s’imaginait que tout se faisait en vertu de ses ordres. On a aussi irrité la
population d’une manière extraordinaire en la faisant passer pour un
ramassis d’hérétiques et de rebelles, épithèles que les domestiques des
ministres et les soldats jettent à la tête de tout le monde (p 63). Toute cette
lettre, dont nous recommandons spécialement la lecture aux historiens,
est un acle d’accusation en règle dirigé par le cardinal contre le duc
d’Albe, contre ses satellites, contre tous les chefs espagnols arrivés aux
Pa)s-Bas pour y exploiter les habitants, les ruiner et les maltraiter. Ces
pages si sombres, écrites avec une profonde conviction, dém ontrent co m ­
bien Granvelle aimait son pays, ses compatriotes, la vérité et la justice,
combien il détestait les étrangers, toujours prêts à exploiter les sujets du
roi, toujours disposés à les trailer en véritables ilotes. Celte missive et celle
q u ’il écrivit à Don Juan de Çuniga (p. 10) réhabiliteront (îranvelle aux
yeux de toute personne qui juge l’histoire avec impartialité. Dans la
seconde de ces lettres, il avoue que sans un miracle de Dieu, il n’y a pas
moyen de remédier aux maux q u o n t engendrés de trop longs relards
Tout ce qui a été écrit à ce sujet en Espagne y a été mal compris, dit-il,
et
011
pont regarder les Pays-Bas comme perdus, ainsi que S. E. Ensuite
ce sera le tour de l’Italie (p. 28).
Le jugement si sévère porté par Granvelle contre le duc d’Albe est-il le
résulta! d’un am our-propre Iroissé et du désir de remplacer le gouverneur
déchu? Nous ne le croyons pas. Au moment de la retraite du duc d’Albe,
Requesens avait proposé au roi de rappeler le cardinal aux Pays-Bas.
Philippe répondit que Granvelle lui était indispensable à Borne et q u ’il
avait des envieux aux Pays-Bas (p. 19). « Il me convient fort bien, dit
Morillon à ce propos, que Granvelle ne voulait servir sous Lalaing parce-
PR ÉF AC E.
XLI
que les choses n’étaient habillées par ceux qui le (levaient et pouvaient. »
Dès 1572, le cardinal avait déjà déclaré q u ’il n’accepterait plus le gouverne­
ment <• pour rien » Ce n’est donc pas le dépit qui l’a fait parler ainsi, c’est
une conviction sincère basée sur des faits incontestables.
Dans sa lettre du 26 juin 157i, adressée au prieur de Bellefontaine
(p. lui)., le cardinal avoue q u ’il n'a jamais été partisan de la convocation
des Etats généraux du pays. La réunion de ces Etals, en 1d57, a eu lieu
malgré lui, a mais enfin, dit-il, ceux qui désiraient la dite assemblée, s’ai­
dant du confesseur du roi, prévalurent. » A son avis, celte réunion fut le
point de départ de tous les désordres : les Etats y enlevèrent au roi l'admi­
nistration des aides pour les mettre entre les mains dos marchands, lesquels
prêtaient des fonds aux moteurs des troubles, « et fit l’on ce q u ’on peust
pour abaisser l’auctorité de S. M., afin qu’elle n’eust ès pays d’cnbas, si non
autant q u ’on voudroit. » La nouvelle réunion des États, projetée par
Requesens, ne produira pas de meilleur résultat : « il ne m’a jamais semblé
bon, dit-il, de faire négocier lesdits Etals ensemble; car je sais la peine
que, au temps de la Royne (15oa), l’on eust pour une assemblée que s’en
fit il y a trente ans, du dommage de laquelle l’on se sentoit cncores au
patientent de ladite Royne (p. 117). »
Selon sa manière de voir, Requesens avait aussi commis une faute grave
en recrutant des Suisses pour augmenter l’armée aux Pays-Bas. Il lui en
avait écrit ainsi q u ’au roi. Les prévisions de Granvelle se réalisèrent en
effet. Ces soldats furent une véritable calamité p our le pays, à tel point
que l’on fut obligé de les renvoyer (p. 186, 413). Le cardinal n’aimait pas
l’emploi de la force dans la répression des troubles aux Pays-Bas. Il ne
cessait de répéter à qui voulait l’entendre que la douceur était le moyen
le plus sû r et le plus expéditif pour apaiser tout le monde. Sa lettre adres­
sée au roi, le 27 février lo7o, le constate également (p. 300).
Dans cette missive, le cardinal commence d’abord par déplorer le triste
état des affaires des Pays-Bas. Des sommes énormes fournies par l’Espagne
T ome V.
6
XLI I
PR ÉFA CE
y ont été dépensées inutilement. Mieux eût valu employer d ’autres moyens,
qui n ’auraient pas été contraires à la religion ni à l’autorité du roi. Il les
indique franchement et loyalement au roi. Le commerce aurait dû être
rétabli surtout. Cependant, ajoute-t-il, il ne faut pas laisser au prince
d’Orange et aux Allemands l’honneur d’avoir o b te n u , par leurs négocia­
tions, ce dont les populations devraient être uniquem ent redevables à la
bonté du roi. Il engageait le monarque à donner de son propre mouvement
la meilleure opinion possible de son affection pour le peuple. Vaines recom­
mandations! Le roi n’écoutait pas. La guerre d’extermination continuait
de part et d’autre, au grand profit de l’étranger et en dépit des recom man­
dations de Granvelle. Sachant fort bien que le cardinal donnait des conseils
dans le sens d’une pacification au moyen de la clémence, le peuple regret­
tait son éloignement. « Ce que je regrette le plus, dit Morillon, c’est que
depuis deux ans que la mémoire de V. I. Srie est si agréable à la généralité
du pays, p a r l’espoir de voir triom pher son conseil, I on rentre en aigreur
et mauvaise opinion contre elle, comme si elle avait eu part à la dissimu­
lation (pp. 45, 44). » 11 n’y avait aucune dissimulation à ce sujet de la part
de Granvelle : dans toutes ses lettres au roi, il ne cessait de préconiser la
clémence.
L’examen attentif des missives du cardinal prouve qu’en y parlant des
affaires des Pays-Bas, il s’inspire toujours de la correspondance de Moril­
lon. C’est aussi son correspondant le plus actif, le mieux renseigné. Toujours
à la piste des nouvelles les plus récentes, constamment en relation avec nos
hommes d’Etat les mieux informés, Morillon est à même de pouvoir juger
immédiatement des événements et d’en transmettre le résultat à son ami.
Rarement, il se trompe dans ses appréciations. Voix sage, voix honnête, il
suit consciencieusement et avec anxiété toutes les péripéties du drame lugu­
bre dont il est spectateur. Il sait en dépeindre les scènes avec talent, surtout
lorsqu’il retrace les excès de la soldatesque, les mutineries des Espagnols et
des Allemands, leurs pillages, leurs dévastations et les sacs des villes.
PR É F A C E .
XL1II
Lorsqu’il définit le caractère d ’un personnage liant placé, il sait mettre
du sel dans ses observations. Ses portraits sont tracés avec habileté, nous
ne dirons pas toujours avec impartialité S’il exagère parfois ses charges,
il devient amusant, même lorsqu’il s’exprime avec passion.
Il en veut surtout aux égoïstes, aux hommes avides d ’honneurs et d’a r­
gent, maladie de] l’époque, défauts capitaux q u ’il sait découvrir dans
l'entourage du gouverneur général, quoique lui-même n’en soit pas com­
plètement exempt. Quand il s’agit d’argent, Morillon est toujours le
premier à réclamer. Cependant, il flétrit avec indignation les vols commis
par le châtelain de Valenciennes, beau-frère d’Albernos (p. 2o); il dénonce
Sancho Davila et Mondragon « qui cherchent à engraisser leurs mains
(p. 440). »>
Lorsque Granvelle fait usage des renseignements fournis p a r son corres­
pondant, il le fait avec tact et une sage réserve. II lui em prunte volontiers
ses idées générales su r la situation du pays; il sait les grouper avec art,
sans s’attacher aux détails parfois trop prolixes fournis par Morillon.
Celui-ci est toujours l’adversaire déclaré des Espagnols, l’antagoniste le
plus décidé du duc d ’Albe. « Il faudra, dit-il, beaucoup de bonnes dépêches
pour regagner de bons sujets et que les Espagnols quittent le pays. Par
suite d’un peu de succès, ils ont mis à découvert le mauvais cœur q u ’ils
nous portent en général, au point d’exciter la rébellion partout Même
Vargas, qui fait tant le bigot, a usé de propos par trop étranges. Selon lui,
le seul fait d’être obligé de reconquérir les pays perdus par l’Espagne et
d’y avoir vu périr tant d’hommes remarquables, exige que le roi fasse
usage de châtim ent et de vengeance. Néanmoins L*s seigneurs dorm ent et
ne dem andent pas à être de la partie, sachant combien il est dangereux
d'être de la compagnie des Espagnols qui s’attribuent le bon et rejettent le
mauvais sur les autres 11 est ainsi, comme dit V'. I. Sie, que si les seigneurs
l’avaient cru, les Espagnols, qui cherchent à nous ruiner, ne seraient
jamais entrés au pays. Le roi pourra bien pendant quelque temps ne pas
XL I V
PRE FAC E.
prendre de résolution sur les principales affaires; mais je crains q u ’il se
trouvera forcompté (pp. 412, 413). »
Morillon, de même que Granvelle, est grand partisan d ’un arrangement
pacifique; mais le roi l’avait déjà déclaré : « plustost me voir mort que de
consentir chose qui soit contre mon honneur et réputation
»
XI.
Selon Morillon, Viglius, président du Conseil Privé, n’était pas tout à fait
exempt de reproches. Abusant des expédienls de la diplomatie, il jouait,
dit-il, « des (ours de Breton à ses amis, à Richardot, par exemple, auquel
il semblait très dévoué (p. 425). » Morillon lui reconnaît néanmoins beau­
coup de finesse, don q u ’il avait de commun, dit-il, avec les « /.Ingli-Saxones
que sont les Frisons et ne vaillent pas un poil mieulx que les Anglois
(p. 425).» En général, Morillon n’aimait pas les Frisons, il était convaincu
que si Hopperus, compatriote de Viglius, revenait aux Pays-Bas, il ne s’en­
tendrait nullement avec lui : « tant y a q u ’ilz sont Frisons tous deux et
conséquemment Anglo-Saxones que jouent volontiers de la queue (de
renard ?) (p, 235). 'i
Le correspondant de Granvelle jugeait Viglius en général d ’une manière
assez favorable, sauf en ce qui concerne la question d ’argent et les avantages
q u ’il exigeait en faveur des siens. Sous ce rap p o rta i était parfois inexorable,
malgré les obligations qu’il lui avait comme confident. Chez Viglius, il
recueillait un grand nom bre de renseignements; il avait avec lui des
relations intim es; parfois il lui donnait aussi des avis (pp. 29, 48, 79 et
suiv., 1<)9, 170).
Dès 1574, Viglius avait beaucoup perdu de sa vigueur (pp. 5(5,100, 27(5).
Insensiblement, il s’affaissait. Un m om entil fut même question de pourvoir
1 Bibliothèque n a tionale de P a r is , t. I l , p. 4 4 8 .
PRÉFACE
XLV
à son remplacement (pp. 57, 281). D’après Morillon, il se souciait peu des
affaires publiques, « il devint pesant et a opinion d’être dans sa dernière
année, et partant laissa couler l'eau de la montagne (p. 5G).» De son côté, le
Grand Commandeur, convaincu qu’il pourrait le faire m archer selon sa
guise, voulait encore le consulter (p. 57), sans être tout à fait bien disposé
en sa faveur : « disant q u ’il en fera toujours ce q u ’il \o u d ra en donnant
quelque office à un des siens ou de ses serviteurs (p. 203). » L’opinion de
Requesens au sujet des faiblesses de Viglius est pleinement confirmée par
Morillon, en disant que le président ne se soucie de rien d’après scs propres
aveux, si ce n ’est de lui-même et de ses gages « remeclant le tout à d’Assonleville, qui favorise de Vergy et la noblesse (p. \ { i ) . » « Et lorsqu’Etienne
Van Craesbeke fut nommé au Conseil de lirabant, Viglius grouilloit, parce
que son protégé ne l’avait pas emporté (p. 154). »
En ce qui concerne la manière d’agir de Requesens à I égard de Viglius,
celle-ci n ’avait rien d ’extraordinaire; le gouverneur ne nourrissait de sym ­
pathie que pour ses compatriotes. S’il consultait le président, Berlaymont
et d’Assonleville, c’était par écrit, « mais, ajoute Morillon, Sancho Davila ,
seule source, seule cause de notre mal, Mondragon, Vargas et Arias Mon­
tanus sont du Conseil d ’Etat, et Roda gouverne tout île la manière la plus
absolue ,p. 110). »
Cette influence des Espagnols, tant décriée par d ’Aerschot et par d ’autres
seigneurs, mettait Viglius mal à l’aise. S’il ne voulait pas aider à décrier les
Espagnols, s’il n’entendait pas leur faire de l’opposition, il n’aimait pas d ’un
autre côté de les voir complètement maîtres de la situation, quoique, selon
d’Assonleville, le président permit tout à Roda, personnage très influent et
intrigant surtout (p. 213).
Quant au roi, Viglius avait toujours pour lui les plus grands égards, lin
jo u r cependant il se permit de dire « q u ’il ne vient rien de S. M. pour per­
sonne, malgré les six ou sept couriers qui lui avaient été expédiés (p. 101). ><
C’était le seul reproche q u ’il se permît à l’adresse de son souverain.
XLVI
PREFACE.
XII.
A côté de Yiglius doit nécessairement figurer Hopperus, son correspon­
dant intime.
Il danse comme le roi flûle (p. 23). Granvelle s’en plaint. Dans le b u t de
complaire au roi et de faire ses affaires, il prend une part des confiscations
par l’intermédiaire de ceux qui les administrent. Il n’a pas tenu compte de
ce q u ’il aurait d û faire pour détrom per le roi (p. 06).
Hopperus écrivait toujours suo more, « et ses lettres en ont toujours
d’autres au ventre, selon l’expression de Viglius (p. 175). » « Il me déplaist,
dit Morillon, que Hopperus, par son indiscrétion et ambition, faict si grand
mal au pays, qui désia a oblié les nouvelles ordonnances si l’on heut lessé
faire au président, qui s’en trouvet en grand traveil (p. 191). » Hopperus
à la fin repondra, continue-t-il, et n’est sage de se piquer avec Çajas, qui
sera trop fin pour sa bouticle (p. 208). Néanmoins il était question de l’e n ­
voyer aux Pays-Bas pour y devenir président du Conseil privé (pp. 250,
265, 423); il serait remplacé à Madrid par Boisschot. Mais pourrait-il s’ac­
corder avec Viglius (p. 2 3 5 )P
Son mémoire sur la pacification des Pays-Bas est l’objet d’une critique
sévère de la part de Morillon. Voici ce q u ’il en dit : « Il est très gonflez avec
beaucoup de répétitions et subdivisions. Il n’est pas l’homme pour donner
de grands expédients, et ce q u ’il dit a-t-il en partie em prunté à Granvelle.
Il me semble q u ’il al oublié ung principal moien, qui seroit de rendre les
biens indifféremment, avec condition que ceulx qui ne vouldroient vivre
selon l’ancienne religion romaine, se debvroienl retirer en aultre pays. Cela
appaiseroit beaulcop les troubles, et les grandz ne vouldriont icy retour­
ner, craindanlz q u ’avec le temps l’on leur polroit faire quelque maulvais
tour. Si l’on adjousloit que les étrangiers ne seroient enlremiz en eslatz ou
ollices, je tiens que ces deux pointz rappaiseroient tout le m o n d e .. . Je
PRÉFACE.
XL VI l
suis esbahi que Hopperus laisse sortir un escript de ses mains si mal fagotté
et d’ung si povre stil et langaige. J ’adjousteray q u ’il fust fort à plaindre
qu ’ung aussi grand Roy n’at aultres gens près de soy. Il est certain que
Hopperus n’at pas tousiours tenu tel langaige du duc d’Albe, q u ’il a flatté
dém esurém ent, pensant par là faire l’appoinctement de son genre, et du
reste que le duc le désestimait avec ses lettres (p. 240)... Hopperus acquiert
partout mauvaise réputation parce qu’il at composé quelque livre en théolo­
gie, que l’on prend po ur signal q u ’il n’est guères travellé d’affaires (p. 575). »
Malgré la correspondance active entre Hopperus et Viglius, celui-ci se
plaignait beaucoup de lui (p. 281).
XIII.
Les événements les plus remarquables m enlionnés\lans ce volume sont
les suivants :
1° Philippe de Marnix de M o n t-S te-Aldegonde est fait prisonnier à
Maassluis ; négociations avec les insurgés par son interm édiaire;
2° Equipement à Anvers d’une flotte destinée à combattre les insurgés;
5° Assassinat de Don Juan de Mendoça;
4° Pillages faits par les Gueux des bois;
5° Nominations de Noircarmes et de Don F’erdinand de Lannoy au gou­
vernem ent d’Ulrecht, de Hollande et de Zeelande;
()° Siège de Middelbourg par le prince d’Orange;
7° Réunions des E tats;
<S° Désastres arrivés aux bateaux armés par les Espagnols à Berg-opZoom ;
9° Bataille navale près de Roomerswaal et anéantissement de la flotte
espagnole;
10° Mauvaise direction prise par Requesens dans la conduite des affaires
des Pays-Bas;
XLYI I I
PREFACE.
11° Plaintes de Flamands dont les bateaux ont été saisis par les Espa­
gnols pour l’arm em ent de leur flotte;
12° Concussions et vols commis par le châtelain de Valenciennes;
13° Brigandages de la soldatesque en Flandre, en Artois, dans le Tournésis, au quartier de Lille, dans le pays de Namur, dans celui d’Utrecht et
en Brabant;
14° Campagnes de Don Juan en Afrique;
15° Plaintes adressées au roi par Médina Celi, sur la conduite du duc
d ’Albe;
16° Les Etats dem andent la suppression du Conseil des Troubles, l’abo­
lition des 10e et 20e deniers, le rétablissement des privilèges;
17° Prépondérance des Espagnols dans le Conseil d’Etat:
fH° Mission en Angleterre du baron d’Aubigni, de François de Halewyn
et de Jean de Boisschot. Arrivée à Briel de (500 Ecossais et 400 Anglais;
19° Négociations en France entre le roi et les Huguenots;
20° Capitulation de Middelbourg. Celte ville est remise entre les mains
du prince d’Orange, ainsi q u ’Arnemuiden ;
21° Conspiration à Anvers en faveur du prince d’Orange;
22° Entente entre le prince d’Orange, la France et l’Angleterre;
23° Invasion d ’une nouvelle armée du prince d ’Orange, sous la conduite
du comte Louis de Nassau;
24° Invasion de l’armée espagnole dans le VValerland;
2o Bataille de Mook, où périrent les deux frères du prince d ’Orange et
Christophe, comte palatin;
2(i° Mutinerie des Espagnols à Anvers;
27° Mutinerie des Wallons et des Allemands à Ulrecht;
28° Eric de Brunswik commet des excès avec ses troupes à Zutphen ,
dans POveryssel et le pays de G roningue;
29° Publication d’une nouvelle amnislie;
30° Enlèvement de la statue du duc d’Albe à Anvers;
PRÉFACE.
XI. IX.
31° Construction de forts près de G eertruidenberg;
32° Sièges de Gorcum et de Bommel. iMortde Charles IX, roi de France.
Création d ’une Chambre'des Comptes pour les confiscations;
33° Prise de Leerdam par les Espagnols. Prise du château de Beest;
34° Destructions commises en Flandre par les insurgés de Terneuzen;
35° Mutinerie des Allemands à Bois-le-Duc;
3(>° Armements des Huguenots en Allemagne;
37° R e p r é s e n t i o n s des Etats de Brabant au roi en Espagne. Bon accueil
qui est donné à leur député par l evêque de Cordoue;
38° Désir de l’électeur de Cologne et de plusieurs princes de l’Empire
pour la pacification des Pays-Bas. Même désir exprimé par l’em pereur;
39° Siège de Leiden ;
4 0 ' Nouvelles ordonnances en Bourgogne. Beprésentations au roi à ce
sujet;
4 i° Projet d’envoyer Hopperus aux Pays-Bas;
42° Les Gueldrois exigent l’observance du traité de Venloo;
43° Opposition des États de Brabant. de Flandre et de Hainaut. Ils veu­
lent la paix;
4 4 « Percement des digues en Hollande. Délivrance de Leiden;
45° Léoninus est chargé de nouer des négociations avec les insurgés.
Mutinerie des Espagnols en Hollande;
4(>° Les soldats allemands se mettent en armes contre les soldats espa­
gnols;
47° Soulèvement des Frisons;
48° Négociations avec l’Angleterre à Bruges;
49° Enlèvement de bourgeois, qui sont rançonnés à Geertruidenberg;
5 0 Les insurgés se font payer par les Flamands des contributions pour
échapper aux incendies;
51° Les Espagnols abandonnent La Haye et tous les forts de la Hol­
lande;
T ome
V.
7
PRÉFACE.
L
52° Négociations de paix inutiles à Brcda;
53" Complot en faveur du Prince d’Orange à Anvers;
5 i° Mission à Bruxelles du docteur Thomas Wilson, envoyé par la reine
d’Angleterre;
55° Excès des troupes allemandes à Anvers;
56° Conquête de Buren;
57° Massacre des catholiques redouté à Anvers;
58" Conquête de Klundert et de Fijnaart par Mondragon;
59° Mariage du prince d’Orange avec Charlotte de B ourbon, après la
répudiation d’Anne de Saxe;
()0° Maladie de Requesens. Il désire se retirer;
61° Prémices de la nomination de Don Ju an aux fonctions de gouver­
neu r général des Pays-Bas ;
62° Rassemblements des Huguenots sur les frontières du pays de Luxem­
bourg;
65° Contributions illégales exigées des habitants de la Campine et de
Flandre;
64° Siège et prise d’Oudewaler;
65° Nouvelle convocation des Etats à Anvers;
66° Prise de Schoonhoven p arle s Espagnols;
67° Conjuration à Amsterdam en faveur du prince d’Orange;
68° Expédition contre l’ile de Tholen et Philipsland;
(59° Siège de Zierikzee;
70“ Conquête de Duiveland par les Espagnols;
7i° Le Sr d’Hierges s’empare du château de K rim pen;
72° L’am iral Boisot prend plusieurs vaisseaux espagnols;
73° Prise de Brouwershaven par les Espagnols ;
74° Siège de Bommenede et prise de ce fort par les Espagnols;
73° Arrivée en Angleterre et à D unkerque de la flotte espagnole dans un
état alarmant ;
PRÉFACE.
LI
76° Mécontentement de la reine Elisabeth d’Angleterre, au sujet de la
bonne entente entre le prince d’Orange et la France, à laquelle il livrerait
ta Hollande et laZeelande;
77° Liberté accordée par le roi de France aux insurgés des Pays-Bas de
fréquenter ses ports et villes;
78° Prise par les insurgés du fort de Haastrecht;
79° Désarroi dans les finances;
80° Mouvements des Huguenots en France.
XIV.
Nous avons consulté, pour la rédaction des notes, les publications indi­
quées à la page
x lu i
de notre volume précédent. En outre, nous avons eu
recours aux livres suivants : Mémoires de G uillaume de S a u lx ; Mémoires
et correspondances de D u p lessis-M o rn a y; Cimber et Danjou, Archives
curieuses de l ’histoire de France, l re série; Forneron, Les ducs de Guise et
leur tem ps; De Croze, Les Guises, les Valois et Philippe I I ; Ranke, Histoire
de France au X F I e siècle ; Correspondance de la Motte Fénélon; Mignet,
Antonio Perez et P hilippe I I ; Le m arquis de P id a l, etc., traduction de
Magnabal; Gianno, H istoire de N aples; ('barrière, Négociations du Levant;
Teiner, Annales ecclesiaslici ; Duchesne, L a Maison de Montmorency ;
G énard, Archievenblad ; Journaal van S p lin ter H elm ich; Mémoires et
documents inédits s u r la Franche- Comté ; Le comte Jules Delaborde,
François de Châtillon, comte de Coligny ; L ’Etoile, Jo u rn a l de H enri N I ;
Beaurier, ÊUsabeth d ’A u trich e, fem m e de Charles I X ; Gollut, Mémoires
de la République séquanaise; Molanus, H istoriæ Lovanienses; Foppens,
Bibliotheca Belgica; A n n u a ire de l’Université catholique de Louvain ; Resolutien der Staten van H olland en F riesla n d ; Vander Aa, Riographisch
PREFACE.
woordenboek; Dodt van Flensburg, A r c h ie f voor kerkelijke en wereldsche
geschiedenis.
Comme antérieurem ent, nous avons tiré parti des papiers d’Etat con­
servés aux Archives du royaume.
Nous exprimons ici de nouveau notre reconnaissance à M. Castan, qui a
bien voulu nous fournir des renseignements utiles.
BlI
CARDINAL DE GRANYELLE.
i.
DON KERNANI) DE L A N N O Y
CO M T E DE L A R O C I I E , AU CA R D IN A L D E G R A N V E L L K .
(Bibliothèque royale de Uruxelles. — Manuscrit n° 16100, fol. 111-112.)
A r r a s , le 8 j a n v i e r 1575.
Monsieur, chete serra pour adverlir à V. S. lllme comment aujourd'hui,
estant près de Mons1' de Sl-Vas *, il m’at dit que il ne serroit assés servir à
V. IllmB S. tant de bien et faveur que le al feit on l’aider d’argent; car
autrem ent son feit dem uroit là. Je désire que bien tost il puisse avoir sa
dépêché, p o u r beaucop de respect, tant pour le bien de son abaye, comment
V. S. lllme peut mieus savoir que nullui ; aiant les dépêches, serrai le maître
là u que esture il est demi maître.
1 V o ir sa no tice t. 1, p . 151, n o t e 1.
*
T h o m a s d e P a r e n t y , B ru x ello is. G r a n v c l l c s 'i n t é r e s s a i t s p é c i a l e m e n t à lui faire o b t e n i r le siè ge
a b b a t i a l de St-V aast à A r r a s , v a c a n t p a r la m o r t d e R o g e r d e M o n t m o r e n c y , d écéd é le 2 5 ju illet 1575.
V o ir G a llia C h r istia n a , t. I l l , fol. 5 9 0 .
T
ome
V.
.
1
9
CORRESPONDANCE
. . . J ’ai reclieu tout eslurc lettres de l’Ex00 du Gran Conimandeur allin
que je voie en diligence visiter tous nous frontières et savoir combien
d’artillerie et municions i sont, et se que samblerat que prontem ent se
porrat 1ère au fortificacions pour la seure gharde. Se que j ’ai b ie n v e u ;
mais je me part pour mieus le revoir et pour y plus amplement mettre par
cscrit le tout et veoir se que prontem ent se porrat remedier : car on n’at le
moien de tout référé se que et nécessère, mais acoutrcr se que se trouverai
plus dangerous po ur surprise; et par se moien je ferai pencer à nous voi­
sins autre chose que ne pencent et le mieus et bien gharder se que avons.
Et cant les François verront que donnons quelque bon ordre, il penceral
deus fois devant de prendre, et arrat peur de nous comment pencent que
avons d’eus.
Y. S. Ill1"“ at de savoir que Mess, ilu Conseil de Troubles me tirent un
jeu fort mal pour moi, car Sa Majesté avoit feit dem ander avis sur la Slic de
Selières* e tq u e c h e t avis fusse envoié en Espaigne. Se bon Varghas ’ et autres
du Conseil me firent entendre que il avoint envoié en Borghoinnc pour
s’informer, et j ’ai envoié trois fois pour se fait; enfin il me ont tenu vu mois
en chete sorte Esture que j ’allis en Brucelles me donnirent la lettre d’avis
disant que il pensoint de l’avoir envoié, car il ont vollu jo u y r de toutes les
rentes elères des confiscacions; et de peur que je n’eusse chete mercède, il
m’ont entretenus vu mois et demi de se que. Voilla comment ses bone gens
011 fort bien servi le maitre, n’aiant feit justice à nullui et prendre tout
pour eus; et si on veut esture fère justice de quatre ans, on ne tirerai des
confiscacions; on me doit vu mille florins, sans savoir ù les prendre. Il s’en
vont riches et avecque peu de réputacion, lessant se pais fort ruiné et
malcontent. Je feray tou service et obéirei à ce bon Sr noviau ghouverneur
en se que me com m anderai; ausi il me montre grande amitié et al pris de
fort bone part se que je luy remontre toissant issi de mon ghouvernemenl.
' Sellières, b o u r g et s e i g n e u ri e d a n s la F ra n c h e - C o in tc , a u j o u r d ’hu i d é p a r t e m e n t d u J u r a .
s J u a n de Var gas, m e m b r e d u Conseil des t r o u b le s.
DU CARDINAL DE GR AN VEL LE
">
11.
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L
DE GRANVELLE.
(lîibliollièque de Besançon. — Lettres de Morillon, t. Il des sup plé m e nts , loi. XI.)
( i r a i m n o n t , le !l j a n v i e r
137-i.
J ’ay reçeus la lettre de Vtl'° lllme et Rnie Slic escripte de sa main le ue du
mois passé, et veu les deux lettres de Mme de Parme, que sont fort amiablez,
escriptez avec grand respect: et je veoidz par icelles la confidence que
Mmii de Parme et le f r è r e 1 ont en Vtlc lll,ne Sric, que faict bonne euvre de dire
à ce jeusne seigneur ce que luy convient pour son bien ; mais la jeunesse
luy lient les yeux, bendés. Il cognoistra cy après le bon conseil que luy
donnez m aintenant; le dangier est que ce ne soit tard.
Je ne feray samblanl à homme qui vive de la fille \ Ce que le duc d’Albe
publie là par ses lettres et à Rome 5, sont fanfarez pour abuser les cor­
neilles et faire entendre que s’il y at cy après quelque bon succès, que c’est
par luy que at esté jeelé le fondement.
Le capitaine Julian recouvrit quelque dicquez et print Auldegonde*.
Il est certain que si leCom m endador Maior fut esté icy plustost, les affaires
n’en vauldroient que niieulx. Il demeure cncores en Anvers, faisant les
apprestez de mer, aiant délibéré d’assaillir les ennemiz de divers costelz s.
Dieu doint q u ’il succède6. Il donne crédit aux (iollandois et en at retiré
1 D o n J u a n d ' A u t r i c h c . V o i r a u t o n i e IV le s l e t t r e s i m p r i m é e s p p . 57!) e t s u i v .
2 J e a n n e d ' A u t r i c h e , fille n a t u r e l l e d e D i a n e l’a l a n g o l a e t d e d o n J u a n . V o i r iO id., p. 5 7 8 .
3 E n q u i t t a n t le s P a y s - B a s , le d u c d ’A ll ie s ’é t a i t d i r i g é v e r s l’I t a lie . V o i r I I oynck van P a p e s d i i e c i i t ,
t. I, p a r t . Il , p . 7 2 7 .
1 J u l i e n R o m e r o n ’é t a i t p a s c a p i t a i n e , m a i s m a î t r e d e c a m p . Il lit p r i s o n n i e r , à M a a s slu is , P h i l i p p e
d e M a r n i x , S r d e M o n t - S ‘' - A l d e g o n d e .
5 R c q u e s e n s r é s i d a e n e ffe t à A n v e r s d a n s le b u t d e f a i r e a v a n c e r les p r é p a r a t i f s d e la flotte d e s t i ­
n é e à s a u v e r la v i l l e d e M i d d e l b o u r g , q u i é t a i t e n ee m o m e n t a s s i é g é e p a r le s i n s u r g é s . V o i r à c e s u j e t
M k n m i c a , C o m m e n ta ir e s , t. I I , p. 1 7 8 , e t C o rr e sp o n d a n c e d e P h ilip p e / / ,
P a p e n d r f . c i i t , C o m m e n la r iu s , t. II, p . 7 2 7 .
* Succède, réussisse.
t.
I l , p.
5;
I I o y n c k van
CO RRESPONDANCE
beaucop quo oflVent do servir, et j ’av espoir qu’ilz feront quelque cliose do
bon, quant ce ne seroit que odio du duc d’Albe,qui lient son stile d’escriprc
accoustumé.
J ’ay voluntiers veu la lettre du cardinal de Pise 1 sur ce de Gemelli *. qui
est en l’opinion par delà q u ’il mérite, et Granvelle al faict ouvre méritoire
d ’y avoir tenu la main. Je mectray la lettre avec celles de la duchesse do
Parme et duc d’Albe avec les autres.
J ’entendz que Louis de Requesens venant à Malines estoit armé d une
cuyrasse, q u ’est digne de diffidence. Il at esté fort mal enbouché; Dieu
perdoint à ceulv qui en sont cause. Il al esté malade à Anvers d ’ung
calarro.
F ilin s 3 partant de Bruxelles, feit ung gentil tour à ses créditeurs, les
tenant devant sa cham bre ce pendant q u ’il partit secrètement par la garde
robe et ung huis de derrière. Son père at esté fort malade à iNamur; je 110
sçay s’il en est parti.
Vargas ‘ s’est faict puierdc son traictement pour tout le mois d ’apvril :
il fault louer Dieu que l’on en est quicte à si bon marchiet. L’on m’escripl
d’ung grand désastre advenu au S1' don Joan de Mendoça en Anvers s, do
nuict, ainsi q u ’il faisoit les amours à la belle Simone en habit desguisé : que
1 J e a n H ic ci P o l i t i e n , a r c h e v ê q u e d o M a u l r é d o n i a , c a r d i n a l d u t i t r e d e S 1 V i t a l , t i c . , a r c h e v ê q u e
d e P i s c , n o m m e c a r d i n a l e n IÜ51 , m o r t e u 1 5 7 4 . Il r e m p l i t cil F r a n c e et a u x P a y s - B a s d e s m i s s i o n s
d ip lo m atiq u es.
*
U n c e r t a i n P i e r r e ( j e m e l l e o u J u m e l l e , é t a i t c h a n o i n e g r a d u e à C a m b r a i . ( C a h p e n t i e u , H is to ir e île
C a m h r a y , t. I , p. 4 0 5 . ) V o ic i c o m m e n t V i g l i u s s ' e x p r i m e s u r s o n c o m p t e : » A d v e r s u s M. N. G e m e l l i ,
eanonici C am crac cn sis, scandalosas concioncs, j a i n , u t a u d io , a d je s u ila r u m q u e r e la s , a rc h iep isc o p u s
p r o v i d i t . » I I o y n c k v a n P a p e n d i i e c h t , t. I, p a r t . I l , p. 77(i.
J D o n F a d r i q u e , fi Is d u d u c d ’A l b e , q u i t t a B r u x e l l e s le 2 4 d é c e m b r e I Ü 7 5 . S o n p è r e l a v a i t p r é c é d é
d e s e p t j o u r s . M e n d o ç a , t . Il, p. 177.
‘ J u a n d e V a r g a s , l i c e n c i é et m e m b r e d u C o n s e i l d e s t r o u b l e s , m e n t i o n n é s o u v e n t d a n s les v o l u m e s
précédents.
5 V o ic i c o m m e n t V i g l i u s r a c o n t e à H o p p c r u s l’a s s a s s i n a t c o m m i s s u r la p e r s o n n e d u c a p i t a i n e
J u a n de Jlcndoça : « In tc re a d u m C o m m c n d a to r A n tv e rp iæ m o ra tu r , m is e ra n d u s san e ac la m en tab ilis
c a s u s t e r t i o h u j u s m e n s i s d i e ( j a n u a r i i 1 8 7 4 ) , i l l u s t r i c a p i t a n e o J o a n n i a M e n d o s s a ( q u o n o n m i n u s in
c o n s i l i o s t a t u s , q u a n t d i r c e t i o n e c q u i l u m m i l i t u m q u c G u b e r n a t o r u t e b a t u r ) ib i a c c i d i t . Q u i in p l a t e a
p u b l i c a c u m q u a d a m p e r s o n a s e r m o n e m s u b n o c l e m b a b e n s , a q t i o d a m D. C h a m p a i g n y f a m u l o , n o n
s a t i s u t i f e r t u r , a g n i t u s e x le v i o c c a s i o n e g r a v e
v u l n u s a c e e p i t , m a x i l l a q u e e i p r o p e m o d u m prn - cis a
f u i t , u n d e i n t e r o c t a v u m d i e m o b i i t . » ( I I o v n c k v a n P a p e n d r e c i i t , toc. c it., p. 7 2 7 . )
DU CARDINAL DE GR AN VE LL E
prendant um brc contre ung lacquay île iMr de Cliampagney, il seroit eslé
navré dudict lacquay en deux lieux au visaige avec ung coup à la teste, au
lieu q u ’il pensoit persser le dict lacquay. Aulcuns (lient que c’est F iliu s qui
l’at i'aict faire Je craindz que Mr de Cliampagney non soitcoulpé. Car l’on
m urm ure q u ’il estoit lors aussi sur les ruez. Je n’ay encores aulcune certi­
tude et l’attendz ce jo u rd ’liui ; car j ’ay escript pour sçavoir la vérité, pour
ce que cecy me tient en peine. Peut-eslre que Mr Bave 1 en escripra plus
particulièrement, et d’aultres choses, comme il est accousluiné de faire en
mon absence.
Coletti n’ai guerre faict pour son maislre. luy ayant donné une telle
c h a u ld e s de la mort de V e rg y 5. Il est vray que Blasere 11 e l’at asseuré,
mais il ne debvoit rien attenter q u ’il ne fut bien asseuré, car cela cuyrat
à l’aultre.
III.
LE P lt É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D I N A L 1)E G R A N V E L I .E .
(lîihliotlièque de B(>sançon. — Lettres di verse s, t. Il , fol. 00 et suiv.)
B r u x e l l e s , le l(i j a n v i e r 1 5 7 4 .
. . . . Ce sont choses estranges de l'audace des Gueux sauvaiges* sur le
Tournesiz. que sont François et Liégeois ramassés, de comme ilz pillent
et exactionnent de beau jo u r tout le monde, tenantz tout le payz subject.
C’est merveille que l’on n’y mect aultre ordre, constituant des prévostz des
mareschaulx. Aussi n’est tolérable la foulle que nos soldatz wallons de la
garnison de Montz font à l’entour de ceste ville, soubz occasion de s’aller
em barcqtier en Anvers et n’estre payés. Ung de voz censiers d’Aflleghem, à
1 Jo s s e Bave, s e c r é ta ir e d u Cons eil p riv é. Voir sa notice, t. I, p. 2 5, n o ie I .
* C h a n ld e, d u latin ca ld a , ce q u i es t c h a u d , i r r i t é d e la fièv re, a g ita tio n .
* F ra n ç o is de V ergy , Sr d e C hain p litte. V o ir sa notice, t. I, p. 30.
4 G u e u x des liois, feuilla rd s, etc. V o ir t. IV, p. i2!l.
()
CORRESPONDANCE
une demie lieue d’icy, les al heu trois jours, que luy ont cotislé plus de
cent thalers avec ce q u ’ilz ont emporté. Et l’on ne peult dire un« mot. Car
il n’y hat poinct de quoy pour les payer. L’on leur at donné deux mois et
aultant aux mariniers,desquels l’on at grande faillie1: j ’enlentsque plusieurs
aiant receu payem ent se desrobent; ce que mérite ung grand chastoy.
L’on appreste dix batteaulx à Gand, xxv grandz à D u n k erk e4, el l’on
faict fort belles apprestes en Anvers. S an ch o d ’Avila doibt mener une partie,
le capitaine Julian Romero une aultre, et Monsr de Beauvoir la principale
partie. Il demeure général s’il peult eschapper de sa maladie qu’est griefve.
Aussi est celle de Monseigneur de Noircarmes.
L’on lient que nostre armée sera de cenl-cincquante batteaulx. Beaucop
noz vad ceste einprinse; car si Middelbourch se revictuaille, le Prince
il’Oranges est affolé. 11 tient grand guect alfin que rien n’y entre, et at faict
justice bien de x l , lesquelz il soubçonnoit d ’avoir esté conniventz au
secours que ont faict ceulx de la Goes.
A u ld eg o n d e3 mect beaulcoup de moiens en avant audict sieur de Noir­
carmes, et at ung esprit diabolicquc; s’il eschappe, il le rat encoires une
infinité de maulx.
L’on dit icy beaucop des garboilles* de France, et que ceulx de Languedocq et aultres veuillent que tout soit réduicl au pied que tenoit le Roy
Loys XII0, que l’on appeloit le^ère du peuple. Les Florentins ont avec leurs
inventions fort chargé le Royaulme de dasses 5, et y introduict d’aultres
choses pires que cela et incomportables, dont ilz polroient ung jour rocepvoir leur paiement.
1 Toutes les affaires d ’a r m e m e n t de la Hotte so n t exposées d a n s
M k .n d o ç a
, t. Il, p. 177.
1 Les faits relatifs à l’a r r e s t a t i o n d e v a i s s e a u x , a u n om d u r o i , à D u u k c r q u c so n t r a p p o r t é s et d é ­
taillés d a n s n o t r e Vlaam se/ie k r o n ijk , p. 4 8 1 . S elon c e tte C h r o n i q u e , 18 vaisseau x s e u l e m e n t furen t
choisis p o u r s e r v i r à l’e x p é d i t i o n d e M id d e lb o u rg .
3
P h i l i p p e de M a rn ix , Sr d e Mont S t'- A ld e g o n d e , fait p r i s o n n i e r à .Naassluis. V o u lan t é c h a p p e r à la
p ein e qu i l’a t t e n d a i t , il fit de g r a n d e s p r o m ess es p o u r o b t e n i r sa l i b e r té . Voir, à ce s u j e t, la C orrespon­
dance d u T a c itu r n e , t. I I I , p p . x x v m et suiv. D e N o i r c a r m e s disait à ce p r o p o s : u Sy ces t h o m m e
» n e faict tout ce q u ’il p o u r r a afin q u e le p a y s se r é d u i s e so u b s l’o béissan ce de l’Églisc r o m a i n e et de
»
S.
M.,
j e ne m y co gn oy p o in t.
j u i n e t ju i l l e t 1885.)
* G arboilles, qu erelles.
s D as ses? (sic).
» (R ahlenbeck,
L a cn jiilulatinn d ’A n v e r s , d a n s la R evue générale de
DU CARDINAL DE GRAN VEL LE
/
Il
y at lettres des gens du duc d’Albe escriptes en Lorraine; l’on tient
q u ’il est m aintenant bien avant en Bourgoingne. Ceulx de N am ur l’ont contrainct et ses gens de payer jusques la dernière maille, ou ne le vouloyenl
lesser sortir, menassant de serrer les portes, dont l’on at esté bien esbahi :
ce sont des maulvaises testes Je pense que ledit Duc se hnstra pour estrc
tost à Gennes, et que par ainsi la Bourgoingne en sera plustost quicle.
Monsieur de G astel2 est cassé du gouvernement de Deventer. Il vouloil
auyvre le pied des Espaignolz et tiranniser, q u ’estoit pour perdre la ville.
L’on y mect Mons1 d’In c h y 3, frère du S1 de Fresin, que at esté vers Vlre lllme
Sgrie à Naples.
Monsr Don F ernande de Lannoy est mandé pour Utrecht aflin que
Monsr de Noircarmes puist changer d’air; Mons'de Rassinghiens, ce pendant
est commiz pour Artois...
. . . L’on at hier et devant hier dict mort Monsieur de B eauvo ir6 depuis
jeud y après midi q u ’il tombit, par sa gravelle, en une si grande foiblesse,
q u ’il lust tenu m ort plus de trois heures. Ceulx d ’Espaigne disoient que
c’estoit de paour q u ’il debvroit aller avec les batteaulx. L’on verrat comme
eulx en useront; car je ne pense poinct q u ’estant encoires si foible, il s’adventure à aller sur mer.
Je craindz fort le maulvais air d’Uti echt pour le Sgr Don Fernando.
‘ « Son fils, p o r t a n t d e B ru x elles , le il u n gentil to u r à ses c r é d i t e u r s , les t e n a n t d e v a n t sa c h a m b r e ,
ce p e n d a n t q u ’il p a r t i t s e c r è te m e n t p a r
la g a r d e r o b e et
u n g h u i s d e d e r r i è r e . » ( Ib id ., p. 84
e t p lus h a u t , p. 4 .)
'
a Jc ail M a rin ier, Sr d e G a s t e l , g e n t i l h o m m e francom tois. A p r è s a v o ir été à M a d r i d , il r e v i n t a ux
P a y s - B a s , où il fu t d 'a b o r d n o m m é g o u v e r n e u r de. Z u tp h c n . V o ir t. IV, p p. 5 8 0 , 5 8 2 , 5 2 4 .
5 C h a rl e s d e G a v r e , Sr d 'O llig n ie s et d ’I n c h y . Voir
D e V egiano,
t. I, p. 8 0 5 .
4 <* Il p a r t i t le 2 8 j a n v i e r . Sa c h a r g e se ra p l u s g r a n d e q u 'i l ne p ense. Son E xcellence lu y a d o n n é
larg e p o u v o i r p o u r négo cier s u r la r é d u c t i o n d e s villes q u ’il a t espo ir d e r a m e n e r en o b éissance sans
e a n o n . Il fait à e r a i n d r e q u e b e a u c o p de scs b o n s desse ings s e r o n t r o m p u z p a r l ’a d v a n t a i g e q u e r e n n e m y
a g aig né s u r nos b a t t e a u x d e v a n t h i e r . • L e t tr e d u 31 j a n v i e r . (L e t t r e s d e M o r illo n , t. V I II , p. 5 1 .)
—
D o n F e r n a n d o a v a i t é t é n o m m é , p a r l e ttre s p a te n te s d e m ai 1 5 7 1 , g o u v e r n e u r d u c o m té d ’A rto is e t
p as sa v e r s la fin d e 1 5 7 5 g o u v e r n e u r d e H o llan d e et U t r e c h t , etc. E n o cto b re 1 5 7 4 , il d e m a n d a à
r e n t r e r en Artois. ( B u lle tin de V A ca d ém ie ro ya le, 2 e sé rie, 1 8 7 5 , pp. 9 0 2 , 908.)
5 M axim ilicn d e G an d, d i t V ilain , b a r o n d e H as sen gh ien , fut
nommé gouverneur
16 f é v ri e r 1 5 7 4 . (Ib id ., p . 9 0 9 . )
* P h i l i p p e d e L a n n o y , Sr de B e a u v o ir. V o ir sa n o t i c e , t."Il, p. 10, n o te 5.
d 'A rto is le
s
CORRESPONDANCE
IV.
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L DE G ltA N Y E L L E .
(Bibliothèque île Uesançon. — l.eltre s diver ses, I. I l , fol. 96.)
........... .. le li l j a n v i e r 1f>7i.
L’on «script d’Espaigne que l’on y attendoit le seigneur Don Joan pour
lout ce mois. Il vad bien q u ’il s’entende avec Voslre III"10 Sgrie, w ide bene
eril illi, et que vous avez prévenu en Espaigne ses gens, si d’adventure ilz
vouldroyent maligner. Et je tiens q u ’ilz ne ignorent vostre crédit, et le pré­
sident Viglius le cognoit assez, ne sçaichant touttefois entendre le bruict,
que court icy, que Vostre lllmc Sgrie vad en Espaigne, pour ce que M1 Hop­
perus ne luy en escript rien ; mais il sçait bien q u ’il n’est appellé à tout ce
que l’on veult faire. Certes je m’esbehi que ledit llopperus ne s’apperceoit
poinct luy mesme de sa façon d ’escripre tant ordinaire et impertinente.
Jusques ores n’at-on rien de ce q u ’il avoit soubz main résolu, pour envoyer
cy; je craindz que le duc d’Albe n’ayt destourné le Roy par ses artifices,
et q u ’il vouldrat encorcs ceste fois passer oultre avec la force; ce que Roda
at longuement prédit. Aussi les gens du Commandador Maior dient q u ’il
ne publiera le pardon, alïin q u ’il ne samble que Sa Majesté y soit conIrainct, jusques l’on aurat quelque succès, après lequel j ’espère beaucop
moings et que l’on persistera sur le xe; et telle est l’opinion de chacun; et
les gens dudit Commendador dient que, encores que le prince d’Oranges
prospère, il sera bien ayse d’accepter le party que le Roy luy vouldra faire.
En ce polroit estre quu l’on se trouveroit fortcompté. Le Commendador
Maior n’at pas ung sol, et Monsr de R e rla y m o n t1 dit que le Roy n’at moien
de liner ung escu. L’on avoit publié icy q u ’il avoit envoié deux millions
pour attirer les marchants de fu rn ir; mais ilz sont eslés plus fins que
cela.
Ilz sont beaucop de gentilzhommes et bien jusques NO que voluntai1 C h a rles de R e rl a y m o n t . Voir sa no tice, t. I, p. 19, noie 4.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
9
renient se présentent de serv ir en cesle emprinse soubz Monsr de Beauvoir
à leurs propres fraitz : je ne sçay s’il n’y peult aller pour sa débilité, s'ilz
vouldronl continuer ce propos soubz Sancho d’Avila 2 et Julian 5.
Ce sont b a y e s 1 ce q u ’escript le duc d’AIbe 5, comme est la pluspart de ses
lettres à l’ordinaire, que les paysantz d’Hollande se seroient eslevés contre
le prince dO renges. Il les traicle trop doulcement; et si de nostre coustel
se feil le inesme et que le pardon se publiât, on gaigneroit beaucop de
cueurs, et ledit prince d ’Orenges ne sçauroit où estre seur.
C’est une bonne œuvre que Voslre lllme Sg,io continue de faire ollice pour
ce povrc pays, q u ’en at bon besoing. Le Commend.ulor Maior afferme q u ’il
n’at encores charge du pardon, et cela croyz-je, et que le Roy tem p orise6.
Plusieurs sont en opinion que si Voslre lllmo Sgric lient aspiré au gou­
vernem ent, q u ’elle y fut parvenue 7. Le confesseur du Commendador
Maior m’al dit que son maislre, entre aultres, vous proposa à Sa Majesté
pour s'excuser; mais que l’on luy resp o n d itq u e l’on avoit à faire de Voslre
|||me Sgrie, là où elle est, et q u ’elle avoit icy des envyeulx. Il me souvient
fort bien q u ’elle ne voulut servir soubz Lalain, pour ce que les choses ne
estoyent rhabillées par ceulx qui le debvoient et povoient faire.
J ’enlendz que aulcuns de la noblesse, mesmes le duc d’Arschot *, feroient
dillicullé de Iraicter le C om m endalor l\Iaior d’Excellence; ce que n’est
poinct faicl saigement, q u an t ce ne seroil que pour le respect de celluy
q u ’il représente. Ce seront lousjours les mesmes.
1 P h i l i p p e d e L s in n o y , S r d e B e a u v o i r . V o i r s a m ilic e , t. Il, p. 10, n o i e 3.
* S an cho Dav ila ou d 'A v ila , ca p i t a i n e d ’u ne com p ag n ie de
c h e v a u - l é g e r s , c h à l d a i u de P a \ i e . Voir
I. III, p. 2 5 5 , et t. IV, p. 5 7 5 .
" .lulien R om cro . V oir p lus h a u t , p. 5, n oie t.
4 liat/es p o u r I ta x , so ttises.
4 « Ce q u e le d u c d ’Albe p u b l i e p a r ses le t t re s là et à Itom c s o n t fan fa res p o u r a b u s e r les corn eilles,
et fa ire e n t e n d r e q u e s ’il y a t ci- a p rè s q u e l q u e bon succès, q u e c'est p a r lu y q u e a t esté jette le f o n d e ­
m ent. ■> Morillon, le 9 j a n v i e r . (L e t t r e s d i v e r se s , t. Il, p. 8 i , e t p l u s h a u t , p. 5.)
6
C’ét a i t v rai. D ans u n e le ttre d u 21 o c t o b r e 1 87 5, le Roi d isa it à R e q u e se n s q u ’il vo u lait lui e n v o y e r
le p a r d o n g é n é r a l , m a i s le d u c d ’AIbc lui av ait écrit le 2 s e p t e m b r e q u ’il fallait b e a u c o u p p e n s e r a u
m ode et a u te m p s de sa p u b lic a tio n . (C orrespondance de P h ilip p e I I , t. Il, p. 4 1 7.)
’ ( ï r a n v e l l e a v a i t d éjà d i t d a n s u n e le ttre d u 15 a o û t 1 5 7 2 : « Vo us j u r a n t q u e qu i m e d o n n e r o i t le
g o u v e r n e m e n t , j e ne l’a c c e p te ro y e p o u r r i e n . » (T. IV, p. 5( H.)
* P h ilip p e d e C rov , d u c d ’A c r sc h o t. V o ir sa notice, I. I, p. 2 0.
T ome V.
2
10
CORR ESPONDANCE
L’on n’ai encores rien de l’arrivée d u duc de Médina en court, où il debestro p o u r la leste de Noël. L’on d i t q u ’il vad à Naples.
J e n ’ay poinet encoires entendu que le Cornrnendador Maior ayt faict
samblanl de rétracter aulcunc chose de ce que le duc d ’Albe al faict et les
siens. J ’enlendz que l’on at tenu grand/, propoz avec Mr de Champaigney '
et avec Irois heures au coup, par deux fois, et que le Comniendador Maior
al esté fo rt e sb e h y de ce que l’on luy at dict, alléguant Monsieur de Cham paigney plusieurs d’Espaigne que sçavoyent à parler de ce q u ’il disoit.
Monsr de Champaigney esl en peine de ce que ledit Duc l’at si mal
imprimé. El je liens que en cela vouldrat — il continuer, el q u ’il n’espargnera ny Vo.slre lllme Sgrie, ny Don Fernando*, quelque bon samblant q u ’il
at tousiours monstre à tous trois. L'on verra comme il sera receu de son
maistre.
Je ne me suis jamais confié de Cigoigne 3 et je congnois q u ’il est de ceulx
qui liegnent avec les plus fortz.
Les Estatz sont icy appelés p ou r le 2 2 4. Je craindz q u ’ilz se r en dr on t dif­
ficiles à cause des foulles que l’on faict sur le plat pays, et il semble, ad ce
q u e je puis ente nd re de Mr le Président, que l’on n’y pourver ra si l’on n ’ac­
corde que lque b on ne ayde, et lesdiclz Eslatz dient q u ’il est impossible
d ’accorder, si les foulles ne cessent El par ainsi l’on viendra en pourfict s
et aigreurs, si Dieu n’y pourveoil.
Y oit
1 F r é d é r i c P e r r c n o t , S' de C h a m p a g n e ) , frère de G r a i n cl le. V o ir sa notice en tête de scs M ém oires
p u b l i é s p a r M. d e R o h a u lx de S o u m o y .
a Do n F m i a n d de I.annoy, com te de La Hoche, b e a u - f r è r e du c a r d in a l de (ira n v e lle . Voir sa notice,
t. I, p. 131, n o te I .
‘ P r o b a b l e m e n t J e a n - A n d r é Cicogna. Voir sa notice, t. IV, p. Ü.Ï4.
4 II s’ag it de la co nv o cation des É ta ts de B r a b a n t.
* l ’onrfict, de l'e spagnol por/iit, ((iierelle, dispu te.
OU CARDINAL DE (JRANVELLE.
11
V.
L E P R É V Ô T M O R I L L O N AU C A R D I N A L D E G I I A N V K L L E .
(Ilibliollièque <to Resançun. — Lettres d i v e r s e s , I. 11, fol. 00.)
B r u x e l l e s , le 2 0 j a n v i e r 1 5 7 4 .
Je; n’ay ccste sepmaine receu anlcunes leltres de Vostre IIl,,,e Sg,ic; ce qu e
j ’impute à ses gran d z empeschemenlz, mesmes s’il soit ainsi que l’on dict
icy, que le seigneur Don Joan d ’Auslrice seroit party vers Espaigne. Que
s’il est, je prie Dieu luv d o n n e r bon voyaige.
Le seigneur Don Fe r n an d o de Lannoy est allé pa r F l a n d re en Anvers
avec m ad a m e la comtesse vostre seur, que le C o m m en da do r Maior al esté
visiter en son logis. L’on avoil co ntrem andé ledict Seigneur j u squ es i
auroit ten u les Eslatz en Artois; mais comm e le messaiger l’at failly en
c hemin et qu e Monsieur de Rassenghien ‘ est p o u r le présent à Arras p o u r
tenir son lieu, il est, co mm e j ’entendz, passé oullre vers Ulrccht, où il est
miz go uv e rn e ur , et aussy de Hollande et Zeelande, ainsi q u e l’estoit, des­
puis la prinse de M ons1' d e B o u s s u t 5, le sieur de Noircarines s, qu e doibt
estre icy de bref, se p o r ta n t fort mal, avec le chancre à la bouche, que p ro ­
cède de sa bleçure. Il n’est à croire c ombien que le départ dudict Don F e r ­
n an do est regretté en Artois. J ’avoye délibéré de l’aller visiter en Anvers;
mais j ’entendz q u ’il est party samedi ou hier avec l’escorte que doibt
r a m e n e r ledict sieur de Noircarines.
L’on lient que l’armé e de m er dressée en Anvers [ p o u r secourir Middelbourg] soit party c e j o u r d ’hu y *. Sancho d ’Avila en est le conducteur,
comme Ju lia n de celle de Berghes, qui, ad ce q u e l’on dit, sera général au
1 Maxim ilien V i l a i n , liaron d e Rasscngliien. Voir sa no tice, t. Il, p. 76, n o t e 1, et plus liau l, p. 7.
* M axim ilien d e I l e n n i n - L i é l a r d , co m te d e B o u s s u , a m i r a l a u s e rv ic e d u K o i , liv ra a u x in su r g é s ,
le 11 o c t o b r e 1 5 7 3 , d a n s la Z u id c rz é c un c o m b a t naval, p e n d a n t lequel il fu t p r i s lui cl son v ais seau .
Voir plu s l o i n , à la p ag e 15, noie 2.
5 M a r n i x d c Mont S'^-Aldegonde, S'1de N o ircarm e s, so u v e n t ci té d a n s les v o l u m e s p récéd en ts .
* Elle p a r tit le 27 j a n v i e r . ( C orrespondance de P h ilip p e / / , t. III, p. 75.)
CORRESPOND ANC E
12
lieu île M1 do Beauvoir que n’esl eneores hors de dangier Dieu les veuille
guider. Benucop de Wallons se sont desrobés d ’Anxers, et nous avons faillie,
p o u r bien achepver l’emprinse, d ’argent et de malelolz. que l’on at prins
jusques sur la wa rd ' de ceste > iIle et forcé d ’aller en Anvers. L’on ne faict
poinct bo nne chasse avec chiens non voluntaires.
Son Excellence est, comme l’on pense, ce j o u r d ’hiiy parti vers Berglies
p o u r faire desloger les batteaux qui \ sont. Dieu leur do nne aventure!
L’on escripl de Flandres que la mer est couverte des batteaux des ennen i ) z ; le Prince est à Ylisinghe; il ari'cslc tous batteaux d ’Anglois et F r a n ­
çois, craindant que. po ur gaigner, ilz ne d o n n e n t que lque secours à ceulx
de Midelbourch que sonl en très grande e x t r é m i t é 2. Quant les maroniers
se sont plainct que ledit airest se faisoit contre l’accord d I intention de la
Bo) ne, il al respondu que c’esloil l'intention d ’elle, présentant de ce leur
do n n e r lettres, et en cscripre à ladicte R ov ne que sçavoit la clause. La
rasière de bled audicl Middelbourch se vent cent escuz; le quartier d ’un g
chien i; 11 g e s t u : un g rat x n pallars. Les soldalz Espaignolz y onl mangé
des enflant/, p o u r h quel faict Mondragon les al l a i d exécuter. L’on al
receu lettres de là du xixe que les soldalz avoyenl eneores de la provision
de pain, de bled et d ’avoine p o u r xvi jours, à une demie livre par j o u i ;
que aux bourgeois l’on donnoil du riz et de la semence de lin dont ils font
des gaufl'res. Ledit Mondragon y souffre be a u c o u p ; car les Wallons et
bourgeois luy font beaulcop d e v e n u e s 5 et se muti nen t souvent comme
gens désespérés. Ledit Prince at 4,001) hom mes en l’isle ‘. et beaucop de
batteaux à l’enlour, que font grand e garde aflin que rien n y entre, esti—
mantz tout leur succès de pp en dre que ce raviclaillement ne se face,
auquel cas noz affaires y r o n t fort mal.
L ’on at escripl icy que ceulx de la Coude * avoyent envoyé à Mr de Noircarmes, ce pend an t que leur garnison esloit dehors, po ur eulx rendre,
1
W u r t, le canal de B ruxelles. Les E sp ag n ols s 'e m p a r è r e n t de lo utc p e r s o n n e s'o c c u p a n t de n a v i ­
g ation d e p r è s ou d e l o i n , m êm e d 'o u v r i e r s t r a v a i l la n t d a n s les t o m b e s , et les firent p asser de force
s u r l e u r s b ateau x .
* Voir, au suje t d u siège d e M i d J e l b o u r g , P . B on, Inc. cil., t. VI, fol. 5 1 7 et suiv.
* ten u e* , dém arches.
‘ L 'ile de W a l c l i e r c n , en Z élan de.
‘ A la fin de sa lettre , Morillon d é m e n t celle no uvelle.
DU CARDINAL DE GR AN VEL LE
15
pourveu q u ’ilz fussent receus et asseurés de grâce, sans laquelle ilz n’entendoj'ent recepvoir garnison dudit sieur; niais ladicte grâce n ’est encoires
preste. Une telle ville se r en da nt et bien traictée en lient tiré beaucoup
d ’au lires après soy, que seroit le vray moien p ou r achever la gu erre et r u i ­
ner l’ennemi : Sed e o ju r e non v tim u r , et l’on void, quoy que Hopperus a\
escripl à Voslre lllme Sg,ie, q u ’il n’y at encoires aulcune suyte de ce q u ’il
disoit avoir soubz la main. Le prolonotairc Caslillo 1 me dit hier q u ’il
avoit enten du de quelc’un qui le peut bien sçavoir, q ue sur le do ubl e que
qiielc’un avoit faict si le duc d’AIbe se oseroil Irouver vers le Roy, puis­
q u ’il rendroil si mauvais compte, que l’aultre respondict : « Que pleut ores
» a Dieu q ue son âme fut aussi bien venue en Paradis c omme seroit le duc
» d'Albe vers Sa Majesté, et q u ’il n’avoit à beaulcop près exécuté le c om ­
» m a n de m en t du conseil d ’Espaigne. » Si cela est, nous en sumez frailz.
Et certes, ou qu e je me tourne, je veoidz que ceste opinion est conceuc par
les plus gens de bien qui n’en dissimulent poinct. Je craincdz que le duc
d ’Albe aurai aussi bien prévenu le Roy comme il at le Com m en da do r Maior,
que est en opinion q u ’il ne fera mieulx q ue son prédécesseur al faict.
Les Estalz se rasse mb le nt; l’on de ma nd e le cenliesme. Dieu doint que
tout se puist bien passer. Il n ’y at faillie de plainctes, ad ce que j ’enlendz
et p o u r re m pa re r contre icelles, l’on al donné charge au beau-frère el aullres
d e u x ench erc her des foulles faictes par les soldatz sur le pial pa ys ; les
mangeries des foriers el archiers de Son Exce propre, q u e c o u rre n t en
Flandres ce pe n d a n t q u ’elle esl en Anvers. Il ne laull pas tenir su r ce
grandes informations : les choses sont assez notoires, et les Estatz et villes
de chascune province en am èneront plus de preuve que l’on ne vouldrat
ouyr , puisque l’on s’excuse par là de faire aides au Roy, que touttefois se
doibvent faire et tosl, ou tout se perdra.
Les Gueux et voleurs se multiplient si très fort au q u art ier de Lisle et de
T ou rn a y, qu e si les villes propres n’y meclent ordre, il y aura i d u gr and
inconvénient. Le piz que j e y veoydz est que ce sont, ad ce que l’on m ’escript, la plus part estrangiers, François, Liégeois et aullres, que saccaigent
et massacrenl de plein j o u r devant les portes desdictes villes, qu e j ’entendz
font gens p o u r les combatre. L ’on tient gr and e garde de j o u r et de nuicl
1 Voir, au su jet <le ce p e r s o n n a g e , le tom e I , p.
CORRESPONDANCE
l i
eu voslre maison de Saincl-Arnaud, q u ’est de besoing allin d ’éviter plus
g r an d inconvénient. Nous n ’oserions p o u r maintenant aller audict lieu
p o u r le liazard que exp éri men ten t beaulcoup d ’aultres.
L’on al heu lettres des gens du duc d ’Albe du x u e. escriples aux fron­
tières de Bourgongne contre Savoie, où que l’on tient q u ’il est p o u r mai n­
tenant, et q u ’il passera oultre en toutte diligence vers Espaigne, p o u r estre
tost vers le maistre, duquel n ’est rien venu de longtemps ny du d u c de
Medina Celi, encores q u ’il soit arrivé en court passé ung mois.
Le maistre d ’hostel Morenos 1 est encoires icv. et Iuy font la guerre les
créanciers d ’Anvers auxquelz il al hosté à de my pa r force ce q u ’il avoit
besoing p ou r a r m e r les batteaux. Dieu doint que la flotte que parte main­
tenant soit victorieuse. Elle lient faict voille sa medi, mais le vent fut lors
et le j o u r précédent si lempcstueux, que nous craindons des maulvaiscs
nouvelles des dicques de Flandres, Zeelande et Hollande.
Depuis ceste escripte, !\lr le Président, qui m’avoit parlé de ce de la
Coude, m ’at asseuré q u ’il n’en est rien; que 11 e vient mal, puisque le p a r ­
don n’est encoires meur.
VI.
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L D E G li A N V E L L E .
(Ilibliothèque dt> Kcsançon. — L ellr cs de Morillon, t. M i l , fol. 1ô.)
B r u x e l l e s , le 51 j a n v i e r 1 571.
J ’ay escript au S r Mal pas a afin q u ’il envoye p a r la balle ce q u ’il avoit de
charge. Je tiens que, selon q u ’il m ’at escript, elle soit parti hier, et que., p ou r
non la trop engrosser, il n’envoyera p o u r ce coup aulcunes poinclures. J ’ay
' M aître d ’hôtel d u d u c d ’Alhe.
2 Le c h a n t r e Ma lpas, c o n t r ô l e u r de l’hôtel de G r a n v e l l e . N oir t. IV, p p . 7 8 , 1 2 8 , 1 5 0 , etc.
1)U CARDINAL DE GR ANVELLE
envoie le pourtraictz, q ue inaistre Christian ' avoil faict s u r celle de
Vtre HJine gric^ p ar |a poste.
Mr de Boussut ’ at été fort, malade d ’ung flux de sang, mais il se porte
m ie u lx ; le Prince avoil donné passe port à tous médecins et chirurgins
q u ’il voudroil appeler p ou r sa guérison. Son Excellence a accordé q ue l’on
traicte sa délivrance soit par rançon ou eschange de Saincte-Audegonde 3
et aultres.
Mr d ’Anchin * at esté aux exlrémes.• et rie scavons
s’il est hors de dangier
*
G
ou non J ’espère que Dieu l’cspargnera p o u r achever son collège à Douay,
q u ’est ung des beaux comrnencemcntz que soit deçà les montz, et peullestre pardelà.
Nous avons pe rdu la bonne et vertueuse dame de VYilre que at esté
emportée par un e fiebvrecontinue en qu atre jours. Il luy en est prins comme
à ceulx que pr ésu m e n t sçavoir en art de médecine, n’aiant voulu o bé yr
aux docteurs.
Mr de Noircarme vad le gr and galop, et au ju g e m e n t de son médecin, ne
verra jama is ce p a y s ; il s’est par trop traveilléà négotier. C’est un g corps,
ad ce qu e j ’entendz, exténué jusques au boult. et il s’est plus de ma nd é
q u ’il n ’at sceu faire.
Le Sr don F e r na nd e et Madame voslre seur sont partis vers Utrecht le
x x v m e 6 : Dieu leur doint bon voiage. Je craindz q u e sa charge sera plus
1 C h r é tie n Van den P e r r e , p e i n t r e du d u c d ’Albe. Voir t. IV. p. 82 4.
2 M ax im ilien de. M cn n in -L iétn rd , co m te de Boussu. Voir t. IV, p. I 7 ô . P e n d a n t un c o m b a t n av al, livré
le 1 1 o c to b r e 1873, d a n s la Zuid cr/.é e, le c o m te fut pris et e m m e n é à F n k h u i z c n . Voir, à ce sujet, Bon,
liv. VI, fol. 3 5 5 v» e t s u i v . ; C orrespondance de Philippe. I ! , t. II,- p. I I S ; Van V l o t e n , N ederlaitds
o p sla n d , p p . 1:24 e t suiv.; S i r e a u e t De Jo n c h e , h t* over het z w a a r d van B ossu te E n k liu ize n , d a n s Ic.s
V aderlandsche aefeningen de 1818, t. Il, pp. 2 5 3 , 5 1 5 ; D e J o n c h e , H erin n erin g en v u n den slag op de
Z u id e rz c e , 1 5 7 5 , ib id ., p. 3 9 8 , e t A a n te eken in g cn betre/fende de gcvangenschap va n d e n g r a a fv a n B ossu,
d a n s les p u b lic a tio n s h is t o r i q u e s d ’U tr c c h t d e 1841), p. 8 0 8 . Il fut q u e s tio n de l’é c h a n g e r c o n t r e Marni.v de Mont-Ste-A ld eg o n d e, q u i a v a i t é té fait p r i s o n n i e r à Maassluis p a r R o m c r o . V o ir GnoEN
van
P b in -
s t e r e r , t. IV’, p. 28SI.
5 M u rnix d e M o nt-S "-A ld eg o nd e.
* W e r n e r d e I):iule, a b b é d ’A n c h in . Voir Le Gi.av, C am eracum c h r is tia n u m , p. 2 5 2 . Il fu t f o n d a t e u r
d ’u n collège à l’U n iv er sité d e Douai.
* F ra n ç o i s e le S auv aig c, v e u v e de feu E n g le b e rt V a n d e n Dale, Sr de W i l d c r , c h a n c e l i e r de B r a ­
b a n t . V o ir t. III, p. 23C.
* V o i r p lu s h a u t , pp. 7 et I I .
h;
CO RRESPONDANCE
g r and e q u ’il ne pense. Son Excellence luy al donné large povoir pou r
négotier s u r la réduction des villes, q u ’il al espoir de r a m m e n c r en obéis­
sance sans ca no n: il faict à crai nd re que beaucop de ses bons desseings
seront r o m p uz par l’advantaige que Pennemv at gaigné sur noz batleaux
devant hier '.
Nostre moisne pr isonnier d’Alïïighem esl malade par vray d e s p i t : il se
veoid convaincu, et loultefois tient bon, asseuré comme un larron. Je le
faictz pensser pa r des médecins, ne vid e a m u r deficere m cliaritate Mr d’An­
vers * est esbaliy q u e je l’ai osé trousser, et se plainct des siens q u ’ilz sont
propriétaires, do nt il est cause: car il leur permect de manier le temporel,
et de recepvoir son rev en u , non obstanl q u ’ilz luy doibvent grandes
sommes du passé.
Mr Viron 3 est à Afflighem, besoignant sur les comptes, où .M1' le Doien
et moy le suyveront après demain, estantz contraintz de tenir icy pied à
boulle pour le service divin, à cause qu e sumez si peu de residentz: et ne
bougerons de là que n’achevons le commencé besoigné, p o u r doibs là aller
droit à Sl-Aman d.
Le chanoine de Xanten, q u ’avoit offert son service, d e m a n d e gaiges et
Iraictement, qu e sera cause qu e lesserons achever ceste année de selleur; et
si povons treuver récompense p o u r vostre prévosté, le vrav sera de s’en
défaire, p o u r n’avoir plus à traicter avec les Clévois.
Mr de S1 Vaast * at obtenu à Rome sa provision, et doibt beaucop à
y t r e ] | | m e g r i e ^ comm e faict le Doien de C am bra y 5 Rucliebusch, que Sa
Sainteté, à la requeste de l’am ba ss a de ur de sa Majesté, qui at faict l’olïîceà
1 L e c o m b a t n a v a l l i v r e p r è s d e R o m m e r s w a a l , le 2 9 j a n v i e r 1 5 7 4 , e s t r a c o n t é d a n s M e n d o ç a , t. Il,
p p . 1 7 0 e t s u i v . ; P . H o r , liv. V I I , fo l. 5 v° e t s u i v . ; I I o y k c k v a n P a p e n d r e c i i t , t. I l , p a r t . II . p. 1 8 4 ;
M e m o r ia le d e p r œ lio p r o p e R o m e r s w a l, d a n s
D
odt
v a n I’ l e n s i i i r g , A r c h i e f v o o r k e r k e lijk e e n w e r e ld lijk r
i'/estchiedenis, t. I l , p. 1 3 5 ; C o rr e sp o n d a n c e d e P h ilip p e I I , t. I l , p p . 1 5 e t s u i v . ; ( î r o e n v a n P h i n s t e r o ,
I. I V . p. 3 2 i .
* S o i i u i u s , é v ê q u e d ’A n v e r s , diî 1 5 7 0 il 1 8 7 6 .
3
M a î t r e d e s c o m p t e s , d o n t il e st s o u v e n t q u e s t i o n d a n s les v o l u m e s p r é c é d e n t s . Il t e n a i t s p é c i a l e ­
m e n t la c o m p t a b i l i t é d e G r a n v e l l e a u x P a y s - B a s .
* T hom as de P aren ty , abbé
de
S t-V aast, m ort
le 2 3
f é v r i e r I 5 7 ( i . ( G a lliu c h r i.s tia n a , t. II I,
c o l. 5 9 0 . )
* M a t h i e u R u c k e b u ' c h , d o y e n d e C a m b r a i , n o m m é le 21 o c t o b r e 1 5 7 3 .
tiu n n m , p. 99 .)
(L
eglav
,
C iim e ru c u m c h r is -
17
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
voslre intercession, al po urveu de novo, moiennanl q u ’il renonce à son
élection.
Les vacations des bénéfices, desquels j ’ay adverty Vtr0 Wme Sric, ne portons
nom, ne sont esté demand és par personne, p o u r la petite valeur, et l’on
tient en la partie de vostre diochèse. que at esté soubz Liège, qu e suivant
les concordantz, les ordinaires peulvcnt conférer en tous mois, q u a n t les
bénéfices n’excèdent x n ducats. J ’envoie u n g billet p o u r la cure de
Rebecque, et en telles provisions se garde le concurs selon le concilie de
Trente. La cure de Vilvorde est aussi vacqué, mais un g indullaire du Roy
l’at accepté.
Le placet de vostre de rni er ind uit se dépesche, au primes maintenu selon
la forme que j ’ay d o n né au jeusne Vander Aa, que al esté fort cmpesché
po ur dresser le dépesclie de ceulx que l’on al envoyé en Angleterre.
Plantin 1 prie de povoir eslre accommodé de l’exemplaire grec des
épistres de S 1 Basile q u ’est en vostre biblioteeque escript à la main, p o u r
les faire translater avec les épistres de S 1 J e h an Chrysoslome, q u ’il at en
mains p o u r im p r im e r. Vostre lllmeSri<’ mand er a son bon plaisir.
VIL
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(lîihliothi'“(|ii(' de l i e s a n ç n n . — L e t t r e s d i v e r s e s , i. I l , fol. 102.)
B r u x e l l e s , le 1 " f é v r i e r 1 5 71 .
J ’escriptz ceste fort triste et troublé du gr and désastre advenu vendredi
après disner à noz batteaux devant Berghes, en la vue et présence de
Son E x oe, q u ’est u ne bien mauvaise amoisse p o u r icelle a; el l’on do nne
1 C h r i s t o p h e P l a n t i n , c é l è b r e ty p o g r a p h e établi à A n v e r s.
*
Berg -op-Z oom . Ces n a v i r e s c o n d u is a ie n t d u se c o u rs en v i v r e s et en h o m m e s a u x assiégés de Mid-
d e lh ou rg . V o ir p l u s h a u t , p. 10.
T ome
V.
5
COH H ESPOND ANCE
18
gr and e faulte au oapilainc Julian 1 d ’avoir esté si téméraire que do pariir
contre vont et m ar é e: si peu considèrent noz genz ce q u ’ils font et ce que
e mporte tant au service de Sa Ma" et bénéfice du pays. Ad ce que je puis
entendre, la relation qu e j ’envoie à Vtie lllme Sgrie. ne dit pas tout. Nos gens
véandz les ennemis tiraient, et le vent rejecta la fumière s u r nos batteaux,
q ue furent tant mieulx recogneuz par les ennemi/, qui décliargearonl aussy ;
et leur fumée les tint couverts de la venue des nostres, q u ’ilz sont venu
p r e n d r e à la main ainsi q u ’ilz ont voulu. Certes le c ue ur m ’at lousiours mal
j ug é de ceste emprinse, d ’aultant que les en nemyz sont les royz de la mer,
aiantz trois ou quattre batteaux contre un g des nostres et la fleur des niaroniers et pilotes, que l’on lient facillement distraict par ung pardon, au
service de Sa Majesté: et d ’iceulx avons-nous la plus grande faulte. L’on
s’est confié s u r les gens de guerre, que encorcs que ce fussent des Holandz.
ne peulvent tenir pied ferme sur la mer quant elle se tormente, s’ilz ne sont
faiclz à icelle: et aux pilotes et maroniers gist la force, car ilz tiègnent pied
à boulle. Le peu que nous en avons beu at esté contraincl et forcé, la plus­
part peseheurs ou conducteurs des batteaux de la war d 2 de ceste ville et
des tourbières de la Campigne. que sont aussi nouveaux s ur mer qua nt elle
est tempestueuse. comme ceulx qui n’y furent oneques. Et de cela, quoy
qu e l’on ayt sceu dire, n’a t. l’on tenu cas, estant assez aux commissaires
d ’accomplir leur n o m b r e ; et qu an t l’on est venu au combat, ces povres gens
n’ont sceu ce que debvoit aller devant.
Le povre sieur de Glimes !, q u ’estoit vaillant homme, et que feit teste
pensant d ’eslre suivy, y est demou ré et beaucop de gentilzhommes de sa
suyle, Bourguignons et de pardeçà, et entre aultres nostre Octavio
que
au mieulx aller sont prisonniers. Ledit capitaine Julian les al 1 res mal
1 Si'lun la le ttre de IUc|ucsciis au lloi, Ju l i e n Hoinero co m m it d e g r a n d e s fautes p e n d a n t l'e xpédilion. Le G r a n d C o m m a n d e u r lui fit p l u s i e u r s r e c o m m a n d a t i o n s , q u ’il o ub lia. Voir la le ttre d a n s la
C orrespondance de P h ilip p e I I , I. III, p. 13.
* W a r d , n av igatio n.
5 T li i e r r i d e Glim es. (ils d ’Ant oine, S1' de L im e l e l l e , de L o u v ra n g e , etc., e t d e Marie d e Ü i o n , était
li e u t e n a n t de M. d e Beauvoir. P e n d a n t l’a c t i o n , il sn d éfen d it avec co u rag e e t y m o u r u t ap rès a v o ir
r e ç u d eu x co u p s d 'a r q u e b u s e .
* L ’u n des fils d e Mr d e C h a n to n a y et ne veu d u C a rd in al. Voir, il ce sujet, le tom e IV, pp. 7!i, 7S,
2 4 5 , 2 1 8 , 2 0 7 , 211!», 5 2 5 , 820.
DU CARDINAL DE GHAINVELLE.
19
suivy. encores qu'il les ayt miz au jeu, ne pensant à aullre chose que à se
saulver, se jectant par le sable en la Thole
Et ail ce q u e j ’entends, est de
ret our vers Son E x ce, et ne fauldra de jecler la coulpe s u r telz que ne l’ont
mérité si bien comme luy. auquel il grévcroit de m o rir estant si riche du
saeq de Malines \ Nous y avons pe rdu les milleurs batteaux et m ieulx
équippez, avec toutte l’artillerie et iminilion, desquelz l’on al desnué les
frontières et pa r trop furn y l e n n e m y : et je craindz que la perd le est plus
gr and e que l’on ne dit. en laquelle le Duc d’Albe debvroil mériloireinenl
avoir part, pu isq u’il at publié en Italie et aillieurs q u e tout esloit si bien
accommodé et s u r le point de réduction, q u e son successeur lèveroil le fruict
de son Iraveil, et que l’on recouvreroit lost ( Hollande, où je ne pense poinct
que dedens huict j o u rs il y aura t ung seul Espaignol du costé de la Haye
et Delft, pu isq ue le prince d ’Oran^es est le maislre s u r la mer, et q u ’il peull
désar mer p o u r g arn ir les villes desquelles il a doubte, et que véritablement
se saoulloient de la guerre, et se fussent tournés tosl si, devant ex p é ri m e n ­
ter la fortune, l’on heut publié le pardon. Maintenant il fauldrat plus q u e
le cano n: car ledit Prince les mun ira de gens; et luy sont venuz nouvelle­
ment vic harquebousiers. Il s’est tenu à Kammeke, et faict à craindre q u ’il
sera tosl maislre de Middelbourch, où Mondragon 3 s’est j us que s mainte na nt
bien porté. S’il tombe entre leurs mains, il sera maltraicté, comm e seront
tous les bons catholicques q u ’ont si longuement vescu en peine on ceste
ville, où l’on tient q u ’il y at pou r trois millions de richesses, tant en m a r ­
chandises q u e aullres biens, coinprins ce q u ’est de de ns Arnmuyde*. El si
nous perdons ces deux lieux, il est bien force q u e la Goes face le sault, et
pa r ainsi serons-nous banniz de la mer et de tout commerce.
El est vr aysem blable qu e encores ne se tiendront ad ce les enneinyz, mais
q u ’ilz poursu iv ro nt leurs succès en Flandres et en la Campigne, jusques
1 T lio lcn , en Z é l a n d e .
*
V o ir , a u su je t d u tr is t e rôle q u e rcitip lil Komei'u p o n d a n t le sac de Malin es, t. IV, pp. 1 5 2 , i ( i 7 ,
4!>ô.
! C h r i s t o p h e de M o n d rag o n l u t g o u v e r n e u r de D a i n v i l l e r s , colo nel d ’nn r é g im e n t d e W a l l o n s , et
co m m a n d a à M id d e lh o u r g p e n d a n t le siège d e ce tte ville p a r les i n s u r g é s . Voir le to m e IV, pp. 2 0 8 ,
3 7 5 , i O i , 47 7 à 4 8 0 , etc.
4
Morillon s ’es t t r o m p é . Le p r i n c e d ’O r a n g e a agi l o y a le m e n t à l’é g a r d de M o n d rag o n et des h a b i ­
t a n ts de M iddelh ourg.
20
CO RR ESPONDANCE
les portes d ’Anvers el de Lire, et q u ’aurons ung estrange esté ; car le comte
Lodovic at esté en France, estant retour né vers le comte Pa latin; el les
Allemand/, samblcnt voulloir mouvoir, que je ne craindz poinct tant comme
les François, qui ne se voul dro nt lesser eschapper une si belle occasion,
s’il/ ont aulcun moien, q u ’il ne fault poinct grand en lestai q u ’est le pa)z,
défur ny de toutles choses et de b o n n e voulenté.
(Certes, je porle une extrême compassion à Son Kxce, qu e se doibt treuvor
bien estonné et perplex, aiant receu un g si grand coulp de baston, et se
trouvant sans argent, mal adsiste de conseil el de ge ns ; et ce que je craindz
plus est que plusieurs inaulvais garçons, cslevés de ce succès, troubleront
le peuple et le tireront à la commotion : car plusieurs, par faulte d’ouvraige
et de traficque, mangent le peu q u ’ilz ont de meubles, et cela despendu,
chercheront leur fortune où q u e ce soit, et q u ’ilz la polront le mieulx
trouver.
S’il heut pleusl à Dieu nous fabvoriser, le Prince estoit desballé à ce
coulp ; car il n ’at poinct un g solz, el assigne ses gens s ur le pillaige de Middelbourch. Il ne se fie plus sur les gens de pardeçà, el se sert d ’Anglois,
Escossois, Dan nem arquoys, Gascons et François; m ai s il est remis à cheval
Son E x cb al en toulte diligence r em an d é Sancho d ’Avila q u ’estoit avec
u n e partie des balteaux vers W a lc h r e m , et estoit désià à la Meuse, ayant
pe rd u au sable le milleur et principal balteau q u ’il avoit, que s’est ouvert.
Les gens se sont saulvés, mais toulte l’artillerie et m un iti on y est demoré.
Ung aullre batteau devant Berghes, que feit une salve y arrivant Son Excel­
lence, al eslé volé du feug que se meict en la m u n iti o n bien mal gardée
p a r les Espaignolz que y sont tous demorés. II p r i n t bien au capitaine
Hobadillo' et à André Tomar, son enseigne, q u ’ilz en estoient sortis po ur
aller au devant de Son Ex™ s. Ung aultre batteau y donna au mesme temps
à travers.
Les bourgmestrez d ’Amsterdam q u e sont icy, sont comme désespérés, el
craindent la perdle de leur ville et de Harlem, que n’emporte poinct lant
1 F ra n ço is de B o b a d i l l o , ca p ita in e d ’in f a n t e ri e es p a g n o le , fu t e n v o y é a u p r è s d u Roi p o u r lui a n n o n ­
c e r la victoire d e son a r m é e p r è s d e Mons et assista au siè ge d ’A lk m a a r . V o ir M endoça , t. I . p. 5 ô ô ,
t. I l , p. KiO.
* V oir, à ce su je t, la re l a t i o n de .Mendoça, d a n s ses C om m entaires, t. Il, p. 180.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
21
comme ledit A m s te r d a m ; e l j e c r a i n d z fort la Frise et Overyssel, et que
après l’on ruera s u r Geldres, qu e seroit enclore le pays d ’Utrecht.
L’on dict que Montgo mm ery 1 at envoie quelques batteaux aud it Prince
avec nouveau secours de F r a nc e et d’Angleterre.
Aulcuns escripvent que Son Excu doibt redresser une aultre armée de
mer. Elle y des pen dr a les éléments et fera peu : Dieu veuille que je me
forcompte. Nous avons trop g r and e faillie de m aronniers et de pilotes, sans
lesquels l’on ne fera rien. Hz se sont enfuyz p ou r le mauvais traictement
que l’on leur at faict du passé, et at faillit que le Margrave et M® de Cliampaigney inesmes les soient allé pr endre de nuict en leurs maisons. Aussi se
sont e nfuyz plusieurs Wa llons, auxquelz l’on avoit do nné mois et de m y de
gaiges, q u ’ilz avoienl d e s pen du avanl q u e les batteaux fussent prestz. Et
ceulx q u e l’on at miz su r les batteaux, sont la pl uspart si mescliantz. q u ’il
ne se fault esbaliir si telles gens n ’obtiègnent victoire.
VIII.
LE
P R É V Ô T M O R IL L O N AU CA R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(liibliotlirque de Besançon. — Lettres diverses, t. II. fol. 104 )
B r u x e l l e s , le i*r f é v rier 1 5 7 4.
Il me desplaicst am èr em en t d’avoir prédict l’infortune de noslre armée 4.
Le pis est q u ’il ne fault rien dire à ceulx d ’Espaigne, po ur ce q u e se mectant
u n e chose à la teste, ilz la veuillent passer oultre et s ou pç on nen t ceulx que
les advertissent p o u r un g mieulx.
1 G a b r i e l , co m te de M o n t g o m m e r y , u n d es p r i n c i p a u x chefs des H u g u e n o t s , a v a i t é c h a p p é au
m a s s a c r e d e la S '- B a r t h é l e m y , e t s’était r éfu g ié en A n g l e t e r r e , a u x îles de J e r s e y e t d e G u e r n e s c y . Il
n a q u i t v e r s 15 5 0 e t fut e x é c u t é le 2 5 m ai 1574- p o u r a v o i r c o m p lo té avec C oligny la m o r t de
C h a rles IX.
* C ’e s t - à - d i r e l 'a n é a n t i s s e m e n t d e la Hotte espagnole p r è s de R o im n e r sw a a l. V oir p l u s h a u t , p. 16.
COKHLSPOiNDAiNCE
Je tascheray lousjours de m ’asseurer en lemps el je lesseray icy le colTre '
de Malines de Vostre lll m8 Sgrie, puisque elle est de cest advis. Toultesfois je
ne liens le lieu de Brucelles si asseuré comme Vostre lllmc Sg,ie pense. Car
s’il y at beaulcop de gens (jui onl à perdre, il en y al dadvanlaige qui onl
envie de gaigner. Je tiens Montz et N a m u r p o u r les villes plus asseuréez:
car il y at grand guetl en la première et bon peuple en la seconde. Il faict
bon à Arras; mais elle est trop frontière si l’ennemy meut de ce coustel là.
A Liège, n ’y at-il que se lier. P o u r Dieu, q u e Vostre lllme Sgrio soil à repoz
de son cabinet. Il n’y al h o m m e despuis son pa rlement d’ic} eslé dedans
qu e M!\I19 Bordey, Viron 1 et rnoy par ensamble. El j us que s ores n’y at il
esté personne q u ’ayl faict ment ion p o u r le veoir; ce que ne sera pormiz à
ho m m e vivant quel q u ’il soit, si ne le commandez, du moingz de mon sceu,
el je ose respon dr e p o u r ledict V iron.
L’opinion générale des Estatz 5 et de tous gens de bien, mesmcs de Mr de
Berlaymont et du président Viglius, est qu e le C om m end ad or Major su yt les
Irasses de son prédécesseur, et, p o u r dire la vérité, de ce veoyt-on plus
d'apparence qu e d ’aullre chose. Et ainsi l’enlenilent ceulx de Flandres et de
Brabant, que je craindz fort redresseront les cornes; car déjà ilz parlent
entre les dentz, et feront d ’advantaige puisque avons le venl au visaige.
L’on se fasche de ce que ledit Comm end ad or , instruict p a r le duc d’Albe,
pourfie d ’avoir p o u r Sa Majesté que lque revenu perpétuel, en ce que l’on
pe rdra temps, et s’aliéneront les cueurs d’advantaige, comme dit Mr le Prési­
dent; et sç aventbicn dire plusieurs des Estatz que le Boy ne l’oseroil mectre
on avant à ceulx de Castille et d ’Arragon, et q u ’ilz n’onl mérité d’estre
esclaves plus qu e eulx. Aussi sont plusieurs en opinion que Sa Majesté at
gardé le pa rdon p o u r veoir le succès de ceste armée, et si elle heut heu du
meilleur, q u ’elle h e u t passé oultre en ses desseings. Et ad ce que je puis
veoir, le p a rd o n polrat venir q u a n t il vouldrat, mais l’on en tiendrai peu
de cas ; et fust esté mieulx de le d o n n e r incontinent après le parlement du
duc d ’Albe.
* Morillon e n t e n d p a r l e r de la caisse de t a b l e a u x , d o n t il est q u e s tio n plus liant, à la p. 11.
’ Bordey e t V i r o n , les h o m m e s de confiance d u card in al a ux P ays-B a s. V o ir t. I, p. i o ; t. IV, p p. 4 5 ,
fit), 0 2, etc.
1 C 'e s t - à - d ir e dps É ta ts de B r a b a n t.
DU CARDINAL DE (iRAÎNVELLE.
25
L’on dit q u e le prince al faicl son proullicl que le Coimnendador Major
soit passé par Malines sans faire sand>lant du pardon, q u o y q u ’il en soi!
esté prié. Certes je liens q u ’il n’ai tenu à luy, pu isq u ’il I 113 emporloil de
faire une b on ne b ou ch e à son entrée, ny a ussy à llopperus, qui dansse
selon que le Roy flutte, q u ’en at si grand espoir à Voslre lllme Sgrifi de si
longtemps. Je craindz que vous lui serez trop véritable prophète et q u ’il
gastera tout. C’est la v n e année que l’on est en ce traveil que Sa Majesté
lieut remédié avec une signature
Elle al faillie de conseil et considère
peu le bas eaige de ses enttans, et (’advancement du sien, et quel mond e il
lesseroil après soy s’il v e n o it à faillir devant avoir appaisé ses Estalz Totil
cecy me faict souvent so u b h a id e r que Voslre Illme Sglie fût près du Rov:
mais q u a n t je considère les h u m e u r s de ceulx qui sont là, il me s amble que
vous avez g r and e raison de désirer d'eslre à Rome pou r plusieurs rega rd /.
Mais l’on dit icy q u e Vostre 111"1« Sg lie est continuée en son go u v ern em en t
p o u r troys ans. ce q u e je ne croyz. Car il me pèseroit trop de ceste rallonge,
et q u e jese ro ie encoires si longtemps sans veoir mon mais tre ,q ui loultesfois
ne du y ct icy, pui squ e nous suniez apparentz d ’avoir encores plus de mal
que onequos. Peult-eslre q u e Dieu y pourverra plus tost q u e l’on 11 e pense,
et p o u r ce ne veulx-jc perdre ceur, mais pr en dr e ma confidence en luy.
Ceulx que sont esté entremiz à l’armée de mer ne se pourvanleronl
d ’avoir faict mieulx q ue M Mrs de Bossut et de Beauvoir, du quel l’on at parlé
souvent in d ig n e m e n t : et 11 e Fat visité le C o m m end ad or Maior jusques
après le désastre advenu.
Aulcuns dienl que le Com m en d a d or Maior a été trop chauld à faire
partir l’armée, sans avoir regard au temps et saison que faisoit lors poul­
ies en n e my z ; l’on se malcontente de luy, q ue suy va nt les vestiges du duc
d ’Albe, il at deffendu à tous recepveurs de 11 e rien payer, que n ’est p o u r se
se faire aymer.
Les Flamengs se pl aindent de ce que l’on al voulu occuper les batteaux
que y estoient venuz d ’Espaigne et de Portugal, tant à Du n k er k e, Ostende
1 On v e r r a q u e la concession ilo ce p a r d o n g é n é r a l , p o u r lequel P h i l i p p e II élail sollicité d e to utes
p a r t s , faisait en c o r e l'o bjet de ses h és ita tio n s a u mois de n o v e m b r e 157G. — Un se cond p a r d o n soid i sa n t g é n é r a l , mais avec g r a n d e s r e s t r i c t i o n s , fut signé p a r le lîni le 8 mai l;> 7i. Il en se ra qu es tio n
p l u s loin.
u
CORRESPONDANCE
qu e à I’Escluse. q u ’ont tourné doz vers Calais et Boilogne, ad ce qu e les
voisins gaignent et les nostres perdent. Plusieurs inarchandz noslres se
retirent auxditz lieux.
Il est certain que l’ambition du duc d ’Albe, po ur mectre son lilz après luy
au gouvernement, l’at affollé et nous aussi; mais beaucop p r és u m e n t q u ’il
en sortira mieulx avec son maistre q u e plusieurs ne pensent. Jus qu es
ores n’at-on rien ou y du du c de Médina, q u e ne doibt avoir esté fort
bien receu, p u i s q u ’il n’en faict aultre sa mb la n t, nv ses gens à leurz amvz
pardeçà.
Francisco Y b a rra * ne vault poinct que l’on en parle. C’est un g glorieux,
ignorant et grand menteur, qui tumb er a qu elq u e jour. Je n’en av poinct
encoires parlé au C o m m en da do r Maior; car je tiens qu e cela donneroit
plustost opinion d ’envie que aulcun g bien, puisque l’on se veull vailloir
de telles gens.
R e i n g o t ’ se meet aultant en crédict co mm e il fut oneques et at levé
soubz le sien à Anvers nO ou (50 mille florins, ad ce q u ’il ne p erd ra t rien,
aya nt pr ocuré p o u r son r em b ou rss em ent qu e ladite deflense at esté faicte
aux recepveurs. Vostre 111Ine Sgrie al heu mille moiens p o u r ag grandir le
crédit q u ’elle avoit; mais elle at tousiours monslré sa modestie tant au
bonnet rouge que plusieurs aultres endroilz.
Mr de Noircarmes n ’en at pas usé ainsi, qui al voulu e n ja m b er sur tout:
ce q ue luy coustera chier, et Dieu sçait ce q u e l’on en dit et de son a m b i ­
tion. Et combien que au contraire Vostre lllrae Sgrie est désirée, s’estant
esclercy l’u m b r e que les seigneurs avoient d o n n é contre elle, desquelz les
desseingz se sont pa r trop manifestés despuis au gr and do mma ige et r uy ne
d u povre pays, mais à la perpétuelle justification de Vostre III™« Sgrie, dont
la postérité fera mémoire.
Le duc d ’Albe doibt estre p o u r le présent bien avant en Savoie, pu i sq u ’il
y at lettre que le 17e du passé il estoit en Bourgongne. Il vad bien q u ’il at
passé ses maladies pardeçà. Il se haslera p o u r estre tost vers le maistre, et
' D o n F ra n c i s c o d ’Y b a r r a , m u n i l i o n n n ir e . V o ir I. Il, p. 5 3 7 .
*
M orillon, d a n s p l u s i e u r s e n d r o i t s de sa c o r r e s p o n d a n c e , p arle avec un e j u s t e sé v é ri t é des g a l a n ­
teries de la f em m e de R a in g o t avec d o n F a d r i q u e e t a u t r e s fa m iliers de la c o u r d u d u c d ’Albe.
Son m a r i était d u Conseil des finances. V oir t. IV, pp. 18C, 19 5, 2 4 6 , 59 9 , 5K5.
DU CARDINAL DE GR AN VEL LE
25
no fera long séjour à Gennes. puis que l’on *1ici l’eslal d’icelle républ icq ue
e s lr e e n (rouble et désordre.
.... Le C o m m e n d a d o r iWaior al. à la rem onslrance de ceulx de Valenchiennes, député commissaires le sieur de Rossignol ' avec qu elq ue aullrc
p ou r se informer s u r les concussions et roberiez du cliaslellain dudit lieu,
qui aurai faulle de son beaufrère A l bo rn os ’, el fault q u ’il se trouve en court,
j u sq u e s ladicle information acliepvée : l’on dit que les excès sont grandz.
Lcd il Rossignol at aussi charge de visiter les villes frontières et de s’i n ­
former sur les foulles que les gens de guerre ont faict en Flandre, Artois,
Tournesiz, au qu art ier de Lille et Namur, et le sr de G o m i c o u r t 3 en Rrabant
et Utrecht; lesdilcs foulles sont assez notoires; et Dieu at désià faicl le cliaslov d ’aulcuns, que s o n ld e n i o ré s avec les balleaux devant Ronunerswalc. Il
seroil mieulx de po ur veo ir à Fadvcnir q u ’il ne se feit plus. Mais l’on vouldral bien do n n e r le mil lcur co nlentemcnl aux Eslalz qu e l’on polral, aiïin
q u ’ils accordent plus promp teme nl. Je craindz, ad ce que m ’escripl Icvesque
d ’Arras, q u ’en ceulx de Artois il y aura plus de notes qu e de chant
L’on at amené pr iso nni er en Anvers le capitaine de IJoogslrate, qui s’a p ­
pelle G r e n e t 4, et est Bourguignon. C’est le lieutenant de Mondragon. L’on
dit q u ’il al faicl tic gr and z larcins el robberiez, et q u ’il est en dangier de
passer par là, selon la démonstration de Son Exco, que luy faict faire son
procès, c om m e elle lient faicl à plusieurs capitaines, qui s’en appercevanlz,
se reli rare nl aux ba lle aux où ilz sont estés lavés. Dieu leur perdoint.
1 J e a n d e N o j e l l e s , b a r o n d e Rossignol. Voir I. I, p. 48.
1 A l’occasio n d e ce p e r s o n n a g e , q u i j o u e un rôle assez peu h o n o r a b l e d a n s p l u s i e u r s des lettre s q u e
n ous a v o n s déjà p u b lié e s , il r e ste à c i t e r ce passage d ’un e d é p ê c h e a d r e s s é e a u C a rd in al p a r le niai Ire
d es co m p tes V i r o n , so us la d a t e d u 2 8 ju in de celte a n n é e '. « T o u s ces se c ré ta ir e s (îles g o u v e r n e u r s
» g é n é r a u x ) font l e u r p r o u l l i t d u son de l e u r nom , co m m e A r m e n t e ro s ,
Irgenleros} A l bo rno s, A l p o r
» n o s, el Z av ala ( s e c r é t a i r e d u C o m m e n d a d o r ) , tout s ’avale.» (M ém oires de G ranvelle, t. X X I X , p. 125.)
5 A d r i e n de G o n im ic o u r t ou G o m i c o u r t , c h ef de l’a r t i ll e r i e . Voir sa notice, t. IV, p. 07.
‘ l.e c a p i t a i n e ( I r c n e t est cité d a n s M enikiça , t. Il, p. 137.
T ome
V.
CORRESPONDANCE
2(i
IX.
L E C A R D IN A L DE C.R ANVELLE AU P R I E U R
DE B F X L E I ’O N T A IN E .
( liil)liothè<|ue de Uesançoti. — Mémoires dp Gritnvelle, t. I , fol. 75.)
N'aples, le 5 f é v ri e r I 5 7 i .
J ’ay receu voz lettres tlu vie de janvier. Monsieur le Duc d ’Albe aura jà
faict son passaige, que n’aurat esté, par que lque lieu q u ’il soit passé, sans
foulle, men an t si g r and e suitte; car je me double bien que le payement
que aucuns a u ro n t faict sera maigre. L’on l’attend à Gennes, où jà doibt
estre Monsr le Cardinal Pacheco 1 et aultres qui le sont allé rencontrer.
Monsr le C o m m end ad or Mayor commence bien en sa c h arg e; mais il
trouve tout en tel désarroy, q u ’il a de la besongne largement. Je prie Dieu
q u ’il luy soit en aide; car il est de besoin». Le pourject q u ’avoit faict
Mons1' de Cha mpaigney pour, à la desroubée, m ectre quelques vivres dans
Middelbourg, n’at eu succès à faulte de secret ; car la chose fus! doscouverte dois in continent q u e au Conseil il fut proposé.
Il est vray que les Vénitiens se plaingnent du Turc, qui use de termes
haultains en leur endroit, et ne leur rend rien ; et p o u r crainte q u ’ilz ont de
luy, et mesmes q u ’il ne leur face que lque envahie su r l’isle de Candie, ilz
font gens, et le Tu r c ne permet que grains et aultres m a r c h a n d é e s viennent
de Levant en la Chrestienté, ny p o u r eulx, ny p o u r aultres. Et aussi n ’osent
lesdits Vénitiens ad ve nt ur er leurs marchandises p o u r Levant; mais de la
Ligue il n’y en a rien, sinon le discours des gens qui dienl ce que pourroit
estre. J e n ’y voy jusque s à oyres apparence : bien suis asseuré que si le
T u r c les envehit, que avec Ligue ou sans Ligue, Sa Majesté les aydera,
pu isq u ’il emporte au bénéfice c o m m u n de la Chrestienté que ledit T u r c ne
face s u r eulx bien ses affaires.
1 Le c a r d i n a l F ra n ç o i s Paelieco était E sp agnol el a p p a r t e n a i t à l ’u ne des familles les plus i m p o r ­
tan tes. V o ir t. I, p. 7.
DU CARDINAL Df: G RANVELLE.
27
Le fort de Th un e s 1 est en defïence, et l’on nous menasse fort po ur ceste
année de grosse armée d u Tur c, tant en Afrique q u e aux costes de ce
royaulme. Le seigr Don J e h an est encoires ici. Aussi y est mon cousin,
vostre frère. Je tiens qu e le seigneur Don J e ha n attendra la response d ’ung
co urrier q u ’il a envoyé en Espaigne, car l’on a jà nouvelle q u ’il est arrivé
en court, par où l’on espère q u ’il ne tardera.
X.
G U I L L A U M E , P R IN C E DE B A V IÈ RE
" , AU C A R D IN A L DE G R A N V E L L E .
(Ribliolhèque royale île Bruxelles. — Manuscrit »° 9475, Recueil III, fol. 360.)
L a n d s h u t , le 7 f é v ri e r 1 87 4.
Illustrissime Domine, ac reverendissime in Christo Pater, amice h o n o randissime, salutem et ainicitiæ meæ studia et obsequia paratissima. Non
poss um intermiltere D. V. hisce meis Iitteris signifîcare in qua miserabili
statu corporis, sepius nu n c Serenissimam Dom inam socrum ac m atrem
meam honor and iss ima m Ducissam Lotaringiæ invenerim, maxi me q u a n t u m
ad suam adversam valetudinem, qua per m u l l u m tempus nu n c prim itu r,
ut D. V. sine d ub i o bene novit, et q uo d pejus est non tam aflïcitur dolore
c o rp o r is ,q u a m animi q u o q u e mœ ro re c o m p ri m itu r. et hoc aliunde non procedit, ut ego conjecturari possum, q u a m ex tante procrastinatione negotii
sui, q u o d ap u d Kegem Gatholicum, D o m i n u m meiim Clementissimurn. tanto
1 A p r è s a v o i r pris la G o u l e l l e , f o rteres se q u i c o m m a n d a i t les a p p r o c h e s de T u n is , d on J u a n d ’A u ­
tr ic h e s’e m p a r a , sa n s c o u p f é ri r , de celle ville. Il y fil c o n s t r u i r e p a r l’i n g é n i e u r italien C e rb e llo n i o u
S e r b e llo n i u n e ci t a d e l l e , d e s tin é e à d o m i n e r la cilé e n t i è r e . A p r è s c e tte facile c o n q u ê t e , d o n J u a n
r e t o u r n a en Sicile.
’ G u i l l a u m e , fils d 'A l b e r t I I I , d u c d e B av iè re , cl d ’A n n e d ' A u t r i c h e , su c céd a en I S 7 9 à son p ère
sous le t i t re d e G u i l l a u m e II, e t m o u r u t le 7 f é v ri e r 1 0 2 6 . Il a v a i t ép o u s é, le 2 2 f é v r i e r 15)08, Re née,
lillc de F ra n çois, d u c d e L o r r a i n e , et d e C h r i s t i n e d e D a n e m a r k , nicce d e C h a rl e s -Q u i n t .
CORRESPONDANCE
n u n c tempore pendel. et quamvis inlollerabiles sump tus quasi lmjus(|ue
fecerit, et a d h u c quotidie facit, tarnen nullo moilo luijusque expediri
potuif. Quod cum ita sit, et ego vcrcor ne ilia tristicia animi et passioues
Seren. Dominam malrem m e a m , qua* nu n c debilitate corporis quasi
exhausta, aliquando q uo d Deus avertal, prorsus consternai. Qu am o b rem
slatui D. V. his meis litteris interpellare et sumopere rogare, cum etiam
sciam qua amicitia et aulhoritale D. V. apud Suam Celsitudinem et etiam
ap ud Regem su um pollet, el cum ipsa Domina mihi et nobis nostra* familiæ om nib us sit charissima el veneranda, ut prima habita occasione nego­
tium hoc ad Sua m Regiam Majeslalem perscribat,el apud eandem inlercedat
q uo j ub ere dignelur, ut tandem supra dictum negotium Sua*, Cels, debitum
et oplalum lincm consequi a nobis omnibus, et sibi ipsimet solatium
aliquod a Regia Majestate accipere aliquando possit. In quo negotio I). V.
niihi non solum rem gralissimam 1'aciel, el pari studio q u a n tu m in me eril
rec ompensabo, sed el supradictam Dominam socrum meam sibi una cum
o m n ib u s suis perpeluo obligabil: cujus causam a d hu c D. V. s u m m o quo
possum studio et me eidem et omnia servitia co mmendo el omiiem prtecor
r eru m su aru m fœlicitalem.
XI.
LE
PUÉVÔT
SI O IU L L O N
(Ilibliolhèque île Hesançon
AU
CAH D IN A L
DE
GHAÎSVELLE.
— Let I res <li\ersfs, t. I l , fol. 1OS. )
AHligliem, le 8 f é v ri e r 1574.
Si le C om m end ad or Maior at hay le duc d ’Albe, il al occasion de le haïr
d ’advantaige, pu i sq u ’il peult cognoislre le gr and forcompte que l’on luy al
faict, et comme l’on at mal mesnaigé '. Car tant q u ’il yrat plus avant, il
' M esnaigé, a d m i n i s t r é .
du
c a r d in a l
de
(;k \ n
velu
:
29
cognoistra que tout est mangé et engaigé, estant véritable tout ce que
Vostre lllme Sgrie en dit, et des causes de la despense p o u r s’estre surchargé
de gens tempore non necessario. Aussi n’at-on pourveu en temps ad ce que
requerroil célérité, et que, par l'aulte de croire bon conseil et ceulx du pays,
l’on at procédé ordine praeposlero. J ’enden dz q u e véanl le C o m m en d a d o r
Maior la perdle de l’armée, il exclarna q u ’il véoit bien que l’on ne feroit
jamais rien p a r force, et q u ’il failloit appoincler. Je liens q u ’il at raison;
mais il le debvoil penser, sans le dire. Si Sa Majesté venoit à ce, je liens
que Saincte-Audegonde y polroil beaulcoup, et que l’on heut heu grand
advantaige s’il se fust laicl il y at an et demi, lorsque le conte Lodowick.
présentoil la charte b l a n c h e ; car ilz n’»voient rien occupé, et maintenant
son frère tient (rois fois aultant q u ’il at perdu. Mais c’est avec grand e des­
pense et hasard à la longue, combien que cepen da nt il polroil acquérir
d ’advanlaige. Je craindz que loultes bonnes résolutions que Hopperus at
tant préconisé, vi en d ro n t tard, puisque la nuée nous pend s u r la teste. Et
plusieurs ont opinion q u e le Conseil d’Espaigne empeschera le Roy de n’acouster telz moiens, m ’a ya nt dit le protonotaire Caslillo 1 q u e son frère dict
cleirement q u e le Com m en d a d or Maior ne fera en rien mieulx que le Duc
d ’Albe, et q u e ledit Conseil veult réduire ce pays en servitude, lequel, s’il
s’en apperceoil, y vouldrat pourveoir. Il y at neuf ans q u ’ilz sont en ce traveil, sans que l’on y ayt pourveu, ainsi q u ’il convenoit, q u ’estoit bien aisé
à faire si l’on heut v oul u; et le Co m m en da do r se perdra, persistant tousjou rs s u r ung revenu perpé tuel, selon que me dit M. le Président Viglius.
Je ne pense poincl q u ’il y parviègne jamais, et qu e pourfiant d ’advanlaige,
ce sera faciliter à l’e n ne m y la conqueste de tout le pays, do n t Dieu nous
veuille garder. Le mal est que l’on ne peult rien dire à ces gens, que sont
p a r trop sou p so n n eu x et da ngereux, to ur na nt ce qu e l’on leur dit p o u r u n g
mieulx en calomnie.
L’on verra ce qu e prollitera le Duc de Médina, que le Pr ésident dit avoir
heu grale et continue audience vers le lioy xv jou rs de long *. Aussi il
' Voir, s u r ce p e r s o n n a g e , le tom e IV, pp. 2!), 31, 5?), 40, etc.
*
S t - G o u a r d , d a n s u n e le t t re é cr ite au roi d e F i a n c e , le 3 f é v rier l!>74, r a c o n te q u e le lîi j a n v i e r
p r é c é d e n t le d u c d e Medina Celi a eu p e n d a n t p lu s i e u r s j o u r s de lo ngues conféren ces avec P h i l i p p e II
s u r les affaires des P ay s-B a s. Voir M a n u scrits de P a r is , t. Il, p. 43!l.
50
CORR ESPONDANCE
empo rte à l’h o n n e u r du Com m end ad or , q u ’il advertisse sans mascre Sa
Majesté de ce q u ’il treuve, que ne sçauroit estre eu pis estât. Si tout cela,
avec les grand z offices et si véritables que doibz longtemps Voslre lll "'8
Sgrie at faict, prédisant ce q u ’est advenu, n ’ayde, il ne se fault plus r om pr e
la leste, mais dire conclamatuin est, et quod peccala m eruerunt. Cependant
le Com m en d a do r Maior est vers les Estatz en opinion q u ’il ne fera rien
mieulx que le d u c d ’Albe. Il debvoit com m en cer p a r le p a r d o n ; mais il ne
peult plus de ce que luy est enchargé.
Je trouve milleur co mpte de luy parler en latin, p o u r ce q u e me respond a n t en inesme langaige, il ne se peult lanl haster comm e au sien pro pre,
qu'il prononce fort dru. Il ne veult parler lïançois. Son secrétaire entre,
ad ce que l’on me dit, bien avant aux affaires, et le président n ’at garde de
le contredire; moins recognoisl-il q u e Voslre lllmc Slie a ) t faict si bons
offices p o u r luy, et suis esté j oy eul x de veoir p a r la copie que Voslre Illme
SgHe | Uy d o n ne assez à e nt en dr e ce q u ’elle at faict p o u r luy. Je ne fauldray
de faire bon office à l’endroict d ’Assonleville, que Mr de Champaigney ne
peull gouster.
Entre tant de maulx, ne m’est peu de consolation que je veoidz Vostre
lllm« ÿrie en opinion que les François ne nous feront grand mal cest esté, et
q u e eulx et les Anglois seront suspectz au prince d Oranges, que je tiens
traictera di fficilement avec l’un g ou l’a u l t r e ; c a r il ne polroit faillir d ’estre
trompé. Il n ’y at lieu suyte de ce que J uli an disoit que ledit Prince demandoit à venir à appoinc teme nt : il est trop fier; el q u ’ancores il Poffrist, je ne
sçay si l’on daigneroit accouster, q u e toutefois seroit le vray, comme dit
Voslre lllme Sg1,e, encores qu e I on ne le voulsist faire, p o u r ce que ce seroit
mectre en jalousie ses ad hérens et faulteurs que se dellieroient de luy,
comme luy heu t laict d ’eulx, si le pa rdon se fusl publié, selon que je l’ay
dict à Son E x c ce.
Je suis bien seur que Vostre lllme Sgrie sçail comm e elle doibl escripre à
Sa Majesté du duc d ’Albe et de son filz,que je tiens at esté trop licencieuse­
ment eslevé, et n’est la touche mauvaise q u e sur ce at esté do nné à Mr Ch a m ­
paigney, qui p o u r dire la vérité, at par trop permis à Oclavio
II sçavoil
po ur qu oy .
1 O clav e P c r r c n o t , fils d e T h o m a s e t ne v e u du G r an v elle. 11 es t souvent q u e s tio n d e lui a u t. IV,
DU CARDINAL DE GHAN VEL LE.
r>l
J ’acte ndr ay avec désir cc que viendrai à Vostre Illme Sgrie d ’Espaigne.
Pleust à Dieu q u ’elle y fust esté appellée et creue il y at de ux ans.
J e ne me suis jamais confié en Arias Montanus \ qu e m ’at tousiours
samblé verus .Irdelio et tenir quelqu e chose de p ro p re de ceulx q u e tiegne nt plus du vieulx teslament que d u nouveaul, quod et vu lins et colnr
omnino m anifeslare videtur.
J ’ay veu ce que vous at escript Mr de Ber laym on t 11 est ainsi que
telles gens veuillent que l’on face tout p o u r eulx, et ne font rien p o u r aulfruy. J e le hante peu, aiant long-lemps apperceu q u e le particulier luy vad
plus à c u e u r que le général, en ce q u ’il at beaucop de samblables, p a r Irop
différent« de Vostre lllme Sgrie que luy at bien respondu.
Vostre lllme Sgrie al fort bien escripl au frère du Co m m en d a d o r Maior,
aflin q u ’il tombe entre ses mains.
XII.
L E l 'R É V Ô T M O R IL L O N AU CA R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(Bibliothèque de Besauçon. — Lettres diver ses, t. I l , fol. I i i
et
125.)
A llligh em , le I.'i f é v r i e r 1 8 7 4 .
Encores tient bon Middelbourg et Arm uyd en, et je tiens q u e Mondragon
escript q u ’il tiendrat tout ce mois. Le mal est qu e ne véons aulcun moien
p o u r la secourir ce pe n d a n t; car encores qu e son ExcCH avoit pourjecté
q u e lq u e secours, touttefois j ’entendz q u ’elle at cheangé d’advis. Ledit Mon­
dr agon lesse aller les bourgeois qu e veuillent parti r: je tiens q u ’il vouldroit
aussi avec h o n n e u r estre bien loing: car s’il est prins, il luy couslera la vie
ou la plus g r an d e partie de son bien, que luy mesmes at estimé p a r cyp p. 7 5, 7 8, 2 4 8 , 2 4 8 , 2G7, 2 9 0 , 8 2 3 , 52i). Il mourut, en effet p e n d a n t le c o m b a t n av al p rès de Berj{op -Zoom . V o ir p lus h a u t , p. 18.
1 A rias M ontano ou .M on ta n us sa v an t e s p a g n o l. Voir t. IV, p p . 2 2 3 , {00.
32
CO RRESPONDANCE
devant à cent mil escuz q u ’il vouldroit do nn e r en mariage avec sa fille
unicquc
lVIonsr de Beauvoir avoit envoie u n g t a m b o r i n , à la r e q u e s t e d e Mous1' de
Cliampaigney, p o ur enclierche d ’Octavio et a ni très prisonniers L’admirai
Hoisot 3 feit pen dre incontinent ledit lamborin en contrevange de ce que le
d uc d’Albe en avoit faic tà u n g des siens; et q u a n t ledit sieur luy renvoya
u n g a u l t r e tamborin, ledit Boisot dit q u ’ilz estoient égaulz, et q u ’il ne recepvroit nul mal, mais q u ’il seroit tesmoing de la mort de cincq Espaignolz
q u ’avoient este prins au conllict de mer le xxix® du passé, q u ’il feit inconti­
nent pendre Vostre 11ime Sg,ie verra l’arrogante response que faict ledit
Boisot audit seigneur. Il en recepvrat quelque j o u r son paiement, soit tost,
soit tard. L’on peult par là veoir que le sieur de Glimes ‘ avec sa suyte e(
ledit Oclavio sont tous mortz. Ledict Glimes, qui combattit fort bravement,
est fort regretté, et son pilote Job, q u ’estoit maistre en son art. Ce sont les
Anglois piratez qui ont exécuté ledit combat, ausquelz le prince d ’Oranges
avoit d o n n é nostre armée en proie.
Sancho d ’Avila est ret ou rn é en Anvers, sans avoir rien exploiclé. Ledict
sieur de Cha mpaigney m ’escript q u ’il avoit esté d ’advis q u ’Octavio deubst
aller avec ledict d’Avila, p ou r ce que le da nge r n’estoit si gr and de ce coustel
comme à Bergliez. (domine que ce soit, ledict Octavio, ad ce qu e je puis
veoir y est demoré. Si ainsi est, je prie Dieu luy faire mcrcy.
Les Wallons q u ’estoyent s u r une partie des batteaulx mangent vos
subjectz de Canticrode s, et vos censes icy à l’entour. Vos seignoriez ne
furent jamais moins respectées à l’en to ur d ’Anvers comme à présent, v
logeant la garde de Son Excellence. Touttesfois il ne tient à le bien remonstrer, ce q ue M' Viron ferai d ’advantaige q u a n d il yrat en Anvers.
Les ennemis ont bruslé le beau villaige d’Oisterwyck, en la Campigne,
po ur vengeance que les subjectz leur avoient tenu barbe, les tuant et déli1 Le c o n t r a i r e e u t lieu. Le p r i n c e d 'O r a n g e a agi à son é g a r d d e la m a n i è r e la p lu s h u m a i n e .
s F aits p e n d a n t le c o m b a t nav al d e v a n t Berg -op-Z oom . O ctave P e r r c n o t y su c c o m b a . Voir p lu s
loin, p. 54.
5
C h a r'e s B oiso t, a m ir a l des i n su rgés . V o ir sa no tice d a n s la liio yra p h iv m ilionalc. Ce p erso n n ag e ,
s u r lequel on n ’a p a s recu eilli assez de r e n s e i g n e m e n t s , a r e m p li n u r ô le très im p o r t a n t p e n d a n t la
r é v o lu tio n d u X V I ' siècle.
4 T h i e r r i d e Glvines. Voir plu s hau t, p. 18 , n o te 3.
* Le com té d e C a n le c ro ix . Voir I. I, p. 2 0:!; t. IV, p. 40.
DU CARDINAL D E GRANVELLE.
vranl ceulx q u ’ilz prendoienl au drossarl de Brabant ou au capitaine de
Hooclislrale, qu e en o nt exécuté plusieurs.
Son E xc ce se trouve bien empeschée,el perd le Nord aux affaires, qu'elle
no trouve pas en si bon estai comme son prédécesseur luy al voulu faire
entendre. L’on dit q u ’elle veult aller vers Gand et m u n ir la lisière de la
mor, et qu e le capitaine J uli an en auroit la commission. L’on m ’cscript que,
p a r los responses q u e Son Exccat fait aux remonstrances des Eslalz, elle se
monstre le plus doulx et gracieulx du monde, et tout aultre q u ’il ne faisoit
lorsqu’il s’asseuroit du revicluaillcmenl; mais je craindz q u ’il trouvera
%encores grandes contradictions et que l’on vouldra avoir aboli la C ha m bre
des troublez q u ’il ne polrat faire s’il n’ai la résolution de Sa I\Iaj'% que tarde
]>eaucop avec le pa rdon 2. Toutlesfois Son Exce me dit, il y at environ deux
mois, qu elle en avoit escript à Sa Maj". de laquelle plusieurs ont opinion
q u e ll e at temporisé p o u r veoir le succès de l’armée, adjouslanlz que s’il
fût esté tel. que tous debvons désirer que l’on bout traiclé les subjoetz in
virga ferrea. El certes, beaucop de maulvais espritz redressent les cornes,
el lonl co urir des maulvais bruilz, eulx resjouissanlz en l’adversité de Sa
Majesté, cl descourageant les bons.
Les Eslalz ne co rres pondent en rien à l’intention de Son Exca, si lanl est
que, comm e l’on m ’escript, ilz de m a nd e nt avoir en préalable licenlié le Con­
seil des troubles, aboli le xe et xx°, restitution des privilèges;, que nulz
eslrangiers ne polront tenir eslalz ny offices, ny aussi avoir charge de
places fortes; que les deniers, que s’accorderont, se manieront par gens de
p a r deçà, et que l’on meele or dre aux foulles et oppressions des soldalz.
P a r lout cecy peull-on veoir qu e ne sûmes encoires hors de to nn en t,
el, comm e verrez par le fragment d ’une lettre cy-joinct, que le naufraige
approche.
il y al désia altération à Du nk er ke , où l’on ne veult recepvoir garnison,
q u ’osl Irès-maulvais présaige de mutation. L’on les al traiclé r ud em e nt el
indiscrètement p o u r c ont ra ind re tous les maronniers d ’aller servir à Ber1 l.e Conseil d e s t r o u b le s.
s D a n s u n e le t t re d u 5 0 d é c e m b r e 137<>, H e q u e s c n s in sislail a u p r è s d u Hoi d a n s le bu l de f a ire
p u b l i e r u n n o u v e a u p a r d o n g én éral. V oir C orrespondance tie 1‘liiUppe I I , I. I l , p. 4 4 0 . Il en av ait déjà
clé qu es tio n en 1 5 7 2. Voir ibid., pp. 4 1 4 et 4 1 7 .
CO ltR ESPONDANCE
glies ce q u ’ilz n’ont voulu l'aire sans asseurance de paiement, po ur ce que
leurs femmes et enflantz fussent morlz de faim en leur absence. Si ce poil
se perdt. je craindz INiewporl et Ostende; car les villes maritimes de Fl a n­
dres sont fort malcontantes de ce q u ’elles se trouvent forcloses du com­
merce et navigation, et que si elles ne tenoient intelligence avec les e n n e ­
m i / que les allèchent, ilz moureroient de faim. Si les ennemiz empiedlent
une fois en Flandres, nous perdr on s du toute la mer, sans laquelle ce pays
ne peult vivre: et si Flandres nous faict une b o u r l e 1, les autres provinces
feront aussi que lque folie. En somme nos affaires vond très mal. et ad ce
q u e je puis veoir, l’on at peu taché d u r a n t l’hy ve r de remédier aux affaires
et po ur les pacifier. Nos forces sont consumées, et encoires plus les leurs
et affections que l’on ne cherche en rien de regaigner, ny de d o n n e r aulcun contentement ou changer de pied; mesmes Assonleville 3 et Berlin
se plaindent gr an d e m en t que tous despesches et lettres concernant le Con­
seil d ’Fstat s’ouvrent par u ng Alonzo Olloa *, que al esté à feu Monsieur de
Mornes, et à ceste cause tenu bien longue prison, et par ung petil boussut
que at esté clercq à Pratz °; et q u a n t ces deux bonnes gens les ont veu et en
faict r app or t, le C o m m en da d o r Maior les envoyé cachetées de son cachet
audiclz Assonleville et Berthy, qui en sont fort scandalisés, disantz que
c’estoit plus tolérable que Albornoz 7, q u ’esloit confident au duc d’Albe,
les veid. Par où Vostre lllme Sgriu peult congnoistre combien peu est suivy
son p r u d en t advis que l'on heut d ’employer les ministres de pa r deçà :
aussi ne se tient aulcune forme de Conseil d’Eslat. L’on faict gr and cas
1 Voir, au s u je t île l'a r r e sta tio n à D uiik erq ui; îles n a v ir e s et des m a r i n s d estin és à l'e x péditio n de
Alidd elb ou rg, u o t i c V taam sche k r o n ijk , p. 181 e t suiv. Elle r a c o n te tout ce q u i s'est passé à ce sujet
d a n s la p r e m i è r e de ces villes.
1 /Io u rte, de hourter, t r o m p e r , fa i r e déf au t.
5
C h r i s t o p h e d ’A sso n lcv ille, co n s e ille r d u Conseil p r iv é et d u Conseil d ’É la t. Voir sa n otice, t. I,
p. 10.
4
J e a n - l î a p t i s te B crty, se c ré ta ir e d u Conseil p r i v é et su p p l é a n t de Valider Aa, s e c ré ta ir e d u Conseil
d ’É ta t. Voir t. I, p. 58.
J Allonzo d e l'Ioa ou Ulloa, m a î t r e d e c a m p d ’un t e r t i o d e Naplcs. V oir t. III, p. 5 (J . Il figure s o u ­
v e n t en cette q u a l i t é d a n s les C om m entaires de
M endoça,
t.
I,
p p . 4 9 , 52, 04 , 4 1 3 , 4 28, etc.
8 E s t e b a n P r a t z , se c ré ta ir e d u Conseil p r i v é e t d u Conseil d e s t r o u b le s . Voir 1.1, p. 44 .
’ J a c q u e s d ’A lb o r n o s, s e c ré ta ir e d u d u c d ’Albc. V o ir t. IV', p p . 8, 114, etc.
DU CARDINAL D E GRANVELLE.
de R o d a 1. Toutlef'ois l’on m ’escript (|u’il devient pire que Vargas* ne fut
oncques.
Le ba ron d ’A u b i g n i 3 est ret ourné d ’Angleterre, aya nt treuvé Mons 1 de
Zwcveghein * et l advocat fiscal de Brabanl 3 à Dunckerke, ne treuvantz
nioien de povoir passer seuremenl. Leur ayant ledit ba ron redoublé la
craincte pour le g ran d dangier q u ’il y dit estre, ilz sont estés mal advisés
de n’estre passés à Calais ou Bouloigne avec des balleaux françois, en guise
de marchandz, et se polroienl treuver envellopés audit Dunkerke.
Ledit ba ron rap porte beaucop de belles paroles, avec un e chaine de
vc escus que luy at d on né la Royne d’Angleterre, avec asseurance de loutte
amitié: mais jo inclement at dit el y enlremeslé q u ’elle ne peult dtlesser de
d o n n e r ayde, faveur et secours au prince d’Oranges, le luy aiant promis, et
(|u’elle feroil tellement envers le Roy, q u ’elle le feroit r en tr er en ses biens.
Aussi at-il veu, pe nd a nt son séjour à Londres, y so nn e r le tambo rin p ou r
ledict Prince, et j u sq u e s au no m br e de vi° Escossois et 111 e Anglois e m ba r cquer, q u ’avons nouvelles estre arrivés à la Brile et que ledit Prince en veull
ga rni r les villes d ’IIollande. El le de rni er mot qu e ladite Royne dit au dict
ba ron en s’expédiant d ’elle, estoit q u ’il deubsl dire au C om m en da do r Maior
q u e l l e luy prioit q u ’il voulsist tenir soing de faire milleur service en ce
g ou ve rne m ent que n’avoit faict le duc d ’Albe au Roy son maistre. Aussi
dit ledit ba ron que les Espaignolz sont piz vouluz en Angleterre que nulle
aullre part.
Il y at nouvelles de F ra nce que le Roy seroit d ’accord avec les l l u g o notz, leur aiant accordé tout ce q u ’ilz ont demandé, et q u ’il avoit cassé les
gens de gue rre qu'il avoit levé pou r sa garde. Il faict à craindre q u e tous
ensamble conspireroient en nostre ruine, s’ilz n’estoient si bas.
1 J é r ô m e R o d a , m e m b r e d u Conseil des t r o u b le s. V oir Ih itlc lin de I’ Icadém ie roi/ale de B elgique,
I. X V I, 2 e p a r t i e , p. Î50.
* J u a n d e V a r g a s , m e m b r e d u Conseil d e s tro u b le s. Voir ibid.
3
Gilles d e L e n s , b a r o n d ’A u b ig n y . Voir t. IV, p. (>7, e l , a u su je t de son a r r i v é e à D u n k e r q u e ,
n o t r e V laam sche k r n n ijk , p. 4 8 4 .
* F ra n ç o i s de I l a l c w y n , S r d e Z w ev eg hcni, d ip lo m a te . V o ir sa vie d a n s la B io g ra p h ie n a tio n a le ,
t. I \ , p 2 0 1 , cl a u s u j e t de so n a r r i v é e en A n g le te r re , n o t r e V laam sche k ro n ijk , p. 4 8 4 .
s J e a n de B o is sch o t, a v o c a t fiscal p r è s d u Conseil d e ISrabant. Il fut c h a r g é d ’a c c o m p a g n e r l l a l e w y n p e n d a n t sa m ission d i p l o m a t i q u e en A n g leterre . Voir sa vie d a n s la B iographie n a tio n a le, t. I l ,
p. 0 2 4 .
ô(5
CORRESPONDANCE
L’on m 'al e ser ip t do Brucelles q u ’il y passa ung courrier de mar ch and a
pour Anvers, le X e , et q u ’il y co urr ul u n g bruict (|u’il y avoit que lque malcontenlement entre le peuple en Espaigne, et dangier de commotion, à
cause des nouvelles impositions. Mais j espère q u ’il sera faulx, puisqu'il n’y
al aultre suyle. Et Dieu veuille que ce soit mensonge. Car il n’y al riens en
cesle co njuncture q u e moings nous conviendroil, puisque se trouvant là
Sa Majesté empescliée, tout yroit à perdition.
Aussi parle-l-on de quelques commissaires que soroienl en ch em in ,
dcpeschés de l' Empereur ‘ et autres princes de Allemaigne, po ur moienner
quelque accord, ne povans plus compo rte r remp es che men l de la Irafïcque
p ou r l inléresl q u ’ilz sentent en leurs tonlieux, et q u ’il en doibl e s I r e allé
aullres devers le Roy. L’on sçaurat de bref s’il e>t ainsi.
Ce (|ue l’on at diet de Couloigne at esté publié par noz propres gens de
pardeçà, à l’occasion que trois ou quatt re belilires ont, soubz les matlines,
volé en la grande Église quelque armoire aliénant celluy où sont gardés
les troys Hoys, ausquelz ilz ne sceurent arriver, aianlz emporté au leu nés
reliques.
Mr de Cuinci 1 al faict une chasse des Voleurs des bois; et ceulx de vostre
ville de Sa inct-Amand s’y sont Ireuvés forl volentiers, estant sorlyz deux
centz bien armés; et ont encores despuis faict une saillie à pari, aianlz tué
des plus insignes brigandz, et en amené trois que l’on doibt exécuter par
la corde.
Encoires ne sçait l’on icv co mm e le duc de Médina at esté reeeu par le
1 Los faits allègues p a r
Morillon c o n c e r n a n t l ’i n t e r v e n t io n d e l 'E m p e r e u r d a n s les a flaires des
P a y s - l i a s so n t très fondes. P a r u n e lettre d u 13 février 1 5 7 4 , R e q u esen s sc p la in t à Muximilieti 11 d u
t r i s t e état des P ay s-R a s et des r e c r u t e m e n t s faits en A llem ag n e p a r Louis de Nassau à D i l l c n b o u r g
e t d a n s d ’a u t r e s p arties d ’A l l e m a g n e , où il es t s o u t e n u p a r le» com tes palatin s. Il sc p r o p o se , dit il,
de p a s se r le R h in d a n s l 'a r c h e v ê c h é de Cologne, p o u r e n v a h i r ainsi les P ays-lias . D an s se s dépêches,
l ’E m p e r e u r p r o m e t b e a u c o u p , sans d i r e m o t d e v o u lo ir i n t e r v e n i r d i r e c t e m e n t d a n s les alîaires des
P a y s - B a s . ( A rch ive s de la S e c r é l a i r e r i e d ’L'tat a lle m a n d e , R e gis tre a u x C orrespondances des em pereurs,
t. Il, pp. ôti(i e t stiiv.) N éan m o in s S t-G o u a rd , a m b a s s a d e u r de F r a n c e à M a d r i d , a s su r e q u ’au m ois «le
m ai l’E m p e r e u r faisait plus q u e j a m a i s in stan c e en fav eu r d e la r éco n ciliatio n d u p r in c e d 'O r a n g e
« et crie iry, t a n t q u ’il p c u lt, q u e l’astérité, q u e le r o y catholicque. m o n s t r e en ceslc affaire, m eet hors
d e la m aison d 'A u s t r i c h e l’e m p i r e . » V o ir M a n u sc rits de P a r is , t. Il, p. 4 4 7 . Viglius f n é e r i \ i t aussi
à l l o p p e r u s . V o ir IIo vnck vam P a p e x p u e c h t , t. I, p a r t . Il, p. 7 9 4 .
s J a c q u e s d e B lo nd el, S r d e C u in c h y . V oir sa no tice, t. I l l , p. 1 13, note 5.
I ) ü CARDINAL DE GR AN VE LL E
37
Roy: aulcungz dient bien, aultres mal
En fin l’on parle icy beaulcop des
simulations d ’Espaigne, de sorte que le crédit et respect se perdt.
Quelc’un me dit avoir lieu advertissement que Sa Majesté picque souvent
ceulx de son Conseil de ce que. p ou r suivre leurs opinions, les affaires en
vaillent piz.
Il trouvera que Vostre IIImc Sgric luy at dict viay. Pleusl à Dieu q u ’il
Plieut creud en temps : non laboraremus.
Aulcungz veuillent dire que Sa Majesté auroit appellé le duc de Savoie,
et q u ’il se debvroit e m b a r c q u e r avec le du c d ’Albe. Je ne pense poinct
q ue celluy de Savoie vouldroit liaba ndonner son payz
XIII.
LE P R É V Ô T M O R IL L O N AU CA R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(B ibliothèque de Besançon. — Lettres diverses, I. I l , fol. I2fl et 127.)
B r u x e l l e s , les 2 3 e t 2!) f é v rier 1 5 74 .
Il y at x ou xi j o u r s que son Exce at lieu très certain advis qu e le conte
Lodovic 8 avoit jusques à troys mille reyters et six mille lansquenechtz au
1 Le iluc de Médina Celi a v a i t en effet à cette é p o q u e des c o n f ér en ces fré q u e n te s av e c le Roi. D’a p r è s
S t -G o u a rd , le d u c « a mis de g r a n d e s choses co n tr e le d u c d ’Alve, résolu , c o m m e l’on d ict et ni'a l’on
a s s u r é , d e lu y n u i r e en to u t ce q u ’il p o u r r a . J e ne sç a y q uel g o u s l le R oy t r o u v a en ce q u ’il p r o p o s a ;
m ais a u lieu q u ’il n e soul oi t a v o ir conseil d ’E stat q u e d e u x ou tro is fuis la s e p m a in e , à cest h e u r e il le
faict e x t r a o r d i n a i r e et to us les j o u r s , e t ay sc e u t q u ’il ne se t r aicte q u e des af faires d e F l a n d r e s . » (L e s
M a n u scrit* de P a r is , t. Il, p. 4 5 9 .) D ’a p r è s u n e lettre d e Çayas a u R o i , le Conseil d ’É t a t à M adrid
v ou lait le p a r d o n e t l'a bo litio n d u 10e d e n i e r . (Correspondance de P h ilip p e I I , l. III, p. 14.)
*
Le com te L o u is d e N a s s a u , f rè r e d u T a c i t u r n e , p r é p a r a i t en A lle m a g n e u n e ex p é d itio n a r m é e
d es tin é e à e n v a h i r les P ay s-B a s. Il avait tr o is r é g im e n ts d ’i n f a n te rie e t 4 , 0 0 0 c h e v a u x . D e so n c ô té , le
p r i n c e d ’O r a n g e faisait r e c r u t e r des t r o u p e s s u r les f ro n t i è r e s d e la B o u rg o g n e e t d e la L o rr a i n e .
R e q u e se n s ne négligea r i e n p o u r r é s i s t e r à cette n o u v elle a t t a q u e . V o ir C orrespondance de P h ilip p e I I ,
t. III, pp. 17, 2 5 , 2 4 ;
G roen
va.\
Phi.nsterer,
t. IV, p. 5 1 5 , 5 2 0 , 4 2 5 et suiv.
« J e ne sçais q u e ce se ra de n o u s ; c a r les b r u ie tz v i e n n e n t d e tons costelz t a n t d ’A llem aign e, Gliel-
58
CORRESPONDANCE
pays du conte Palatin, preslz à m ar c h er cl p o u r se j o in d r e avec un bon
n om br e d'infanterie françoise; et i\Ionsr de Vergy al adverli en mesme
temps q u ’aux confins de Bourgoigne il y avoit mille chevaulx et xvi enseignes
de gens de pied aussi preslz à marcher. Depuis at on heu advertissement
q u e le Koy de France est entré en nouveau ap poinctement avec les Hugonolz, el q u ’il al miz d ’accord el allié par ensemble ceulx de Guise avec les
Memorancy, et q u ’il at cassé ses gens de guerre q u ’il avoit prins p ou r sa
ga rd e ; et que iceulx sonl levés par quelc’un incongnu, ainsi q u e l’on feit
peu paravant la prinse de iVlonts et Valenchiennes. Et est certain que le
conte Lodovic at parlé audit Roy. Aulcungz veuillent dire q u ’il seroit esté
vers le grand seign eu r; mais le voyaige est trop long p ou r l’avoir faicl en
si peu de temps
i\Ionsr de Sainct Bavon at hier receu lettres de Son Exue comme elle esloit
advertie que les ennemiz estoienl auprès d ’Aix, el q u ’ilz inarchoient en
diligence, et que l’on avoit descouverl une (raison en Anvers. Il ne peult
estre que ilz n’ayent grandes intelligences aux villes: je craindz Maeslrichl,
le payz de Geldres, Frise et Overyssel.
tires (|ue F ra n c e , q u e se v oient g r a n d s p r é p a r a t if s de m acliin atio ns e u n t r e ces p a y s de p a r d e ç à , si q u e
vois g r a n d e s a p p a r e n c e s si D ieu ne disp o s e au c o n t r e de ce q u e les h o m m e s p r o p o s e n t , q u e se ro n s
mal. » ( E x t r a i t d ’u n e le t t re d u s e c ré ta ir e Bor ty à V ig lius, d u 2 0 j a n v i e r 1574. — D ocum ents h isto ­
riques, t. X I II , fol. KO v°.)
« .Nous av o n s p assé q u e l q u e s j o u r s eu a d v e r t e n c e de d iv e r s e s bons lieu x d ’Allem aignc q u e le com te
p a la tin Clirisloplile et le com te L ouis d e Nassau a v o i e n l c o m m e en p ied 5 , 0 0 0 ch ev au lx cl 5 à (i,000
p ie tto n s. E t h i e r soir est v e n u h o m m e ex p r ès, env oie en t o u t e diligence de M. de Vcrgis, in f o r m a n t le
m e s m e , mais d i s a n t q u ’ilz a v o i e n l tro is r é g i m e n t s d ’A llenians et q u i n z e enseignes d e F ra n ç o is (pie
levoit et av oil desjà en p a r t i e p restz à d e u x lieux de B o urg o ign e le Sr d ’Isclic, et q u e le to u t m a r c h e r a i t
e n c o r e ce mois. Ce q u e j e tiens se faict p o u r d i v e r t i r les forces d 'I Io lla n d c , o ù les villes so n t t a n t p r e s ­
sées d e noz g ens q u e , à L c y d e n , n e se v e n d p l u s pain p u b l i q u e m e n t , niais p a r d i s t r i b u t i o n d u m a g i s t r a t .
J e laisse p e n s e r V. S. c o m m e n t n o u s en s û m e s, e s tan s sans u n sol, à ce q u e S. E. dict. » ( E x t r a i t d ’u n e
le t t re du se c ré ta ir e B e rly à V i g l i u s , d u 13 f é v ri e r 1 57 4 . — llrid., fol. 51.)
1 C harles IX t i n t en effet u n e c o n d u i t e t r è s éq u iv o q u e . Il négociait avec le p r i n c e d ' ü r a n g e et
L o u is d e Nas sau. D ’a u t r e p a r i , il a s su r a à R e q u csen s q u ’il fa v o ri s e r a i t les affaires d u roi d ’E s p a g n e ; il
v ou lait, d isa it-il, e n t r e t e n i r a v e c ce m o n a r q u e u n e b o n n e intellig en ce. Son a m b a s s a d e u r alla j u s q u ’à
d ir e q u e son m a î t r e ne s o u ffrirait pas q u e les reb elles des P a y s - B a s r e ç u ss e n t d es se c o u rs d e la p a r t
d es F ra n ç a is. Le c o n t r a i r e e u t lieu. Des s o ld a ts franç ais a l l è r e n t r e j o i n d r e le com te Louis. Voir b a r o n
K ervyx
de
Letteniiovk,
t. IV, p p . 50, 7 0 , 7:2.
L es G u eu x et les H u g u en o ts, t. III, p p . 5 7 0 et suiv.;
G roen
van
P iunstekkr,
DU CARDINAL DE GR ANVELLE
5!)
Son E x 0« al tlonné icaerlgelt ' à 7000 reylers. Si noz berniez d ’o r d o n ­
nance fussent esté entrelenuez [que n’Iieussent t a n t c o u s lé comme ont l'aict
les estrangiers, que ont ruiné le plat payzj, les cnnemiz n’heussent osé faire
une telle emprinse en telle saison. Mais le Duc s’est deffié des gens du pays
et at désarmé les villes de leur artillerie, que l’on at envoyé en Espaigne, et
p ou r la pluspart faict tomb er ès mains des ennemiz, tout ainsi comme si
l’on leur lient voulu d o n n e r .; et mainte na nt I on en aurai faulte et aussi des
munitions desquelles les frontières sont desfurnies.
Monsieur d ’Havret at charge de faire xx enseignes en haste *. Il at hier
déclairé audict sieur Gou ve rn eu r q u ’il n’en treuve poinct ung ne. Ceulx de
la ville d ’Anvers lièvent cinc([ enseignes, que seront soubz Monsr de C h a m paigney p o u r la seurlé de la ville que treuve moien de les paier. Il y al
encores q u elq ue autre qui at cincq enseignes.
Ce malin est venu advis à Monsr de Mérode que hier en nuict ledit conte
Lodovic at couché s u r ses terres, et q u ’il tiroit vers Valkenbourch. Ledict
seigneur est parti en diligence pou r retirer sa femme etenffantz en Anvers.
J e tiens que doibz hier ilz seront à l’endroict de Maestricht, s’ilz n e p r e n d e n l
le chemin de Geldres pour venir en Hollande, et m u n i r les villes que sont
en faulte de toultes choses, et n’en peulvent plus; de sorte que, sans ce
secours, il y avoit espérance de les réd ui re; et en ce at travaillé Monsr don
Fe rn and e, non sans ap parence de quelque bon effect, que par cecy sera
r o m p u : car les ennemiz m arc he nt j o u r et nuict et n’am èn en t chariotz ny
bagaiges, p o u r che mi ner plus légièrement Ils menassent de mectre tout en
feu et flamme, que ne seroit poinct le milleur p o u r eulx. 4.000 reytters ne
sont obligés de servir plus d ’u n g moys, car c’est un g lleyltersdiensl ' q u ’ilz
font au prince d Oranges, qui, p ou r les récompenser, ne vouldrat faillir à
leur d o n n e r quelques villes en proie. J e craindz g r an d e m en t les Gascons
q ue sont cruelz, et les Anglois et Escossois qu e sont désià en Hollande, et
l’on enliève des a ul lr esà Lon dr es; c’est pi tiéc om me ilz traictentles manantz
de \ \ alchre et Zuydsbeveland, où il n’y at poinct ung paysant a u x champs.
1 W acrtgeH , p a y e m e n t s faits a u x p e r s o n n e s q u i s'e n g a g e a i e n t au s e rv ic e m ilita ire . V o ir t. IV, p. 54-5.
1 Voir, à ce sujet, la Correspondance de P h ilip p e I I , t. III, p. 2 4 . C h n r l e s - P h i l i p p e d e C r o y , s e i g n e u r,
p uis m a r q u i s d ’I Ia v r é , fu i c h a r g é de faire ces levées.
5 R e y tle rsd ie n st, un serv ice o u un en g a g e m e n t d a n s la cavalerie.
40
CO RRESPONDANCE
Aulcuns cra indent Nieumeghe; el les paysans là à l’e nlo ur desvalisent
tout ce que y passe. Ce que je craindz le plus est les intelligences et p r a ­
t i q u e s que les ennemiz ont aux villes: et nostre p e u p le , q u ’est fort altéré,
se trouvant povre et sans gaignaige, liaulsera la leste selon q u ’ilz co m­
mencent a parler tort séditieusement, et il n ’y aurat faulte de maulvais
esprilz partout. Les plus couvertz sont les plus dangereux, estant la dissi­
mulation g r and e partout.
Il y at lieu emprinse que l’on dit estre descou verte par le Sr Don Fe r­
na n d e de Lanno y que y at faict pr en dr e ung suspecté de trahison, qui at
accusé deux complices en Anvers, lesquelz estoient Anabaptistes q u e ont
congneu le faict; et comme en divisant l’on les al interrogué q u ’elle
emprinse il y avoit su r Anvers, ilz l’ont confessé sans peine.
Monsr le duc d ’Arscliot est hier p art y vers Anvers, selon que Son Exce
l’avoit mandé, que l’at con lre man dé par lettres que vi nd rcn t hier audict
sieur de Sainct-Bavon, luy d o nn a nt charge de ceste ville. Je ne sçay s’il
vouldrat accepter, n aiant aulcuns soldatz et peu de moyen p o u r en avoir.
Louvain, iMalines, Diest, Tillemont et les autres villes de ce costel là s’hab a n d o n n e nt et ne sont p o u r résister aux ennemiz, nv sans maulvaises
h u m e u r s ; car tous les banniz reviègnent.
Le C om m end ad or Maior at m an d é Messrs Fonch 1 et del Rio * p ou r servir
de conseil; je n ’entendz poinct que Mr Roda 5 soit appellé: car il at icy
affaire en la C ha m br e des troubles. Le sieur Castillo * me dit q u e ledit duc
d ’Arschot al lieu de grandes paroles avec ledit Roda.
J ’ay entendu despuis que c’est à cause que ledict Roda luy at do nné
assignation de six mille florins sur les biens conlisqués s, et depuis il at p r o ­
curé que son Excellence at escripl à Antonio del R i o “ q u ’il ne paie rien, qui,
1 J e a n l'o nck , p r é v ô t d e N o tre-D a m e, à U trecht. Voir sa notice, t. I, p. 103.
* L ouis Del Rio. Voir sa vie d a n s la B iographie n a tio n a le, t. V, p. M i .
* J é r ô m e Roda, m e m b r e d u Conseil des t r o u b le s. (B u lle tin de l ’A ca d ém ie royale de B elgique, t. XVI,
Ü1' partie, p. 5 0 , e t n o t r e t. IV, p p . 107, 120, 12 4, etc.)
‘ Le p r o t o n o ta ir c J é r ô m e Castillo. Voir sa no tice, t. I, p. 10!).
5 Dans u ne le ttre d e Viglius à l l o p p c r u s d u 1er av r il 1 8 7 4 , il est d i t : « De so l u t i o n e G,0 0 0 11. A n t o ­
n ius Cel Ityo, t h e s a u r a r i u s c o n f isc a tio n u m , sp e m ce r ta in n o b is focit, se ad p r o x i n m m P ass ch a cam
pecuniam ad rnuneralurum . »
(H oynck
van
P apendrecht,
t.
I,
p a r t . Il, p. 7 9 8 .)
6 A nto ine Del R i o , Sr de C lc y d a e l, r e c e v e u r g é n é r a l d es confiscations ù p a r t i r d e 1 573. Il m o u r u t
à L is b o n n e le 17 f é v ri e r 1580. V oir sa vie d a n s la B iographie n a tio n a le, t. V, p. 4 0 8 .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
41
ail ce que dit Caslillo, avoil rescript q u ’il ne falloil poinct ainsi Iraicler ung
si principal seigneur.
L ’on tient g ran d propoz de la venue du Roy, et que le duc de Medina
seroit au port de Portegallet p ou r soy venir par deçà dé se m ba rc q u e r vers
Bretaigne p o u r venir go u v ern er par deçà, que j e tiens estre baiez ' po ur
entretenir. Car il y a lettres de Candiano d u vingl-neufviesme du moys
passé que ledict Duc n ’avoil encore heu accès vers Sa Majesté, et q u ’elle
n ’esloit guères contente de luy.
Son Ex 08 envoie Osorio 1 et Pierre de Paz 3 vers le d u c de Br u n sw ic k allin
q u ’il liève gens. Devant que eulx seront là et qu e nous serons prestz, ledit
coule Lodovic aura i exécuté son eniprinse. Monsr Fo n c h * est envoie vers
Monsr de Liège, allin q u ’il ne donne passaige.
L’on tient p ou r certain que ledit Prince est en traiclé avec la royne d ’Anglelerre p o u r Vlissinghe, allin d ’avoir arge n t; car il n ’at pas u n g solz, et
assigne ses gens s u r le b ut in q u ’ilz trouveront à Middelbourch, q u e l’on dit
s’est r en d u devant-hier, et que les soldatz et bourgeois ont la vie saulve, et
q u ’ilz ont livré le capitaine Mondragon lié et garotlé illec 5. C’est le bruict
q ue l’on nous apporte de Flandres et d ’Anvers.
Capitulation de /)Jiddelbourg.
L’appoinc leme nt se feict v en dredy °, el le Prince at p a rd on né à tous sans
réserver a u lc u n g ; et al fuict cond uire par ses batteaulx Mondragon et ses
1 H u iez o u U nies, d e l i a x , sottises.
* Don A lv aro d 'O s o r i o , c a p i t a i n e esp ag no l. Voir Mendoç.i, t. I , p. 105. P l u s i e u r s officiers d u n om
d'O/.orio ou O s o rio s e r v i r e n t d a n s l ' a n n é e . V oir D o cu m en ta s in é d ilo s, t. L X X IV , p p . 59 5, 5 9 7 , 4 0 9 ,
cl n o ir e to m e IV, p. G02.
3
P i e r r e de P az ou Paez, ca p i t a i n e au se rvice esp agn o l. Il p r i t p a r t a u x faits d ’a r m e s les p l u s i m p o r ­
t a n ts d a n s les P ays-B a s. V o ir II oy .vck
van
P apendreciit , t. Il, p. Il, p. 1 4 1 , n o te 2 ; t. IV, p p . 2 4 5 , 2!ili,
4 5 5 ; JI endoça , t. Il, pp. 105, 118, 2 4 7 , 2 4 8 , 2 4 9 , 2 8 9 .
* J e a n F o n c k , p r é v ô t d e N o t r e -D a m e à LHrecht, d o n t la n o te est in s é ré e a u to m e I, p. 105, av a i t
r eçu en effet la m ission de faire, a u p r è s d e l ’év è q u e d e Liè ge, d es d é m a r c h e s p o u r ne pas la iss e r p a s s e r
le com te Louis. Voir, à ce s u j e t , les le t t re s <|u’il é c r i v i t à H e q u c s e n s , d a n s la C orrespondance de
P h ilip p e I I , t. I l l , p p. 28, 2 9 .
s l 'e s b r u i t s é t a i e n t des in v e n t i o n s c o n t r a i r e s à la vérité. M o nd rag o n fut b ien tr a i té p a r le T a c i t u r n e
et a jo u i de t o u t e sa lib e r té .
6 La c a p itu la tio n d e M i d d c lb ou rg fut signée le 19 fév rie r 1574. L ’acte en es t r e p r o d u i t e n l a n g u e
T
ome
V.
6
42
CORRESPONDANCE
soldatz et les bourgeois, que ont voulu sortir, j u s q u ’à la .Meuse, et sont
arrivés à Gand ; mais ils m eu re nt comme bestes, après avoir mangié. Ea
ville de Middelbourcli paie m c mille florins, et le Prince prend à soy les
biens des abscntz et les marchandises que portent plus d ’un g million. L’on
dit que ses ba üe au lx ont la leste vers Espaigne, faisanlz leur compte d ’empiedler sur la marine. Hz ont grandz dcsseingz sur main. Ceste doulceur
de laquelle at usé le P r in c e luy ferat gaigner le ceur de plusieurs villes, que
sont esté mal traictées du d u c d ’Albe.
Ce que plus me desplaist est que les Eslalz de Brabnnt s’adaptent si peu
à la proposition et d e m a nd e de Son Exce et que ceulx de Hayn na ul t et
d ’Artois responde nt quasi d’ungne mesme bouche, disantz les derniers
q u ’ilz n’oseroient proposer à leur peuple l’équivalent cl perpétuel que l’on
dema nd e au xc et x x e; d o n t Son E x co se trouve bien fasché et empesché, que
al envoie la response des Eslalz à Monsr de Sainct-Bavon, q u e y treuve du
■pro et du contra. T a n t y at q u e ces Estais sont plus chatloilleulx et dilliciles à cond uire que celluy de Milan; et que l’on p e u l t à présent cognoislre
si Vre lllme S ' ie en son temps bien at servy, faisant o b é y r Madame comme si
elle fut eslé Roy, tant q u e vous l’avez soubstenue.
Plusieurs sont en opinion que si Ju lian heut suivy l’advis de Mous 1 de
Beauvoir, que heussions obtenu la victoire, sur la courageuse invasion que
feil le vaillant feu Sr de Glimes ’, estimanl d ’estre suivy, ce q u ’il ne lut
poinct; car ledit Ju lian et ung Angulo * luy feirenl le faulx bon, q u e y per­
diren t de leur suyle 400 Espaignolz et 200 Wallons. Il vad bien que la
faillie n’at esté faicte par quelc’ung du pays.
L ’on dit main tena nt que Julian at faict ce q u ’il at p e u ; mais que le
C om m an da do r Maior at esté trop chaukl, faisant partir trop tost les ix bât-
franç aise d a n s M e .v doca , t. Il, p . 187 j d a n s la G rande Chronique de H o lla n d e, t. Il, p. 27(5; eu langue;
n é erlan d aise d a n s P. B o n , liv. VI, fol. 5 v°, et d a n s W acenaar , t. V I , p. 4 0 2 , d 'a p r è s u n m a n u s c ri t .
V o ir aussi la Correspondance de P h ilip p e / / , t. I I I , |>p. 2 4 , 2 3 e t 2 0 ; Correspondance d u T a citu rn e,
t. I I I , pp. 9 5 e t su i v .
1 V o ir p lu s h a u t , p. 18.
*
Osorio de A n g u l o , ca p i t a i n e espagnol, qu i fit c o n s t r u i r e la citadelle de Flcssin gu e. Une d ivisio n
de la flotte d es tin é e à r a v i t a i ll e r M i d d e lb o u r g , en j a n v i e r 1 5 7 4 , lui fu t confiée. P e n d a n t le c o m b a t ,
son n a v i r e to ucha à u n bas-fond et fut assailli p a r les e n n e m is . l!n co u p d ’a r q u e b u s e le bles sa. Voir
M endoça,
t. I, p p . 2 0 2 , 20 3 , 2 7 0 ; t. II, p p . 181, 183.
43
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
leaulx p ou r descouvrir, que furent accablés des ennemiz avant q ue Ju lian,
q u ’estoit une lieue en arrière, y pe u 11 arriver.
XIV.
LE
P R É V Ô T M O R I L L O N AU CA R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(Bibliothèque de Besançon. — Lettres d iv erses, t. I l , fol. 124 e t 125.)
B r u x e l l e s , le 2 4 e t 2 7 f é v ri e r
1574.
Combien fut il esté milleur que, suivant l’advis de Vostre lllmo Sg,ie, l’on
heut prins le chemin de la clémence, p o u r pa r ce moy en affoller l’en n e m y
en d o n n a n t le pa rd o n que l’on at tant différé, p o u r mai nte ni r l’autorité.
Dieu doint que l’on ne soit conlrainct d ’y venir, et que ce ne soit trop
tard. iMais ceulx d ’Espaigne sont bien si echervellés q u ’ilz di ron t q u ’il
vaull mieulx p erd re ses Estalz q ue d ’en ve nir ad ce poinct. Pleust ores à
Dieu que le faict de la religion n ’y fut joinct; je tiens qu e le regret en seroit
tost passé. Quo y q u ’il en soit, le C o m m e n d a d o r Maior at pe rd u crédit,
estant en aussi malvaise opinion comm e son prédécesseur. Il at avallé la
response des Estais dou lcc men t; mais il n’en pense pas moings. Cependant
chascung se lient s u r sa garde et nous périssons et sûmes en dangier
d ’ungne révolte généralle et pillaige des povres gens que ont les yeulx
ouverlz. Et n ’est à croire combien que les bons et ceulx qui ont à pe rdre
sont mal contentz et altérés p o u r l’opinion q u ’ilz ont tous en général que
le Roy est mal content et se déifiant d ’eulx, et que p o u r tant il les mect
en p roye, et que la promesse du pa rd on el abolition du x e sont vaines, et
que p a r tous moiens l’on at ch erché de gaigner le devant, p o u r après rédi ­
ger le tout en servitude. Veoire ce qu e je regrette le plus est que aiant
esté despuis deux ans la mémoire de Vostre IIImo Sgrie si aggréable au
général du pays, p o u r l’espoir que l’on avoit qu e son conseil et bon zélé
améneroit que lque remède aux maulx présenlz, m a in te na nt l’on rentre en
CORRESPONDANCE
aigreur cl mauvaise opinion contre elle, co mm e si elle auroil heu pari en
la di ssimulation; mais j ’espère que la vérité se cognoislra que lque jour.
Les gens de l’agent de France ont publié q u ’il y auroit altération en
Espaigne. Le Président Viglius me dit q u ’il ne le croit, et certes en ce temps
il ne nous polroit arriver chose plus contraire; nous n’avons icy faulle de
meschantz gens qui se délectent à semer telz propos.
L’on dit que Sa Majesté at une imposition sur l’église d’Espaigne de Irois
millions de d u c a l z , avec lesquelz elle veult icy con tinue r la guerre. L’on en
doibt d’advanlaige à noslre cavallerie et infanterie, et je craindz qu e ferons
peu avec les forces. La paix est plus à propos p o u r faire seignorier les
princes leurs subjectz, auxquelz ilz trouvent plus de contradiction au
temps q u ’ilz mènent guerre que qu an t ilz sont à repos. Mais ceidx d ’Espaignc ne l’enten de nt pas ainsi.
Le Président se contente peu du Co m m en d a d o r Maior. Ainsi jusques ores
qu e sont plus de trois mois q u ’il est au gouvernement, il ne faict chose que
vaille. Il s’enferme de u x ou trois heures avec gens de peu, discourre et jaise
comme une pie borgne, s td nihil seqiiitur. Il at qua tre ou cincq m a r m o t e l z 1
desquelz il faict sa marotte*. Le Président at esté planté icy p o u r reverdir.
Il y a t t r o v s sepmaines que B e r la y m o n t est dehors, veoires un g moys p o u r
faire les nopces de son tilz. Le duc d ’Arschot at icy gardé la maison, et
ce pe nda nt d ’Assonleville 5 at gouverné le m o n d e avec le Commen da do r
Maior, et son beau-père les Estais de B r a b a n t, avec tel fruict comm e l’on
veoid.
Viglius m ’a t d i t que le Com m en da do r Maior loue jusq ue s au ciel Albornos * et Joan Moreno 5, et que soubz luy Del Ryo et Roda sont devenuz
plus insolentz que auparavant. Le de rnie r le monstre p a r effect, s’estant
• M a r m o te lz , p etits singes.
2
S t - G o u a r d , a m b a s s a d e u r de F r a n c e à M a d r i d , d o n n e u n e assez tris le idée des ( | u a l i l é s d e R e q u e -
s e n s , l o r sq u ’il d i t d a n s u n e le ttre d u 2 0 o c to b r e 1575 : « Il va assez mal h a b i t u é et disp osé de sa
p e r s o n n e p o u r p r e n d r e le trav ail r eq u is en si g r a n d e s affa ires, co m m e celui q ui p orte, p o u r ses m a u ­
vaises h u m e u r s , dcr.x f o n ta in e s, l’u n e à u n b r a s et l’a u t r e à u n e j a m b e . » (M a n u sc rits de P a ris, t. Il,
p. 4 3 6 .) Voir au ssi b a r o n
Kervy.v
de
L ettem iove,
L es H u g u en o ts et les G u e u x , t. III, p. 3 6 3 .
* C h r isto p h e d ’Assonlcville. (Voir sa notice, t. I, p. 10.) Il avait épo usé M a rg u erite Schyf vc, fille de
J e a n , c h a n c e lie r d e B r a b a n l.
4 J a c q u e s d e A l b o r n o z , s e c r é ta ir e d u d u c d ’Albe. V oir t. III, p. 8.
‘ J u a n Moren o, E sp ag no l, co nseiller de Hequesens. Voir les M ém oires de C lia m p u yn e y, p. 2 5 5 .
1)11 CARDINAL DE («RAiNVELLE
m
fourré en la maison d ’Egmont, q u ’il faict rac couslrer j us qu c s au bo ult aux
de sp end z de Sa Majesté.
Les Estatz de B r a b a n t . a u poinct de leurs conditions que les estrangiers
n ’a u r o n t ollices n y administration des forteresses, ont n o m m é en chief
Mr de Champaigney
Sancho d ’Avila *, Monsr de V il ler val s q u ’est à Boisle-Duc, Aldana 4 q u ’est chastellain de Wallieim, un g don Loys Carillo 8
q u ’est à Hoogstrate, le sieur de Sainl-Remy q u ’est à Breda, et sic consequenter. Si Sa Majesté tenoit son pays en paix et repoz, comme faisoit (’E m ­
pe re u r son pere, elle comm an der oi t au lieu que l’on la veult commcndcr.
L’on al prins en Anvers des gens, inestnes quelques Espaignolz, que con­
fessent l’empr inse q u ’ilz avoient s u r les cliasteaux dudict Anvers *, Gand ej
Valencliiennes. C’estoit trop p o u r bien l’acliepver en un g coulp. Depuis est
arrivé le secrétaire J u n o t qui afferme q u ’ilz sont bien xx prisonniers, que
Monsr de Cha mpaigney at successivement faict venir en sa maison sans
bruict, où ilz sont estés retenuz et examinés p a r ledit Sr et M1' de Haulteville 7; mais ledit secrétaire dit q u ’il n’at rien entend u des chasteaux de
Gand et Valencliiennes 8. Trop bien qu e sept soldatz de la citadelle d ’An­
vers, q u e sont Espaignolz et prisonniers, avoient intelligence pour ren dr e
un e porte à l’en nemy, et estoient après p ou r pracl icq ue r et c o r r u m p re des
aultres soldatz. Il y at aussi prin s ung nègre ou more blancq, auprès
du quel l’on at treuvé beaulcop d ’or p ou r gaigner gens, et l’on at prins ung
' F r é d é r i c P e r r e n o t , S'' d e Champagne}', f r è r e 'lu c a r d i n a l d e G ran v ellc.
* S an ch o d ’Avila, ch âtelain de P a v ie , g o u v e r n e u r d u c h â t e a u d ’A n v e r s , s o u v e n t cité d a n s le t. IV
e t d a n s M endoça.
3 A d r i e n d ’Oignies ou d ’O n g n y c s , S r d e W illc r v a l. V o ir sa b i o g r a p h i e d a n s M . K k r v v n d e V o l k a e r s .
iieke, e t D i e g e r i c k , D o cu m en ts h istoriques, t. I, p. 2 0 7 .
4 F ra n ç o i s d ’A ldana, c a p ita in e esp ag no l. V o ir
M endoça,
t. Il, p. 2 0 1 .
* Do n Louis Carillo. V o i r ü o c u m e n lo s in è d ito s, t. L X X I V , p. 2 7 2 .
‘ La c o n s p i r a t i o n faite p a r u n e p a r t i e d e la garniso n e s pagn ole d e la citad elle d ’A n v e r s , à la t è t e
d e laq u elle se t r o u v a i e n t J u a n Alonso et P e d r o Maldonado, es t r e l a t é e av ec les plus g r a n d s d étails d a n s
P. B o r , liv. VII, fol. 8. C ette c o n s p i r a t i o n , t e n d a n t à fa ire li v r e r le c h â t e a u e n t r e les m a i n s de g en s
d u p r i n c e d ’O r a n g c , fu t d é c o u v e r t e e t les cou p ab les s u b i r e n t le d e r n i e r s u p p lic e . V o ir C orrespondance
de P h ilip p e H , t. III, p . 2 9 .
’ « Ilz s o n t p o u r le p r é s e n t p lu s d e
lx,
e t se s o n t e n f u y z p l u s d e v% t a n t b o u r g e o i s q u e m a r c h a n d z
de to u t e s n a tio n s, au ssi b ien E sp aig n o lz q u e a u l t r e s . « (N ote de Morillon.)
8 « D e p u i s l’o n a t c o n g n u q u e s i , et q u e le Sr Don F e r n a n d e a t d e s c o u v c r t u n e e m p r iiis c q u e se
» faisoit s u r N i c m w e g h c e t M a cstrich t p a r les in esm es q u e c o n d u is o ie n t ccllcs d ’A n v e r s. » ( A u t r e
n o t e d e Morillon.)
CORRESPON DA NC E
4(i
capitaine de Vlissinghe que se lenoit eu Anvers, et avec luy un espie du
prince d'Orange, que traicteroient par ung orfèvre et ung cousturier anal)aptistes qui ont tout confessé. Monsr de Cham pa igne y at descouvert ceste
traïson par l’advis que luy at do nné Monsieur de Largilla *, estant le tout
venu en lumière par la su rprin se d ’une lettre. Je penseroye q u e cecy rompera les desseingz du conte Lodovic, qu e marchoit j o u r et nuict, et debvoit
hier passer la Mose * par la glace; si fort hy ve r avons nous heu depuis la
Purification ; mais hier comme nch a le dégel q u e continue peu à peu
J ’entendz q u e le C o m m en da d o r Maior appelle Mr de Champaigney con ­
tinuellement au conseil d ’Estat, qui 111 y ouvre les yeulx de combien le duc
d ’Albe et les siens l’ont forcompté. Ce que Assonleville ayde tout ce q u ’il
peult, et ledit C om m en da do r dé monsl re de le croire, et se repe ntir q u ’il
n ’at prins aultre pied co mm e n ça n t le g o u v e rn e m en t , et veult m an d e r le
président Viglius à Anvers.
Sa i nct -A ud eg on de 5 avoit par lettres exh orté le prince à paix, re m o n ­
strant combien l’effusion de sang desplaist à Dieu. J ’entendz q u ’il luy
at faict response que de ce il luy desplaist grandement, et q u ’il peult avoir
cogneu combien il a y m e la paix; mais q u ’il auroit à faire avec gens qui ne
tiègnent aulcune foy et qui o n t leu le Concilie de Constance : fidem. non
servandam hœreticis; qu e l’on at veu comm e at esté traiclé le Lantgrave*,
et recenteinent (’Admirai ", après tant de caresses et sermenlz, entre si
gr and z festins et nopces, et que nullement il ne vouldroit venir à paix si
elle ne se proposoit de ce coustel, et que avant toutte chose les Espaignolz
seroient tenuz de sortir. Ainsi auroit le loup bon marchiet des brebiz, si
leurs gardes, que sont les chiens, fussent déchassés.
1 Cliarlcs, Sr île L a r g i l l a , B o u r g u i g n o n , a u se rvice de P h i l i p p e II et d e so n p ère. (V o ir sa no tice,
t. I, p. tO.)
*
L ’on tien t q u 'i lz l’ont passé, e t q u ’ilz v i e g n e n t d r o i c t c o n t r e B r a b a n t . » (Note d e Mor illon.)
s P h ilip p e Marn ix d e Mont-S"’-A ld cg o n d c. V o ir ces l ettre s d a n s la C orrespondance d u T a c itu rn e ,
t. III, pp . 7 8, 5 6 9 , et ce q u e M.
Gaciiard
en d i t d a n s l 'i n t r o d u c t i o n de ce volum e, pp. xxix e t suiv . La
r é p o n s e du p r i n c e à M a rn ix est i m p r i m é e , ib id ., p. 8 8. T o u t ce q u e Morillon en dit est c o n f o rm e à ce
tex te.
4 P h ilip p e le M a g n a n i m e , la n d t g r a v e d e Hessc, qui, a p r è s a v o i r fait, le 18 j u i n 1846, sa so u m is sio n
à l’e m p e r e u r C h a r l c s - Q n i n t , fu t a r r ê t é p a r le d u c d ’Albe e t G r anv clle.
5 L ’am iral G a s p a r d de Coligni, assassiné p e n d a n t la S '- B a r t h é l e m y à P aris.
DU CARDINAL DE GR AN VEL LE
47
Son Excellence Fat tenu fort secrctle et la copie (rotle par icy. Et je tiens
qu e le prince Fat faict semer, selon q u ’il est cauteleux, p o u r gaigner bonne
opinion partout, comm e il at desjà faict vers plusieurs Espaignolz de Midde lb o u rc h q u ’il al fort h u m a i n e m e n t traicté, de sorte que le capitaine
Mondragon en dit tous les biens du monde. Il esl de présent en Anvers.
L ’on dit q u ’il y viègncnt des ambassadeurs de FEinpereur que ne sont
g ue rr e loing d’Anvers, et q u ’ilz parlent de la grosse dent, que l’on lesse
ainsi p e rd r e ces beaulx Estatz; que l’on tient les Fr ançoys, la royne d ’An­
gleterre avec ledit Prince sont après pour parlaiger entre eulx; et que le
r o y de F r a nc e se repent d ’avoir faicl tuer FAdmiral, p o u r ce que l’on luy
faict e n te n d r e qu e FAdmiral l’heut e m pa tro nn é des Eslatz de pardeçà. C’est
chose elère q ue Gascons, que sont avec ladite troupe, sont ceulx q u e ont
convoyé le roy de Poloigne, que le conte Lodovic at conduict et obtenu
ledit secours : en ce q u e l’on peult veoir co mm e nous en sumez '. Si Sa
Majesté heust creud Vostre lllme Sgrie en temps et lieu, nous serions à repoz
où q u e ne faisons q u ’e nt re r en noz misèrez.
Le Seigneur de Ch am p aig n ey m ’escripvit devant hier p a r une stafetle
qu e je heusse à me retirer vers Artois; mais comme despuis les advertissem ent z se refroidissent, je n ’ay aulcunc envie d ’h a b a n d o n n e r ce lieu, si je
n’y suis contrainct.
C’est du xxini de febvrier lo74.
Depuis ceste escripte, sont venu nouvelles que les ennemiz ont passé la
rivière, et q u e ce sont esté seullement 111 e reylers que se sont monslré
entre Aix et Maestricht, où noz Allemandz, que meur en t de faim p a r faulte
d ’estre paiés, ont cuidé livrer une porte aux ennemiz, do n t l’on s’est
apperceu en temps. La gr an de troupe q u ’est de n m chevaulx et vm harquebousiers mal en ordre, ne sont estés plus avant que deux lieues de la bonne.
Il y at vc Gascons près de Dillinghe fort bien équippés, et Mons1' Bordey,
qui est arrivé ce seoir xxvi, dit que le gouve rne ur de Champaigne at rué
s u r huict enseignes que le conte Lodovic y avoit levé ’.
1 O u p e u t c o n s u l te r a u s u je t d e s c r a i n t e s d e s Espagnols, s u r l’e n t e n t e e n t r e le p r i n c e d ’O r a n g e , la
F r a n c e e t l’A n g l e t e r r e , e t l ’i n t e r v e n t i o n d u ro i de Pologne, la le ttre d e S t- G o u a r d , du 21 f é v r i e r 1 5 7 4 ,
publiée p a r
G roen
van
P rin s te re r ,
t. IV, p p . 54-5 et su iv ., et a n a l y s é e d a n s les M a n u scrits de P a ris,
t. Il, p. 4 4 0 .
’ R e q u csen s d o n n e au Koi des r e n s e i g n e m e n t s s u r la m a r c h e d e l 'a r m é e du p r i n c e d ’O r a n g e d a n s
■iS
CORRESPONDANCE
Son Excellence a faict publier hier xxv u n g ban en ceste ville que tous
Lspaignolz heussent d ’eulx tirer en Anvers p ou r se présenter au chastellain Sancho d ’Avila, toutte excuse cessante, soubz peine de la ha rt; et que
nul man an t de ceste ville ne les lieut de loger d’advantaige soubz l’amende
de cent florins : c’est qu e l’on cherche encores aulcuns p o u r estre so ubçonnés de la traihison d ’Anvers, q u ’il fut esté mieulx de faire trousser sans
leur don ne r temps à eulx saulver. Hz parlent fort mal de Son Excellence.
Il y at venu courrier devant hier d ’Espaigne, q u e l’on disoit apporter
de gramlz pacquelz cl despeschez p o u r Son Excellence, et l’on actendoit
quelque résolution; mais Mr le Président m ’at dict que c’esloil sicut erat
in principio, et at heu lettres de Hopperus.
Dieu doinl bon voyaige à Pero Melendez s’il vient avec une si puis­
sante armée de mer co mm e l’on escript. Le principal est q u ’il ayt des bons
pilotes que congnoissent les baneqz et estroietz. Il rencontrera du re partie,
q ue à les principaulx portz a co mm andement. Je ne me sçauroie ima giner
que Sa Majesté vou ld rat a d v e n lu r er si g r an d e force, que seroit mectre en
hazard les Indes, et la cosle /narine d ’Espaigne, s u r laquelle les ennemis,
ad ce que l’on dict, ont des desseingz, aianlz plus de batleaux et de gens
q u ’il ne leur fault, que désirent eslre employés pou r gaigner.
Ceulx d ’OoslIande ont fort po ur veu la France de bledz; ainsi perdo nsnous peu à peu toutle traficque.
Comme Son Excellence avoit escript à ceulx de Matines de lever quelques
enseignes des bourgeois, et de les paier, ceulx du clergié ont député le
Doien avec le gardien des cordeliers et p rie ur des carmes, et ceulx du
gr an d conseil Monsr Richardot, p o u r rem onstrer que ceulx qui sont p ou r
le présent en ladite ville sont ex ipsa fece et que n’ont que perdre, voires
que ont adhéré aux ennemiz lors q u ’ilz tenoient la ville, et q u ’il ne convenoit leur mectre les armes en m ai n s , comme certes il ne convient en
scs le l i r e s des 1 i cl 2 4 f é v r i e r c l 5 m u r s 1 !)7i. ( C orrespondance de P hilippe / / , t. III, p p . 2 3 cl s u i v . )
V o ir a u s s i P. B o r , l i v . VII, f o l . 1 2 v ° ; G r o k x v a n P r i n s t e r e r , t. IV, p p . 5 1 3 , 3 2 0 , 3 2 b e t s u i v .
1 P ed ro Slelendez d e A viles, a d e l a n t a d o de F lorid e, élait a p p e l é à c o m m a n d e r la flotte espagn ole
a r m é e à S a n t a n d c r en d es tin a tio n d e s P ay s- B a s. L a f i e n t e , f/isto r ia de E sp a fia , t. XIV, p. 15, a s s u r e
q u e les a r ch iv es de S im an cas r e n f e r m e n t u n g r a n d n o m b r e d e p a p i e r s relatifs h cet a r m e m e n t e t des
lettre s d e Melendez, d u com te d ’O liv a r c s, d e do n Diégo I f u r t a d o et d ’a u t r e s pe r so n n e s . Ces p a p ie r s
p o u r r a i e n t , dit-il, s e r v i r à l’iiistoire com p lète de ce tte Hotte.
DU CARDINAL DE GRAINVELLE.
49
aulcune ville d ’a rm e r la populace, comme l’on le vcull faire icy et à L o u ­
vain; mais que les milleurs bourgeois estoient encoires hors du pays p o u r
révér ence de justice, supplianlz Son Excellence p o u r le pardo n, q u e seroit
la milleure assurance q u e l’on sçauroil d o n n e r à cesle povre ville. J ’enlendz
qu e lesdictz députés sont retournés tout ainsi comm e ilz sont allés, que
cause un g exlresme malcontentemenl et désespoir.
C’est du xxvii de febvrier. l o 7 l .
XV.
M A X IM IL IEN II AU CA R D IN A L DE G R A N V E L L E .
( Kibliuihùque royale de Bruxelles. — Manuscrit il" 9 4 7 3 , Recueil I II , fol. 5 7 5 .)
V ien n e, 28 février
1 57 4.
Revercndissimo in Christo pad re Sor Card, nueslro Caro y ainado amygo:
pues segun somos informados vos lo estais bien de los negocios que ay
tienen Fonseca de Andrea y G y r o n im o Marsella, y os liara relacion el que
esta presentara de lo que pretenden en ellos, no havra para que dezirlo
aq u y particularmente, syno q u e por enten d e r yo que son entranos buenos
cavalleros y sus cassos honrrados, y q u e desean el bu en effeclo dellos
algunas personas : a q uy en tenemos m u c h a voluntad de complacer, holgariamos s y n gu lar me nt e q u e por nuestro respecto le consiguiessen, y assi
os pedimos, Sor, y rogamos alfectuosamente los tengais po r encomendados,
para favorecellos y hazerles q u e en todo lo que huviere lu gar como cosa de
nuestro contenlamiento : que en el lo le rescibiremos de Va R a persona,
que Nuestro Seïior guarde.
De la m ain de VE m pereur : Toda la merced que a eslos se hiziere sera
para m u y gran eonplenamiento pues enliendo que son personas que lo
merescen. y lo po dran medrar.
T
ome
V'.
7
50
CO U R ES 1*0 NI) A iNCE
XV.
ANALYSE.
L ' ü m p e r e u r r e c o m m a n d e s p é c i a l e m e n t au C a rdina l le s a Ha ires d e F o n s e c n d ’A n d r e a
e t d e G u i l l a u m e M a r s e lla , d e u x parfaits g e n t i l s l i o m m e s . Il c r o it q u e le C a r d in a l e st an
c o u r a n t d e c e s affa ire s, q u i
lui s e r o n t p lu s a m p l e m e n t e x p l i q u é e s par le p o r te u r d e
c e t t e lettre. L ’E m p e r e u r fin it e n d i s a n t : T o u s les s e r v i c e s q u ’on po u rra r e n d r e à c e s
p e r s o n n e s m e se r o n t très a g r é a b l e s ; j’e n t e n d s q u ’e ll e s le m é r i t e n t .
XVI.
LE
CA R D IN A L
DE
(JK A N V E L L E
AU
ROI.
(Arc hives Karnesiennes a Naples, liasse i r 1733.)
N a p l e s , Ic l er m a r s 1S71.
Da prissa agora el Senor don J u a n a la parfida deste correo, p or dar aviso
a V. Magd de quo la da tambien y a su parlida : y ha dias q u e muestra
gran gana de partir, pero deve haverlo eslorbado, como el dize, la falta de
dineros, por no haver podido cu m p l ir con lo q u e le ha parescido ser necessario hazer antes de su part id a; a mi me ha pesado harto no haver podido
supler a todo lo que para esto fuera menester, pero ya ha entendido
V. Magd por m uch as cartas mias, por los Bilan^os, y po r el ho m br e expresso
q ue embie, y por lo que agora toco en esso lo vera, qu e no me queda forma
ni ng un a y que me hallo el mas emb ar aca do h o m b re del m u n d o , por que
veo los avisos que vienen de que l’arm ad a del T ur co vendra m u y poderosa
amenaz ando nuestra costa, y aun dizen q ue saldra t e m p e r a n o ; y para
delendernos no hay de qu e echar inano, pues estan continuadas las rentas
DU CARDINAL DE GR AN VELLE.
SI
ordinarias y exlr ao rdi na ria s, y no solamenle cl donativo corriente, mas
aun cargados Ios dos no aim olorgados, liaviendonos V. !\Iagd cargado los
inorcaderes sobre el los. los quales sabiendo quo no tenemos ya consinacion,
no nos daran credilo, y digo a V. MagH qu e sienlen en lodo extremo los
desle Reyno que se cargue sobre donalivos no concedidos, lo qual no se
puede lener secrelo, pues los mercadercs mismos lo publican entre si, por
su credito, y dizen q u e parcsce que V. Magd quiere liazer el donativo
renla or din ar ia, y q ue no lo po dran soslener, ny saben coino potlerse
valer veniendo I’a rm a d a del Turco, siendo los titulados y barones p or la
m a y o r parte cargados de lantas deudas q u a n to quasi vale su hazienda; y
V. Magd nos havia dado esperanca que nos descargaria de los mercaderes,
antes q ue veniessen los plazos y que no serviria el acceptar las lettras de
V. Magd sino por credilo; no lo deve haver podido hazer V. \ l a g d, por las
necessidades que en olras partes occurren, pero havra podido entender
por los Bilan^os, y lo q u e se ha escripto, que lo m ay o r necessidad esta
agora aqui, y vera lo poco que se saca de los expcdientes, y cobran los
mercaderes con sus despachos, que por manda do de V. Magd sc les ban
dado los tercios del dona tivo; cargar mas el Reyno seria ponerle en
manifesto peligro, como hartas vezes lo he significado a V. Magd y que
m uch os foraxidos nascen de qu e hay muclios, qu c por ser las cargas tan
grandes, no pueden vivir con Irabajo sin robar, que es gran cargo de'
consciencia; y no es bu en o Icomo V. Magd lo vee en Flandres] trailer los
vassallos a exlrema desperacion : bien se que aqui no po dr an hazer lo que
en Flandres, por ser el silo dilTerenle y lener V. Magd la m ar [sic) y que los
Franceses son lexos, ny es verissimil que si quisiessen hazer Turcos, pero
podrian por desperacion ponerse en cosa q u e aun q u e no les saliesse,
costaria caro antes qu e se remediasse, y lo que aqui se hiziesse podria
d a r occasion a olros motivos de Ualia y de olras partes : ny pucdo de xar
de dezir qu e son obligados los principes antreveer con su prudencia estas
cosas, para qu e haziendo officio de pad re con sus vassallos evilen lodo
lo que los pueda trah er a faltar a lo q ue deven. Suplico a V. Magd con
loda h u m il d ad y con el encarescimiento m ay o r q u e puedo sea servido
mirarlo, y m a n d a r a los del consejo de su hazienda que lo remedien, y
enliendan lo desle Reyno difTerentemenle que fasla agora, por que no
solo no se podran pagar las galeras, como lantas vezes lo he escripto [que
52
COU RESPON DANCE
qu a nd o nos devriamos servir délias no estaran a p un lo , ny la geilte de
gucrra ordinaria de a cavallo y de a pie, mas n y los olïiciales tampoco. y
m u ch o monos el d u q u s d ’Urbino los lieml ero s del Rey de Polonia, ny los
que lienen mercedes y ayudas de costa sobre este Reyno; y nos lian heclio
m ay o r dano de lo que yo podria escrivir po r el credilo, los loOm ducados
de que ay ud am os et dicho Senor don J ua n, por que dio su palabra que se
pagarian por lodo agosto de los dineros que havian de venir d’Espaiïa por
l’armada, y nos obligamos por respondienles los que V. Magd sabe, împor tu naronme, coino liazen agora los mcrcaderes, que les (liesse los despacbos
para executar los respondienles; m an dô m c V. Mag1' (|ue procurasse entretenerlos por lodo Oclubre, acabé con ellos de su voluntad esperassen fasta
agora con la esperança de la venida del correo, pero vienen al presente a
solicitai- la execucion con mu cba imp or tun id ad , y piden que se les liaga
juslicia, ny me qu ed a ya otro lerrnino, sino dezir que espero lo que trahera
Concha, y por no liaverse pagado ny cumplido, y porque lainbicn al tiempo
que se contaron los dineros no les querian dar obligacion sinon del
Sor don J u a n , y no tan del pagador como se les liavia ofrescido, tomaron
dende entonces so^pecha que los qu eri an engariar, la quai les ha crescido
con la dilacion de la paga, y esto de manera que ny aun 30m ducados que
dize cl Senor don J u a n liene inenesler haveinos podido fiai lai* con promctler
que se pagarian de los dineros que trahera el dicho Concha, ny aun con
dezir que espéra por lioras (50m ducados en galeras que afirman ser partidas
de Sicilia, por que ny créen que hay galeras ny dineros ny menos que se les
pagaria de los que viniessen, y en estos terniinos somos, (jue lo sienlo en
el aima, por q ue en solo el credito lenia esperança de podernos sostener,
la quai agora me van faltando con lo que veo por esta experiencia. y
teniendolo, de mala gana me embaraçava en lo que no es en mi mano c u m plir por que temia lo q u e ha succedido.
Estava el Se âor don J ua n en dexar aqui el d û q u e de Sassa 1 para entretener los Alemanes, que ya pienso no se po dr an despedir, pues los tenemor
1 (ïu i-IIb ald I I , d u c d 'U r b i n , né I« 2 a v r il 1514, m o r t à P esa ro le 2 9 s e p t e m b r e 1 5 7 i . II fut oapi• aine-géncral dos V énitiens et en s u i te d u St-Siégc. P h ilipp e II lui d o n n a le c o m m a n d e m e n t de ses
a r m é e s en Italie.
1 G o nzalvo de C o r d o u e , d u e de Sessa. Voir sa n o t i c e , t. IV’. p. 5 0 3 .
DU CARDINAL DE GRAÏNVELLE
53
menester si l’arm ad a viene, y a un los Espaiioles que estan en Sardina
de mas de la olra gente que se podrà, y sera forçoso en tal caso levantar a
estos Alemanes. se deven do lo servido lo q u e V. Magd por los despaclios
del Seiior don J u a n liavra en te nd id o; a mi parescer i’uera a proposito que
q u ed ara el duqu e, mas liarà dilticuldad en esto por haverlc dado V. 3Iagd
licencia, por que dize qu e si quisiera V. Magd que qu ed ara selo escriviera,
auu se esla Iractando sobre esto, y si el Duque, o, no quiere, o, no puede
q u e d a r ; yo dezia al Seiior don J u a n que el marques de Santa Cruz 1 podria
suplir a esto, pues es persona q u e tiene credito, y que liaviendo V. Magd
clegido para el govierno deste Heyno en mi ausencia, q u a n d o endu ve a
Roma al conclave, si no lo estorbara ser verano, y el (lever el y r con sus
galeras, verissimil es que V. iVlagd le confiarra esto, y mas, estase todavia
como digo tractando con el duque, y de lo que mas adelante se liiziere
adv ert ira el Senor don J u a n .
Manda V. Magd en las cartas qu e escrive al dicho Seiior don J ua n, y aun
en las q u e a mi me escrive, que no vaya a Espana d on Pedro Velazques 2
escrivano de racion, fundandolo sobre que este olïicio q ue tiene requiere
su presencia, y ya me pedia licencia para y r fasta Sicilia a to m a r su muger,
por que pueda despues servir con mas sossiego, y aliorrar de la costa que
se liaze teniendo dos casas : esta no se le podia negar, pero dize el Senor
don J u a n , que p or d a r cuenta a V.Magd de los gastos del arm ad a tiene nec;:ssidad que vaya con el, y qu e a no liailarse en Espana para esto, baria gran
faIta al servicio de V. Magd y suyo, y si V. Magd no tiene otra causa la quai
no puedo adivinar, por que no quiera q u e vaya, sino la de su olïicio
de escrivano de racion, como lia estado tantos aiios este olïicio sin dueno,
paresceme debaxo de emienda que lo podria estar por très, o, qua tro meses,
que como tiene dispusicion para liazer viage con diligencia, podria bolver
p o r la posta mandandos elo V. Magd, q ue aÿ buviesse acabado lo qu e al
servicio de V. Magd conviene.
Assi mismo me mand ô V. Magd en una carta suya a parte, que se lia
vuelto al présentante, como ordena que lediga mi parescer sobre la licencia
1 Le m a r q u i s J e S a n t a - C r u z , g é n é r a l îles galères de Naples, assista à lu bataille d e L ép an te. (D ocuin m to s m e d ito s , t. I l l, pp. 2 1 6 , 2 2 2 , 2 2 5.)
1 P e d r o V elasq uez, n o b le espagn ol, eilé d a n s le Voyaije de P h ilip p e I I , t. I, p. 20 , t. Il, p. 8!).
M
COKRESPOJN DANCE
qu e pide Carillo de Quesada ' p or y r a la corte de V. Magd a dar cuenla de si
si I’arm ad a del Turc o viene sobre este Reyno : yo liolgaria de tenerle aqui
y inuchos otros tales, pero por olra parte V. Magd sabe lo q u e passa, y q u e
le i mpulan que haya cargado sin razon a don Alonso Pimentel *;el dize qu e
no se hallara tal, y que no ha desseado ny dessea otra cosa sino que saiga
el dicho don Alonso m u y libre; dizenle que en Espana se hazen c ontra el
malos officios, v que dan quexas a V. Magd y que sino se purga, demas dela
mala opinion en q u e podria q u e d a r con V. Magd y sus ministros, qu e es lo
que el dize que mas se ntiria, no eslaria sin peligro adoquiere po r los
parientes y amigos del dicho don Alonzo, a‘ los quales el querria aclarar
q u e e n lo que prele nd en el no tiene culpa, y siendo assi paresceria debaxo
de emienda q ue se le haria agravio de no darle op o rtu n id a d para purgarse
con V. Magd, y con ellos, remettiendolo todo al prudenlissimo juy zio de
Vuestra Magestad.
Ayer llevo Dios al cielo don Her man do de Toledo* caslellano q ue fuo de
Sl-Elmo, m u y buen moco cuerdo y diestro cavallero, ama do de todos los
desta ciudad, y persona de quien en cosas de mas importancia pud iera
V. Magd recibir servicio, ha sido gran desastre, y que todos ban sentido, v
tanto mas que la causa de la muerte aya sido jostra y hcrida en el braco, no
tal que de principio sc temiesse tanto m a l : vivio so lo se ys di a s como V. i\Iagd
entendera, el castillo vaca q u e se puede tenor mas a merced que a cargo muv
importante al presente; tiene un h e rm a n o llamado don G a r c i a 4, capilan de
infanteria, m en o r q u e el de edad, aquien el S e n o r d o n J u a n ha dexado por
cabe^a de los Espafioles sacados deste tercio, que estan en T u n i s ; para este
cargo del castillo, es m uy bastante y sufficiente, y y en do la edad adelante
lo sera m as ; los servicios de los inuertos me fuer^an a que yo suplicque
a V. Magd hazerle esta merced, y los servicios qu e le m adr e haze de presente
a I Imperatriz, y tengo por cierlo que sera de todos m u y bien entendida y
de buen exemplo; dessealo mu ch o cl Senor don J u a n , y tanto mas que po r
1 Carillo d e Q uesad a (sic) Q u i x a d a ?
Alonso P i m e n t e l , no ble c s p a g n o l , q u i figure d a n s u n g r a n d n o m b r e de t o u r n o i s , deceits p a r
C n l v r t c , ct d a n s G o l l u t , col. 1 6 6 4 , 1661).
3 H e r m a n o d e T o l e d o , se cond fils d u d u e d ’Albc, cite d a n s Ca lvclc, t. 1, p. 1 5 ; t, II, p p . 9 0 , 91.
1 Don G a r c ia , en p itain e espngnol.
DU CARDINAL DE GRAÏNVELLE
m
Iiaver salido el defuncto en la jostra privada que martes passado liizo en el
parco, succedio este inconveniente, sin culp a de nadie, antes ha dado el
dicho Senor don J u a n con su exeniplo aninio a los cavalleros deste Reyno,
para q u e se exerciten en las armas, y eoniiençan darse a ello, lo quai no
hazia antes con q u a n to m uch os vezes sobre esto les havia predicado, y nianda d o p o n e r la tela en el parco anos ha. adon de solia estar para convidar los
a esto, y ya vienen algunos a exercitarse aun qu e no tantos como yo
querria. Gua rd e iNuestro Senor, etc.
XVI.
ANALYSE.
L e bruit s e
r c p a n d q u i “ le s T u r c s fon t d e s a r m e m e n t s c o n s i d é r a b l e s e t m e n a c e n t
d ’u n e i n v a s i o n le s c ô t e s d e N a p le s ; u n e p ar e ille te n ta tiv e se r a it d ’a u ta n t p l u s d é s a s ­
t r e u s e q u e par s u it e du d é l a b r e m e n t d e s f in a n c e s o n s e
t r o u v e à p e u p r é s b o i s d ’é ta l
d e l e u r o p p o s e r u n e r é s is t a n c e s é r i e u s e . L e s m a r c h a n d s r e f u s e n t d e faire d e s a v a n c e s ,
le s n o b l e s et s e i g n e u r s d o i v e n t p r e s q u e tous a utan t q u ’ils p o s s è d e n t , et un g r a n d n o m b r e
d e cito y en s,
incapab les d e
s u f li r e par l e u r
travail à l 'a c q u it t e m e n t d e s c h a r g e s qui
p è s e n t s u r e u x , s o n t o b l i g é s d e s e faire v o l e u r s d e g r a n d s c h e m i n s . O n n ’a pas à e r a i n d r e ,
il e s t vrai, q u ’ils i m it e n t les F l a m a n d s dai:s l e u r r é v o lt e , o u q u ’ils s e f a s s e n t T u r c s ;
m a i s ils p o u r r a ie n t f a c i l e m e n t s e la is se r e n t r a în e r par le d é s e s p o i r à q u e l q u e a c te d e
v i o l e n c e , d o n t les s u i t e s s e r a ie n t i n c a l c u l a b l e s . C ’e st le d e v o i r d 'u n s o u v e r a i n d e p r é ­
v e n i r d e p a r e i l s d é s o r d r e s et d e m a i n t e n i r , par le s p r o c é d é s d ’u n e a ffec tio n t o u t e p a te r ­
n e l l e , s e s s u j e t s d a n s le d e v o i r . Il est d o n c i n d i s p e n s a b l e q u e P h i l i p p e i n t i m e à son
C o n s e i l d e s fi n a n c e s l’o r d r e d e r e m é d i e r a u x vic e s d ’a d m i n i s tr a t i o n s i g n a l é s e t d ’imprK
m e r a u x a ffa ire s u n e m a r c h e to u t e d i f f é r e n t e ; c a r a u t r e m e n t il d e v i e n d r a i t i m p o s s i b l e
d e p a y e r , n o n s e u l e m e n t le s g a l è r e s q u i se t r o u v e r a i e n t h o r s d'état d e s e r v ir l o r s q u ’on
e n a u r a it le p l u s p r e s s a n t b e s o i n , m a i s les tr o u p e s o r d in a ir e s e t l e u r s o llic ie r s , le d u c
d ’U r b i n l u i - m è m e , les h é r it i e r s d u roi d e P o l o g n e e t to u s c e u x q u i o n t d e s g r atilîn atio n s
e t p e n s i o n s s u r le r o y a u m e d e N a p l e s .
CORRESPONDANCE
36
XVII.
LE
PRÉVÔT
M O R IL L O N
AU
CA R D IN A L
DE
GRANVELLE.
(Bibliothèque île Besançon. — Lettres diverses, t. I l , fol. 140-14 1, 156-157, 169-173, 176-177,
180-181, 188-189.)
..................., 2
m ars 1574.
Il n’y at aulcune apparence de meilleure conduite, aiant perdu le Comm e n d a do r Maior réputation q u ’il ne recouvrera facillemenl; car l’on at
opinion q u ’il fera pis q u e le duc d ’Albe. Tr o p bien q u ’il n’y at laulte de
paroles, que ne sont que p a r trop liabondantes, mais de peu de suite. Je
vouldroie que l’on n’heu l faicf celle fourbe au d u c d ’Arschot que j ’ay escript
de rn iè re m en t: cela dégouste fort les gens de bien. Le président Viglius se
soucie peu, ad ce q u e je puis veoir, des affaires; aussi il devient pesant et
al opinion d ’estre en sa dernière année, et pa rla n t lesse couler l’eaue de la
montaigne. Cependant les gens d u Co m m en d a d o r commencent à empiedter,
et n’y at nulle apparence d ’abolir le Conseil des Troubles, mais encores
e-saier de r emédier par les forces et armes, q u ’est mal possible sans argent;
et l’on tient p o u r u n e maxime ou q u e le Prince sera vaincu, ou que encores
q u ’il fust vainqueur, il sera bien aise de p r en d r e tel party que le Roy
vouldra. Par ainsi clémence d e m o u re bannie, sans tenir aulcun regard aux
âmes que se perdent, là où l’en n em y s’empatrone, que ne do rmira ad ce
p r in te m p s ; et Dieu doint que soions plus tost prestz que les aultres fois.
Ceulx d e s E s ta t z de B ra b a n t sont en continuelle communication, et tout
le debvoir que peult faire le Chancelier gasle plus, à son accoustumé, q u ’il
n ’advance. Touttefois, il dit assez au C o m m en da do r Maior, qui n ’at aussi
laulte de propoz. Sa santé est p o u r estre suspecte p o u r les raisons contenues
aux lettres de Voslre Ulrau Sgrie; et si le Ro y suivoit son conseil pour, en
cas de nécessité, tenir prest par le moyen que luy est miz en avant le suc­
cesseur, il ne feroit peu p o u r ce pays, que l’on mect en obly et gr an d
hazard. Et ne fault aux Françoys gr and force p o u r le conquerre, pu isque
les coraiges sont tanl aliénés, que le Roy, au boull de ix ans, ne pourveoit
DU CARDINAL DE GKANVELLE.
57
à la pacification et redressement des affaires et repoz de ses bons subjectz,
que sçavent que Vostre Jlline Sgrie at faict de grand z offices, et tant sont-ilz
plus marriz que nul faict ne suyl.
Les Vénitiens ont leur pa iem ent du Tu r c q , que les lient aussi suspendz.
Mons1' de Noircarmes est tel comme dit Vostre lllnie Sgrie, et changera
plus tost de vie qu e de condition. L’on l'attend icy et vouldroye q u ’il y fut;
car il ne sert que d ’empe sc hem en t là où il est, et vouldra que Don Fe rn an d e
se conduise selon sa façon de faire, de laquelle chascun se plainct. Il vad
bien q u e le Co m m en d a d o r Maior et son frère le congnoissenl.
J ’att en dr ay avec désir et en son temps ce que Vostre lllme Sg,iu recepvrat
d ’Espaigne. Elle at fort p r u d e m m e n t répond u el procédé, en ce q u e le Iloy
luy al escript et en la response q u ’elle at faict au Pape, digne de quelqu e
j o u r ven ir en lumière p ou r instruction des ministres, comm e en cas sem­
blable ilz ont de se c o n d u ir e ; et ne suis esbehi si ledit Pape l’estime el
louhe en secret : car il ne la sçauroit reprendre, et doibt désirer que tous
eeulx de qui il se sert fussent de semblable zèle, intention et loyaullé.
Son E x ce al escript un e fort amiable à Monsr de Saint-Bavon, disant que,
p o u r son indisposition et aullres considérations, il ne l’ose m a n d e r vers
luy, encoires q u ’il a bien affaire en cesle saison de son bon conseil p o u r les
affaires d ’Estat et de guerre, luy priant [car de ce terme use-il | de l’advertir
souvent de son advis s u r iceulx, el comme l’on p o u rra faire p o u r treuver
deniers J ’entendz qu e ledit sieur s'excuse, disant que le duc d ’Albc ne luy
al guerre c o m m u n ic q u é s u r le faict de guerre, persistant que comme il al
d e m a nd é au Boy d e s i r e déporté, et que Sa Majesté luy en at d on né espoir;
que Son E x ce luy veuille pe rm e ttr e de se retirer en que lque maison sienne
p o u r estre en plus de repoz. i nt e rp ré ta nt les autres considérations p o u r
lesquelles Son Excu dit le veult lesser icy estre, alliu de l’attacher avec
Monsr le duc d ’Arschot, qui at e mprins le go u ve rne m ent de cesle ville; que
me faict espérer que l’on luy donnera gens p ou r la garder.
Son Exce se contente peu de la response des Estatz. q u ’est quasi conforme
de tous les pays, q u e sont peu eontentz, véantz que l’on ne change de pied.
Ma intenant se veoid à quelle intention ceulx d ’Espaigne ont faict le
chasteaul d’Anvers, à sçavoir p ou r leur servir d ’une sh eure relraicte. Et
ainsi l’en lendent plusieurs.
L’on at publié des maridementz que les pavsantz. po ur ce que les
T
our
V.
'
S
CORRESPONDANCE
58
ennemis veuillent envayr le pays de plusieurs costelz, aient de mene r
leurs bledz, biens et bestial avec les fouraiges aux villes prochaines, que
l’on abbate les pontz, et emporte les fers des molins, et q u e les fouraiges,
q ue ne se polront emporter, soient bruslés Ce q u ’at fort estonné le peuple,
combien q u ’il ne s’entend qu e p o u r l’extresme nécessité, et qu e telle
provision sert p o u r d o n n e r crainte à l’ennemi. Mais cela ne sçavent
entendre ceulx de pardeçà entretenuz en si longue paix. Pleust à Dieu
que cest hyver le Com m en da do r Maior se fut emploié d’establir icelle :
mais il faict à crai nd re que ses desseings sont aultres.
Le Seigr don F e r n a n d e at occupé aucunes forteresses au pays de Waterland, fort à nostre advantaige et do mma ige des ennemiz, et sortit d ’Utrecht
le x x m e du moys passé pour faire nouvel exploict et bien important. Dieu
doint tel succès que sa grande valeu r mérite \
Tout ce pays at esté effraié à peu d’occasion, et je m ’esbahiz q u e l’on at si
peu d ’advertences. Du temps de Vostre lllmc Sglie l’on estoit plus vigilant
et mieulx paié. Vostre IIIme Sgrie verra ce que m ’escripvit Monsieur de
Champaigney ; depuis il s’est refroidi 5.
J e suis à peu de fraitz trop mieulx adverli, tenant correspondance à
Sa inct-Trond, co mm e je fis l’an 72, où l’on at fresches nouvelles de
Maestricht et de Liège à touttes heures, que ne sont ceulx d u gouverne­
m e n t ; ce que n’est excusable, puisque ceste faulte engendre g r an d mal.
Enfin ces belittres q ue nous ont tenu en peine plus de huict jours, ne
vaillent pas u n g coulp de p oi ng ; et touttefois l’on en at faict grand e
r u m e ur , et q u ’ilz estoyent plus de x i i i i ™ , y compris v m reyters, au lieu
qu'ilz ne sont poinct v m c chevaulx et x i i c piedtons mal en ordre. Le Comte
Lodovic. que les at conduict, et n’est fondé que sur traïsons et surprinses,
et de man de passaige au pays de Liège, que l’Evesque avec les Estatz luy
1 Cette o r d o n n a n c e d u 2 0 fév rie r 1574 ( » . st.) déf en d au ssi d ’a v o i r d es r e la tio n s avec l'e n nem i.
E lle a été i m p r i m é e clicz Manon, en f la m a n d ; le tex te français se t r o u v e d a n s le r e g i s t r e n° 58, fol. 305 ,
d e la C h a m b r e des Com ptes .
*
En ce q u i c o n c e r n e l’i n vas io n des E spagn ols d a n s le W a t c r l a n d , on p e u t c o n s u l te r le N icu w e
m ilita ire S p re ta to r de 1 8 4 8 , t. II, p. 4 0 ; C orrrspnndance do P h ilip p e I I , t. III, p. 174.
8 » Monsr , r e t i re z - v o u s v ers A r t o i s le p lu sto s l q u e v o u s p o u r r e z : c a r j ’e n t e n s q u e les e n n e m i s
» so nt p o u r p a s s e r la Meuse e t f o r t z , ce j o u r - i c y , et je vois t r è s m a u lv a isc prov ision en nos affaires.
» A t a n t , etc. D 'A n v e rs, le
x x i i i ''
de fcb v rie r . P e r r c n o t . » Voir ces pa r o le s citées p lus h a u t , page 4 7.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
39
ont courtoisement r e f u s é 1, disanlz puisqu'ils ne le veoient auctorisé par
l’E m p ir e p o u r con duire armé e pa r les terres d ’ic e l lu y , telle q u ’est celle de
Liège, il n ’y avoit p o u r q u o y luy d o n n e r passaige; et p ou r leur asseurance
ont levé six enseignes de piedtons. Je tiens q u e ledit Comte Lodovic at
d em a n d é le passaige p o u r nous amuser, attendant l’hissue de ses dessein*^
que luy sont failli de tous costelz; et je tiens q u ’il se gardera bien de passer
la rivière, et que ceste levée de boucliers luy p ou rra grefver p o u r faire
nouvelle empri nse à le s té prochaine, puisque son crédit sera consumé.
Plus sont à craindre les forces de mer q ue tirent vers Amsterdam p ou r
l’assiéger. iMaisSon Excellence, q u ’use d ’extrê me diligence en touttes choses,
ne dort et aura t temps p o u r ressembler ses gens et contreminer.
J ’envoie copie du traicté d ’entre le prince et Mondragon*. L’on peult veoir
comme il vad de la religion et en quel da n ger sont les âmes tant q u ’elles
seront soubs telle m a i n ; et de ce me plainctz-je q u e l’on tient si peu de
compte. Ledit Mondragon est retour né à Vlessinghes, p o u r ce que l’on ne
veut enten dr e à sa délivrance devant celle de Monsr de B o u s s u 5. Aulcuns
subtils pensent q u ’il ayt charge de tram er quelque appoinctemenl:, ce que
n ’at nulle apparence ad mon advis, puis q u ’il fault que cela viègne de plus
hault.
Monsr de Ville est c ommis au gouv erne men t de Malines, et le S 1 d’fnchy
à celluy de Louvain. Mais je tiens q u ’il ne sera besoing de tout cela et que
les premières nouvelles q u ’auro ns du coustel de Maestricht seront que les
ennemiz seront retirés, que les paysanlz, s’ilz estoyent conduictz comme
ilz debvroient p a r qu elques gens de guerre, debvoient avoir assommés
pièçà.
1 Ces l ettre s s o n t im p r i m é e s d a n s la Cnrresnaiulaitce de P h ilip p e / / , t. I II , pp. 27 et 28.
*
Cette c a p i t u l a t i o n , d a t é e du I!) f é v rier 157-i, es t r e p r o d u i t e dim s M k xo oç a, t. Il, p. 187, et d ans
la G ra n d e C hronique de H o lla n d e , t. Il , p. 2 7 t i , en la n g u e fran ç aise. P . Bon. liv. VI I , fol. ‘j v», et
NVag en aar, I. VI, p. 2 0 2 , en on t i m p r i m é le texte en lan g ue n é e r l a n d a i s e .
1 S elon les ternies d e cette c a p i t u l a t i o n , Mon drag on d e v a i t se c o n s t it u e r p r i s o n n i e r d u p r in c e
d 'O r a n g e , si e n d é a n s les d e u x m o is P h i l i p p e de M arn ix, Sr de Mont Slc- A Idego nd e , et q u e l q u e s a u t r e s
p e r s o n n a g e s n ’o b t e n a i e n t l e u r m ise en l i b e r té . Voir C orrespondance d u T a e ilu rn e ! t. III, p. 9(i. Le
G i a n d C o m m a n d e u r a y a n t p r o m is à la famille d e Bous su d ’é c h a n g e r ces p r i s o n n i e r s c o n t r e c«t a m ir a l,
M o n d rag o n ne p u t sa tis faire a u x con d itio ns posées d a n s la c a p i t u l a t i o n . Le p r i n c e d ’O r a n g e é c r iv it à
M o nd rag on des l ettre s p a r lesquelle s il lui r ap pela sa p aro le. Enfin M a rn ix fut m is en l ib e r té le 12 oc­
t o b r e , e t M ondragon lut d égagé d e sa par ole, sans se r e n d r e à F l e s s i n g u e , com m e le dit Morillon.
CORRESPONDANCE
60
XVIII.
LE CA R D IN A L DE G R A N V E L L E A DON JU AN D E ÇUNIG A.
tRritis li M u s e u m
— A d d it io n a l Ms. 2 8 5 8 8 , fol. 38.)
..
tü m ars 1574.
Muy m i n niteva es la que a V. S. 1. escriven de Venecia de la perdida
de Midelburg
y A ni m a *, a u n q u e lia (lias temiamos succederia assi; a la
gente de la lierra tengo laslima que con tailla fé, trabajo, y h a m b r e lia
soslenido socorro. Pe rd o n e Dios a los q u e con esperanças vanas ban eng anado S. Magd y differido el remedio. liartas vezcs cscrevi al seiïor Du q u e
dende el principio, que con el timor que luvieron aquellos estados del
p rim er casligo dévia no m u d a r la forma del govierno, q u e es ôpt ima para
la qualidad de aquella tierra, sino reformai’ el abuso y lo q u e era malo,
eslableciendo el autoridad de S. Magd, y con facilidad se pudiera hazer assi
en lo del general de los estados como en el govierno particular de las
tierras que lo tenian menesler, y no huviera replica. Envaneciaronse de
los prosperos successos, y enlendieron en otras casas, y pensaron que
qu a n d o q ue rri an lo mud ari an todo a su fantasia, y embar car on el Rey
con la opinion del gran provecho de las confiscaciones, y con d a r a
entender q u e con las alcavalas le liarian una renia perpetua con que
Fla nd es sola baria la gueria a F r a n ci a , que es loda vanidad, ni para lo q u e
prelendian se ban sabido d a r maria y lomar el tiempo y la occasion : y el
baver pensado eslablecer el hijo despues de si en aquel govierno lia sido
1 La ville de M id d e lb o u rg so r e n d i t le 2 2 février 1574. Voir, a u su je t d e ce siè g e ,
fol. 5 1 7 et s u i v . ; liv. VI I , fol. 4- e t 5 ;
P rin s te re r,
t. IV, p p . 3 0 0 et s u iv .;
H oynck
M endoça,
van
Papendreciit,
P.
B o n . liv. VI,
t. I I , pa r t. I l , p. 1 8 5 ;
G roen
van
t. I I , p p . 127 et s u i v ., 170 e t s u i v . ; C orrespondance de
G ranvclle, t. IV, p. 5!i'.l, (iOI, (iOi, (>14, G25, 0 0 5 , 0 7 1 , 1)81 ; Correspondance de P h ilip p e / 1, p. 5 5 5 ,
435, 441.
*
A r n c m u i d c fut c o m p r i s d a n s la ca p itu la tio n de M i d d r l b u u r g , d atée d u l'.l fév rier 1 5 7 4 , r e p r o ­
d u i t e en lang ue fra nçaise d a n s
M endoça,
t.
Il,
p. 187, et d a n s la G rande Chronique de l/o lla n d e , t.
p. 2 7 0 , et en la n g u e n m l a r d n i s c d a n s P. Bon, liv. \ II, fol. !» v°, et W
agenaah,
t. VI, p. 402 .
Il,
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
(it
nuestra extrema ru yn a, haviendole pueslo todo en mano do quc lia dado
la salida q u e vemos. En siete anos aquellos pueblos, no solo ban perdido
el iniedo con los continuos trabajos. rapinas, y mallratimientos; sino quo
viendo las desordenes, la poco cuenta q ue dcllos se tenia y ser governados.
y como ellos p retenden tiranizados de los qu e odiavan y aborrecian, sc ban
desesporado y obslinado y perdido al Rey el amor, figurandosse pues no se
(lava remedio a sus quexas, que procedia q u a n to se liazia de su volunlad y
q u e havian indignado contra ellos Su Magd, dandolos por hereges todos. y
rebeldes, que eran los titulos que los soldados y aun los criados de los
ministros davan indifl'erentemente a todos. El haver lieclio Su Magd m u d i a s
vezes deinostracion de (|uerer y r sin effecto, les lia dado opinion qu e proceden con ellos por engailos. La respuesta que dio Su Magd a los que
embiaron los estados a d a r sus quexas, y ver que ni lia venido en tanto
tiempo el perdo n, y qu e el Duque continua on liablar del x mo denario mas
de lo q u e co nvenia.y q ue lia tanto que ay esta el sefior Comendador Mayor
con quien esperavan q u e se acomodarian todas cosas, y no veen aun principio por no baverle correspondido de Espafia, liazc en los animos dosta
gente lo q u e V. S. I. puede pensar. Es menester, Senor mio, engariarlos por
su provoclio, y mostrar que tiene gran cuenta dcllos y los tiene en mu cho .
y que fia dellos, y liazer con csto lo quc le parecera q ue cumplo al servicio
del amo, y tratando con mu chos dellos pensaran sino se sigue su parecor,
q u e dellos ay quien lo da tal y lo passaran mejor, pero si voen otros
puestos en lo publico en los negocios tornan zelos, y si los que liasta aqui
lo ban liecbo mal son continuados en los cargos, cresceria el odio y desperacion, y pensaran que se aya de seguir siempre el camino errado del
Duque. Valiente se ha mostrado Julian Romero en tierra, y en lo poco
qu e navego para y r a acometer los enemigos, hizo y err o en la marincria,
pues fue a olios contra viento y contra la marea, y el liumo del artilleria le
cubria los enemigos, que a man o salva tiraron a su gente, y aun quieror»
dezir no se si es verdad, qu e en esta j or na da no mostro el valor que solia, y
que si el y los olros siguieran a Monsr de Glimes (que gouvernara mejor
q u e Julian) perdieramos menos y recibieran los enemigos mas dano, y
perdio Julian su navio, pero el se salvo sobre q u e dizen lo qu e les paresce,
y se puede enten de r la opinion que tienen de Sancho de Avila, de J ua n
Moreno y otros, y agora hablan de un Ysonca, que yo no conozco, que en
CORKESPONDANCE
una tierra de la marina principal queria sin dinero traer a palos marineros,
no qu erie ndo ellos dex ar sus inugeres y hijos sin provision por que murieran de hambre, y se alboroto la tierra, a d on de sino entrara la gente del
conde de Re u x suscederia peor, viendo tratar mal de palabra y de obras
p or un estrangero sus ciudadanos, y dcspues nos espantamos que nosirven
(o sirvun de mala gala gana), creo q u c lo mesmo y peor seria en Espana, y
dizen que este Ysonca en otras partes se ha havido asperamenle, y que es
m u v odiado, estos tales hazen aborrescer los que los emplean, y dello susceden mill males, y l orno a dezir qu e no se espanten si tralados mal in urm u ra n, por qu e lo haran a u n q u e sean tratados n m y bien, a u n q u e sea el
que los govierna el mas atentado del m undo. Pero ay esta differencia
que qu an do ay causa va el odio adelanle, qu a nd o no la ay no han dieho
corno se les passa de la fantasia seilaladamente qu a n d o los manlienen con
alegria. Haze m u y bien cl Sefior Com en da do r m a y o r de prevenirse, y todo
es menester a lo qu e veo de los avisos; pero p or demas es, como he escrito,
pensarlo llevar todo por la fuerca, por que digo que aun q u e vencidos y
reduzidos a esclavos no dur ara, y cessando la fuerca haran peor, y cl mantener la fuerca sera ruyiia de los otros reynos de S. Magd, y se po nd ra la
tierra de manera que jam a s podra a y u d a r a Su Magd, y holgaran de p e rdersse, y que todo se picrda por vengarsse a lo menos desta manera. y
q u a n d o vean la suya no la perdonaran. lean los tumultos que han suscitado
con sus senores naturales presentcs v quan peligrosos han sido, y como
ellos con su prudeneia lo ban r e n u d i a d o con castigo breve, y luego con la
clemencia, y procurarles bien y alegria, con que los han mantenido en
prosperidad y tanto amor, que el d u q u e Philippe domo con solos ellos los
Franceses, vincio treze balallas, bolvio en la silla de S. Pedro a Eugenio,
y con haver hecho tantas cosas con cl a m or de sus subditos, hizo tanta
Itazienda. q ue haviendo Carlo, su hijo, perdido muchas balallas y hazienda,
no han acabado IWaximiliano, y Philippo rey de Castilla, y el emper ado r
Carlo de gloriosa memoria. de agolar las riquezas y joyas que dexo el
dicbo d uqu e Philippo en su recamara, q u e gran parte ha aun hallado el
Rey N. S. y todo porque supo g an ar la voluntad y amo r de sus subditos, y
lenian cu yd ad o desto mesmo sus minislros, que qued aran tambicn lodos
ricos; a esto senor mio os menester mirar, y tomar para eslo el camino que
conviene. con que sacaran mas dcsla gente en gafumdolcs dulcemente que
DU CARDINAL DE C K A . W E L L E
po r la fuerca. No digo q u e de presente sacanin mu ch o po rq ue no pueden,
son r u y n a d o s y pe rdido el commercio, quo es su unico mantenimiento, pero
es me nest er m ir a r para adelante q ue no es pontilicado, sino hazienda here­
ditaria q ue passa a hijos, y es menester considerar en que se vera Esparia si
estos eslados vienen en m anos de otros, que lo veo eon gran dolor muy a
vispera dello, y tengo grandissima lastima y compassion al Senor Comenda d o r Mayor, aun qu e en lo q u e passa no liene culpa, sino quien le ha
dexado en m an o el negocio tan desperado de cura. Una esperanca me
qued a en la desventura de Midelburg, que se el dafio que suelen hazer a
los exercitos aun m u y ordenados, los sacos, quan to mas al del principe de
Oranges de Ingleses, Franceses, Alemanes, Escoceses, y de la tierra la meno r
parte sera la suya, y assi tendra poco con que sostener adelante, y los
que havran hecho su negocio procura ran de recogersse. y la rixa entre las
diversas naciones podr ia susceder tal qu e nos daria lmen juego. Pro cu re el
Senor C o m en da do r m a y o r entr e ellos division y diflidencia con b l and ur a,
con perdo nar, y gratificar algunos, que es el mejor camino que en este
caso presente se pued e tener. Escrivo lo que se me ol'rece, los dos hermanos
q ue son cuerdos, de mi locura pueden sacar algo que sirva, execulandolo
mcjor de lo q u e yo sabria pensar.
W ill.
ANALYSE.
M a u v a i s e s n o u v e l l e s : la p r ise d e M id d e lb o u r g e l d ’A r n e m u i d e , d o n t
p r é v u e . L e s s o l d a t s s u r t o u t s o n t à p l a i n d r e , par
s u it e
des
la p e r t e é iait
p r iv a tio n s q u ’ils o n t é té
o b l i g é s d ’e n d u r e r . Q u e D i e u p a r d o n n e à c e u x q u i o n t t r o m p é Sa M a j e sté e n la b e r ç a n t
d e v a i n e s e s p é r a n c e s e t e n d iffé r a n t l’e m p l o i d u r e m è d e . L e C a r d in a l a v a i t s o u v e n t
é c r it au d u c (d’A l b e ) d a n s le b u t d e l ’e n g a g e r à c o n s e r v e r la f o r m e é t a b lie d u g o u v e r ­
nem ent,
à n e pas s e m o n t r e r tr o p s é v è r e et à s e c o n t e n t e r d e faire d i s p a r a ît r e l e s
a b u s . J a m a i s il n e lui a r é p o n d u . Il a vait trop d e p r é s o m p t i o n , et 011 a m a l agi e n fai­
sant c ro ire au R o i q u ’il avait üram l in té rê t à c o n f i s q u e r les b i e n s , q u e p a r c e m o y e n le
(ii
CORRESPONDANCE
p a v s aurait s u d i s a m m e u l
p r o d u it d e fo n d s p o u r faire la c e a u x d é p e n s e s d e la g u e r i e
c o n t r e la F r a n c e , et le d u c
n ’a pas su s ’y
m e tt r e c e t te i d é e à e x é c u t i o n .
La
p r e n d r e d ’u n e
m an ière c o n v e n a b le pour
p e n s é e du d u e d e faire p a s s e r s o n (ils F r é d é r i c au
g o u v e r n e m e n t , a p r è s s o n d é p a r t, a é t é fatale au p ays. Il s ’e n est m a l tiré. E n t r c l e m p s ,
le s e x c è s et les d é s o r d r e s o n t
irrité le p e u p l e , q u i , d a n s s o n d é s e s p o i r , est d e v e n u
l ' e n n e m i d u R o i , p a r c e q u ’il s ’im a g in a it q u e tout s e faisait e n v e r t u d e s e s o r d r e s . O n a
a u s s i irrité la p o p u la tio n d ' u n e m a n i è r e e x t r a o r d in a ir e e n la fa isa n t p a s s e r p o u r un
ram assis,
com p o sé d'h érétiqu es
et d e r e b e l l e s , é p i i l i è t e s
que
les d o m e stiq u es
des
m i i i i s i n s et les s o l d a t s j e t t e n t à la tète d e tout l e m o n d e . S a M ajesté s'éta nt e n g a g é e à
*e r e n d r e a ux P a y s - B a s , s a n s a v o i r a c c o m p l i sa p r o m e s s e , le p e u p l e a cru q u e c ’était un
l e u r r e . La r é p o n s e q u ’e l l e a d o n n é e aux É t a t s , l o r s q u ’ils lui faisaient leu rs d o l é a n c e s ,
l'a b s e n c e d'u n ac te d ' a m n i s t i e , la p e r s i s t a n c e d e la part d u d u c à e x i g e r la p e r c e p t io n
(iu 1 0 ' d e r i e r ,
le retard
m is
à l’a r r i v é e
d e K e q u c s e n s , d o n t le p e u p l e a tten d a it le
m e i l l e u r r é s u l t a t ; t o u t e s c e s c i r c o n s t a n c e s o n t produ it le p lu s m a u v a i s e f lé t
sur
le
p e u p l e , c o m m e le Hoi p e u t fort b i e n s e l’i m a g i n e r . S i c e u x q u i s o n t a c t u e l l e m e n t d a n s
le pays s e son t r é v o l t é s , le m é c o n t e n t e m e n t a u g m e n t e e n c o r e . C ’est la m a u v a i s e v o ;e
su iv ie p a r le due. Julien Itom ero a in d ubitablem en t
m o n t r é d u c o u r a g e d a n s l’a r m é e
d e (erre, ruais s u r m e r il n'a pas é t é h e u r e u x . Il perdit so n n a v ir e c l e u t la vie s a u v e .
O n c r it iq u e a u s s i S a n c h o d ’A v i l a , J u a n M o r e n o e t d 'au tr e s p e r s o n n e s e n c o r e . Y s o n z a ,
q u e le C a r d in a l n e c o m m i t p o in t, v o u l u t faire m a r c h e r le s m a t e l o t s à c o u p s d e b â t o n ,
l o r s q u 'ils n e v o u l a i e n t pns a b a n d o n n e r l e u r s f e m m e s et e n fa n ts , p o u r n e pas les la is s e r
m o u r i r d e fa i m . S a n s l’a r r i v é e du c o m t e d e K œ u l x l'affaire aurait m al t o u r n é , l o r s q u e
l e | e u p l e se v oy ait ainsi m a lt r a it é par d e s p a r o le s et d e s \ o i e s d e fait d e la part d ’un
é t r a n g e r . O n peut a i n s i s e r e n d r e c o m p t e s'il y a b o n n e o u m a u v a i s e v o l o n t é . L e C a r d i ­
nal va p l u s lo in e n c o r e : il p e n s e q u e si les c h o s e s s e p a s s a ie n t ainsi e n E s p a g n e , il e n
se r a it d e m ê m e , c l pir e e n c o r e . O n dit a u s s i q u ' V s o n z a s ’e st e n o u t r e c o n d u i t b r u t a l e ­
m e n t a i ll e u r s , et q u ’il est d é t e s t é . C e s g e n s - l à s e font h a ïr par c e u x q u ’ils e m p l o i e n t . l>e là
a r r iv e n t tant d e m a l h e u r s . Il n ’y a d o n c pas lie u d e s ’é t o n n e r q u ’e n m altra itan t ainsi le s
g e n s , c e u x - c i m u r m u r e n i ; ils le font déjà q u a n d ils s o n t b ie n m e n é s . M ais il y a c e t te
d i f f é r e n c e , q u e lorsq u 'il y a d e s m o ti fs , la h a i n e est p lu s l o r le . L e C o m m a n d e u r ferait
m i e u x d e p r é v e n ir c e s i n c o n v é n i e n t s . Car il laut tout p r é v o ir , e t il faut é v ite r l'e m p lo i
d e la c o n tr a in t e , parce q u ' u n m o y e n s e m b l a b l e n e d u r e pas. En a g i s s a n t a in si, les g e n s
f e r o m p ir e et les a u t r e s p a j s du H oi s e r u in e r o n t . Ils p r é fé r e r o n t tout p e r d r e p o u r s e
v e n g e r au m o i n s d e c e l t e fa ç o n , q u a n d ils en t r o u v e r o n t l'o c c a sio n . V o y e z les tr o u b le s
déjà a r r iv é s m ê m e e n p r é s e n c e d e le u r s e i g n e u r . L e d u c P h i l i p p e ( l e B o n ) a v e c le u r
a id e d o m p t a la F r a n c e e n tr e iz e b a ta ille s. C e p r i n c e r en d it le S l - S : è g e à E u g è n e , a u g ­
m e n t a s e s p o s s e s s i o n s , p r o sp é r a
tant q u e ,
m algré
les p e r te s e s s u y é e s
par s o n
(ils
C h a r le s ( l e T é m é r a i r e ) , M a x im i l ie n et P h i l i p p e ( le B e a u ) , et l’e m p e r e u r C h a r l e s - Q u i n t
DU CARDINAL Dli GR ANVELLE
(»5
n ’o n t pu é p u i s e r l e s r i c h e s s e s , ni les j o y a u x ; c l to u te s c e s p o s s e s s i o n s o n t é t é r e c u e i l l i e s
par Sa M a je s t é . C ’é ta it le r é s u l t a t d e l ’a m o u r q u e lui p o r ta ien t s e s s u j e t s . L e s m i n i s t r e s
e u x - m ê m e s s ’e n r ic h i s s a i e n t . V o i l à à q u o i tou t do it a b o u tir par d e s v o i e s c o n v e n a b l e s .
D e c e l t e m a n i è r e o n tirera m e i l l e u r parti d e s s u j e ts en l e s c o n d u i s a n t p a r la d o u c e u r ,
au lie u d ’e m p l o y e r la force. L e C a r d in a l n e p e n s e pas q u e d a n s c e m o m e n t o n e n tirera
g r a n d ’c b o s c : ils s o n t t o u s r u i n é s , e t le c o m m e r c e , q u i faisait la p r in c ip a le b r a n c h e d e
l e u r e x i s t e n c e , e s t e n t i è r e m e n t p e r d u . C e p e n d a n t il faut e x a m i n e r l’a v e n i r , q u i n ’e s t pas
u n p o n tific a t, m a i s un b i e n h é r é d i t a i r e p a s s a n t a u x e n f a n t s . Il faut au s si c o n s i d é r e r c e
q u e l ’E s p a g n e d e v i e n d r a i t si c e s É ta t s t o m b e n t e n t r e d e s m a i n s é t r a n g è r e s , é v é n e m e n t
q u i e s t b i e n p r è s d e s e r é a lise r .
L e C o m m a n d e u r e s t à p l a i n d r e : sa p o s it io n e st le r ésultat d ' u n e m a u v a i s e situ a t io n ,
d o n t il a h é r i t é . N é a n m o i n s l e C a r d in a l a e n c o r e un e s p o i r . C'est q u ’il y aura à M id d e lb o u r g u n sa c , q u i e s t t o u j o u r s le d é s i r d e s a r m é e s , et à p lu s forte ra is o n c e l u i d e l’a r ­
m é e d u p r in c e d ’O r a n g e , c o m p o s é e d ’A n g l a i s , d ’A U e m a n d s , d e F ra n ça is e t d ’E c o s s a i s .
Il y e n a s a n s d o u t e q u i l e q u i tt e r o n t , et c e u x q u i
r e s te r o n t s e q u e r e l l e r o n t p e u t - ê t r e
e n t r e e u x . C e ci ferait n o t r e affaire. A c e t effet, le C o m m a n d e u r d o it tâ c h e r d ’y in tr o d u ir e
la d iv is io n et l e s d i s s i d e n c e s , d ’e m p l o y e r la
d o u c e u r , e n faisant v a lo ir l ’a m n i s t i e et
e n a c c o r d a n t d e s g r a t ific a tio n s à q u e l q u e s - u n s d ’e n t r e e u x . C ’est le m e i l l e u r c h e m i n à
su iv re en ce m o m e n t.
XIX.
L E C A R D IN A L D E G R A N V E L L E A DO N JU A N D E ÇUN IG A.
(British Museum — Additional Ms. 38I5K8, fol. 40.)
.................. . 2 2 m a r s 1574.
Beso cien mil vezes las manos a V. S. L, y al Sefior Com en da dor Mayor
po r la merced q ue me hazen, de por esla via d a rm e parle tan particular
del miserable estado presente de lo de Flandes. Dias ha qu e lo temo aun
peor como lo he escrito; pluguiera a Dios fuera el dicho Sefior Com endador
Mayor luego q u a n d o yo le daria prissa, y antes que acabaran los qu e alia
estavan de ru yn arl o todo, y qu e de Espafia correspondieran y lo quisieran
T ome V.
9
66
CORRESPONDANCE
entc nde r como conviene Pordone Dios a los que tail malamenle lian
enganado el Rey y indinadole contra mu chos buenos, pintandolos todos
ruynes por c ub ri r sus faltas, con q ue han pr ocurado de hazerlos tales,
quales los pintaron. Quexonie de Hopperus, que p or complazer y pensar
hazer su negocio. y tener parte en los confiscaciones por man o de los que
las tratavan, no aya con la fuerca y vivez q u e devia, hecho los officios que
devia, y q u e le han m uch as vezes acordado para desenganar a Su Mag1,
y representado los inconvinientes en que se ve n a sino m u d av a n la forma
de aquel govierno. No me espanto de las condiciones q u e pide el Duque
Darscot. ni de la difficultad que pone su herniano en lo que le mandavan
levantar gente, ni de lo que piden las villas antes que q u ere r acceptar
guarnicion. a u n q u e vean y confTiessen que sin acceptai las son perdidas.
p or qu e temen los exemplos passados, v como Su Mag 1 no corresponde ni
ay inemon'a de conceder al Sefior Comendador m ay o r autoridad de darles
satisfacion, y han tornado opinion que el Serior Comendador Mayor liene
inandalo y voluntad de seguir las inslrucliones y informaciones que
piensan, el Sr Du q u e y los suyos le han dado, ni se fian, ni dexaran de
pe rd er el a m or y devocion, quo es lo que mas he teinido siempre, y tantas
vezes proteslado que sino se cobra la voluntad de los vasallos, a u nq ue
embien 2()m Espanoles, no haran nada a u n q u e lo huviesse ya allanado todo,
de q ue nos vemos m u y lexos, antes mas en vispera de perdersse todo.
No seria remedio para lo que al presente se ofresce servirsse por cavalleria
de los pensionarios, a los quales se deve que han servido m u y mal, y hecho
poco menos dano que los enemigos, y son lexos, ni ay q u e liar dellos.
De los obispos vezinos seria mejo r toma r gente si los han tratado bien;
hablan de cavallos de Baviera, es lexos y ay en aquella parte bien pocos y
no tan buenos : y todavia sino ay cavallos mal podra venir la Infanteria
alemana, que la desbarataran el Palatino y otros, antes que lleguen al Rhin,
o antes que le passen : si los vasallos tuviessen amor, temerian poco quanto
en socorro de su h e rm a n o puede hazer el Conde Ludovico; pero pierden
cada dia mas el amor, y no lo quieren remedial- por las vias que para esto
convendria tomar, ni quieren creer; no se q u e mas me diga. creo que
Monsr de Champ ag ney mi herm an o hara lo que pudiere en lo que le m a n daren, y que dara razon de lo que no podra hazer, o de que no se podra
encargar, porque no haziendolo haria m u y mal, ni meresceria los favores
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
67
que Su Ex" le liaze. Escrivioine 15 dias ha Monsr de Vergy, Governador
del condado de Borgoila. que Monsr de Ihon q ue tiene cargo en aquellas
fronteras de Francia por el Rev de Francia, havia desbaratado la gente que
levanlava Monsr de Tiche po r cl Conde Ludovico, d u d a n d o que se ju ntaria
con los Uguenotes contra el Rey su am o ; no se si le pesara qu a n d o sepa
que era para el Conde Ludovico. Buelvo con esta el escrito del Coronel
Mondragon, y no se que me diga mas sino rogar a Dios que ponga su santa
mano en todo que bien es menester, y tengo harta laslima al Senor Comendad or may or , a quien si dieran en llegando la autoridad q u e devia haver,
el invierno pud iera haver ganado las voluntades, que para su a y ud a valiera
mas que quanta gente le pudicra n embiar. Aviso a V. S. I., q u e Dios ha
cerrado el passo para gente del condado de Borgoiia, por la falta que ay de
pan y vino, m a y o r que 110 ha tenido en cicn afios, y tanlo que lo que valia
de ordinario ocho, se vende a ochenla; es gran laslima, y se quex an infinito
de la gente qu e ha acomp an ad o al S' Du qu e Dalva.
XIX.
A N ALYSE.
( î r a n v c l l c r e m c r c i c l ' a m b a s s a d e u r «les r e n s e i g n e m e n t ' q u ’il lui a d o n n é s s u r la m a u ­
v a i s e situai ion d e la F l a n d r e , et il c r a in t b e a u c o u p q u ’e l l e n e s ' a g g r a v e e n c o r e . P l û t à
D i e u q u e le C o m m a n d e u r y e ù l é té p l u s iôl, c o m m e il l’avait s o u h a i t é . Q u e D i e u p a r ­
d o n n e a u s s i à c e u x q u i o n t si in i'c lia n in ic n i agi e n v e r s le U o i , e n l ’e x c i t a n t c o n t r e b e a u ­
c o u p d e b o n n e s g e n s , e n lui faisant c ro ire q u e to u t le m o n d e e st m a u v a i s , p o u r c a c h e r
l e u r s p r o p r e s fa u te s. Il s e p la in t b e a u c o u p d e la c o n d u i t e d ’I I o p p e r u s , q u i p o u r c o m ­
p la ire e t d a n s le b u t d e faire s e s alla ire s, p r e n d u n e part d a n s le s c o n f i s c a t i o n s par l 'in ­
t e r m é d i a ir e d e c e u x q u i le s m a n i e n t . C e c o n s e i l l e r n ’a p a s n o n p l u s te n u c o m p t e d e c e
q u ’il aurait d û faire po u r d é t r o m p e r Sa M a jesté .
Il n e s ’é t o n n e pas d e s c o n d i t i o n s p o s é e s pa r le d u c d ' A c r s c h u i , ni d e s d i f f i c u lt é s faites
par son frère au sujet d e s o r d r e s q u i lui o n t é t é d o n n é s p o u r l e v e r d e s h o m m e s , ni d e
c e q u e d e m a n d e n t le s v ille s en r c f i o u u l d e s garnisons, q u o i q u ' e l l e s s'a p e r ç o iv e n t d e l e u r
CORRESPONDANCE
68
p e r le sa n s e e s e c o u r s ,
par s u it e d e c e q u i s’e s t p a s sé . C o m m e Sa M a j e s t é n ’a pas
a u t o r i s é le C o m m a n d e u r à l e u r d o n n e r s a l i s f a c l i o n , e ll e s
ont pensé
q u e c elu i-ci a
o r d r e d ’a gir e n v e rtu d e s in s t r u c t i o n s d o n n é e s au d u c d ’A l b e e t d e s s i e n s . D è s lors
e l l e s n'on t a u c u n e c o n f i a n c e ; e l l e s n ’o n t p lu s d e d é v o u e m e n t . C ’e s t c e q u e le C ar d in al
a t o u jo u r s c ra in t.
S i 011 n e g a g n e pas l’a m o u r par la d o u c e u r , tou t se r a b i e n t ô t p e r d u .
Il
n e se rait pas c o n v e n a b l e d e s e s e r v ir d ’u n e c a v a le r ie c o m p o s é e d e p e n s io n n a i r e s ,
p a r c e q u ’ils o n t r e n d u d e m a u v a i s s e r v ic e s e t fait p r e s q u e a u ta n t d e m a l q u e l ’e n n e m i .
O n n e p eut a v o i r a u c u n e c o n f i a n c e e n c e s g e n s . M i e u x v a u d r a it p r e n d r e le s so ld a ts
chez
le s é v ê q u e s d u v o i s i n a g e , s ’ils s o n t b ie n
traités.
On
p ar le a u s s i d e c h e v a u x
d e B a v i è r e . C ’e st b ie n l o i n ; il y e n a p e u d a n s c e p a y s ; ils y so n t rares e t pas d e s m e i l ­
leu rs. E n o u tr e , s ’il n ’y a pas d e c h e v a u x , l ’in f a n t e r ie a l l e m a n d e n e se r v ir a à r i e n .
A v a n t d ’arriver a u R h in e l l e se r a d é fa ite par le P a la tin . Si les s u j e t s é t a ie n t fi d è le s , il
n'y aurait pas l ie u d e c r a i n d r e le s s e c o u r s e n v o y é s au c o m t e L o u i s d e N a s s a u par son
fr èr e; m a is c h a q u e j o u r ils p e r d e n t d e l e u r a t t a c h e m e n t .
L e s e i g n e u r d e C h a m p a g n e y fera to u t c e q u ’o n lui o r d o n n e r a , e t il ren dra c o m p t e d e
t o u t c e q u ’il aura e x é c u t é .
M
d e V e r g y , g o u v e r n e u r d e B o u r g o g n e , a é c r it il y a q u i n z e j o u r s q u e M. d e H io n
e st c h a r g é d e g a r d e r les f r o n tiè r e s au n o m d u roi d e F r a n c e , e t q u e l e s t r o u p e s l e v é e s
pour
le c o m p t e d e L o u i s d e N a s s a u o n t é t é d i s l o q u é e s .
f u s s e n t jo in te s a u x
Il
c r a ig n a it q u ’e ll e s
ne se
H u g u e n o t s c o n t r e le B o i s o n m a î tr e . L e C ar d in al p e n s e q u ’il le
r e g r ette ra p l u s tard.
Il
n ’a pas reçu l ’é cr it d e .M on td ragon , et il a g r a n d e p itié d e l l e q u e s e n s q u i n ’a pas
t o u te l'a utorité n é c e s s a i r e . M ie u x v a u d r a i t lui d o n n e r c e l t e autor ité q u e d e lui e n v o y e r
tou le s c e s t r o u p e s .
L e p a s sa g e d e c e l l e s - c i e s t f e r m é d u c ô t é d e la B o u r g o g n e , par s u it e d u m a n q u e d e
pain et d e v i n , d o n t la d is e t t e n ’a j a m a i s é t é si g r a n d e d e p u i s u n s i è c l e . C e q u i s e v e n ­
dait à 8 se v e n d a c t u e l l e m e n t à raiso n d e 8 0 .
L e s g e n s q u i o n t a c c o m p a g n é le d u c d ’A l b e se p la i g n e n t b e a u c o u p d e lui.
DU CARDINAL DE GR ANVELLE
61»
XX.
G U IL L A U M E D E HAV1ÈRE 1 AU CAIIDl.NAL D E G K A N V E L L E .
(Bibliothèque royale de Bruxelles. — Ms. n» Ü475, fol. 568-36J.)
Châ te au tic L a m l s h u t , 5 a v r i l 1 5 7 i .
Salutem et amicitiae nostrae studia atque ollicia paratissima.
Licet imper dilectum nobis ac fidelemstabuli noslri præfectum. Joannern
P e tru m Givarra, aliquot cq u o ru m nobis ex regno a d d u c e n d o r u m causa.
Neapolim ablegaverimus, cujus reditum in dies expeclamus, cum tarnen
a d b u c binos equulos ejusdem generis per sincere nobis dilectum ac fidelem
Ludovicum W els eru m , capitaneum, sub coinite Lotlronio 2 militantem,
nobis comparari ac prima occasione ad nos transinitli atil adduci jusserimus, rogamus q u o q u e Dilectionem Vestram el Reverendissimatn. llluslriniam ut ei noslro nom ine concedere velit, quo iidem absque impe dim en to
traduci, aut per e u m transmilti possint. Id q uo d cu pim us omni alia occa­
sione nobis oblata erga eamdem Dil. Vestram q u a m atnice promereri. Cui
omnia p r e c a m u r fausta ac fœlicia.
Postscriplum. Cum bas j a m sigillo noslro munitas vidissemus quid in
scribendo excidisset prius m em or ia , revocavimus utpole quid Dilectioni
Vestrae [ob varium et m an s u e l u m illud animal polynomon] deberemus
con su ltu m indicare vi debatur, etenim res ipsa postulat ut illi indicernus
q u a m gr at um imo gralissimutn m u n u s nobis e ra t cum ante hac in Euro pa
a nullo u n q u a m visum nec veteri memoria co m m e n d at u m nobis persuade amus : qua de re ingentes ac plurimas Dilectioni Vestrae gratias agimus
s im ul que si q ui d illi gr atu m fore in nostris p artibus o p p o r t u n u m videbitur,
pa r pari relaturos pollicemur. His bene valare D. V. ju be m us .
1 Voir sa n o tice p lu s h a u l , p. 2 7 , n o te 2 .
s Le co m te A lb e r ic <Ic L o d r o n , c o m m a n d a n t d ’u n r é g i m e n t île I l a u t s - A l l c m a n d s . V o i r t. I l , p. 5 8 4 ,
et t. IV, p. 2 8.
70
CORRESPONDANCE
XXI.
L E CA R D IN A L D E U K A N V E L L E A D O N JU A N D E CUN IG A.
(lii ilish Museum. — Additional Ms. 2Ko88, Col. 42.)
................. .. H
a v r i l 1574.
Las cartas que vienen de Flandes de 16. no nos dan aun ni ng un a buen a
nu ev a; no se lo qu e se pienssan en Espafia, no quieren creer sino q u a n d o
no ay mas rcmedio. Dame alguna esperan<;a b u en a q u an to a Io del Conde
Ludovico haver el tardado tanto cerca de la Mossa sin poder passar, y que
aigunas se van despues de la rota que ban avido, q u e ha sido poca cosa.
Pero los de Monsr de Sedan Franceses me ponen en cuidado si los t u m u l tos de la Francia no dan causa a que buelvan a tras. Pero el Principe de
Oranges haze po r su parte lo que puede bolviendo sus fuer^as de m ar
hazia Holanda, y paresce qu e quiere apret ar Amsterdam. Hazen en Roterda m una manera de galeras q u e correran p or los canales, y daran trabajo
y assi mismo lo que cresce d e g e n te y provision q u e haze en S,e-G ertrudemb e rg , de d ond e correra fasta Enve rs, y Liera y toda la Campinia y Langstrate, que cortara camino a los nuestros que q u e rr a n y r a Utrecht y A m ­
sterdam que tienen gran falla de viluallas; lo q u e mas temo de todo es que
se pierde a gran passo la religion, y el descontento de todos los subditos
qu e pienlen de todo el a m o r y voluntad al Rey, pareciendoles q u e los dessuampara de todo p u n t o , y que los quiere mal a persuasion del D u q u e ; y
que el Sr Com m en d a d o r Maior segun pienssan se govierna por las instrucciones que el Du que le ha d a d o , pues ni ay memoria del p e r d o n , que
verna ya tarde ni se quita el Consejo de tro ub le s, ni los aseguran contra
ei x mo denario o alcavalas. Gritan de nuevo al cielo contra los Espaiioles
que son desregladissimos, y hazen grandes insolencias, y so color que falla
paga pienssan q u e todo les es licilo, y sin paga mal se disciplinan, pero
coino tantos anos debaxo del Duq ue han mal tratado y con gran insolencia los subditos, sin memoria de casligo, crece el odio a la nacion, lo qual
entendiendo los Alemanes, Ingleses, Franceses q u e favorescen al Principe
DU CARDINAL 1)E GRANVELLE.
71
de Oranges por valerse de los naturales de a<[ uel Ios estados. Dizen qu e
han co njurado y especialmente principes de Alemania, a p r o cu r a r que de
grado o por fuerca salgan los Espanoles, y desto gustan los de la t ie r ra , y
si a eslo se viniesse pensarian los estrangeros que alcanQarian facilmente
q ua nt o quisiessen. y sabe Dios como yria entonces lodo, y si la religion se
acabaria de perder con lo qu e el Principe de Oranges y los suyos lo procurarian. Piden los estados de Brabante al Senor Co m m en da do r Maior que
puedan e m bi a r pe rso na , a representar al Rey el miserable estado en que
se ballan, para qu e o con s i i presencia o como le paresciere de remedio a
tantos males. Y S. Exc" les responde que quiere saber quien quieren embiar
y con qu e instruccion, y q ue el lia liecho los ollicios necessarios; y yo me
acuer do que lo que escrevi dende el principio fue que el Sr Com men da do r
Maior en llegando avisasse de como lo havia ballado lodo, y como lo de la
liazienda y lo que se devia, po rq ue de la falta quedasse descargado, creo
que lo havra liecho, y yo no se ya que me diga mas, porque si Dios con
milagro no se lo haze, ya no veo por via bum an a remedio po r haver lardado tanlo, y no aprovecha ante vor, ni qu an to se escrive mal lo en lie nden a lo que veo en Espaiia; y podemos dar lo de Flandes y el Sefior Comm e n d a d o r Maior 'que yo siento inlinito) por perd ido , y no cs por manera
de dezir sino que a>si lo entieixlo. y que holgaran los de la tierra de perdersse, p or que les paresce qu e son menospreciados y odiados, y que estrangeros lo hazen todo, y que de .»olos estrangeros se fia aquel govierno Mala
cosa es q u a n d o subdilos lienen eslas opiniones a u n q u e falsa»; y fasla que
los d e s e n g a n e n , y que se les tonieii a ga nar las voluntades, en peligroso
eslado se esla, ni fuercas lo pueden remedial-, y mas teniendo los vezinos
q ue tienen para ser favorescidos dellos. y S. Magd tan l e x o s , y si aquello
se pierde, aparejemonos para ver poco despues cosas en Italia de mala
digestion, contra las quales no es poco freno loner el Rey los estados de
Flandes, no plegue lo veamos qu e harto lo temo, pues j u r o a V. S I. que
no suelo teiner mucha s vezes sin causa. Guarde, etc.
Dize el Sr Don J u a n que se embarcara mariana, no se si lo podra hazer;
ha yd o a m er e n d ar a Pogio Real, y partio tan presto despues de comer con
el Sr D u q u e de Sesa q u e no le he podido alcancar para darle las buenas
Pascuas, y por esto le he embiado la carta de Olguin a d on de esla, para que
la viessen amhos con mi parescer.
T2
COKKESPOiNDAINCE
Monsr de Norcarmes inurio en Utrecht, a 5 del mes passade. Dios le
perdone. Si muri era sobre Mons no perdiera nada en ello Su Magd. Quando
mas le favorescia el D u q u e escrivia letras infernales contra el D uqu e, y la
forma del go vierno; quiça tienen algunas en Espana ; yo podria mostrar
algunas, etc.
XXI.
ANALYSE.
Les lettres ven u es des Pa^s-Ras ne ilonnent a u c u n e n ou velle. Le Cardinal ne peut
s ’im agin er à quoi l’on pen se en E sp agn e. On y songera lorsqu’il n’y aura plus rien à
Caire. C ependant il a q u e lq u e espoir par suite du retard m is par le co m te L ouis à pas­
ser la Meuse. N o m b r e de so ld a is l’aba n d on n en t d ep u is la déroute qui a été d e peu
d'importance. Mais les troupes françaises de >1. de Sedan l’in q u ièten t, si les troubles
de la France ne l’o b lig e n t pas à rebrousser ch e m in . Le prince d ’O range dirige ses forces
de mer vers la Hollande el va serrer de près A m sterd am . A Rotterdam on construit une
esp èce de bateaux destin és aux canaux et qui don n eron t de l’embarras. Les en n e m is
augm entent le n o m b r e d e leurs troupes et font d es provisions à G e e r tr u id e n b e r g , d ’où
ils iront ju s q u ’à A n vers et L ie r r e , dans toute la Cam pine et L a n geslrael; ainsi ils
couperont le ch e m in à nos troupes, qui voudraient se rendre à Utreeht et à A m sterd am .
Le Cardinal craini surtout la perte d e la religion e l le m é co n ten tem en t d es s u j e t s , qui
perdent l’a m o u r et le d év o u em e n t dus au R o i, en croyant q u ’il les aba n do n ne c o m ­
p lè t e m e n t, et q u ’il leur en veut, par suite des co n seils du duc d'A lbe. Ils sont persua­
dés aussi q u e le C o m m a n d e u r g o u v ern e d'après les instructions dud it duc. Le pardon
viendra trop ta r d , el le Conseil des troubles fonctionne toujours. T o u t le m o n d e
se plaint des excès des E sp agn ols et d e leurs in so len ces. C eux-ci se plaignent, d e leur
côté, du défaut de p a y e , et se croient tout permis. Ils n ’ont plus au cu n e discipline
depuis les tolérances du duc d ’Albe. La nation est toujours détestée de plus en plus. Ces
désordres étant co n n u s des A l l e m a n d s , des A nglais et des F r a n ça is, ceux-ci protègent
le prince d'O range. Dans le but d e gagn er les habitants de ces E tats, ils disent qu'ils
ont conjuré sp écialem e nt des prin ces d ’A lle m a g n e de faire partir les E spa gn o ls de bon
gré ou par la loree; ce qui fait p articulièrem ent plaisir aux habitants de ces pays. Si
ceci arrivait, ils feraient ce que bon leur sem b lerait; el Dieu sait ce qui en résulterait;
Dl) CARDINAL DE GRANVELLE.
cl si
la religion
n e serait
pus c o m p lè te m e n t p erd u e
par l’intervention du
75
prince
d'O range et des siens.
L es Etats d e Brabant d e m a n d e n t nu Grand C o m m a n d eu r la perm ission d ’en v o y er
au Roi un d é lé g u é , ch a rg é de lui faire connaître leur situation, et d'y porter rem èd e.
S. E. d e m a n d e d e lui in d iq u er le n om de cette p erso n n e et ses in structions. Il a aussi
informé lesdits États de ses propres dém arches. Le Cardinal se rap p elle les ordres
donn és par le Roi à S. E. tendant à lui faire co nn a ître, dès son arrivée aux P a y s-B a s,
le l a t dans lequel ces p rov in ces se trouvent, leur élat financier et les rem èd es à em p lo yer .
Il n e se souvient plu s des autres points. Sans un miracle d e D i e u , il n ’y a pas m oyen
d e r e m é d ier aux m aux par suite d e s longs retards. T o u t ce qui a été écrit à c e sujet en
E sp a gn e y a é lé mal c o m p r i s , et on peut regarder les P a y s-B a s c o m m e perd us ainsi
q u e S. E. C’est ce qui serait à regreller. Convaincus d ’étre détestés, les habitants de
ces provinces sont en ch a n té s d e suivre cette v o ie ; m a lh e u r e u se m e n t il n’v a pas de
rem èd e possible par suite d e l'intervention des étrangers en leur faveur et de l’é lo ig n e m en t du Roi. Q uand ce pays sera perdu, les m au v aises a flaires co m m en ce ro n t en Italie.
P lût à Dieu q u ’il n ’en soit pas a in s i, m ais les craintes sont bien fondées à ce sujet.
D o n Juan se propose d e s ’em b a rq u er dem ain . Le Cardinal ignore s ’il pourra le faire.
Le prince est allé d în e r à P o g g io r e a le , et pendant l’après-diner il est parti en c o m p a ­
g n ie d u du c de S e s s a ; d e sorte q u e le Cardinal n ’a pas pu lui présenter ses souhaits à
l’occasion des fêles d e Pâq ues.
M. d e INoircarmes est d é c é d é à L t r e c h t , le 5 du m ois d e rnier. S ’il était m ort avant
d ’aller à M o n s, S . M. n ’y aurait rien perdu ; car, lo rsque le d u c d ’A lb e le favorisait le
m ie u x p ossib le, il écrivait d es lettres dirigées contre lui et contre l’administration. Peu têtre y a-t-il e n c o r e de ces missives en Espagne ; le Cardinal pourrait en m ontrer é g a le ­
m ent.
T
ome
V.
74
CORRESPONDANCE
XXII.
L E CA R D IN A L D E G R A N V E L L E AU P R I N C E
d ’ü
R B IN ‘ .
(Archives d ’Urbino. — Div. Ct., I. I , liasse cxxi.)
N a p l e s , 2 5 a v r il 1571.
Trovomi con le doe leltere di V. E x a. et la secunda m ’ha dato hoggi il
Gallo a chi ho detto a bocca quel che passa qu an to a Micael Angelo Tar entino, di che ho informato molto fa Gio. Fe rra nt e Cuniga, qu a n d o me deide
la prim a di V. Exc., pr om et ten dom e di darn e conto particular ad Essa; per
dove harà potuto intendere che q ua nt o se ha fatto nel negocio del detto
Ta rentino è fatto con havere principal mira anzi tulto al servitio et contento
délia Serenissima Principessa, la quale riverisco come devo et desidero il
suo contento et sodisfattione q u a nt o chi si vole in questo m u n d o ; et tanlo
più vedendo q u a n to i chara a V. E x \ la quale puô essere certa che la detta
Serenissima sera da me servita et honorala q u an to puô desiderare. Si come
V. E x “. me trovera p ro m p to a servirla co rdialmente in ogni occasione.
XX II.
ANALYSE.
L e Cardinal a reçu les d eu x lettres. Il a dit à un Français de vive voix tout ce qui
co n c e r n e M ie h e l-A n g e d e T aren te. Il en a inform é en suite Jea n-F erdinand d e Ç u n in g a ,
et il en rendra co m p te à S on E xc ellen c e. D e cette m an ière elle aura pu se convaincre
q u e tout ce qui a été fait à propos de l’affaire dudit perso nn a ge de T arente a principa­
le m e n t pour but le bon plaisir de la S érén issim e P rin cesse.
1 G ui d ’Ubaldo de la R o v c r i , q u i a b d i q u a so n d u c h é ct co n s erv a ainsi le t i t re d e p r i n c e .
DU CARDINAL DE GR AN VELLE.
75
XXIII.
l ’i m p é r a t r i c e
m a r ie
au
c a r d in a l
DE GRANVELLE.
( Hibliothéque royale de Bruxelles. — Manuscrit n° 9 47 3 , fol 586.)
V i e n n e , 2S a v r i l 1 8 74 .
R° in Christo P a d r e S e n 01' Card 1 nuostro caro y amado amygo. Haviendo
entendido q ue van ay dos frayles de Sl Francisco p o r negocios de algunos
monesterios suy os, y syendo yo m uy devota de su h o r d e n , holgariamos
huviessen bu en a y breve expe dic ion , y ha vemos qu erido en co m e n d a r os
los pidiendo os m u y afîectuosemente los faborescais en lo q u e pr etenden
que rescibiremos en ello s y n g u la r contentamiento de vuestra R “ persona
que Nuestro-Senor tenga su continua guarda.
XXIII.
A N A L Y S E.
L'Impératrice r e c o m m a n d e à («ranvelle les d eux frères d e S t- F r a n ç o is , chargés de
protéger les intérêts de leur ordre.
CORRESPONDANCE
76
XXIV.
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU CA R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(Bibliothèque de Besançon. — Lettres diver ses, t. I l , fol. 150, 157.)
B r u x e l l e s , 2 6 av ril 1674.
Vostre lllme Sgrie a u ra t jà enten du l’h eu reu x succès q u e nous gens ont
heu le xiine de ce mois contre les ennemiz à i\loucke ', u n g villaige deçà
Niewmeghe, près de la rivière, au devant de C u i y k e e t d e la Grave, où ilz
s’estoyent tranchisés et avoient force vivres de Clèves et Julliers, et les
nostres peu, qui tacharent de les tirer hors de leur fort, faignantz de fuyr.
Ce que feit h a b a n d o n n e r les ennemiz leurs trenchiz, que se por taren t fort
vaillamment; mais à la fin furent contrainctz d ’h a b a n d o n n e r la place, p a r le
bon ordre que tenoient les nostres, que les ont rompu. De sorte q u ’ilz sont
demorés plus de nm sur les champs. L’on at trainé en Anvers xmi ensei­
gnes venuez de là, et nous gens ont treuvé d u bu tin et plusieurs coffres et
bagaiges d u conte Christoffre Palatin, où l’on at trouvé plusieurs lettres et
emprinses comme l’on dit, et q u ’il y auroit heu d u coustel de deçà corres­
pondence, q u ’est l’ordinaire fiction de ceulx de l’Espaigne, po ur faire plus
dégouster nostre nation. Mais jusques ores n’a t o n veu aulcune vérification
de ce que le duc d ’Albe et les siens disoienl en semblable matière, q u e ne
l’heussent touttefois voluntiers pa rd o n n é s’ilz heussent treuvé estoffe po ur
eulx attacher à qu elcun. Don Joan d ’Osorio apporta lesdites nouvelles le
xvie tard, fort gaillardes, que vm estoient demôré s u r la place, xl enseignez
ou du moingz x x x v n prinses avec une infinité de bagaige, ledit conte
Christoffre et conte J e h an mortz, xvc chevaulx demeurés : dont j ’ay veu
lettres escriptes p a r le C o m m en d a d o r Maior, et que v n c chevaulx estoient
entre les mains de noz chevaulx legiers, sans hommes, lesquelz s’estoient
*
L a balaille d e Slook es t r a c o n t é e e n d étail d a n s M e ndoçh, t . I l , p p . 21 i e t suiv . Le m êm e a u t e u r
d o n n e , à p a r t i r de la p age 194, des r e n s e i g n e m e n t s s u r la m a r c h e des Espagnols e t d e leu rs en n e m i s .
Voir au ssi P .
B
ob
,
liv. VII, fol, 13 v" et suiv.
DU CARDINAL DE GR AN VEL LE
77
e n f u y z ; q u e le conte Lodovic estoit gresvernent blecé. Inco nl in en tS on Excel­
lence allit à la chapelle r en dr e grâces à Dieu et feit chan ter le Te Deum et
so n n e r les grandes cloches de ceste ville, c om me l’on at faict a ux aultres, et
tenu de belles processions. Si fut dépesché ledict Don J oa n Osorio vers
Sa Majesté le xvin ® 1 p o u r p or ter si grandes nouvelles, que sont grandes
assez, puisque l’e n n e m y est deffaict et r o m p u à platte, au lieu q u ’il pensoit
nous dégloutir*. L ’on tient p o u r véritable q u ’ilz ne s o n td e m o ré s plus hault
de xiu ou x i i i i enseignes, et n i m hom mes morts sur la place, et q u e le conte
J e h a n s’estoit retiré devant la bataille, que le coûteChristoffre soit eschappé,
et que le conte Lodovic 3 at esté fort bleçé. Mr d ’Hierge *, qui s’est treuvé
aud it rencontre, at opinion q u ’il soit décédé de ses plaies, de tant plus q u ’il
n ’y at nouvelles q u e les ennemiz, que se sont retirés en Clèves et Julliers,
se rallient; ce q u e ledict Lodovic ne délesseroit de p r o cu r e r s’il fut en vie.
L’on tient p o u r vray que le conte Henr y 5 de Nassau, son frère, y est
de moré.
Le ba ro n de C h e v r a u l 6 at fort bien faict avec les ehevaulx légiers, aussi
at Sancho d ’Avila, lequel at conduict quelques trouppes d ’Espaignolz,
comm e at faict Mr de Hierge jusque s à sept enseignes que s’estoient mutinés,
avec promesse de leur faire avoir leur grâce; mais depuis la victoire ilz se
sont remiz à m u ti n e r plus fort que devant, et sont venuz avec leur electo
j u s q u ’à Anvers avec intention de la co uri r par faulle de pa ie m e n t ; et
ledit Sancho estoit venu avec eulx, et at iniz par le chasteau cent ehevaulx
dedans la ville, dont Monsr de Cham pa igny s’est malcontenté, crain gn ant
que la reste suivroit selon la contenance que tenoit ledict Sancho, di sant
q u ’il ne les empescheroit s’ilz vouloient en trer : ce que Son Exoe at p r i n t
fort mal, c o m m a n d a n t audit sieur de Cha mpaigney de mectre artillerie s u r
1 Correspondance de Philippe I I , l. III, p. 5 5 .
s Degloitlir; e n g l o u t i r , a v a l e r , d é v o r e r .
3 L o u is , c o m t e de N a s s a u , v i t le j o u r le 1 0 j a n v i e r 15 5 8 e t p é r i t p e n d a n t la b a ta ille de Mook.
( VoriSTERMAN
van
Oyen
, lle t vorstenhuis O ranje-N assau, p.
99.)
4 Gilles d e B c r l a y m o n t , b a r o n d ’H i e r g e s , cité s o u v e n t d a n s les vo lu m es p r é c é d e n ts .
‘ Le c o m t e H e n r i , n é le 1 5 o c to b r e 1 5 44 , m o u r u t é g a le m e n t à Mook. ( Ibid ., p. 101.)
8 H e n r i de Vienne, b a r o n de Cliev rau . Il fu t n o m m é , le 51 o c to b r e 1 5 7 5 , m e s tr e de c a m p gén éral,
a p r è s a v o i r épo u sé A n n e d e Bessy; il m o u r u t a u mois d 'a o û t 1582. ( Correspondance de Philippe I I ,
t. Il, p. 5 6 5 , e t L a Chcsnaye des Bois, t X I X , p. 7 1 0.)
78
CORRESPONDANCE
les murailles, et tirer contre lesditz Espaignolz. Et co mm e le jeu s’eschauffoil, et que les Espaignolz avec les Wallons estoient à demie lieu près
d ’Anvers, Son Exce est parti d ’icy samedi de rni er p o u r y d o n n e r ordre,
menassant ledit Sancho que s’il se vouloit j o u e r de mectre gens dedans la
ville par le chasteau contre sa volunté, il luy feroit t ran ch er la teste; et l’on
nous dit q u e tout s’est accommodé, et que Son Exce les faict paier de xvm
mois les x Ce seroit chose contre raison si le chasteau d ’Anvers, q u ’est faict
p o u r la seurelé de la ville, servist p o u r la piller; et ad ce que j ’entendz l’on
n’en lient heu si bon m archiet que l’on pensoil : car jà tenoient les bourgeois
prestz beaucop des bal lez de laine, et chaisnes de fer p ou r tendre aux rues,
et force paille p o ur t re nc her entre la ville et chasteau. Aussi avoient les
bourgeois vu ydé aulcunes maisons pou r les r em pl ir de terre au besoing *.
(leste mutinerie at fort estonné le pays, avec ce que l’on menassoit de
saccager Louvain et ceste ville. Ce que vient mal à propos p o u r faciliter
les aydes. et sera cause que l’on persistera de faire quicter aux estrangiers
la garde des places fortes et toulte maniance de deniers. Les Eslatz généraulx s o n t i c y convocqués p o u r le dernier de ce mois.
Le s eigneur Don F e r n an d e est fort mal content, comme Vostre lllm,! Sgrie
verra par ce q u ’il luy escript et à moy, et se fasche fort Madame la contesse
J ’ay prié audicl sieur d ’avoir un g peu de pacience et d ’actendre jusqu'il
au rat response de Vostre lllme Sgrie.
Mr de Noircarmes n’at voulu quict er son traictement de 700 escuz par
mois, ny son entremise jusque s le j o u r de sa m or t qui le print comme
il dici à l’impourviste, n'aiant encores po u rv eu à ses affaires; de laquelle
parole Son Excellence at esté scandalisé : car à dire vray il avoit esté assez
long temps malade et bas p o u r adviser à ses affaires. Il fut ad ministré à
grande haste. Dieu lui perdoint. Jama is h o m m e ne fut si peu plainct. Ses
propres parenlz en ont dict d u mal depuis sa m o r t ’.
Le constant bruict q u ’est icy par lettres venuez d ’Espaigne. q u e le Duc
d Albe at esté mal receu de Sa Majesté, son tilz envoie à Alcantera sans
1
Voir, au s u je t de ce tte m u t i n e r i e , la Correspondance de Philippe I I , t. III, p p . i>4, 5 5 ;
l:v. VII, fol. 10, et les Mémoires de Frédéric Perrenot, p u b lic s p a r
de
R
obault de
P . Boit,
S o t u o v , p p . 5 3 et suiv.
5 P h ilip p e d e Mont S "-A ldego nd e, Sr de N o i r c a r m e s , m o u r u t à U trech t des s u ite s de ses b lessures
le 5 m a r s 1574. ( Correspondance de Philippe I I , t. III, p. 33.)
DU CARDINAL DE GRAJNVELLE.
79
povoir a p p ro c h e r de la court, Vargas confiné à Alcala, at plus resjouy
ceulx de ces pays que ladite victoire, encores que l’on en soit esté fort
joieulx. Je ne sçay ce q u ’en est : car aulcuns dient q u e c’est dissimulation
Cependant ledit Duc et les siens en portant la honte. L’on dit q u ’il est envoie
en sa maison p ou r se délasser et revenir en cou rt après les bons jours, d ont
l’on verra de b r e f la vérité; mais que l’on n ’est allé au devant de luy, ny
luy d on n é logis en co u rt ; q ue le duc de Médina est gr and-in aistre d ’hostel
de la R o y n e et g o u v e rn e u r de Mgr nostre Prince *. veu voluntiers de
Sa Majesté, et q u e icelle at accordé ung si ample p a rd on , comme l’on doibt
p ubl ier samedi pr ochain, en présence de tous les Estatz convocqués p o u r
cela, me faict croyre q u ’il y at quelque chose et su rto u t ce que Vostre
11lme Sgrie at dit si souvent que le Roy estoit peu content du duc d ’Albe et
q u ’il at aemulos en court, et le mesme m ’escript Tisnacq 3.
Mr le P résident asseure q ue ledit pardon serat ample [que n ’est pas de
l’ad vis du du c d ’Albe], et que peu de gens en seront exceptés. S’il fut venu
deux ans plustost, non laboraremus, mais vous n’avez esté crcud. L’on parle
fort de la venue de Pierre de Melendes * avec force de batleaux et gens q u e
feront peu s u r W a lc h re et se mectront en dangier; mais il les fault lesser
faire, combien q u e q u ’ancores l’on auroit l’Hollandc et Bomele, louttefois
l’on ne recouvrera Zeclando par force, q u o y que l’on saiche faire.
La dame de Vredeinburch, fille bastarde du de rni er d u c de (ieldres. at
s o u bte nu trois sièges de ceulx de Bonmiele, qui à la fin ont am en é grosse
artillerie, de sorte q u ’elle at esté contraincte de se rendre. Hz l’ont mené
pr isonniere avec ses filles en leur ville, la menassent de pen dre , luy ravi
tous ses meubles, rasé son chasteau que l’on ne sçauroit rédifier p o u r
n u " mille florins, tel q u ’il e sto it “. Mais le prince d ’Oranges l’at faict délivrer
1 Le d u c d ’AIbo fu t en effet mal reçu p a r le Roi. Voir, à ce s u j e t . Les M anuscrits île P a ris, t. I l ,
p. 4 4 5 .
•
2 Voir Les M anuscrits de P aris, t. Il, p. 4 4 5 .
' C h a rl e s d e T i s n a c q . V o ir sa notice, t. I, p. 17, n o t e 1.
4 V o ir p l u s h au t, p. 4 8 , n o t e 1.
5 Le fa it d e la d a m e d e V r e d e n b o u r g s e r v i t de p r é t e x t e à l’env oi, a u p r è s d u T a c i t u r n e , d e B o nté,
e x - p e n s i o n n a i r e d e M id de lb o u rg , c h a r g é sp é c i a l e m e n t de nég ocier la paix e n t r e les in s u r g é s et P h i l i p p e .
L e p r i n c e d ’O r a n g e v o u l a i t y s o u s c r i r e , à c o n d itio n d 'a c c o r d e r la l i b e r té de co nscien ce, la r é u n i o n des
E ta ts - G é n é r a u x e t le d é p a r t des t r o u p e s e s p a g n o l e s ; trois p o i n t s a u x q u e l s le Hoi n e v o u la it sou scrire.
,
V o ir Mémoires anonym es, t. I, p. 1 0 8 ; Corres/iondance du Taciturne t. III, p. x x x v i.
80
CORRESPONDANCE
et renvoie avec ses filles à Tiell ', disant q u ’il ne faict guerre aux dames,
niais aux Espaignolz et ceulx q u e leur sont adhérenlz. Il at faict pen dre ung
sien maistre d ’hostel q u ’avoit faict foulle, et u n g Bertel Lentens, capitaine
frison, fort re n o m m é p o u r actes semblables, et faict gr and e justice, aiant
deflendu que l’on ne touche aux gens d’Eglise n y au païsant de Brabant, et
al faict mectre prisonnier Vandenderpe *, qui at trahi Malines, p ou r ce q u ’il
at rendu Zevenberghe 3 après l’avoir branscallé, et dict-on q u ’il est en dangier d ’eslre pen du. Si l’on faisoit justice de nostre couslel,les affaires yroient
mieulx; les foulles sont incomportables. Ceulx de Sainct-Amand en sçavent
à parler et fussent eslés Iraveillés d ’advantaige, ne fust la diligence que
feismez vers Son Excellence, escripvanlz aussi à M1' de Trebruges que nous
do nna incontinent saulve-garde q u ’il al exécuté.
Si leconl e Lodovic est mort, les desseins de son frère, le Prince, seront
troublés.
XXV.
L ’ i M P E R A T R I C E M A R IE AU
CARDINAL DE G IU N V E L L E .
( Bibliolbeque royale de Bruxelles. — Mainiseiit n° 9475, fol. 388.)
V ie n n e , 5 0 avril li)7 4 .
R° in Ch° Padre S r Card 1 nuestro caro y amado amygo. Matheo Fletes,
que la presente os dara, es hijo de u n criado viejo de esla casa, y el tambien
syrvio a la seren" Princ° de Portugal, my hcrmana, que sea en gloria, por
loqual es razon pr ocuremos en bien y sele desseamos, y assy hemos holgado esle de lermina do de y r a residir en esse Reyno, confiando que por n r0
respelto vos S"r le faborescereis y acomodareis; pedimos y rogamos os
mu ch o tongais quenla con el para q u e sea empleado en alguna cosa de
poco travaso con que se pueda sustentar, pues segun en tendemos, le falla
1 T hielt, villc d e la G ucldre.
* S ire A r n o u l v a n d e n D o r p c , c h ev alier, S r de M aasd arn, etc. Voir sa notiec, t. IV, p. 4 0 7 , nolc
* Voir I. IV, p. 2 4 2 .
SI
DU CARDINAL D E GRAINVELLE.
salud para passalle, q u e lodo lo que po r el byzierdes nos sera de much o
contentamiento, y le rescibiremos en ello de Vra R" persona, que Nuestro
Senor tenga en su continua guarda.
XXV.
ANALYSE.
L'Impératrice r e c o m m a n d e à la b ien v eillan ce du Cardinal Mathieu F le t e s , ancien
serviteur d e la p r in c e s se , et fils d ’un ancien d o m e s tiq u e de la maison de l'eu la sérénissim e prin cesse de P ortu gal.
XXVI.
LE
PRÉVÔT
M O RILLON
Ali
CA R D IN A L
DE
GRANVELLE.
( B ibliothèque tle Besançon. — L ettres diverses, t. I l , fol. 109-175.)
B r u x e l l e s , 1, 2 e t 3 m ai
1574.
Il ne peull eslre que ne soiez adverti de divers costelz du gr an d et
incroyable dom ma ige q u e la mutinerie des Espagnolz at faict à la ville
d ’Anvers 1 en une bien m aulvaise conjoncture, lorsque Son E x ce debvoit
c e j o u r d ’h u y p u b lie r le p a rd o n général, que l’on dit estre fort ample, en
l’assemblée gé n é ra le de tous les Etalz q u e sont esté mandés de venir deux
fois au ilant co mm e de cousliime, ainsi q u ’ilz ont fai(z. aianl chascung
1
La m u t i n e r i e co m m e n ç a le 2 0 av r il 1 5 7 4 ; v o i r JI end o ça , t. II, p. 2 3 3 ; P. lion, liv. V II, fol. 10
Mémoires de Champat/iiey, p. 3 3 ; Corres/iotidance de Philippe I I , I. III, p. 02.
T
ome
V.
Il
CORRESPONDANCE
82
pays député fort notables personnaiges, que trouvent bien estrange ce que
passe audit Anvers, et ne dient poincl tout ce q u ’ilz pensent '.
Depuis le xiniu. que l’on r o m p i t les ennemiz avec moind re dommaige
eu r que l’on n ’at dit, puisque l’on afferme q u e les contes Christofîre Pala­
tin, Lodovic et Henri de Nassau sont à Coloigne % p or ta nt ledit conte Henry
l’ung bras en escharpe, et les aultros deux sains et dispoz, lesditz Espaignolz se sont de rechief mutinés, lirans droit contre Anvers, où l’on dit que
Sancho d ’Avila leur avoit promiz les faire en trer et paier doibs q u ’ilz
avoient r om pu l’e n n e m y ; de qu oy Monsr de Champaigney d o n n â t advis à
Son E x ce cepen da nt q u ’ilz estoient encores Ioing:, et à mesure q u ’ilz
approchoient, envoya messngiers et slafettes, les xxie, x x n e, et trois ou
qu a tre le x x m u du mois passé, représentant bien à certes les inconvénienlz
qui en polroient souldre à ladite ville, et envoia lettres par le sieur de Ve r s 5
tant à MM™ le duc d’Arschot, de lierlaymont et Saint-Bavon, qu e à Son Excc,
qu e s’esbahissoit de la craincte que ledict sieur avoil, lequel comm e saige,
usa de toute diligence alfin que cela luv servit de descharge cy-après. Son
Excese délibéra tout à l’instant de partir vers Anvers ledit x x m e; mais elle ne
fut prest jusque s le x x i m e matin, arrivant le mesme j o u r en Anvers. P l u ­
sieurs ne trouvarent bon son pa rlement pour le d a n g i e r o ù elle se mectoit,
si les mutins, q u ’esloient jà près d’Anvers, l’Iieussent surpr in s s u r l a v a r d * .
Ledit sieur de Cham pa igne y estoit d ’advis q u e Son E x ce, po ur sa seurté, se
debvoit mectre dedans le chasteau ; mais elle fut d ’advis contraire se logeant
en la Mere", chercheant de trouver deniers, et mandit vers soy le magistrat
alïin q u ’il heust de furn ir auxditz Espagnolz 2()0m escus. Et comm e ils
s’cxcusoient pa r faulte de moien, leur fut réplicqué q u ’il estoit force,
q u ’ancores on debvroit d o n n e r vasselle et chaisnes. Et comme les soldatz
approchoient la ville, ledit sieur de Champaigney de ma n d a Son E x ce s’il
1 Les E ta ts - G é n é r a n x »voient été co n v o q u és à B ru x elles p o u r le 5 0 a v r i l W û 'i. V o ir G a c i i a r d ,
Lettre à M M . les questeurs, p. 125, e t les d o c u m e n t s s u r les m êm es É t a i s , d ans la Correspondance de
Philippe / / , t. III, pp.
e t suiv.
2 V o ir plus h a u t , p. 77, notes 5, 4, 5, o ù l e u r m o r t es t co nstatée.
5 P r o b a b l e m e n t C lau de de V ers, lieu ten an t-co lo n el d ’un i c c i m e n t d ’in f a n t e ri e w a llo n n e . V o i r t IV,
p. 390.
4 V ard, le canal.
* P lace de Meir, à Anvers.
*
DU CARDINAL DK GR AN VEL LE .
83
luy plaisoil q u e l’on leur ouvrit les portes, que sont esté tenu serréez P' us
de trois jo urs. Mais cela ne fut de besoing; car lesdits soldalz fu rent conduiclz entre la ville et le chasleau, aulcuns dient que ce fut p a r Sancho
d ’Avila, et pa^sarent ung fossé à secq, duquel l’on avoit tiré l’eau tout à
propoz et y jecté quelques chariolz dedans, couvertz d ’aix et se présenlarent ainsi entre le chasteau et la ville, sans q u e l’on leur donni st aulcun
empescliement par ceulx du chasteau, qui »voient déclairé a upa rav an t
q u ’ilz les ayderoient pluslost. Aussi personne de la garnison ne se monslra
s u r les rempa rtz et deffenses, jusque s tous les mutins furent passés; et
ce pendant n’avoicnt oblié de to urner toulte leur artillerie contre la ville
Les véant en trer le dit sieur de Champaigney. il de ma n d a à Son Exce s’il
luy plaisoil q u ’il les feicst destourner, ad ce que se fenoient preslz le fils de
l'Amman Sterck 5 et le sieur de Vers3, qui ont chascung une compaignie
soubzledicl sieur, ausquelz l’on dit q u ’ilz heussenl à se retirer en hora mala.
Depuis ledit sieur de Champaigney offrit à Son Exce de trencher la ville,
et avoit gens preslz, et partit avec sacqz de laine, et lient en peu d ’heures
affranchi la ville; mais cela ne fut Ireuvé b o n ; mesmes il fut requis de se
retirer avec ses compaignies en la nouvelle ville; ce que po ur obéir il leict.
Ju sq ue s ores estimoient plusieurs que ceci estoil un g jeu joué entre Son
Excellence et l uy ; mais comme estant venu en la nouvelle ville, il se jecta
en la maison des Oislrelinck, se trencha et garamlil de sacqz de laine, et de
xx canons q u ’il feit pr end re hors des balleaux de guerre, q u ’il feit lirer les
qu a ttr e pontz de la nouvelle ville et tenir en or dr e les batteaux p o u r tirer
au long de la rue, et q ue loulles les fenestres de ladite maison furent garnies
d ’harquebousiers à crocq et ses gens en bon ordre, ladite opinion se perdit,
et fut ledil sieur fort estimé et loué : car s’il heut voulu lâcher ses siens
.
.
.
3
p o u r faire poincte, les bourgeois ne de m a nd oi en t plus beau jeu, et y en
avoit plus de mille avec corceletz à preuve soubs leur habit, et des pistoletz
à leur ceinclure, qui n’atlendoient que de s’allacher. Mais les Espaignolz.
q u ’esloyent désjà entrés dix de front, et logés à discrétion aux milleures
maisons, tant s u r la Mère 1 que ailleurs, n’avoient envie de m ordre, encores
1 A ix p o u r ai*, p lan ch es.
* God efro id S le r c k , ch ev alier, lu t n o m m é am raan d 'A n v e r s en I iiô.l et m o u r u t en I!i87.
3 C laude de Vers. V o ir la p age p r é c é d e n 'e .
* La place de Meir, à A nv ers.
84
CORRESPONDANCE
q u ’ilz ap pro ch ar ent p o u r veoir la contenance d ud it Sieur, qui offrit audit
C om m end ad or de les combattre, et jecter hors de la ville; mais cela ne
convenoit, p u i s q u ’il ne se fut faict sans effusion de sang et perdle de
Sa Majesté. Cependant ces bonnes gens se saisirent de la maison de la ville,
se fourranlz par dedans les comptoirs et secrelz et criarent : Foira, foira
Wallones luteranos ; foira Champaiçjney
menassans sa maison contre
laquelle ilz ont tiré force harcquebousades, estimanlz la saccaiger; mais il
avoit miz bon o rd re et gens de faict p o u r la deffendre; et se saulvarent les
principaulx meubles p a r une hissue de derrière et la faveur des voysins; et
comme l’on y employa des porteurs au sacq, il y lieut ung qui emporia le
coffret auquel cstoient toultes les bagues et pierreries de feu Madame la
Contesse. que fut pe rdu plus de xx heures, dont heusmes icy I advertissement que me d o nna une maulvaise nuict; mais le recouvrement que
sceusmes lendemain me remict en repoz. Le larron avec son frère, que
l ’a v o it a y d é à cacher ledit coffret, sont prisonniers. Ledit Sieur at tenu tous
ses coffres et meubles aux batteaux de guerre que sont esté hier amenés
en cesle ville j u s q u ’à xx, où ilz ne sont mal j u s q u ’à présent, encores que
les Wallons de Mondragon, qui ont failli de s ur pr e nd re Louvain, soient
cy à l’enlour. Mais l’on tient la ville serrée pa r le co mm a nd em e nt de
Son Exce. q u ’at escript à Monsr le duc d'Arscliot de les tenir dehors, ayant
désià expérimenté le da nger q u e suit de les recepvoir aux villes.
Et po ur reto ur ner auxdietz altérés, il n’est à croire les insolences q u ’ilz
ont faict de nuict, sonnantz des faulx alarmes, avec samblant de vouloir
tout tuer, disantz mille maulx de Son Exce et criants : P aya, p a y a *. Et ne
fut que ledit Sieur à la requête de Son Excu, que envoia souvent vers luy,
lieut tenu ses soldats et les bourgeois en office, il y heu t esté une merveil­
leuse boucherie. Et se sont repenti lesdietz bourgeois gra n d e m en t «l’avoir
de man dé audit Sieur congié de combattre, disantz que s’ilz l’heussent faict
sans congié, q u ’ilz fussent esté bienlost quittes de leurs hostes. qu e ne
cessarenl j u squ es ledit sieur de Champaigney avec ses compaignies fust
comm andé pa r Son E x ce de sortir, dont fut le mercure Chappin Viltelli5,
I T r a d u c t i o n : « D e h o r s , d e h o r s W a l l o n s l u t h é r i e n s , d e h o r s C h a m p a g n e)’ ! »
‘ T r a d u c t i o n : » P a y e z , payez. »
II Voir sa no tice, t. IV, p. 2 7 0 .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
85
auquel ledit Sieur dict q u ’il avoil sa commission du Roy, et q u ’il ne povoit
liab an do nne r u n g lieu que luy esloit si chièremenl e n ch arg é; toullesfois
que si Son E x Cft luy ord o nn oi t de sortir, q u ’il le i'eroit. aiant son o r d o n ­
nance signée, que j ’enlendz elle luy al donné, où ledit Vitelli de par elle,
au gr and regret des bourgeois qui ont offert de avec 4,000 testes ga rder la
personne et maison du di t Sieur, auquel ilz ont mo ns tr é une extresine affec­
tion et amo ur , et at esté u n g gr and bien q ue de l’un g costel ny de l’aullre,
n’at esté procédé p a r voie de faict; car si une seule harqueb ous e se fust
déchargée, il faict à craindre q u ’il en fût suivi très grand inconvénient. Et
Son Excc envoioit de temps à aultre vers ledit Sieur a(Tin q u ’il retint ses
gens et le peuple. Et comme les mutins craindoient q ue l’ont leur c o ur ru l
sus, ilz do n n a re n t presse à Son Exce de faire sortir ledit Sieur, qui luy
obéyt et se relira avec ses compaignies à Eccre 1 et depuis à W in e g h e m *,
dont depuis les mutins euIx trouvantz affoibliz, si les bourgeois aianls
pe rd u leur frein s’eslevoient, feirent ce q u ’ilz po ul ren t p o u r faire revenir
les W a ll o n s ; ce q u ’ilz ne vou lu ren t faire; et partant, ilz s’accoslarent des
Allemandz, leur promettantz part au butin, et qu e du moins ils seroient
paiés comm e eulx.
Tous ceulx q u ’escripvent d ’Anvers dient n ’avoir jamais veu chose plus
espouvantable que les faulx alarmes que ces bonnes gens fuisoient de
nuicl, crianlz et urlantz comm e s’ilz heussent voulu tout rnectrc au fil de
l’espée, de manière q u ’une infinité de femmes enceinctes sont avortiez ou
devant le temps accouché, et beaucop d anciennes gens morlz et malades
de p a o u r , et sont sorti plus de deux ou trois mille femmes vers Flandres,
que n ’ont peu e m po rt er aulcun bagaige ou coffret. Les Por tug uè z parlent
de là ; aussi font les Oslreling que veuillent aller à Bruges, les Englèz à
Em pdc, et sera bien venu si aulcune nation y demeure. Car le m a r c h a n t
veult estre asseuré, et ne se veuillent confier à ung barba re chaslellain,
disantz q u e puisque le chasteau, que les debvoit conserver, est cause du
dangier, quaerendas alias sedes. C’est le bien que Sancho d ’Avila et Mondragon, pa r leur témérité et oultrecuidance, ont faict à ceste ville q u ’est
desvalisée : car q u ’ancores Son Excellence pr ocure l’assurance [en ce q u ’elle
1 E e k e r e n , p r o v i n c e d ’A n v e r s.
* W y n c g h c m , ibid.
86
CORRESPONDANCE
rend grande peine], toulle lois il sera plus d ’ung demi -an devant que les
estrangiers s’y oseront confier. Et si ledit Sanclio d ’Avila d e m e u r e avec le
chasteau, tous sont en opinion que le m arc h an d ha b a n d o n n er a la ville;
et je tiens que devant que l’en retirer, l’on luy d on ne ra plustost le gou ve r­
nement de la ville, que sera la r u in e r ; car n’estant politicque, comme
il n ’est, mais brutal et superbe comme un g lion, il vouldra tiranniser; ce
que le peuple à la longue ne comportera. Et seroit à craindre que si ung
j ou r les ennemiz approchoient, ilz trouveroient plus d’inclination et faveur
des manantz que du passé; et j e tiens que ce at esté à ceste fin q ue on at
voulu désarmer les Anversois et co mm an dé q u ’ils heussent d’apporter leurs
armes à la maison de la ville. Ce q u ’ilz ont refuse tout à plat, deman dan tz
si l’on leur vouloit co pper les gorges.
J ’entendz que les mutins cl leur efeclo' ont porté peu de respect à Son
Excellence, estant/, venu contre son gré à loulles heures en sa c h a m br e;
et certes j'ay lousiours cremeu q u ’ilz ne se saisissent de sa personne. Elle
m a u d i t le mardi Mons1' de Be rla ym ont , d ’Assonleville, Roda et Berti. Roda
partit le mesme jou r, d’Assonleville et Berti lendemain, et ledict sieur de
Berlaymont, qui alla fort enviz, le jeudi L’on al menacé, poulsc et injurié
le Magistrat, qu e n’at heu lieu ny auctorilé en la maison de la ville, où les
m uti ns don noi ent les passeporlz et bulletins, disanlz mille maulx à ceulx
que les venoient quérir, avec pleine démonstration de la haine q u ’ilz nous
portent, laquelle est réciproque. Et je suis marri d ’en o u y r parler tant
ouvertement de beaulcop de gens principaulx, que sont en opinion que
tant que ceste nation sera pardeçà, le Pays n ’aura t jamais bien, pu isq u ’ils
(lient clere que c’est le service de Dieu et du Roy de le faire povre. P o u r mov
je liens que n’aurions tout gaigné d ’en eslre quicte : car si l’on hoste le
chien, les loups a ur on t bon inarchiet des brebiz; et s’il est apparent q ue le
pardon nous ramènera beaulcop de meschantz garçons que ne reviendront
p ou r bien faire, mais pour, véanlz leur poinct, ung j o u r faire pis que
devant, et seconder aux ennemiz. Tr o p bien suis-je avec ceulx qui (lient
que. aiant le Duc d’Albe tant permiz à ses soldatz, et q u e tous ceulx qui ont
lieu charge soubz luy sont gens dépravés et grandz larrons, pregnans
1 Les m u tin e s e s p ag n ols d é s ig n a ie n t e u x - m ê m e s le u r c h ef p a r élection. Ils le n o m m a i e n t é l u , en
espagnol electo.
DU CARDINAL DE GKANVELLE.
87
plaisir à destruire le payz, que Sa Majesté les debvroil retirer en Italie, et
envoier icy des aultres en esehange, mieulx disciplinés, et soubz bons cliiefs.
q u e les sceussenl con tenir en l’observance militaire et aux villes frontières,
et q u e le pays pr ocu ri t q u ’ilz fussent bien paies et par temps, sans manger
le bon h o m m e ou faire tort à perso nne ; et q ue de mesme l’on chastiu q u e l­
ques capitaines des Wallons exemplairement, d'aullant q u ’ilz instiguent
leurs soldptz à mal faire, n ’espargnans le cencier, ny les maisons cainpestres
des gentilshommes ou monastères.
Monrr d ’Achcy * n ’est venu mal à propoz audit sieur de Champaigney,
estant ung gen til ho mm e saige et de bon conseil. Il fut d ’advis, lorsque
Sancho d ’Avila fut arrivé, que ledict sieur le feit visiter p o u r sçavoir son
porte men t depuis ceste victoire, avec aultres propoz courtois, luy de m a n ­
da n t quelques affutz. Ad ce que ledict d ’Avila répondit que q u ’ancores le
prince d ’Orenge fut devant la ville, q u ’il ne luy envoieroil les affutz; qu'il
n’avoit que faire de ses visites et correspondences. pu isq u’il ne vouloit de
son amitié; de laquelle réponse deux gentilshommes q ue ledict Sieur y
avoit envoyé o nt laict foy soubz leur signature : p a r où I on peull veoir que
ceste discorde n’a dvanchera en rien les affaires de la ville et du pays. Son
Excellence at escript pa r deux fois audict Sieur, depuis q u ’il est dehor.».
assez longues lettres, louant sa conduicte et prudence, de laquelle il auroit
adverty Sa Majesté
Le d ernier du mois passé, furent les m utins d ’accord avec Son E x ce
q u ’ilz recepvroient x x x v i i paies, les cincq en drap, car ilz sont tous nudz,
et le su rplus en argent. La ville furnil 4(J0 mille florins à recouvrer sur la
pr emière aide, et l’on raba ttr a auxdietz m utins les prestz q u ’ilz ont heu.
Hz ne debvoient lesser tant croistre leur de ubt, mais le d e m a n d e r au duc
d ’Albe; et plusieurs ont opinion, p o u r ce q u ’ilz veullent estre paiés de tout,
que la pluspart d ’eulx se vouldra retirer de ce pays; car ilz ne veuillent
plus r et ou r ne r en Hollande, où q u ’il n ’y at plus que frire, selon que Vostre
Hlm® Sgrie peult veoir par un e lettre que m ’ont escript les cincq églises
d ’Utrecht, où le seigneur don Fe r n a n d e se désespère, et craindons qu e luy
et Madame y deviend ron t malades. Ceulx d ’Artois que sont icy regrettent
leur absence, et les désirent ravoir, q u o y q u ’il doibge couster.
1 Un dos fils d u b e a u - f r è r e d e G r a n v d l u . V oir t. Il, p. 5 0 3 .
88
CORRESPON DA NC E
Il n’est à croyre combien d ’Espaignolz sont accouru en Anvers des
chastels de Gand et Valenchiennes. Il nVn y al poincl u n g en cesle ville.
Hz veullenl tenir les places des mortz. La monstre se doibt passer s u r la
Boursse. Dieu sçait comm e le Roy y serat servi. Touttes enseignez seront
pleines 11 fust esté mieulx les paier à l’une des portes, faisant serrer les
au Ht•es. po ur pa r ce boult en estre quicte et les faire deslogier. Son Excc
at fondu sa vaselle et ramassé des deniers tout ce q u ’elle at peult, et
at escript à Monsr le duc d ’Arscbot q u ’il l’excuse vers les députés
des Eslalz, espérant d ’estre icy dedans quattre ou cincq jours. J e ne
pense poinct q u ’il y soit en huicl ou dix j o u r s ; car ad ce que j ’entendz, non ob stant l’appoinctement, ces diables recominenchent. adjoustans tousjours nouvelles conditions, et appellent les Wallons p o u r estre
plus forlz contre le p e u p le ; de manière q u e ceulx que sont eslés icy à l’enlour, soubz espoir d ’y entrer, s’en vont en diligence contre Anvers. Et
faict à craindre q u ’eulx et les Allemandz ne lesseront sortir Son E \ ce s’ilz
ne sont aussi contentés. De si maulvaise conséquence est ceste mu tiner ie;
et avec tout ce est le duc Ericb avec -4,500 chevaulx en Overissel, où il
gatte tout à l’accoustumé, et le paiement de sa monstre est mal presl. Mal
su r mal n’est poinct santé; et ce que je pèse le plus est q u e cecy passe en
la présence et quasi à la vue des députez de tous les Eslatz généraulx, que
sont en ceste ville, laquelle est tenu serrée et avec garde, comme si les
ennemiz fussent devant. Et le mesme se faict par touttes les villes de
lirabant, att endant co mm e s’acbepvera ce jeu d’Anvers. Dieu doint q u ’il
passe mieux q u ’il n’est apparent.
Mgr, p our ce qu e j ’estoye encores à Malines lorsque les altérés a p p ro choient Anvers, Vostre Seigneurie me pa rdonner a si ceste fois je ne respondz aux affaires particulières; car p ou r dire la vérité, je ne suis à mon
aise, crai nd ant quelque désastre audicl Anvers p a r le désespoir des b o u r ­
geois que ne sçauront plus c omporter les insolences nocturnes, que recommenc hc nt par abatre portes, ha requebouser les feneslres et aidtres p é t u ­
lances. De j o u r tout est paisible, comme furent les nuietz de vendredi et
samedi; mais hier en nuict ces bonnes gens sont ret our né à leur naturel.
Depuis ma lettre close, est arrivé Monsieur de Thoraise qui dict que
1 Sans d o ute G u illa u m e de M o n tm o r e n c y , S r de T h o r é .
89
DU CARDINAL DE (ÎRAiNVELLE.
l’on at hier commencé passer monstre, et que q uo y que Chappin Vitello et
Pedro Trigosa 1 ont sceu preseher, les altérés persistent d ’estre paiés de
lodo; q u ’ilz ont repoulsé Son Exce par deux fois, ainsi q u ’elle at cuidé sor­
tir, et la tiègnenl en son logis; q u ’elle at en charge à Monsr de Cham pa igney de p re n d re le ch emi n de Berghes et Bois-le-Duc, p o u r se j oin dr e
avec Monsr de Havret, qui est delà Bois-le-Duc avec ses x x enseignes pou r
empescher les ennemiz que sont passé la riviere deçà Bommele, et viègn en t avec cent enseignes; <|ue les W all on s de Mondragon sont près de
Breda p o u r ven ir en Anvers et d e m a n d e r paiement. Touttefois l’on ne
leur doibl b e au cop ; car ledit sieur de Champaigney les at faict accomm o­
de r de preslz p a r la ville d’Anvers.
Son E x ce se fâche fort de ces m utins q ue sont en sa c h a m b r e et garde ­
robe, de sorte q u ’il n’en peult sortir. Il les appelle ennemigos de Dios y
det R e jj 2, do n t ilz se soucient peu. Je le vouldroie veoir hors de leurs
mains.
XXVII.
LE
PRÉVÔT
M ORILLON
AU
C A RD IN A L
DE
GRANVELLE.
( üibli(illii‘i|iir de llesançon. — Lettres diverses, I. Il, loi. 170.;
Bruxelles, o mai
1874.
Le C o m m e n d a d o r Maior al perdu crédit à jamais, d on t il me pèse. L’on
tient que comm e il est fin, q u e avec ceste conjun ctu re de la victoire q u ’est
maigre, si les chiefz principaulx sont eschappés, comm e l’on dit qu'ils sont,
il at bien voulu mon str er aux Estais q u ’il sçait inoiens à trouver deniers;
et que à ceste occasion il at heu intelligence avec Sanc ho d ’Avila et Mon­
dragon : n’estant croiable q u ’ilz heussent tant osé s’ilz ne fussent estés du
1 P i e r r e T r i g o s c , j é s u ite e s p a g n o l , à A n v e r s. Voir sa notice, t. IV, p. i ü ô .
* T r a d u c t i o n : « e n n e m i s d e Dieu et d u Itoi. »
T ojie V.
12
ÎM)
CORRESPONDANCE
C o m m an d a do r Maior advoués et autorisés. Mais le tout pourroil lui couster
chier et à nous tous. T a nt y at q u ’il est en pire opinion q u e ne fut oncques
le duc d’Albe, et tenu p ou r légier, précipité et subit, s’esbahissans plusieurs
principaulx de ce que Vostre Illme Sgrie l’at tant estimé par ses lettres, et
q ue Hopperus. par charge du Roy, l’at extollé si hault.
J ’entendz qu e le Co m m en da do r dit q u ’il vouldroit, p o u r la moictié de
son bien, q ue cecy ne luy fut advenu, do n t ne suys esb ahi; et n’est à croire
ce que MMrs d’Arschot et Lallaing * dient en pleine table devant paiges et
valetz ut consueverunt p o s tpocida.
L ’on ne parle plus du p a r d o n ; moings s’y fie l’on en icelluy, alléguante
aulcuns que le C o m m en d a d o r Maior en feit u n g e n Grenade q u ’il ha violé
luy mesnie p r e m i e r 2. Enfin plus allons-nous avant et moings y at y a p p a ­
rente île ressource, et ainsi passent nos jours en doleurs et povreté que
accroistra ; car le Roy est trop puissant p o u r le Prince, et le Prince garni de
trop de bonnes places p o u r en sortir sans bon appoinctement. Et il use de
si grande police et dextérité, que les biens q u ’il at Ireuvé à Middelbourch
ne luy causent dommaige.
Les 50Um escuz que l’on at envoyé d ’Espaigne sont encores mal pretz,
et ne fault penser de plus trouver argent en Anvers, puisque les grandes
boursses se retirent à Hambourg, Rouan. Londres, Emp de n etMidde lbourgh
Dieu doint b o n n e a dv en tur e de Pierre Molendes Ceulx de Vlissinghe
a rm e n t 70 batteaux de guerre.
cj
Voslre 1llme Sgrie verra ce q u e le j e u n e Assonleville m ’e s c r i p ts u r l’arrivée
du duc d ’Albe vers le Roy. Quo y q u ’il en soit, je tiens q u ’il retournera vers
luy; car le C om m end ad or dit q u ’il at esté bien receu. Touttesfois, Hopperus
at escript au président Viglius, quod tristis venit, et Iristior a b i i t 3. Mais
comme c est u u g ancien courtisan, je tiens q u ’il ne se lessera chasser avec
basions, comme dit Voslre lllme Sgrie, et il sçait beaulcop.
Le Roy de France at relaxé ses prisonniers et tout p a r d o n n é ; ce q u ’at
faict ret ou rn er les François, q u ’esloyerit près de Maeslricht, en France.
1 P h i l i p p e , coin te d e L a la in g . Voir sa notice, t. I I I , p. 4 5 2 .
2 D a n s la c a m p a g n e c o n t r e les M orisq ues.
5 Voir, à cc suje t, Joitcltimi Hop péri epislolœ ad V iylium , p. 5 8 7 .
DU CARDINAL DK GKANVELLK
XXVIII.
LE
PRÉVÔT
M O R IL L O N
AU
CA R D IN A L
DE
( Itibliolhèque île Besançon. — Lettres diverses, t
GRANVELLE.
II, fui. ITti-177.)
L oiiv aiu , 17 m ai lî>74.
La m utinerie d’Anvers c on ti n u e et s’aug men te depuis mes dernières; de
sorte q u ’ils en sont sorti plus de vc mesnaiges des plus riches, aiant retiré
chascung ses livres et arge nt comptant, et jecté dehors soubs couleur de
marchandises ce q u ’ilz ont peult. Quoy appercevantz lesamutinés, ils font
m a in te na nt le guect aux portes sans lesser sortir aulcun bien, de manière
que je ne veoidz co mm e l’on polrat retirer les meublez de Canticrode 1 ;
ce q u e fust esté faisable si les Allemandz heussent demo ré seuls à la garde
des portes, co mm e ilz ont faict quelque temps.
Ceulx du chasteau se sont aussi amutiné s ung entier enseigne, q u ’avoit
faict un g electo et corporal ; mais le porte-enseigne* fut h o m m e de bien, que
envoiat à part ledit electo, s imul ant eslre des siens, et le tua et jecta dans le
fossé et le mesme du di t corporal ou sergent, et le d e m e u r a n t d u d i t ensei­
gne at esté jecté dehors, q u ’avoient désià prins les clefz que se sont recou vertez et ledit chasteau asseuré. Si est-ce q u e l’estrangier ne vouldra plus
d em or er en tels h asardz et variétés 3.
' Le cliàle ni de C a n te e r o i x , p i c s d ’A n v ers. V oir I. I, p. 2(i2, et I. IV, p. 4(i.
* Ce t en seign e se n o m m a i t S a l v a t i e r r a . Voir Mendoça. t. Il, p. 2 5 5 .
* Voici cc q u e le se c ré ta ir e B e rty, tém oin oculaire d e ce q u i se pas sait à A nv ers, écrivit à r<: su je t
au p r é s i d e n t Viglius II y f o u rn i t au ssi des dé tails s u r ce q u i a eu lieu à (J l r e c h t :
« A n v e r s , 0 mai 1574.
» Cc q u e se p asse ici av ec les so ld a lz es t q ue l’o n va jo u r n e l le m e n t d e s c o m p t a n t a v e c e u l x , e t q ue
l’on e s p è re a c h e v e r avec eu lx la s e m a in e p ro c h a in e . L e u rs co m p a g n o n s qu i doiz G h e l d r e s niarch oienl
v ers H o llan de e s t a n s logez le p r e m i e r d e m a y a ux f a u b o u rg h s d ’U t r e c h t , ne p o u v a n s e x é c u t e r le sacq
p a r eu l x d é s ig n e d'i celle ville s’ils y e u s s e n t e n t r é s , en lieu d e p l a n t e r le m a y . b o n t i r e n t le feu a u x d i t s
f a u h o u r g h s ; de so rte q u e ceulx d e la ville sc m i r e n t en a r m e s à la ch asse de Ions les E spag n ols q u ’ilz
s ç u r e n t r e n c o n t r e r . E t fust la chose p o u r a r r i v e r à g r a n d s d é s o r d r e s q u i toulesfois f u r e n t p r é v e n u z p a r
le d e v o ir d u co m te de La Roche, co m m e il cscripl b ien a m p l e m e n t h S. E., et voira V. S1'1' un s o m m a ir e
CORRESPONDANCE
92
Son Exce at faict publier quelque protest imprimé, q u ’estoit fort bien
arraisonné s u r l’iiuctorité de Sa iMa'% do n n a n t pardon po urveu que l’on se
abstinst d ’ultérieure rébellion; cela lesat faict enraiger, faire nouvelle con­
jure, deschassants leur esleu et officiers et en faisants des aultres, et sont
estés sur le poinct p o u r déchasser Son Excc.
Cette mutinerie vient en mauvaise saison et nous faict perdre le fruict
de la victoire qu e at esté plus grand e que l’on a d i t ; car l’ont al surpr in s
lettres du prince d ’Oranges à son frère le conle Jeh an, auquel il confesse la
mort de ses frères Ludovic et Henri et du conte Palatin, adjoustant q u ’il
crainct qu e les Hollandois tou rn er o n t bientôt leurs robes s’il y at espoir
de grâce. Et le fils de Montgoinmeri ' est mo rt de ses plaies à Grave, s’estant donné à cognoislre peu avant sa mort, de m a n d a n t sépulture h o n n o rable; mais comme il est mo rt hérétique, le curé du lieu l’at faict mectre
en terre prophane.
Hz sont inm piedtons en B o m m e l - W e r d t 2, que seroient tost desfaictz si
nos gens lie fussent mutinés; et ce q u ’est le piz. les Espaignolz q ue sont
à Utrecht, tous noz Wa llons et Allemandz suivent les vestiges des amutinés d ’Anvers, que dient q u ’ilz sont obligés au conte Lodovic qui at esté
cause q u ’ilz se sont peu assembler despuis la trahison que I on leur feit à
Harlem. Le duc d ’Albe, que les congnoissoit, les tenoit repartiz en divers
lieux, sans les lesser joindre
Ceulx que ne sont pas esté tués p a r noz gens en la bataille ont depuis
esté maltraictés par là où ils sont passé des paysantz; de sorte que peu
sont retournés en Allemaigne. où ilz ne seront plus si promptz de venir.
d e ce faict p a r u n e le ttre ci -enclose, q u e m ’a es c ri p t le ca p i t a i n e L i a n d c n , qu i n ag uères disn a avec V. S.
à Bruxelles.
» Q u a n t à nos Suisses, il m ’es t d ’a d v is q u ’ilz d e m e u r e r o n t d e r ri è r e s . C a r au 2 5 e d ’avril n ’a v o it l'on
e n c o r e o b ten u le congé r e q u i s d es ca n t o n s p o u r les lev er et c o n d u i r e h o r s le pays , et ce p a r les m enées
et travers es des F ra n ço is. T o u c h a n t les af fa ires en F ra n c e , Ro da m ’a dict q i f i l z y vont bien p o u r n o u s ,
por que et rei commença à costar crtbecas, y brevemcnle mandera cortarlas, a algunos grandes. (A ce q ue
le Roi com m ença p a r c o u p e r des tètes e t o r d o n n e de le faire à c e r t a i n s p erso n nag es i m p o rtan ts .) » ( Col­
lection de documents inédits, t. X III, p. 5 2 v°.)
* Fils d e G a b r i e l , co m te de M o n t g o m m e r y , q u i a v a i t eu le m a l h e u r de blesser à m o r t le ro i
H e n r i 11 d a n s un to u r n o i, e t s ’él a i t dès lors a t t a c h é à la ca u s e des p r o t e s t a n t s de F ra n c e . G ab riel su b it
le d e r n i e r su p p lic e à P aris le 2G j u i n s u i v a n t .
* B o m e l r c w a a r d , ile d a n s la p r o v in c e de G ucldre.
I)U CARDINAL DE GRANVELLE.
93
C’est grand chose que soions quicte du conte Lodovic, et que les François
ont de la besoigno. Dieu nous favorise beaucop, et si estions sur pied, je
tiens q u e (’Hollande retou rnero it tost, et que jà elle le seroit. si le pardon
fut esté public d ’ung costel et que l’on leur heu monstre les forces d ’aultre
p o u r maintenir l’auctorilé du maistre. La Zeelande tiendra si ne devenons
maistres de la mer.
Le duc Erick est à Z ut phe n avec 1.500 chevaulx, et gatte tout, comme
il a faict en Overyssel.
Nos bendes d ’or do nn an c e et soldatz de la frontière, auxquelz l’on doibt
par années, c om m en cen t de faire les mauvais.
Ju lia n Romero at esté chassé d’Anvers et at trouvé les portes closes à
Brucelles, do nt il at esté fort fâché Touttefois l’on luy al à la lin ouvert,
que fut esté mieulx au co mm en cem en t pou r non tant les traiter: et l’on at
fort la dent s u r cesle ville de Brucelles.
L’on nous dit icy q ue les Espaignolzde Valdez sont entrés à U t r e c h t 1 par
le chasteau, que je ne puis achever de croire; car si ainsi est, le seigneur
Don F e r n a n d e est en peine avec les manantz. Ces insolences nous font
beaucop de mal.
Ainsi q u e j ’escripvoye ceste l’on m’advise q u e les amutinés d ’Anvers
s’accommodent. La ville at treuvé 1111e mille florins, comm e l’on les luy
avoit commandé. Si cela n ’aide, il sera lard avant que l’on trouve d ’ad vantaige. Touttefois l’on de man de par e m p r u n t à Monsr l’évèque d ’Anvers
vnm florins, et à plusieurs particuliers 1111111 chascung.
Monsieur de Villcrval 4 al longtemps pourlié de faire aulcuns forlz en la
Campigne, q u e le duc d’Albe at c o n tr e d it ; et co mm e Son Excellence les at
consenti, l’on en tire un g gr and fruict et repos, car ceulx de Ger truyenberghe sont tenuz courtz. Il n’est pas à croire comme ladite Campigne, que
estoit la meilleure et plus riche partie de Brabant, est désolée.
Monsr de Champaigney at esté de nuict vers le Co m m en da do r Maior,
mand é de luy; mais qu elq ue semblant que l’on face, je tiens que celluy
1 Les é v é n e m e n t s q u i e u r e n t lieu à A nv ers, le 5 0 av r il 1 5 7 4 , so n t r e la té s d a n s u n e le ttre d e V aldès
ad r e ss é e a u G r a n d C o m m a n d e u r le 2 m ai e t i m p r i m é e d a n s la Correspondance de P hilippe 11,1. Ill ,
pp. 6 8 e t s u i v . ; c eu x d ’U treeh t, ibid., p p . 0 9, 81 .
s A d r i e n d ’Oignics, Sr d e W i llc r v a l. V o ir sa b io g r a p h ie d a n s K ervys
Documents historiques, t. I, p. 2 6 7 .
■
be
V olk a er sb ek ec I D iegerick ,
CORRESPONDANCE
94
qu'at le go uvernemenl du chasteau est plus en grâce et que c’est un jeu
joué, encores q u ’il soit mal tourné
Le Padre Trigosa ' cl Arias Montanus 5 ont esté mal et ignominieusement
traiclés des mutinés, j u s q u ’à tirer audict Trigosa u n g pistolet chargé, tant
seullemcnt de pap pier au visaige, p ou r le faire taire lorsqu’il les prescha sur
le marchiet.
Ainsi que j’escripz ceste l’on nous dit de rechief que les affaires d ’Anvers
se sont raccommodés. Dieu le doinl.
XXIX.
L E P R É V Ô T M O RILL O N AU CA R D IN A L D E G R A N V E L L E .
( Bil>l 'oihèipie île lîe-ançon. — Lettres diverses, l.
Il,
fol.
IKO-INI )
Bru x elles , 2Î> m ai
lt>71.
Encores continuent les amutinez d ’Anvers en leur propos, et ce q u ’ilz
accordent l’u ng jou r, ilz le r o m p e n t l’aultre, et font mille insolences et
griefz aux bourgeois qu e p e rd e n t pacience se véantz ainsi affligez ’. Tel en
est à deux, trois et qua tre florins p a r j o u r, au lcuns m ar ch and z à x u et
à xvi; bien est vrav que la pluspart s’est retirée. Ce que veantz lesdietz
amutinez, ilz g a rd e n t les portes et passaiges s u r l’eaue, et ne lessent sortir
personne. Ilz ont fort mal traicté le cassier de la vefve de Girard Sterck,
sieur du Busquoy, p o u r ce q u ’il d o n n â t un co u lp de poignart à u n g soldat
qui l’outragea g r and em ent ; que fut cause q u ’il fut tiré violentement hors
de la main de justice et miz à mo rt par les amu tinez qui ne voulurent permectre q u ’il se confessist, que lque requeste q u ’il enfe luy ont coppé le
1 V o ir p lus h a u t , p. 80.
* A rias M on ta n us o u M ontano. Voir p lus h au t, p. 51.
* Uequ esens d o n n e d a n s sa le t t r e a u Roi d u 23 mai u n e p e i n t u r e é g alem en t af freuse de la m u t i n e ­
ri e e s pagn ole. V oir Correspondance de Philippe I I , t. 111, pp. 8 8 e t suiv.
DC CARDINAL DE GRANVELLE.
nay, les oreilles et doibgtz, luy do n n a n t plus de cent coups après sa mo rt
et d ép en du p a r les piedz à un g gibbet, où ilz l’onl harcquebouzé. Cecy at
merveilleusement irrité les bourgeois. J e craindz que devant q u e le jeu
passe, il y aura de l’inconvénient, et q ue la ville se perdra. Si nous ennemiz
auroient plus de forcez et q u ’ilz l’approchoient, je craindz q u ’ilz en auroient
bon marchiet: tant sont les couraiges altérez; et il faict à croire q u e ceulx
qui ont en charge le chasteau, se contenleroient de ga rde r icelluy. L’on
verra doibs que ces gens seront paiez et partiz l’or dre que se meclra en
ladite ville, en laquelle, si Mr de Champaigney n ’est remis, l’on verra devant
longtemps le mal q ue a dv ien dr at de son absence, laquelle est désià fort
regretté de chascun. Il se tient à Canticrode ' avec x x soidalz, en ce qu'il
faict bien : car lesditz amutinez luy veuillent grand mal et le menassent
grandement. Ilz enraigent de ce q u ’il al esté en ladite ville en habit desguisé parler à Son Excc, que l’at encores m a nd é depuis, do n t il s est excusé
p o u r le dangier, ce q u ’elle at fort bien prins ; et ad ce que me dit Mr d ’Achey, q u e vint hier de là, Son Kxce est fort mal contente de ces gens et
pr en d pacience. Elle pensit di manche aller à la g r and e église, et a\o it faict
porter son tappis et coussins que ces bonnes gens ren \ o i ar e n t, d i s an t z q u ’il
n’y avoit que faire et q u ’il n’esloit temps de leur faire le serment selon
leurs conventions, que Son Exce n’usera cy-nprès de chastoy, ny en général
ny en particulier, ne d ’aulcun ressenleinent; mais q u ’il les paiast premier,
et que lors se polroit faire le serment. L’on dit q u e hier sont esté mises les
fables à Sainct-.Michiel et y porté l’argent pour les paier. Dieu doint que
l’on en soit une fois quicle. Certes ilz font perdre une belle saison pour
recouvr er l’Hollande avec un g si beau et secq temps q u ’il faict à présent;
et je tiens que si la grâce fusl esté publiée, comm e elle fut esté pièçà sans
ce désastre, que icelle d ’ung coustel et les forces d’au lire heussent désià
faict ret ou rn er beaucop de villes. L’on dit que ceulx de Dordrecht en ont
b on ne volunté, et qu e don Fer nan de * est vers Schoonhove et les tient
serrez. Du moings fussent esté pièçà nostres Delft et Leyden sans ces broilleries. Le Prince d ’Oranges est tousiours vers Bominele que l’on vad
assiéger, et y est allé Chappi n Vitello p o u r tenir le lieu de Son Excce.
1 C a n te c ro ix , c h â t e a u a p p a r t e n a n t à la famille P e r r e n o t , e t sis p r è s d ’A n vers. Voir t. I, p. 262 .
3 F e r d i n a n d d e L am io y, eo m te de La floche, b c a u -frcrc de G ran vclle. V o ir jiltis liau t, p. 10.
CORKKSPONDANCE
Je craiiulz que celle ville nous a m us er a; mais l’on polroil d o n n e r s u r les
gens dudit Princ e, que sont là à l’e nto ur avec peu d ’ordre.
J ’enlendz que iVlr de Champaigney al escripl fort am pl em en t au Koi sur
ce que passe et q u ’il a faict c o m m u n ic q u e r ses lettres devant que les envoyer
à Viglius
Son Evce estime d ’eslre icy la veille de la Pentecouste, et lors pu b lier le
pardon, aiant m a n d é à cesle cause Mons1' de Cambray que ferai l’odice à
Saincle-Goele, et lVlons1 d ’Arras le sermon, selon q u ’il at esté requiz p a r
lettres de Son Excc.
;Monsr de Sainct-Bavon al voulu qu e je entreviegne avec Mr Foncq* sur le
faicl de la grâce et p o u r estre subdélégué comme l’aullre fois. Ce que m ’at
empesclié de povoir escripre plus particulièrement, ce q u e j ’espère faire par
le premier, et mesmes de quelle sorte s’esl arresté le concilie provincial
que nous at delenu à Louvain jusque s samedi dernier, encores q u ’il fust
publié le j o u r de l’Ascension.
Son Exce at escripl aux dépuiez des Eslalz que sont icy alfin q u ’ilz
d em eu ren t j us qu e s la Pentecouste. Ceulx de Brabant ont receu et ouvert
les lettres, sans appelier les aullres, qui en sont faschez. Hz leur ont envoié
copie non autenlicque.
Cette mutinerie ne pouvoit adv en ir en pire conjun ctu re que ce p e n d a n t
que les députez des paya y sont, q u ’est despuis le d ern ie r d ’ap v ril ; confé­
r a n t consilia et j e veoidz beaucop de choses q u e me déplaisent, mesmes
que tout vad à la désespérade, et je craindz commotion populaire t ant icy
que aillieurs c ontre ceulx d ’Espaigne.
Hier sur le seoir s’est mis le feug à une tour où le d u c d ’Albe avoit faict
meclre de la p o u l d r e 1, que al lué gens, ru in é maisons et gatlé les verrières
de Saincle-Goele et du c h e u r du Saincl-Sacrement, et en avons sentie les
esclalz chéans.
1 Cette lettre, ilatée d u “28 av r il 15 7 - t , r s t a n a ly s é e d a n s la Correspondance de Philippe I I , t. III,
p. o I . C h a m p a g n e ) lui rem it la r e la tio n d e la m u t i n e r i e i m p r i m é e d a n s les /{eciieils d ’Aretophile et d a n s
les Mémoires de Cham pagney, p u b l i c s p a r de R o b a u lx de Soumoy, p. 33. D ans l’i n t r o d u c t i o n , p. xxv,
l 'é d i t e u r p arle d es p lain tes de R e q u e sc n s a u Koi c o n t r e C h a m p a g n e y .
’ J e a n F o n c k , p r é v ô t d ’U tr c c h t. Voir ^ lu s h a u t , p. 4 0.
5
11 y en a v a i t S 0 q u i n t a u x . L’e x p lo s io n e u t lieu le 2 4 m ai vers q u a t r e h e u r e s d e l’a p r è s - d i n c r .
S ep t à h u i t p e r s o n n e s y p e r d i r e n t la v i e ; il y e u t b e a u c o u p d e blessés. Voir, p o u r plu s a m p l e s d étails,
la Conespiiiidnnce de P hilippe H , t. III, p. 92.
DU CAKDliNAL D E GRANVELLE.
97
XXX.
l. E C A R D IN A L D E G R A N V E L L E AU DL’C D U R B I N
(A rchives d ’ U rh in o. — C l. I , Div. fol. cxxi.)
N a p l e s , 5 0 mai 1574.
Il Secrelario di V. Ecc;‘ m ’ha datlo le sue delli
del passalo et 5 di
queslo, et moslrato me ancora la Jettera di V. Ecca scritta a lui. Io sono
cerlo ehe quella, conoscendo la devota et anlica servitù mia, credera facilmente che nessun ollilio fallo per lui in corte nelle cose ehe le h an no
parso convenire al suo servilio m ’ha possuto offendere, nè l’ho preso in
a lira parte se non come V. Eccza slessa desidera, perché son certo c h ’in lende quello ehe passa et il fine eh’io lengo cosi nelli suoi negotii corne
in quelli delli SS1' Principe et Principessa di Bisignano Sapera ehe tutto
va indrizato al suo servilio, et con il respetlo che debbo all’ 11Ima et E c c ma
sua casa; et ch’am bi dui tenemo u n medesimo fine, se bene alle voile nelli
mezzi non concurrerno in un parere. Pero Iddio, et il m o n d o et V. Ecc“
slessa vederan sempr e ehe l’intenlione mia è relia senza allro fine ehe di
far quello ehe si deve. iVIi piace c h ’el delto prosecrelario vadi d a r una
voila da lei, perc hé spero che da lui sarà informala di maniera ehe conoscerà come io procedo.
Son cerlo che V. Ece” si sarà rallcimitn
del buon successo del le cose di
<?
Fi a n d ra poichè e lanlo affellionala a Sua Maestà, dirô ancora et al be nefilio universale, per il quale non è poco a proposilo ehe la Fi an dra si
riduca al segno clic convii ne. El veramenle non poleva la vittoria venire
a meglior l e m p o ; et si pu o siuiilmenle lenere per molto b u o n a nova l’havere il Ile Chrislianissimo scuoperlo li tradimenti che s’urdevano conlra la
sua persona et la religione. El vengo cerlificalo con lellere del Sr Imbascialore nostro nella corte di Francia che è p u r vero che ha fallo meliere en
prigionc nella baslida il lie Chrislianissimo con molto contento della villa di
1 (iui-L'balil II, d u c d ’U i h i n , né le - av ril I ÜI 4, nioi l Ic iJi) sc p l c n i h r c 1 5 7 4 . Voir plu s hau t, p. 7 4.
T ome
V.
13
98
CORRESPONDANCE
Parigi, il mariscalo de Memoranzi ' et quello di C os sè 1 Adgiongheno alcuni
che avea mandalo con molta diligenlia in Languedoc per pigliar nel medesimo tempo il mariscalo Danvila 5 fratello del detto Memoranzi, per du bb io
c h ’ havendo le armi del Re in mano intesa la priggione del fratello, non
facesse qualche sinistro motivo. Con questo et essersi disfatta dapoi la
gente che di novo pensava far il coiîdè Giovanni de Nassau parente del
Principe d ’Oranges; et che visto quello li 4-m Francesi et 600 cavalli che
n andavano agiongersi se fossero retirati, si puô sperare che dalla parte
d ’Allemagna et di Francia quelli slati del Re nostro signore staranno
sicuri per quella estate.
Di levante intendemo che I’armata del Tu rc o non ha possulo essere
tanto presto a p un t o come si diceva, el che saranno li 15 del mese che
viene inanzi che possa partire di Constantinopoli. Tanta grande machina
como V. Ecca meglio sa, non si maneggia cosi agiatamente come molti si
pensano, et chi ne fa la prova lo intende. lo so q u an to stentiamo in questo
regno per mettere in ordine le nostre 50 galere, ma io le tengo gia gratie a
Iddio in lal pu nt o che spero p ot ra nn o giongersi in Messina q u a n d o ve nn e r an n o le altre el forse meglio in ordine di qua ntc vi saranno. Et offerendomeli sempre pr o m p to al suo servitio et a tutta ril lma et Eccma casa sua
faro fine con prega r Iddio che la prosperi et conservi.
XXX.
A N A L Y S E.
Le secrétaire du duc d ’U rbain a remis scs lellrcs au C ard inal, qui
lui est très
d évo u é. Il tiendra com p te de ses recom m an dation s, c o m m e le duc le désire, à cause du
1 F r a n ç o i s , d u c de M on tm o ren cy , m a r é c h a l d e F ra n c e , né le 17 j u i l l e t 1530, m o r t le 15 m a i 1 5 7 9 .
Il fu t i n c a r c é r é il la Bastille le i m ai 1 5 7 4 .
1 A r t h u r de Cossé, co m te S eco nd igu y , m a r é c h a l de F ra n c e , n é v ers 1 5 1 2 , m o r t le 15 j a n v i e r 1 5 8 2 .
■ H e n r i d e M o n tm o r e n c y , com te d e D a m v ille , p u i s duc, c o n n é t a b l e de F r a n c e , f rère p u î n é d e
F ra n ço is, né le 15 j u i n 1535, m o r t le 2 avril 1614.
99
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
m ê m e intérêt q u ’ils ont en ce qui co n cern e les affaires du prince et de la princesse de
B usignano. Ils ont toujours poursuivi le m ê m e but dans d ’autres affaires, q uo iq u ’ils
aient parfois différé sur les m o y e n s d'exécution. D ie u et le due saven t q ue les inten­
tions du Cardinal ont toujours été droites.
Il pen se q u e le d u c se réjouira du bon su ccès d es affaires en F land re, sachant très
bien q u ’il est d év o u é au roi d ’E sp agn e et au bien public. En effet, la victoire ne pouvait
arriver m ieu x à propos. On peut aussi regarder c o m m e e x c e lle n te la no u v elle d e la
décou verte d e la trahison ou rd ie contre le roi d e France et la religion.
D e s lettres d e l’a m b assad e u r d ’E sp agn e à la C our d e F ra n ce ont appris au Cardinal
q u e le B oi a fait in carcérer h la B a stille , au grand c o n ten tem en t d e la v ille d e P a r is,
les m aréch au x d e M on tm oren cy et d e Cossé. D p s personnes ajoutent en core q u ’il était
question d ’arrêter, dans le L an g u ed oc, le maréchal de Darnville, qui, disposant des
forces du R o i , aurait pu exciter un m o u v e m en t et réunir 4 , 0 0 0 Français et 0 0 0 c h e .
vaux aux troupes de Jean d e N a s s a u , frère du prince d ’Orange. Mais on peut espérer,
pour le m o m e n t, q u e tout restera dans le statu quo.
D e l’O r i e n t, le Cardinal a appris q u e la flotte turque n ’a pu être prête et q u ’elle
quiltera C on stantinoplc pour le 1!) de c e mois seu lem en t.
G ranvelle a eu de la p ein e à mettre en ordre 5 0 galères de la (lotte arm ée à M essine.
XXXI.
LE
PRÉVÔT
M O R IL L O N
AU
CA R D IN A L
DE
GRANVELLE.
( Bibliothèque de Besançon. — Lettres diver ses, t. I l , fol. 188, 189.)
B r u x e l l e s , 1er j u i n
I5 7 i.
J e di ray p a r ceste ce qu e concerne le publicque en response des vostrez
d u vu® du mois passé. Q u a n t aux foulles, elles accroissent jo urnelemenl, et
je ne veoydz poinct ap parence de mie ulx; car il n’y at moien de paier
les soldatz, pu isq u e le paysant ne peult paier son maître, et délibère de
h a b a n d o n n e r tout, co mm e désià s’est faict en plusieurs lieux. Les capitaines
flattent leurs soldatz, et leur permettent tout ce qu'ilz veuillent.
100
CORRESPONDANCE
J ’av veu ce que Voslre lllme Sgrie at escript et comme »1 esté receu le duc
d ’Albe. Aulcuns dient q u ’il est rappelle en Court p o u r go uverner tout; aultres qu e c’est p o u r r end re compte de ce q u ’il a escript au maistre c ontre la
vérité; a 11 lires dient que le d u c de Médina retourne, quod p a r u m est verisimile.
Nos amutinez sont paiez devant les festes. mais ne veuillent sortir devant
la lin d’icelles. Pleut à Dieu que ce fust samedi, et que l’on licentiât les
députez des Estatz, q u e se debvoit faire doibs le co mm en cem en t que l’on
se trouva accablé en Anvers, p o u r les s ép are r, et fussent retourné estantz
rappeliez. Il y h eu t hier un g mois q u ’ils sont icy, s’entrevéantz el festoyans:
je oye et veoydz beaucop de choses que me plaisent peu, et polrez avoir
dict vray en ce que sur ce poinct avez escript à Mr le Président, qui m ’al
comi nu nicq ué vostre dernière lettre, et dict qu il vouldroit bien ayd er au
ptiblicq si sa disposition le comportait. Et dit q u ’il s’apperceoit que l’on ne
le y demande. Aussi depuis q u e le Cornmendador est en Anvers, il n’at
poinct faict grand e presse n y à Mr le Président, ny à Mr de Berlaymont, ny
à Assonleville que sous escript. Mais Saneho d ’Avila, qui seul est source et
cause de nostrc mal, Mondragon avec ung Vargas nouvellement venu et
Arias Montanus sont du Conseil d ’Estat; et Roda gouverne tout absoluement, dont lesditz députez s’appcrceoivent et s’altèrent: et Dieu sçait ce
q u ’en dit le duc d’Arschot, qui s’appelle bourgmestre de Bruxelles, ne faict
qu e rire et brocca rder sans traicter aulcune chose sérieuse, pa rla nt de fil el
d ’éguille à table et de faire raison. L’après disnée, l’on vad pr om en er po ur
veoir aulcunes galoises 1 : c’est le train que mènent ceulx que doibvent
servir d ’exemple, estant la josne noblesse fort desbordée et adonnée à la
boisson. Et puis l’on se picque et pr end de q uerelle,comme s’est faict p a r le
sieur de Ru ys sebourch
que s’est attaché, après avoir joué du gobelet, avec
1 Galoises ou yalloises, fem m es de m a u v a i s e vie.
’ R o b e rt d e M c lu n , p lus c o n n u so us le n o m d e m a r q u i s de R o u h a i x , Sr d e R i c h e b o u r g , fils de
H u g u e s , c o m te d ’Esp ino y, v ico m te d e Gar ni, etc., et de Y o la n d e de W e r c h i n , d a m e de W a l l i n c o u r t ,
p r i t p a r t à la récon ciliatio n d es W a l l o n s avec P h i l i p p e , e n t r a a u s e rv ice e s p a g n o l , s ’e m p a r a de Licfk e n s h o e k , d e v i n t g é n é r a l d e ca v a le r ie et as sista a u siè ge d ’A n v e r s en 1 58 5 , où il sc no ya le 4 av ril
d e la m êm e an n ée. P a r lettre s paten tes d u 1 " m a r s 1 5 7 0 , sa s e ig n e u rie d e R o u b a ix fu t érigée en m a r ­
q u i s a t , et il fu t n o m m é c h e v a l i e r d e la T o is on d'o r. Il av a i t ép o u s é A n n e de R o l l i n , d o n t il n ’e u t pas
d 'e n f a n ts . V o ir IIovxck van P a p e n d u e c h t , t. I l , p a r t . I l , pp. 5 ! ) 5 , 4 0 7 , 4 5 7 , 4 4 1 , 4 7 1 ; K k r v v n de
V o l k a e r s b f k e et D ieg eiiick , D ocum ents su r 1rs troubles des P a y s - B a s , t. I, p. 4 3 8 . Son nom est sou-
DU CARDINAL D E GRANVELLE.
101
le sieur de B ea um ont ', le sieur de Cappre * et qu elq ue aullre enc ore', et
p o u r la dernière fois vendredi, après avoir disné avec Mr le d uc d ’Arschot,
avec le conte Philippe de Mansfeld auquel il donna ung coulp d ’estoc au
travers du corps, duquel il m o u r u t sur la place, sine cruce, sine lace. Dieu
luy pe rdoint : il esloit fort querelleux. Ledit Ruyssebourch s’est relire et
peult bien estre s u r sa g a rd e ,c a r les parenlz le poursuyvront. Il at fort gasté
son mariaige avec m ada m e la viconlesse. Le bastard d ’Aymerie at mal
nou rri ses trois frères
Le d u c d ’Arschot joua l’aultre j o u r au ballon sur le gr and inarchiet de
ceste ville; ce que fut bien noté par aulcuns, que (lient q u ’il ne se soucie que
de ses plaisirs, Mr de Ber laymont de son argenl, que la noblesse est vicieuse,
le Président indisposé, Assonleville légier et so ubdain, et que partant ceulx
d ’Espaigne qui ont empr ins de inattiner les subjeclz, ont beau jeu. Cepe n­
dant le duc d ’Arschot et aulcuns des députez dient q u ’il se fault laire quitte
de l’Espaigne et jecter Roda hors du conseil d’Estat. Ce que m’a plainct
le Président, q u e n’en est à son aise, ny de ce q u ’il ne vient rien de Sa
Majesté p o u r personne, à laquelle il dit que le Com m en da do r al envoie six
ou sept courriers, et en receu trois ou qualtre sans en faire aulcun sem­
blant*; et en celle opinion veoidz-je les députez qu e ledit C o m m end ad or ne
faicl rien nisi ex praescriplo Régis, et q u ’il n ’en fault aclendre chose meil­
leure. Voslre Mme Seigrie verra par la copie ce q u ’ilz ont useript au Com­
m e n d a d o r Maior et ce q u ’il al i espondu. Et dicl q u ’il morera de regret, et
qu e le prince d ’Oranges ne leict jamais tant de mal comme ont faict les
amutinez, et diet vray.
,
Son Exce at assigné ceulx d ’Anvers p o u r ce q u ’ilz ont furni sur la pre­
mière ayde de Brabant, que je craindz serat fort conditionnée.
Le sieur Roda vint icy le j o u r de la Penlecouste par la rivière, et comme
v e n t cité d a n s ces d o c u m e n t s et d a n s les Mémoires anonym es, t. I , p. 1 KO. L 'a ss a ss in a t q u 'i l co n u n il
s u r la p e r s o n n e d e P h i l i p p e d e Mansfeld es t r elaté d a n s u n e let(rc_d c K eq ues ens au lioi d u 15 j u i n
1 5 7 4 . V o ir Correspondance de Philippe I I , t. I l l , p p. 103 e t su iv ., e t p. < 0 4 , la lettre de Itequescns
a u p è r e de la v ictim e.
1 P h i l i p p e de C roy , d u c d ’A ersch o t, Sr d e B e au m o nt. V o i r t. IV, p. 07.
* O u d a r t d e B o u r n o n v i l l c , Sp d e Câpre s. V oir t. III, p. 5 8 5 , e t
de
V
egiano
* P h ilip p e , com te de M ansfeld, fils de P i e r r e - E r n c s t .
* A p a r t i r d u 7 j u i n j u s q u ’a u 9 ao ût, le Roi n ’écriv ait p l u s à Requcscns.
,
Nobiliaire, t. I, p. 2 8 7 .
COHIiESPONDAlNCE
102
le balteau se fendit po ur e>tre trop chargé, crai ngnant de se noier, il se
jecta en l’eaue, et eschappit par naiger. Il al consulté les sieurs du conseil
d ’Estat sur q ue lq ue difficulté proposée par Son Excellence : aulcuns client
q u e c’est p o u r licentier le d u c Erich, q u e gatte et r uy ne l’Overyssel, dont
ceulx d ’Ainslerdam pensoient estre secournz de vivres, et Hoda retourna
hi er en Anvers.
Mondragon faisant samb lan t de ret ou rn er vers le Prince
selon q u ’il
esloit obligé, passant par Breda, y est ret e nu ; q u ’est faict à propoz. Il
semble que l’on ren dr a Saincle-Aldegonde p o u r luy. Le prince d ’Orange at
envoié saulfconduict p o u r Iraicler du rachat de M' de Boussut
î\lr d ’Havret 3 faicl le fort de Lilit près de Bommele, sur laquelle ville
l’on al heu a m pr i ns e ; et dit l’on que Elberlus * l’auroit conduict, ce q u e je
ne croidz: car ce ne seroil prudence, el mectroit tous les siens en trop
gr and hazard Ladite e m p r i n s e a t esté descouverle, et ceulx que l’on avoit
envoyé p ou r l’exploicter delTaictz, sans qu e ung seul en soit eschappé.
Le Sgr don Fe r n a n d e n ’est sans traveil là où il est, comm e congnoistrez
p a r ses lellres. Les Allemandz veuillent suyvre les Espaignolz q u e sont
relournez à La Haye, q u ’est fort mal traiclée des ungs et des aultres.
Il y al gr and bru ict que don Joan vient avec grande armée par deçà, et
le croit sa mère q u ’en est fort joyeuse 5. Il y al dangier, s’il vient, q u ’il la
serre en quelqu e monastère po ur r o m p r e l’hantise d ’ung Anglois q u e l’on
1 Alix te r m e s de la ca p itu la tio n île M id d e lb o t i r g , citée plus h a u t , p. 4 1 , .Mondragon , q u i c o m m a n ­
d a i t les E spagnols en c e tte v i l l e , s’ét a i t en g a g é , s u r sa foi, h sc c o n s t it u e r p r i s o n n i e r d u p r i n c e
d ’O r a n g e , d a n s le cas où il n e p a r v e n a i t pas à faire d é l i v r e r : P h i l i p p e d e M a r n i x , Sr d e Mont Sle-A ld cg o n d e , le c a p ita in e J a c q u e s , fils d e S i m o n , C itad elli, i n g é n i e u r i t a l i e n , le lie u t e n a n t W i l l c k e u Van
A n g e r e n et le ca p i t a i n e P e t a i n . Ileq uesen s s 'é ta n t refusé d ’a c c o m p l i r ces con d itio ns, M o nd rag o n v o u ­
lait sc c o n s t it u e r p r i s o n n i e r d u T a c i t u r n e . Voir, à ce s u j e t , lu Correspondance du Taciturne, t. Ill,
p p. 9(î, f>7 ;
Mendoça,
t. Il, p. 18!) ; I*.
Bob,
liv. VI I , fol. 0 v".
* I le n i n - I . i é t a r d , Sr d e Boussu. a m i r a l au s e rv ice d ’E sp ag ne, av a i t été fait p r i s o n n i e r d a n s la Z u i d e r ­
zee, le I I octo b re 1Ü75. Voir P. B o b , liv. VI, fol. 130 v " ; Correspondance de Philippe I I , t. Il, p. 4 2 0 .
s C h a rl e s -P h i l i p p e d e Croy, S r d ’I l a v r é . V o ir t. I, p. 3G(>.
* E lb e r l u s l . c o n i n u s , p rofes seur à l'U n iv ersilé d e L o u v a i n . V oir sa notice, t. I, p. 47.
5
B a r b e B l o m b e r g , m è r e de Do n J u a n , av a i t ép o usé J é r ô m e P y r a m u s K cgc!, qu i fut n o m m é c o m ­
m iss a ire à Bruxelles . E lle ré s i d a i t en cette ville l o r s q u ’elle d e v i n t veuv e. D ép en s ière à l'excès, elle
v i v a i t d a n s le p l u s g r a n d d é s o r d r e et e n t o u r é e d 'a m a n t s . P h i l i p p e II v o u la n t la faire e n t r e r d a n s u n
c o u v e n t en E s p a g n e , elle s ’y refusa. Au m o m e n t d e l 'a r r iv é e de Don J u a n , elle q u i t t a le p ays e t sc
r e n d i t en Espagne.
103
DU CARDINAL DE GR AN VEL LE
tient estre espousé avec elle. Ceste nation al vogue par icy : j ’entendz qu ilz
sont bien 111e en ceste ville Si quelque altération y survenoit, ilz n’cspargneroient personne, et feirent leurs foingz à Malines. iMlle Be uf en at prins
u n g en grâce q u ’elle veult avoir po ur mari encores que la mère ne veuille:
mais les choses sont venuez trop avant. Aldana 1 est venu p o u r espouser la
plus j eu s ne fille, et tlict qu e Montgommery serait amené prisonnier à Paris,
qu e seroit une gr and e nouvelle pou r la France.
Je veoidz qu e Vostre Ulme Sgrie n’oblie aulcu ng oflice vers le Co m m en d a d o r Maior. Dieu doint q u ’il la croie et Iuy soit enlier. Il seroit bien que
le principal d’estat s’escripvit en françois: mais cela ne se fera. Il at trois
ou quatl re secrétaires espaignolz, et Iuy seul escript aultant qu e eulx tous
ensemble. Ung clercq, petit boussu que ha servi Prats *, ha plus de crédit que
son maistre. Celuy-cy se lue et ha perdu auctorile,et la l'aict perdre à ceulx
qui l’ont tant lou hé; et comm e u n g m a l ne vient seul, Vostre Illme Sgrie verra,
pa r la copie de la lettre que le sieur d’In de ve ld e 3 at escript à Mr de S^Bavon,
ce que ad vint devant hi er ,c epe nda nt que Son F x ce fut à l’église, feit le ser­
m ent aux a mutine z de tenir l’accord, Trigosa 4 prescha quel mal irréparable
ils avoient faict: eulx pr iar en l merci, le doyen de Taxis 5 les absolvit de
l’exc omm un icati on . Les capitaines et alferez r e t o u r n a i e n t en leur charge,
et baisarent avec des pr incipaulx rebelles les mains à Son E x oe, et le peuple
véant tout cecy disoit cléreinent q u ’estoit u n g jeu et farce jouée. Et fut
bien csbahi q u a n t on sonna l’alarme p ou r l’approc he des enneiniz, qui ne
d o rm e n t, et ne perde nt aulcu ne occasion rei yerendae.
A peine voul ure nt sortir les soldatz que jouoient en plein marchiet sur
des tables dresséez à propos, estant désià plusieurs quictes de ce q u ’ilz
avoient receu, veoir en la place mesme de St-Michiel où ilz furent paiez;
et puis l’on en cherchera de l’aultre pa r quelqu e moien que ce soit.
Ce at esté u n g bo n stratagème de magnifier par delà la victoire q u ’avons
heu contre le conte Ludovic, q ue certes estoit grande, mesmes si Iuy y est
demoré, en cas q u e l’on s’en fût bien servi et que les amutinez n’heussent
* F ra n ç o i s Aldaîi;i, officier e s p ag no l. V o ir
M
endoça
,
t. I l , p. 2 6 1 .
1 É li c n n e P ra ts, s e c r é ta ir e d u Conseil p r i v é . Il fu t aus si se c ré ta ir e d u Conseil d es trou ble s.
* Nicolas Micault, Sr d ’In d e v e ld e , co n s eille r d u Co nseil p r i v é . V o ir sa no tice, t. IV, p. 5 3 5 .
4 L e P. T rig o s a , j é s u it e . V oir sa n o t i c e , t. IV, p . 4U3.
* Roger T axis, d o y e n d 'A n v e r s . Voir
H
oynck
van
P
apendiieciit
,
t. II, p a r t . Il,
511.
104
CORRESPOND ANC E
loul galté, qui nous perde nt cest esté et toutte occasion de bien faire.
Dieu doint bonne adventu re à Pierre Melendez '. Le b ru ict est que l’e n ­
nemi s’appreste p ou r le recepvoir, et s u r ma foy, je craindz q u ’il ne nous
mesadviègne. Nous voulions tout ha sarder et faire p a r force, et il y at da n gier q ue l’on perde tout; il fut esté mieulx que, suivant l’advis de Vostre
I lln,e Seigrie, l’on heu t prins le c hemin plus seur p a r la clémence et appaiser
ceste dangereuse guerre. Ce serat q u a n t il plairai à Dieu!
XXXII.
IN S T R U C T IO N S
D O N N É E S PAR
P H I L I P P E 11 A DON
PEDRO
DE
A V I L A , M A RQUIS
DE
LAS NA VAS, E T AU L IC EN C IÉ DO N F R A N C E S C O D E V E R A , DU C O N SE IL R O Y A L D E S
O R D R E S , E N V O Y É S A ROM E L’ UN E T L’A U T R E P A R SA M A JE S T É C A T H O L IQ U E .
(Bibliothèque de Besançon. - Mémoires de Granvelle, t. III, fol. 4 à 12.)
L 'E s e u r ia l, 4 j u i n
1574.
La principal causa que nos ha movido à embiaros à Roma, ha sido y es
p o r d a r satisfaction à S. S. que, assi con cartas de su mano, como p or su
Nuncio que reside en esta corte, y por nuestro e m b a x a d o r q u e esta en la
suya, nos ha hecho m u y g r and e instancia que embiâssemos personas, para
( r a d a r de algun assiento y concordia sobre las diferencias de jurisdiction
que de algunos aïlos â esta parte se ban movido en Nâpoles y Milan
Demas desto nos ha movido â ello, el desseo q u e siempre havemos
tenido y tenemos de que los reynos y eslados que Nuestro Senor nos ha
encoinendado eslen con la quietud y sosiego que es razon, sin que por
ni ng un a causa pueda seguirse en ellos lurbacion ny alteracion alguna, como
de algunos dias â esta parte se ban seguido delas dichas competencias de
jurisdiccion, assi en Nâpoles como en Milan.
1 V oir plus hau l, p. 48.
DU CARDINAL DE GRANVELLE
105
Assi mismo nos ha parescido que es bien q ue todo el m u n d o entienda,
qu e po r nuestra parte no ha quedado ny qucda quo por (odos los medios
possibles no se Ionic assienlo y concordia con S. S., siendo nos obligado.
co mo hijo obedienle de la yglesia, a lener c l respello quo cs razon a quien
representa la persona de Dios en la tierra, m ay o rm en te en tiempos que
quasi en lodas las partes de la Christiandad circu mvi cin as a nuestros Reynos,
esla tan esfregado lo q u e (oca a la religion y obedien^ia a la sede appostolica. P o r lo qual, a u n q u e pudieremos con rigurosos rimedios, q ue el derecho
y c o s tu m b re nos permile defender nuestra jurisdiccion Real, y r e p r i m i r el
orden de proced er que en prejuyzio della algunos perlados han tenido en
estas materias, todavia nos ha parescido usar primero deste concedimiento
con S. S. de embi aros a Roma, para Iraclar con las personas que S. S. d e p u ­
la re todos los cabos q ue adelanle enlendereys.
Y a u n q u e creeinos q ue antes de vuestra llegada a Roma, v por vcnlura
anles de vuestra partida de aqui, S. S. havra niandado absolver los que
han sido declarados p o r descomulgados p o r las dichas causas, assi en
Napolcs como en Milan, segun lo havemos con muclia ellicacia pedido por
medio de Don J u a n de Cuniga nuestio embnxador, todavia liaveis de y r
con esle presupuesto q ue aquello anle lodas cosas este hecho, y dezir
claramente a $ S. q ue teneis orden nuestro p re c is o , de no co mencar ni
llevar adelanle ni ng u n traclo de concordia, si pr imero S. S. no los absuelve;
en el qual caso procurareis tambien con loda instancia, que S. S. se conlente de absolver generalmente ad caulhelam lodas las personas de mis
Reynos. q u e eslan en alguna manera illamadas en censuras por estas
causas de jurisdiccion, a u n q u e si esto postrero no se pudiesse oblener. no
liaveis de dexar de c om m e nc a r \ proseguir vuestra comisM’on. coino que den
absuellos los q u e estan declarados y publicados por descomulgados. segun
arriba se os ha dicho.
Y si bien de vuestra persona y dexleridad lenemos la conlianca que
vs juslo, y el poder que se os dara para esto sera lan absolulo y libre como
por el se vera lodavia. por ser estos negocio, de lan grand e qualidad. y
haverse disculido aqui lanlas vezes, y con lanlo studio y allencion, v
haver de ser la concordia q ue se tomare pei pelua y irrevocable, quercmos
y es nuestra volu ntad precisa, (jue en el traclar los dichos negoeios no excedais delo que en esla instruction se conlienc; y q u a n d o por la parle de S. S.
T ome V.
11
106
CORRESPOiNDAiNCE
se propusiere algun medio en esta 110 contenido, si el medio lucre lal que
a vos eon los demas personas qu e abaxo se diran, os parezca razonable,
direis que nos dareis aucto dello; y si no paresciere tal que se deva
aceeptar, lo desechareis del todo, sin da r a enlen de r que nos lo quereis
advertir, a u n q u e ; no eniba rg ant e esto, es nuestra voluntad que nos aviseis
parl icul arm en le de todo lo q u e on ello de la una y de la otra parle se fuere
p ro p o n ie n d o , para q u e se os pueda d a r de aqui el orden q u e convenga.
Sobre todo baveis de eslar preve ni do s, en que no haveis de d a r oydo a
ni ng un a cosa tocante a estos Keynos de Spana, ni a otros fuera de los de
Italia, diziendo claramente, en caso q u e p or S. S. sc os a p u n t c a l g u n a cosa
cerca deltas, q u e no teneis orden ni comission de tractarlas, ni tan poco
cs encargareis de escrivirnos nada sobre ello. excusandoos dela manera
q u e mejor pud ieredes, para 110 p on er en disputa, lo que de lantos aiios y
eon Ian evidente beneli^io nuestro esta tan assentado. Llegados a Roma,
comunicareis la presente instruction y despachos que Ileva is, con nuestro
e m b a x a d o r don J u a n d e ^ u n i g a , y ju n cl a m e n l e con su p a r e s c e r y intervencion, yreis Iractando de todos estos negocios todo el t i e m p o q u e alia esluvieredes, sin que se liaga cosa quo 110 le sea eomunicada, y tornado en el la
su parescer. Y dareis tambicn alguna parle dello, a los prelados q ue alii
estan, por la causa del areobispo de Toledo, de orden nuestra, no diziendoles ni comimmicandoles, lo que parlicularmenle se os dira en esta in st ru c ­
tion, si no para enlend er su parescer en la forma y manera del tractar los
negocios, y enlend er los medios q ue a ellos se le oll’rescieren, lo qual liareis
tambien en la prosecucion del negocio todas las vezes que os paresciere. Y
assimismo dareis la parte que it vos y al dicbo e mb ax ad or paresciere, al
eardenal Paclieco, y otros que alii ay confidentes nue stro s, pues el dicbo
embax ado r, coino persona de tan buen juy zio y experiencia de las cosas
de aquella corte, os sabra dezir con quales personas y que cosas sera bien
conninicar.
Al liempo q u e besoredes el pie a S. S., 110 direis mas de palabras blandas
y generates, dandole a enlen de r la allicion y devocion que le lenemos,
y q u a n ta desseamos que estas cosas se acaben con salisfaccion de ambas
partes.
Despues en la priinera audiencia secrela, no dexareis de signilicar a S. S.
con palabras m u y elfieaces el sentimiento que bavemos tenido de dos
DU CARDINAL DK GRAiNVELLE.
107
cosas : la primera, que algunos ayan querido persiiadir a 8. S. que en el
ticmpo de su ponlificado, se aya hecho po r mi parte ni por la de mis minisIros novedad ninguna, ni cosa q ue 110 solo 110 sea g ua rda da y usada de
muclios tiempos alras por los Reyes mis predecessores, q u e l'ueron tan
catholicos y christianos principes, pero m u y conveniente y necessaria para
la quielud y huen a governacion de aquellos Reynos, sino solo, continuado
la possession y uso lan antiguo q ue liasla aqui se ha tenido antes; desde el
dia que S. S. s e s e n t o en aquella silla, havemos pro cur ad o y rnandado, que
se lenga on todas paries m uy especial c uyd ad o de no inovar cosa alguna
conlra la j urisdiclion ecclesiaslica, sino q u e aquella se eonservassc y aug­
mentasse en lodo lo q ue no fuesse en detrimento de la nueslra real. Y assi
con todo encarescimienlo le rogareis y supplicareis de nueslra parte. quite
lal persuasion de su pensamienlo, y lenga enlendido q u e nunca fue lal
nue stra intension, sino de lenerle lodo el respecto |y mayo r si puede ser|
del que a sus predecessores havemos lenido; conforme a lo qual corresponderemos siempre con S. S., y a su paternal benevolencia. con la obediencia
filial y entranable alieion qu e de qu a lq u i e r principe y Roy christianissimo
S. S. puede dessear. La segunda cosa de que os haveis de sentir de nuestra
parte, es de la forma y man er a de proceder qu e en Napoles y .Milan, se ha
usado conlra mis ininislros, en perjuizio dela jurisdiccion real, mayo rm ent e
en tiempo q u e yo devia ser mas regalado y favorescido de S. S., haviendo
c ons umido todo mi pa lrimo nio en defensa dela c h r i s t i a n d a d : pues, siendo
yo tan observante v obediente hi jo de la sede appostolica, desseara niucho
qu e S. S. huviera ydo a la mano, y m an da d o a los prelados y sus ministros,
qu e no procedieran po r el or den que ban procedido. pues de no lo haver
hecho assi, ban tornado alas para proseguir y co n lin ua r los medios que ban
tenido en d i m i n u y r v d an ar la jurisdiccion que con lanta razon tenemos, v
dela qual con tanla juslicia y execucion della se ha usado p or mis minislros
para la bue na quiet ud de nueslros eslados; m ay o rm en te q u e los prelados y
sus m in is tro s, se ban esforcado y anim ad o mas delo q u e devian con los
breves tan rigurosos que ha escripto al cardenal de Gr anvelle, v co mm en do r
m a y o r de Castilla, y mas viendo el cu ydado q u e yo s iem pr e he tenido de
encoinendarles la jurisdiccion ecclesiaslica y la cuenta que con el la se ha
lenido y tiene en mis Reynos, lo qual puede S. S. muy bien conoscer, considerando qual ha q ue da do en lo demas de la C hr ist ian da d; y a este p r o -
108
CO RR ESP O ND EN C E
posito no dexaieis de d a r a enlend er a S. S. el respeclo de que con el se lia
usado. pudiendo, como pudieramos, valernos de olros medios para conser­
vation de nuestra jurisdiccion. Hecho esto, y procu ra do todavia que S. S.
qu ed e sabroso al cabo deste razonamiento, le pedireis que, paraque estos
nego^ios se despachen con mas brevedad, m an de hazer luego hazer la
d e pu ta tio n de las personas que con vos se buvieren de ju nt a r, para tractarlos amigablemente y p or via de concordia, y no p o r forma de j uy zio ni
disputa en cosa ni ngu na que toque a los merilos dellos. Y havcis do p r o c ur ar que las dichas perso na s, no scan en mas nu m ero de Ires, assi por
evilar la confusion que ordina ria men te se sigue dela inullilud de personas,
como por que no excedan el de vosotros con el diclio e m ba xa d or ; y que se
seriale lugar do nde os podais j u n t a r fuera del palacio de S S (si pudiere
ser], por excusar el ru y d o que de semejantes j un tas en lugares tan publicos
sc p u e de se gu i r, y q u e se seaalen tambien los dias y las boras en que esto
havra de ser, porque se pueda tractar y conc luyr con la brevedad quo mas
fucre possible, por excusar los incon\enientes que cada bora de nuevo,
nascen destas differencias.
Comencandoos a jun tar , baveis de a gua rda r a q ue los cardenales 6 perso­
nas que fueren deputadas po r parte de S. S. sean los primeros que pr o p o n gan, y si ellos prelendiessen que vos primero propusiessedes, podreis m u y
bien excusaros, diziendo q ue S. S. lia sido quien nos ha hecho instan^ia
paraq ue os embiasseinos alia, y qu e no embargante, que po r medio de
nuestro e m b a x a d o r le haviamos pedido declarasse el modo y forma que se
havia de tener; e m bi an do yo personas como S. S. queria, no lo quiso hazer,
y assi no baveis podido llevar comission precissa en ninguna cosa parti­
cular sino general, como lo pueden ver por la forma del mandatto. Y con
la misma razon, en caso q u e os pidiessen la instruction para verla o sacar
cosa della, podreis dezir q u e no llevais n i n g u n a , por no haver podido
entend er sobre que cosas particularmente se havia de tractar; lo qual todo
se ha de hazer afin que, si puede ser, seamos reos y no actorcs Y si to­
davia ellos insislieren en que por nuestra parte se comience a pr oponer
alguna cosa, les direeis, que las qu e al presente se ban puesto en controversia po r parte delos ecclesiasticos, son todas tan claras en nuestro favor,
q ue no veis que medio pudiessedes pr op on er sin notable agravio de nuestra
jurisdiccion, poniendo exemplo en las dichas de Milan, es a saber la dela
I)U CARDINAL DE GRANVELLE.
109
familia arm ad a y la del resla. eslando fan claro en dereclio, tjne ny los
prelados pucdcn tenor tal familia en tierras ad ond e la jurisdiction temporal
no es delos prelados, sino es po r permission de los principes seglares a
quien toca el uso de las armas; y ni mas ni menos quo en las cansas p r o ­
fanas y de bienes profanos entre personas seglares no pucdcn los juezes
ecclesiasticos exercitar jurisdiccion alguna, y q u e en estos cabos Ian claros
y qu e no tienen en derecho alguna dillicultad, como S. S. muy l)ien sabe.
no paresce que es justo qu e po r su parte se quiera q u ita r nuestra justi^ia,
si no conservarla como padre universal de lodos, gu a rd a nd o a cada 11110 lo
que es suyo.
Assi mismo paresce que se puedc dezir en lo de los expolios del Reyno
de Napoles, y en lo del sacrilego. pues tambien en derecho esla m uy averiguado. q ue do nde ay jurisdictiones espirilual y temporal distinelas, qu a lquier principe, p or gr and e que sea, ha do pedir el derecho q u e pretende en
el foro del reo a quien pide, y que en los casos m ir lo s , para la pena grave
(jue la yglesia no alcanca a da r al malhechor. puedc y deve el juez seglar
eonoseer y darse la pena q ue a la qualidad del delicto conviene. Eslo direis
lo mas brevemenle que se pudiere, insistiendo solo en derecho, y no tocando palabra de possession ni de eostumbre, pues siendo a(|uel de nuestra
parte, a ellos tocara allegar la possession y eostum bre que prelendcn ser
en su favor; de la qual podrcis m u y bien salir. diziendo que no se hallara
tal possession ni la puedc haver, no haviendo con cu rri do en ella los r e q u i ­
sites q ue para la proterition de (al coslumbre se requiere, es a saber ni el
curso del tiempo ni la nolicia y tollerancia nuestra, por donde, ya que sc
pudicsse dezir possession, se havia de llamar viciosa y clandestina} y por
consiguiente de ni ngu n efl'ecto para pr ejudicar a nuestra ju ri s d ic ti o n ;
a u n q u e todo eslo ha de ser po r inanera de discurso y no por via de dispula, pues sobre la diclia possession no se han de adm iti r pr ob an c a s de
hecho ni allegaciones de derecho, ni otra cosa alguna por d on de paresca
q ue aya conoscimiento de causa.
Podreisles dezir q ue q u a n d o Pio Quinto, su predecessor, embi6 aqui al
cardenal Alexandrino su legado, yo, po r d a r satisfaction a S. S , me con­
tents de venir en algunas cosas y medios que les fueron dados p or escripto,
de los quales si S. S. no tiene cumplida satisfaction, y les paresce que aya
algunos mejores, podran dezirlos y (ractar sobre ellos. y por esla via ven-
CORR ESPOND ENCE
cireis a conseguir vueslio intento de que ellos sean los primeros a pe dir y
p r op o ne r medios, que es cosa que inucho imporla a la bu ena direction del
nesrocio.
c' *
Y para q ue tengan cumplida nolicia de todas los cosas de que hasta
ogora ha liavido c on tro ve rsi a, os he mand ad o d a r trasiado de alguuos
papeles, assi consultas como instructiones y cartas de los virreyes, v p a rticularmcnte de las instructiones que llevaron el Marques deCer ral vo, y el
e om m e nd ad or m ay o r de Castilla, j un cl a m e nl e con otros papeles locantes a
esta materia; pero lo que al prosenle paresce que mas insta y tiene necessidad de remedio. se reduce a pocos cabos que son los siguientes.
El primero es de la familia armada, y en este ya por nuestra parte se
tomo el medio que havreis visto. de conceder al cardenal Borromeo aquellos
cinco 6 scys hom bre s con la lirnilacion que nos paresci6 ser conveniente.
Haveis de insistir que S. S. tenga por bien de o r d en a r al cardenal Bor romeo
quo sea contento con osso. y on caso que 8. B. quisiesse que essos liombres fuessen uno, 6 dos mas de los que se concedieron a instancia de Pi’o
(iuinto, no dexareinos de complazelle cn ello para atajar del todo esta differoncia, v q u a n d o et cardenal Borromeo se hiziesse renilente de acceptar
esta concession de nuestra mano. por el h u m o r que le movio por esta causa
de descomulgar sobre ello al coinendador m ay o r de Castilla, podreis lom ar
p o r medio que se liaga en virtud desta concordia entre S. S. v mi.
Y mientras estos nego^ios de Milan se fueren tractando, no dexareis de
hazer muv g r a n resentimiento con S. S. del mal modo de proceder del
cardenal Borromeo, no solarnente a lo que toca a la usurpacion de nuestra
ju ri 'd ic t io n Beal, poro aim en invcntar y hazer cosas tan contra nuestro
slado como ha hecho, pues bien pucde S. S considerar los grandes incon> e ni e n t e s q u e pudieran succeder, de hallarse descoinulgado el q u e represenla
mi persona en aquel estado.y los dos mas principales in in is tro sq ue ay en el
govierno d e l , y <|tie m uy 1‘a cilmenle pudiera succeder alguna occasion, que
viniendo enemigos sobre aquel estado faltasse la obediencia, y el govierno
y la provision estando descomulgados los que la haviau de hazer. Por lo
qual, y por haverassi mismo qu erido q u e se publique cada p r im e r domingo
del mes la excomunion, y la renilencia cn la absolucion, y protestos que
hizo su agente en Roma, y otras mucha s novedades que ha intentado y
intenta cada dia contra nuestra estado y jurisdiction, a u n q u e havemos sido
DU CARDINAL DE GRANYELLE.
lil
provocailo a liazer la deinostracion contra él q u e Tuera j u s t o , todavia
teniendo ol respecto a S. S. que en lodo devemos y qu eremos tenerle, no lo
havemos heeho, antes hemos holgado de representarlo prim ero a S S. con
la elïicacia y consideracion que el caso requeria. paraque con su prudencia
m ira nd o las cosas sobredichas. y mas el desacato y obstination que ha
tenido con S. S. en no g u a rd a r la orden delà supersessoria que le havia
dado, y en oponerse à la absolucion que S. S. mandava conceder al coinend a d o r mayor, sea S. S servido de poner la mano en ello, y proveerlo de
ma liera qu e 110 sea yo forçado a remediarlo delà mia, y que agora sea promoviéndole a otra yglesia. 6, como mejor le paresciere, le saque de aquel
estado, p a raq ue con ello se vengan a obviar los grandes inconvenientes que
de su estada en él se pueden cada dia seguir.
El segundo caho es del Mesta,cii que sera j usto que S. S. se contente que
se haga ôrden expressa y general, de que los legos, po r las cosas profanas,
sean convenulos ante juezes seglares, pues, demas de ser esto conforme a
derecho, conviene lanlo y es necessario para conseguirle el que le tuviere,
sin confusion de los liliganles.
Qu an to à los expolios, pues esta por nuestra parte la juslicia tan clara,
como arri ba se ha dicho, assi en la propriedad como en la possession, no
tractaréis de medio ninguno. pues no es bien ponei lo en disputa, s i n o q u e
se haga viva instancia, para que qu a nd o algun lego fuere llamado à juyzio
sobre esta razon. sea ante juez seglar, pues es conforme à juslicia, y se uso
assi en tiempos passados; y si os paresciere que para atajar estas diflereuçias sera buen medio tractar con S. S. que attenlo que los obispados y
bénéficiés de aquel Reyno son tan tenues como es notorio, tuviesse por bien
de alçar la man o destos expolios, y darlos à los successores conforme
a la disposicion del derecho coinun, en lo quai S. S. haria obra digna de
su gr and ez a; y tan pia, que sera quita r de aquel Reyno una graveza, de
q u e aquel Reyno y clero reciba grandissima vexaçion, y que assi mismo
dexasse de e m b i a r à él collectores ni nunçiôs, pues qu ita ndo lo do los
expolios serân poco menest er; haréis en esta parte la diligencia que os
paresciere convenir para bien deste négocié, pero q u a n d o viéredes qu e en
alguno destos dos pu n tö s havrâ dillicultad, y qu e el tractar dellos podria
causar embaraço y mala satisfaction para conseguir el effecto q u e se p r é ­
tende, no locaréis en ellos, sino solamentc insistiréis en lo demas q u e en
112
COKUKSPOMMINCK
esle particular se os ordena, p r ocu ra nd o on lodo caso, quo a lo monos iS S.,
vonga cn quo las causas do los mismos expolios que se traclaren contra
legos, sean conoscidas y delerminadas por los juozes seglarcs, como siempre
se lia liecho, antes do la yda del d u q u e de Alcala a aquel Reyno, cuya
ncgligencia bien sabe S.S. qu e po r tan pocos afios y aun po r mucbos mas
no pudiera liazer prejuyzio a mi real jurisdiction.
Kn lo que toca al economalo de Milan, no parcsce quo ay quo afiadir ni
q u i ta r al medio quo eslava tractado con el cardenal Alexandro, q u e os que
yo no mbre la persona, y quo S. S. le conceda la provision y el titulo, piles
devo bastur a S. S. quo yo me aparte dela possession, en que ha tantos afios
qu e eslan mis predecessores en aquel estado, de quo el economo sea di pu tado por mi \ tonga patento y titulo mio, y me conlenle de qu od ar consolo
el nom bra mie nto , y que el se llame economo apposlolico. Y a un qu e paresce
q ue on la dipulacion que S. S. lia lieclio de J u a n Duarte para el dicho
oflicio, lia que rido coinoncar a poncr eslo assi en execution, lodavia por que
en la diclia provision 110 bare mcncion ninguna de nuestro no mbramiento,
no havemos qu eri do consentir que lo acceple el dicho J ua n Duarte,si bien
al Com en da do r m ay o r se parescio de dar otra orden alia, como el ha querido. no emb arganlo lo qual insislircis que cn esta concordia q u e agora se
ha de lomar so ponga special capitulo dollo. paraq ue quede para adolante
en lodos tiompos assi assentado.
Kn la materia do la m onarchia de Sicilia, por ser cosa do la importancia
(jue veis para la buena governacion de aquel Keyno, no liavcis de locar
cosa ninguna de medios, ni respon de r a los q u e p or parte de S. S. se propusiosson. sino ombiarlos acii luogo, paraq ue se os diga como haveis do
pniceder. Solamonte podreis assegurar a S. S.4que si ay en el exercitio della
alguims abusos, yo holgare much o de quitarlos y quo si S. S. quiere confirmar y renovar, yo la recibii e de su sancta mano, no embarganto que por
el privilegio tan anliq uo y la costumbre que inviolablemente so ha gu a r ­
dado en aquol Heyno, 110 pueda \ o ni (leva tenor scrupulo ninguno Y e n
esse easo os ombiaremos de aca particularmonte, todo lo quo acerca del
oxercicio della le podra reformar o emendar. 6, pedir a S. S. por nueva
concession.
En lo del m ar qu e s de Casalarbore, haveis de liazer instancia con S. S.,
que se conlenle de venir en el medio ya propueslo por mi em baxador, que
DU CARDINAL DE GR AN VELLÊ.
es, que se elijan àrbitros por su parte y por la rnia, y tercero en caso de discordia, y que desta m ane ra amigablemente se acabe de delerminar, pues
tractàndose de da r fin à lodas las differençiàs con este assiento, no es j uslo
qu e esta que de indecissa, y los sonores del feudo descomulgados, como lia
tantos aîios q u e lo estan.
El negoçiô de los casos mixlos tiene dos partes : la una tocante al caso
del sacrilego que se sacô de las carçeles del arçobispo de ÎNâpoles, y la otra
en general de todos los casos qu e por los doctores se Hainan mixtos. En lo
del sacrilego si seos tocâre alguna cosa, podréis justilicar lo hecho con
deçir, que la q u ali da d del caso agravava de manera el delicto que no podia
ser casligado dig namen te p o r j u e z ecclesiaslico; po r lo quai el juez seglar
paresçe que en q u e re r tractar del castigo, y en castigarle, no liizo excesso
alguno. antes lo q ue convenia al bien publico y â la auctoridad y reverençia
que se deve à las yglesias, m ay or m en te que en general se puede acometer,
que el juez ecclesiaslico mas tracla de los casos mixlos contra legos por via
de penitençia, y correction, q u e p or via de castigo sulficienle.
En el segundo cabo, tocante en general â tados los casos mixlos, veréis
una consulta que nos liizo el d u q ue de Alcalâ, â los diez y nueve de julio
1570. p or la quai paresce que, assi de dereclio como por los capilulos del
Papa Honorio, y antiquissiina costiirnbre de aquel Reyno, se ha proçedido
en ellos, de la ma nera que mandàmos respon de r al cardenal Alexandrino; y
pues esto esta tan llano, 110 ay (jue traclar de medio alguno. s i n o q u e S. S.
se contente d e q u e açerca della no se inove cosa alguna, ailles quede en esta
concordia assentado que assi se gua rde en lo de adelante. Y si todavia p or
parte de S. S. se propusiesse alguna cosa çerca desto, nos la avisaréis,
comunicândolo p r im e ro con los prelados qu e arriba se os ha apu nlad o, y
advertiéndonos de su parescer y del vuestro.
En lo delas décimas de INâpoles y iVIilan, veréis lo que se respondiô al
cardenal Alexandrino, d e lo quai no cenviene en ninguna manera apartarse.
y q u a n d o el Papa pretendiere otra cosa f lo q u e no creemosj nos avisa­
réis dello, sin traclar alla otro medio alguno. Y po rq u e conviene q u e estas
différencias enlre la jurisdiction ecclesiàstica y seglar queden con el assiento
que agora se tomarâ decision . 110 solamente para lo q u e toca al présente,
pero tarn bien se dé forma en que para lo de adelante no las pueda haver :
veréis la concordia q u e se tomô entre el cardenal de Domege y la Reyna
T ome V.
15
m
CORUESPONDANCE
dofia Leonor tie Aragon, y en cl punlo quo toca a averiguar la diflerencia
(Idas dos jurisdictiones con cleclion do a rb it ro s , como alii sc dice, procurareis do establescer olra semejante con S. S. en los Reynos v ostados do
Italia.
"
Por la nueslra parlc bavois de Iraclar en esta concordia de que S. S eon­
firme, el qitalenus opus sit, de nuevo conceda el indulto que lengo en el
estado de Milan por concession de Leon decimo, lieclia al Rey Francisco de
Francia como Du q u e de aquel estado, que, si bien no ay en el privilegio
o indulto sobre dicbo scrupulo ni n g u n o , y se ha gu ardado siemprc y
guard» inviolablemente, todavia holgaremos de recibir esla merced de
man o de S. S.
Assi mismo haveis de hazer grande inslancia, de que S. S. sea servido
reformar la bula in cena D o m in i, de algunas clausulas de nuevo anadidas
p or S. S., y por su predecessor r*io Quinlo, a lo qual paresce por la relacion que nos hizo el cardenal de Granvela, que se inclinava S. S. el marco
passado de setenta y Ires; y para esto vereis la instruction que se dio al
dicho co mandador mayor, de que arriba se haze mencion, j u n cta me n le con
la nota de los inconvenientes que de los dos Reynos de iNapoles y Sicilia, y
estado de Milan, nos ban advcrtido los visereyes y consejos dellos, para quo,
eonforme a lo que de los dichos papeles resulta, podais pr oc ur ar el remedio
conveniente, advertiendo a S. S. que para auctoridad de la misma sede
apposlolica conviene, que la bulla se haga de manera que los reyes y p r i n ­
cipes temporales no podamos agraviarnos della, porque dessa manera
procuraremos qu e se guarde y cumpla, y tenemos por bien que se publique
y se guarde en todos nuestros Reynos y estados, d an do a entend er a S. S.
que p or la relacion que tenemos de nuestros consejos, esta nuestra consciencia bien saneada de que, segun la opinion de los mismos canonistas,
no es obligado el principe seglar a cu m pl ir los mandamientos del Papa
sobre cosas temporales, por do nde se seguira desacalo y menosprecio a la
sancta sede apposlolica, qu e es la cosa quo, segun los tiempos que agora
corren, S. S. deve lo mas que pudiere evitar, quan to mas que aquellas
revocaciones que S. S. haze en ella de privilegios, costumbres y prescripciones iminemoriales, no pued en d ex ar de causar grandes turbaciones en
los principes seglares, y por consigniente en toda la republica Christiana
cuya quietud y sossiego deve S S. procurar, como de su Sancto zelo y
desseo se confia
DU CARDINAL DE GRAiNVELLE.
113
Eli general terneis advertencia, de quo ni ngu n papel scripto ni firmado
de vuestra man o q ue de en poder de la otra parte, sino qu e vayan las
cedulas y papelcs q ue sobre ello passaren en forma de simple scripluru,
y que no pueda tener fuer^a ninguna, salvo en caso q u e S. S. viniesse en
algun medio de los sobre dichos, o alguno dellos, en el qual se podra en
aquella parte stablescer y finnar la concordia mienlras se fuercn adelanle
Iractando los demas cabos.
Adverlireis l a m b i e n , que a u n q u e arriba se os ban a pu nl a do los dicbos
medios, no baveis de tocar ninguno <lellos, si primero no fuere sobre aquel
particularmenle propuesla quex a por los diputados por S. S., de manera
qu e por nuestra parle no se les venga a offres<jer cosa ni nguna de los
medios, sino fuere despues de mucha instancia liecba por ellos, governandos
en el proponerlos con la dexteridad que se requiere, es a saber, no condescendicndo a ellos en el p r i m e r lance, sino poco a poco, y en la forma que
para guiar bien los negocios os paresciere que convenga, p r ocu ra nd o que
lodo se liaga con lo majo r venlaja que se pudiere en benelicio de nuestra
jurisdiction. Y adverlireis assi misino, que en las confirmaciones o concesciones de nuevo que S. S. nos huviere de bazer por virtud desla concordia.
sean para mi y mis successores en el Reyno o estado donde aquellas se
huvieren de conceder, pues no nos eslaria bien en ni nguna manera que
alguna dellas fuesse temporal, ni que po r nin gun caso luiviesse de extinguirse, a u n q u e no por esso reusareis de acceptarla, sino de xa ndo la platica
en pie nos avisareis de lo que se os huviere oflrescido, para que enlendida
la qualidad del nego<jio y forma de la gragia que se olTresciere se os escriva
si se havra d e a d m i l i r o dexarse de bazer inslan^ia en el la.
En lo del Capellan m ay o r de Napoles, si por parte de S. S. se persistiere
en la que xa que aqui propuso el cardenal Alexandrine, haslara allegar la
possession mas q ue immemorial en que aquel esla del exercitio de la
jurisdiction episcopal en mi palacio real y castillos de aquel Reyno, como
mas am pliam ente lo vereis p o r la consulla que sobre ello nos liizo el card e­
nal de Granvela a ultimo de marco 1572, en el ultimo capilulo della, si
bien ay un lilulo que Papa Leon deciino con^edio al E m p e ra d o r mi Senor.
de gloriosa memoria, de la data de dos de novieinbre 1519, cuyo Iraslado
se os dara, del qual no hareis presentation ni ngu na liasla q ue deis aviso
dello al cardenal de Granvela, paraque ju n c l a m e n l e con el consejo colla-
CORRESPOiNDANCE
It-ral vea si conviene moslrarle, y podreis lambien coinunicar con el dicho
cardenal en el mismo tiempo, si pueslo que S. S. de la diclia possession
immemorial y del dicho titnlo [ e n c a s o q u e s e haya de mostrar no quedasse
satisfeclio [lo que no creemos] seria bien tractar que S. S. se conlente de
concederme tin breve, en que por aucloridad apposlolica conceda la diclia
jurisdiction, con las clausulas y circunstamjias necessarias a los Capellanes
Mayores qu e por mi y mis successores pro tempore fueren elegidos, y que
no se pudiesse obtener esle breve perpeluo, que seria lo mejor, si convendria Iractarse en esta concordia, q u e a todos los que yo diere lilulo de
eapellan mayor, les conceda la provision con la aucloridad*episcopal que
hasta agora le ban exer^ilado; y procurareis haver ;i las manos los breves
que cn el dicho lilulo de Leon decimo se acusan, de los quales y de la respuesta del dicho cardenal nos einbiareis traslado, para quo de aqui se os
de la orden que convenga, teniendo entretanlo el negocio suspenso, con
allegar solo la possession immemorial, como arriba se ha dicho.
P o r la copia que se os dara de una carta del presidente de Sicilia, y de
los papeles que en ella se acusan. vereis como los dias passados hall andose
en Roma el Arcobispo de Palermo por comission y cosas de nueslro servi<jio, fue puesto a la puerta de su casa un cedulon, en que se descomulgava
al Raron y Baronesa de Prizi vassallos y feudalarios nuestros del Reyno
de Sicilia, a instan^ia del cardenal Alexandrino pretendiendo tocarle la
diclia baronia de Prizi. como a co me n d ad o r perpeluo de la Abbadia de
Casamare; y po rq ue de los dichos papeles compre hen de re is assi mismo lo
que en esle negocio ha passado, y el notable prejuyzio que se liizo a
nueslra real j u ri s d ic tio n, en q u ere r exlraer de aquel Reyno las causas que
se ban de decidir y d e ter mi na r por nuestros ministros, en especial esta
que es feudal, y cuyo juyzio nos toca como fi directo y sup rem o seflor del
feudo, enlendereis del nueslro emb a x a d o r de Roma, a quien mostrareis los
dichos papeles en llegando a aquella corte, del eflfeclo que ban sido los
olficios que le havemos m an da do hazer paraque los descomulgados sean
absueltos, llevando estos adelanle hasta que se consiga el fin que se preicnde. Y q u a n d o el cardenal [lo que no es de creer por ser vassallo nueslro,
y que liene entendido q u e no solo a el, siendo persona de la qualidad que
es, pero a qu alq ui er olra, m and am os hazer cu mplida justicia en los p r e lensiones que tienen en nuestros Reynos, como en esta misma se haria
f)U CARDINAL DE GRANVELLE.
117
en caso qu e fuesse agraviado], persistiesse en su proposito, y en no q ue rer
retractarse dc la offensa evidente que ha intentado hazer a nuestra j u r i s ­
diction, y preeminentia Real en essa, informareis a S. S. de lo q ue ay. pues
siendo tan gran lelrado, entendera la sin razon qu e en esto se nos haze,
pro cu ra nd o remediarlo, con q ue los descomulgados sean absueltos, y
advertiendo de no da r copia de los dichos papeles que han de servir para
sola informacion vuestra, y avisarnos de lo que en el negocio se fuere
haziendo.
Havreys gran cu yda do de avisarnos con todos los correos que vinieren
de lo q u e se fuere haziendo, como arriba se os ha dicho.
Passareis por Milan, y comunicareis con el Marques de Agamonle nucslro
go vernador y capitan g e n e r a l , ) ' con el gran canciller y presidente del
Senado, lo qu e en esta instruction ay tocante a aquella provincia, para que
si os quisieren advertir de alguna cosa lo puedan hazer, y de lo que assi
os advirtiercn nos avisareis, y si al dicho gov ernador paresciere d e e m b i a r
con vos alguna persona instruyda destas materias para major instruction
vuestra, dexamos que la embie, y con elia communicareis solamente lo que
al dicho e m b a x a d o r Don J u a n de Cufiiga y a vos paresciere.
Assi m ism o llegados a Roma, dareis luego aviso de vuestra llegada el
cardenal de Granvela, para qu e os pueda advertir si algo se offrvsciere. y
terneis cuenta de co mu ni car con el todo lo que se fuere haziendo tocante
al Re yno de Napoles, como lo hareis con el govern ad or de Milan, de lo que
se fuere haziendo tocante a aquel estado.
Al Presidente de Sicilia podreis tambicn d a r aviso de vuestra llegada,
pa raq ue tenga noti<jia dello, si bien en las cosas de la m onarchia no haveis
de tractar cosa ni ng un a sin nuestro special orden, como arriba se os ha
sinificado.
Y
a u n q u e confiamos que con el sancto zelo de S. B., y vuestra dexteridad
sera Dios servido q ue se tome esta concordia y assiento que vays a tractar.
todavia,en caso q ue po r algunas causas,esto no succediesse co nf or m ed nues­
tra intension y desseo, qu e vcais qu e la platica del todo qu ede sin esperan<ja
de concierto. y q u e no aprovechan los medios offrescidos, nos despachereis
luego correo proprio, con aviso de todo lo q u e en ella huviere passado, y
el estado en que q ue da ren los nego^ios, advirtieendonos pu n c ta m en te de
vuestro parescer en cada uno, paraque, vista la qualidad d e l, j u n c to con lo
CORRESPONDANCE
que se huviere tractado, se os ordene lo q u e para ultimo remate de
vueslra comission convendra r esp on de r a S. S.
Au nq ue po r lo que arri ba se os ord ena teneis entendido, q u e se ha de
co inmunicar esta instruction con el e m b a x a d o r Don Ju° de Cuiiigo, y
proceder en lo tocante a ello con su intervention y parescer, todavia
para m ay or infor mat ion vuestra os la havemos querido advertir de nuevo,
con ordenaros que en las cosas graves no se haga nada sin el parescer
de todos tres, mas en las menores se podra hazer lo que pares^iere a los
dos, advertiendoos q ue si en algun capilulo de la instruction no estuvieren
conformes todos tres, queremos que se suspenda la resolucion del, y se nos
de luego razon de la desconformidad, ju n to con las causas qu e cada uno
allegare para fu nda r su parescer, paraqu e se os ordene lo q u e se havia de
hazer en ello.
Del Escorial, a nu° de J un io M. D. LXX1IIJ0
Yo el Rev.
•/
Vakgas.
XXXU.
TRADUCTION.
Le principal m otif qui n ou s a d é te rm in é à vous e n v o y e r à R o m e est le droit de
d o n n er satisfaction au Souverain Pontife, lequel tant par lettres écrites »le sa main q ue
par 1 interm édiaire du n o n ce, résidant en notre co u r , et celui de l’am bassadeur qui
nous rep résente près d e sa personne, nous a fait les plus vives instances [tour nous
d écider à lui e n v o y er des agen ls spéciaux chargés de con clu re q u elq u e arran gem en t au
sujet d e certains différends en m atière de juridictions qui se sont éle v é s entre nous
d ep u is q uelq u es a n n ées dans le r o y a u m e d e N a p les et le d u c h é de Milan.
l ' n autre m otif non m o in s im p érieu x pour nous a été le désir d e maintenir le calm e
et la paix dans les Etats q u e la P ro v id en ce a confiés à n o s soins, évitant q u ’il s ’y intro­
duise, pour q u e lq u e m otif q u e ce p uisse être, le m o in d re (rouble et le m oindre désordre,
ainsi que n o u s avons m alh e u r e u se m e n t pu le voir arriver dans ces derniers tem ps, par
suite des différends m en tio n n és ci-d essu s. Nous avons ég a lem e n t ju g é c o n v e n a b le de
D l CARDINAL DE GRANVELLE.
119
faire connaître au m o n d e entier que nous n’avons n égligé île notre côté aucu n m oy en
raisonnable p our nou s
entretenir dans une parfaite intelligence avec
le Souverain
P o n tife, étant o b ligé, en n o tic qualité de ii's très obéissant de la Sainte É g lise , de pro­
fesser le plus grand respect pour celui qui rep résente ici bas D ie u lu i-m è m e , à une
é p o q u e p rincip a lem en t où dans toutes les parties d e la Chrétienté qui av o isinen t nos
Etals on voit s'affaiblir de jo u r en jo u r rattachement à la foi de nos ancêtres et l ’o b é is ­
s a n ce envers le S ain t-Sièg e apostolique. En c o n sé q u en ce, bien q u e nous eu ss io n s pu
dans le principe user des m o y e n s de rigueur que le droit et l’usage no u s mettent entre
les mains pour défen d re notre juridiction royale, et réprim er la con d u ite tenue au p r é ­
ju d ic e de ce lle -c i par q u elq u e s prélals dans toute cette affaire, no u s avons toutefois
ju g é c on v en a b le d ’em p lo y e r à l’égard de S. S. des p rocédés conciliateurs, en vous
envoyant à R o m e pour traiter avec les agents d ésig n és par e lle les divers articles dont
va suivre le détail :
N o u s avons tout lieu de croire q u ’a \ a n t votre arrivée à H o m e, peut-être m ê m e avant
votre départ d e Madrid, S. S . aura déjà fait ab soud re ceu x qui avaient été déclarés
ex c o m m u n ié s pour les motifs susdits, tant à ÏNaples q u ’à Milan, cédant en cela aux
vives instances q u e n o u s lui avons faites par l’intermédiaire d e don Juan de Çufiiga,
notre am bassadeur ordinaire; cependant vous d evez partir avec cette p en sée ferm e que
l’absolution dont il s’agit doit p récéder indispen>ablement toute n égociation , et dire
cla irem en t à S. S. q u e vous avez l’ordre précis d e notre part de n’en ta m e r ou p o u r ­
suivre a u cu n e e s p è c e d ’arrangem ent sans une s en ten ce d ’absolution p ré ala b le; dans ce
d ernier ca s,
vous
ferez
tout votre possible pour obtenir
q u e S. S. v eu ille
bien
absoudre g én éra le m en t a d cau telam tous les sujets de m e s Etals, qui ont e n c o u r u d'une
m an ière ou de l’autre les cen sures à propos de ses différends en m atière de ju rid ic­
tion. Si toutefois 011 n e pouvait obtenir celte c on ce ssio n , vous ne devriez point pour
autant vous d isp e n se r d ’e n tam er et poursuivre la négociation d ont vous êtes ch a rg és,
pourvu q u ’on ab solv e ceux qui ont été déclarés p u b liq u e m e n t e x c o m m u n ié s , ainsi que
n o u s l ’avons dit plus haut.
Q u e lle que soit la ju ste confiance q u e n ou s ayon s en votre h ab ileté person n elle,
q u e lle q u e soit l’é te n d u e des p ou voirs qui v ou s so n t confiés, toutefois, c o m m e l’affaire
q u e vo u s allez traiter est de la plus hau te im portance, q u ’elle a été ici déjà l’objet d ’une
é tu d e lo n g u e et approfondie, c o m m e d ’autre part l’arran g em en t à con clu re doit être
p erpétuel et irrév oca ble, n o u s v o u lo n s et notre intention form elle est q u e dans le cours
d es négociations v ou s n’ex céd iez en a u cu n e m an ière les limites prescrites par cette
instruction. A in si d o n c, dans le cas où S. S. vous ferait proposer q u e lq u e m oy en non
prévu par celte dernière, si ce m o y e n est j u g é raisonnable par v o u s - m ê m e et par les
p ersonn es q u e nous d é sign er on s ci- ap rès, vo us répondrez q u e vous nous en d o nnerez
u n e connaissance im m é d ia te; dans le cas contraire, vous le rejetterez a b so lu m e n t, sans
CORRESPONDANCE
m ê m e donner à en ten d re q u e vous nou s en ferez part, bien que notre intention soit
pourtant q u e vous no u s teniez exa ctem en t au courant de tout ee qui vous sera proposé
d e part cl d ’autre, alin q u e no u s puissions d ’ici vous tracer la marche à suivre dans
cette afl'aire.
I, ne ch ose dont il est important, que vous soyez intim em en t pénétrés d ’avance, c ’est
q u e vous ne devez prêter l’o reille ù a u cu n e proposition con cernant nos Ktats d 'iisp ag n c
ou autres, siiués hors de l’Italie, vous bornant à répondre clairem ent, dans le cas où
6 . S. vous ferait faire q u elq u e s insinuations à ce sujet, q u e vous n'avez au cu n e esp èce
tle pouvoirs ou d e mandai pour traiter une question de ee g en re; vous éviterez m ê m e
d e vous en g a g e r à n ou s en écrire le m o in s du m o n d e , \ o u s excusant à cet égard du
m ieu x que vous p ou rrez; car il ne co n vien t point de rem etlre en question aujourd’hui
des choses d écid ées depuis si lo n g te m p s à l’avantage de notre couronne.
Aussitôt arrivés à R om e, vous c o m m u n iq u e r e z à don Juan de Çuiiiga, notre a m b a s­
sadeur, la présente instruction et les d é p ê c h e s dont vous êtes porteurs; vous aidant d e
ses conseils et d e sa coopération personnelle dans toules les négociations aux q u elles
sera consacré voire séjour à I t o m e , ayant soin d e ne vous en gager dans a u cu n e
d ém a rch e, sans lui en avoir d o n n é con naissan ce et vous être assurés île son assen ti­
m en t. V ous mettrez ég a le m e n t au courant de cette affaire les prélats espagnols qu e
n ou s avons en v o y és dans celte ville pour la cause d e l'archevêque de T o lè d e ', sans
leur don n er toutefois con naissance des particularités conten ues dans cette instruction,
vo u s b o rn an t de d em a n d er leur avis sur la m arch e à suivre et à recevoir c o m m u n ic a ­
tion des m o y e n s qu ’ils ju g e r o n t con v en ab les pour en assurer le s u c c è s ; ce q u e vous
co n tin u e rez de faire du reste dans le courant des n égociation s toutes les fois q u e vous
le trouverez à propos dans l’intérêt d e nos vues.... m ê m e recom m andation à l’égard
du cardinal P a c h c c o et autres personnages qui sont dans la co n fidence de cette allaite :
notre am b a ssa deu r, avec sa p ru d en ce ordinaire et son exp érie nc e des usages d e la
c o u r de R o m e, saura bien vous dire q u elle s sont les p ersonnes avec les q u elle s vous
pouvez entrer en rapport et j u s q u ’à quel point il con vien t de les initier à la conn ais­
san ce de l’o bjet qui n ou s o c cu p e.
D ans le m onten t où vous serez adm is à baiser les pieds d e S. S ., vous vous en tien­
drez à son égard à des d ém onstrations g én érales de b ienveillance rév éren cieu se, lui
1 D o n B a rt h é l é m y C a r r a n z a de M i r a n d a , a r c h e v ê q u e d e T o lè d e dès 1 5 5 7 . Sacre à B ruxelles le
27 fév rier de l 'a n n é e s u i v a n te p a r Mgr d e G r a n v e l l e , alo rs év ê q u e d ’A r r a s , il fu t i n c a r c é r é à la su ite
d ’u ne fausse d é n o n c ia tio n p a r l’in q u isitio n
es p a g n o le ,
2 2 av ril 18 59 j u s q u 'e n 1 5 6 7 , où il fu t e n v o y é à
qui
le r e t i n t d a n s ses cacho ts d e p u i s
Rome su r
le
les o r d r e s r é i t é ré s d u P a p e Pic V.
Ce pontife le fit m e t t r e en lib erté . V oir ci- a p rè s u n e le t t r e des 3 et 4 j u i n 1 5 7 6. Ce prélat, th éolo gien
d isting ué, av a i t pris p a r t a u co ncile d e T r e n t e e t d e v i n t c o n f e s s e u r de Marie T u d o r p e n d a n t son
m a r i a g e av ec P h i l i p p e II.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
m
exprim ant toute noire alTeciion et noire d é v o u e m e n t à sa personne, ainsi q u e noire
désir <!e voir (outes ces difficultés term in ées à la satisfaction d es deux partie«.
Plu s tard, dans la prem ière aud ien ce secrète, vous té m oig n ere z à S. S ., dans les
term es les plus significatifs, la pein e q u e nous avons ép r o u v ée en voyant certaines gens
ch er c h e r à lui p ersuader q u e, dans le cours d e son pontifient, il ail été introduit par m oim ê m e ou par q u elq u e m in istr e agissant en m o n n om la m oindre innovation, qui non
s e u le m e n t déroge aux u sages suivis d e tout temps par les rois m es prédécesseurs, ces
princes si ch ré tie n s et si ca th oliq u es, mais qui ne soit pas utile, in disp en sab le m ê m e
pour le m aintien d e la tranquillité publique ainsi q u e la lionne administration d e m es
É tals et c o n fo r m e, du reste, à l’usage invariablem ent suivi ju s q u ’au lem p s présent. Il y
a p lu s ; dès le jo u r où le Souverain Pontife est m o n té su r le trône d e S'-Pierre, nous
avons d o n n é d e tous côtés les ordres les plus positifs pour q u ’en au cu ne matière il ne
soit rien in n o v é co n trairem ent à la juridiction ecclésiastiq u e, mais que celle-ci, bien au
contraire, soit m ain ten u e, a u g m e n t é e m ê m e dans lotit ce qui ne sera pas contraire à
nos p réém in e n ces lo y a le s. A insi d o n c vous le prierez et le supplierez de notre part»
avec toute la c h a le u r p o ss ib le, d e bannir d e son esprit u n e s em b la b le p en sé e et d e se
persuader q u e jam ais nous n ’avons eu à son égard d es intentions de ce g en re, toujours
d éterm in és à lui tém o ig n er autant d e respect [et plus encore s ’il était possible] q u ’à
tous ses p réd écesseu rs, lin vertu de celte disposition, nous ne cessero n s d e correspondre
à la b ien veillan ce paternelle d e S. S. avec l’obéissance filiale ci l'affection sin cère q u ’elle
peut désirer d'un prince ou d’un roi vraim ent chrétien.
Notre d e u x iè m e sujet d e p lainte est relatif à la m anière d ’agir suivie à N aples el à
Mi!an à l’égard de m e s m inistres, au préjudice de la juridiction royale, à u n e époqu e
surtout où j ’avais lieu de m ’attendre à toutes les m arq ues de faveur et de b ienv eilla nce
p ossib le de la part de S. S., ayant e m p lo y é m on patrimoine tout en tier à la d é fe n s e de
la C hrétienté. A ce litre, en effet, cl en ma qualité d e fils très obéissant du S* S ièg e apos­
tolique, j ’avais lotit lieu d ’e sp ér er q u e S. S. aurait in tim é à ses prélats et ministres
l’ordre d e suivre une p rocéd u re toute différente ; faute de quoi ces d erniers se sont
trouvés e n c o u r a g é s à persévérer dans une m anière d ’agir essen tielle m en t contraire à la
juridiction q u e nous exerço n s à si ju ste titre et q u e nos m in isires utilisent a vec tant
d'é q uité pour la paix el le b o n h e u r d e nos Etals. Notre déplaisir à ce sujet est d'autant
plus grand que les prélats et les ministres du S l- S i è g e on t ré ellem en t d ép a ssé les
bornes d e la m od ération d a n s les brefs si rigoureux adressés au Cardinal d e Granvelle
et au G r a n d - C o m m a n d e u r de Castdle, surtout au m o m e n t où l'on pouvait apprécier le
soin (pie j'ai toujours eu d e recom m an d er à ees derniers le plus grand respect pour la
juridiction ecclésiastiqu e et les égards q u e l'on co n serv e pour e lle dans m e s Etats,
égards (pie S. S . pouvait apprécier, ne ïùt-ce qu e par com paraison avec ce (pii se fait à
c.c sujet dans le reste de la C hrétienté. A ce propos vo u s ne m an q uerez pas d e faire
Tome
V.
m
CORRESPONDANCE
valoir aux veux du Souverain Pontife les m é n a g e m en ts q u e nous avons gard és à son
égard, dans le m o m e n t où n ou s aurions pu faire usage de m o y e n s tout différents pour
maintenir la juridiction qui nous appartient.
Ce préliminaire acco m p li avec tous
co n ven a b lem en t l'esprit de S. S.,
les m é n a g e m e n ts n écessaires pour disposer
vous la prierez d e vouloir bien, afin d'assurer la
p rompte expédition d e c elle affaire, d ésig n e r sans perdre d e tem p s les p e rso n n e s qui
d evront s ’a b o u c h e r avec vous pour traiter à l’am ia b le et par voie de conciliation à
l’exclusion d e toute form e ju r id iq u e
et de toute discu ssion
relative au mérite de
l’affaire e ll e - m ê m e . Ces p erson n a ges n e d evro n t pas ex céd er le n om b re de trois, tant
pour éviter la confusion inséparable d e toute a ssem b lée n o m b r eu s e q u ’afin de m a in ­
tenir l'égalité n u m ériq u e entre e u x c l v o u s - m ê m e s a u x q u els se joindra l’am bassadeur.
Il serait é g a le m en t bien [si toutefois la ch o se était possible] d e vous faire désigner,
hors de l’e n c e i n i e d u palais pontifical, un local q u e lc o n q u e où vous tiendriez vos séances,
afin d ’éviter les r u m e u r s et les conjectures au xq u els peu ven t don ner lieu d e sem b la b les
réunions dans un édifice ouvert à tous venants, et de d éterm in er d ’avance les jo u rs cl
les heu res desd ites séances, afin d ’e x p é d ie r la ch ose avec plus de célérité, rem édiant
ainsi aux n ouveaux in co n vén ien ts q u ’entraine ch aq u e h eu r e de retard dans la décision
d es dillieullés qui nous occupent.
U n e lois les séances c o m m e n c é e s , vous aurez soin q u e les p rem ières propositions
soient faites par les cardinaux ou autres personnages représentant le Souverain Pontife.
Si par hasard ils prétendaient d e leur côté q u e vous devez faire les prem ières o u v e r ­
tures, vous pourriez très bien vous e xcu ser en disant q u e c ’est su r les instances
expresses de S. S. qu e nous nous s o m m e s décidé à vous e n v o y e r à H o m e ; q u e m algré
la prière que n ou s lui avons faite, par notre am bassadeur, d e vouloir bien spécifier la
marche à suivre et les m é n a g e m e n ts
à garder
dans cette affaire,
p u isq u e
nous
en vo yio n s d es agents tels q u ’elle pouvait les désirer, e lle a c o n sta m m e n t refusé de
s ’ex p liq uer sur ce point, et que vous n ’avez pu par co n séq u en t recevoir d e moi q u e des
instruclions gé n éra le s et non particulières, ainsi q u ’on pourra le voir par la form e de
votre mandat. En vertu du m ê m e prin cip e, dans le cas où l’o n v ou s d em anderait toute
c om m u n ica tio n de vos instructions, dans le but d ’en tirer q u elq u es in ductions particu­
lières, vous pourrez dire q u e vous n’en avez reçu d ’aucun e esp èce, faute par nous de
connaître d ’u n e m an ière précise les points q u e l’on devait traiter; le
tout afin d e
parailrc, s'il est possible, non point d e m a n d e u r s , mais sim p le m e n t défendeurs. Si
toutefois on insistait pour q u e les p rem ières ou vertures fussent faites par no u s, vous
diriez q u e les principes m is p résen tem en t en qu estion par les ecclésiastiqu es sont tous
si év id e m m e n t en notre faveur q u ’il vous parait im possible d e proposer aucun m oyen
qui no porte pas un e atteinte notable à notre juridiction ; vous citerez pour e x e m p le ce
qui s’est passé à Milan, c’est-à -d ire l’affaire des do m estiq u es arm és et c elle d e ll e s l a ,
I)U CARDINAL DE GRAiNVELLE.
123
élant d e la d e rn ière év id en ce en droil que les prélats p eu v en t jouir du privilège
d ’arm er leurs g en s dans un pays où la juridiction tem p o re lle
ne leur cornpète point,
si ee n ’est en vertu d ’u n e autorisation spéciale des princes sécu liers, seu ls dispensateurs
en p a reille matière. D e m ê m e , dans les causes profanes et relatives à des ch o ses
te m p ore lles entre des personnes du siècle, les ju g e s ecclésiastiq u es n ’ont a u cu n e e sp èce
d e juridiction
exercer. Ainsi donc, en cas aussi clair, aussi év id en t q u e celui d ont il
s’agit et qui n ’offre en droit a u c u n e e sp è ce d e difficulté, c o m m e S. S. ne l’ignore point,
il ne sem b le point ju s te q u e l’on v ien n e en son nom porter atteinte à nos prérogatives
lorsque son devoir, c o m m e père universel de la C hrétienté, l’o b lig e tout au contraire à
veiller à leur conservation et à m aintenir chacun en possession de ce qui lui appartient
à titre légitim e.
On en peut d ire autant des su c ces sio n s ép iscopa!es du royau m e de N ap les et de
l'affaire du sacrilège, p u isqu’il est ég alem en t constant en droit que partout où il y a
ju ridictions spiritu elle et tem p orelle distin ctes, tout prince, q u e lq u e grand qu'il soit,
doit faire valoir ses réclamations devant le tribunal dont est ju sticiable le d éfendeur
contre lequel il réclam e. P ou r les cas m i x te s , dans lesq u els l’É glise ne peut infliger
ju rid iq u e m en t u n e p eine grave au malfaiteur, c'est le ju g e sé cu lier qui peut et doit
m ê m e connaître du délit, alin d ’y a ppliquer un ch âtim en t co n ven a b le. V o u s exposerez
tout ceci le plus b r iève m en t possible, vous bornant à insister su r le droit, sans touch er
un seul m ot de possession ni de c o u tu m e , parce q u e ayant le droit pour nous, c’est à
eux q u ’il ap partient d ’a llég u e r la possession et la co u tu m e q u ’ils in vo q u en t en leur
laveur. Q uant à cette objection , vous pourrez facilement la résoudre, en disant qu'il
n ’y a ni n e peut y avoir d e possession à invoquer en pareil
cas, faute du concours
des circonstances requises pour légitimer la dite p ossession, à savoir le cours du tem p s,
la con n aissa n ce du fait à no u s acquise, et notre approbation au m oin s im p licite ; de
telle m an ière qu ’u n e se m b la b le possession, à su pp oser q u ’elle put être ad m ise, devrait
être app elée vicieuse, clan destin e et par c o n sé q u e n t de nul effet pour entraver notre
juridiction. T o u t ceci, du reste, sera traité par form e d e sim p le raisonnement et non
par voie d e d iscu ssio n , p u isq u ’il ne convient d’ad m ettre au sujet d e ladite possession
ni p reu v es de fait, ni a llégation s de droil, ni quoi q u e c e soit enfin qui puisse d o n n er
lieu de so u p ço n n er q u ’il y a con naissan ce d e cause.
Yrou s pourrez ajouter q u e lo rsq u e Pie V, p r éd écesseu r du pape a ctu el, en vo ya en
E sp a gn e le cardinal A lexand rin , son légal, je consen tis, pour faire plaisir à S. S., à
l'adoption d e certa in es m e s u r e s proposées alors par écrit ; dans le cas où elles seraient
ju g ées par e lle in suffisantes et inférieures à d ’autres q u ’elle aurait en vue, 011 pourrait
proposer et dis cu ter ces dernières, et de cette m an ière nous a tteindrions le but que
nous avons en v u e, c ’est-à-d ire de les a m en er à faire d e u x - m ê m e s les p rem ières o u v e r ­
tures, circonstance qui est du plus haut intérêt pour la b o n n e direction de la n ég o c ia ­
tion toute entière.
m
CORRESPONDANCE
Alin de vous m e u r e parfaitement au courant de toutes les qu estion s con troversées
jusqu'à ce jo u r, j ’ai fait transcrire pour votre usage q u elq u es pièces, telles que co n su l­
t i o n s , instructions et lettres de vice-ro is, et p a rticulièrem ent les instructions d o n n é e s
dans le tem ps au m arquis de Cerralvo, ainsi q u ’au G ran d -C o m m an d eu r d e Castille,
avec plusieurs autres d o c u m e n ts relatifs à ce sujet. Mais ce qui presse ac tu elle m en t le
plus et se m b le nécessiter un plus prom pt rem èd e, se réduit à un petit n o m b re de
points dont va suivre le détail :
Le premier est la question d es d o m es tiq u es armés. S u r ce point n o u s avion s adopté
déjà le tem p éra m en t q u e vous co n n aissez, c’est-à-dire d ’accorder au cardinal D orrom ée
la faculté d ’arm er cinq ou six h o m m e s , avec les restrictions qui nous sem blaient c o n v e ­
nables. V o u s insisterez d onc auprès de S. S. pour q u ’elle v eu ille bien en g a g e r le
cardinal à se con ten ter de c e lle con ce ssio n , cl dans le cas où e lle désirerait que l’on
ajoutât un ou deux h o m m e s d ’arm es à ceux qu e nou s avions accordés su r les instances
de Pic V , nous ne ferions au cu n e difficulté d e lui d on n er satisfaction, afin d e terminer
toute contestation sur ce sujet. Q u e si le cardinal B orrom ée refusait d ’a ccepter c elle
con cession d e notre m ain, par suite de eette m auvaise h u m e u r qui lui fit p r éc é d e m ­
m en t e x c o m m u n ier, à propos d e l'a flaire m ê m e dont il s’agit, le G rand-C om m andeur de
Castille, vous prendriez c o m m e term e m o yen de la lui faire co nsidérer c o m m e le
résultat d ’un arran gem en t sp écial conclu entre le Souverain Pontife et moi.
P endant le tem ps q u e ce s affaires d e Milan vous occuperont, vo u s n e n é g lig erez pas
de té m o ig n e r au S ou verain Pontife tout le m é c o n t e n lc m e n l q u e no u s ca u sen t les m a u ­
vais p rocédés du cardinal B o rro m ée, non s e u le m e n t en ce qui c o n c i r n e l’usurpation
d e notre juridiction royale, mais e n co re les actes arbitraires qu'il s'est perm is au préju­
d ice de noire c o u ro n ne. S. S. p eut se figurer, en effet, les graves in co n vén ien ts q u ’ont
pu entraîner l’exco m m u n ic a tio n de la p erson n e qui m e représente dans ce royau m e et
c e ll e des deux principaux ministres ch a rg és du g o u v ern e m en t, dans le cas très facile à
prévoir,
où
l’e n n e m i venant à se porier sur le M ilanais, il fût devenu im p o ssib le
d ’o b ten ir d es sujets l’ob éis sa n ce , d e m aintenir l'autorité et de prendre les m e s u r e s
n écessaires, par suite de l'ex com m u n ic ation d e ceu x qui étaient chargés d e pourvoir à
ces différentes ch o ses. En c o n s é q u e n c e , cl co nsidérant, en outre, q u e le cardinal dont
il s'agil a d o n n é l'ordre d e lire p u b liq u e m e n t la se n t e n c e d'excom m unication ch aq u e
premier d im a n c h e du m o is, son refus de lever les c ensu res, la p r o le s ta to n faite à ce
sujet à H o m e par son agent, les d é m a r c h e s qu'il a tentées et tenle en co re ch aq u e jour
au préjudice de notre p u issan ce et d e n o tre jurid iction , q u o iq u e une (elle m an ière
d ’agir eût aulorisé d e notre part q u e lq u e dém on stration v ig o u r e u s e contre lui, c e p e n ­
dant le respect q u e nous d e v o n s c l v o u lo n s professer c o n sta m m e n t pour le S ouverain
P o n life n ou s en a dissu ad é, cl no u s avon s m ie u x aim é faire d ’abord à S. S. des rep ré­
sentations sérieu ses et m o tiv ées, c o m m e le cas l’exigeait. N ou s la prions, en c o n s é -
Dl! CARDINAL DE GRANVELLE,
125
q u en ee, do vouloir bien ex am in er dans sa pruden e les laits exp osés c i-d e ssu s, c o m m e
aussi le m an q u e d ’égards et la d é so b éissa n c e d o m le m ê m e prélal s'esl rendu cou p ab le
e n v er s elle en refusant d e se conform er à la supersessoire [au sursis] et s'opposant
à l'absolution q u ’e lle voulait faire d o n n er au Grand C o m m a n d eu r , afin q u ’e lle p uisse
intervenir e ll e - m ê m e dans cette disc u ssio n , et m e rendre telle ju stice que je n e trie
voie pas contraint d e m e la faire m oi-m ém e, c’est-à-dire q u ’elle pourrait, par ex em p le,
appeler le cardinal à un autre siège ou l'éloigner par un m o y en q u e lc o n q u e du terri­
toire de Milan, afin d ’o b v ie r aux inconvénients qui p eu v en t résulter à c h a q u e instant
d e son séjou r dans cette province.
Le second point est relatif à l’alfa ire de Itesla. A ce propos, il sera de toute justice
que S. S. p erm ette de rendre u n e ord o n n an ce exp resse et g énéra le en vertu de laquelle
les laïcs, pour toute esp èce de procès en matière tem porelle, seront traduits devant les
j u g e s s é . u l ic r s . Celte m anière de procéder, in d é p en d a m m en t de ce q u ’e lle est c o n ­
form e à la ju risp ru d en ce , est tout à fait co n ven a b le et m ê m e in d isp en sa b le pour aider
à reconnaître de q uel côté se trouve le bon droit, «ans introduire de confusion parmi
les parties o p p o sé e s .
O uant aux su ccessio n s épiscopales, notre droit étant si évident, c o m m e il a été dit
plus haut, tant en ce qui c o n cern e la propriété que la po ssessio n , il ne saurait y avoir
ici m atière à discu ssion ; car il n e co n v ie n t point d e m ettre en question une ch ose de
c elte n a tu re; mais vous insisterez elïica cem ent pour obten ir q u e lo rsq u ’un laïc sera
d éféré d evant les tribunaux p our ce motif, sa cause soit instruite par des juges s é c u lie r s ;
car ainsi le veut la ju stice, et tel a été l’usage de Ions les tem ps. Kn outre, vous aurez
à ex a m in er si, pour trancher toutes ces difficultés, il ne serait pas à propos, vu la
faible im portan ce des r e n ie s ép iscop ales et des bén éfices dans c e lle
partie de m es
Etats, q u e S. S. voulût bien se dessaisir de son droit sur lesdils héritages et les a b a n ­
d on n er aux su ccesseu rs, co n fo rm ém en t à la disposition du droit c o m m u n ; e n quoi S. S.
ferait u n e œ u v r e d ig n e du rang q u ’elle o ccu p e et so u v e r a in e m e n t méritoire, su p p ri­
m an t dans ce roy au m e une ch a r g e qui pèse s e n s ib le m e n t sur les populations et le
clergé, renonçant, d e plus, à y en v o y er des collecteu rs et des non ces, puisqu’un e fois
ses droits a b a n d on n és par e lle , ceux -ci d eviendraient inutiles. D a n s ce cas, vous feriez
toutes les d iligen c es n écessaires pour le bien d e la ch ose. Mais, si l’un de ces deux
p oints venait à offrir q u e lq u e difficulté et q u e leur d isc u ssio n put, en soulevan t q u e lq u e
m éc o n te n te m e n t, contrarier la fin q u e l ’on se propose, vous vous abstiendriez d ’aborder
c e lle m atière, v ou s bornant à insister sur les points spécifiés dans la présen te in s tr u c ­
tion, mais ch erch an t, en tout cas, à obten ir du m oin s d e S . S. q u e tous les procès
intentes à d es laïcs, r elativem en t aux héritages susdits, soient instruits et j u g é s par les
j u g e s séculiers, ainsi q u e la ch o se s’est faile de tout tem p s avant q u e le d u c d ’Alcala
n e fût en v o y é dans le M ilanais; car S. S. doit bien com p r en d re q u e la n ég ligen ce
CORRESPONDANCE
d e ce personnage, pendant un si petit n om b re d ’a n n ée s et m ê m e pendant un temps
pins considérable, ne peut, en a u c u n e m anière, préjudiciel’ à ma juridiction royale.
P o u r ee qui c on c e r n e l'économ at d e Milan, il ne parait pas q u ’il y ait rien à ajouter
ni à retrancher au moyen con certé d ’abord avec le cardinal A lexandrin, et qui consistait
a m e laisser le ch oix du sujet auquel le S o u v er a in Pontife conférerait la provision et
le titre ; car il doit suffire à S. S . q u e, renonçant au droit dont m e s p rédécesseurs ont
jo ui si lo n gtem p s d an s ce r oy au m e, droit en vertu du q uel
l’é c o n o m e devrait être
n o m m é par m oi, recevant d e moi seu l sa patente et son titre, je m e borne à la sim p le
nomination de ce fonctionnaire, qui prendrait le titre d ’é c o n o m e apostolique. Bien que
le S o u v era in P o n tif j, dans le ch oix q u ’il a fait d e Juan D uarte, pour l’oflice dont il
s’a g i t , se m b le s etre co n fo rm é déjà d ’avance à c e l a rrangem ent, toutefois, c o m m e dans
ladite provision j e ne ferai m ention a u cu n e de notre ch oix, nous n ’avons point voulu
permettre que Duarte acceptât l ’em p loi dont il s’agit, quoique le G r a n d -C o m m a n d eu r
ait ju gé à propos de d o n n er d es ordres dans un autre se n s . Malgré cela, vous insisterez
pour que, dans l'arrangement qui doit être pris à ce sujet, on consacre à cet objet un
chapitre spécial, qui garantisse dorénavant nos droits dans toutes les circonstances
possib es.
A l’égard de la m o n ar ch ie de S icile, vu l’im portance à vo u s bien c o n n u e d e la c h o se
pour la bon ne administration de ce royaum e, vous n ’aurez à mettre en avant quoi que
ce soit qui r essem b le à un expéd ien t, ni à rép on dre aux propositions qui vous seraient
faites à ee sujet d e la part d e S. S ., mais vous vous bornerez à nous en d o n n er de suite
c o m m u n ication à n o u s - m é m e , afin q u e l’on vous indique la m arche à suivre dans ce
cas. S e u le m e n t vous pourrez certifier au So uv erain Pontife que s'il s est introduit q u e l ­
q ues abus dans l’administration d e ee r oy au m e, je m 'em presserai de les faire d is p a ­
raître et que, si S. S. veut n ou s en co nfirm er et ren o u v eler le privilège, je suis p rêta
recevoir celte faveur de sa saim e m ain, bien q u e l’an cien neté du titre et la co u tu m e
i n \io la b le m e n t suivie dans ce royaum e puissent n ou s e n le v e r tout scrup u le à cet égard.
D ans ee cas, nous vous e n verro n s un détail précis de tout ce q u ’il peut y avoir à
réform er ou a m en d e r dans la form e du g o u v e r n e m e n t et d e ee que vous devriez
d em a nd er à S . S. par une con cession n o u velle.
Q u a n t a l'affaire du marquis d e C a sa lb o r a , vous insisterez auprès d e S . S . p o u r q u ’e lle
veuille bien s’en tenir à l'expédient déjà [im p osé par mon am bassadeur et qui consiste
dans
le choix d ’arbitres d ésig n és par lui et par m oi, sau f la n om ination d ’un tiers
arbitre en cas de partage d ’opinions, afin d e term in er
la ch o se à l’am iab le; en
effet,
d és q ue l’on s ’occu pe de lever toutes les difficultés au m o y en d e l’arrangem ent dont
il s’agil, il n ’est pas juste que celle-ci d e m e u r e in décise et q u e les propriétaires du
fief restent sous le poids d e l’ex com m u n ication , c o m m e ils le sont depuis un si grand
n o m b r e d’années.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
127
L’a (Taire des cas m i x te s se divise en deux p u n ies : l'une qui est relative ;m fait du
crim inel sacrilège tiré des prisons de l'archevêqu e d e N a ples, et l’autre composant en
général tous les cas ap p elés m i x t e s par les docteurs. Quant au lait du sacrilège, si l’on
en touche q u e lq u e c h o se en votre présence, vous pourrez justifier ce qui s’est fait, en
d is a n tq u e les circonstances du délit en aggravaient tellem ent l'énorm ité q u ’il ne pouvait
ctre c o n v en a b lem en t puni par le ju g e ecclésiastiqu e. Ainsi d o n c, évoquant devant lui
la c au se, en prononçant et faisant exécuter la peine, le ju g e séculier, loin d e co m m ettre
aucun abus d e pouvoir, a fait ce q u ’exigeaient le bien public et le respect du aux é g l i s e ;
d ’autant plus qu'en g én éral on p eut co nsidérer q u e le j u g e ecclésiastiq ue, dans toute
affaire du ressort d es cas m i x te s c on tre laïcs, procèd e plutôt par voie de pén iten ce et
de correction que par application de peine proportionnée au délit.
P o u r ce qui c on cern e le seco n d
c h e f, com p rena n t en général tous les cas mixtes,
vo u s verrez u n e consultation d o n n é e par le d u c d ’Alcala, le 1 9 ju illet 1 5 7 0 , d e la qu elle
il résulte q u ’en droit c o m m e en vertu des
articles du
Pape Ilon o riu s et de
l’usaçe
im m ém o r ia l d e ce r oyau m e, on a procédé en pareil cas de la m anière que nous avons
fait rappeler au cardinal A lexandrin. L ’affaire étant si claire et si sim p le, il est inutile
de rien d iscu ter à ce sujet, et il suffit que S. S. v eu ille bien c on sentir à ee q u ’il ne soit
fait, dans le cas présent, d ’innovation d ’au cu n e esp èce, mais à ce q u e l’on stipu le dans
l’arrangem en t à con clu re en tre n o u s q u e la m ê m e m arche sera dorénavant c o n sta m ­
m en t suivie. Si toutefois on vo u s faisait à ce sujet q u e lq u e s propositions au n o m de S. S.
vous nous en d o n n eriez avis, après vous être e n ten d u s avec les prélats désig n és c i- d e s ­
sus, et n o u s transmettriez leur opinion et la vôtre.
Q uant aux d im es d e Naplcs et de Milan, vous verrez la rép on se que nous avons faite
au cardinal A le x a n d r in ,e t d e la q u elle il ne convient en a u cu n e m an ière d e s’écarter le
m oins du inonde. Q ue si le Pape manifestait q u e lq u e s prétentions d’un autre g en re [ce
qui n o u s rép u gn e à croire], v ou s nous en d on neriez avis, sans entrer provisoirement
dans a u cu n e discussion relative à cet objet.
C o m m e il est très im portant q u e ce s différends en tre les juridictions ecclésiastiq u e
et sécu lière soient d éfin itivem ent term inés au m o ye n de l'arrangement q u e l’on s’o c ­
c u p e d e co n clure, et cela, n o n -s e u le m e n t pour le m o m e n t actuel, m ais en core de
m an ière à p réven ir le retour d e pareilles difficultés, vous verrez la transaction passée
dans le tem ps entre le cardinal de C o m ège et la reine É léo n o r e d ’Aragon. Q u a n t a l’e x ­
pédient d ont il y est fait m e n t io n et qui con siste à ju g er par l’interm édiaire d'arbitres
les différends au sujet des d eu x juridictions, vous tâch erez d’obtenir d e S. S . q u ’il soit
ég a lem en t adopté p o u r ce qui co n ce rn e les États et roy au m es d ’Italie.
V o u s aurez à o b ten ir en outre, dans l’arra ng em en t en projet, que S. S. confirm e et
ren o u ve lle m ê m e , en tant que besoin sera, l’Indult q u e j ’ai dans le Milanais par c o n ­
cession d e l.éo n X au roi François Ier, c o m m e d u c de cette provin ce; car, bien q u ’il ne
GOItKESPONDANCE
me
rosie au sujcl du privilège ou induit susdit aucu n
scru p u le, et q u e les clauses
en aient été, c o m m e elles le sont encore, inv io la b lcm en t ob servées,
nous recevrons
toutefois avec plaisir cette faveur d es mains d e S. S.
V o u s insisterez ég alem en t d’une m anière très active pour q u e le So uverain Pontife
v eu ille bien su p p r im er, dans la B u lle in Cuena D o m i n i , certaines clauses récem m e n t
ajoutées par S. S. e l l e - m ê m e et par P ie V , son p rédécesseur, suppression vers laquelle,
suivant ce q u e nous a rapporté le cardinal d e (iran velle, S . S. paraissait incliner au mois
de mars 1S73 ; à ce sujet, v ou s verrez l'instruction, déjà m e n t io n n é e plus haut, qui lut
d o n n é e au G ra n d -C o m m a n d eu r , d e m ê m e q u e l’ex p o sé des in con vén ients q u e les vicerois et con seils des ro ya u m es de N a p les, de Sicile et du Milanais nous ont
sign alés
c o m m e le résultat de ces clauses, afin q u ’à vue d e ces d o cu m en ts vous puissiez travail­
ler plus efficacem ent à p rocurer le rem èd e.
V o u s ferez o b server à S. S. q u ’il con vient, dans l’inlérèt m ê m e du S ‘-S i è g e , d e for ­
m u le r la Huile de telle m anière qu e les Rois et princes tem p o rels n ’en puissent prendre
aucun om brage, m oyen n an t quoi ils en surveilleront l'exécution cl consentiront v o lo n ­
tiers à ce q u ’elle soit publiée d'ins tous leurs Etals et d o m a in e s ; à ce propos vous ferez
bien en ten d re au Souverain Pontife q u e d ’après l’opinion des canonistes e u x -m è m e s
n o u s s o m m e s co m p lè te m e n t
autorisés à croire en co nscien ce q u ’un prince sécu lier
n ’est point tenu d ’obéir aux injonctions du Pape en matière tem p or elle; d où résu lte­
rait infailliblem ent, en cas de refus de sa part, une atteinte notable à la considération
c i à l’aulorité du S a in t-S iè g e apostolique, c h o se q u e S. S. doit ch e rch er à éviter de tout
son pouvoir dans les circonstan ces actuelles, d ’aulanl plus que ces révocations de pr i­
vilèg es, co u tu m e s et prescriptions établies de tem ps im m é m o ria l, qui sont m en tio n n ée s
dans ladite b u ll e ,n e peuvent m a n q u er d'occasionner de grands m écon ten tem en ts parmi
les princes sécu liers et par co n sé q u en t du trouble dans toute la R ép u b liq u e ch rétien n e,
dont le calm e et la paix doivent être l’objel île sa sollicitude, ainsi q u ’on a lieu de l’e s ­
pérer d e son zèle et de s e s pieux désirs.
Kn général, vous aurez soin q u ’a u cu n e piè ce écrite ni sig n ée de votre main ne
d e m e u r e au pouvoir des négociateurs pontificaux, mais que les actes et cédilles dresses
à l’oi-ension d e s d iv e i s arrangem ents soient en forme de sim ple écriture, qui n e puisse
avoir a u cu n e force, excepté dans le cas où S. S . consentirait à l’adoption de l’un des
expédients ci-d e ssu s désignés. Pour
lors, il faudrait valider les actes précéd em m en t
dressés, tandis q u e l’on poursuivrait la discu ssion des autres articles.
V ou s ne perdrez pas de v u e non plus qu'aucun îles rnoyei.s dont il s'agit ne doit
être mis en avant par vous, jusqu'à ce q u e les dép utés d e S. S. en aient fait officielle­
m e n t la proposition; d e m a n ièr e qu ’il ne soit fait de notre part a u cu n e o uverture, si ce
n est sur les viv es instances d e ces derniers. V o u s procéderez en outre avec toute la d ex ­
térité req u ise, n’aequieseant point d ’abord aux offres qui vous seront faites, mais vous
DU CARDINAL DE GR AN VEL LE .
129
laissant a i m m r in s e n sib le m e n t et par lu voie qui vous sem b lera plus con v en ab le pour
la b o n n e direction de l'affaire, veillant à ce q u ’en toutes circonstances les intérêts de
notre ju rid iction so ien t stip u lés le p lu s av an tag eu sem en t possible. V o u s
aurez é g a le ­
m en t soin de faire confirm er les privilèges ou c o n c e ss io n s n o u v e lle s q u e S. S . pourra
n ou s faire en vertu de ce traité, non s eu lem en t en ma faveur, m ais aussi
pour m e s
su c cesseu r s dans les Etats ou roy au m es qui seront l’objet desd ites c o n c e s s io n s ; car
il n e nous conviendrait sou s aucun rapport q u ’au cu n e d e c e lle s-c i soit, pour q u e lq u e
m o tif que ce fût, tem p oraire on sujette à extinction. Dans ce cas pourtant, il n e faudrait
point refuser a b so lu m e n t, mais su spen dre à l’instant m ê m e la négociation pour nous
d o nn er avis d e cet incident, afin q u ’après m ù r ex am en d e l à nature d e l ’affaire et d e la
form e d e la co n cessio n e ll e - m ê m e , on puisse vo u s écrire s’il faut accepter p urem en t et
sim p le m e n t ou cesser d ’insister à ce sujet.
Q uant au G rand-Chapelain d e N a p les, si l’on persistait au nom de S. S. dans la plainte
fo rm u lée ici par le cardinal A lexandrin, il suffira d'alléguer la possession plus q u ’im ­
m ém o ria le où est ce person n age du droit de juridiction épiseopale dans mon palais
royal et dans les châteaux de ce ro y a u m e , ainsi q u e vous le verrez plus a m p le m e n t par
le d ern ier chapitre d e la consultation que n ou s a d o n n é e sur ce sujet le cardinal de
G ranvelle, à la date du 31 mars 1 5 7 2 , bien q u ’il y ait un titre con céd é par le pape
L éon X à l’E m p e r e u r m o n p ère, de glo rieu se m é m o ire , le 2 n o v e m b r e 1 5 1 9 , dont il
vous sera d éliv ré u n e c o p ie , q u e vous n ’exhiberez pourtant point avant d ’en avoir
d o n n é avis au cardinal de G ra n velle, pour q u ’il e x a m in e a v ec le C onseil collatéral l’o p p or­
tunité de cette com m u n ication . V o u s pourrez é g a lem e n t co n su lter en m ê m e tem p s ce
prélat pour savoir si, dans le ras peu probable où le Souverain Pontife ne trouverait
point suffisante la p ossession im m ém o r ia le cl le titre en q u estion , à sup p oser qu e l'exhi­
bition en fut j u g é e opp ortun e, il serait bien de c h er c h e r à o b ten ir de S. S. un b ref dans
lequel, en vertu de son autorité apostolique, elle m e concéderait ladite juridiction, avec
les clau ses et circonstances nécessaires, aux Grands-C hapelains n o m m é s , p r o tem po re,
par moi et m e s su c c e s s e u r s , ou si, à supposer q u e l’on ne pût obten ir ce br ef perpétuel,
qui serait le p lu s avantageux, il conviendrait de stipuler dans le traité q u e tous ceux à
qui j ’accorderais le titre de Grand-Chapelain recevraient du S ‘-S iège la provision d e leur
office a vec l ’autorité é p iseop ale d ont ils ont été revêtus ju s q u ’ici. V o u s tâcherez aussi
d ’avoir entre les m a in s les brefs é n o n c é s dans le titre co n c é d é par L éon X , d e sq u e ls
ainsi q u e d e la r ép o n se du cardinal d e G ranvelle vo u s nous en verrez copie exacte, afin
q u e l’on p u isse vous transmettre d ’ici les ordres co n ve n ab les, tenant dans l’intervalle la
n égociation en su s p e n s , et vous bornant à allégu er la possession im m ém o ria le , ainsi
q u ’il a été dit plus haut.
Par la cop ie qui vo us sera rem ise d ’une lettre du président de Sicile et d es d o cu ­
m en ts é n o n c é s dans celle-c i vous appren d rez c o m m e n t l’a rch ev êq u e de P a lerm e se
Tome
V.
17
m
CORRESPONDANCE
trouvant ces jours derniers à R o m e par notre ordre, et pour affaires d e notre service,
ou vint placarder à la porte d e son habitation un écriteau, dans leq u e l 011 exco m m u n ia it
le baron et la baronne d e Prizi, n os vassaux et feudataires dans le ro ya u m e de Sicile, à
l'instigation du cardinal A lexandrin, qui reven d iqu e la haronie de Prizi c o m m e lui appar­
tenant de droit en sa qualité de c o m m a n d e u r perpétuel de l’abbaye de Casamarc. Les
d o cu m en ts susdits étan t d estin és à vous metlre au courant d e tout ce qui s ’e sl passé
d a n s cette affaire et à vous faire apprécier la notable atteinte qu e l’on a portée à notre
juridiction royale, en ch erch a n t à trunsporler hors de ce ro ya u m e les ca u ses qui d oi­
vent être ju g é e s par n o s ministres sp é cia lem e nt dans un eas féodal, c o m m e c elu i-ci,
par e x e m p le , dont la décision nous com p ète c o m m e seig n eur direct et su p rêm e du lief,
vous vous inform erez auprès de notre a m b a ssa d eu r à R o m e , au q uel vous d on n erez, dès
votre arrivée dans cette ville , com m u n ica tio n d es pièces dont il s’agit, de l’effet produit
par les d ém arc h es que nous l’avons ch a rgé de faire pour obten ir q u e les e x c o m m u n ié s
soient relevés d e leurs cen su re s, l’engageant à persévérer ju s q u ’à ce q u e nous ayons
atteint le but q u e nous avons en vue. P o u r le cas où le cardinal, persistant dans son pre­
m ier d e ss e in , se refuserait à reconnaître l’offense é v id en te q u ’il a faite à notre j u r id ic ­
tion et à nos p r é ém in e n ces royales, c h o s e qui nous r é p u g n e à croire d e la part d’un
vassal d e notre cou ron ne, leq uel doit savoir q u e nous s o m m e s prêt à rendre ju stice
entière, non s e u lem e n t à lui, par considération pour son rang, mais en core à toute autre
person n e au sujet d es réclamations q u ’e lle s peuvent avoir à faire, dans ce cas, dis-je,
vo u s informeriez S . S. d e tout ce qui s’est passé, parce q u e sa haute in te llig e n c e nous
d o n n e la certitude q u e l l e appréciera d e suite le tort que n ou s recevons dans cette affaire
et s’empressera d ’y porter r em èd e en faisant absoudre c e u x qui ont été e x c o m m u n ié s ;
v ou s aurez soin toutefois d e ne point lui c o m m u n iq u e r les piè ces d é sig n é e s p lu s h au t,
lesq u elles d oiven t servir u n iq u e m e n t à vous ren seigner v o u s-m ê m e s, puis vo u s nous
tien drez au courant de tout ce qui se passera relativem ent à cet objet.
N o u s vo us r e co m m a n d o n s ég a lem en t de no u s faire savoir par c h a q u e courrie r le
progrès d e la négociation, ainsi q u e n o u s v ou s l’avons dit plus haut.
A votre passage par Milan v o u s c o m m u n iq u e r e z au marquis d’A y am o n t, noire g o u ­
v e r n e u r et capitaine g én éra l, ainsi q u ’au g r a n d -c h a n celier et au p résident du Sén at les
passages d e la présente instruction qui sont relatifs à cette province, afin q u ’ils puissent
v o u s faire part d e leurs vu es et réflexions q u e vous auriez soin d e n o u s transmettre. Si
par hasard le g o u ve rn eu r ju geait à propos d e vous adjoindre q u elq u e p ersonne versée
dans la connaissance de celte matière pour v ou s assister d'une m anière spéciale, nous y
co n sen to n s volontiers, m ais il ne faudrait c o m m u n iq u e r à ce personnage q u e les c h o se s
qui vo us sem bleraient utiles, à l’am bassadeur don Juan de Çuniga et à vo u s-m êm e.
Aussitôt arrivés à R o m e vous en d o n n erez avis au cardinal de G ran velle, afin q u ’il
soit en m esu re d e v o u s faire savoir ce qui pourra vo u s intéresser, et aurez soin d e le
DU CARDINAL D E GRANVELLE.
tenir au courant d e tout c e qui se traitera rela tivem en t au ro ya u m e d e N a p les, c o m m e
v ou s ferez à l’égard du g o u v e r n e u r de Milan pour ce qui tou ch e cette province.
V o u s pourrez é g a lem en t informer d e votre arrivée le président de Sicile, hien q u ’en
ce qui co n cern e g é n é r a le m e n t les affaires de la m o n arc h ie vous n e deviez entrer en c o m ­
m unication avec qui q u e ce soit, sans un o rd re ex p rès d e n oire part, ainsi q u e nous vous
l’av on s signifié plus haut.
L e zèle du So u vera in P o n tife et votre hab ileté p erson n elle n ou s d o n n en t tout lieu
d ’esp érer qu'avec la grâce de D ie u vous réu ssirez à c o n clu re le trailé qui e st l’objet de
votre voyage ; n éa n m o in s, dans le cas où pour un m o tif qu elc o n q u e la ch o se n e m a r ­
chant pas au g ré d e nos désirs, vous verriez les négociations en tiè rem en t désesp é rées
et tous les ex p éd ien ts proposés d e v e n u s in u tiles, vous n o u s ex pédieriez de suite un c o u r­
rier exp rès pour no u s in form er d e tout ce qui se serait passé et d e l’état où en seraient
p résen tem en t les affaires, n ou s donnant en m ê m e tem ps votre avis su r le tout, afin
q u ’après avoir e x a m in é celui-ci et la m a rch e d e s ch o se s , on vous in diqu e les dernières
propositions et r ép o n ses qu e v ou s aurez à faire à S. S.
B ien q u e nous vous a yon s déjà signifié plus haut q u e vous devez c o m m u n iq u e r à
l'ambassadeur don Juan d e Çuniga la présente instruction et vous aider, dans tout ce
qui s’y rapporte, d e so n e n trem ise et de ses lu m ières, toutefois, alin d e vous pénétrer
d avantage de cette idée, n o u s vou lo n s vous en réitérer ici la r eco m m a n d a tio n , vous
en joignant dë n e rien décider en m atière g r a v e , sa n s u n e parfaite conform ité entre
les trois; quan t aux articles d e m oin d re im po rta n ce votre avis à vous d e u x pourra
suffire.
J e term ine en vous enjoignant, dans le cas où votre opinion ne serait point u na n im e
su r un article q u e lc o n q u e de l’instruction, de s u s p e n d r e toute décision à cet égard, et
d e n ou s in form er im m é d ia te m en t d e cette circo nstan ce, ainsi q u e des motifs du partage
d es voix et d es raisons q u e ch acu n
allèg u e à l'appui de son sen tim en t particulier,
afin qu e l’on puisse vous indiquer d ’u n e m an ière certaine la m a rch e à su iv re en
pareil cas.
D e l’Escurial, le 4 ju in 15 74 .
CO RRESPONDANCE
XXXIII.
LE
P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D I N A L D E G R A N V E L L E .
( Bibliothèque de Besançon. — Lettres diverse s, t. I l , fol.
190-191, 194-195, 196-1U7, 202-203.)
B r u x e l l e s , le 15 j u i n 1 57 4 .
Monseigneur. Il m a t g r an d e m en t despleut que par le d ern ie r co urrier je
ne puis advertir Votre Illmc Sri(! de ce q ue se passa icy to uch an t le p ard on et
les Estalz
mais c omme à l’heure que je me disposoie po ur escripre je me
trouviz saisi d’une pleuresie et forte fîebvre, il me fut force de me jecler au
lict. Si est ce qu e je fus soigné à heure, ce q ue me do nna la vie et sortiz du
lict le quattriesme jou r. Bien ay-je tenu la c h a m b r e despuis et bon régime,
faisant m on compte, s’il plaisl à Dieu, d ’aller demain à l’église. Le docteur
me deffend le traveil et beaulcop escripre, et p o u r me sentir encores assez
débile, je suis contrainct luy obyér, sup pli an t Vostre lllme Srie me p ar d o n n e r
si j e suis bref.
Il
y lieut hier au disner huict j o u rs que Son Exce arriva icy pa r la v a r d 5.
Le j o u r de la Tr inité se feit la publication du p a rd o n de Sa Saincteté 5 en
l’église de Sainte-Geole. où Mr de C a m b ra y 4 feit l’olfice, adsisté de p lu ­
1 Ce fu t le 6 j u i n q u 'e u t lieu à B ru x elles la p u b l i c a t i o n d e l 'a m n is tie a c c o r d é e p a r le R o i , laq uelle
c o n t e n a i t b e a u c o u p d ’e x c e p tio n s e t d e r éserv es . Les lettre s p a t e n t e s d 'a m n i s t i e , d a té e s d u 8 m ars
1 8 7 4 , son t p u b l i é e s en fra n ç a is d a n s la Correspondance de Philippe I I , t. I I I , p. 4 8 6 ; e n flam an d ,
d a n s P . B o n , liv. VI I , fol. 2 7 v°. Le m ê m e a u t e u r (fol. 2 9 v°) e t la Correspondance de Philippe H ,
t. III (p. 4 9 9 ) , d o n n e n t la liste d es p e r s o n n e s exclues du p a r d o n . T o u s les ac tes r e la tifs à ce p a r d o n
so nt i m p r i m é s , ibid., p p . 4 8 8 à 8 1 9 . H a m o n t , i m p r i m e u r à B r u x e l l e s , a m is au j o u r le m ê m e é d i t en
fra n ç a is et en flam and. Il l’a fait s u i v r e d u Règlement servant sur lesdittes lettres de grâce et pardon
général de S. M ., selon lequel sehascun se aura à conduire. Ce r è g l e m e n t est d a t é d e B r u x e l l e s , le
2 5 a v r i l 1 5 74 . Il es t a u s si r é i m p r i m é d a n s la Correspondance de P hilippe I I , t. III, p. 4 9 3 . La r e l a ­
t ion d e la p u b lic a tio n d u p a r d o n se t r o u v e d a n s la Correspondance p r é c i t é e de Philippe I I , t. III
p . 4 9 9 , d a n s l’Histoire de B ruxelles, p a r
* Vard, canal.
H
enne
et
W
a u t e r s
,
t. I, p. 4 2 9 , e t
B
oonen
,
loc. cit., p. 115.
* La b u l l e d e G r é g o ire XI I I e s t p u b l i é e d a n s la Correspondance de Philippe I I , t. III, p. 4 9 5 .
* L ouis d e B e r l a y m o n t , a r c h e v ê q u e d e C a m b rai de 1 5 7 0 à 1596.
1)1 CARDINAL DE GRAKVELLE.
155
sieurs abbez et prélalz de Haynault, q u ’estoyent icy venuz aux Estatz.
Monsr d ’Arras feit le sermon, q u e fut fort bien troussé selon son accouslumé,
en présence de Son E x ce, que luy al faict gr and receuil, des d u c d ’Arschot,
Sr de B e r la y m o n t ', Sr de Rassenghien *, comtes de Lallaing s, d ’A r e m berghes ‘, Hornes s et aultre noblesse, ensamble de tous les députez des
Estatz de chascune province, q u e se trouvarent tous en la procession q u e
se feit à l’e nt ou r de ladite église.
L’après disner se publia le pardon s u r ung eschalTault dressé devant la
maison de la ville, auquel fut Son Exce adsistce de Mess™ du Conseil d ’Estat
et Monsr de Sainct-Bavon ; et s u r l’allée de la maison de la ville estoyent
lesdictz députez des Estatz. J ’envoye à Vostre lllme Srio la copie dud ict
pardon , ensamble celle des lettres que Sa Majesté et Son Excellence ont
escript à Vostre IIImc Srie et à inoy, son ind igne vicaire, selon lesquelles je
faiclz escripre aux doyens r u r a u l x de c o m m a n d e r le con tenu à tous curez
et monastèrez. Dieu doint q u e ledit pardon prolficte! La lon gue ur luy at
liosté beaucop de forces avec aulcunes clauses, desquelles plusieurs sont
peu satisfaictz; et l’avarice d ’aulcuns que conduisent le Conseil des troubles
gatte tout; car ilz anticipent les paiementz de ce q u ’est escheu du revenu de
ceulx qui vraisemblablement de bvr ont estre remiz en leurs biens, aiantz
ve ndu tout le bois croissant et jeusnes plantaiges à vil prix, q u e faict parler
plusieurs.
Len de mai n de la Trinité tint Son E x ce les Eslatz en la g r and e gallerie, et
parla q u elq ue temps en e s p a i g n o l 6, s’excusant de ce q u ’estoit adven u à son
g r an d regret en Anve rs , rejectant toulte la faulte s u r le chasteau. Depuis
Mr d ’Assonleville feit la proposition, de laquelle j ’envoyeray la copie à
Vostre lllme Srie, si je la puis recouvrer. Les Estatz présentaient leurs
remonstrances que y r o n t cy joinctes, non pas si bien couchéez co mm e elles
sont estez conceuez, estantz obmiz aulcungz poinctz p a r obliance. H s am 1 C h a r l e s d e B e r l a y m o n t . V o ir sa notice, t . I, pp. 19 et su iv ., e t d a n s la Biographie nationale.
* M ax im ilien d e G an d, d i t V i l a i n , S r d e R a sse n g h ien . V oir sa notice, t. I l , p. 7 4.
* P h i l i p p e , com te d e L alain g. V o i r sa n otice, t. I, p. 4 5 2 .
4
C h a rles d e L ig ne, c o m te d ’A r e n b c r g , fils de J e a n e t d e M a rg u e r ite de La M a rc k , n é le 2 2 fév rie r
1 5 8 0 , m o r t le 18 j a n v i e r 1 6 1 6 . V o ir la Biographie nationale, t. I, col. 5 8 0 .
* G eo rg es de H o m e s , com te de H o u t k e r k e , v ico m te d e F u r n e s , Sr d e G a e s b e e k , etc.
* Ce d isc o u rs es t i m p r i m é d a n s la Correspondance de P hilippe I I , t. III, p . 528 .
154
CORRESPONDANCE
ble q u e Son Exue les al treuvé doulcos et hum bles. J e ne sçay si c’est p o u r
p a r tel m oien les couler, mais ad ce q u e je puis c o m p re n d re lesdilz Estatz
ne désistent ju sq u e s l’on leur ré p o n d e s u r c h a scun poinct. Vostre Illme SriB
at bien p ré d it q u e l’on ne trouvit jam ais bon com pte à les jo in d re tous
ensem ble. L e u r séjour at esté icy trop long, si com m e de x l jo u rs. Il fut
esté m ieulx les ren v o y e r chez eulx, lorsque l’on se trouva attaché en
Anvers, et les rappeler.
Le j o u r du Sainct-Sacrem ent convia Son Excellence au d isner les q u a ttre
évesques q u ’estoyent icy aux Estalz, à sçavoir celluy d’Arras de N a m u r *,
d ’Anvers 5 et de Bois-le-Duc *, les Srs susditz. iYIonsr de C h am paigney,
Monsr de Sainct-B avon, Roda, les contes de S c h o u v e n b u rc h 8 et de E b e rstain °, le chancelier de B r a b a n t 7, qui b adina tout ce disner, ha re n g u a n t,
b u v a n t à la pro sp é rité du Roy, à la santé de Son E xce, laquelle il m ercya
d ’u n g si m agnifîcque b a n q u e c t en nom des adsislentz, et dit m ille folies :
de sorte q u e ledit Assonleville, q u ’estoit de ladite com paignie. fut bien
h o n teu lx 8. Et tous les paiges se m o cquoient des propos alcariastres de ce
povre chancellier, q u e rua un e pom e doibs là où il estoit à travers d ’u n g
kestreling 9 q u ’estoit devant Son Exce, à laquelle que lq u e s pièces avec la
canelle et succre d o n n a re n t aux y e u lx . L’on tient q u e ledit chancellier
avoit desjeusné avec de la malvoisie doulce à son a c co u stu m é ; car il fut
in co n tin e n t r a u s t 10 et parla allem and et italien. Il ne se fault e s b a h ir si les
affaires de B ra b a n t sont p e u advancez, estantz c o n duictz p a r un tel chief.
Mr de C ham paigney est p a rti ce m atin vers Hollande, p o u r avec le
Sr Don F e rn a n d e asseurer les villes d u p a rd o n , a y a n t Son E x C8 dépesché
u n g povoir fort am ple s u r eulx deux, q u e je tiens fera d u fruict. L’on at
1 F ra n ç o is R ic h u rd o t, é v ê q u e d ’A rra s , no m m é en 1 5 6 1 , m o rt le 2 6 ju il l e t 1 5 7 4 .
* A n to in e Ila v e t, n o m m é en 1 5 6 3 , m o rt le 3 0 n o v e m b re 1 5 7 8 .
* F ra n ç o is S o n n in s , é v ê q u e d ’A n v ers d e 1 5 7 0 à 1 5 76.
* L a u re n t M ets, é v ê q u e d e B o is-le -D u c de 1 5 6 9 à 1 5 8 0 .
‘ Le co m te Jo sse d e S c h a u w e n b o u rg ou S c h a u e n b o u rg . V o ir sa n o tice, t. IV , p. 1 5 8 .
* O lto n , co m te d ’E b e rs te in . V o ir sa n o tic e , t. IV , p . 3 1 3 .
’ J e a n S cbeyfvc. V o ir sa n o tic e , t. I, p. 2 9 7 .
* Il é ta it g e n d re de J e a n S c h e y fv e , c h a n c e lie r d e B ra b a n t.
* K estreling, p ro b a b le m e n t u n crousteille, espèce de g â te a u . D an s le p a to is d e B ru x e lle s , korst.
c ro û te , d e v ie n t kest ou keust.
R aust, de l’a lle m a n d rauscli, c tr e iv r e , b r u y a n t.
DU CARDINAL DE GR ANVELLE
faict sa m b la n t q u e Iedict Sieur alloit p o u r faire dix enseignes de piedtons,
faisant casser celles des capitaines Lopez, Grillo et Marin q u i ont faict u n g
inonde de desgastz, tout com m e ont faict les com paignyes de Mr d ’Havret,
q u e l’on parle aussi de casser p o u r avoir pillé x xvm villaiges à Pentour de
Bois-Ie-Duc, de sorte q u ’il n’y est dernoré un cheval, vache, m outon, ny u n g
pollet, a ia n t em p o rté tout ce q u ’ilz o n t peult, sans rien lesser aux povres
paysantz. E t ilz noz vièg n e n t encores vi™ G risons ou Suisses tous nudz, qu e
sont p rès de N a m u r, q u e Son E x cc avoit c o m m a n d é à del Gadillo 1 de c o n tre m an d e r. D ’a u ltre coustel sont près d ’Urbi * les 5,01)0 reyters d u conte de
Mansfeld, et q u e lq u e s x x v n enseignes d ’Allemands, q u e nous m an g e ro n t les
oreilles et ne se rv iro n t q u e p o u r d o n n e r jalousie au x princes d ’AlIemaigne,
desquelz aulcungz lièvent gens.
Ceulx de G h eldres sont peu contentz d ’estre si m allraictez de Chappin
Vitello, qui at son ca m p vers Bomele, où sont les xx enseignes d u d it
S ie u r d ’Havret, qui se tro u v a n t l’aultre jo u r à B ois-le-D uc, d e m a n d a
4,000 florins p o u r ses soldatz ; l’on luy en d o n n a 1,500 p o u r en estre quicte.
L ’exem ple d ’Anvers attire.
X X X IV .
LE
PHÉVÔT
M O R IL L O N
AU
C A R D IN A L
DE
GRANVELLE.
(B ib liothèque de Besançon. — L e ttre s d iv erses, l. I l, fol. 194, 195.)
B ru x e lle s , le 1 4 ju in 1B74-,
M onseigneur. J e re s p o n d ra y à la lettre de vostre IIIme et Rme Sgrie d u x m e
d u passé, p o u r à laquelle satisfaire nous tenons ju s q u e s ores le conte
Lodovic, son frère le conte Henri, et Christoffe, (ilz de l’É le cte u r Palatin,
p o u r m ortz ; et telle est la te n e u r d ’u n e lettre q u e m ’at m o n stré p a r copie
' I le rn a n d o d cl G a d illo , a n c ie n s e c ré ta ir e du d u c d ’A lbe. V o ir t. III, p . 2 2 7 .
' L isez : p rè s d e D u rb u y .
136
CO RR ESPONDANCE
Monsr de C ham paigney, escripte par le P rin c e d ’O range à son frère, le
eonle Jelian, advisant p a r icelle s u r ceulx q u ’il se p olrat servir ceste guerre,
el les m oyens q u ’il debvral ten ir p o u r a ttire r le P rince de C ondé; laquelle
lettre, com m e j ’ay dict a u d ic t sieur de C ham paigney, me sam ble plustost
d ’artifice et faicte à propos p o u r nous a m u s e r q u e à aultre effect; et telle
est bien l’opinio n d u d it sieur. J e suis m arri q u e n’en puis avoir copie.
Q u a n t au Conseil des troubles, il d u re encores, et at despuis trois
sepm aines d o n n é d ’aussi sauvaiges apostilles q u e oncques par avant J e ne
veoidz point qu e les Estats se co n te n ten t ju sq u e s il soit du tout abro g u é .
L’on a ttrib u e à leur invention q u e les biens seront restituez à ceulx qu e
feront preuve d ’avoir, d u r a n t leur absence, vescu c atholiquem ent, desquelz
s’en trouvera p e u ; car chascun n’at heu moien de vivre soubz Liège. Telz,
p o u r gaigner leur vie, sont estez conlrainctz de h a b ite r en A ngleterre, telz
à E m pde, telz en Allemaigne, où il n ’ y at exercice de nostre catholicque
religion
touttefois il en y at de noz réfugiez qu e allantz là esbranslez,
se y sont tant lassez de l'hérésie, q u ’ilz sont reto u rn ez au bon ch em in ,
veoires je me suis lessé d ire d ’a u lc u n s q u e sont de renom , q u e je tenoye
hérésiarches qui passé d e m y -a n ont deffendu à leur femme et m aisnie
de plus h a n te r les presches. Si l’on attiroit des telz. ce seroit affoiblir
l’ennem i.
L’on est bien esbalii par icy q u e Sa Saincteté soit esté si large d ’a c ­
c o rd e r u n e si am ple grâce, d o n n a n t r e to u r à tan t de m eschantz gens, que
seroienl p o u r un j o u r nous c o pper les gorges; mais j ’espère q u e Dieu nous
aidera.
Je liens qu e les pays s’efforceront p o u r paier leur c ontingent des de u x
m illions, et jà ceulx de B ra b a n t sont après p o u r paier leur cotte d’ung an.
Le principal est de sçavoir com m e l’on ferai de la p a rt des pays occuppez,
com m e Hollande el Zeelande.
Il est croiable que, com m e vostre Illme Sgr,e dit, les F rançois n’a u ro n t
p o u r ceste année m oien à nous faire g u erre, estant le B oy m ort et celluy
de Poloigne en ch em in p o u r p r e n d r e la coronne, en ce q u e la Royne-m ère
l’adsisle, a iant dict à Monsr d ’A lenchon q u ’elle y em ploiera le corps à la
vie plustost q u e luy y p a rviègne, Iuy im p u ta n t la m o rt de son frère, q u e
1 V o ir cc q u e n o u s (lisons a u su je t de ces é m ig ra tio n s , d a n s le tom e IV, p . 8 8 , n o te 1.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
157
nous vieiil mal à p ro p o z ; car je tiens le successeur plus belliqueulx qu e
luy, el q u e u n g j o u r il nous d o n n e ra i à faire, si ne sûm es ralliez et en plus
de repos et de b o n n e volunté de v a n t q u ’il com m encbe.
L’on nous faict icy accroire qu e le T u rc q vient fort puissant p a r terre,
el ainsi l’at escript Monsr de Mansffeld à son fdz q u e at eslé tué p a r le
Sr de R issem bourgh (’ap p e llan t po u r p re n d re charge soubs l’E m p e re u r, qu e
faicl ce q u ’il peult p o u r résister a u d it T u rc q .
Encores ne m ’apperceois-je q u e l’on a y l p ro c u ré diffidence en tre ceulx
qu e sont à la suite d u prin c e d ’O ranges. T ro p bien s’est jecté le Sr Don
F e r n a n d e s u r V aterlandt ’, où il al conquis des places fort im p o rta n te s , et
plus qu e aulcuncs villes, com m e E lpendam et q u e lq u e s autres forteresses,
y pro cé d a n t p ru d e m m e n t et d ilig em m en t avec si peu de gens q u ’il at, et at
rué ju z et p rin s plus de 111e Anglois, sans les dem orez s u r la place que
excèdent ledit nom bre. Les ennem iz b r u s le n t les lieulx et villaiges q u ’ilz
ne p eulvent plus lenir. Si la m u tin erie d ’Anvers ne fut enlrevenue, l’on
he u l désjà L eyden 3 et Del ft, q u ’estoient lors sans g a rnison, et ont salué
h u m a in e m e n t Valdez qu e se meict dedans leur traicl, encores q u ’ilz ne
l’ont voulu tirer. L’on dit q u e le P rince y at renouvellé le m agistrat et
rafreschi de gens.
Voslre lllme Sgrie ne faicl peu p o u r nous, em p e sc h an t q u e l’on n’y envoie
d ’advantaige de gens d ’Italie; car il ne fauldroil q u e cela p o u r nous p a ra ­
c hever de perdre.
1 P h ilip p e île M a n sfe ld , fils de P i e r r e - E r n e s l, a été tu é au m o m en t d ’u n e q u e re lle p a r le Sr de
H ic h e b o u rg , q u i o b tin t sa g r â c e , p a r su ite d e la m a u v a ise c o n d u ite de la v ictim e. Selon Ile q u c se n s,
(•’é ta it u n des s u je ls le s p lu s m al in te n tio n n é s c l les p lu s d a n g e re u x du p a y s . V oir, à ce su je t, la Cor­
respondance de Philippe I I , t. III, p p. 1 0 3 , 104. V o ir au ssi p lu s h a u t , p p . 1 0 0 , 1 0 2 .
*
La m a u v aise s itu a tio n d a n s la q u e lle se tro u v a it le V V atcrland e s t d é c rite p a r P . B or , liv . V II,
fol. 17, e l d a n s la Correspondance de Philippe 11, t. III, p p . 1 0 5 , 106.
s En ce q u i c o n c e rn e le siège de L e id e n , v o ir M en d o ça, t. I l, p p. 2 6 4 e l su iv ., e t P. B o n , liv. V II,
2 1 ; G ro e n v an P r i n s t e r e r , t. V, p p . 1 0 , 2 6 , 37 et s u iv .; K o s t, Lelterkundig en beoordeelend
overzigl der gesehiedenis van het beleg van Leiden; Brieven van Johan Van der Does over het beleg van
fol
L eiden, d a n s D o d t van F l e > s b l r g , A re h ie f voor kerkelijke en wereldsclie gesehiedenis, t. V I, p. I ;
V is s c h e r , Twee brieven van Johan Van der Does, W erken van het genootschap te Ulreclit, k ro n ijk,
2 ' a n n é e , p. 151 ; V is s c iie r , Onuitgegeven stukken rakende het beleg van Leiden, etc. — L es d e u x sièges
d e cette v ille o n t fait d a n s les P ay s-B a s l’o b je t d ’un g ra n d n o m b re de tr a v a u x . V o ir Correspondance
de Philippe i l , t. I l l , p p. 5 5 1 e t su iv .
T
ome
V.
18
Iô8
CORRESPONDANCE
Mes précédentes a u ro n t dict ce q u ’est passé a u x d e u x concilies avec
l’a b b é de Lobbes. Q u a n t à Monsr de C ham paigney, il at heu em peschem ent
despuis q u e se tin t vostre concilie synodal et de p u is ju sq u e s la venue de
Son Excellence en ce lieu, lorsque je suis tom bé m alade. E t lu y pa rtit
h ier vers H ollande, rem e cta n l le tout ju s q u e s son retour. Il m e sam ble
q u ’il est peu c ontent de son go u v e rn e m en t, d u q u e l il se treuvera en fin
forcompté.
JNous avons p e rd u : Monsr de B eauvoir ', q u ’estoit allé à Liège p o u r
b oire l’eaue de Spa, le m aislre des postes Antonio de Taxis en Anvers, et
Novaterra * à Louvain. Dieu leur perdoint.
Malines s’est fort r e f a ic td e c e u lx q u e s’y sont réfugiez d u r a n t les tum ultes
d ’Anvers, où Son E xce veult r e to u r n e r p o u r resta u re r la ville et Passeurer,
qu e serai fort bien faict à luy, et je suis seur q u ’il n a t faulte de bonne
vol un té.
Chascun est bien esbahi q u e la statue 5 du Duc est hostée, encoires qu e
l’on faict c o u rir le b r u ic t qu e c’est la Duchesse d ’Albe qui la d e m a n d e
p o u r la m ectre en q u e lq u e ja r d in . J e im p u te plus ceste folie à celluv que
l’a feit faire q u e fut A ria s , q u e à luy. Le piz est que l’on rase aussi ses
arm es miz s u r les portes d u d it chasteau en plus g ra n d n o m b re qu e celles
du Roy.
Albornos, ad ce qu e m ’at dit le P r é s i d e n t Viglius, at escript à Del Rio
q u e ceulx q u i parloient icy mal de son m aislre, s’en p olroient tost repentir,
et q u e les affaires alloient fort bien en C o u r t; ce q u e m e fait croire le c o n ­
traire, et q u ’il d o ib t estre mal à son aise. Castillo m ’at dict avoir veu lellres
de Vargas, disantes q u e à B arcelonne luy esloienl venu lettres d u R oy de
n ’a p p ro c h e r la C ourt de cinq lieues; q u e louttefois il n’avoit accepté dons
com m e Albornos, ny se meslé de finances ou de paier les soldalz, ny des
affaires d ’A ngleterre, desquelles l’on dit le D uc estre fort b a tt u ; qu e ledil
1 P h ilip p e de L a n n o y , Sr de B e a u v o ir. V o ir sa n o tice, t. II, p. 10. Il m o u r u t à L iè g e , le 2 j u i n , en
se r e n d a n t a u x e a u x d e S pa. (Correspondance de Philippe I I , t. III, p. 105.)
1 N icolas de N ova T e rr a ou N ie u la n t, é v ê q u e d e H a a rlc m , n o m m e en 1561 e t r e tir é en 1 5 0 9 .
‘ L a s ta tu e de b ro n z e q u e le d u c d ’A lbe s’é ta it fa it éle v e r à A n v e r s , e t d o n t le s ta tu a ir e Jo n g e lin c k
é ta i t l’a u te u r , e s t g ra v é e d a n s P . B o n , liv . IV , fol. 1 8 5 , e t d a n s Les délices des P ays-B as. Les in s c rip ­
tio n s é ta ie n t d e B en o it A rias M o n ta n u s, s a v a n t p h ilo lo g u e espagnol. R c q u c se n s la fit e n l e v e r ,d ’a p rè s
R enon de F ra n c e .
DU CARDINAL D E GRANVELLE.
Vargas n’avoil perm iz les insolences des gens de gu e rre , et si cela fut esté
de sa charge, q u ’il he u l p u n i les chiefs p o u r les p re m ie rs ; s’il avoit esté
sévère, q u ’il c ra in d ro it q u e ce avoit esté trop p e u ; q u ’il n ’avoit heu sa
com m ission d u Roy, mais d u d it Duc, d u q u e l il avoit ses descharges bien
faicles.
L’on nous a t encoires de p u is peu de tem ps b ru slé an lires q u a ttre batteaux 1 près d’Anvers, auxquelles les Espaignolz faisoienl le guect. El to u ttefois l’on at p rin s h o n teu se m en t la fem m e du vice-adm iral Hem stede *
avec ses enffanlz, et a n n o té ses biens, com m e s’il fut esté traictre, d o n t
n ’a p p e rt rien. C’est l’ancien stil de la nation de rejecter ses faultes su r
a u ltru y , et le u r h oster les h o n n e u rs de ce q u ’ilz o n t b ien faict. L’on at faict
un Espaignol ad m irai de v a n t q u e le sie u r <le Beauvoir fut m ort, q u e l’on
at routi à petit feug p a r tan t de traveil. J u lia n R o m e ro est faict mareschal
de cam p, encoires q u e les am ulinez pro te ste n t de ne voulloir servir soubz
Iuy. Ung Vargas est général de la cavallerie, et Don B ern a rd in o de M e n d o ça 3
cassé. S ancho d ’Avila at 1,000 escuz de ren te p o u r la victoire de Mockem
et le chasteau d ’Anvers, où l’on at miz trois enseignes d ’Espaignolz. T o u ttefois ledil Sancho n ’est à son aise, et se d o u b te de q u e lq u e coup de pigne
p o u r estre seul cause du désordre. Toultefois il est m ain te n a n t aussi s u p e r­
in te n d a n t de la ville, a ia n t v o u lu avoir les clefz d ’icelle, encores q u e son
E xc« Iuy a y t escript de s’en desporler, ad ce q u ’il n’at obéy. Son E xce, q u e
at par tous m oiens possibles p e rsu a d é Mons' de C ham p a ig n e y de r e to u rn e r
à son gou v e rn e m en t, avoit c o m m a n d é a u x députez de la ville qu e sont icy
de le prier, de ce d o n t ilz se sont bien g a rd e z ; car ils v o u d ro ie n t estre sans
g o u v e rn e u r, et c e sluy-cy est trop fin p o u r eulx; lequel encores q u ’il soit
esté requiz p a r trois fois de r e p re n d re son g o u v e rn e m e n t l’at refusé; mais
1 V o ir la r e la tio n de ce fa it d 'a rm e s d a n s la Correspondance de P hilippe I I , t. III, p . 9 5.
* A d o lp h e d e H aem sted c fu t accu se d e tra h iso n p a r U eq u csen s c l e m p ris o n n e . T o u te c e lte affaire
e s t lo n g u e m e n t ra c o n té e d a n s la Correspondance de Philippe I I , t. I l l, p p . 9 5 e t su iv .
* D on B e rn a rd in o d e M endoça, officier esp ag n o l, a r riv a en 1S67 av ec le d u c d ’A lbc. C’c ta it un m ili­
ta ir e trè s d istin g u é , a u te u r d e s Commentaires s u r la g u e r re d u X V Ie siè cle au x P ay s-B a s. Ces m é ­
m o ire s, ré d ig é s en lan g u e e s p ag n o le, o n t é té tr a d u its p a r L o u m ic r e t a n n o té s p a r le colonel G u illa u m e .
C’est l’éd itio n q u e n o u s cito n s so u v e n t d a n s n o tre v o lu m e. D e v e n u m alad e en 157-4, il fut re le v é de
ses fo n ctio n s, e t a u m o m en t de son r é ta b lis s e m e n t, il r e ç u t u n e m ission im p o rta n te a u p rè s d 'E lis a b e th ,
re in e d ’A n g le te rre . V oir sa n o tic e p a r le colonel G u illa u m e , d a n s le tom e Ier d es Commentaires de
Mendoça.
IÎO
CORRESPONDANCE
à la lin al p ro m iz d ’obéyr. Aussi elle f a t suffisam m ent deschargé devers
les Estatz, m ectanl la faillie s u r le chasleau, et luv a ia n t prom iz acle de
son debvoir, et q u ’il n’at faulle en l’outraige que at faict le soldat am utiné,
contre lequel le B r o o d e n r a e t 1 d ’Anvers at présenté requestc à Sa Majesté,
r e q u é r r a n t q u ’il soit chaslié et tenu de ré p a re r les dom m aiges à chascun
pa rticu lie r; q u e le chasteau soit rasé, la ville close p o u r a ssc u re r le m a r ­
c h a n d , a d jo u sta n t qu e p e rso n n e ne veult lever b o l id e de laquelle a u llru y
p o rte la clef.
J ’entendz de Monsr d’A rras qu e Son Excellence al à toute occasion parlé
fort h o n o ra b le m e n t et affectueusem ent de Vostre IIlm0 Sgric.
Il n’est pas m aulvais q u e lesdils arnutinez se sont vantez q u e sans eulx la
ville se fust p e rd u e le j o u r de la Pentecouste, lorsque les e n nem ys s’e m p a ­
rè r e n t de x u u ou xv balteaux, a u x q u e lz ilz o n t laissé e m p o rte r plusieurs
pièces d'artillerie q u ’estoyent en terre, et sont encores venu depuis charger
les autres pièces q u ’ilz avoyent lessé s u r le rivage.
L’on dict q u e Sa Majesté, p a r les lettres q u ’elle ha eseript s u r ladite
m utinerie, se m o n tre peu contente *. Aultres dient q u e ceulx d ’E spaigne
dienl que c’est bien em ploié p o u r ce q u e ceste canaille d’Anvers ne voulloit
p reste r au Roy, et qu e en tout é v énem ent Sa Majesté at heu a rg e n t p o u r
paier ses gens, qu e polroit bien estre un e chière finance.
L’A m bassadeur de F ra n c e at asseuré à Son E x ce q u e les ba tte au x de
Vlessinghe o n t b ru slé l x navires de P ie rre Molendez qui, ad ce compte,
a u ro it faict m aulvaise g a rd e ; et certes je suis tousjours esté en craincte
q u ’il m ésadviendroit à nostre a rm é e : c a r les ennem iz sont trop puissants
p a r m e r et o n t plus de 11e xx ba tte au x fort équippés. Il sera tard avant q u ’on
les le u r a rra c h e des m ains p a r force.
Monsr d ’Achey J avec son frère p a rte n t dem ain p o u r B ourgoingne,
aiantz icy achepvé fort bien tous leurs affaires. Ce sont deu x gentilz personnaiges et q ui o n t bien adsisté Monsr de C ham paigney, leur oncle, tant
d ’advis com m e de leurs personnes.
1 B recd en r a a d , ou larg e C onseil d ’A n v ers, d o n t n o u s a v o n s d o n n é l’e x p lic a tio n au t. IV, p. 5 5 1 .
*
L a le ttre d u R oi à ce s u je t, d a té e d u 7 ju in 4 ÎS 7 i, e s t im p rim é e d an s la Correspondance de P h i­
lippe I I , t. I I I , p. 9 2 .
s V oir p lu s h a u t, p . 87.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
Ul
Mons 1 le P r o to n o ta ire do C hasteaurouilland ' est parti ce m atin avec
Monsr d’Arras, et est fort bien en grace de Monsr de Sainct-B avon.
XXXV.
G U IL L A U M E , P K IN C E D E B A V IÈ R E , AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
( Bihliotliètjrif royale du Bruxelles. — Manuscrit n" Ü473, Recueil III, loi. 575.)
S ta r n b e rg , le 27 m ai 1574.
Salutem et am icitia 1 n ostræ p e rp e tu u m in cre m e n tu m . S cripsim us ja m
ante ad lllani et Rev. Dilem Vestrain fusius et m axim e triu m s e q u en tiu m artic u lo ru m causa, p rim o q u id e m de negotio Serenissim æ Dom inæ socrus ac
m atris n o stræ dilectissim æ et honoratissim æ L olharingiæ ducissæ v id u æ ;
deinde ut equos n o n n u llo s illius generis vel equilis ex regno q u o r u m
c o m p a r a n d o r u m stabuli nostri Magistro P e tro G ivarra m a n d a lu m dede­
ram u s, ju x ta S ermi Regis concessam nobis circa h u e veniam h u e ad nos
transm ittendos. PostremoDil* Vestræ com m e n d av e ra m u s ju v en e m q u e m d a m
nobilem R e n a tu m Bernage, quem qu id em d e sid e rab a m u s ad ejus servitium
prom overe, et nihil eo potuisset hoc tem p o re fieri nobis gratius. Sed tarnen
cum intelligam us id Dil 1 Vestræ non fuisse c o m m o d u m p ro c u l d u b io non
sine gravi causa ac ratione, non est instituti nostri m ajori illud instantia
c o n tra ipsius com inoditatem petere. Cum itaque non d u b ite m u s q u in q u o
ad p r im u m nos brevi per su p ra d ic tu m stabuli nostri m ag istru m à Dil«
vestra h a b itu ri sim us responsum , q u o d q u e ad equos a ttinet illos p r o p e diem per ip su m q u o q u e ad nos adductos iri, superest u t de eo q u o d po stre m u m f a c itD ilem V estram d e n u o m oneam us, rogantes ut velit saltern p ro
sua in q u a v e rs a tu r ibi auth o rita te , præ fati nobilis nostri protectionem in
gratiam nostri eatenus suscipere, c u m q u e in tan tu m p ro m o v e re q u a te n u s
1 P i e r r e M o u c h c t , Sr de C h â te a u R o u illia r d , p r o t o n o ta ir c . V oir t. IV7, p. 145.
CO RRESPONDANCE
possit p rim a occasione h u e advolare a tq u e ad nos redire. Idque vicissim
om ni studio eandem pro m e reri cupim us.
XXXVI.
A N N E , P R IN C E S S E D E P O L O G N E
AU C A R D IN A L DE G R A N V E L L E .
(B ibliothèque royale de Kruxelles. — M an uscrit n" !)473, fol. i>K3.)
C ra c o v ie , le K l ju in
1574.
Illustrissim o et R everendissim o in Christo patri D om ino A nthonio G ranvellano S. R. E. p ræ sbitero C ardinali, et p e rp e tu o adm inistrator! A rchiepiscopatus M echliniensis, ac Vice-regi et locum tenenli generali in regno
N eapolitano, amico nostro honorandissim o. Anna, Dei gratia, infans regni
Poloniæ, etc., salutem et o m n iu m b o n o ru m accessionem. Illustrissim e et
R evme in Christo pater, D o m in e amice noster honorandissim e. C um mitterem us istuc q u æ d a m ad v enerabilem agentem n o stru m q u ib u s negotia nostra
opus h a b e re v id e b a n tu r, v o lu im u s his q u o q u e litteris P a tern ita te m Vestrain
p ro m ore nostro salutare, e ique fausta ac fœlicia om nia com precari.
Rogannis P a tern itatem V estram m agnopere u t in causis illis nostris qu æ
p ro p e m o d u m solius Paternitatis Vestræ auctoritate c o n tin e n tu r, præ stet
tandem nobis P a tern ita s Vestra n a tu ræ in geniique sui æ quitatem et
illam q u æ est h o m in u m ecclesiasticorum m axim e p ro p ria pietatem . ut
a liq u a n d o vice-rege Neapolitano G ranvela cardinali ad id q u o d om ni ju ris
claritate a tq u e evidentia n o s tru m est possim us in regno Neapolitano p e rvenire. In q u o sane p e tim u s ne P a tern ita s Vestra a u t querelas nostras
a q u ib u s se m p e r fu im u s alienissim æ, a u t inonita vel m an d a ta aliorum
expectet, sed u t ipsa p otins id q u o d ju s esse pro sua p ru d en tia intelligct
1 A nne é ta it fille de S ig ism o n d I , roi de P o lo g n e , e t d e v in t la fem m e d ’E tie n n c B a tto ri, é lu ro i d u
m êm e p a y s , le 15 d é c e m b re 1 575.
DU CARDINAL D E GRANVELLE.
145
p ro ipsa («quitate sua perficiat et ex e q u atu r. Ea quae su n t ex venerabili
ipso agente nostro P aternitas Vestra intelliget. Q uam bene valere cupim us.
XX X V II.
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(B ibliothèque île Besançon. — L ettres d iv erses, t. I l , fol. 196, 197.)
................ .. le 15 ju in 1 574.
M onseigneur, j ’ay veu tel tem ps Monsr de C bam paigney m al à son aise
et peu c o n te n t d u C o m m e n d a d o r Maior, et se vint jecter à la F o n ta in e 1
v e n d re d i seoir, sans v o u lo ir v e n ir icy ju sq u e s lendem ain, veille de la T ri­
nité, q u e Son E x ce y a rriv a, qu e depuis luy a ia n t parlé so u v e n t et beaucop
l’a t e n tiè re m e n t rem iz et asseuré. Les lettres q u e Monsr de C h a m paigney
luy avoit e scrip t estoient fort libres
je pense bien q u e v é ritab le s; mais
le D uc d ’Albe ne les h e u t jam a is accepté de si b o n n e part, com m e je veoydz
q u e l’on a t faict, et je tiens q u e vous aurez veu celles q u e avec certain dis­
cours il al envoyé au R oy !, lequel encores q u ’il fust fondé s u r vérité et s u r
son d e bvoir, j e p e n s e n ’au ra p o i n c t e n t o u s e n d r o i c l z p l e u t à Vostre lllmeSgrie.
Si en est-il bien p rin s à vostredit frère, auquel l’on m onstre g ra n d e confi­
d e n c e ; et toulte fois il ne pe u lt estre qu e le C o m m e n d a d o r ne soit adverti
' M aison d e p la isa n c e d u C a r d in a l, d a n s le vo isin ag e d e B ru x e lle s , à S t-J o ss e -te n -N o o d e
’ L es re la tio n s e n tr e d e C h a m p a g n ey e t R e q u esen s n ’é ta ie n t p as to u jo u rs d e s p lu s c o rd ia le s. C h a m ­
pagne}', e n n e m i d e s E sp a g n o ls , m a is d é v o u é a u R o i, n ’a p p r o u v a it p a s to u t ce q u i se p a s sa it. L e C om ­
m a n d e u r v o u la it s’en d é b a r r a s s e r à to u t p r ix . V o ir la Correspondance de P hilippe 11, t. I I I , p p . 115,
1 5 8 . C h a m p a g n e y in s is ta it d e son cô té s u r la n écessité d e lu i a c c o rd e r so n congé. V o ir ibid., p . 3 3 8 ,
e t Mémoires de Cham pagney, p p . x x v c l su iv .
*
L a le ttre d e C h a m p a g n e y a d re ss é e a u
R o i,
le 2 8 a v r il 1 5 7 4 , r e n fe rm a it la re la tio n d es excès
co m m is p a r les E sp a g n o ls à A n v e rs. V o ir la Correspondance de P hilippe I I , t. III, p . 6 1 . C ette re la tio n
e s t im p rim é e p p . 13
à
2 8 des Mémoires de Cham payney, p u b lié s p a r
de
R
o im u l x
de
S
oumoy
.
144
CORRESPONDANCE
de Sa Majesté q u e luy a u ra i renvoie lesdicles lellres et discours, q u e j u s ques à présent je ne sçauroye im aginer avoir nuict à Monsr de C h a m p a i­
gney, p u isq u ’il est plus encaressé et e nlrem iz au secret, ju sq u e s avoir c o m ­
mission de p a rd o n n e r a u x réservez, et de traicter avec le prince d ’Oranges
et Boisot ', luy p a rd o n n a n t et re n d a n t son bien. C’est l’u n g de ceulx que
sont revenuz de la secte. Dieu d o i n t q u e ce soit à certes. Monsr de C h a m paigney in’a td e ffe n d u d ’en faire s a m b la n t u(lin que rien ne soit esvtnlé; ce
q u e j ’espère ne se fera par la présente, puisque, avant q u ’elle arrive, tout
serat faict ou failli.
Le C o m m endador n’h e u t pensé q u e les Estais heussent heu tant de verd,
et crainct c om m e saige; aussi je liens qu e l’on tiendra bon. D’aultre p art il
red o u b le si gran d z frailz q u ’il dict m onter p o u r chascun mois à 750,000
florins, q u ’il n ’est au pouvoir de Sa iMajesté ny de l’Espaigne de furnir, et
ne faict q u e exclam er contre l’inutile despence qu e at faict le Duc d ’Albe,
a uquel je tiens q u ’il at pro cu ré l’ignom inie que luy faict le maistre, q u e l ­
q u e bon s a m b la n t q u ’il luy a y t tenu. Ce qu e Voslre lllme Sgrie at to u sjo u rs
prédicl ; et cela me faict croire qu e Vargas, A lbornos et Moreno a u ro n t
encores leur Sainct-Marlin.
L’altération des Eslalz et tous gens de bien at eslé g ra n d e c ontre le Com ­
m e n d a d o r p o u r ce q u ’est advenu en Anvers, ju sq u e s à d ire q u i l estoit
indigne du go u v e rn e m en t, p u isq u e sa p ro p re nation le respecloit si pe u ;
q u ’il ne p re n d conseil qu e des estrangers, estant Roda fort odieux p o u r
s’estre m onstré violent, h a ullain et peu discret à Anvers lo rsq u ’il commitnicqua avec le m agistrat, q u e se plainct fort de luy. Aussi at dit le Duc
d ’Arschot q u ’il ne veult plus estre d u Conseil d ’Estat, p u isq u e ledit Roda
en est, qui entrevient à la consulte où q u e luy n’est a p p e llé; et cecy at-il
dit au Conseil d ’Eslat p rése n t le C o m m en d a d o r Maior.
J ’entendz qu e ledict D uc d ’Arschot est après p o u r faire to m b e r le g o u ­
ve rnem ent de iY!onsr de C ham paigney, si le chasteaul se jo in g n ist à la ville et
à son frère, présupposé q u e Monsr de C ham paigney persistist de le re fu s e r;
ce q u ’il ne fera, a iant desià d o n n é son mot.
1 C h a rles B o iso t, a m ira l d e la (lotte d u p rin c e d ’O ran g e. — C h a m p a g n e)' fu t en effet ch a rg é de
so n d e r les in te n tio n s d u p rin c e d ’O ra n g e s u r la p o ssib ilité d ’u n e p a ix . Il em p lo y a à c et effet le se i­
g n e u r de R iv ière, l’av o cat T re s lo n g e t M arn ix . V o ir Correspondance du Taciturne , t. I I I , p.
x x x v ii
.
14')
DU CARDINAL DE GUANVELLE.
Les Estatz se p lain d e n t fort de la folie d u d it Duc, q u i enyvra Monsr de
C anibray 1 vendredi, et le tint ju sq u e s à trois he u re s du m atin, veuillant
lors v enir desjeusner s u r les bailles
Hz d ie n t qu e son père ne soucie de
rien qu e de son proufiict; q u e le P résident Viglius n ’en peult p lu s; qu e le
Chancelier de B ra b a n t est u n g fol, et son beaul-fdz 5 im p e rtin e n t, et q u ’avons peu de gens de cerveau, com m e dien t ceulx d ’Espaigne. Touttefois
j ’ay veu q uelques trasses d ’u n g q u e d o n n e beaucop des bons a d v is ,
d é m o n s tra n l q u e tous les bons espritz ne sont pas m ortz. Il d o n n e s u r
les doibglz d j R oda et ses sam blables, et vouldroit q u e l’on p ro c u ra s t le
re to u r du D u c de Medina-Celi p o u r estre en si bon lieu com m e il est et
p o u r croire conseil
J ’envoie copie du p rotest *, encores q u e j e liens qu e l’aurés veu. Il y at
beaucop de choses q u ’il fust esté mieulx au ju g e m e n t de plusieurs de non
toucher, p o u r non d o n n e r si gran d e intelligence de ce q u e passe.
T o u t le m o n d e crie co n tre C hiappin V ite lli5, q u e c’est un F lo re n tin que
conseille la g u erre, et au g m en te la m aulvaise opinion q u e l’on at de luy.
Line parole mal assise q ..’il dit en Anvers, lorsque l’on se p lain d it de tant
de femmes avorlies, q u ’il dit qu e ceulx q u ’estoient entré feroient q u a ttre
fois a u lta n t d ’enfl’a nlz de ce qu e s’en estoit perd u .
Le p a rd o n se p u b lia h ier a u x villes. Dieu d o in t q u ’il proullicle; a u ltr e m en l l’on accusera la m alice de ceulx du payz. L ’on at d o n n é beaucop de
tem ps au P rin c e p o u r r e m p a re r c ontre îedit p a r d o n ; touttefois j ’en veulx
bien espérer s’il est bien conduict, com m e je tiens q u ’il serat, p u isq u e ceulx
que j ’ay no m m é ailleurs o n t povoir de l’asseurer.
Le sieur R oda fut envoié icy le j o u r de Pentecouste p o u r p e rsu a d e r a u x
d é p utez des Estatz d’eulx tra n s p o rte r en A nvers; m ais le Conseil d’E stat
fut d'advis q u ’il n’en feit sam blant, p o u r ce q u ’il n ’h e u t rien o b te n u ; ca r la
chose le u r estoit p a r trop suspecte, co m m e si l’on les h e u t voullu a ttire r a u
chasteau! p a r force.
1 L o u is de B e rla y m o n t, a r c h e v ê q u e d e C a m b rai.
1 A ux b a r riè r e s p rè s d e la c o u r o u p a la is d u c a l à B ru x e lle s.
* S c h c y fv e , c h a n c e lie r d e B r a b a n t, d o n t la fille a v a it é p o u s é d ’A sso n lev ille. V o ir sa n o tic e , I. I,
p. 297.
4 S a n s d o u te la r e m o n tra n c e d es É ta ts G é n é ra u x d es 7 - H ju in 1 8 7 4 , im p rim é e d a n s le t. 111^
p . 5 5 6 d e la Correspondance de Philippe I L
* V o ir sa n o tic e , t. IV , p . 5 0 7 .
T
ome
V.
19
CORRESPONDANCE
L’on at rem iz à Anvers les A llem andz q u e sont des m endianlz. Deux
enseignes se j o in d ire n t aux Espaignolz am utinez. L ’on lient le s tâ t «le la
ville peu asseuré p a r eulx, p o u r ce q u ’ilz se raient p o u r la vendre cl eulx
jo in d r e a u x ennem yz.
Aldana q u e s’est icy venu m arier, dict q u e le Roy ne se soucie d ’ung
tro n de choux de ce pays, en ce qu e je tiens il luy faict tort. Puisqu'il
traicte si m al le D uc d ’Albe, c’est signe q u ’il en tient cas. Le filz do feu
A drien de la C h a m b r e , q u ’est re to u rn é de C o u rt, dict qu e le président de
Coarruviers at ten u à sa table si eslrange propoz d u D uc d ’Albe, q u e s’il
ne fust asseuré de la volonté de son m a is tr e , il ne se serait si avant des­
bo rd é. Il adjouste q u e ce q u e at esté accordé à Sa Majesté en Espaigne
s’exécute si rig o re u se m en t et a v a r e m e n t, qu e les officiers q u ’ilz sont là
a u lta n t mal voluz q u ’ici, et q u e les particuliers sont peu contentz de ce que
leurs vins, laines, huilles et olives leur d e m e u re n t s u r les bras, aianlz nous
b a n n iz Pavantaige s u r la m er contre toutte nation.
XXXV III.
L E P R É V Ô T M O R ILL O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(B ibliothèque de Besançon. — L etlres d iv erses, I. I l , fol. 2 0 2 , 203.)
B r u x e lle s , le 2 0 j u in 1 8 7 4 .
M onseigneur. P o u r resp o n d re a u x letlres de Vostre IllmeSgrie d u x x m c et
xxvii® du m ois passé, certes nous d e m e u ro n s en opinion q u e le Conle
Lodovic avec son frère et le P alatin Christolïle ne nous ferons plus de mal.
Q u a n t au dixiesm e, Vostre lllme Sgrie verra, p a r la proposition faite a u x
Estalz et q u e lu y envoie Monsr le P résident, com m e cela vad, ensam blc du
Conseil des troublez qu e vit encores.
1 L e s e ig n e u r A ld an a e s t c ité a u t. IV , p. 2 6 6 . M endoça cite au ssi, t. Il, p. 2 6 1 , F ra n ç o is d ’A ’d a n a ,
q u i c o m m a n d a it u n e co m p ag n ie p e n d a n t le siège de L eid cn en 1 8 7 4 .
DU CARDINAL D E GR AN VE LL E.
\M
L’on al dressé des forlz co n tre G e rlru y d e m b e rg h e et aullres lieux que
nous feront d u r e r la guerre. L’on assiège G o rc u m et B o m m e le '; mais c’est
sans artillerie ou m u n itio n ; ce q u ’est cause q u e C happin Vitelli est re to u rn é
à Bois-le-D uc, disant q u ’il ne veult m ectre en d a n g ie r son h o n n e u r. D ieu
d o in t q u e la facilité d u S eig n eu r Don F e rn a n d e ne le face succéder en la
charge de Général au lieu d u d ic t Vitelli ; car il est facille de veoir q u e cest
esté nous coulera sans rien faire. T o u t e f o i s nous avons, ad ce que dict
Monsr de B erlaym ont, x l 1" piédlons*. et p a rta n t Vtre Illme SgriB faict fort bien
d ’e m p e sc h er q u e l’on n ’en envoie d ’advantaige d ’Italie ; c ar il y en a tp lu s qu e
le pays n’en sç au ro it n o u r r i r ny paier. Mais, ad ce q u e m ’at dict u n g Sr de
N e d o n c lie l 3 venu n o u v ellem en t d’Espaigne, le Conseil y at arresté d e d o m p ­
ter le pays. Je ne sçay s’ilz en v ie n d ro n t bien à c h i e f ; d u m oings m onstrentilz g ra n d e a ig re u r contra nostrales, qu e y s o n t a b h o rriz , selon q u e m ’at
com pté ledit g e n tilh o m m e , qui dit q u e le G r a n d - P r i e u r * avoil exacerbé
les A rragonnois, ce q u e Sa Majté at voulu in c o n tin e n t estre addoulci. Ceulx
qu e y lièvent les impostz de l’accord de tant de millions, usent de telle
rig e u r q u ’il en polroit a d v e n ir du mal.
Il ne se fault e sb ah ir q u e les François o n t deffendu q u e l’on ne publiast
nouvelles doibs L y o n ; car leur Roy at esté m o rt Irois sepm aines avant q u ’ilz
en o n t fait sam blant. J e suis seur q u e l’a iant sceu Vostre lllme Sgrie, elle
l’a u ra t faict so n n e r a u x oreilles de ses voysins, alfin q u e le T u rc q sçaiche
avec quelz especiers il at à faire, et peult estre qu e le dict m o rt le ferat
refro id ir de ses em prinses. Je me suis resjouy, véant p a r vous lettroz du
1 » Q u a n t J u lia n R o m ero a t so m m é cc u lx de B om m cl de sc r e n d r e , ils o n t re s p o n d u q u e q u a n d
l’o n g e u v o ic ro it u n g du p a r d e ç à , ils r e s p o n d ro ie n t. •> (N o te de M orillon ) V o ir la le ttre d e R cq u cscn s
au Roi d u 15 j u i n 1 5 7 4 d a n s le t. III, p. 100 de la Correspondance de P hilippe I I .
’ S elo n V E tat som maire des gens de guerre que le lloi a dans les P ays-B as à la date d u 14 jan vier
1 5 7 5 , le n o m b re d ’h o m m es q u ’il d e v a it y a v o ir, se lo n la m o n tre , m o n ta it à 5 9 ,2 5 0 h o m m e s, e t celu i
d ’h o m m es q u ’il p e u t y a v o ir s’é le v a it à 0 9 ,1 5 0 . V o ir Correspondance de Philippe H , t. III, p . 2 4 7 .
3 P ro b a b le m e n t G eorges d e N c d o n c h c l, fils de G eorges e t d e M a rg u erite d e H a b a rq . Il é ta it Sr de
V icogne, e tc ., e t m o u r u t le 2 5 ju in 1(501 à A rra s . F id èle à la cau se de P h ilip p e II, il s e rv it le Roi à sa C o u r
e t a u x P a y s - B a s , e t r e ç u t d e lu i les te r r e s q u e le d u c d ’A lbe a v a it co n fisq u é s u r scs frè re s C h a rle s e t
H e n ri. Il a v a it é p o u s é : I» A d rie n n c d ’O s th o v e , d a m e d e P o n t-H a in e s, d e V c rd rc c k d e L an n o y , m o rte
sa n s e n f a n ts , 2° M arie de B c rg h c s -S t- W in n o c , d o n t il e u t d eu x e n fa n ts.
raldique, t V III, p p . 6 0 , ( i l e t su iv .
4 L’u n des fils d u d u c d ’A lbe.
(P
o pl im o n t
,
L a Belgique hé­
CORRESPONDANCE
xxvue du passé, q u ’il estoit encores si loing, et q u e Vostre 111™15 Sgrie a t si
bien pourveu ceulx de Maltha, qu e l’on at icy d it prinse et aussi au fort de
T u n e s ; et q u e o u ttre ce elle at p ourveu si bien à ses frontières et avec si peu
de fraitz, q u e n ’est pas l’o rd in a ire du D uc d ’Albe, d o n t le Roy sçait ce q u ’il
luy couste, et d o ib t c h é rir et faire différence de ceulx qui le servent bien
et à pelilz frailz.
Je craindz q u e le prince d ’O ranges nous serat trop fin, et q u e Monsr de
Charnpaigney fera peu, q u ’est désià à Utrecht. J ’e n tendz q u e Boisot avec sa
fem m e seroit allé en Angleterre. Je ne sçay ce q u e cela veult dire, q u e
peu It estre il p olrat estre allé de l’a u ltre coustel; car Monsr de C h a m p a igney faisuit com pte de traicter avec luy. C ependant nostre esté passe à
rien faire.
Q u a n t au pardon, tous ont opinion q u ’il serat de peu d ’effect si l’on ne
d im in u e le n o m b re des réservez, qu e sont ceulx q u e tiègnent les villes et
assujectent les bons q u e sont fort torm entez à M id d elb o u rg , où ce vaillant
B o u rg m estre , qui at si lo nguem ent soubstenu, est arresté p ris o n n ie r avec
des aultres eschevins et honorables bourgeois et m arc h an d z p a r le m al­
h e u re u x F riso n Rollema ', qu e Monsr le P ré sid e n t y m eist bailli, et q u ’est
re to u rn é en son office, pe rsé c u ta n t les Calholicques, encores q u e l’an 70 il
receut son absolution de m oy en ceste ville, ensam ble la grâce d u Roy.
E t ju sq u e s l’on p a rd o n n e ra à tous réservez, leur r e n d a n t leur bien à charge
de le vendre et eulx re tire r aillieurs q u e ne v o u ld ro n t vivre catholicquem ent, ou q u e l’on tie n d ra i p a r trop séditieulx et da n g e re u lx p a r leurs
actes passés, il ne fault jam a is espérer paix p a r dechà, n y faire com pte de
rec o u v re r la mer. Touttefois ne faisant ce p a rd o n m iracle, les Espaignolz
l’im p u ten t à la m alice des subjectz, q u ’ilz veuillent p a r force c o n tra in d re de
se confier en e u lx ; ce q u ’dz ne feront jam ais Hz p a rle n t de r u in e r (’H o l­
lande, ju sq u e s à y c o p p e r les a rb re s de fruict ; il polroit estre q u ’il leur
cousteroit c h ie r et q u e p a r u n g tel désespoir pressantz les ennem is les
dicques, Sa Majesté et noz p ro p re s gens ilz seroient les plus intéressez.
Du m oings at ce p a rd o n r e n d u gens de bien nous F rè re s des bois * à S a in t­
*
T zo m m o R ollem a a p p a r te n a it à la fam ille de H o p p e ru s ; il fu t e m p ris o n n e p a r le C o n seil des
tr o u b le s , p u is re m is en lib e r té e t n o m m é b a illi d e M id d e lb o u rg . Il fin it p a r e m b ra s s e r le p a rti d u
p rin c e d 'O ra n g c .
(IIoynck
va
.\ P
apen d rech t
,
I.
I,
p a r t.
II,
p p . 5 6 5 , 4 2 9 , 8 1 2 , 5 5 0 , 5 4 8 , 8 5 8 , 5 5 9 , 7 2 2 .)
s F rc re s des b o is , B o sq u illo n s ou G u eu x des bois. V o ir t. IV , p. 4 2 9 .
DU CARDINAL DE GRANVELLK.
149
A m a n d , q u e se rangent, recongnoissanlz la ju stice et veuillanlz, après tant
de misères, vivre soubz l'obéissance de lu Sainte-Eglise et de Sa .Majesté.
II sam ble qu e Mol ' ne veult être c o m prins soubz le p a rd o n , p ré te n d a n t
n ’avoir offensé : en ce q u ’il faict une gran d e folie ; car s’il se laisse forclorre,
to u t le m o n d e d irai q u e c’est u n g fol, et p e rsonne ne se vouldra plus m esler
de luy. Landaz at esté plus saige, que at accepté la grâce ainsi q u e l’on la
veult d o n n e r, et supplie c ependant d ’estre adm iz à p u rg e r ce q u e l’on
luy difficulté.
x m i ou xvin naves d ’O istla n d e \ ainsi qu e se n o m m e n t m a in te n a n t les
H ollandais, sont reto u rn ez à la Brille, encore q u e Sa Majesté les avoit fait
a rre ste r p o u r g u id e r P ero Molendez, q u ’est signe q u ’il est encoires mal
prest, et qu e lesditz ba tte au x o n t m auvaise volunlé L’on tient q u e ce que
l’A m bassadeur ou agent de F ra n ce avoit asseuré à Son E xcce, qu e p lusieurs
naves de Sa Majesté estoient arsses, soit faulx.
Le Sgr Don F e r n a n d e m ’escript q u ’il c rainct q u e les Espaignolz d ’Anvers
a u ro n t receu le p a ie m e n t de ses soldatz, et q u e cela les p o lra t a m u tin e r
p u isq u e l’on ne les paie poinct. Les Suisses sont tiré vers Bois-le-Duc. Hz
pa ie n t et tiègnent discipline là où ilz passent. Je craindz q u e nos W allons
les façonneront, m esm es si le paiem ent deffault. Ceulx de Monsr d ’H a v r e t 5
su rp a sse n t tous aulfres en excès et insolences.
Dieu nous veuille a y d e r ; c a r a y a n t icy si g ran d n o m b re de gens sans les
em ploier, il ne peult estre q u e n ’aions beaucop de m aulx. Il est icy venu
u n g Gonzaga, frère ba sta rd de feu Don F e r n a n d e 4, qui at le m esm e traictem en t d u d ic tC h a p p in Vitelli, et p a r ce m oien les eslrangiers nous m angent.
Q u a n t J u lia n R om ero at som m é ceulx de Bom m ele de se r e n d r e , ilz o n t
re s p o n d u qu e q u a n t l’on y envoieroit u n g de p a r deçà, ilz y respondroient.
1 J e a n d e M o l, d i t le B o rg n e , Sr d ’O e tin g e n , a n c ie n g e n tilh o m m e de C h a rlc s -Q u in t. V o ir sa n o tic e ,
t. I, p . 4 0 .
* Oistlande, p a y s d es e n v iro n s d e la m e r B a ltiq u e.
* C h a rle s -P h ilip p e d e C ro y , Sr d ’H a v ré . V o ir sa n o tice, t. III, p . 3 6 6 .
* F e r d in a n d d e G o n zag u e , fils de F ra n ç o is de G o n zag u c I I, m a rq u is de M antoue e t d ’E lis a b e th
d ’E st, fu t d u c d e M olfetti, p rin c e d ’A r h n o e t de G o u a sta lla , v ice-ro i de S icile. Il n a q u it le 2 8 j a n ­
v ie r 1507 e t m o u r u t à B ru x e lle s le 15 n o v e m b re 1 5 5 7 .
150
CORRESPONDANCE
XX XIX.
L E C A R D IN A L DE G R A N V E L L E AU P R IE U R
DE B E L L E F O N T A IN E
( Bibliothèque île lte»aii(,on. — Mèmoiivs île G ranvellf, l. I“\ fol. 7 0 , 80.)
N a p le s, le â(i ju in
1571.
M onsieur m on Cousin. J e resp o n d ra y p a r ceste à la vostre du v i n g t- q u a triesm e de may. L’exploit q u ’on avoit faict contre le Conte Ludovic et ses
gens estoit tel q u e si les E spagnol/, p a r leur m u tin erie si estrange, n’eussent
to u t gasté, nous pouvions avoir espoir q u e les affaires publicques ès pays
d ’em bas prem lro ien t m eilleur ch em in qu e du passé.
Monsr le C o m m en d a d o r Mayor, p a r lettres q u ’il m’a escript, se loue g r a n ­
d e m e n t d u bon d e b v o ir de Monsr mon frère, Monsr de Cham paigney, m e
d isa n t q u ’il s’y est fort bien et p r u d e m m e n t conduict, q u e m’est g ra n d
contantem ent. L’on nous asseure, p a r les dernières, qu e lesdits Espagnol/,
estoient appaisez; mais ça esté après avoir faict plus de desservice a
Sa Majesté q u ’ilz ne luy o n t faict ny feront jam ais de service; car leur
m u tin erie a t faict p e rd re u n e belle occasion, et se voit cler p a r les lettres du
p rin c e d ’O ranges interceptées, desquelles ledict seigneur C o m m en d a d o r
Mayor m ’at envoyé copie, q u ’il n ’estoit à son ayse, et q u ’il estoit en gran d e
crainte après la deffaicte d u d it Conte Lodovic.
L’on escript q u e le se igneur C h a p p in Vitelli estoit desjà p a rty p o u r aller
dresser le cam p à Bois-le-D uc, où l’on tient q u e lesdils Espagnolz le d e b voient tost aller treuver, p o u r dois là faire e m prinse s u r R o m m e l: mais
toutesfois ju sq u e s à oyres je n ’ay nouvelles q u e lesdils Espagnolz fussent
partiz d ’Anvers. Et p a rla n t iceulx, le se igneur C o m m e n d a d o r M ayor se
debvoit freuver à B ruxelles p o u r p u b lie r le p a rd o n général, et négocier
avec les Estatz y assem blez; mais il ne m ’a jam ais sem blé bon de faire
négocier lesdits Estatz e nsem ble: car je sçay la peine que, au tem ps de la
1 J a c q u e s de S t - M a u r i c e , p r i e u r de Bellefontainc. V o ir sa notice, t. II, p . 58 9 .
DU CARDINAL D E GR AN VELLE.
loi
R oyne, l’on eust p o u r un e assemblée que s en fil il y a passé trente ans, du
do m m ag e de laquelle l’on se sentoil encores au p a rle m e n t de ladite R oyne
D epuis l’an l v i i , le Roy en fit u n e a u l t r e 2, laquelle je contredis, n o n o b s ta n t
q u e j e fusse fort indisposé d ’une fiebvre; mais en fin ceulx qui désiroient
ladite assem blée, s’a y d a n s d u confesseur du Roy, p r é v a lu re n t; q u ’a esté le
com m e n ce m e n t des d é s o rd re s; c a r ils o starent au Roy l’a d m in istra tio n des
aydes, p o u r les m ectre e n tre les m ains des m a rc h an d z , lesquelz ay d o ie n t de
d eniers prestez ceulx q u ’ont esté cause des troubles, et fit l’on ce q u ’on peust.
p o u r abaisser l’a u ctorité de Sa Majesté, afin q u ’elle n’eust ès P ays d ’en bas,
sinon a u ta n t q u ’on vouldroil. Dieu d o in t q u e en ce>te nouvelle assem blée
m ieux en advienne, q u e je n ’ay veu ad v e n ir des précédentes.
La levée des Suisses 8, q u ’o n t passé p a r delà, n ’at pas esté p a r m on advis;
ca r il y at d e u x ans, q u ’estanl le seigneur C o m m en d a d o r Mayor à Milan,
m ’a y a n t ad v erly de ce q u ’on luy avoil m is en teste telle levée, je lui en
escrivis m on opinion, com m e aussi fis-je au Roy, s u r ce q u ’il luy pleut me
la d e m a n d e r. La nécessité où ledit se igneur C o m m e n d a d o r Muyor se sera
tre u v é venant le conte Lodovic, et pe u lt estre la d o u b le q u ’il avoit de non
p o u v o ir a voir Allem ans, a u ra esté cause q u ’il se soit servy de cest e x p é ­
dient. Mais si enfin l’on en vouloit faire levée, il convenoit que ce fust p a r
les m oyens ordinaires, et non pas par telles praticq u e s particulières, com m e
sont celles d u colonel Roollo et de ses sem blables, et crains fort q u e les
term es q u ’on y at tenu ne soyent de p réju d ice a u x négociations de nostre
pays p o u r lesquelles l’on envoye en Suysse Mr le trésorier de Salins *.
La m o rt du Roy de F ra n c e 5 fera c h a n g e m e n t a u x affaires. A u c u n s
1 G ra n v e lle e n te n d p a r le r d e la r é u n io n d es É ta ts G é n é ra u x en 1 8 5 5 , a u m o m e n t d u d é p a r t d e la
r e in e M arie d e H o n g rie . Le d is c o u rs d 'a d ie u q u ’e lle p ro n o n ç a en ce m o m e n t d e v a n t les É ta ts G é n é ­
r a u x e s t im p rim é d a n s
G
a ch a rd
,
Analectes helgiqiies, p . 1 0 2 . V o ir au ssi
I I e n .v
e
,
Histoire de Charles­
Q uint, t. V, p. 2 7 2 .
*
G
L es É ta ts G é n é ra u x se r é u n ir e n t à p a r tir du m ois d ’a o û t 1857 ju s q u ’a u m ois de m ai 1 5 5 8 . V o ir
a co a rd
,
L ettres à M M . les Questeurs, p p . 9 0 e t su iv .
e D a n s u n e le ttre a d re s s é e p a r B e rly à V ig liu s, le 6 m ai 1 5 7 4 , il est d it : » Q u a n t à n o s S u iss e s, il
m ’e s t d ’a v is q u ’ils d e m e u r e r o n t d e r r iè r e . C ar au 2 5 ' d ’a v r il n ’av o it l’on e n c o re o b te n u le congé r e q u is
d es c a n to n s p o u r le s le v e r e t les c o n d u ire h o rs le p a y s , e t ce p a r les m en ées e t tra v e rs e s d es F r a n ­
çois « . (Collection de documents inédits, t. X III, fol. 5 4 v°, a u x A rch iv es d u R o y a u m e .)
1 B o n n c t-J a c q u e m e t, S r d e N a n c ra y , in o rt en 1 580. V o ir sa n o tic e , t. III, p. 2 1 1 .
5 L e ro i C h a rle s IX d écéd a le 5 0 m ai 1 5 74.
152
CORRESPONDANCE
e spèrent qu e ce sera p o u r ung plus g rand repos, pu isq u e l'on ne voit que
p e rsonne s’oppose à la légitime succession d u R oy de P ologne; et servira
beaucop p o u r a c co m m o d e r leurs affaires, et m esmes ceulx de la Religion, la
p r i n s e d e ceulx qu e l’on a en m ain, si la R o y n e -m è re les retient ju sq u e s à
la venue d u d it Roy de Pologne, com m e je pense elle fera, et m esmes ceulx
qui sont à P aris, lesquels vray se m b la b le m e n t les P arisiens ne luy conseil*
tiroient de d é livrer ju sq u e s à ladite venue qu e l’on liaste fort; et passera
ledit Roy p a r les terres de l’e m p e re u r et de ses frères, et par l’estat de
Milan, ne se fiant des héréticques ny Allem ands ni François.
Les dernières nouvelles q u e nous avons de l’arm ée du T u rc sont q u e
une partie estoit à Negroponle, où s’attendoit la reste. Elle nous faict h o n ­
n e u r de venir si tard, et com bien q u e le b ru ic t c o m m u n à C onstanlinoble
soit qu e ladite a rm ée voise en Afrique, contre la Colette et T h u n es, toutesfois p u is q u ’elle tarde tant, il est plus a p p a re n t q u ’elle d o n n e ra i s u r les costes
de ce ro y au lm e et de Sicile. Si toute l’a rm ée du Roy estoit assem blée à
Messine, elle m ettroit g ran d frain à celle du T u r c ; car com bien q u ’elle^soit
de g rand n om bre de vaisseaux, elle est mal en ord re de rey m e u rs et de
m ariniers. J ’a ttends le reto u r de vingt de noz galères qu e j ’ay envoyé à la
Colette, et de h u ic l q u e j ’ay aussi envoyé à Malte, lesquelles p o u r estie
renforcées p o rte n t la c h io u rm e d’aultres g a lè re s;e t q u a n t elles seront icy,les
noslres c in q u a n te seronl prestes p o u r aller audit Messine. Reste q u e le
seigr Don J e h a n p o u rv o y e d e gens de g u e rre p o u r m ettre s u r icelles, oultre
le bon n o m b re qu e je y ay jà
1 V oir u n e le ttre d u 6 j u in s u r la m êm e m a tiè re (Ibid., f° 7 8 ).
DU CARDliNAL DE GRANVELLE.
153
XL.
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L DE G R A N V E L L E .
(lîihliolbèijue de Besançon. — L ettres de d iv ers, i. I l , fol. 208-200, 210, 231-231.)
A fllighem , le 2 8 ju in 1 5 7 4 .
M onseigneur. Monsr de Charnpaigney m ’escripl du x x ie q u ’il a rriva à
U lrecht le x v m e, q u ’il trouva à B ois-le-D uc le m arq u is C hiappin Vitelli
délibéré de re to u r n e r en court, q u ’il se plaingnoit et sçavoit faire valoir sa
m a rc h a n d is e en ces q u a rtiers là, q u ’il n’y at q u e plaincles p artout faulte
d ’argent, et a p p a re n c e de diverses m utineries, en ce q u e je crains il sera
p r o p h è te : car le Duc E r i c h 1 avec ses noirs harnas faict tels desgats à l’e n to u r
de G ro e n in g h e , q u ’il faict à cra in d re q u ’il y a u ra t q u e lq u e altération,
com m e l’est venu d ire expressém ent le sy n d ic q u e du lieu, qui d it q u e lesdilz noirs h a rn a s ne p re n d e n t point u n g poullet sans p a ie r; mais il fault
q u e c ha sc u n e m aison paie p a r sem aine cincq lallers, q u e sont h u ic t florins,
et q u ’il n’est possible c ontinuer. Le P résident al bien p a o u r q u ’ilz passe­
r o n t en son pays et doibs là en Geldre, q u e s e r o i l p o u r faire révolter l’ung
et l'aultre pays, avec ce qu e Billy n’est a ym é dans son g o u v e rn e m e n t p o u r
l’e x trê m e avarice de sa femme. Le Comte de Mansfelt a 3,000 chevaulx
«l’a u ltre coustel, qu e galtent tout vers D u rb y ’. Plusieurs s’esbahissent de si
g ra n d n o m b re de cavallerie, estant la saison fort advancée, et q u ’il n’y at
artillerie, p o u ld re , m u n itio n n y affutz preslz, ny pionniers, sinon q u e l’on
v e u ll a d ce assubjectir les Anglois que sont estez prin s en W a lle r la n d où
avons p e rd u plus d e C00 W allons p a r la faulte des capitaines, q u e les
1 K rick d e B ru n sw ic k . V. sa n o tice, t. I , p. 51. S cs c a v a lie rs p o r ta ie n t d e s h a r n a s n o irs e t é ta ie n t
v u lg a ire m e n t n o m m és les n o irs h a r n a s .
1 D u ib u y , p ro v in c e d e L u x e m b o u rg .
*
O n p e u t c o n s u lte r s u r l’in v a sio n d u W a tc r la n d , u n d es tro is g ra n d s q u a r tie r s d u N ord de la p r o ­
v in c e d e H o lla n d e , u n a r tic le é c r it p a r le b a ro n d e C h e v ra u lx , d a n s le Nicuwe m ilitaire spectator de
1 8 4 8 , t. Il, p . 4 0 , e t la Correspondance de P hilippe / / , t. I I I , p . 1 7 4 e t su iv .
T
ome
V.
20
m
CORRESPONDANCE
c o n d u iro n t trop avant sans v iv re s ; de sorte q u e les ont encloz et affamez
ju sq u e s ilz se sont renduz.
L edit sieur de C ham paigney adjouste en sadite lettre q u ’il at co n tre m a n d é ses com pagnies, et q u ’il s’excusera, s’il peult, de l’accreue, véant
Testât du Pays rl’Utrecht. J e veulx espérer q u ’il tient q u e l’on n’en a u ra t de
besoing; car il adjouste q u ’il taste u n g g u e y q u e ju s q u e s alors ne re s p o n doit mal. Aussi il at envoié u n g de ses gens au C o m m en d a d o r q u i le
dépescha s u r le cham p, et l’on at aussi faict p a rtir le d o cteu r E lb e rtu s 1 en
diligence vers Bois-le-D uc, de où je pense q u ’il tirera vers Monsr de Chain p a ig n e y ; c a r j ’entendz q u ’il est d u secret, et q u e le C om m en d a d o r l’emploie,
lequel at d o n n é Testât o rd in a ire de B ra b a n t q u e tenoit feu Q u a rré * à u n g
qui espouse la fille 3 d u d it docteur, d o n t Monsr le P ré sid e n t groulle, q u e le
voulloit e m p o rte r p o u r le fdz d u feu conseiller Bruxelles *; mais le
C om m en d a d o r Maior gaigna le procès, ce q u e m e faict croire q u e Monsr le
P ré sid e n t ne sçail ce q u e passe. Toutlesfois l’on dict p a rto u t q u e Ton traicle,
q u e seroit bien le plus beau p o u r rem ectre le pays en paix et repoz. Ce
sont ceulx d ’Espaigne q u e ne sçavent rien taire q u e s o n n e n t ce bruict.
S c h a re m b e rg h e r b m e dit q u e le Duc de Saxen lève des chevaulx, mais
q u e c’est p o u r son a sse u ra n ce ; au ltres dien t q u ’il s’en faict bien x n m; mais
qu e c’est p o u r F rance, où Ton dit q u ’il y at heu q u e lq u e bataille vers Sainct
J e an d ’Angely, où q u e le Duc de M ontpensier seroit d e m o u ré p r is o n n ie r ;
m ais il n ’y at a u lc u n e certitude.
Ils sont re to u rn é e nviron xxxiu b a tte au x d ’Espaigne qu e Sa Majesté y
avoit faict arre ste r p o u r les faire v e n ir avec son arm ée q u e doibt c o n d u ire
P ie rre Melendez, et q u e ce sont les boolzgesellen 6 qui ont faict ce
* E lb e rtu s L e o n in u s. V o ir p lu s h a u t, p. 102. Il fui c h a rg é de n ég o cier la p a ix avec le P rin c e
d ’O ran g c.
* C h a rles Q u a rré , c o n se ille r a u C onseil de B ra b a n t, m o rt e n 1 5 7 3 V oir sa n o tice, t. IV , p. 1 4 0 .
8 L a fille d e L e o n in u s, q u i se n o m m a it M arie, é p o u sa E tie n n e v an C raesb ek e, c o n se ille r d u C onseil
d e B ra b a n t. V o ir
S
t e in
d
’A
l t e n s t e in
,
A nnuaire de la noblesse de Belgique, t. X X V , p.
111.
E tie n n e
v a n C raesb ek e, n a tif d e L o u v a in , d o c te u r ès d ro its d e p u is le 2 7 a o û t 1 5 7 0 , fu t no m m é c o n se ille r v e rs
d é c e m b re
1 5 7 1 . Il d o n n a sa d é m issio n e n 1 6 1 6 e n fa v e u r d e son fils J e a n e t m o u ru t en 1 0 1 8 .
(M an u scrit d u C onseil d e B ra b a n t, p. 5 9 1 , et C om pte d e s d o m ain es de B ru x e lle s d e 1 5 7 5 .)
4 P h ilib e rt de B ru x e lle s , c o n s e ille r d u C onseil p riv é . V o ir sa n o tice, t. I, p . 9 3 .
* U rb a in S c h a re n b e rg c r, s e c ré ta ire d 'É ta t de lan g u e alle m a n d e . V oir t. I, p . 5 9 .
* Boolsgcsellen, m a te lo ts.
DU CARDINAL DE GUAJNVELLE.
(our ce p e n d a n t qu e leurs m aislres estoient lenu p o u r gaiges à Larredo et
aulti ■es porlz, q u e se ro n t m altraictez; ca r lesditz batleliers o n t m ené avec
eulx trois com m issaires espaignolz q u ’ilz o n t jecté en m er. L ’on tient qu e
ce sont esté H ollandois q u e se dien t Ostrelincgz. Les douze batteaux estoient
arm e z et fort é q u ip p c z d ’a rlillerie; la reste chargée de sel e( au lires m a r ­
chandises ; et d ie n t d ’a voir obéi à l’a rre st n e u f mois, et q u e com m e l’on ne
les paioit ny fu rnissoit de vivres, q u ’ilz sont estez contrainctz de rev e n ir
p o u r non inorir de faim. Ils d ie n t q u e qu e lq u e s G ueux et R ocheloix sont
venu à L a rre d o m ec tre le feu à a u lc u n g z des b a tte a u x de nostre a rm ée :
ce q u e je ne croy, ca r il n’y at heu suite de ce qu e l’on en avoit d it p a r
avant.
C hascun s’e sbahit q u ’il ne v ien t rien d ’Espaigne, et q u e Sa Majesté ne
dépesche p e rso n n e despuis q u ’elle sçait le trespas du R oy de F rance.
Noz Estatz de B ra b a n t beso in g n e n t flosehement s u r l’ayde, se plaind antz des m aigres apostilles qu e l’on d o n n e s u r la rem o n slra n ce présentée
à Son E x ce p a r les Estatz généraulx. Touttefois elle al faict u n g n e o rd o n ­
nan c e q u e tous estrangiers lenanlz estât en B ra b a n t contre les privilèges,
a y t de le q u itte r au x x n e de ce mois q u ’est désià passé : ad ce com pte
S a n c h o d ’Avila et beaucop d ’autres go u v e rn e u rs en se ro n t frailz. J e tiens si
Monsr le C h a m paigney besoingne bien q u ’il serai b r a b a n tin é
pe u lt eslre
du Conseil d’E s ta t et des finances.
L’on dresse u n e C h a m b re des com ptez p o u r les confiscations; q u e sera le
m esm e effect d u Conseil des tro u b le s, changeantz seullem ent de nom . De
ce n’e st-on content,
Ceulx de Malines sont v e nus r e m o n s lre r la dilïiculté q u e l’on le u r faict
de la p a rt des ferm iers des tonlieux p o u r les lesser passer à l’accoustum é.
S on Excellence les renvoie a u x finances et elles à luy. S’ils m ’heussent
d e m a n d é advis, je le u r heusse conseillé d e m a n d e r exéculoriales contre
lesditz fermiers, usa n t du m esm e rem èd e com m e ils faisoient devant que
la ville se perdist. Car il sem ble que, p a r le p a rd o n , ilz sont rem iz au m esm e
estât et estre q u ’ilz estoient avant leur révolte: et de ceste opinion est bien
Monsr le P résident.
1 Hrabantiné, q u i a re ç u la n a tu ra lis a tio n de B r a b a n ç o n , q u a lité n éc e ssa ire p o u r o b te n ir c e rta in e s
fo n ctio n s d a n s le d u c h é d e B ra b a n t.
CORRESPONDANCE
11 n’y at a u lcune nouvelle qu e le D uc d ’Albe soit m an d é en Court. A ce
c om pte n’effectuera t-il p o in cl ce q u e Mons1' d ’H avret dit luy avoir ouy dire
q u e la m aison de G ranvelle le luy p a y eroit u n g j o u r ; aussi ne ferat-il
m aulvais office contre ce pays, d u quel il avoil dit, p u is q u ’il se debvoit
p e rdre, q u ’il se d ebvoit faire de sorte q u ’il s’en souvinst à jam a is Il faict à
c roire q u e Sa Majesté serat d ’aultre advis, croiant celluy de Vostre Illme
Sgrie et d u C o m inendador Maior, qu e j ’entends avoir escript en conform ité,
à Sadicte Majesté, com m e a t tousiours faict Vostre IIlme Sgrie. Touttesfois
R oda m ’at dit q u e pluslost h a b a n d o n n e ra le R oy ce pays q u ’il ne luy
obéisse. Et il appelle o béir de c o m p o rter et d o n n e r tout ce q u e luy
songeroit, sans avoir considération de l’extrêm e p auvrelé de laquelle ceulx
d ’Espaigne sont cause . . . .
1 Voici ce q u ’à l’occasion de ce se ig n e u r M orillon é c riv it a u C a rd in a l d a n s u n e le ttre de la v eille :
« J 'a y veu le tem p s si h p ro p o s lo rsq u e le D uc d ’A lbe a r r i v a , q u e l’on h e u t c h a s lré la jo y e u s e e n tré e ,
» re sc in d é b eau c o p d e p e rn ic ie u x p riv ilè g e s au x v ille s , re d re s s é l'a u c to r ité d u P r in c e , ra b b e ss é les
» c o rn e s des E s la tz , co p p é les m em b re s p o rris . Mais com m e le D uc a v o it a u ltr e s d esse in g s c o rre s p o n » d a n t p c u lt-c stre à ccu lx d u M a ître , p o u r s u b ju g u e r t o u t, q u e se p o u v o it fa ire p o u r u n g tem p s et
» te n a n t en sem b le les fo rces, m ais n o n p a s p o u r to u sio u rs, e t m esm es s u r v e n a n t q u e lq u e g ra n d c h a n ­
» g e m e n t ou m o rt d e p rin c e , e t q u e lq u e chose q u e l’on a y t h e u e n te s te , A lbe n ’e s lo it p o u r l'e x é c u te r,
» e s ta n t tro p am y de so n o p in io n , h a u lta in e t g lo rie u x , q u e v o u lo it to u t faire p a r force e t sa n s p r e n d re
» a d v is , ou s’il le p re n d o it, il faiso it le c o n tra ire e t p ro c é d o it au x su b tilite z e t p e u de v é r ité ; d isa n t
» le p lu s c o n tr a ire de sa p ensée, c u id a n t tro m p e r e t s’e s ta n t tro m p e soy-m esm es. S ’il h e u t e re u h V o stre
* S e ig n eu rie Illu s tris sim e a u co m m en cem en t, scs affa ires s’en feu ssen t p o r té de m ie u lx , e t n e se tr o u ­
» v e r o it m a n te n a n t en la ra q u e " ny le R oy en tra v a il, q u i a u r a t b ie n à fa ire à r e c o u v r e r ses p ièces " ,
• si ce n’est p a r a p p o in c te m e n t................»
* Fange.
** Province».
DU CARDINAL D E GR AN VEL LE .
157
XLI.
G U IL L A U M E , P R IN C E D E B A V IÈ R E ' ,
AU C A R D IN A L , D E G R A N V E L L E .
( Bibliothèque royale de Bruxelles. — M anuscrit n° 0 4 7 3 , fol. 371.)
L a n d s h u t, le 29 ju in 1S 74.
D uas ad nos d é d it p r im o maii conscriptas litteras, et accepim us et q u a m
p ro m p lo et alacri anim o com m endata negotia Serenissim æ socrus nostræ
D. V. h a b e at p ro b e c ognovim us : id q u o d nos ita illi devinctos reddit, ut
ullo officii genere re p e n d e re vix possibile nobis videatur, Serenissim æ
socrus q u id et q ualia nobis D. V. polliceatur ju d ic a v im u s, q u æ partem
lo n g in q u æ æ g ritu d in is tanto n untio visa est deponere, nec iniriun sane
cum tanti viri a u th o rita te ad ex o p ta tu m negotiorum finem tan d em perventu ra m pro c om perto sibi p ersuadeat, novit etenim q u a m a m a n te r et quo
studio pro solita anim i bcnignitate gratificari et j u v a r e illi D. V. exoptet,
ideo im m ensas vobis agit gratias, q u a m ob n ix e ro g an d o ut Sereniss® Régi
illam et negotia sua c o m m e n d a re (p ro u t capistis) velitis u n a q u e cui potissim u m n e g o tia e x p e d ie n d a c o m m itte re d e b e a t in dicare data p rim a occasione.
Id q u o d nobis tam g r a tu m e rit q u a m q u o d g ratissim um om ni studio
nostro (u b i libuerit) re p e n d e n d u m . Inte rim nos q u a m excusatos habeat. si
m a n u nostra lias non fecerim us, rogam us, c u m adversa vale tu d in e rem orati
id facere cogam ur. D. 0 . M. D ilectionem vestram q u a m fœliciter vivere in
a n nos Nestoreos concédât.
1 V ., a u s u je t d e ce p e rso n n a g e , page 14 t .
m
CORRESPONDANCE
XL1I.
LE C A R D IN A L DE G R A N V E L L E AU DUC
d ’ü
RB IN 1.
(Archives il'IJibitio, cl. I, Div. G, liasse cxxi.)
N a p le s , le 7 ju ille t 1 57 4 .
Di m olta consolatione m ’ è stata la lettera di \ r. Eccïa de xxi del passalo,
vedendo, con q u a n ta amorevolezza mi dà conto délia sua andata a Urbino
et délia causa. E t se bene p e r via di R om a ne haveva io havuto aviso,
tuttavia mi sono so m m am ente rallegrato d ’in te n d e rlo da lei. N§ v eram ente
puoteva da re parte a nisciuno cosï delle causî clie l’han n o mossa a fare
questo viaggio come del frulto ricavatone, cbe più contentezza ne pigliasse
di m e cbe sono desiderosissim o dé prosperi successi delle cose sue. Non
potrà essere che il restare la Sra D uchessa non sia di giovam ento per il
contento che délia sua presenza h a v e ra n n o quei popoli. E t fra tanto la
residenza de V. Eccza in Pesaro* Testate potrà servire per la sicurezza contra
qualsivoglia im presa de’ Turclii, se ben spero che per questa istate l’a rm a ta
T urchesca non p otrà d a re m olta noia in colesle b a n d i, poichè, come
V. Ecc“ bavera inteso, si è avviata verso B a rb a ria, havendo messo in terra
al passare p e r il capo de Stilo 5 fin a 12000 T u rc h i, li quali sono slati tratlati
di m aniera che hav e ra n n o poca occasione de laudarsi, essendovene restati
m orti da 200, et fra essi u n capitan Corso renegato m olto favorito d ’AIuciali. H anno abru sc iato alcuni form enti sparsi p e r la cam pagna, et alcune
ca p an n e , ma gratie a Iddio non fatto d a n n o de m om e n lo . Anzi quello che
loro h a n n o ricevuto è stato senza coinparation n isciuna m aggiore. Alli 2 di
1 G ui il’A lb ald II, d u c d ’U rb in , n é le 2 a v r il 1 5 4 4 , m o rt à P esa ro le 2 9 s e p te m b re 1 5 7 4 . 11 a v a it
é p o u sé : I» J u lie , fille e t h é r itiè re d e Je a n -M a rie V a r a n e , d u c d e C a m e rin o , 2° V icto ire F a rn è se , fille
de P ie rre -L o u is , p r e m ie r d u c d e P a r m e ; c’e s t d ’e lle q u ’il s’a g it d a n s c e tte le ttre .
* V ille e t p o r t d ’Italie , d a n s le d u c h é d ’U rb in .
’ Le cap de S tilo est situ é d a n s la p ro v in c e d e la C a la b re u lté rie u re .
DU CARDINAL D E GRANVELLE.
139
questo se guitorno il loro viaggio verso Capopassaro * con vento assai p r o s pero, n e dopoi havem o altre nuove di loro. Iddio li confonda, prosperi et
contenti V. E. com e desidera.
XLII.
ANALYSE.
Le cardinal a reçu la lettre par la qu elle le duc lui fait pari d e sou voyage à U rbin et
la cause de so n d ép lacem en t. Il en avait déjà é té averti par la vo ie d e R o m e et en
attend les m e illeu r s résultats. P eu t-être le séjour de la d u c h e s s e ne sera pas d ’u n e
gran d e aide, par suite du c o n te n te m e n t que le p eu p le ressentira de sa présen ce. L e
séjo u r d u d u c à P esa ro pendant l’été pourra être utile contre toute attaque du T u rc,
q uo iq u e sa flotte n e p u isse g u è r e inspirer de l’in q uiétu de par suite d e la direction q u ’e ll e
a prise vers les côtes barbaresques, après avoir d éb a rq u é au cap d e Stilo. Mais il y a
perdu en v iron 2 0 0 soldats et un capitaine corse renégat, grand favorisé d ’A lu ciali. S e s
troupes y on t brûlé q u e lq u e s ch a m p s et d es ch au m ières. Le 2 de ce m ois il a poursuivi
son v oyage vers le cap d e Passaro.
XLIII.
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(B ibliothèque de Besançon. — L ettres d iv erses, t. I l , fol. 231 e t 232.)
B ru x e lle s , le 19 ju il le t 1 5 7 4 .
M onseigneur, J ’a y veu et a d m iré ce q u e Vostre Illme Sg r*8 escript si lib re ­
m e n t et elè rem e n t a u frère d u C o m m en d a d o r Maior * q u ’est la p u r e vérité;
‘ L e ca p d e P a sa ro , e n S icile.
* L e frè re d u C o m m a n d e u r é ta it D on J u a n d e Ç u n ig a , a m b a s sa d e u r d e P h ilip p e II à R om e. L es
160
CORR ESP ON DA NC E
Sed verilas odium pat'it. Aussi ay -je veu ce qu e le C o m m e n d a d o r Maior
escript, et ce q u e Vostre 11lma Sgr!e luy respond. L’on verrat ce q u e le
C o m m en d a d o r Maior fera à Sancho d ’Avila, vraie source de la m utinerie,
a iant lu y -m e sm e co n d u ic t les soldatz en Anvers. Ju s q u e s ores trium phe-il,
et dit-o n q u e le C om m en d a d o r at dit q u e plus tost le Roy p e rd ra ces pays,
q u e de m ectre aultre cliastellain que d ’Espaigne, d o n t nos patriotes ne sont
contentz. Je renvoyé lesdictes lettres, m ercyant la confidence. Il est certain
q u e l’on d o n n e g ra n d e jalousie, e m ployant Roda aux finances et principal
faict du Conseil d’E s t a t I l at esté xv jo u rs à Anvers p o u r faire finances,
q u e n’est de sa profession. Je pense que Sclietz n ’en soit à son aise; car
c’est m o n stre r delfiance de luy. J ’entendz qu e l’on n’at trouvé g ra n d chose,
aianlz les Genevoys jà tout tra n sp o rté aillieurs. Toutlesfois il n’at tenu à
Arias et Trigosa de faire tous offices de c o u rtie rs , aiantz emploié leurs
c incq sens p o u r p e rs u a d e r les m a rc h a n d z qui nulla ratione movenlur, nisi
lucri.
Je ne m e suis d esm onstré en rien véh é m e n t en ce de la m utinerie, q u ’est
assez détestée g é néralem ent p a r tous, sans q u e je m ’en mesle. Si est ce q u e
je m ereye bien h u m b le m e n t à Vostre Illme Sglie son advertissem ent. E t je
h a n te peu les susdietz et mesmes R oda, p o u r ce q u ’ilz sont d a n g e re u x Et
q u a n t à moy, je ne peulx d u r e r estant véhém ent et haultain, faisant m oim esm e ce q u e j ’ay p a r c y -d e v a n t rep rin s en Vargas a iant rete n u en son
p o voir la prison de C auberghe \
J e liens q u e les escriptz de Mr de C ham painey 1 envoiez au Roy et au
C o m m e n d a d o r Maior ne plairoient du to u t à Vostre lll,ne Sg,ie, encores
q u ’ilz soient véritables, et com m e telz advouez p a r Mr le Président, qu e
peult estre n’y ga rd e la sincérité requise, com m e Vostre Illme Sgrie dict; mais
le C om m en d a d o r Maior d esm ontre d ’estre fort c ontent de luy, et dict l’on
le ttre s ad ressées à ce p e rso n n a g e p a r le C a r d in a l, e t d o n t M orillon p a r le , so n t im p rim é e s p lu s h a u t ,
p p . GO et su iv .
1 « Il ne p e u t d u r e r , e s ta n t v é h é m e n t e t h a u lta in . • (N ote de M orillon.)
* La p riso n p rè s du P alais d u cal a u C o u d e n b e rg , à B ru x elles.
* La le ttre a d re ss é e a u R oi le 2 8 a v ril 1 5 7 4 , p a r M. d e C h a m p a g n ey , e s t im p rim é e d a n s la Corres­
pondance de Philippe / / , t. I I I , p. 6 1 . P a r c e tte le ttr e P e r re n o t en v o ie a u Roi la re la tio n d e la m u ti­
n e rie des E sp ag n o ls à A n v e rs, im p rim é e en 1 5 7 8 d a n s les Recueils d'A rètophilc, e t r e p ro d u ite à la su ite
d e s Mémoires de Champagney, p u b lié s p a r
de
R obaulx
p age x v ii de la N otice q u i p ré c è d e c e lle p u b lic a tio n .
de
S oumoy , in - 8 ° , 1 8 6 0 . V o ir à c e s u je t la
i(H
DU CARDINAL D E GR AN VELLE.
q u ’il le veult faire des finances et du Conseil d ’Estat. J e ne sçay si c’est
p o u r l’espoir q u ’il feroit m iracle là où il est allé J e craindz q u ’il re to u rn e
sans rien faire, aussi bien q u e Elbertus du coustel de Bom m ele *. J ’ay bien
e n te n d u q u e Mr de C ham paigney voulut avoir par escript o rd o n n a n c e de
sortir, affin q u ’il ne deslessast le g o u v e rn e m e n t qu e le R o y luy avoit miz
en m ains, et qu e to u t at esté bien p rin s du C o m m en d a d o r Maior selon le
lesm oingniaige q u ’il luy d o n n e p a r ses lettres et l’estime q u ’il faict de sa
v a le u r et sçavoir; mais il ne se fault tousiours fier ad ce q u e les gens dîent.
Les m u tineries nous ont faict p e rd re u n e partie de l esté J e c raindz q u e
le P rince et S a in cte -A u d eg o n d e , soubs c o u le u r de traicler, nous facent
p e rd re l’a u tre ; car le concierge de M onsieur de Boussut, qui at esté vers
ledit Prince, et qui ne veull e n te n d re à rien si l’on ne luy rend son filz ou
vc mille escuz de ran ç o n , s’espante 5 de la g ran d e obstination q u ’il at veu
au x villes d ’H ollande, si peu d ’appa re n c e y at y q u e L eyden et Delft se
re n d e n t, ou q u e le p a rd o n général les conduise ad ce: q u e à Bom m ele ilz
o n t attaché au g ib b et et foielté de verges (sic), et le to u t p o u r ce q u ’ilz ne
se veuillent confier des Espaignolz, n y se m eclre en leur dangier, p o u r le
m aulvais tra icte m e n l et intolérable q u ’ilz font encores à la Haye et ail—
lieurs, où ilz sont estez appelez. Hz o n t recouvert L erdam *, d o n t ilz font
g ra n d e bannière, l’éq u iv a lan t à Visselinghes : mais ce n ’est en vérité q u ’ung
povre lieu et b o u r g mal cloz et serré. Hz sont estez à D ord rec h t en dissentio n ; mais le P rince y at pourveu envoiant su b it 400 soldatz, et est le
m aistre p a rto u t au m oien d’iceulx et des m aulvais bourgeois q u e ne craind e n l rien plus q u e u n g appoinctem ent.
1 A» m o is d e j u i n C h a m p a g n ey é ta it p a r ti p o u r U tre e h t d a n s le b u t de n ég o c ie r u n e ré c o n c ilia tio n
av ec les v ille s. V o ir à ce s u je t la N o tice p ré c ité e d e H oballx
de
S oumoy , p p . xx, x x i e t s u iv .; Corres­
pondance de Philippe / / , p . 9 8 ; Correspondance du Taciturne, t. III, p. x x x v ii.
*
E lb e rtu s L c o n in u s , p r o fe s s e u r à l'U n iv c rsilé île l.o u v a in , a v a it é té a u to risé p a r H cq u csen s à e n ­
v o y e r, en a v ril 1 5 7 1 , Ilu g u e B onté a u p r è s d u T a c itu rn e , d a n s le b u t d e n ég o c ie r u n e ré c o n c ilia tio n .
V o ir Correspondance du Taciturne, t. III, p p . x xxvi et su iv .
3 S ’espante, d e l'esp ag n o l espantar, s ’é p o u v a n te r.
4 C liia p p in V ite lli, a p rè s a v o ir éch o u é d e v a n t p lu s ie u rs v ille s , p a r v in t à s’e m p a r e r d e L c e rd a m , où
il fit p e n d re d e u x p a s te u rs e t un in s titu te u r . La sc èn e d e ces e x é c u tio n s est lo n g u e m e n t ra c o n té e p a r
P . B o r , liv. V II, fol. 41 e t su iv . L cerd a m é ta it u n e p e tite v ille d e p eu d ’im p o rta n c e , d o n t la se ig n e u rie
a p p a r te n a it a u co m te de B u r e n , fils d u T a c itu rn e . V oir a u s si
M endoça,
t. I l , p . 2 5 7 , o ù l’a u te u r r a p ­
p o rte le d é ta il d u sièg e, e t Correspondance de Philippe 11, t. III, p. 124.
T
ome
V
j
21
CO RR ESP ON DA NC E
Nos Estatz de B ra b a n t ne se c o n d u ise n t com m e ilz doibvent, apposantz
u n g m onde de conditions, d o n t l’on se fasche e x tr ê m e m e n t; et aiantz les
abbez estez faire leur ra p p o rt, Son Exce s’est mise en cliolère et les at r e n ­
voie p o u r m ieulx estudier leur leçon, d o n t ilz o n t esté mal contentz. Et ad
ce q u e je puis c o m p re n d re persistent tous, aiantz dressé u n e response, de
laquelle le C hancellier chargé de p a r eulx refuse de faire rapport. Je
c raindz qu e ceste opiniastreté nous causera q u e lq u e g ran d inconvénient,
pe rd a n t Son E xce pacience p o u r n’avoir u n g denier, et se véant avec tant
de gens de g u e rre q u e ne font q u e m angier. Et les 7,000 reylers du duc
E ric h nous a p p ro c h e n t peu à peu, sont à l’e n to u r de N iew m eghe et une
p a rtie en la Cam pigne, estant à c ra in d re q u ’ilz v ien d ro n t plus avant, et
su y v e ro n t l’exem ple d ’A nvers, où les Alleinandz sont, p a r trois fois la sepm aine passée, esté en question ' et arm es contre les bourgeois, en estant
de m e u ré d’ung costel et d’a u ltre plus de x l . Il y at aussi les chevaulx du
conte de Mansfeld q u e r u y n e n t L u x e m b o u rc h ; l’on traicte p o u r les envoier
en F rance. Nous n’avions aussi g u e rre affaire des Suisses, et fut esté m ieulx
croire le conseil de Vostre 11ln,e Sgrie; et je suis seur qu e l’on se re p e n t de
les avoir faict venir. Tous noz W a llo n s se sont cassez * eulx-m esm es, ne les
aiantz les chiefz peult rete n ir plus lo n g u em e n t ensam ble, p a r faulte de paie­
m en t; et jà est icy Mr d ’H avret qui dit q u e le jeu luy at cousté plus de
x x x m florins du sien.
Ju s q u e s ores ne faict le p a rd o n g ran d m iracle, et ne se sont encoros
présentez en ceste ville trois p o u r se réconcilier. Touttefois tous les m au lvais ga rn e m en tz re to u r n e n t tant à Malines q u e icy et h Bois-le-Duc, et en
F la n d re s et au q u a rtie r de T o u r n a y les m eurtriers qui ont tué les p re b s tres, boullefeugz des églises et m onastères et qui o n t com m iz dix mille
m eschantés. Et p a r ainsi ceste grâce nuict en particu lie r; m ais elle sert à
Malines, Z u tp h e n , T o u r n a y , Valenchiennes, Bois-le-Duc et Harlem .
L e C o m m en d a d o r Maior d ’u n g costel sam ble vouloir rem ectre beaucop
de choses à l’ancien piedt. Mais l’on ne p e u lt e n te n d re qu e cassant le C on­
seil des troubles, l’on dresse u n e C h a m b re des comptes, p o u r les biens
confisquez, q u e se tie n d rat en la m aison d ’Egm ont, où se loge Roda, qu e y
’ E stre en q u a tio n , a v o ir des d iffé re n d s , d es q u e re lle s.
1 Cassez, d éb an d é« .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
présidera. Toutlefois tous gens saiges d ie n t q u e nul p ardon ne prolïïctera
si l’on ne re n d les biens, et ne traictera le P rin c e s’il n ’est asseuré de ce
poinct. L’on polroit d o n n e r term e à ceulx q u e ne v o u ld ro ie n t vivre selon
les édiclz p o u r les vendre, et je liens qu e la p lu sp a rt dem eureroit.
Mr de B e rla y m o n t est fort mal co n te n t qu e ledit C o m m en d a d o r veult
m ectre gens à l’e n to u r de ceste ville, q u ’ilz d e b v ro n t n o u r r ir et paier, et
q u e leur sera re n d u des aydes, et qu e cela re n d mal volunlaires ceulx de
B r a b a n t; et d it le luy a voir dit, mais q u ’il ne le ve u lt e n te n d re et enraige
de ce q u ’il ne treuve argent. Et est parti ce S eigneur p o u r faire les loix de
F la n d re s à l’ancien pied, d isa n t q u ’il est bien ayse de faire place à ceulx
d’Espaigne, puis q u ’ilz veuillent tout faire seulz : et p a r ainsi le C o m m e n ­
d a d o r Maior est seul avec les estrangiers. Mr de B e rla y m o n t dict q u ’il
enraige de ce q u ’il ne treuve a rg e n t; mais q u ’il se povoit bien passer de
tant de gens.
L’on faict g ra n d fondem ent de l’arm ée de m er q u e P ie rre Melendès '
doibt c o n d u ire ju s q u e s à 500 voiles et plus de x m hom m es, d o n t les H ollandois se rient, et d ien t si elle ne vient q u ’ilz l’y r o n t c h e rc h e r ju sq u e s
au x Indes. Toultefois la ro y n e d ’Angleterre at désarm é et coppé de rechief
force testes p o u r q u e lq u e conspiration q u e l’on d it estre dressée s u r la
faveur de ladicte arm ée *, et p a r le com plot d ’a ulcuns Espaignols. Cepen­
d a n t le prin c e d ’Orenges faict a b attre les tours s u r les advenues de la
m e r en Z eelande, et hoster les tonneaulx qu e m o n stro ie n t la profondeur.
L’on c rainct q u ’il at q u e lq u e secret traicté avec ladite Royne, vers laquelle
Charles Boisot n’est allé p o u r rien. W a s t e e l 3 sert de chancellier en son
absence, et d it o u v e rte m e n t q u e son m aistre ne traicterat avec Espaignol,
luy a y a n t M ondragon faulsé sa foy, après l’a voir si bien traicté avec sa
suite q u ’il povoit faire m o rir de faim
il peult bien estre q u e l’on at miz dedecus s u r la p o in c tu re d u du c
d’Albe, qu e H opperus escript à Mr le P ré sid e n t le 26e d u mois passé ‘ estre
mal en grâce de son m aistre qui à peine le p e u lt veoir, et dit vouloir
1 V o ir p lu s h a u t p. 4 8 e t M anuscrits de P a ris, t. Il, p p . 4 1 5 -4 4 4 .
* Qitomodo istu d ? (N ote d u C a rd in a l.)
• P ie rre W a s te e l, an cien p e n s io n n a ire d e M alines. Y'oir t. IV , p p . 2 8 9 , 5 0 5 , etc.
' C ette le ttre n e se tro u v e p as d a n s f/opperi Epistolœ ad Viglium.
CORRESPONDANCE
m
sçavoir la vérité de ce q u ’est icy passé; et q u e c ependant il est vilipendé
en la court, et q u e son emulo C o rduba y estoit m an d é et arrivé. Rio veult
faire accroire q u e ledit Duc, y est avec auctorité et crédit. Si cela estoit, il
ne seroit goutteux, n’a ia n t à ceste cause signé les lettres q u ’il at escript au
C o m m en d a d o r Maior, B e rlaym ont et aultres, sinon p a r A lbornoz. Le P ré sidentV iglius est en opinion q u ’il escript encores au C om m endador, com m e
il a t faict tout le tem ps q u ’il at esté en chem in, p o u r conserver les m a u ­
vaises instructions q u ’il luy at d o n n é avant partir. S c h a re m b erg h e se déses­
père q u e l’on négotie si mal avec Allemaigne, disant qu e Assonleville qui
s’en mesle, n ’y e ntend rien.
Voslre IUme Sgric at heu raison d ’extoller ledit C om m endador, p u isque
le m aistre s’esloit résolu s u r luy, et at advisé à la vérité ce q u ’il y at de
bien et de mal en luy; et certes je le tiens eslre de bon vouloir et zéleux
p o u r le service du m aistre et repoz p u b lic q : mais il treuve tous moiens
p o u r y p a rv e n ir diiïicilles, estantz les perdtes de son prédécesseur trop
grandes, et tou t tant apovri q u ’il n’est possible tro u v e r deniers. Ceulx d’Arthois et H aynault, q u e sont m ain te n a n t bien et riches, font assez bon
d e b v o ir; mais c’est avec rem o n stra n ce . F landres at à souffrir et B rabant
surto u t, q u e ne p e u lt g u e rre d o n n e r, et c o nditionne beaucop.
J ’ay veu ce q u ’avez escript à Arias ', q u e est en o pinion vers tous d ’estre
vain et g lorieulx; et est très bien à propoz ce qu e luy escrivez de W eyens
et sacq de Malines. Il s’est vanté q u e en q u a ltre m ois il re p u rg e ra tout le
pays d ’hérésies : plaise ores à Dieu q u e ce fust en a u lta n t d ’années! Il n’est
pas l’hom m e, et ceulx qui feuilletent bien sa bible * n’y treuvent poinct si
g ra n d chose p o u r s’y estre si souvent n o m m é ; il at de stru ic t P lantin. Feu
Masius ' at lessé ug n e version de Josué, q u e d é m o n stre son éru d itio n avoir
esté grande, encores q u ’il ne la sçavoit p a ra g o n e r * et faire reluire com m e
1 A rias M o n tan u s. V o ir p lu s h a u t , p . 5 1 .
* L a B ible im p rim é e p a r P la n tin e t d o n t l’é d itio n a v a it é lé so ig n ée p a r A rias.
* A n d ré M asius ou Maes, n é à L n n n ic k , fit scs é tu d e s à l’U n iv e rsilé d e L o u v a in , d e v in t c o n seille r du
d u c d e C lèves e t fu t a p p e lé p a r P h ilip p e II à p r e n d r e p a r t à l’é d itio n d e la b ib le é d ité e à A n v ers p a r
A ria s M o n ta n u s. 11 p u b lia p lu sie u rs liv re s re la tifs à l’h isto ire sa in te et e n t r ’a u tr e s E xplicatio m His-
toriam Josuae, p u b lié p a r P la n tin e n 1S74-, a p rè s la m o rt d e l’a u te u r, M asius é ta n t d écéd é en 1 5 7 5 .
(V .
F
oppens
,
Bibliutheca Uelgica, t. 1, p . S5.)
4 Paragoner, d e l’esp ag n o l paragonar ou parangonar , m e ttre e n p a ra llè le , c o m p a re r.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
165
Arias, q u i est a u c te u r de ces preces, desquelles le Roy ne faict aulc u n e
m ention dans ses lettres, mais bien le C o m m en d a d o r Maior q u e l’a d o re ; et
j ’e n te n d z q u e luy ne reçoipt poinct a u lta n t de despesches d u Roy, com m e
faict Arias, d o n t plusieurs se m ocquenl.
Mol ' dit q u ’il n’at besoing de p ardon et q u ’il veult d e m a n d e r restitution
p o u r estre o u y en justice. S’il persiste en cela, lessaut passer le lemps, q u e
j e ne croidz, il m o nstrera q u ’il n ’est saige. Son cousin V anderinere * est
re to u rn é en v ertu d u p a rd o n , aiant faict tout d e bvoir, et je tiens q u ’il a u ra t
son bien, co m m e l’at he u t le sieur de L a ndaz 5, sa u lf les levées. J e liens qu e
ledit Mol a bien à faire du p ardon et q u ’il at plus a d h é ré au P rince
d ’O ranges q u ’au Roy, d u q u e l il tenoit son estât auquel il prétend r e to u r n e r ;
m ais il sera ta rd a v a n t q u ’il y parviègne.
Le com m iz O y e m b ru g g e * at g ran d cré d it vers le C o m m en d a d o r Maior
et R oda; cestuy sçait p o u rq u o y . Devant longtem ps de luy et Reingot 5 se
d e sco u v re ro n t beaucop d’o r d u re s : car ilz font o rd in a ire d ’a p p o intem enl
avec les a b b e z s u r le u r prest au m illeur m a rc h ie t q u ’ilz p e u lv e n t; et après
ilz se font dresser p a r les recepveurs in valore quanti p lu r im i, q u e lq u e
basses qu e les eaw es soient. J e m e souviens fort bien com m e vous le printes
m al d u feu présid e n t C arrelte 6 qui faisoit le m esm e m estier e t l ’avoit p r a 1 J e a n d e M ol, d it le B o rg n e. V o ir t. IV , p p . 2 1 0 , 2 5 9 , 2 9 2 , 5 1 5 .
« Moi a la m a in lev ée de so n b ie n , m ais c h arg é e t d é té rio ré , com m e p lu s ie u rs a u tr e s . L ’on a tte n d
» le s ie u r d e B o c x tc l; e t l’e n ra g é L u m c l, d i t d e la M a rch e , d e m a n d e a u s si son p a rd o n , e t p e u lt-e s tre
» q u e ce n e s e ro it le p ir e d e le lu y d o n n e r , p o u r fa ire p e r d re l’o p in io n à ceulx d ’I lo lla n d e e t Z eclan d e
» q u e l’on n e tie n d r a t p as la p a r o le , e t j e s u is s û r q u e a ia n t sa g râ c e , il se tie n d r a i h o rs d e ces p a y s , se
« c o n te n ta n t d ’y re v o ir son b ie n . » L e ttr e d e M orillon d u 2 a o û t. ( I b i d 2 8 5 v°.)
* P h ilip p e V a n d e r M c c re n , Sr d e S a v e n th c m . V o ir t. IV , p p . 2 1 0 , 2 8 9 , 2 9 2 , 5 1 8 , 5 8 8 .
* P ro b a b le m e n t N ico las d e L a n d a s , Sr de H e u le , q u i, a p rè s a v o ir p r is
p a r t au x r e q u ê te s des
n o b le s a d re ss é e s a u R oi e t a u d u c d ’A lbc, fin it p a r s’e n r e p e n tir e t p r it p a r t à la ré c o n c ilia tio n d e s p r o ­
v in ces w a llo n n e s e n 1 8 7 9 . J e a n d e H o m e s , S r d e B oxtel, e t N icolas d e L an d as s’é ta ie n t c o m p ro m is
p e n d a n t les tro u b le s . V. T e W ater , t. II, p p . 4 6 2 , 4 6 5 , 4 9 0 , 4 9 1 .
* E n g lc b c rt d ’O y e n b ru g g c , m e m b re d u C onseil d es fin an ces à p a r t i r d e 1 8 7 2 . V o ir B u tk e n s , Sup p l.,
t. 1, p . 2 0 2 .
* J a c q u e s R e y n g o u t ou R c y n g o u ts , m e m b re d u C onseil d e s finances à p a r tir de 1 862. V o ir t. IV ,
pp. 193, 246, 509, 853
et B u tk e n s ,
l. c.
* J e a n C a rre lle fu t su c c e ss iv e m e n t, à la C h a m b re d es co m p tes
à
L ille, p e tit c le rc , se c o n d g reffier,
com m is a u d ite u r , p u is e n 1816 p r é s id e n t. V o ir D e S e u r , L a Flandre illustrée p a r l’institution de la
Chambre du roi à L ille, p p . 8 8 à 8 8.
CORRE SPOND ANC E
ticqué avec iMousr (le S l-iie rlin
Enfin loul le inonde al ung b ut, q u ’est
de d ev en ir tost riche.
L’on ne veult d o n n e r le cenliesme, mais bien i’équivalent à cause de la
re b u s q u e * q u ’en feit le du c d ’Albe.
•
XL1V.
LE
PRÉV ÔT
M O R IL L O N
AU
C A R D IN A L
DE
GRA NVELLE.
(B ibliothèque de Itesaiir.on. — L ettres diverses, I. I l , fol. 233, 534.)
B ru x e lle s , le 19 ju ille t 1 5 7 4 .
M onseigneur. J e re sp o n d ra y à u n e partie publicorum m ’estant h ier seoir
fort resjouy de voslre lettre d u xxive du passé qu e le T u r c n’estoit encores
passé lors N egreponte, au lieu q u e aulcungz m aulvais espritz o n t semé q u ’il
esloit jà passé Mallhe et T h u n e s , et q u ’il tiroit d roict vers O ran, p o u r
doibs-Ià se je c te r s u r les Espaignes et les p r e n d r e à Pimpourveu. Ce que,
j ’espère, Dieu ne perm e ctra jam ais. Et ne seroit saigeinent faict à luy 3 de
ta n t esloigner ses forces, et encores m ectre en d a n g ie r tan t de vasseaulx
mal équippez, lessant d e rriè re vos 50 galères avec celles de Secille q u e
polroient, d u r a n t l’absence de son arm ée, eulx jec ter s u r la grève et
ailleurs.
Il ne peult estre q u e vostre lllme SgriB ne su p p o rte u n g m o n d e de traveil,
p o u r non seullem ent p o u rv eo ir a u royaulm e, mais com m e je veoidz au
nouveau fort de T h u n e s * et ceulx de Maltha; et est u n g g ra n d bien q u e
places si im p o rta n tes soient p o u rv e u de ce q u e le u r fault p o u r so u b ste n ir
u n g si puissant e n n e m i; et est g ra n d e m e n t b esoingné qu e le fort de T h u n e s
1 G é ra rd d e H a m c rie o u rt, a b b é de S t-B e r tin de 15 4 4 à 1 5 7 7 .
’ Rebusque, d e l'e sp a g n o l rebusca ou rebusco, a c tio n de g la n e r, re c h e rc h e r, e x to rq u e r.
* C’e s t- à - d ir e a u T u rc .
4 V o ir p lu s h a u t, p. 2 7 , ce q u e nous y avons d it d e la cita d e lle c o n s tru ite p rè s d e c e tte v ille .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
167
soit si adv a n ch é q u e p o u r se deffendre. Je p rie Dieu les conserver et s u r ­
to u t vostre lllme Sgrie, affin q u e p a r sa vigilance et p ru d e n c e la povrc Chrestienté soit secourue. C’est g ra n d e providence de faire so n n e r a u x oreilles
d u T u r c q ce qu e passe en F rance, allin q u ’il e n tende q u ’ilz ne sont en estât
p o u r d iv e rtir p rése n tem e n t les forces du roy d ’Espaigne, auquel ilz p o r te n t
si g ran d e envie. Mais si le nouveau R oy peult plus tost ap p a ise r son
ro y a u lm e q u e le R oy nostre m aistre fera ce pays, certes je c raindz q u e les
François, p o u r e n tre te n ir le T u rc q , nous d o n n e ro n t u n e baste *, et q u e
serons de ce costel si hors d ’halaine, q u e ne polrons s o u b s te n ir; car nous
d e b vons les élém entz, et avons deux fois plus de gens q u e ne sç aurons
p a ie r ; et l’eslé nous passe sans rien faire. Car au prim es tire l’on l’artillerie
et p o u ld re de Malines p o u r la c o n d u ire s u r Bom m ele, où je c raindz qu e
nous nous a m u serons sans rien faire. Et c e p e n d a n t le pays se m ange j u s ques au x oz, d o n t Monsr L in d a n u s ' at faict un e re m o n s tra n c e fort
poignante à Son E x ce, q u e se d o n n e g ra n d e peine de tant de plainctes de
tous couslelz, et encores plus de ce que l’occasion y est si gran d e , et q u ’elle
n’y p e u lt p o u rv eo ir p a r faulte d ’argent.
Il sam ble q u e les H ugonotz de F ra n c e retire n t leurs cornes depuis que
le Roy de Poloigne les ap p ro c h e , q u e d o ib l désià estre en F rance, p u isq u e
m e re q u e d y d e rn ie r h u ic t j o u r s , il debvoit e n tr e r le C o m t é 5, lorsque
Mo»sr le d u c d ’A rschot estoit encores à N ancy. L e d it Roy est eschappé
finem ent des m ains des Polacres, desquelz j ’e n tendz il estoit a u lla n t saoul
q u e e ulx de luy et de sa suite. Touttefois ces b rav e s gens estoient délibérez
de le rete n ir, bon gré mal gré, com m e Roy. Mais com m e il feit c onvocquer
les Estats p o u r m ec tre en délibération s’il fust plus ex p éd ien t q u ’il feit
u n g to u r en F ra n ce , lessant u n g lieutenant en P oloigne, ou d ’y dem orer,
m eclant u n g R égent en F ra n ce , les a ia n t ainsi e n d o rm i et gaigné d e u x ou
trois, il s’avala * de n u ic t p a r u n e fenestre et se m eict à se saulver avec
q u a ltr e chevaulx ; et com m e il avoit p o u rv e u à ses affaires, en trouva bien
tost après c in c q u a n te q ui, au g ra n d galop, l’o n t c o n d u it en Austrice, en
* D o n n e r u n e baste, d o n n e r d es p o in ts. B asta sig n ifie en esp ag n o l : p o in ts .
* G u illa u m e L in d a n u s o u L y n d c n , é v ê q u e de R u re m o n d e d e 1 5 6 2 à 1 5 8 8 .
* L a F ra n c h c -C o m té , p a r où le d u c d ’A e rsc h o t d e v a it in v ite r le Uoi à p asser.
4 S'a v a la , d e s c e n d it.
i 68
CORRESPONDANCE
laquelle il avoit désià faicl q u a tlre lieues q u a n t un principal Polonois le
rala in d it avec 1,500 clievaulx, luy rem o n stra n t la honte q u ’il avoil fait au
royaulm e, s’en estant ainsi relire à la cachette.
L’on d it qu e la diligence de Monsgr le C o m m en d a d o r Maior at bien servi
a u d it Roy, a iant prévenu l’adverleuce q u ’il luy feit du Irespas du Roy de
F ra n ce p a r l’E m p e re u r, d e u x jo u rs avant q u ’a rriv are n t les nouvelles de
France, q u e fut cause q u ’il lient tem ps p o u r po u rje c le r ses affaires, aiant
receu p o u r bon le conseil de l’E m p e re u r qu e l’at si bien traicté qu il faict à
c ra in d re q u e cela n’offense les l’olonois p o u r m oins fabvoriser son (ilz. Si
est-ce q u ’ilz n’oseront eslire q u e lc ’un q u e desplaise au T urc, avec lequel le
Moscovile est en picque, lequel favorise à l’E m p ereu r. Et face la R o y n e m ère ce q u ’elle v o u ld ra , je tiens q u ’elle ne fera riens p o u r Monsr d ’Alençon,
q u e l’on dit estre serré plus près q u e devant avec le prince de Bearne.
M onfgom m ery 1 at eslé exécuté et escarlelé p u b l i q u e m e n t . Voslre Illus­
trissim e S eigneurie v erra p a r ce qu e je luy envoie im p rim é en France
com m e il fut.
Les François préc o n isen t la m ort du feu Roy à leur m anière. Dieu d o in t
q u ’il a y t faict si belle fin com m e ilz dient. q u ’est bien en sa puissance.
iMémorency *, son frère et les aullres prisonniers ne d o ib v c n t estre à leur
ayse, et sont en d a n g ie r de de m o re r, avec apparence que le Roy d em orera
m aistre, et le R oyaulm e redressé, com m e dict Vostre III"16Sgrie, si les affaires
sont bien c o n d u il z 5.
L ’on at parlé q u e l’E m p e re u r luy d o n n e ra une a u ltre fille*; mais je liens
avec ceulx q u e sont d ’o p in io n q u ’il p re n d ra la s e u r d u d it P rin c e du
Bearne, qui n’at enffantz de celle du R o y ; et p a r ce m oyen les Royz de
Navarre, q u e ont tousiours tro u b lé la F ra n c e , ne rem u e ro ie n t plus.
1 G a b rie l, co m te d e M o n tg o m m ery . V o ir p lu s h a u t , p . 2 4.
* F ra n ç o is , m a ré c h a l de M o n tm o re n c y , e t le m aréch al de C ossé a v a ie n t é té a r rê té s d a n s les p r e ­
m iers jo u r s d ’a v ril.
* M orillon e n te n d p a r le r de H en ri III, tro isiè m e fils de H en ri II e t de C a th e rin e d e M edici, n é le
I!) s e p te m b re 1 8 K I, d u c d ’A n jo u , p u is Roi de P o logne, p ro c la m é R oi d e F ra n c e le 5 0 m ai 1 374.
Il n 'é p o u s a n i la fille de l’E m p c re u r, ni la s œ u r d u p rin c e d e B é arn , m ais L o u ise d e V au d em o n t,
mort»! à M oulins, le 2 9 ja n v ie r 1 6 0 1 , sa n s e n fa n ts.
4 M axim ilien II a v a it u n se u l b u t, celu i d e p r o c u re r, d a n s la p e rso n n e d u n o u v e a u Roi, u n p r o te c ­
te u r de sa fille É iis a b e th , v e u v e d e C h a rles IX . C’é ta it là le se c re t de l’accu eil si c o rd ia l q u ’il lu i fit
a p rè s sa fu ite d e P o lo g n e .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
11 n'est rien qu e le Palatin soit m o rt : il ne nous ferat poinct ta n t de
bien ; mais l’on tie n t son (ils Cbristoff’re c e rtain e m e n t m o rt en la bataille
et W asteel confesse q u e le com te Lodovic et son frère aussi y sont dem oré,
q u e le d o c te u r E lb e rtu s com pte d ’une estrange m anière, qu e seroit q u e se
se n ta n t ledit conte fort blessé il se seroit lessé c o n d u ire p a r son dit frère en
vostre maison à Mocke *, où les Espaignolz p a r fortune, plus q u e p a r aguet,
au ro ie n t miz le feug, y a y a n t veu e n tre r n o m b re de gens ausquelz ilz ont
em pesché le reto u r, p o u r avoir e n v ironné la maison. Si g ran d z sont les
ju g em e n lz de Dieu, s’il en est ainsi.
L’on dit q u e le com te de Mansfeld al. ob ten u congié p o u r aller veoir
(’E m p e re u r, et q u e Madame d ’A rem berghe, après q u e ll e a u ra i co n d u ic t la
fille du D uc de Clèves au D uc de Deux>Pontz s, passera o ultre vers NostreDame de Lorette et à R om e p o u r gaigner le j u b ilé e ; p e u lt eslre q u ’il luy
p re n d ra i envie d ’aller visiter Madame de P arm e *.
L’on parle q u e ceulx d ’Anvers seront rem iz q u a n t à la j u d ic a tu r e en tel
povoir q u ’ilz sont esté p a r c y -devant, et q u e les deu x conseilliers de B ra ­
b a n t re v iè g n e n t8. Aussi al Son Excce escript au g ra n d Conseil, au Doien, aux
G ouverneurs et aussi à l’Escoutette de Malines d’adviser s u r le m agistrat
q u ’il veult renouveller s u r l’ancien pied, com m e il sam ble voulloir faire
p a rto u t ; et il y at espoir q u e cela faict, il leur r e n d r a t le tonlieu, estant fort
c ontent d ’eulx, de la g ra n d e joie qifilz ont faict du p a rd o n et des reinercieinentz q u ’il dit n ’estre faicl p a r aulcune aullre ville. Il seroit bien de rem é ­
d ier p lusieurs abuz, d o n t j ’ay fait receuil p o u r m o n stre r à Mons 1 de S ainct1 C h risto p h e c la it, en effet, m o rt s u r le ch am p de b a ta ille de Mook.
1 D es a u te u r s ra c o n te n t q u e ces p rin c e s s 'é la n t réfu g iés d a n s u n e g ra n g e p o u r p a n s e r le u rs b le s ­
s u re s , les E sp ag n o ls y m ire n t le feu. Ce q ui est c e r ta in , c ’est q u e le u rs co rp s n e f u re n t p as r e tro u v é s
s u r le c h a m p d e b a ta ille . V o ir
H
oynck
van
P
a pen d reciit
,
t. 1. p a r t. I l , p . 8 0 3 .
‘ P h ilip p e L o u is , l ’a în é d es fils d u d u c W olfgang d es D e u x -P o n ts , et f o n d a te u r de la b ra n c h e é le c ­
to ra le d e iN eu b o u rg , é p o u x d e la p rin c e ss e A n n e , se co n d e fille d e G u illa u m e , d u c d e C lèves.
‘ M a rg u e rite de la M arck, com tesse d ’A re m b e rg , n ée le 15 fé v rie r 1 5 2 7 , m o rte à S e v e n b erg en en
é ta it fllle d e R o b e rt, co m te d e la M arck e t d ’A rc m b e rg , e t de W a lb u rg e d ’E g in o n t. E lle a v a it
ép o u sé, le 18 o c to b re 1 5 4 7 , J e a n , b a ro n de B a rb a n ç o n , m o rt à la b a ta ille d e H c ilig e rle e , le 2 4 m ai
1 5 6 8 . C ette d am e a lla , e n effet, v is ite r M a rg u e rite d e P a rm e , n o u s le v e rro n s p lu s lo in p a r u n e le ttre
q u e G ra n v e llc a d re s s e à c e tte p rin cesse.
. 5 Jün 1 5 7 1 , u n e c h a m b re d e ju s tic e , com posée îles c o n se ille rs R a n st e t B o o n en , a v a it é té é ta b lie à
A n v ers. V o ir t. IV, p . 3 5 7 .
T om e
V.
2 “2
170
CORRESPONDANCE
Bavon, q u i m e d o i b t d o n n e r j o u r p o u r luy en c o m m u n iq u e r. Je suis aussi
délibéré de p o u rsu iv re d ’u n g chem in l’im m u n ité de la m altote p o u r vostre
clergié. Dieu d o in t q u ’il proulTicte.
XLV.
l ’a r c h i d u c
CHA RLES
d ’ a ü T R IC H E
1 AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(B ibliothèque royale de Bruxelles. — M anuscrit 11" 9473, fol. 379.)
G r a tz , le 2 2 ju ille t 1 5 7 4 .
Reve in Christo Pater, Domine, amice charissim e, salutem et b e n e v o lentiæ nostræ affectum. Q u a n d o q u id e m Majestas Sua Catholica D om inus
Patruelis n oster colendissim us, ja m ite ru m dignatus sit R mæ D. Vestræ
pa te n tib u s suis literis, quas sibi nostro n o m in e M arlinus A n th o n iu s Malet,
vel ejus m a n d a ta riu s cum his reddet, m an d a re, u t nobis c e n tu m ilia millia
d u c a to ru m , q u æ s u p e rio rib u s a n n is Majestas Sua Regia liberaliter nobis
dono dederat, h is p r o x im is s u b seq u e n tib u s annis in solidum cu re t ac num erari faciat, p r o u t id R. D. V. ex ipsis litteris copiosius percipere poterit.
E t vero p lu rim u m nostra intersit, u t ejusm odi Majestatis Suæ liberalitatis
cum effectu com potes re d d a m u r. Q uod q u id em nobis, reb u s sic se h a b e n tibus, vix s p e ra re liceret, si nobis de au ra R. D. Vestræ benevolentiæ et
amicitiæ ta n tu m n o n p o llicerem ur. Idcirco eandem R. D. vestram quo
possum us m ajore studio o b se cra m u s ac petim us, p ro m a t ta n tu m de dicta
sua erga nos, et totam nostrum inclitam D om um Austriæ, benevolentia et
observantia; et n o n solum ja m tandem hoc negocium ita instituât, dirigat,
c o m ponat et conficiat, u t nobis ju x ta m a n d a tu m suæ Majestatis Catholicæ
*
L 'a rc h id u c C h a rle s d ’A u tric h e , fils de F e r d in a n d Ier, n a q u it en 1 5 4 0 , o b tin t en p a rta g e l’I lly rie , la
C o r in lh ie c t la C a rn io le, Ht sa ré s id e n c e à G ra tz e t m o u ru t le 3 0 a o û t 1 5 9 0 . Il a v a it é p o u sé , e n 1 5 7 0 ,
M a rie, fille d ’A lb e rt II, d u c de B a v iè re .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
171
p ecunia ipsa præ finilis tem poribus, a b sq u e ullo defectu, in te g ralite r et
infalibiliter se m p e r n u m e re tu r, sed etiam q u o d c o m m oditate sua fiat, amice
nobis resc rib a t et significet q u id nobis ulle riu s faciendum a c o r d i n a n d u m
sit, u t huic nostro desiderio u s q u e q u a q u e satisfiat. Nam nisi id etiam
R. D. V. præ stiterit, non p a ru m a d d u b ita m u s rem ite ru m im perfectam
re m a n s u ra m , et sic nos h u ju s Majestatis Suæ Catliolicæ Iiberalitatis ac
m unificentiæ frucluin d ieb u s nostris vix a sseq u itu ro s esse. Faciet ig itu r
nobis R. D. Vestra rem longe m ax im e g ratissim am , si nos etiam benevole
certiores red d id e ril, q u id nobis passim o b s e rv a n d u m et p ræ s ta n d u m erit,
u t ne spe nostra, q u a m bac in parte s u m m a m in ejus am icitia, patrocinio et
a u th o rita te p o n im u s, frustre m u r. Q uod nos R. D. V. vicissim o m n ib u s in
re b u s p ari anim i p ro m p titu d in e s em per rep e n d e re c o n a b im u r. E t de cætero
illam ad m ultos ann o s bene valere optam us. Sicuti hæ c om nia ex præ libato
M artino A nthonio Mafïeti vel ejus m a n d a tario latius intelligere, et in
o m n ib u s fidem a d h ib e re dignabitur.
XLVI.
LE P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(Itibliotbèque de Besançon. — L ettres d iv erses, l. Il, fol. 2 1 0 )
..................... 2 0 ju ille t 1 5 7 4 .
Le 16e de ce m ois m ena Monsr de C liam paigney avec luy
g o n d e d’U trec h t ju sq u e s à Montfort, où se v in d re n t tro u v e r
ju s q u e s il se ra t de r e to u r le sieur de Carne
q u i est de
Bocxtel, e t J u n i u s ’ d ’A nvers au j o u r suivant, et debvoit ledit
S aincte-A ldeen son lieu et
la m aison de
S aincte-A Ide-
1 L e sire d e C a rn e é ta it le b e a u - f rè r e de S te-A ldegonde.
*
Je a n J u n iu s o u D e J o n g h c , A n v e rso is d év o u é a u p rin c e d ’O ra n g e , é ta it u n p e rso n n a g e d ’u n m é rite
tr a n s c e n d a n t. Il fu t c h a rg é p a r lu i d e d iffé re n te s m issio n s d ip lo m a tiq u e s en F ra n c e , e n A llem agne, en
172
CORRESPONDANCE
gonde estre de re to u r au vin* j o u r q u ’est jà passé Je ne sçay ce q u ’il a u ra t
négolié avec le P r in c e ; l’on n’en dit rien, niais le c o m m u n b r u it est p a rto u t
q u e l’on traicle de la paix.
D epuis q u e ceulx de L eerdam 2 se sont r e n d u , le cliasteaul de Beest at
faict le sam blable après avoir este canoné. L’on dit q u e N i e u w p o r l 5 est aussi
nostre, q u ’est un e b o u rg ad e q u e l’on avoit tranchisé. Le Sgr don F e rn a n d e
s’est treuvé s u r la d icque avec qu e lq u e s enseignes, a iant ro m p u le desseing
q u e les ennetniz avoient de les persser, q u e se sont retirez.D ieu d o in t q u ’ilz
n ’y reto u rn en t. Ledict Sgr ne se p o rte poinct bien.
L ’on dit aussi qu e com m e ceulx, q u e Ton tient à A m sterdam p o u r gu id e r
les batteaux q u e Ton y p rép a re p o u r aller au devant de P ie rre Melendés
so n t très m al traictez p a r les comm issaires, qui les b a tte n t et ne leur
d o n n e n t leur nécessité, sont esté s u r le poinct pour, avec les naves, s’aller
j o in d r e a u x e nnem iz, ne fui esté q u e le m agistral s’en soit d o n n é garde, que
at hosté les cables, voiles et g o u v e rn a u lx desdietz batteaulx.
Castillanos, el pagador, s’est lessé m o rir à B ois-le-D uc, où Ton dict que
Son Excellence vad.
Le inarquiz Vitelli est icy de retour, fort mal c ontent de Jtilian, qui al
c o m m andé à u n g sien soldat de d o n n e r palos *,en présence d u d ic t m arq u is,
A n g le te rre et de r e p ré s e n te r les in té r ê ts d es p ro v in c e s d u N ord p e n d a n t les n é g o c ia tio n s d e B r é J a .
V o ir
G
rokn van
P
k in st er e r
,
t. III, p p . 2 5 7 , 2 4 5 , e tc ., e t
V
ander
A
a
,
Biographisch woordenboek.
1 Voici ce q u ’on lit au su je t de c e tte a ffa ire d a n s u n e le ttre de R c q u e se n s au R oi, du 25 ju i l l e t 1574- :
C h a m p a g n e) a négocié à U tre c h t av ec q u e lq u e s v ille s, e t ju s q u 'ic i av ec p eu de l'ruit. Il a eu au ssi de
trè s-lo n g s e n tr e tie n s avec de S te-A ldegonde q u e n o u s te n o n s là p ris o n n ie r, q u i est trè s-g ra n d h é r é ­
tiq u e , m ais h o m m e d’u n e h a u te capacité, d it-o n , e t q u i jo u it de b eau c o u p de c r é d it a u p rè s d u P rin c e
e t ceux q u i le su iv e n t. C h am p a g n cy a s s u re q u 'il l’a to u t à fait p e rsu a d é q u ’on n e s a u r a it t r a i te r d e
chose q u i to u ch e à n o ire sa in te re lig io n , n i à l'a u to r ité d e V. M .; il a jo u te q u e, dûns to u s les r a p p o rts
q u ’il a eus avec lu i, d e p u is p lu s d ’u n nio:s q u ’il est à U trech t, les ch o ses se so n t p assées d e la m a n iè r e
l a p lu s c o n v e n a b le ... L e r é s u lta t est q u e , le 17 j u i l l e t , led it A ldcgonde e s t p a r ti, a p rè s a v o ir fait s e r ­
m e n t de r e to u r n e r d a n s les se p t j o u r s , e t laissé au p o u v o ir d e C h am p a g n cy , com m e o ta g e s , u n Mr d e
C a rn e s , son b e a u - f rè r e , et c e rta in J u n i u s , d ’A n v e r s , q u i e s t trè s -a v a n t d a n s la con fian ce d u P r i n c e ;
l ’u n e t l’a u tr e h é ré tiq u e s a in s i q u e lu i. (Correspondance de Philippe I I , t. III, p. 1 2 1 .)
* L eerd a m f u t p r is en ju ille t 1 5 7 4 (V o ir p lu s h a u t, p . 161) e t le c h â te a u de B e est se r e n d it a u x
m êm es c o n d itio n s q u e L e e rd a m . (M endoça, t. I l, p. 2 5 7 .) V o ir s u r les c o n q u ê te s d es E sp ag n o ls la le ttr e
d e R e q u escn s, d u 2 5 ju ille t 1574, d a n s la Correspondance de P hilippe I I , t. I II , p . 1 2 4 .
* N ic u w p o o rt, p e tit p o rt en H o llan d e.
4 Palos, c o u p s de b â to n .
DU CARDINAL DE GR ANVELLE.
à u n g sien fam ilier q u i en avoit a u lta n t faict p a ra v a n t a u d ic t soldat; et
ledit J u lia n est icy a u ssi; et l’on dit q u e le m a rq u iz re to u rn e m al c ontent
en Italie; ad ce q u e l’on ne p e rd ra rien. II s’est tenu en o r d re de bataille
avec les Suysses et chevaulx légiers p o u r d o n n e r s u r ledit J u lia n et les
Espaignolz, q u e n ’est bien faict n y à l’ung, n y à l’aullre de ainsi com m ectre
et h a s a rd e r les gens de Sa Majesté. Si les W a llo n s ne fussent cassez, il y
h e u t h e u d u jeu.
L ’on dit q u e l’arm ée de m e r ne peult v enir p a r faulte d ’a rg e n t qu e l’on
a ttend des Indes p o u r le mois de m ay qui vient.
Noz Estatz de B ra b a n t d e m e u r e n t e ndurciz et d o n n e n t m aulvais exem ple
a u x aultres
Hz o n t prin s fo rt mal une lettre q u e Monsr de B o is -le -D u c 2
at escript au C hancellier en cholère, p o u r ce q u ’il le som m oit, à la peine de
mil florins, à se re tro u v e r icy, q u ’il seroit niieulx de m eclre en peine ceulx
q u e y sont faisant si m aulvais d e b v o ir; laquelle lettre ledict C hancellier
leur at m o n stre en pleine congrégation ; ce q u e rend les Evesques encores
plus odieux.
Ils sont venu lettres d ’E spaigne depuis deu x jo u rs . H opperus escript sao
m ore, et ses lettres o n t to u sio u rs des aultres au ventre, com m e d it le P r é ­
s id e n t Viglius.
B e rty at dict avec jo ie à T iro n que Vostre lllme Sgrie est m andée en
Espaigne, et a d jo u s te n t p lu sie u rs q u e c’est p o u r estre P ré sid e n t ; aultres
p o u r succéder à l’A rchevesque de Tolledo, de la m o rt d u q u e l je n ’a y rien
e n te n d u . Don F e r n a n d e vad à Naples, et Monsr de C ha m p a ig n e y en Arthois;
q u e Monsr d ’H avret d o ib t avoir le g o u v e rn e m e n t du chasteaul et de la ville
d ’Anvers. De tout ce sont h ie r esté les bailles 3 pleines.
Son E x c ce at accordé à ceulx de B ra b a n t q u e les Estatz se ressam blent
p o u r adviser s u r les moiens de la paix, p o u r en a d v e rtir Sa Majesté et sçav o ir son bon plaisir, d o n t lesditz de B ra b a n t font g ra n d e feste. J e ne sçay
si de ta n t de fois assem bler lesditz Estatz l’on y tre u v e ra t b on com pte.
Il est v ray ce q u e Vostre IIlme Sgrie at p ré d it d u C o m m en d a d o r Maior q u ’il
1 La c o n d u ite d e s É ta ts d e B r a b a n t, le u r o p p o sitio n e t le u r s p la in te s so n t ex p o sées d a n s u n e le ttre
de R e q u esen s d u 2 5 ju il le t 1 5 7 4 . ( Correspondance de P hilippe 11, t.
d b e c d t, t. IV , p a r t. I l, p . 8 0 9 .)
* L a u re n t M e tz , é v ê q u e d e B o is -le -D u c de 1569 à 1 5 8 4 .
* B ailles, les a b o r d s de la c o u r à B ru x elles.
III,
p. 118;
H
oyxck
van
I'à
pen
-
CORRESPONDANCE
174
est subit, et sçait peull ce q u ’il faict. Il escripl lousiours, estant souvent
e n te rré avec G onz a g a ,R o d a et V arg a s,d o n t plusieurs font mal le u r proulïict,
inesmes le P ré sid e n t Viglius, q u ’il vo u ld ro it m en e r avec luy en A nvers;
m ais il n’y veult aller, s’e x c usant s u r son indisposition.
XLVIl.
LE
C A R D IN A L
DE
G K A N V EL LE
AU
P R IE U R
DE
B E L L E F O N T A IN E
(B ibliothèque de Besançon. — Mémoires île G ranvelle , t. I , fol. 81.)
INaples, le 51 ju ille t 1 5 7 4 .
Monsieur m on Cousin. Nous som m es empeschez à p r é p a r e r ce q u e nous
pouvons p o u r secourir la C olette et le fort de T hu n e s, où l’arm ée d u T u rc q
est m ain te n a n t, et dois le x m de ce mois ju s q u e s au xix® avoit tant
besoingné au x trenchées, s’a y d a n t de sacz plein d’a rè n e 1 et de baies de
laine, qu e c’est chose quasi incroyable. Noz gens o n t bon couraige, et
j ’espère q u e Dieu nous aydera.
Le Roy de F ra n ce est à Venize, où l’on luy faict fort g ra n d e feste. Le
Seigr Don J e h a n , et le Marquiz d ’A y a m o n t s luy ont offert passage p a r Testât
de Milan, et les forces d u R oy p o u r s’en servir p o u r la seurté de son passage.
J e ne pense pas, q u o y q u ’a y t escrit M onsieur le C o m m en d a d o r Mayor,
q u e ledit Roy passe p a r le conté de B o u rg o in g n e ; car dois les terres d u duc
de Savoye, il a le L yonnais près. Toutesfois, s’il y vad, il luy fauldra faire
to u t h o n n e u r, et ne debvrez de vostre p a rt o b m ectre de luy faire en ce cas
la révérence. J ’a im eroye m ieulx q u ’il excusasl de passer p a r là; car je crains
plus ceulx q u e s e ro n t à sa suitte q u e luy-m esm es.
* Ja c q u e s d e S t-M aurice o u M a u ris, p r ie u r de B e llcfo n tain c. V o ir sa notice, t. II, p . 5 8 9 .
’ A rène, sa b le.
* A n to in e G u zm an e t Ç u n ig a, m a rq u is d ’A y a m o n te .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
XLVI1I.
175
i
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(B ibliothèque d e Resançon. — L ettres de d iv ers, t. I l , fol. 240, 242-245, 247-249, 2 5 1-25?.)
........... , le 2 a o û t 1 5 7 4 .
M onseigneur. Le C o m m e n d a d o r Maior se p la in d ra de ceulx d ’icy com m e
il vouldra, mais il n’at g ra n d e envie de s’en serv ir: Roda est son cu e u r, d o n t
Del Rio enraige, et vouldroit faire à croire q u ’il est gousté de ce seigneur,
et q u ’il lu y d it co m m e il se d o ib t c o n d u ire avec ce pays, q u e sont touttes
baies *. Il est v ra y qu e les seigneurs et les nostres s o n t la p lu sp a rt telz,
com m e V ostre lll1"® Srie les déchiffre, enclins à m u tin e r en de rrière et m u r ­
m u re r; mais l’on y tro u v e ro it encores des gens si l’on v o u la it; et puis
q u ’Espaigne veult to u t faire, il le faut lesser convenir. Il se fie s u r Melendès,
lequel s’il ne vient, nous d e m e u re ro n s aux mesmes te rm e s ; et s’il se perd, il
n e faict à croire q u e les enn e m iz viègnent à a p p o in c tem e n t, qu e Monsr de
C ha m p a ig n e y n’avoit miz en m aulvais term es, a ia n t désià r a b a ttu le poinct
d e la Religion, d u q u e l ne se faisoit m ention, estant rem iz à la généralité des
Estatz q u ’o n t faict profession, p a r leur rem onstrance, de v o u lo ir persister
en la C atholicque R o m a in e ; et aussi ne s’appelloient plus ceulx d ’Hollande
et Zeelande Estatz, mais o n t supplié en qualité de la noblesse, villes et
m a n a n s d u pays, com m e je tiens Vostre IIIrae Srie a u ra t desjà veu p a r les
copies. J e m e d o u b te q u ’il n’y a u ra t a u ltre suite, p u isq u e le C o m m e n d a d o r
c h e rc h e de ro m p re , disant q u e ce n’est le D uc d’Albe qui a t p icq u é lesditz
payz de se revolter, n y le X e , m ais l’hérésie, et q u ’il se re p e n t de l’a voir
e scrip t a u ltre m e n t à Sa Majesté. E t certes, il est en p ire estime q u e ne fut
oneques ledit Duc. Les siens p ro p re s luy o n t p e rd u le resp e c t; et les
e nn e m y z le tiègnent p o u r le p lu s fin frette ! q u e s ortist jam a is du payz d o n t
il est. E t p u is q u ’il ne gouste l’accord, il v e rra t com m e l u y en p ren d ra , a y a n t
’ B aies, so ttises.
* F rette, f u r e t , h o m m e a d ro it.
i 7(»
CORRESPONDANCE
confessé plus d'une fois qu e l’on ne recouvrerai ce q u ’est perdu, par force,
en ce q u ’il «Ii c i vray, non j)as de x l ans. Le m esm e dit bien C happin Vitelli,
a iant assiégé Bommele, où il ne gaignera rien qu e à y desp en d re l’argent
d u Roy.
Le 2(ie du mois passé sont venuz q uelques batleaulx d ’HolIande à T e rnense, où ilz dressent u n g forl; et a ulcuns de leurs piedtons el chevaulx
sont venuz j u s q u ’à Axelle * en F landres, q u ’ilz o n t prins, saccaigé el bruslé^
e m m e n an t avec eulx beaucop de gens et meubles. INoz chevaulx légiers
sonl à C ourtray, et veuillent eslre à T o u rn a y , disanlz q u ’elle est plus h é ré ticque que jam ais, qu e l’on y ch a n te et presche; q u e sont b ourdes p o u r y
avoir entrée, à cause q u ’ilz sont là m ieulx qu e près des ennem iz et sont plus
creuz en leurs m ensonges q u e ceulx de pardeçà disanlz vray
Jam ais ne fut tant a b h o rri le d u c d’Albe c om m e le C om m endador, estant
en opinion d ’eslre preceps, eslourdi et à sa leste, s’estanl lessé pe rsu a d e r à
d espescher lellres. que le saige chancellier at scellé, aux recepveurs des
q u a tlre villes de B r a b a n l de lever trois mois de long chascun mois, et chascu n recepveur 10,000 florins à p r e n d re p a r forme d ’e m p r u n t aux villes et
villaiges, et vouloit passer o ultre; mais les Eslalz luy ont rem o n stré
sam b e d y , p a r escript et de bouche, q u e ce seroit contre les privilèges et le
serm ent du Roy, à sa joieuse enlrée, et poinct p rac licquable, voires qu e
cela causeroit plus d ’inconvénients et d ’allération qu e ne feict jam ais le xe.
Kl 1on dit q u ’il parla plus d o u lx q u e l’aullre jo u r.
Il n'est à croire com m e chascun s’altère et ce qu e dit le peuple pendant
a u x oreilles des d é p u te z des Estatz q u a n t ilz vont à la m aison de la ville,
d e m a n d a n tz si l’on souffrira telles nouvelletez; q u e à ce com pte n’est plus
besoing ressa m b le r les Estalz. El à la fin le C o m m endador s’envelopperat
tant, q u ’il ne sçaurat de quel coustel se tourner. Il parle indiscrètem ent des
Estatz à table et devant les paiges, a iant dit q u ’il a rra c h era des deniers hors
des trippes des Estatz, encores q u ’il leu r pèse. Et aulcuns de ceulx que sont
à l’e n to u r de luy d ie n t q u ’ilz ne d e m a n d e n t q u e a rgent et q u ’ilz feront bien
à la reste venir à j u b é le pais, auquel on hosle toutte dévotion de a y d e r à
Sa Majesté, com m e o n t com m encé faire ceulx de H a y n n a u lt* , et n ’en fera
1 A xel fu t p r is e t b r û le le 2 ju i ll e t IS 7 4 . (Correspondance de Philippe I I , t. III, p. 1 5 4 .)
* l.'a c te d 'a c c e p ta tio n p a r le g o u v e rn e u r g é n é ra l, d u c o n se n te m e n t d es
E ta ls d e H a in a u t, à la
DU CARDINAL DE GR AN VEL LE .
177
m oings Artois, po u rv eu q u e l’on les asseure du x e, et q u e l’on hosfe la
C h a m b re des troubles, q u e se d o ib t faire de tem ps à aultre, mais ne s’a c h è ­
vera jamais. Et Dieu sçait les im postures qu e y passent, d o n n a n t assignation
là où q u ’il n’v at q u e p re n d re et où l’on at escum é le pot a u p a ra v a n t,
a b b a ta n t encores arbres, re n d a n t le bien a u x catholicques, c hargé des
rentes de cinq ou six ans, et les m aisons fort mal réparéez, q u ’est d im in u e r
g ra n d e m e n t la grâce et gré q u e Sa Majesté m érite d ’u n g tel pardon.
Lesditz Kslatz de B ra b a n t o n t d e m a n d é au C o m m en d a d o r Maior s’il
entend leur g a rd e r les privilèges ju ré s par le Roy. Il dict beaucop et lingua
sua, d o n t ilz se plain d e n t, q u ’il ne le u r fait response p a r le Chancellier, du
m oings co m m e l’on soloit faire du tem ps de M adame de P a rm e , q u ’est
regrettée et v o u ld ro it-o n la veoir de re to u r avec Vostre lllme Sgrie, et q u e
l’on fut quicle de ceulx d ’Espaigne, q u e c a u se ro n t q u e lq u e j o u r u n e rébel­
lion : c a r ilz m anifestent p a r trop leur intention q u ’est de g o u v e rn e r p a r
ty ra n n ie , et de se faire ric h e s; ce qu e ne se soutirerai à la longue. Et sûmes
délibérés tra n s p o rte r ce q u ’est à Monts ju sq u e s à D ouay, où il n’y at g a r ­
nison ; ca r les W a llo n s o n t pa rto u t m aulvaise volunté, et d ie n t q u ’ilz
veuillent estre paié com m e le sont esté les Espaignolz, lesquelz se vantent,
s’ilz ne sont paiés à la fin de trois mois q u e e x p ire n t avec le présent, q u ’ilz
sçavent bien là où ilz sont estez paiés la d e rn iè re fois; et jà fault le paie­
m en t aux Suisses. Et les noirs h a rn a x du d u c E rich a p p ro c h e n t Louvain
et ceste ville, où l’on les g a rd e ra bien d ’entrer. Mais elles sont sans chief, et
la c o m m u n e q u ’est povre, se feroit tost m aistre ; ce q u e je ne vouldroie
a tte n d re ; mais je m e tie n d ra y prest p o u r in c o n tin e n t p r e n d r e la clef des
cham pz, si q u e lq u e altération survient.
L’on ne parle qu e des g ra n d z dom m aiges q u e o n t faict les gens de
Mons>r de Havret, auquel Assonleville a escript une lettre q u e c ontenoit le
diable co n tre ceulx d ’Espaigne, qu e at esté interceptée p a r le Chancellier
de B rabant, d o n t Monsr de C ham p a ig n e y l’at adverty. Ce seroit p o u r le
dellerrer. J e v ouldroie q u ’il escripvist m oings et q u ’il se fléchist plus vers
R oda q u e g o u v e rn e paisiblem ent. Il dict q u e Monsr le P ré sid e n t lu y c om plaicst trop.
d e m a n d e des su b s id e s faite au m ois de ju iu 1571, p o rte lu d a te d u 2 a o û t d e la m êm e a n n é e .
Inventaire analulique des archives des E ta ts de H ainaut, p. 120.)
T omf. V.
23
(L
a c r o ix
,
178
CO RRESPONDANCE
Le fils de feu Adrien blasonne icy tellem ent le Roy, q u e je vouldroie
q u ’il fut là où il estoit il y at ung an, le déchiffrant double, couvert, et qui
p a rle plus loing de ses pensées. J e n ’ay parlé à luy, ny ne v o u ld ro ie ; mais
j e le sçay de bon lieu : peult-estre q u ’il le faict p o u r o u y r ce qu e 1 on d ira ;
mais c’est m ectre le R oy en m auvaise opinion vers les siens.
L’on dit q u e les Espaignolz de S ardaigne et de Milan sont en c hem in p o u r
v e n ir icy.
Il vad bien q u e le T u r c q
vouldroit. D ieu le confonde
P . S. L’on ne parle plus
q u e l’on ne le d o ib t a tte n d re
n ’est a p p a re n t de laire tant de m al com m e il
et nous d o n n e v ic to ir e 1.
du D u c d ’Albe, et a t e s c r i p t le Duc de Medina
icy.
XL1X.
LE
PRÉV Ô T
M O R IL L O N
AU
C A R D IN A L
DE
GRANVELLE.
( B ibliothèque de Besançon. — L ettres de M orillon, t. I l, fol. 553.)
..................... 2 a o û t 1 57 1 .
M onseigneur. Ceste sera p o u r a d v e rtir Vtro Illme et R me Srie, si d ’a dventure
elle ne l’a t encores e n te n d u d ’ailleurs, d u trespas de feu M. le Rme d ’A rras %
q u e ad v in t le xxvi® d u mois passé, à n e u f heures du seoir, après avoir receu
tous ses sacrem entz et a d h o rté ses confrères à paix et c o n c o rd e ; il at d o nné
fort bon tesm oignaige à Mr le p ro to n o ta ire vtre n e p v e u r % selon qu e verrez
• L a flotte tu r q u e a v a it a tta q u é la G o u le ltc le 2 2 ju ille t 1 574, e t p r i t la fo rte re sse d 'a s s a u t le
2 4 a o û t de la m êm e a n n é e .
* F ra n ç o is
R ic h a rd o t, é v ê q u e d ’A rra s d e
1561
à
1574.
V o ir
S
ta pleton
,
L audati • in funerc
F. Richardot, episcopi A Irebatensi.
’ P ie r re M ouchet, p r o to n o ta ire , S r d e C h â tc a u -R o u illa rd , v ic a ire d e l’év êq u e d 'A r r a s , c o n s e ille r
e c c lé sia stiq u e a u G ran d -C o n seil d e M alines. V o ir sa n o tic e , 1.1, p. 1 3 5 , n o te 2 .
m
DU CARDINAL D E GRANVELLE.
p a r la lettre de Mr R i c h a r d o t ', qui ne me sa m b le ro it convenir, com m e j ’ay
dit à M. de C ham paigny, d ’escripre au Roy, qu e polroient s a m b le r emendicata sufl'ragia. Ledict Sr en at parlé à Son Excellence, q ui d é m o n slre b o n n e
volunté, d e m a n d a n t si c’est celuy q u ’il avoit pou rv eu de le s tâ t de conseillier, et p a rta n t at ledict Sr de C h a m paigny bien faict d ’a d h o rte r ledict
Sr p ro tonotaire, p u isq u e son vicariat est expiré, d ’aller résider à Malines :
ce q u e luy a u g m e n tera sa rép u ta tio n . P o u r r e to u r n e r a u d ic t Sr d ’Arras,
certes il est fort regresté p a rto u t p o u r ses g randes vertus et ra re éru d itio n ;
il estoit m erveilleusem ent a y m é tant de son cliappitre. q u e de tout son
diocèse et pays d ’Artois. J e p rie Dieu de le m ectre en sa gloire. Vostre m ai­
son, à laquelle il estoit fort affectionné, y perd beaucop, et m oy u n g bon Sr
et patron.
Ledict Sr de C h a m p a ig n y at aussi pa rlé à Mr de St-Bavon ', qui p ro m et
toutte adsistence au dict Sr p rotonolaire, q u e je pense veoir de bref, pu isq u e
Mr Viron et m oy avons arre slé de nous tro u v e r p o u r le xxie à H a vrincourt.
p o u r la v ente des bois et rendaige des fermes, q u e la p lu sp a rt e x p ire n t
ceste a n n é e; et nous v e rro n s d ’u n g chem in ce q u e l’on faict à S ^ A m a n d s.
J ’ay p a rlé à Son Excellence p o u r l’im m u n ité d u c h a p p it r e d e Malines; si
polrions avoir u n e raiso n n a b le quote, co m m e dit Mr d ’Assonville, il n ’y
a u r o i t q u e bien : aussi luy ay-je parlé to u ch a n t le m agistrat, et au Sr Roda.
Son Excellence me dit q u ’elle voulloit a voir m on advis, q u e je di ray pl us
voluntiers à Mr de S l-Bavon, q u e de le m eclre p a r escript.
Sadicte Excellence vad dem ain tem p re ‘ en Anvers, et dit-on qu e c’est
p o u r plusieurs m o is ; il lesse icy ledict Sr de S*-Bavon avec le privé Conseil.
M o l s m ’est venu m e rc ie r de ce q u e j ’ay faict p o u r luy d u r a n t son exil;
je tiens q u ’il at la m ain-levée de son bien, mais chergé et d é té rio ré com m e
plu sie u rs aultres.
Le beau-filz de Mr H opperus 6, qui estoit chastellain de la G aude, est
1
J e a n I tic h a rd o t, év ê q u e d ’A rra s, p u is a rc h e v ê q u e de C a m b ra i d e 1 6 0 9
à
1615.
* V'iglius.
1 L’a b b a y e d e S t-A m a n d :
G ra n v e lle é ta it ab b é d e ce m o n a s tè re , à p a r ti r d e 1 5 6 1 .
4 Tempre, g o u v e rn e r, r é g le r j d u la tin temperarc.
* Je a n d e M ol, d it le B o rg n e. V oir p lu s h a u t, p. 149.
* C o rn e ille V a n d c r M yl, c h â te la in d e G o u d a, a v a it é p o u sé C a th e rin e , fille de H o p p e ru s, e t liv ra cette
f i l l e au p rin c e d ’O ra n g e . V o ir t. IV , p. 2 7 7 . — D e ce ch e f il fu t c o n s id é ré com m e c o u p a b le de tra h is o n .
CORRESPONDANCE
180
aussi de r e t o u r ; on attend aussi le sr de Bocxlel ' ; et I’enraigé Lum el,
d it de la Marche, d e m a n d e aussi son p a rd o n , et peult-estre q u e ce ne
serait le p ire de le luy d o n n e r, p o u r faire p e rd re l’opinion à ceulx d’Hollande et de Z élande qu e l’on ne tie n d ra i pas la p a ro le ; et je suis seur
q u e aiant sa grâce, il se tie n d ro it hors de ces pays, se c o n te n tan t d ’y
rav o ir son bien.
J ’envoie à Vtre lllme Srie les preces ainsi q u e les avons conceu p o u r
voslre diocèse, q u e j ’ay c o m m u n ic q u é au x d e u x confesseurs de Son E xcel­
lence; car il at p a r dessus le cordelier u n g jésuite, et ilz les o n t trouvé fort
b o n n e s ; j ’en ay envoié copie à vos évesques c o m p ro v in c ia u lx ; en facent
com m e ilz v o u ld ro n t, quia quoi capita tot sensus; touttefois en telles
choses, ilz se d e b vroient c o n fo rm er au m étro p o lita in , et à luy seul se
d e b vroient envoier choses sam blables, p o u r les envoier et r é p a r tir entre
les com provinciaulx, p a r où qu e seroit ga rd é la conform ité : mais il sam ble
a u llre m e n t à Arias Montanus.
Molinæus * est à G and, où son frère le conseillier l’at s e rr é ; je ne sçay
s’il a u ra t appel lé ou escript à Rom e p o u r a voir absolution de carcere
effracto et p erju rio, d o n t j ’escriptz à vostre agent, et aussi s u r une aultre
appellation interjectée in m ateria correctionis, d ’ung c oncubinage p u b lic à
Louvain ; q u ’est incorrigible.
J e ne sçay où re c o u v re r les six poinctures de dévotion à huille, com m e
y t r e ] | | m e g r i e | es d em ande, et je craindz q u ’il les faudrat faire à faire;
au q u e l cas c o u steront plus c h iè re m e n t; j ’en ay d o n n é à Mtre Christian s, le
p o intre, la charge
J e faisoie m on com pte resp o n d re aux aullres lettres de Vtre lllme S” «, de
m ain de secrétaire, mais p o u r non r e ta rd e r la valise.
N e fig u ra n t p as à la liste d es p ro s c rits an n e x é e au n o u v e a u p a r d o n , il r e n tr a e n B elg iq u e. V o ir
IIoynck
van
P
a pe n d u e c iit
, t.
I,
p a r t.
II,
pp. 800, 804, 805, 815.
1 J e a n d e H o rn es, Sr d e B oxtel e t B oucignies. V o ir sa n o tice, t. IV, p. 2 5 9 . M orillon a v a it in sisté s u r
so n ra p p e l à d iffé re n te s re p ris e s.
*
t.
I,
J e a n M olinæ us ou V a n d e r M eulcn v it le j o u r à G an d , fu t d o c te u r à L o u v ain , e tc . V o ir sa no tice,
p. 6 9 . C’é ta it u n p e rso n n a g e trè s sin g u lie r, s u r leq u el on p e u t au ssi c o n s u lte r
drecht
,
IIoynck
van
P apen-
t. I, p a r t. I l , p p . 4 0 2 , 7 7 1 , 7 7 4 , 7 8 0 , 8 5 0 , e t s u r ses d é m a rc h e s a u p rè s d u S t-S iégc, ibid.,
p. 832.
‘ C h ré tie n V an d e n P e rre . V o ir p lu s h a u t , p. 15.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
181
L.
LE
C A R D IN A L
DE
G RA NVELLE
A
ANNE,
P R IN C E S S E
D E P O L O G N E 1,
(liih liolhèque royale de Bruxelles. — M anuscrit n» 9 475, fol. 384.)
N ap les, le 8 a o û t IS 7 4 .
Seren. Infans. Q ua okscrvantia Ser"'""' V estr “"1 C elsitudinem sim sem per
p ro se q u u tu s, testatum illi facere p o te ru n t litteræ meæ d u d u m ad illain
datæ, neque credo esse n onnullos in Polonia, qui q u ib u s olïiciis hoc ipsum
c o m p ro b a rin t, et q u a n to studio Serenos Regem et R eginam bonam m atrein
observaverint, q u a q u e sedulitate in iis rebus, q u æ ad eos p e rtin e b a n t sim
versatus eo tem pore, q u o in aula invictissimi Im p e rato ris Caroli V resedi,
d u m q u e ad illos p e rtin e b a n t negolia, m ea opera e x p e d ie b a n tu r, declarare
illi p o te ru n t, et non d u b ilo Illustrissim um et R everendissim um D om inum
m eu m Carolum W a rm ie n s e m m em o rem esse q u id a me p ræ s titu m sit; d u m
in ea aula bis o rato rem ageret. Ego sane b a n c ipsam v o lu n ta te m servo,
servaboque, d u m vivam : pa ra tu s in o m n ib u s illi ofïiliosissime se rvire; egit
m ecum a liq u a n d o R dus Secretarius, qui n u n c hic Celsis Vestræ negotia p r o ­
c u râ t de no n n u llis, q u æ ad earn pertin en t, negotiis. Monui c re b ro cum
a d ire t eos, q u o r u m op e ra h u ju s generis negotia hic p e rtr a c la n tu r , et sine
q u o r u m in te rv e n tu , se c u n d u m Regis nostri instructiones, expediri non
possunt. H abet cam erarios in negotio d e b itæ p e c u n iæ , h a b e t et ex iis jutlïces
in causa b o n o r u m , q u e hic burgensatica v ocantur. Dixi si q u id adversus
hoc suspilionis h a b e t p ro p o n e r e u t velint, me d a tu r a m o p e ra m u t q u a m
diligentissim e j u s illi d ie a tu r, su m m o eliam favore q u a n tu m ju sticia
p a tie tu r. Id si aget ea q u a decet diligentia, brevissim o tem pore, q u o d spero
negotia ejus confecta r e d d e n t u r , neque sane a p u d m e Smi Regis Poloniæ
H e n ric i, qui n u n c in Galliam redit, n e q u e c u ju sq u e intercessioneopu s
h a b e t, cum sp o n te mea p a ra tu s s i m , q u ib u s in reb u s p o ssim , p ro m p ta
1 V o ir p lu s lia u t, p. 142, la n o te a u s u je t de cette p rin c e ss e . La m a jo rité d e la d iè te p o lo n a ise d é fé ra
la c o u ro n n e à A n n e à la co n d itio n d ’é p o u s e r E tie n n e B a th o ry .
IS 2
CORRESPONDANCE
mua servitia illi exibere. Deus Opt. Max. Cels. Vestram diu servet incolum em .
Ll.
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
( llihliolhèque de Besançon. — L elires diverses, t. I l , fol. 247-219.)
B ru x e lle s, les 8 e t 10 a o û t 1574.
M onseigneur. Ceulx de H a y n n a u lt ont accordé les prem iers, tan t la
q u o tte q u e le centiesme, soubz condition qu e leur d o n n e ra seurté du x® et
x x e e t q u ’ilz n’a u ro n t plus qu e faire en la C h a m b re des tro u b le s; s u r ce
q u o y l’on leur at accordé certains despesches '.
L’on escript d ’Anvers q u e Monsr de C ham paigney y at esté v o luntiers
veu; qu e Son E x 08, à son arrivée, luy at faict m ectre les clefz de la ville
e n tre ses m ains, et le m o t du guect, q u e ledit sieur at rep rin s après les
avoir présenté à Son E x ce.
J ’envoie à Vostre Illme Sgrie copie de la requeste présentée p a r ceulx de
B ra b a n t, q u e ne sont encores résoluz s u r le faict de l’ayde, com bien que
Son Exce a l resp o n d u s u r aulcunes rem o n stra n ce s q u ’ilz luy avoient d o n n é
en ceste ville *. J ’entendz q u ’elle at déclaré q u e ce q u e A ndré C ig o ig n e 5 at
faict à Breda at esté p a r son o rd o n n an c e et expresse ch a rg e ; q u e n’est
p oint p o u r é m e n d e r les affaires. L’on attend ceulx de Flandres.
• L ackoix, loc. c i l p. 120.
« C eulx d ’A rto is o n t a c c o rd é la q u o te à p a ie r p ro m p te m e n t, c a r ilz o n t b ien am en aig é, et p o u r le
cen tiesm e ic l m ille flo rin s u n e fo is. P a r ce m oien p o lr a t l’on lic e n c ie r 11 “ c h e v a u lx d u d u c Ë ric li, e t
s u r cc e s t - o n , e t a u s si les S u isses.... » (L e ttre d e M orillon d u 16 a o û t, ibid., fol. 2 4 5 .)
* D ans u n e le ttre d u 18 a o û t, R c q u esen s se p la in t a u Roi d e la c o n d u ite d es É ta ts d e B ra b a n t. L e u rs
p ré te n tio n s so n t d é ra iso n n a b le s , e t ils les é ta y e n t s u r la J o y e u s e - E n tr é c . (Correspondance de Philippe 11,
t. I II , p . 1 5 0 .)
5 J e a n A n d ré C icogna. V oir sa n o tic e , t. IV , p. 8 5 4 .
DU CARDINAL D E G R AN VE LL E
Les Allem andz se sont a m ulinés à Bois-Ie-Duc pour avoir paiem ent. Hz
v o u ld ro n t tous suivre l’exemple d ’Anvers.
L’on est après p o u r relaxer d ’u n coustel et d ’au lire tous les prisonniers,
s a u lf la p e rsonne de M onsr d e Ë o ussut, n ’y v e uiliant e n te n d re le P rin c e
d ’O range p o u r plusieures raisons q u ’il allègue, et mesines ne noceat libertati
r e d d il u s 1. L’on dit q u e ledit P rince d evient fort m a ig re : mais q u ’il luy vient
a rg e n t de tous costelz, de sorte q u e si l’on licentie les reyttres [en ce qu e
Son E x ce traveille b eaulcop], luy les acceptera.
Monsr de B e rla y m o n t d e m a n d e A rras p o u r son au ltre filz, suo more,
v e uiliant a voir tout, d o n t il est fort noté de chascun, et puis il se plainct
q u ’il n ’at jam a is rien heu.
Bruxelles, 10 a o û t 1d74.
Le siège est devant B om m ele et G orcum , où les ba tte au x sortent et
e n tr e n t sans e m p e s c h e m e n t; ainsi passera l’esté. C epe n d a n t je veoids les
E statz peu c o n te n t e tc o gnoissent assez m anifestem ent q u e le C om m endndor
se m o u c q u e d ’e u lx ; et se d é m o n s tre n t ceulx d e .............. plus insolentz q u e
oncques... Aussi m ectent-ilz g rand espoir en l’arm ée de m e r; mais je tiens
q u e ce sont m ines, et qu e le Roy a u ra t m illieur conseil ; ca r s’ilz se o b tie n t
ju sq u e s là q u e de venir, je les tiens p e rd u com m e l’àm e de J u d a s ; et tel est
l’o p in io n de tous ceulx qui e n te n d e n t et cognoissent les deu x forces et l’a d vantaige q u e l’une partie a t s u r l’autre.
L o rs q u e Son E x 08 p a rtit d ’icy, elle rec o m m a n d it fort au m agistrat la
b o n n e g a rd e de ceste ville, d isa n t q u ’il les laissoit sans g o u v e rn e u r et garde,
p o u r la confiance q u ’il at d ’eulx, et q u e si q u e lq u e chose survenoit, ilz
h eussent de l’advertir, il les aideroit. 11 y at icy un je u n e h o m m e q u e sert la
contesse de H ochstratte, d ouagière de B u g n e c o u r t ’, q u e a servi son frère de
* L e p r in c e d ’O ra n g e so u le v a, e n effet, d e g ra n d e s difficu ltés à p ro p o s d e la m ise e n lib e r té d e
B o u ssu . Il é ta it d é c id é à n e la lu i a c c o rd e r q u ’en éch an g e de so n fils, le co m te d e B u r e n , r e te n u e n
E sp a g n e p a r P h ilip p e II, o u u n e so m m e d e 4 0 0 ,0 0 0 écus. (Correspondance du Taciturne, t. III, p . 1 0 0 .)
E n o u tr e G u illa u m e lu i re fu s a d e fa ire u n to u r p e n d a n t le s n ég o ciatio n s.
t. V, p. 1 1 9 .)
(G
roen
van
P
r in st e r k r
,
•
* E lé o n o re d e M o n tm o re n c y , v e u v e d e P o n ce d e L a la in g , S r d e B u g n ic o u rt, é p o u sa e n se co n d es
n o ces A n to in g d e L a la in g , co m te d e H o o g h s tra c te n . L e frè re d e c e tte d a in e é ta it F lo ris d e M ontm o­
re n c y , Sr d e M o n tig n y , q u i fu t a r r ê té , p u is e x é c u té s e c rè te m e n t à S im an cas, p a r o r d r e de P h ilip p e II.
P e n d a n t sa d é te n tio n on sem a d a n s la p riso n d es n o te s fau sses q u i s e m b la ie n t se r a p p o r te r à u n e
184
CO RRESPONDANCE
M ontigny de secrétaire, lorsqu’il fut d étenu p riso n n ier avec le m aistre d ’hostel d u d it M ontigny et qu e lq u e s autres dom estiques siens, et qui fut p o u r
sa p a rt gehenné troys fois s u r la fuyte q u e son m aistre avoit préparé, et que
le principal interrogat estoit p o u r sçavoir si Renard n’en sçavoit à parler,
ad ce qu e l’on p e u lt veoir quelle o pinion en avoit le Roy. Ledit jeu sn e
h o m m e com pte merveille de ce q u e passa lors; ce q u e seroit trop long à
escripre...
lu
.
L E P R É V Ô T M O R ILL O N AU CA R D IN A L D E G R A N V E L L E .
( Bibliothèque de l!esanr;m>. — L ettres de divers, t. Il, fol 240 )
.................. . le 14 a o û t 1 5 7 1 .
M onseigneur. J ’ay veu qu e Yostre Illmu Sgrie m ’escript du xvi« du mois
passé, to u ch a n t Monsr de C ham paigney, et je vous ay désià adverti de ce
q u e ledit sieur at passé avec le C om in en d a d o r Maior, a v a n t leur p a rle m e n t
d ’icy vers Anvers; et suis esté en mesm e do u b le, com m e je veoidz avoir
esté Vostre lllme Sgrie, q u e l’on avoit entrem iz le Roy plus loing p o u r le
d é c arte r; mais j ’ay p e rd u ceste opinion com m e aurés veu p a r mes d e r ­
nières et pénultiesm e. Bien est v ray q u e luy faisant faire q u e lq u e nouvelle
venue par d ’Avila, la p orte sera ouverte p o u r s’en faire quicte, p u isq u ’il
n’est p o u r souffrir. 11 est de vif esprit, et faict profession de v ertu et de
vérité, com m e d o ibvent faire tous gens d ’h o n n e u r ; mais de fonder s u r ce
u n e si g ra n d e liberté q u e de contester ou pourfier avec les princes ou
ceulx q u e s ont au g ouvernem ent, ne convient tousiours, et eulx le peulvent
co m p o rter p o u r u n g tem ps; mais à la longue ilz s’en fâchent et s’en treuve
év asio n m éd itée p a r le p ris o n n ie r. C’é ta ie n t d e s é c rits in v e n té s à p la is ir, d a n s le b u t d e p e r d r e ce
se ig n e u r. N éan m o in s d e s in fo rm a tio n s f u re n t p rise s à ce s u j e t; d es p e rso n n e s f u re n t a r rê té e s e t m ises
à la to r tu r e . C’est ce q u e M orillon av o u e e n d is a n t q u e le se c ré ta ire d e M ontigny fu t gehenné troys fois.
V o ir ce q u e n o u s e n d iso n s t. IV , p. 4 5 , e t les so u rces q u i y so n t citées.
18»
DL! CARDINAL DE GRAINVELLE
l’on enfin décrédicté vers eulx. Il fault a u lcune lois céder et souffrir, a tte n ­
d a n t le tem ps avec pacience si l’on veult se servir de la divise de m on
m aistre \ q u i l’at m ieulx exécuté que ne sçauroit le faire Monsr de C ham paigney, q u i est trop ferme, et com m e vous dites a m y de son opinion. Et
q u e lq u e advis q u ’il me d e m a n d a l’a u ltre j o u r devant d e p a rtir d’icy, si est
ce qu e je liens q u e si lu y -m e sm e n ’heust heu la volunté de se ranger, qu e
to u t ce q u e Bave*, auquel il d e m a n d a aussi advis et à Monsr le P ré sid e n t et
R oda [ p a r m on e n h o rt affîn de gaigner gré d ’eulx] luy h e u sse n t p e u lt dire,
he u t servy peu. Ledit Bave m ’at dit q u ’il usa des m esm es arg u m e n tz
com m e j ’avoie faict. P leust à Dieu q u ’il d e m a n d ist souvent advis à Vostre
IUme Sgrie et q u ’il le suivist; il n’en v auldroit pas pis. Le tem ps lefera m eu rir.
L’on n ’at guerres veu prollicter les inférieurs à b raviser contre leurs s u p é ­
rieurs, et dict fort bien le p roverbe : con tu Rey no p a r te peras, etc. J ’ay
so uv ent heu la m esm e craincte q u e Vostre lllme Sgrie, qu e le bien p a rle r et
trop lib re m e n t n uiroit, et je ne veoidz q u e l’on s’en garde. Le C o m m end a d o r et R oda accoustent tout, et n’en pe n sen t pas m oings. Il se p eult veoir
q u e l’on n’at gousté la négociation de Monsr de C ham paigney en Hollande,
p u isq u e l’on la lesse d o r m ir ‘. Polroit estre q u e l’on a u ro it consulté le
maistre.
J e renvoie ce q u e Monsr de C ham paigney at escript à Vostre Illme Sgr!e,
q u i n ’at v raiem en t mal faict ses affaires, a iant largem ent accreu son revenu
d e p u is son p a rte m e n t et son c ré d it en u n e c harge si p rin c ip ale et ho n o rab le
q u ’elle surpasse touttes aultres. Dieu d o in t q u e c h a sc u n g en use si bien
com m e elle at faict, et q u e l’on pregne le m esm e c hem in p o u r y parv e n ir
et sym b o lise r au Durate.
Les Sieurs Don F e r n a n d e et de C ham paigney dé sire n t fort l’ad v a n ch e m e n t de M onsieur vostre n e p v e u r * à lev e sc h é d ’Arras, etc.
1 V o ir le m o t final d e c e tte le ttre .
* Jo sse d e B ave, s e c ré ta ire d u C onseil p riv é . V oir sa n o tice, t. I, p. 2 5 , n o te I.
8 D an s u n e le ttre d u 2 5 ju ille t 15 7 4 , R e q u e se n s d it a u Roi : « C h a m p a g n ey a négocié av ec q u e lq u e s
v ille s e t j u s q u ’ic i s a n s b e a u c o u p d e f r u it ». V o ir Correspondance de Philippe I I , t. III, p. 120.
4 P i e r r e M ouchet. V o ir p lu s h a u t, p . 141.
Tom e
V.
24
CORRESPONDANCE
186
L 1 II.
LE
PRÉVÔ T
M O R IL L O N
AU
C A R D IN A L
DE
GRANVELLE.
(b ib lio th èq u e de Besançon. — L c llic s diverses, t II, fol. 2 4 2 -2 tô .)
B ru x e lle s , le 10 a o û t 1 57 4 .
Monseigneur. Je re s p o n d ra y à voslre lettre publicorum du xv® du passé
le plus su ccinctem ent q u e je polray.
Il est vray qu e Son E x cc faict ce q u ’elle p e u lt, a iant licenlié u m clievaulx
de Monsr de Mannsfeld, qu e sont désià au D u c h é de B ourgongne p o u r
servir le Roy de F rance. Hz o n t faict tan t de m aulx en L u c e m b o u rc h , q u e
les povres gens, p o u r se venger, ont b o u lté le feug en leurs m aisons, p o u r
y b ru sle r les clievaulx et reyters dedans, com m e ilz o n t faict plusieurs.
Son Exce est aussi après p o u r se deffaire des reyters du Duc Érich, q u e
font tant de mal à C ule m b o u rc h et près d ’Utrecht, q u ’il n’est com portable.
Si les Espaignolz, q u e l’on at em ploié p o u r traicter avec les chiefz, leur
porlissent u n g peu plus de respect, j ’entendz q u e tout cela seroit désià
a c com m odé; mais com m e ilz sont braves et fiers, les A llem andz ne les
veuillent souffrir. Si e spérè-je q u e p e u à peu l’on les renvoiera. L’on parle
aussi qu e les Suisses reto u rn e ro n t, q u e seroit ung beau d é c o m b re; et noz
W a llo n s se sont cassez d ’eulx -m esm es. P a r ainsi Son Excellence raccoursseroit les fraitz, et feroit b e a u co p d e ce q u e les Estatz accordent. L’on dict
aussi qu e le m a rq u is Vitelli s’en vad. Cela me feroit croire q u e nostre
g u e rre ne d ureroit. J ’entendz qu e l’on vouldroit d o n n e r la qualité au S r
Don F e rn an d e , q u e j ’espère, com m e il est saige, ne se lessera m en e r à la
d a n s s e : ca r l’on ne peult c o m m a n d e r au soldat s’il n’est paié; et les Espai­
gnolz ne recongnoissent a u lc u n chief. C’est p o u r ce q u e ledit M arquis se
retire, aiant esté mal obéy et traitté de rufian 1 p a r Ju lia n . Q u a n t ores l’on
e n 's e r a t quicte, ce sera au m o in d re mal : car il ressam ble au du c d ’Albe et
est u n g c h ie r varlet.
1 R u fi un ou Ilufien, d é b a u c h é , h o m m e d e m a u v a is e vie.
DU CARDINAL DE GR AN VE LL E
187
Les Estatz de B ra b a n t sont parti p o u r Anvers, et sa m b le n t s’arre ste r à
a u lcunes conditio ns desquelles Son E xce ne veult o u y r parler, n y q u ’ilz
b e n d e n t le Roy. Ad ce q u e je puis veoir, l’on n’a u ra t des Estatz de H a y n n a u lt tout le c o n te n tem e n t q u e l’on avoit dé m o n stré p a r leur p r o m p t
accord tant p o u r la q u o te q u e centiesme, avec touttefois abolition des X e
et x x e, desquelz on leur at r e n d u les lettres d ’accord q u ’ilz en avoient
d o n n é au d u c d ’Albe, et les apostilles aussi de la C h a m b re des tro u b le s;
ca r lesditz de H a y n n a u lt p ré te n d e n t q u e tous biens confisquez seront r e n duz avec les levées, p u is q u ’il n ’y at confiscation en H a y n n a u lt; et M adame
de M ontigny répète Leuse et aultres terres de son d o u a ire : ad ce com pte
Sa Majesté y p e rd r o it largem ent.
Ceulx qu e viegnent d ’Allemaigne d ien t q u e l’on y faict des am as ' tant
p o u r le R oy de F ra n c e q u e p o u r le P rince de Condé, auquel le P alatin 1
feroit plus d ’assistence, ne fût la craincte q u ’il a l; les autres princes luy
c o u rr iro n t sus p o u r ce q u ’il so u b stie n t les rebelles.
C’est u n g gra n d bien q u e le xvie du mois passé l’arm ée du T u r c q n’avoit
exécuté a u llre chose. J ’espère q u ’elle ne fera g rand mal, e stant la saison si
avanchée. Si le Moscovite descend à l’ayde du Moldave co n tre le T u rc q ,
cela luy d o n n e ro it de la besoingne. Nous sûm es h e u re u x com m e V. I. S.
diet qu e les F rançois o n t à faire chez eulx.
Le d u c d ’Arschot at beau d ire de R o d a ; ca r le C o m m e n d a d o r le seconde
usque a d tædium, de ceulx d ’E spaigne; et je tiens q u e en cela ne c h a n g erat-il rien p o u r le Duc, ny p o u r aultre, e stant raiso n n a b le q u e les Royz et
go u v e rn e u rs a ient la m esm e liberté q u e c h a scun père de famille, et q u ’ilz
se servent de gens à le u r goust. C’est bien, com m e Vostre lllme Sgrie dit. le
p o in ct p o u r lequel se p e rd it la noblesse, se form alisant co n tre le R oy p o u r
ce q u ’il em ploioit Vostre lllme Sgrie.
Si ceulx de Sardaigne et L o m b a rd ie v iègnent icy, je c raindz q u e le pays
en se ra t fort altéré. Mais si ce fut p o u r les faire vivre en discipline, soubz
bons chiefz, et qu e l’on renvoia au lta n t d ’aultres avec leurs capitaines,
qui o n t icy m u tin é et faict ta n t d ’excès, to u t seroit r a d o u b b é et chascun
* F aire des am as, r é u n i r d e s tr o u p e s , fa ire des re c ru te m e n ts .
* F ré d é ric l i t , d it le P ie u x , p a la tin du R h in , n é le 14 f é v rie r 1 5 1 5 , m o rt le 2 6 o c to b re 1576. Il
a p p a r te n a it au p a r ti p ro te s ta n t.
188
CORRESPONDANCE
d c m oreroit conlenl. Sa Majesté faict bonne euvre do c o m m a n d e r p a rto u t le
chastoy des a m utinez qu e l’o n t bien m érité; car sans eulx le Prince
d ’Oranges he u t présenté la carte blanche, si l’on heut poursuivy la victoire
contre le conte Ludovic.
LIV.
LE P R É V Ô T M O R ILL O N AU C A R D IN A L DE G R A N V E L L E .
(B ib lio th è q u e d e Itesançon — L e ttr e s d e M o rillo n , l. Il îles s u p p lé m e n ts , fol. 21t-24r> .)
B ru x e lle s , 16 a o û t 1 574 .
M onseigneur. J e m ercie très h u m b le m e n t Vtre 11lme et Rmo Sglie le soing
q u e je veoidz elle p orte de sa grâce tant de la santé de mes deu x b e a u frères \ q u e aussi de la m ienne, q u ’est bonne, grâces à Dieu, de tous, sauf
des enffants d u conseilliez d o n t il en y at deux fort traveillé des liebvres;
m ais la jeunesse peull p o rte r beaucop.
Le religieulx p ris o n n ie r d ’Aflleghem at heu sa sentence, et est à G em b lo u x ; le s u rp lu s est paisible, et sont fort diligentz a u x liçons, ausquelles
le professeur faict g ra n d d e b v o ir et les e n tre tie n t en paix.
L’on procède contre M olinæus *, tant de la p a rt de Mrs de R e m u n d e qui
at b o n n e teste, et de Bois-le-Duc \ q u e de la vostre mesme, super violaiione
carceris et ju r a m e n ti. C ependant l’université et c h a p p itre de L ouvain ne
le recognoissent p o u r chancellier ou d o ien ; les aultres Rme*, vous suffra* Los d eu x b e a u x -frè re s d e M orillon é t a ie n t : 1» D id ie r V an T ’S e s tie h , p ro fe s se u r à l ’U n iv e rsité d e
L o u v a in , né le 2 0 o c to b re 1 5 5 1 , m o r t le !) m ai 1 5 8 5 , ép o u x d e M a rie, d ite M a rg u erite M orillo n (v o ir
sa n o tic e , t . I , p. 2 7 4 ) ; 2» J é rô m e V an W in g lie , p r o c u re u r à L o u v a in , m e m b re de l'a d m in is tra tio n
co m m u n a le d e c e tte v ille. Il a v a it é p o u sé M arie M orillon.
2 V o ir p lu s h a u t, p . 1 8 0 , ce q u e n o u s y d iso n s d e ce p e rso n n a g e .
* G u illau m e D am as d e L y n d e n , év ê q u e de. R u re m o n d e de 15G2 à 1 5 8 8 .
‘ L a u re n t M e ts, év êq u e d e B ois-le-D uc de 1 5 6 9 à 1 5 8 0 .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
1 8 !)
gantz, o n t pitié de luy, et m esmes Mr d ’Anvers
qui au com m e n ce m e n t
avoit esté si véhém ent, ju s q u e à me v e n ir tro u v e r par de u x fois chéans,
a (fin qu e je feisse p ro céder le p ro m o te u r contre ledict Molinæus, lequel
n’est gu e rre diligent à p o u rsu iv re ; et de nostre costel, il n ’y at p o u rq u o y se
hasler, puis q u ’il d e m e u re s u s p e n d u de ses estatz, et q u e son frère le c o n seillier le retient à G a n d et le vo u ld ro it se rre r en u n g m onastère; mais il
n’y veult estre. Je ne sçay s’il aurat escript à R om e p o u r avoir absolution
s u r ce q u e j ’ay escript passé q u e lq u e tem ps à vostre solliciteur W illet; et
j ’espère q u e si Vostre lllnie Sgrie luy escript p o u r aultres choses, elle sera
servie de le luy ram e n te v o ir et d o n n e r une recharge.
Q uelque brav e q u e l’a b b é de Ste-G e rtr u d e * soit, s’il ne chem ine droit, il
se trouvera relevé. Q u a n t a u x abbéz de P ré m o n stré , ilz sont exem ptz, mais
ilz se p o lro ie n t bien tan t oblier que la C o u rt s’en mesleroit. J e suis seur
q u e les abb é z de B r a b a n t ne sont g uerre en grâce de Son Excellence, et je
dresse u n e response s u r le u r requeste contre le sém inaire, q u e j ’espère
sera trouvé relevante, et q u e p a rv ie n d ro n s à nostre in te n tio n ; et at Mr de
St-Bavon gousté les m oiens et arg u m e n tz desquels je use. Les évesques ont
la précédence e n tre les abbez aux Estatz, et celluy de B ois-le-D uc se porte
v irile m en t; m ais ledict Sr d’Anvers, estant v ie u lx e t pusillanim e, ne d e m a n d e
q u e paix et repos. Avec le tem ps, lesdicts abbez se feront tant cognoistre,
q u e l’on a u ra t m ille u r m archiet d ’eulx. Hz e n te n d e n t mal leurs affaires, et
c o n sid è ren t pe u le d a n g ie r auquel ilz sont, si Sa Majesté n ’est servie \
L’a b b é de S‘-A d rie n * n ’at encores resp o n d u à m on d e rn ie r escript. d o n t
je l’ay faict som m er, et at re sp o n d u q u ’il y furnira de d a n s de u x jo u rs . Je
v e rra y ce q u ’il d ira t, mais je pense avoir si bien dé d u ic t sa prodigalité,
qu e si l’on ne le veult p o rte r m anifestem ent en sa malice, il debvra estre
1 F ra n ç o is S o n n iu s , é v ê q u e d ’A n v e rs d e 1570 à 1 8 7 6 .
* J e a n V alid er L in d c n , a b b é d e S te -G e rlru d e , à L o tiv a in , g ru n d p a rtis a n d u p rin c e d ’O ra n g c . V oir
le t. IV , p . 1 5 2 .
3
L es m e m b re s d e l’é ta t e c c le s ia s tiq u e , d e m êm e q u e ceu x des a u tr e s é ta ts de B ra b a n t, fa isa ie n t de
l'o p p o s itio n a u x ex ig en ces d u g o u v e r n e u r esp ag n o l. V o ir la Correspondance de P hilippe I I , t. I I I , p. 1 5 0 .
* S im o n d e W a rlu s c l o ccu p a le siège a b b a tia l d e S t-A d rie n à G ra m m o n t d e 1 5 6 0 à 1 5 8 3 . V oir
S ande rvs , l'Iandria illu slra ta , t. I I I , p . 175. D ès 1 5 7 2 M orillon a v a it d es d ém êlés av e c ce p ré la t, q ui
a im a it le g ra n d m o n d e , le lu x e e t les d ép en ses. Il v e n d it des b ie n s e t d es o b je ts d ’a r t a p p a r te n a n t à
son m on istère. V o ir t . IV, p. 2 6 7 , e t
de
P or te mo .\ t , Histoire de G ram m ont, t. I I , p . 2 2 2 .
190
CORRESPONDANCE
renvoié. Quoi q u ’il en adviegne, je suivray vostre advis et parleray avec la
prem ière com m odité à Son Excellence en la m esm c forme qu e Vtre Sgrie
m ’escript; et avec ce nous a u ro n s satisfaict vers Dieu et le m onde, et rejecterons p a r ce boult la faulte s u r le doz de ceulx q u e la font.
Je suis joieulx q u e Vtre lllme Sgrie at a p p ro u v é la résignation qu e j ’ay
adm is de la p ré b e n d e de vostre suffragant, lequel je lesse soigner q u a n t à
sa pension, luy aianl p réd it le dangier, u s a n t de protest qu e je n ’en v o u loie o u y r les plainctifz cy après, s’il y at faulte de paiem ent ou d ’asscurance.
Mr Regnault, m aistre des cérémonies de vostre église de Malines, at esté
h e u reux d ’estre p ourveu devant le trespas de Mr le R n'e d ’Arras, à qui Dieu
face paix. J ’ay enchargé a u d ic t Mr R egnault de c hoisir quelc’un qui soit
p o u r luy succéder.
J ’espère qu e la cité de Malines recouvrera son exem ption du tonlieu.
E ncores n’est le m agistrat dressé, d o n t Rio at charge, qui avec aulcuns de
ceulx qui sont esté du m auvais g o u vernem ent, est après p o u r y rem ectre
les m esm es; ce qu e s’il se faict, tout de m o re ra en confusion com m e p a ravant. Il fault redresser le dom aine de la ville; q u e ceulx qu e l’o n t m anié
et m an ie ro n t cy après en re n d e n t c om pte devant com m issaires de Sa Majesté.
L ’on y trouvera de la m auvaise versalion, d o n t j ’ay inform é Mr de S‘-B avon,
qui vcult q u e je soie p rése n t au r a p p o r t q u e luy fera del R io, auquel Son
Excellence d o n n e p resse,com m e m ’escript Mr d ’Assonville, et q u e ll e entend
q u e tout me soit c o m m u n ic q u é , et q u e je d o n n e m on advis, com m e je feray
p o u r le plus grand proulïit de la ville, que at esté trop mal gouvernée.
L’abbesse de Forés * s’est faict quicte de Madame Haller [quelque im p o r­
tu n e elle luy soit esté], s u r l’e x p édient q u e sa fille estoit p a r tro p eaigée
p o u r estre receue dans son m onastère, et q u e à ceste causes, les religieuses
ne le consentiroient ja m a is , sans voulloir e n tr e r en contention de la
noblesse, p o u r non irrite r ladicte d a m e , puis q u e l’eaige luy donnoit
assez de pied p o u r persister en la n é g a tiv e; l’on ne m ’at rien dit depuis.
J ’ay c o m m u n ic q u é au d o c te u r E lberlus * ce q u e Vtre Sgrie m ’at escript
to u c h a n t son filz; et il est d ’avis de le suivre, et m ercie Vtre !llme Sgrie très
1 F ra n ç o ise de la D o u v e , ab b e sse d u m o n a stè re de F n re st, p rè s d e B ru x e lle s , d e JB 60 à 1S 85.
* E lb e rtu s I.co m m is, p ro fe s se u r à l’U n iv e rsité d e L o u v a in . V o ir sa n o tice, 1 .1 , p. 4 7 , n o te I .
DU CARDINAL D E GRANVELLE.
h u m b le m e n t tant de peine q u ’elle a prin s p o u r le re c o m m a n d e r à Sa Saincteté et au d a ta ire , a im a n t m ieulx veoir son filz c o m p é ta m m e n t pourveu,
qu e de le veoir eslevé en gloire.
Il me desplait q u e H opperus, par son indiscrétion et a m bition, faict si
g ra n d mal au pays, qu e eult désià oblié les nouvelles o rd o n n an c e s si l’on
h e u t lessé faire au P résident, qui s’en tro u v e ra en g ra n d traveil.
Mr C happuis 1 re to u rn e ce j o u r d 'h u y vers B ourgongne; car l’on ne
veult to u c h e r son affaire ju s q u e Mr Blasere * a u ra i inform é s u r trois ou
q u a tre p o in ctz ; et iceulx achevéz, il est chargé d ’envoier le tout p a r deçà,
p o u r la b o n n e envie q u e l’on at de lever la suspension et reinectre le diet
C ha p p u is en son e s tâ t; qui ne se polrat p la in d re de m o y , q u e je ne luy
aye faict loulte adsislence à m oy possible; d o n t il m a t mercié, et dit faire
bon r a p p o r t à Vtre Illme Sgric.
M o l5 a trouvé façon de faire acheter les bois de son creu [q u e Ton avoit
v e n d u ] p a r m ain interposite : de sorte q u ’il y en at esté peu a b b a tu , et il
espère a voir qu icta n ce du prez. Madle H adrienne sa sœ ur, d o ib t es Ire
encores p a r icy; je ne sçay si elle est avec m ad a m e d ’A rem berghe.
Si nous polrions avoir u n e ferme paix, j ’espéreroie q u e la religion seroit
bien tost reflorissante en B ra b a n t et en F la n d re s et aultres pays de Sa
Majesté; car c eulx q u e y re to u rn en t ne font pas si b o n n e relation des sec­
taires d’A llem aigne et d ’A ngleterre, com m e a ulcuns s’im aginoient. J e
c raindz plus (’Hollande et Zéelande, où l’hérésie est m erveilleusem ent
plantée et enracinée.
Certes Mrs vous nepveurs de C hasteau-Roilliau 4 et d ’Achey 5 sont des
p a r a g o n s 6; et q u a n t au p rem ier, il m érite d ’estre m ieulx q u e à Malines;
mais s’il ne p a rv ie n t où le désire veoir, ce lu y sera degré p o u r avoir
m ieulx.
Mr Viron envoie ses com ptes; je ne sçay s’il a u ra t resp o n d u s u r le c o n ­
1 Je u n C h a p p u is ou C h a p u is, c o n s e ille r fiscal a u P a rle m e n t de D ole du 1 5 6 5 à 1 5 7 1, m o rt en 1 5 8 4 .
V o ir sa n o tice, t. IV , p . 108, n o te 1.
1 J e a n d e B lac scrc, c o n s e ille r ail G ra n d C onseil de M alines. V o ir sa n o tic e , t. I, p. 121.
* J e a n d e M o l, d it le B orgne. V o ir p lu s h a u t, p . 149.
* P ie r re M ouchet, p ro to n o ta ire , Sr de C h â te a u -Iio u illn u d . V o ir t. I, p . 1 5 5 .
* lîn d es fils d u b e a u - f rè r e d u C a rd in a l. V oir t. Il, p p . 5 0 9 , 5 9 1 .
* Paragons, m o d èles, ex em p les.
192
CORR ESP ON DA NC E
tenu en la balle, q u e je n’ay failli luy ra m e n te v o ir ' ; il devient vieulx et
o b liv ieu x ; je suis jo ie u lx q u ’elle est arrivée entière.
I\lsr nous sûm es tant déservi de gens, q u e q u a n t ce seroit s u r ma vie. je
ne sçauroie ren c o n tre r chose q u e fut digne p o u r in stituer Mr vostre n e p v e u r ad ce q u e j ’ay pensé plus d ’un e fois, et y reg a rderay p o u r tous moiens
possibles.
Ceulx d ’Artois ont accordé la q u o te à paier p r o m p te m e n t; car ilz ont
bien am enaigé, et p o u r le centiesm e i°l m ille florins un e fois; p a r ce m oien
polrat l’on licenlier n m chevaulx du d u c Erich, et s u r ce e s t - o n , et aussi les
Suisses. Ce q u e Dieu d o in l.
P . S. Mr d e C h a m p a ig n e y m’escript q u e le Sr Don F e rn an d e at les fiebvres,
d o n t je suis fort m a r r i; il le fault tire r de là, ou il s ’en trouvera mal.
LV.
L E C A R D IN A L D E G R A N V E L L E AU P R IE U R D E B E L L E -F O N T A IN E
(B ibliothèque de Besançon. — M émoires de G ranvelle, t. I , fol. 35K.)
N iip lc s, 19 août. 1 57 4 .
M onsieur m on cousin. J ’ay receu voz lettres du vingt et uniesm e de
juillet, et m ’at esté g ran d c o n te n te m e n t de veoir celles q u e m ’a escript
m o n cousin M onsieur de M ontbarrey *, vostre frère, me d o n n a n t a d v e rtissem ent de son arrivée p a r delà avec santé et entière convalescence, d o n t
j e loue Dieu.
Il y at q u e lq u e tem ps q u e je n ’ay nouvelles de Monsr de C ham paigney,
m on frère, q u e j ’im p u te à l’occupation q u ’il a en Hollande, où l’on l’a
envoyé p o u r les affaires q u e vous dictes. Monsr le C om m en d a d o r M ayor
1 Ram entevoir} r a p p e le r à la m ém o ire .
* Ja c q u e s de S t-M a u ris ou M aurice, p r ie u r d e B e llefo n tain e. V o ir t. 11. p. 5 8 9 .
* Je a n de S t-M au ris, Sr de M o n t-B a rre y , a tta c h é à l’a rm é e . V o ir t. IV , p . 4 4 7 .
195
DU CARDINAL D E GRANVELLE.
d é m o n s tre g ra n d c o n te n tem e n t d e luy, d o n t je reçois plésir. J e m e d o u b le
q u e tous ne l’ont tel; mais je crains q u e ce q u ’il parle quelquefois et escril
tro p lib re m e n t p o u r h o m m e de son eage ne luy face d o m m a ig e ; bien m ’asse u ré -je q u ’il est m chu de b o n n e intention.
J e c raindz toujours l’assem blée générale des Estatz des Pays-d’Em bas,
p o u r les causes q u e je vous ay escrit et p o u r aultres. L’on verra ce q u ’en
succé d e ra; mais il seroit tem ps que nous nous trouvissions en plus de
repos, et q u ’on p rin s t a u ltre chem in, p u isq u e l’expérience de ta n t d ’ann é es
at m o nstré qu e celluy q u ’on a tenu ju s q u e s à oyres n ’est à p r o p o s ; et vous
vous souvenez de ce q u e j ’en ay pièçà dit. J e co n tin u e de faire les m esmes
offices p o u r m on appaisem enl. et afin qu e j’aye ceste satisfaction d’avoir
faict m on d e b v o ir bien, me seroit-ce plus de c o n ta n te m e n t q u ’ilz p r o f i ­
tassent
Je ne d ira y d a v a n ta ig e q u a n t au besoigné d e Monsr le trésorier de Salins 1
devers Messieurs des Lighes, sinon q u ’il me sem ble q u ’il a à son accoustu m é faict très bon devoir. Reste que Sa Majesté p ren n e résolution de ce
q u ’elle v o u ld ra s’y face plus avant. Et q u a n t a la levée des Suisses, il y a
plus de deux ans q u e j ’ay resp o n d u à Monsr le C o m m e n d a d o r M ayor q u ’il
ne convenoit s’en se rv ir p o u r les Pays-d’Em bas, luy faisant e n te n d r e les
raisons qu e à ce me m ouvoient, et les considérations q u e c y-devant l'on y
avoit te n u ; mais p e u lt-estre l’avoit-il obiïé, ou q u ’on l’avoit désespéré de
p o u v o ir avoir A llem ands p o u r les opposer au conte Lodovic. Enfin, je me
serove contenté de p re n d re aultres gens, et n ’y en avoit faulte au pays.
Vous aurez, avant q u e ceste arrive en voz m ains, nouvelles com m e je
tiens, q u e le Roy T rè s-C h re stien sera près de L yon. Il n’y a p o in ct de mal
q u e nostre pays soit déchargé de son passaige. L’on v erra de quel pied il
c hem inera en son royaulm e. L’on tient q u ’il pense r e te n ir celluy de
Poloigne, jo in c te m e n t avec celluy de F ra n c e ; mais il est du to u t hors de
propos, se tre u v a n t les P olaques fort em peschez de ce q u ’ilz d o ib v en t faire
p o u r la nouvelle élection, s u r q u o y ils sont tom bez en g ra n d s débats*
1 B o n n e t Ja c q u c m e t, Sr de N a u c ro y . V o ir sa n o te , t. III, p. 2 1 1 .
*
A p e in e c o u ro n n é ro i de P o lo g n e (2 4 fé v rie r 1 5 7 4 ), H e n ri d e V alo is s 'é c h a p p a de son ro y a u m e
le 18 ju in , p asse p a r l ’A u tric lie e t l’Ita lie et r e n tr e en F ra n c e le 15 s e p te m b re . A p rè s a v o ir a tte n d u
p e n d a n t 13 m ois le r e to u r d e le u r ro i, les P o lo n ais d é c la r è r e n t (1 5 ju il l e t 1 5 7 5 ) le trô n e v a c a n t
p e n d a n t la d iè te d e S teczisk a. V o ir
C
h a r r iè r e
,
Négociations de la France dans le Levant , t. III,
p p . 4 9 7 e t su iv .
T
ome
V.
25
194
CORRESPONDANCE
Hz del n o i e n t faire en ce mois d ’aousl q u e lq u e assem blée d'Estals p o u r
conférer ensem ble, et jà se com m encent faire les brigues et se m o u c q u e n t
au c u n s de ce q u e ledit Roy T rès-C hrestien pense re te n ir le royaulm e, y
pouvoir e n voyer q u e lq u e lieutenant ou régenl, ou d é p u te r avec ce tittre
q uelc’u n g du pays.
J ’entends q u e le Sr de Foix 1 a pensé p e rsu a d e r à Sa Saincteté q u ’elle se
voulust em p e sc h er à p r o c u r e r envers les Polaques le déseing du ro y de
F r a n c e ; ce q u e j ’espère elle ne fera; mais bien pensé-je q u ’elle luy com ­
plaira à c o n sentir à la vendition d ’aucunes rentes d ’Eglise, à coleur q u e se
soit p o u r s’en servir co n tre les Huguenotz. Dieu d o in t q u ’on n’en use de la
mesm e façon qu e cy-devant l’on a faict avec peu de profiit de la religion.
Mais le d u c d ’Arschot serai, com m e je pense, passé o ultre p o u r aller
tro u v e r le Roy Très-Chrestien. J e désire q u e les noslres luy a y e n t faict to u t
bo n recueil; car il est personnaige q u e s’est tousiours m onstré affectionné
à nous aultres com m e aussi feu Monsr le Duc son père.
Le se igneur D on J e h a n est icy dois sam bedy dernier. 11 faict son com pte
de p a rtir in c o n tin a n t p o u r aller vers T ra p a n a afin de d o n n e r toute la
faveur q u ’il p o u rra à nos gens qui sont à la Golelte et au fort de T h u n e s ,
et travailler les T u rc z q u i les o n t assiégé et faict g ran d progrès avec leurs
tran ch ées en peu de te m p s ; mais enfin il fault venir, q u e lq u e b a ttre q u ’ilz
fassent lesdictes deu x places à l’assault, où j ’espère qu e les nostres re n d r o n t
bon com pte d ’eulx, et qu e ledit se ig n e u r Don J e h a n ne fauldra de se servir
des occasions qui se p o u r ro n t présenter, lesquelles se p re n e n t m ieulx de
près que de loing; et p o u r ta n t faict sagem ent de s’a p p ro c h e r. Les apprestes
sont grandes p o u r s’en servir en to u t ce qu e polroit s u rv e n ir; et j ’espère
q u e Dieu nous a y dera, auquel je p rie q u ’il, M onsieur m on cousin, vous
do in t l’accom plissem ent de voz désirz.
1 P a u l de P o ix , c o n s e ille r a u P a rle m e n t de P a ris e t d e p u is a rc h e v ê q u e d e T o u l o u s c . l t é ta it fils
d e Je a n , co m te d e C a rm a in , e t d e M adeleine C a u p èn c, n a q u it e n 1 8 2 8 e t m o u r u t à R om e le 2!) m ai
1 5 8 4 . L o rs q u ’il é ta it e n c o re m a g istra t, il p e n c h a it v e rs la to lé ra n c e en m a tiè re de re lig io n . A p rès a v o ir
re m p li p lu s ie u rs m issio n s d ip lo m a tiq u e s, il fut n o m m é a rc h e v ê q u e d e T o u lo u s e en 1 8 7 7 .
DU CARDINAL DE GR AN VELLE.
m
LVI.
LE CA RD IN A L DE GRANVELLE AU DUC ü ’ u R B IN .
(A rchives d ’U rbino. — CI. I, l)iv. G. liasse, cxxi.)
N a p le s , 2 9 a o û t lt>74.
La de V. Eccîa d e ’ ix di questo ho havuto, et ho ricevuto a inollo favore
I haverm i voluto da re cossi m in u ta m e n te conto del suo viaggio, delli oflitii
fatti col Re C h ristian “0 1 et di quello ha ricavato délia sua m ente con li saggi
olfitii fatti da lei in benefitio publico per p ro c u ra re la q u iete universale, et
il rem edio de i d isordini. Io p e r me credo non potersi giudicare quel che
rlovem o s p e ra re o tem ere di qu e sto nuovo Re, nè q uale sarà il suo governo,
sin tanto che e n tra to in F r a n c ia et incoronato che sia si veda p e r tre o
q u a ttro mesi che conteglio usarà, et q uale sarà il m aneggio de i negotii.
Di che nascerà il puotersi conoscere li h u m o ri delli contenti et offesi di
questa novità. E t prego V. Eccza che p e r c o n tin u a re a favorirm i, hav e n d o
bisogno d ’essere avvertito per trovarm i lontano sia servita farmi p a rte di
q u a n to p iù ne in te n d e rà , che Io terrô a sin g u la r obligo p e r servirlo in
q u a n to potrô con t u tto il c u o r e a V. Eccza, le cui inani bascio cordialm ente.
LVI.
ANALYSE.
G r a n v elle a reçu la lettre du 9 d e c e m o is, par la q u elle il a appris tous les détails du
vo ya ge d u D u c et les bon s offices q u ’il a ren du s au roi d e F ra n ce, ainsi q u e l’influence
1 E n ce m o m e n t H e n ri III p a s s a it p a r l'Ita lie .
I;)(>
COHRESPON DANCE
qu'il a e x e rcée sur l'esprit de ce m onarque dans le but d ’ètre utile à la c h o se pub liqu e
et à procurer la paix un iverselle. Le Cardinal pense q u ’il n ’est en co re possible de ju g er
en ee m o m e n t de ce q u ’il faut esp ér er ou craindre du nouveau Roi ni de son g o u v e rn e­
m en t. Lorsqu’il sera entré en France el a p rès son c o u ro n n e m en t, on verra au bout de
tro's ou quatre m ois q uelle cond u ite il tiendra et la direction q u ’il im prim era aux
air»ires. On pourra ainsi connaître les sen tim ents
de
ceu x qui
«ont con ten ls ou
m éco n te n ts de la n o uveauté. Ensuite il invite le D u c à co n tin u er de lui faire part de
ee q u ’il jugera con ven able de lui faire connaître et de (oui q u ’il apprendra encore, vu
son éloign em ent. Il en sera p articulièrem ent o b lig é au D u c.
LU.
LE P R É V Ô T M OR ILLON A U CARDINAL DE GRANVEI.LE.
(RihliothiM|iie «le Besançon. — L e ttr e s (le d i v e r s , t. I l , fol. 2 74 à 277 .)
.................. .. 5 s e p t e m b r e
lï> 7i.
Ce que j ’avoie d e rn iè re m e n t a p p rin s à Anvers estoil le général m alcon­
te n te m e n t q u e l’on at du C o m m e n d a d o r iWaior, et plus q u e l’on n ’ai heu du
D uc d ’Albe, qu e l’on tenoit p o u r tel q u ’il esloit, et qu e au lieu de la g ran d e
a llc n te q u e l’o n a v o it de cestuy-cy, l’on n’y treuve rien m ieulx q u ’en l’an lire,
te n a n t ung m esm e desseing d ’o p p r im e r le pays, e m p lo i« ' les estrangiers et
e sloingner la noblesse et anciens serviteurs. El l’on d it q u ’il al eslé dit au
C o m m en d a d o r ainsi q u ’il estoil au Conseil d’Estat, q u ’il est plus hay que
n ’at esté le D u c ; et lient-on q u ’il s'est retiré à Anvers p o u r avoir le chasteau
à doz, a iant heu craincle q u e les Estalz m eclroient la m ain s u r luy, s’cslant
logé au cloislre de S a in ct—Michiel. p o u r avoir plus seure retraicle p a r caue
et p a r terre.
J e fuz esbahi d ’y veoir troys salles pleines de ceulx qu e d e m a ndoient
audience, tan t des Estalz de plusieurs pays qu e capitaines bien Tachez q u ’il
n ’y avoit accès; c a r les huissiers disoient h a u lt et cler à ceulx q u e d e m a n ­
d o ien t entrée, q u ’ilz ne p o v o ie n t et q u ’il leu r estoit deffendu doibs le j o u r
DU CARDINAL D E GR AN VEL LE .
précédent q u e I on avoit tenu les portes serréez à lous, s a u f à Roda, p o u r ce
que ledit C om m en d a d o r escripvoit à Sa Majesté p a r u n g paige; de sorte
q u e l’on d it m ain te n a n t p o u r ung proverbe que les paiges sont du Conseil;
et dep e sc h a n t le cou rrier, luy fut e x p ressém en t deffendu de ne [»rendre
lettres d a u llr e s , qui qu e ce fut. El l’on dit q u ’il en at receu une d u Roy,
sans plus, dont les gens de bien font mal leur proullit, p re n d a n tz opinion
q u e l’on veult cinpescher q u e la vérité ne viègne en lum ière. A ulcuns dient
q u e le C o inm endador Maior n’at lieu lettres du R o y despuis d e u x mois
Hz y esloient deux g enlilhom m es de l’A rc liid u c, qui avoient escript à
Scliareinberger, com m e avoit aussi faict le D uc de Clèves, p o u r leur p ro ­
c u re r briefve a udience q u ’il 11 avoit sceu o b te n ir le j o u r p récéd en t p o u r les
causes susdicles, d o n t il se c o m plaingnit à m oy, et q u ’il avoit lionle q u e les
deu x gentilliom m es veissent le peu de crédit q u ’il avoit. Et p o u r se c o u v rir
p riâ t 1 h uissier le lesser e n tr e r en une avant-cham bre, ce q u ’il ne feit
volunliers, et je oys reg re tte r à l’huissier qu e l’on refusoit a udience à ceulx
des hslatz et à ta n t de gens de bien, et q u ’il seroit m ieulx de la d o n n e r que
lanl escripre, qu e se d e b v ro it comm ecti e aux secrétaires
L orsque le C o m m en d a d o r sortit, je luy parlay selon q u e Voslre IIlm*
Sgric a u ra t entendu" p ar mes précédentes, et S c h a re m b e rg e r a m m c n a les
d eu x g enlilhom m es envoiez avec lettres de leur m aistre, ausquelz l’on tint
c o u rt propos, les rem eclant à une aultre fois, q u ’il esloit désjà la rd t et
environ midi, p o u r o u y r messe. Touttefois q u o y qu e ledit C o m m en d a d o r
sceul faire, il fut arre slé plus de dem ie he u re p a r les pou rsu iv a n tz , tant des
Eslalz q u e capitaines de tn a n d a n s estre licencié ou paie ; et il saulle au x
nues q u a n t l’on luy d e m a n d e a rg e n t, d isa n t qu e les Estalz ne luy en
veuillent d o n n e r.
Toultesfois ceulx de F landres, ad ce qu e m ’at d it Assonleville. offrent
trois m illions p o u r leur cotte et v m c mil florins p o u r le centiesm e, affin de
' La Correspondance de Philippe I I n 'in d iq u e p lu s de le ttre d u Roi à R e q u esen s à d a te r d u 19 a o û t
j u s q u ’au S se p te m b re s u iv a n t, e t d a n s u n e le ttre du G ra n d C o m m a n d e u r à P h ilip p e I I , d u 16 s e p te m b re ,
il accu se la ré c e p tio n d e six le ttre s du 9 au 18 ao û t. Il les d é s ira it b e a u c o u p , d is a it-il, c a r d e p u is tro is
m ois il n ’en a v a it p lu s reçu .
‘ Kn é c riv a n t si so u v e n t au Roi «les le ttre s trè s d é ta illé e s , il sa tis fit a u d é s ir de so n m a ître , q u i se
p la ig n a it d u laco n ism e du d u c d ’A lbe. V oir, à ce s u je t, les pages v in et ix de la P ré fa c e a u tom e III de
la Correspondance de P hilippe II.
198
CORRE SPOND ANC E
non estre plus recherchez ; ceulx de B ra b a n t offrent aultres trois millions
et to u t com ptant. Ceulx d ’Artois et de H a y n n a u lt offrent chascun nu® mille
florins, et i c l mille p o u r le centiesme, tout argent c om ptant, en hostant à
jam a is le x e et x x e 1 avec la C ham bre des tro u b le s , et q u ’ilz puissent
m a n ie r les deniers ou avoir leurs com m issaires présentz à la d istribution,
q u e l’on entrem ecte ceulx d u pays au x charges, et q u e l ’on mecte o rd re
s u r les m angeries des gens de guerre, avec q uelques autres conditions,
desquelles l’on ne veult o u y r parler. E t touttefois les Estatz persistent,
aiantz ceulx de F la n d re s présenté une requeste assez aigre, disantz que
l’orgueil et a rrogance des Espaignolz les at p e rd u , aiant eulx délibéré de
ru in e r ces estatz, et assovir leu r a m bition et avarice, et q u e p a rta n t lesdits
de F la n d re s sont résoluz d ’envoier devers Sa Majesté et luy supplier
de g o u v e rn e r ces pays, ainsi q u ’il faict ceulx d ’Espaigue, q u ’est p a r ceulx
de la mesme nation, faisant so rtir les estrangiers de tous gouvernem entz
et entremise*. Ceulx de B ra b a n t, s u r l’advis q u e leur at d e m a n d é Son E x ce
1 L es d é ta ils c o n c e rn a n t les n ég o ciatio n s e n tr e R cquesciis e t les É ta ts so n t résu m é s d a n s u n e le ttre
d u 16 se p te m b re 1 5 7 4 a d re ss é e a u R oi. V o ir Correspondance de P hilippe I I , t. III, p p . 1 4 9 , 150.
2 II y a u n e c e rta in e e x a g é ra tio n d a n s ce ré c it. L es re p ré s e n ta tio n s d es É ta ts de F la n d re s, q u e n o u s
r e p ro d u is o n s ici d ’a p rè s le te x te fo u rn i p a r M. G illio d ts-V an S c v c rc n , le d é m o n tr e n t à l’é v id c n c c :
L es q u a tr e m e m b re s d u p a y s e t co n té de F la n d re s a y a n t esté a d m o n e ste z p a r d e u x le ttre s d e V o strc
E x cellen ce, afin q u ’ilz e u s s e n t à fa ire to u te d ilig e n c e à r a p p o r te r le u r ré so lu tio n e t acc o rd s u r la
p ro p o sitio n faictc p a r V o slre E xcellen ce à eu lx e t a u x E statz G é n é ra u lx assem b lés en la ville de
B ru x e lle s les v ije e t v iij' d e ju in g d e rn iè re m e n t p assé, no n o b s ta n t q u e s u r y ccllcs ilz o n t re sp o n d u
p a r le u r s le ttre s e t e x cu sé le p e u de d élaiz q u i re s te en c o ire s p o u r a p p o r te r iccllu y le u r a c c o rd , n 'o n t
v o u lu la iss e r d 'a b o n d a n t e t o u ltre le d e b v o ir s u s d it e n v o y e r k 'u r s d é p u te z à fin d e s u p p ly e r V o strc
E xcellen ce, à p r e n d r e d e ta n t d e m e ille u re p a r t le u rs ex c u se s e t e n te n d r e q u e l ’on n e cesse d e faire
to u t d e b v o ir p o ssib le v e rs les b o n s su b je e tz d e Sa M ajesté, à fin de les y in d u ire , m esm es en ceste
t a n t g ra n d e e t g é n é ra lle le u r p o v re té .
E t com m e y c e llc se va a u g m e n ta n t d e j o u r en j o u r , o n t b ie n v o u lu r e p ré s e n te r à V o strc E xcellen ce,
q u e s’il n ’y est p o u rv e u d e bo n el so u b d a in re m è d e , ilz se d o u b le n t g r a n d e m e n t q u e , ou les su b je elz
se tro u v e ro n t diflicilz à a c c o rd e r si g ra n d e s ay d es, ou q u a n d ilz le s a u r o n t ac c o rd é n 'a u r o n t m oyen d ’y
s a tis fa ire e t f u rn ir .
M esm em cn t e s la n tz a d v e r tiz d e l'in te n tio n d e V o slre E xcellence, d 'y e n v o y e r en g a rn iso n cin cq ou
s ix com p ag n y es d e s c h e v a u lx lé g ie rs, p a r lesq u elz ilz c ra ig n e n t, v eu la m a n iè re e t d isc ip lin e m ilita ire
q u ’ilz o n t com m ence à s u y v re , q u ’a u lie u d 'e s tre p a r eu lx g a rd é s o u su s te n u z com m e d es am y s, ilz n e
so y e n t gastés, m engés e t o u ltra g é s , d ’a u ta n t p lu s q u e V o stre E xcellen ce le u r a acc o rd é c e rta y n c
licen ce d ’e x ig e r s e rv ic e à c e u x q u i so n t fra n e q z , lib re s, b o n s e t leaulx su b je e tz d e Sa M ajesté, n v
o n q u e s acco stu m és à te lle s e t se m b la b le s c o n trib u tio n s , a u x q u e lle s (so u b z h u m b le c o rre c tio n ) ilz ne
191)
DU CARDINAL DE (JRANVELLE.
p o u r rap p a iser ces tro u b le s, m ectent en avant q u e Sa Majesté se veuille
d e b v ro y o n t c s trc a ssu b jc c tiz sa n s le u r p ré a la b le a c c o rd ou c o n s e n te m e n t. E sta n tz les c h a rg e s d u d it
s e rv itio n te lle s e t si g ra n d e s q u ’elles e x c é d e ro n t la m asse de l ’a y d c d e m a n d é e p a r V o stre E x cellen ce;
fa isa n t o u ltrc ce à c o n s id é re r q u e lesd ic le s co m p ag n y cs ne se c o n te n ta n t/, e n c o irc s d e sd ic ts se rv ic e s,
d e m a n d e n t e t c o n s tra in d e n t les g e n s , ta n t a u p lat p ay s q u ’ès villes, p a r c u lx m esm es e t p a r le u rs
g o u ja rs, c o u rtisa n s et se m b la b le le u r d é te s ta b le s u y e te le u r d o n n e r, sa n s a u lc u n p a y e m e n t, d u v in ,
p o u lle tz , p e rd riz, o liv es, c â p re s , o ra n g e s, su c res, c sp e c e ry e e t to u te s a u ltr e s se m b la b le s frian d ises
q u ’ilz p e u v e n t p e n s e r ou so n g e r p o u r tr a v a ille r le u rs p a tro n s, c o n s tra ig n a n tz à ch o ses in d ig n e s e t
y n s u p p o rta b lc s les b o n s su b je e tz e t g en s de bien e t d e c œ u r ; de p lu s q u e la c o n n iv e n c e d es cliiefz e t
y m p u n ité d e le u r s d élietz le u r a e c ro is t lad ictc licen ce, telle m e n t q u e p a r le u r h a u ll e t n a ïf o rg eu il
et o u llrc c u y d a n tc p ré s u m p tio n , e t d ’a u ltr c co slé p a r le m e s p riz e t d e s d a in g d o n t ils u se n t à r e n c o n tre
d es b o n s g en s e t lc a u lx su b je e tz de Sa M ajesté, ta n t d o u lx e t d e s b o n n a ire s , il se m b le q u 'ilz ta s c h e n t à
le u r d o n n e r occasion d u d iv e rtis se m e n t d es cœ u rs ta n t a ffe ctio n n é s à so n se rv ic e .
El co m m e le seu l re m è d e g isl en V o stre E xcellence, su p p ly c n t q u ’il plaise à iceile d e d é p o r te r le
p a y s d e F la n d re s des co m p ag n ies e s tra n g iè re s , y a y a n t d o u z e ou q u a to rz e en seig n es a c o m p liz e t cen t
ch cv n u lx a r q u e b u s ie r s p o u r la g a rd e d e la coste m a rin e e t p a y s de F la n d re s c o n tre u n e s o u b d a y n e
e m p r in s c ; ou b ien , si Son E x cellen ce e s t ré s o lu e y v o u lo ir m e ttre e t a d jo u s te r u n e ou d e u x co m ­
p a re s
à fin d ’e n tr e te n ir y cellcs en d isc ip lin e m ilita ire , p la isra les faire p a y e r de le u r so u ld e , et
C D nséquem m cnt fa ire p u n ir e x e m p la ire m e n t les d é lin q u a u tz et c e u lx q u i, en a y a n t la c h a rg e , se
a b s e n te n t d e le u rs co m p ag n y cs. E t o u ltrc d e d é p o r te r les su b je e tz d u to u t, de d o n n e r a u lc u n se rv ic e
en a rg e n t o u a u ltre m c n t, m e sm e m e n t c o n s id é ré q u e feu l’e m p e r e u r C h a rles, de tr è s h a u lte m ém o ire , a
p o u r ce r e g a r d , a u g m e n té les gaiges d e s g en s à ch ev al de q u a r a n te cin q p a ta r s p a r m ois, e t p a r to u t
ne le u rs e s t rie n d e u , au m oings lesd ie tz su b je clz ne le u r d o ib v e n t ny so n t a c ro stu m é s de p a y e r a u lc u n
se rv ic e d u te m p s d u d ic t feu E m p e re u r, n y d e Sa M ajesté. E n q u o y p la isra à V o stre E x cellen ce les
m a in te n ir. E l fa ire b ien .
A posttlle.
Sun E x cellen ce n ’en v o y e en F la n d re s ces c o m p ag n y cs d e s c h e v a u lx lé g ie rs ou re n fo rt d es gens de
g u e r r e p o u r la co m m o d ité de le u rs lo g em en lz, m ais p a r n écessité e t p o u r le se c o u rs d ’u n g te l b o n e t
fid rl p a y s à fin d e r é s is te r au x in c u rs io n s ou s u b ite s in v a sio n s d e l’e n n e m y p a r m e r, com m e les
e x e m p le s so n t fra isc h c s, v eu m e sm e s les a d v e rtiss e m e n tz q u i se d o n n e n t c o n tin u e lle m e n t d es forces
d i'sd ictz e n n e m is p a r m e r p o u r e m p rin se s s u r F la n d r e s ; e t p a r tel se c o u rs p e u v e n t v e o ir le so in g q u e
S a d icte E x cellen ce tie n t d e le u r d éfen cc e t p ro te c tio n , d o n t se d o ib v e n t b ien te n ir sa tisfa ie tz . E t q u a n t
mi s u r p lu s d e s p la in te s, l’e x tr ê m e p ré s e n te c h ie rté d e to u te s choses m o n s tre q u ’il e s t n é c e s a ire d o n n e r
au x so ld a tz q u e lq u e co m m o d ité de v iv re de le u r s o u ld e ; e t, à fin q u e n e fa c e n t ex cès, les m a g istra lz
d es lie u x c o m m e c tro n t de le u r p a r t c e rta in s co m m issaire s av ec c e u lx o rd o n n é s p o u r les gens d e g u e r re ,
q u i p r e n d r o n t re g a r d q u e n e so it e n r ie n s ex cédé le ta u x , et q u ’il n ’y a y t q u e lq u e ju s te ca u se de
p la in e tc . O r d o n n a n t a u s u r p lu s q u e le sd ie tz g en s d e g u e r re v iv e n t en to u te b o n n e d is c ip lin e m ilita ire ,
s a n s s 'a b s e n te r, n y fa ire fo u lle, n y m e n g e ry e s d e d e n s n y d e h o rs la ville, à p a y n e d e c h asto y ex em p la irre . E t si to st q u e la n é c e ssité c e s s e r a , fa ire m o d é r e r o u r e tire r c c s tc g a rn is o n e x tr a o rd in a ir e p o u r
ta n t p lu s s u p p o r te r ces s u p p lia n ts , com m e e n a esté e t est to u s io u rs so n d é s ir.
F a ic t en A n v e rs le x iij“" j o u r d ’A o u g st 4 574.
S o u b i signé :
B
erty
.
200
CORRESPONDANCE
e n c h e m in e r p a r deçà
et sinon q u ’elle envoie q u e lq u ’u n g du sang, et que
l’on entrem ecle ceulx du pays, et q u e s u rlo u t Sancho d’Avila soit destitué
p o u r s’eslre si mal c o n d u ic t en sa charge et appellé les altérez en Anvers,
ville si principale. Mais l’on leur respond s u r ce point q u ’il ne se peult faire
à cause que tout est p a rd o n n é , et q u e l’on ne p e u lt faulser le serm ent q u e
l’on at faict aux a m u tin e z ; s u r ce quoy j ’entendz q u ’il tint à peu qu e q u e lcun desdits Eslatz ne luy dit q u e Son E x 08 se dehvoit aussi souvenir du
se rm e n t q u ’il avoit faict au pays, et celluy de Sa Majesté. L ’on at fort mal
p rin s, en général, que au lieu de chastier ledit Sancho d ’Avila, selon qu e à
l’opinion de to u t le m onde, il at si bien m érite, Son E xce soit allé d isner
avec luy au chasteau, le xixe du mois passé, où il y avoit g ra n d festin, et
les plus belles dam es d ’Anvers, d e m e u ran tz les m ariz à la maison à l’o rd i­
naire. Il n’y avoit a u d it festin n u llu y de p a r deçà.
Ceulx des Estais de B ra b a n t se ressentent fort des propoz q u e Roda al
ten u à ceulx de B erghe s-o p -d en -Z o o m et à ceulx de S le en b e rg h e, qui
ont supplié d ’estre déchargé de leurs garnisons, que les destruisent et
m a n g e n t ju sq u e s a u x oz, offrant de les paier de leur deubt, po u rv eu que
l’on leur d o n n e octroy p o u r lever les deniers; ce q u e leur est refusé et aussi
à ceulx d ’Hoogstrate et de T u r n h o u t. S u r ce q u o y ledit Roda leur avoit
ré p o n d u q u ’ilz heussent de s’adresser a u x Estais de B ra b a n t qui estoient
cause de la r u y n e du pays, ne veuillant d o n n e r deniers, sinon avec condi­
tions p o u r b r id e r Sa Majesté, q u e ne le souffreroit. et qu e l’on veoit clèrem ent q u e ces Estatz avoient intelligence avec le prince d’Orenges, p uisqu ilz
deniiindoient le p a rte m e n t des Espaignolz. Ce q u e je n’ay jam ais e n te n d u
estre leur prétension, mais bien q u ’ilz ne seroient entrem iz a u x affaires et
g ouvernem enlz d u Pays. Ht dit-on que ledit Roda dict aux com m iz desdites
villes q u ’ilz regardassent devant eulx, alïîu q u ’il ne leur ad v in t le mesme
qu e à ceulx de Bois-le-D ucq, doibz où l’on a llendoit à toultes heures n o u ­
velles que la ville seroil pillé p a r les Allemandz et Espaignolz q u e y sont
en garnison, p a r faulte de p a ie m en t; et l’on dit que les Espaignolz incitent
les A llem andz ad ce faire, p o u r non estre seulz, et se vantent qu e s’ilz ne
*
L es E ta ls de B ra b a n t e n v o y è re n t eu E spagne T h ie r r i l l i l l , c h a rg é de fa ire d es re p ré s e n ta tio n s au
R oi. C elui-ci ne v o u lu t p as le re c e v o ir, sa c h a n t q u e les É ta ts n ’a v a ie n t reçu a u c u n e a u to ris a tio n d e la
p a r t de R eq u csen s. V o ir la Correspondance de P hilippe I I , t. III, p. 104.
DU CARDINAL DE GR AN VE LL E.
sont paies p o u r les trois mois expirés le d e rn ie r du passé, q u ’ilz sçaivent
bien où ilz ont lieu leur d e rn ie r paiem ent, et q u ’ilz sçaivent le chem in
p o u r y r e to u rn e r. Je n’ay poincl e n te n d u ju sq u e s ores q u e B o is-le-D uc a) l
heu m al; niais l’on ne se d o ib t e sb ah ir si faisant ainsi, les villes refusent
garnison [d ont li*dict Roda se plainct fortj. Car ilz se voient en d a n g e r de
c e u l x q u e les deb v ro ie n t conserver. Ceulx de Bruges sont estez som m és de
recepvoir qu e lq u e s coinpaignies, à peine d ’estre ten u rebelles, q u e sont les
term es desquelz usent les comm issaires espaignolz, q u a n t l’on ne faict
tout ce q u ’ilz veuillent. Ladicle ville at respondu q u ’ilz n ’avoient d o nné
cause p o u r eslre ré p u té rebelles, com m e ilz ne feroient encores, et q u ’ilz
avoient j u s q u ’à prése n t bien ga rd é leur ville com m e ilz feroient à l’advenir,
n’estanlz délibérés de recepvoir garnison p o u r estre saccaigés ou Iraiclés
com m e ceulx d ’Anvers. El toulles les villes sont en opinion q u e l’on y
veult in e c tre g e n s p o u r les s u p p é d il e r o u piller; et a ulcuns Espaignolz sont
esté si indiscrelz qu e de se vanter qu e l’on c o n tra in d ra it ceulx de Bruges
les recepvoir p o u r y b a s tir u n e citadelle, et p a r ce boull s’asseuror d ’eulx,
q u ’est p o u r les desgousler. Touttefois I on al changé de propoz d ’y envoier
garnison
L’on veult m eclre des chevaulx-légiers aux villes de Hay nnault, com m e
l’on at faict à Nivelle, G ra n d m o n t et Ninove, où ilz font beaulcop d’exac­
tion s; mais ceulx de H a y n n a u ll s’y opposent, et avons veu, passanlz par
Braine, q u e l’on y gard o il soigneusem ent les portes co n tre les Espaignolz,
q u e seroienl m ieulx en B ra b a n t puisque la g u e rre y esl, et au x frontières
de F landres et près d ’Anvers, où l’on at encores p rin s des batteaux depuis
qu e Son E xce y est.
Son Excellence est après p o u r lieentier les xv enseignes des Suisses,
re te n a n t sept enseignes tant seullem ent des m illeurs. Mais les capitaines
o n t resp o n d u q u ’ilz sonl tous venuz ensam ble, et veuillent tous p a rtir
ensam ble. Aussi pensoit-elle licenlier les reyters du du c E ric h , q u e s’ilz
ne sonl paies à leur term e, noz d e m o re ro n t s u r les bras encores six mois
p a r faulte d ’a rg e n t co m p ta n t, que les Estalz p ré se n te n t; mais l’on ne le
v e u lt accepter avec les conditions q u ’ilz y apposent.
lies Suisses sont parliz, et ceulx de D eventer et Zwoll ont resp o n d u
le paiem ent du du c E rich et de ses reyters, desquelz l’on est aussi p o u r
quicte.
T ome V.
36
CORRESPONDANCE
202
L ’on tient p o u r certain qu e l’électeur de Coloigne ' at adverti par lettres
Son E x ce, com m e bon am y et serv ite u r de Sa Majesté, qu e les Princes de
l’E m p ire se m alcontentent extre sm c m e n t d ’u n g n e si longue guerre, que
faict cesser les com m erces et traficques d ’e n tre eulx et ce Pays-B as; et que
si Sa Majesté n ’y pourveoit de bref, q u ’il y a u ra t g ran d e a lté ra tio n ; que
MM" de Mentz* et de Trêves avec le du c de Clèves, avec ceulx de Munster,
P a d e rb o rg n e et aultres éveschez s’en ressentent, et que le P alatin et aultres
p rinces séculiers p o u rsu iv e n t le rem ède, d o n t les trois Electeurs ecclésiasticques avec le duc de Clèves sont délibérés escripre à Sa Majesté,
offrant ledit de Coloigne toutte adresse p o u r s’entre m e c tre vers le P rin c e
d ’Orenges et faire tous bons offices à p r o c u re r une paix Q uoy q u ’il en soit,
l’on at envoie Monsr F o n c h en diligence vers l’Electeur de Coloigne 5, soubz
p rétexte d’aller visiter ses prévostez, mais q u e c’est p o u r so n d e r quelz
m oiens proposera ledit sieur de Coloigne. Il est de re to u r et parti p o u r
Anvers.
Aussi dit-l’on q u e l’E m p e re u r envoie u n g am b a ssa d eu r au Roy* po u r le
r e q u é r ir sérieusem ent d ’e n te n d re à la pacification de ses Estatz, affin q u e
les voisins ne se m eslent du je u , à couleur de faire rem ectre le com m erce.
E t le sindicq des Hanses est allé secrètem ent en Angleterre p o u r y traicler
qu e lq u e chose en conform ité de ce q u e dessus, aiant c harge de, à son
retour, parler de la p art des villes de la Hanse à Son E xce; q u e sont toultes
choses que me plaisent peu, p o u r ce qu e sera a n im e r le peuple et les Estatz
q u e préte n d en t estre convocquez en général p o u r conférer p a r ensam ble :
quod non expedit.
1 A u m ois d 'a o û t l’a rc h c v ê q u c de Cologne re ç u t le c o n s e ille r F o n c k , ch arg é, p a r o r d re d u g o u v e rn e u r
g é n é r a l, de s’e n te n d r e avec ce p r é la t a u s u je t d es m oyens à e m p lo y e r p o u r p acifier les P ays-B as. Le
C o m m a n d e u r v o u la it a b s o lu m e n t u n e e n te n te av ec le p rin c e d ’O ran g e. Il co m p ta it s u r to u t s u r le bon
r é s u lta t des n ég o ciatio n s e n ta m é e s avec l’é le c te u r de S axe. V o ir la Correspondance de P hilippe / / ,
t. III, p p . 110 e t 1 6 2 -1 6 3 .
1 M e n tz, M ayence.
* D an s les Appendices n o u s d o n n o n s l’itin é ra ir e d e F o n ck .
4
C et a m b a s sa d e u r é ta it R um pff. Voici ce q u e le G ra n d C o m m a n d e u r e n d it au Roi le 1er s e p te m ­
b r e 1S 74 : Le com te de M ontagudo lui é c rit q u e R u m p ff a lla it p a r t i r ; le R oi ju g e r a sa n s d o u te q u ’il d o it
b ie n le re c e v o ir. {Correspondance de P hilippe / / , t. III, p. 1 4 8 .) D an s u n e a u tr e le ttre d u 3 0 o c to b re ,
il d it q u e R u m p ff d o it ê tre a r riv é à M adrid, e t d o u te q u e le Roi p uisse p r e n d re u n e ré so lu tio n s u r i e
q u ’il lui p ro p o se ra , p u is q u 'il ig n o re lu i-m ê m e ce d o n t les reb elles se c o n te n te ro n t. ( /6 id ., p. 178.)
DU CARDINAL D E GR AN VELLE.
203
Gculx de B ra b a n t sont peu d’accord d ’e n tre e u ! x , e t ont prins diflîdence de Monsr Sonnius
p o u r ce q u ’il se tourve souvent du costel de
Son E xCe, les adm o n e slan iz de non estre réfraclaires; s u r ce q u e auicuns
des Abbez luy ont rep roché q u ’il se d o ib t sou v e n ir de son serm ent et
de b v o ir d ’estre père n o u rric ie r du povre peuple..
Il n’est à croire c om bien d’Espaignolz s’escartent jo u rn e lle m e n t, qu e sont
desvalisés su r les frontières. J ’en veidz v enir à Wons, q u a n t nous y allions,
huict q u e se disoienl m arcliandz P iedm ontés a y a n tz u n g Italien p o u r
conducteur.
L’on dit qu e Monsr de Guise en at levé hu ict com paignies, et depuis en
sont partiz plus de 300.
Le C o m m en d a d o r Maior at renvoie les députés de L ouvain p o u r r a p ­
p o rte r m illeure response du peuple, et si non q u ’il y pourv erra. C’est de
q u o y se plainct B erty d isa n t q u ’il n’a veu de sa vie ho m m e plus im p e rti­
nent qu e ce Seigneur, et q u ’il p e rd ra t tout, et qu e l’on v errat de q u o y avant
ung mois. Se m esm e dien t S c h a re m b erg e r et d ’Assonleville.
Ledit C o m m e n d a d o r n’est content d u présid e n t Viglius, d isa n t q u ’il en
ferat tousiours ce q u ’il voudrat. en d o n n a n t q u e lq u e olfice à qu e lc u n des
siens ou de ses serviteurs. Aussi se plainct Assonleville q u e ledit P ré sid e n t
com plaist et p e rm ect tout à Roda qui use d’auctorité a iant disposé de Testât
de lieutenant civil de Gand, à la requeste de Mad,l° R e i n g o t 3, qu e re n tre en
crédit, et at despesché Savallos l’o rd o n n an c e p o u r despescher les lettres que
Monsp de Sainct-Bavon at scellé, n o n o b s ta n t q u ’il désiroit a d v a n c h e r a udict
estât le filz de Wadlle Boisot*, qui le m érite p o u r estre docte, laborieulx, fort
h o m m e de bien et h um ble. Cecy n’est pas p o u r re p re n d re l’ancien pied, et
je veoidz qu e ceulx q u e sont à l’e n to u r de Son Ex 08 veuillent bien qu e l’on
saiche q u ’ilz o n t le cré d it et q u ’ilz en veuillent u s e r ; et Monsr Roda rend
peine p o u r a d v a n c h e r à la P résidence de F la n d re , le conseillier Pam ele \
1 E voque d 'A n v e rs e t fa isa n t p a rtie d e l'E ta t e c c lé s ia stiq u e de B ra b a n t.
* Je a n -B a p tis tc B e rty , se c ré ta ire d u C onseil p riv é e t d ’É ta t, m o rt e n 1 5 7 9 . V oir sa n o tice, t. I, p. fis.
5 V o ir p lu s h a u t , p. 2 4 .
4 P ro b a b le m e n t C a th e rin e B o iso t, fille de P ie r r e , q u i é p o u sa C h a rle s de T is n a c q . La no tice de
celui-ci se tro u v e t. I , p. 17.
5 G u illa u m e d e P a m e l, s u r le q u e l n o u s av o n s
d o n n é u n e n o te , t. IV , p. 2 4 6 , ne f u t n o m m é à
la p résid e n c e d u C onseil de F la n d r e q u ’à la m o rt de Je a n de B laescre, d éc é d é le S a v ril 1 S 8 5 . V o ir
CORRESPONDANCE
Mais Monsr de Sainct-Bavon at resp o n d u qu e l’on feroit to rt à Blasere, qui
at si lo nguem ent servi, et faict tan t de peine, q u e a u ltre ne luy doibt estre
préféré. J ’entendz que le despesche p a r lequel on e n v o io its a nom ination en
Espaigne, et despuis la duplicata, sont estez destroussés en F ra n ce avec
u n e despesche d ’im portance de Son Excellence q u e l’on ressent fort. Ledit
Blasere s’appreste p o u r p a rtir vers B ourgongne l, luy a iant ledict Roda
p rom is faire fu rn ir argent p o u r faire son voyaige; et luy at d o n n é
rap p a isem e n t s u r l’o rd o n n an c e q u ’il lient de se m ectre en c hem in avant
la tin du mois passé, souhz la peine deue à si g ran d e omission et
tard a n te .
Del Rio aspire à ladite P résidence; il at ob ten u co n tre d ’AssonlevilJe la
garde des Chartres de F landres*, encores q u ’il ne soit o rdiné du privé
Conseil. Ce fut le D uc d ’Albe qu e le luy d o n n a à son parlem ent.
D’Assonleville est en opinion q u e le Roy soit m alc o n te n t de la m u tin erie
d ’Anvers 3 p o u r ce q u e l’on est si em pesché de faire à croire q u e la ville y
at proflicté, p o u r avoir v e ndu beaucop de denrées à ceulx d’Espaigne; mais
cela ne confesse elle poinct, a iant d o n n é requeste qu e en six sepm aines ilz
o n t cousté à n o u r r ir aux bourgeois plus de 300 mille florins, p a r dessus
ta n t d’aborts de femmes grosses, et le m auvais traictem ent faict à tan t de
gens, avec u n g si g ra n d tort faict à Dieu, q u a n t l’on d ict messe en plein
m archiet. près du gibbet, clero reclamante et renitente.
Il n’y at a u lc u n espoir p o u r ré d u ire les villes d ’H oilande, aiantz d it ceulx
de Leiden q u e plustost m an g e ro n t-ilz leurs enffantz, ou se bru sle ro n t en
leurs maisons, que de se re n d re aux Espaignolz, q u i avoient d o n n é espoir
la n o tice de
p a rt.
P am el,
loc. cit.,
celle de B lae sere, t. I ,
p.
121,
et H oy.vck
van
P
apendrecht
,
I. Il,
I, p . 3 9 9 .
1 En q u a lité de co m m issa ire d u g o u v e rn e m e n t d e s P a y s-B a s, p rin c ip a le m e n t à l’effet d e v é rifie r
l’e x a c titu d e d es c h a rg e s p o rté e s c o n tre q u a tr e c o n se ille rs d u P a r le m e n t de D o le , s u s p e n d u s d e le u r s
fo n ctio n s déjà d e p u is tro is ou q u a tr e an s.
*
A la m o rt de H erm ès d e NVynghcne, d écéd é le 5 m a rs 1 574, L ouis D el Rio f u t nom m e p a r le ttre s
p a te n te s du 15 a v ril s u iv a n t, g a rd e d es c h a rte s d e F la n d r e . A ce tit r e il figure d a n s les co m p tes
j u s q u ’en 1 577. V oir
pp. xxxvn et
Ju le s
de
S '- G e n o is ,
Inventaire des chartes des comtes de Flandre, In tro d u c tio n ,
xxviii.
5 D an s u n e le ttre du 7 ju in 1 5 7 4 , le Roi d it à R c q u esen s q u e la m u tin e rie d es so ld a ts esp ag n o ls
lu i d o n n e to u te la p e in e e t le souci q u i se p e u t im ag in er. V o ir Correspondance de Philippe I I ,
t. I II, p . 9 2.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
205
de la re c o u v re r dedans trois ou q u a ttre jo u rs , selon leur accoustum é. Et
je veoidz à la relation de ceulx q u e viegnent de là, q u e PHollande et Zéelande persistent en leur o p in iâ tre té ; et la saison serai désorm ais p o u r eulx,
et fera force q u icte r les sièges de liom m ele et G o rc u m , où q u e l’on a faict
flotter l’eaue de sorte q u e le capitaine Ju lia n avec ses gens a t esté c o n tra in c t
se loger s u r la d icque Assonleville dit la délibération du C o m m en d a d o r
Maior estre de re tire r les Espaignolz de la Haye au mois p ro ch a in , y m ectant le feug, mesmes en la m aison du Roy, q u e seroit ung g ra n d dom m a ig e
et feroit un e g ra n d e altération, si nous mesmes nous destruisions ce qu e
l’e n n e m y at espargné et tenu en vénération, q u e seroit a u g m e n te r le m al­
c o n te n tem e n t q u e se veoidt p a rtout, q u e je n’heusse creu en Artois de la
noblesse, si je ne l’heusse veu et oy à ce d e rn ie r voiaige.
J ’entendz q u e A lexandre Gonzaga 1 dit ouvertem ent, q u e p a r cy-devant
le se ig n e u r Don F e r n a n d e Gonzaga 1 luy at dit : « Vous verrez, p o u r estre
» jeu sn e , ce que je ne puis veoir p o u r estre vieulx, qu e c y -a p rè s les Espai» gnolz vo u ld ro n t m ectre le pied su r la gorge de ceulx des Pays-B as, qui
» ne l’e n d u re r o n t et se p e rd r o n t plustost q u e de le souffrir, et lors les
» Espaignes ne d u r e r o n t guères. »
Le m arq u iz Vitelli, ny Mr de C ham paigney ne s o n t plus a p p e lé s a u Conseil
d ’Estat, et j ’ay noté que, à l’e n to u r de la m aison du d e rn ie r, l’on at logié
beaucop de ceulx d ’Espaigne qu e le hayssent à m ort. 11 a envoié depuis
nagaires u n g billet au C o m m en d a d o r Maior, insistant tousjours s u r son
congé
J e ne sçay s’il faict bien, me d o u b la n t q u e u n g j o u r il lui sera
donné, et en la sorte q u e je luy ay prédit. Il m ’at com pté q u ’il a dil, p a r
m an iè re de conlidence. à Roda que le C o m m en d a d o r estoit pis voulu q u e
ne fut jam a is le D uc d ’A lbe; q u e les ennem iz l’o n t en o pinion de plus fin et
de plus cauteleux q u e ne sortit jam ais d ’Espaigne, et qu e p a rta n t ilz ne se
1 A le x a n d re d e G o n z a g u e , co m te de N o v ellare?
* F e rd in a n d d e G o n zag u e. V o ir p lu s h a u t, p . 1 4 9 .
5 D a n s sa le ttre d u 1 0 o c to b r e , M orillon ré p o n d a it a u C a rd in a l : « J e m e su is b ie n a p p e rc c u e s tre
v é rita b le ce q u e V. I. S. d it d e M. d e C h a m p a g n e y , q u ’il n e p en se r ie n s m o in g s q u e à sa r e tra ic te ,
en c o re s q u ’il en face o u v e r te d é m o n s tr a tio n ....... e t p o lr o it e s tre q u 'il se tr e u v e ro it b ie n e s b a h i si l’o n
le p re g n o it a u m o t. » ( I b i d 5 1 6 .) A u s u r p l u s , d e C h a m p a g n e y , d ég o û té de to u t ce q u i se p a s s a it,
a v a it in sis té , les 2 8 m a rs e t les 2 0 a o û t 1 5 7 i, a u p rè s du Hoi p o u r o b te n ir son co n g é. V o ir Correspon­
dance de Philippe I I , t. III, p . 158.
CORRESPONDANCE
lieront jam ais ou luy ; liercem enl q u e les Estatz luy liègnent m oingz de
respect, véanlz qu e ses propres gens ne le luy tiègnent. J e luy respondis q u e
les trois poinctz estoient véritables, mais qu e je vouldroie q u ’il les heust
lessé dire à u n g a u ltre ; et il me dem a n d a si do n c je ne Irouvoie bon q u e luy
1 he u t dit. et je luy dis clèrem ent qu e non, et q u ’il ne peult estre qu e le
C o m m en d a d o r ne luy veuille à occasion de cecy g ra n d mal. Aussi q u a n t
il le vad veoir, il l’entretient, ad ce qu e Mr de C ham paigny luy mesmes
m ’at compté, de propoz longz de ses affaires particuliers et de publicorum
nikil. Aussi j ’ay bien noté u n e parole q u e dit l’au tre j o u r del Rio, présentz
Mr le Président, Micaut ' et m oy, que Sainct-A udegonde avoit faict de bien
m auvais ollices, les q u a ttre jo u rs q u ’il avoit esté relaxé, et q u e ce avoit esté
u n g m auvais conseil de le luy avoir perm is, q u e je tiens ledit del Rio avoir
e n te n d u d ’aultres qui c h e rc h e n t de d o n n e r le chat aux ja m b e s à Mr de
C ham paigney.
La jeu sn e D am e de H o o g s lra te ’ al faict ce q u e lle at peult p o u r retire r
m adam e de Horne, sa m ère, y envoiant gens exprès, alfin q u ’elle ne lessist
perdre l’occasion du p a rd o n , et elle y preslat l’oreille; mais com m e elle at
prins conseil du conte de N i e u n a e r 5, il sam ble q u ’elle n’y veult entendre.
J ’espère qu e le Sgr Don F e rn a n d e se p o rte m ieulx, aiant receu avec la
prosente lettre sienne, q u e ne faict plus m ention de sa maladie. On at g rand
espoir de la recouvrance de Leyden faulte de vivres; il y at advis q u ’ilz en
ont assez ju sq u e s les assiégeanlz seront c o n tra in tz desloger p a r les eaues
haultes et basses, et jà o n t-ilz perssé quelques dicques ; mais ce ne serat
rien, ne soit q u e q u e lq u e g ra n d e lem peste survienne.
l
es c om m issaires des vivres c o m m a n d e n t a u x villaiges de c o n trib u e r a u x
chevaulx-légiers foing, avoine et pailles p a r certaine q u a n tité chascun jo u r,
tant à l’e n to u r de ceste ville q u e p a r tout le B rabant, d o n t chascun m u rm u re ,
c;ir il n’est possible fu rn ir aux aydes el auxdictes chearges; et Dieu sçait les
larrecins q u e s’y font.
L’on est encores em pesché p o u r visiter les privilèges de ceulx de Mali nés
1 Nicolas M icault, d ip lo m a te , c o n s e ille r du C o n seil p riv é. V o ir sa n o tic e , t. IV, p. ô53.
1 E lé o n o re de M o n tm o ren cy . V oir sa n o tic e , t. IV , p . 8 2 .
5 A d o lp h e , co m te de N ie u w e n a a r e t d e M e u rs, q u i a v a it ép o u sé la v e u v e de P h ilip p e d e M o n tm o ­
r e n c y , com te de H o rn e s. V o ir t. IV, p . 5 3 5 .
207
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
q u e I on treuve fort adva n ta ig e u x p o u r e u l x , et j ’espère q u e rien n’en serat
hosté \
J ’e n te n d z q u e l’on veull rem eclre le pensionaire de Louvain au service
de la ville, q u e sera la ru y n e r , car il est m alitieux et m a lh e u re u x : donl je
m e ra p p o rte à tous les gens de bien de L ouvain, ecclésiastiques et sécu­
liers *. J ’en ay piéçà adverti le Sr R oda; je ne sçay s’il Pat oblié, mais je luy
d ira y et à son Excellence pro p re , que l’on les at forcom pté, et q u ’il ne co n ­
v ie n t; et je pense tro u v e r estolTe p o u r m’a tta ch e r a u d ic t pen sio n n a ire au
faict de la religion.
Ceulx de F la n d re s, Lisle, D ouay, q u ’esloient deputéz, sont renvoiéz Let
très mal contentz] p o u r ra p p o r te r au lire response.
J ’entends q u e depuis m on p arlem ent, lMr de C ha m p a g n ey est rappelé au
Conseil d ’Elat, et q u e l’on luy faict caresse.
1 En ce q u i c o n c e rn e les p riv ilè g e s d e c e lte v ille , v o ir VInventaire des chartes de M alines, p u b 'ié
par
p. 5 5 7 ) d u
ré ta ­
b lis s e m e n t d es 5 g ild es d e la v ille , d ’u n n o u v e a u rè g le m e n t p o u r ces c o rp o ra tio n s e t (p. 2 5 6 ) d u
ré ta ­
V
an
D
o ren
D eu x v o l. in-8°, M alines, 1 5 5 9 e t 1 5 6 2 . Il
.
y
e s t fait m e n tio n (t.
I,
b lis s e m e n t d u m a g is tra t, p a r ac te d u m o is d ’o c to b re 1 5 7 4 .
’ Ce p e n s io n n a ire é ta it J e a n L ie v e n s van C a u d c k e rk e , né à L o u v ain e n 1 5 1 5 , m o rt en la m êm e
v ille , le 21 a o û t 1 5 7 8 . Il é ta it fils de J e a n L ie v en s e t d e M arie V an D ieve. D ’a b o rd s e c ré ta ire d e la
v ille , il fu t a p p e lé a u p o ste d e p e n s io n n a ire e n 1 5 5 9 e t é p o u sa J e a n n e V tim a c rts, m o rte e n 1 5 8 0 .
L ie v e n s é ta it u n h o m m e in s tr u it, la b o rie u x , h a b ile et trè s a tta c h é a u g o u v e rn e m e n t d u Roi. a P e n d a n t
o n z e an s, d it M. V an E ven, il f u t l’âm e d e to u te l’a d m in is tr a tio n
de la v ille , a s sista n t à to u te s les
ré u n io n s d u C onseil, r é d ig e a n t to u s les a c te s , fa isa n t p a r tie d e to u te s les d é p u ta tio n s , d o n n a n t p a r to u t
d e s p re u v e s d e so n s a v o ir e t de s o n z è le . » Ses Registers ende Vcrbalen, co m m e n ç a n t le 13 ju in 1 5 5 9 et
fin is sa n t a u 51 ju i l l e t 1 5 7 8 , e t c o n s e rv é s d a n s les a rc h iv e s d e sa v ille n a ta le , so n t u n e so u rc e p ré c ie u se
p o u r l’h is to ire lo cale e t c e lle d u p a y s e n tie r p e n d a n t c e tte p é rio d e . V oir
p. 3 4 , e t
B
oonen
,
Geschiedenis van Leuven, p . 8 4, é d itio n de M.
V
an
E
D
ven
c et é d ite u r s u r L ie v e n s est, on le v o it, to u t d iffé re n t de celui de M orillon.
iv æ u s
.
,
Itenim Lovanienxium ,
— Le ju g e m e n t p o r té p a r
208
CORRESPONDANCE
L V III.
LE P R É V Ô T M O R ILL O N AU C A R D IN A L DE G R A N V E L L E .
( Bibliothèque de Besançon
— Lettres de Morillon, t. I l , fol.
................. fi se p te m b re
K>74.
M onseigneur. J e re s p o n d ra y aux lettres de Vostre lllme et R n18 Sgrie
du x \ i e et x x i \ e de juillet, et n ’est petit le bénéfice qu e V. I. S. at faicl à ce
povre pays, p ro c u ra n t q u ’ilz ne viènent plus d’Espaignols p a r deçà. Mais
com m e ceulx qu e sont estez icy se d im in u e n t tan t et se desrobent, je
craindz qu e avant longtem ps l’on en envoierat des aultres, p o u r ce q u e
sans cela le C o m m en d a d o r Maior se trouvera s e u l; et c’est raison q u ’il se
confie plus en ceulx de sa nation q u e aultres. Aussi je suis en celle opinion
q u e si l’on retiroit le chien des brebiz, q u e ce seroit p o u r les livrer au
lo u p ; et les Espaignolz sont propres po u r g a rd e r la frontière, m o ie n n a n t
q u ’ilz .soient tenuz en discipline, q u e sera facille en les bien pa ia n t; mais
ils ne (luisent rien p o u r avoir a d m in istra tio n p a r deçà avec forclusion
de ceulx du pays, q u e le soufl’rero n t po u r u n g te m p s; sed tandem fu r o r
fiet, sepius laesa patientia.
H op p e ru s à la fin se p e rdra, et n ’est saige de se p iq u e r avec Çajas q u e
serat trop fin p o u r sa bouticle, et s ’il se lesse afï'oller de Dutatre* à son dam p.
Il n’est si slilé au x François q u ’il ne se deust faire ayder. et n’a u ro n t tort les
François d ’eulx m o c q u e r de ce que vient de sa forge, com m e le pardon.
L’on at icy beaulcop parlé de ce qu e l’Evesque de Cordoba 5 estoit
m an d é en Court ; ca r l’on tenoit q u e l’on l’avoit renvoié en son Evosché
p o u r le bon traictem ent q u ’il avoit faict à ceulx de pardeçà, qu e furent
1 G ab riel de C aias ou Ç a y a s, s e c ré ta ire d u R oi. V o ir sa n o tic e , t. I, p. 2!I0. Il est so u v e n t cité d a n s
les v olum es p ré c é d e n ts.
* D u ta r tre est p e u t-ê tre le m êm e p e rso n n a g e d o n t M orillon p a rle d a n s u n e le ttre du 2 8 ja n v ie r 1 5 7 2
( v o ir t. IV, p. 9(i) so u s le nom de d u T e r tr e , q u i s’é ta it co m p ro m is av ee C liapuis, en d is a n t q u 'ils
a u r a ie n t de la p e in e à é c h a p p e r à la d é g ra d a tio n .
* B e rn a rd d e F re z n e d a , n o m m é é v ê q u e de C o rdoue, le 2 4 ja n v ie r 1 5 7 2 , m o rt le 21 d é c e m b re 1 5 7 7 .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
209
députez p o u r rein onstrer à Sa Majesté l'inconvénient q u e viendroit ilu x e ;
el ce ne seroit son cas de gou v e rn e r pardeçà, encores q u ’il soit bien bon
seigneur, qui at tousiours d esm ontré affection à ce pays. Ces Estatz se
c o n ten lero ien t plus du Duc de Medina, q u ’est souvent regretté et désiré
p o u r estre du sang, et en opinion q u ’il croiroit conseil et vo u ld ro it
g o u v e rn e r selon l’ancien pied.
Q u a n t tout serat faict, le p ardon ne p ortera le fruict qu e l’on avoit
espéré, p u isq u e les villes d’H ollande ne veuillent reto u rn e r, disantz q u ’ilz
ne se fieront jam ais aux E sp a ig n o lz ; et c e p en d a n t nous at ram m en é u n g
m o n d e de maul vais garçons, qu e sont estez b a n n iz , com m e les advocatz
Betz Artus 1 et le P r o c u re u r Genitz ’ q u e sont retournez. Et d ira t m a in te ­
na n t le C o m m en d a d o r Maior q u e c’est l’hérésie q u e at faict to u rn e r aux
Hollandois leur robe, que n’est ainsi ; c’est luy q u e les at faict héréticques
p a r son indiscrétion *.
P uisq u e Don J o a n est parti p o u r Secille, il serai plus près là où q u e l’on
l’attend avec si g ra n d désir. Dieu luy d o in t de bien exploicler et secourir
ceulx de la Goullette et de T h u n es, q u e I on tient icy estre p rin s *. Si est-ce
q u e je n’en croidz rien ju sq u e s j ’aye a u ltre nouvelle; ca r nous avons p a r
icy beaulcop de m aulvaises gens, et qui le dient p o u r détra cle r a u x Espai­
gnolz, com m e s’ilz ne sç auroient g a rd e r places.
Mol 8 s’est servi du p a rd o n , el at esté plus saige qu e Madame de H orne 7,
ny le sie u r de Roxtel 8, n ’estant lu y r e to u r n é , mais son filz; en ce qu e je
m ’estoye forcom pté, p re n d a n s l’ung p o u r l’aultre.
1 Je u n B etz. V o ir sa n o tice, t. I, p. 2 7 4 .
1 V oir, au s u je t d ’A r tu s , I. I l , p. 5 8 3 .
* A n to in e G c n itz fu t n o m m e se c ré ta ire d u C onseil d 'É ta t, o rg a n isé en 1 5 7 2 p a r les É ta ls de H ol­
lan d e, d e Z é la n d e e t le p rin c e d ’O ra n g c . V o ir P. Bon, liv . VI, fol. 3 2 9 v°.
* Le 16 a o û t p ré c é d e n t (ibid., 2 4 5 ), M orillon s ’e x p rim a it a in s i: « Si n o u s p o lrio n s a v o ir u n e fe rm e
p aix , j ’e s p c rc ro ic q u e la re lig io n s e ro it b ie n lo st re flo riss a n te en B ra b a n t e t en F la n d re s e t a u ltr c s p a y s
de Sa M ajesté; c a r ceu lx q u e y r e to u r n e n t ne font p a s si b o n n e r e la tio n d es s e c ta ire s d ’A llcm aig n c e t
d 'A n g le te rre co m m e a u lc u n s s'im a g in o ie n t. J e c ra in d z p lu s l’IIo lla n d c e t Z é e la n d e , où l'Iiéré sie e s t m e r ­
v e ille u se m e n t p la n té e e t e n ra c in é e . »
* l.u G o u le tte a v a it é té p rise d 'a s s a u t, p a r la flotte tu r q u e , dès le 2 4 a o û t 1 5 7 1 .
* J e a n d e Mol, d it le B o rg n e. V oir p lu s l i a u t , p . 149.
’ V o ir p lu s h a u t , p . 2 0 6 .
1 Le Sr d e B oxtcl p è re , q u e M orillon a v a it d ésig n é a n té r ie u r e m e n t (p. 168), e s t J e a n d e llo rn o s ,
Sr d e B o x te l,c tc ., d o n t ce p ré la t a v a it to u jo u rs re c o n n u l'in n o c e n c e . V o ir sa n o tice, t. IV, p . 2 8 9 .
‘ T
ome
V.
27
210
CORRESPON DA NC E
Le b ru ic t de l’arm ée de Bisquaie* vad en fumée, et certes je ne suis
m a rri q u ’elle n ’est venu, p o u r la craincle q u e j ’avoye q u ’elle se perdroit
p a r faulle de p ortz et de pilotes.
Ceulx de Bom m ele tiègnent bon, et la saison com b a ttra doresm ais p o u r
eulx ; et ilz se m o q u e n t des Espaignolz qui n’o n t a u lcune envie de les
assaillir, et e u lx -m êm e s le d ien t sans a u lcune dissim ulation.
II sera bien q u e merciez Son Excellence, Monsr de Sainct-B avon et
d ’Assonleville de la p rom otion de M onsieur de Chasteaurouillaud
que
s’accom oda p o u r aller à Malines, q u e je tiens estre a (lin de faciliter celle
de l ’Évesché, d u q u e l je le v ouldroie veoir pourveu.
Monsr le P ré sid e n t ferat m ain te n a n t faulse m onnoie p o u r B i l ly 5, p u is q u ’il
at délivré sa patrie des reyters q u e y pensoient e n tre r, lesquelz il at tenu
de h o rs par force. Je p r e n d r a y b o nne c o n ju n c tu re p o u r p a rle r au Président
Viglius des papiers de R enard *, en la sorte q u e Vostre Illustrissim e
Seigneurie m ’escript, afïin q u ’il sçaiche qu e Vostre dicte lllmu Sgrie sçait
q u ’ilz sont retrouvez et en bon n e m ain. P o lro it bien estre q u ’ilz fussent
estez en la sienne.
E lb e rlu s tient encores la practicque, et si l’on at am usé le P rince
d ’Oranges, aussi nous a-t-il amusé, ne désirant que gaigner tem ps, a tte n ­
d a n t qu e lq u e c hangem ent, ou la m o rt de Sa Majesté, ou de P E m p e re u r p o u r
m ie u lx toi 11er les cartes p a r après.
Je suis en mesme o pinion q u e Vostre lllme Sgrie de ce qu e le frère du
C om m en d a d o r Maior 5 excuse tan t Monsgr de C ham paigney, et je tiens,
q u e lq u e sa m h la n l q u ’ilz facent, l’u n g ny l’au llre ne luy veult bien. Le
C o m m en d a d o r Maior faict sa m blant d ’avoir escript au Roy p o u r avoir s u c ­
1 C 'e s t-à -d ire la flotte a rm c c en B iscaye, sous le c o m m a n d e m e n t de P ie r re M clcndez, m o rt le 6 s e p ­
te m b re 1 5 7 4 . V o ir p lu s h a u t, p. 4 8.
1 P ie r re M o u c h cl, p r o to n o ta ir e , Sr de C h à tc a u -R o u illa rd , e tc ., f u t no m m é c o n se ille r e c c lé s ia s­
tiq u e a u G ra n d C onseil d e M alines p a r le ttre s p a te n te s d u 19 ju in
1574 c l m o u ru t en ce tte v ille
en 1578.
8 G asp ard d e R o b les, S r d e B illy, so u v e n t c ité d a n s les v o lu m es p ré c é d e n ts .
4
M orillon e n te n d p a r le r d e s p a p ie rs d e S im on R e n a rd , e n n e m i d e G ra n v e lle . V o ir t . IV , p . 9 7 .
O n les r e tro u v a p a rm i ceux de V a n d e r Aa, a p rè s la m o rt de celu i-ci. Ils fo rm e n t d a n s la co llectio n d e s
m a n u s c rits de G ra n v e lle la sé rie in titu lé e : Ambassades de R enard , 5 vol. in-fol.
*
L e frè re de R e q u csen s é ta it do n J u a n de Ç uniga ou Z u n ig a , a m b a s sa d e u r d u Roi a u p rè s d u
S t-S iège. V o ir t. IV., p. 15.
DU CARDINAL DE GHANVELLE.
211
cesseur au g o u v e rn e m en t, et qu'il p erdt espoir de reco u v re r ce q u ’est
p e rd u
Dieu doint q u ’il n ’achève la reste.
J ’ay faict p a rt à Monsr Don F e rn a n d e , et à Monsr de C h a m paigney des
nouvelles des T u rc q z q u e Vostre III mu S g ™ m ’avoit donné, laquelle faict
b o n n e euvre d ’cscripre si clèrem ent au frère du C o m m endador, alïin que
l’on retom be s u r l’ancien pied, et em ploie ceulx du p a y s; ce q u e ju sq u e s
ores n ’at aydé. Ils s’en tro u v e ro n t à la fin m auvais m arc h an d z , et q u e leur
avez dit vray. L ’on m ’escrit q u e p o u r ceste cause Monsr le d u c d ’Arschot
at esté envoié en B ourgongne. Toultefois d u r a n t son absence je ne veoidz
pas qu e les affaires soient allez mieulz, et est h e u re u x d’en estre esloingné.
Los abbez et nobles de B r a b a n ts o n t , ad ce q u e l’on dit, d ’accordz avec
Son E xce q u e leur at j u r é foy de cavallero, q u ’il le u r fera c onfirm er tous
privilèges p a r Sa Maj‘"; m ais q u ’il ne la veult Iesser b rid e r; il sam ble q u ’il
retirera les Espaignolz des forteresses, saulf q u a ttr e ,q u e sont Anvers, G and,
V alenchiennes et G roenninge. J e c raindz qu e Son E xce ne trouvera les
villes de B ra b a n t si traiclables com m e lesdits . eux membres®.et sont plus
hardiz p o u r ce q u ’ilz o n t résisté contre le x B q u e les abbez et nobles
avoient accordé.
L’on dit q u e la Ilo y n e m ère est allé au devant d u Boy, m e n a n t le Duc
d ’Allençon et son beaul-fils, sans les croire* à a u ltr e , et q u ’elle les c o n d u ic t com m e statues*. Si ledit Boy rappaise son ro y a u lm e co m m e n ce a n t
p a r un p a rd o n , c o m m enceant par le prince d e C o n d é , je c raindz q u ’il nous
je tte ra la g u e rre au doz.
Monsr de C h am paigney tient plus de propos de se re tire r qu e de re c o u ­
v re r b a ro n n ie ou estre brabantisé*. Il deb v ro it aller à vostre eschole po u r
' M o rillo n , iluns u n b ille t jo in t à sa le ttre d u 19 s e p te m b re (»Aid., 2 9 4 ) co n firm e c e tte d é m issio n .
« D ep u is cestc e s c rip te (d it-il), B ave m e m an d e q u e le C o m m e n d a d o r M aior a t d e m a n d é son congé au
» R oy, se fo n d a n t s u r ce q u ’il n e se p c u lt a s s u re r icy , e t m oings d e s E sp a ig n o lz , sa p r o p re n a tio n , q u e
* d e n u lle a u llr e , e t q u e le R oy le lu y a u r o it ac c o rd é , m ais q u ’il d o ib t te m p o ris e r ju s q u e s lu v se ra
» e n v o y é su c cesseu r. •
* Croire, co n fier.
5
T o u jo u r s g a rd e s à vue, les p rin c e s d u sa n g a v a ie n t é té en v o y és a u d e v a n t de H e n ri III et le
r e ç u r e n t à la fro n tiè re d e S avoie. P lu s loin il tro u v a C a th e rin e de M é d ici, sa m è r e , q u i lui re m it los
p o u v o irs d o n t elle a v a it é té in v e s tie p e n d a n t l’ab sen ce d e son fils.
4
C h a m p a g n cy a v a it d éjà e n v o y é sa dém issio n a u R o i, nous l’a v o n s v u p lu s h a u t, m ais elle n ’a v a it
p as é té re ç u e . N é a n m o in s, d a n s u n e le ttr e d u 10 a o û t 1 5 7 4 , P h ilip p e II d it à R e q u cscn s : » D ’a p rè s
CO RRESPONDANCE
212
a p p re n d re à se m a in te n ir si d oulcem ent en tout tem ps com m e Vostrc
dite Illme Sgrie a tfa ic t, qui faict bien de tenir bon pied et bon œil au Duc
d ’Albe. q u ’est u n g sauvaige d o c te u r et u n g souverain forgeur de b ourdes
et de calom nies, q u e souvent r e to m b e n t s u r le ch ie f des auteurs. Je pense
bien q u ’il ne se jo u era contre Vostre IIIine Sgrie. laquelle il c r a i n c t p l u s q u ’il
n ’ayme, et p o lro it estre qu e la pensant faire so rtir de là où elle est, il luy
feroit g rand bien, q u e seroit p o u r le faire enraiger a p rè s, la véant avec
mercèdes, et soy non.
Au b a n c q u e t du chastellain 1 fut noté qu e le principal c o n v i é ’ dem anda
à une dam e quelle pensée elle avoit au tem ps de la m u tinerie, et ce q u ’elle
pensoit d e v e n ir; elle dit qu e son intention estoit, allant les choses pis, de
s’aller r e n d r e à luy; et il respondict q u e encores q u e le traveil luy estoit
lors g ran d , il l’h e u t m oingz se n tu aiant si bon h e u r q u e u n e si belle d am e
se fut retiré vers luy. E t com m e aulcunes dam es d ire n t à Roda q u ’il d o n noit fort à souvenir de Vostre lllme Sgrie, il re sp o n d it q u e l’on le disoit,
m ais q u ’il vo u ld ro it estre si bien voulu des dam es com m e luy.
LIX.
LE
M A IT R E
D E S C O M PTE S
V IR O N
A l) C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
( Bibliothèque île Besançon. — M émoires «le G ranvelle, I. II, fol. U T - 119.)
B ru x elles, 15 se p te m b re 1 5 7 4 .
Monseigneur. Le p ro to n o ta ire de C astelrouillaud est passé p a r icy p o u r
aller à sa résidence à Malines, et a requis à Monsr le P r é v o s t 1 luy faire avoir
ce q u e celui-ci lu i d it, les r a is o n s q u e le d u c d 'A lb e lu i a d o n n é e s d e vive v o ix , il c o n v ie n t d e r e t i r e r
le Sr de C h a m p a g n ey d ’A n v e r s , m ais a u c u n e ré so lu tio n n 'a é té p rise . » V oir Correspondance de P h i­
lippe IJ , t. III, p. 128. P lu s t a r d , R e q u esen s in sis te a u p r è s d u R oy p o u r q u e C h a m p a g n e y reço iv e u n e
d e s tin a tio n à l'é tr a n g e r . (Ibid., p . 157.)
1 D ’A n v ers, do n S anchez d ’A vila. V o ir, a u s u je t de ce b a n q u e t, p lu s h a u t, p. 2 0 0 .
* L e G ra n d C o m m a n d e u r.
1 P ie r re M ouchet, V o ir p lu s h a u t, p . 141.
DU CARDINAL DE GR ANVELLE.
215
le logem ent de vostre m aison com m e l’avoit feu Monsr Malpasz *, lequel en
a escript au concierge N uym z p o u r l’assister ... de m anière q u e p a r ses
vertus nous avons trouvé orcaiz* q u ’il est d ’ung chacun bien voulu, de
m an iè re qu e ch acu n le s o n o c le 3 successeur de Monsr d’Arras. E t m’a dict
ce jo u rd 'h u i Monsr de S t-V ast *, qui retriuve (sic) p o u r les Estatz, qu e en
p r e n a n t congé de Son Excellence, il luy parla du trespaz de Monsr d ’Arras,
luy d e m a n d a n t qui estoit idoine p o u r y p o u rv o ir, luy dict q u e l’Eglise et
noblesse luy avaient d o n n é charge de rec o m m a n d e r ledict pro to n o ta ire à
Son Excellence p o u r ses vertus et b o n n e cognoissance, etc., etc.
De nos nouvelles d ’icy, q u e ne sont petites, c’est qu e les reyters sont
envoie u n e p a rtie en France avec le conte Charles de Mansfeld, la reste en
Allemaigne. Aussi sont partis les Suyches s par le congé d u com m issaire
del Gadilo *. q u y avoit charge d ’e n re te n ir ix enseignes: et p o u r le faire bien
finem ent p o u r re te n ir les m eilleurs, don n a congé à to u s ; ce q u ’ilz acceptarent, m o ie n n a n t leur condition q u ’est q u ’ilz d o ibvent a voir r e to u r ; et
q u a n t se vint à paier, il vouloit rete n ir lesdicts enseignes; ce q u ’ilz estoient
content, m o ie n n a n t q u ’ilz eussent leur re to u r com m e les a u ltr e s ; à
q u o y ilz estoient fondez. Quoy véant q u e n’estoit de sa c h a rg e , et q u ’il
s’estoit g r a n d e m e n t é quivocqué, se sont tous partiz Ce n’est pas le p r e ­
m ie r q u ’il a faict et mesmes au faict desdicts S u y c h e s , mais il est de
la livrée des aultres. J e tiens q u e l’on y pensera deu x fois d e v a n t q u e les
faire revenir.
Les Estatz de B r a b a n t, assavoir l’Eglise et nobles, o n t accordé la
d e m a n d e avec certaines c o n d ic io n s , et e n tre autres q u ’ilz m a n ie ro n t
les d e n ie rs ; et com m e la som m e est si g ra n d e q u e à peine ilz y sçauront,
ilz m e ttro n t suz u n e form e d u centiesm e, et ne tie n d ro n t n u llu y franc,
com m e je pense, q u e v ien d ro it m al au propoz à Votre Illme Seigneurie.
C eulx d ’Artois o n t accordez avec conditions qu e Son E x c0 n ’a voulsu
a c c o r d e r ; et s’en sont r e to u rn e z com m e ilz sont venuz. Ceulx de H ain1 L e c h a n tr e M alpas, c o n tr ô le u r de la m aiso n d e G ra n v e lle . V o ir t. IV, p . 7 8 .
% O rcaiz, p o u r or ça, m a in te n a n t, e n ce m o m en t.
* Sonocle, p e u t- ê tre d e sonare ou soncre, fa ire e n te n d r e le b r u it, d e là d ésig n e r.
4 T h o m a s d e P a r e n ty , a b b é d e S t-V a ast.
* Les S u isses, tro u p e s a u x ilia ire s lev ées p e n d a n t le p rin te m p s . V o ir Lettres de Vcrgtj, t. I, p . 7 6 .
* H e rn a n d o d el G ad illo , s e c ré ta ire d u d u c d ’A lbe. V o ir t. N I, p. 2 2 7 .
214
CORRESPONDANCE
n a u ll ont accordé et sont acceptez; et q u a n t à leurs rem onstrances l’on
y ad visera
L’on a nouvelle q u e ceulx de Leide en Hollande assigez par nos gens
o n t envoiez un g des leurs devers Monsr le cointe de la R o c h e 1, et il a envoié
u n g des siens à la ville p o u r p a rle m e n te r; après avoir beaucoup opiniâtré,
fauldra q u ’ilz vien n e n t à a p p o inctem ent, p o u r ce qu e le u r desseing de
secours est failly, parceque après avoir ro m p u z la d icque du pays pensant
q u e l’eaue v iendroit ju sq u e s à la ville de Leyde, et qu e p a r petis basteaux
ilz po u ro ie n t envoier vivres; niais ilz se sont trom pez et se noiez quasi, et
la ryvière s’est vuydée et reculée de la dicte ville, qu e les fera venir à ju b é.
Ceulx de R o tied a m et aultres villes voisines se tre u v e u t affoulez de ladicte
r o m p tu re . Hz ne veullent traicter avec Espaignolz, d o n t plusieurs q u ’ilz
so n t pardeça sc tre u v e n t esbays, parceque les Estats persistent qu e les
estrangiers sortent hors du pays, et d ien t q u e c’est a d h é re r au d ire du
P rince d ’Oranges.
Messieurs les rentiers du P u y ts-à -M y re ’ de Salins ont escript à Votre
U | m e S g r i e p o u r avoir votre faveur en ce q u ’est raisonnable et tout ju s te
q u e de les laisser j o u y r de leurs biens com m e la raison r e q u e rt et selon
q u e l’e m p e re u r Charles avoit faict.
V
Le b r u it c o u rt p a r icy passé ung mois q u e Votre lllme Sgrie est a rc h e v e s q u e d e ï h o l e d o , et q u ’il doibt aller en Espaigne; qui m ’en parle je dis que
je ne le crois et qu e rarcheveschée n ’est vacante. De vostre allée en Espaigne
Dieu veuille q u e le Roy en soit inspiré. En ce cas le p e u p le de pardeçà en
p re n d r o it g r a n t co n ten tem en t, esp éra n t qu e Sa Majesté p r e n d ro it au tre pied
a u x affaires d ’icy q u i ne fait.
Si nous avons p e rd u z des seigneurs de tiltre, il s’en reforge des nouveaulx
com m e conte de B arlem ont, m a rq u is d ’Anvers, etc.
• V oir, au s u je t des n ég o ciatio n s e n tr e le g o u v e rn e u r g é n é ra l e t les E ta ts d es d iffé re n te s p ro v in c e s,
la Correspondance de Philippe I I, t. III, p p. 1 il) e t su iv .
• V oir, a u s u je t d e l'in te r v e n tio n
affa ire s des assiégés d e L e id c u ,
d e Don
M emdoça,
t.
F e rd in a n d d e l.a u n o v , com te de la H oche, d a n s les
Il, p.
266.
• I.e P u its à Mu ire d e la g ra n d e sa u n e rie à S alin s, est d é c r it d a n s G o l l l t , toc. cit., col. 1 62 e t su iy .
DU CARDINAL DE (JRANYELLE
215
LX.
L E P R É V Ô T M O R ILL O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(B ibliothèque de Besançon. — L ettres diverses, t. Il des supplém ents, loi. Ü.O-ÜJ 1.)
B ru x e lle s , le 19 s e p te m b re 1 8 7 4 .
M onseigneur. J e resp o n d ra y à la lettre de Vstre lllme et Rme Sried u x v n e de
mois passé v a r io r u m , et elle a u r a t d e p u is e n te n d u le trespas ta n t regretté
de feu Mgr d ’Arras, au q u e l je prie Dieu d o n n e r repos 1 II ne povoit dis­
p oser de lev esché, et s’en faisant q uicte ne povoit vivre de l’air; et je tiens
q u e ce fut esté au plus tard q u ’il he u t p e u lt trop bien q u ’il vouloit p a r ce
m o n s tre r sa g r a titu d e et b o n n e affection, m ectant en tout é v énem ent en
a v a n t Mr le p ro to n o ta ire vostre n e p v e u \ Sam blable dé m o n stra tio n at faict
feu Mr de T o u r n a y 5 au frère de Mr d u R eulx *, l’a iant faict ch a n o in n e de
T o u rn a y , et destiné, a u lla n t q u e en luy estoit, successeur en son évesché.
Ce q u e Dieu veuille, aiïin q u e évitons sa con c u rre n ce en celluy d’Arras.
Mais Mr de B e r la i m o n t s [que d ’oresm ais appellerons Conte, p u isq u e le Roy
l’at ho n o ré de ce tiltre et Mr d ’H avreth * de celluy de M arquis], y p réten d
p o u r son filz prévost de Liège 7, com m e je vous ay e scrip t; d o n t le c h a p p itre de T o u r n a y ne se réjouyt, se c o m p la in d a n t du peu de ju stice qu e
l’on trouve à C a m b ra y , et q u ’estant frères là et à T o u rn a y , il y a u ra i plus
de connivence. Les d e u x bons évesques trespassez de T o u r n a y et d ’Arras
s’en sont souvent plaintz, et ledict c h a p p itre de T o u r n a y est affectionné
au p ro to n o ta ire d u Reulx p o u r estre de m aison, leur confrère et S r fort
d o u lx et traictable.
' V o ir p lu s h a u t , p. 1 7 8 , n o te 2 .
* P ie r re M ouchet, p ro to n o ta ire , Sr d e C h â te a u -R o u illa rd . V o ir t. IV , p. 141.
* G u ib e r t d ’O ig n ie s , é v é q u e d e T o u rn a i de 1 8 6 8 à 1 8 7 4 .
* J e a n d e C ro y , co m te d e R œ u lx . S on f r è r e , G é ra rd de C roy, Sp de F ro m e s e n , f u t d ’a b o r d p ré v ô t
d e S t- P ie r r e à L ille.
* L o u is d e B c rla y m o n t fu t cré é co m te p a r P h ilip p e II.
* C h a rle s -P h ilip p e d e C ro y , Sr d ’H a v r é , fu t en effet cré é m a rq u is , en 1 8 7 4 , p a r P h ilip p e II.
’ E rn e s t-B o g isla s d e C ro y , q u i fu t p o s tu lé év êq u e d e C am in . Il n ’o b tin t p as la p ré v ô té d e L iège.
216
CORRESPONDANCE
Aussi al Ytlu lllme et R II,e Sriu raison de ne se vouloir m ectre en chose
q u e puist traverser vostre prétention p o u r r e n c o m ie n d e
q u e j ’espère
s’o b lie n d ral avec a u llre c hose; car l’on e ntend d ’E spaigne qu e le Roy
a ppreste g ran d e récom pense à Granvelle, tant p o u r luy q u e les siens, que
je croy ferm em ent, si tant est qu e l’on le retire de là où il est, q u e je ne
m e puis p e rs u a d e r tant q u ’avons le T u r c s u r les bras, qu e at faict c hanger
heaucop de desseinz au Roy.
L o n m ’escript qu e MM. d ’Y pres et Sl-O m e r sont dépuléz p o u r eulx
in fo rm e r s u r les qualitéz du fu tu r évesque d ’Arras. L ’on v e rra t en quel
p réd ic am e n t se trouvera m o n d ic t Sr vostre nepveu. q u e j ’entendz passer
les 3."> ans, qu e j ’espère en tout cas ne polrat faillir à la prévosté de Lille.
Il réside en son estât à Malines. Mr de N a m u r * at q u e lq u e veine audict
évesché, selon qu e je veoidz p a r ses lettres. Il y a td a n g ie r , selon q u ’il est
d ’eaige et indispost, q u ’il p o lr o itb ie n déplacer a v a n t q u ’il a u ro it les d é p ê ­
ches d’Espaigne et de Rome.
Je suis bien aise qu e aiez m ercié Son Excellence des plaisirs que, p o u r
vostre respect, elle faicl à tous ceulx q u e se réclam ent de Y,r0 IIIme et Rme Srie.
Je ne puis avoir sinon tant bon espoir de MM. vos nepveurs les Sra d ’Achev
et de Thoraise, q u e se feront valoir 5. Je vouldroie que Mr de Lille * p o u r ­
suivit le c hem in q u ’il dit vouloir p r e n d r e ; ce serai ung g ra n d c o n te n tem e n t
p o u r Madame la Conlesse sa mère, p o u r m esdam es sa com paigne et bellem ère, laquelle m ’en feit des g ran d z plaintifs q u a n t je fuz au service de feu
Mr d ’A rras; et en h e u t escript q u e lq u e légende à Vtre lllme et R me Srie ; mais
Mr de Rossignol ”, qui est fort saige ge n tilh o m m e, et m oy deslo u rn a m e s
cela, com m e chose servante à peu et qu e vous h e u t peult d o n n e r regret.
La dam e de R e r m o n t 6 est encores icy p o u rsu iv a n t scs affaires; et q u a n t
elle me r e q u ie rt d ’advis ou d ’adsistence, je luy suis tousiours prest.
Estienne G irard 7 s’en vad faire u n g to u r en Bourgongne, mais d o ib t icv
retourner.
1 Encom ienda, m ot esp ag n o l q u i signifie re v e n u .
1 A n to in e H a v c t, é v ê q u e d e N a m u r de 1 5 6 5 à 1 5 78.
1 V oir p lu s h a u t , p. 2 0 0 .
* Le p ré v ô t de L ille , G é ra rd d e C ro y . V o ir S aivderus, t. III, 2 6.
5 Je an d e N o y e llc s , b a ro n de R ossignol. V o ir t. I, p. 4 8 , n o te 5.
* S ans d o u te R c rm o n d , fam ille fran ç aise.
’ 11 é ta it s e c ré ta ire de l’a rc h e v ê q u e d e C a m b ra i. V o ir t. I, p . 1 6 7 .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
AIr Blasere ' n’est encores presl, car il n’y al p o in cl un solz p o u r le faire
desloger. Il sera bien aise d ’e n te n d re l’affeclion q u e Vtre lllme Srie luy porte,
q u ’est son seul confort. J e le veoidz un peu en peine de ce q u e non seule­
m en t Roda et c o n sé q u a m m e n t Son Excellence, mais aussi les Cordeliers et
Jésuites e m brassent la p o u rsu ite p o u r Mr Pam ele s. Si ledict Blasere parte
vers B ourgongne, j ’espère q u e l’affaire du lieu ten an t d ’O rn a n s sera red re ssable, et je feray tous bons offices q u e me seront possible vers ceulx q u e
m ’escripvez, en tem ps et lieu.
J e ne m ectray en obii la rem pte des bledz, desquelz je ne conseilleray
faire ga rd e ju s q u e le tem ps sera plus cler, mais bien q u e lq u e essay.
La vielle d am e de H oochstrale 3 s’est fort resjouy de voslre response, et
celle q u ’avez faict à son beau-filz le Conte de Ligne, et q u e luy ferez encores,
ce bien d’escripre de rechief p o u r luy à sa Majesté.
Le eonseillier Asseliers * se lient fort obligé de la faveur q u e luy faicles,
e scripvanl p o u r son fdz à Son Excellence, à la fin p a r luy p r é te n d u e ; el le
m érile m ieulx q u e Michiel de Jacca 6, q u ’est u n g glorieux et d angereux fol,
qu e se fourre p a rtout, el se vante de son crédit : a iant menasse le m agistral
de cesle ville, et l’au llre j o u r blessé ung sien la b o u re u r ju s q u e à m ort. Il at
encores sa maison pleine de c u y rs q u ’il p rin t au sacq de Malines et traicte
mal sa femme. Q u’il se ga rd e q u ’il ne luy adviègne com m e à Serasso, que
vous at autrefois servi, q u e se noioyt en sa sagesse, el parloil bien cocard
el a u d a c ie u x ; au s u rp lu s u n g sien beau-frère l’at tué. Dieu luy perdoinl.
Cesle nation se faict a b h o r r i r p a r son insolence; de sorte qu e l’on liendra
infâm es celles qu e s’allieront avec eulx.
J ’ay veu la mère de celluy q u e at escript la lettre q u e je renvoie à Vtre
|||m e
m a js j e ne la sçauroie rem ectre, ny m e so u v e n ir q u e c’est, ne
l’aiant veu depuis q u ’elle me donna ladicte lettre.
L’on vad p r o lo n g a n t la restitution du m agistrat de iVIaliues, et la restitu ­
tion de la franchise tant désirée, seul et un icq u e rem ède p o u r la ressource
’ Voir plu s h a u t , p. 5.
1 G u illa u m e d e P u m e l, p r é s id e n t d u C onseil d e F la n d re . V o ir p lu s h a u t, p. 2 0 3 .
* A im e , co m tesse de H e n n e b o u rg , v e u v e de P h ilip p e de L a lain g e t m ère d e M a rg u e rite de L a lain g ,
<]ui é p o u sa P h ilip p e , co m te d e L ig n e.
4 P ie r r e A sseliers, c o n s e ille r d u C onseil de B ra b a n t. V oir sa n o tice, t. IV , p. 2 6 5 , n o te I.
* M ichel de Ja c c a . V o ir t. IV , p p . 4 5 5 , 4D5.
T om e
V.
2S
218
CORRESPONDANCE
de la povre ville, s’estans com m iz Mr> Pam ele et Caix, n e pveur de Mr de
Sl-R avon, p o u r eulx in form er si l’on ne s’est oblié et abusé en ladicte fran­
chise, que ne se p o lra t si tost achever, puis qu e l’on préte n d s u r ce exam iner
la plu sp a rt des ferm iers des tonlieux de pardeçà. Ces ralongues me sont
suspectes, et m ec tro n t bcaucop de gens en désespoir.
Du Blioul ' m ’escript q u e l’on ne trouve bonne la citation q u e >lr de
Liège at o b ten u contre i\lr de N a m u r e t a u l t r e s évesques, et qu e l’on co m m ect q u e lq u e C a rd in a u lx p o u r cognoistre de leur différent, sans figure de
procès, qu e seroit trop mal séant entre personnaiges de telle qualité ’. J e ne
sçay ce q u e ledict Sr polroit d e m a n d e r à Vtre lllmu Srie, mais trop bien se
po lroit-on p lain d re de luy, q u ’il d étient les lieux qu e sont désignez po u r
les limites de vostre diocèse.
iM' le Conte de B erlem ont et Mr de C a m b ra y son filz se treuvent en peine
de ce que Gemelli 5 at si g ra n d audivil * vers Sa Sté, p a r la faveur du d a ­
ta ire 5, estant Sa Sté e m b o u c h é q u e c’est p a r haine qu e ledict de C am bray
p o u rsu it le dict Gemelli, à cause q u ’il fut son com p é tite u r en l’archevesché,
q u ’est un e b a i e 6; car ledict Sr estoit lors en Italie, et fut aussi tost esleu
com m e il sçeut la vacation. Hz v o u ld ro ie n t qu e occuperiez en ceste cause ut
soient. Je leurs respondz q u ’estez loing et fort enipesché en aultres c hoses;
q u ’il fault quelc’un s u r le lieu; la faulle e s l q u ’ilz n’ont p a r bon m oien envoié
le procès in stru ic t contre ledict Gemelli, q u e je pense estre s u p p rim é p a r le
dataire. Le Cardinal P i s a n o 7 escript a u d ic t Sr a rchevesque p o u r l’avoir : l’on
le debvoit avoir envoié p a r d e u x ou trois voiez. J ’escriptz ausdicts Srs q u ’il
se fault adresser à Son Excellence p o u r e scrip re à son frère l’am b a ssa d eu r 8
' L a u re n t d e B lio u l, fils d e L a u r e n t , q u i fut p re m ie r s e c ré ta ir e au C onseil p riv é .
5 Ces d iffé re n d s ro u la ie n t s u r les lim ite s e n tr e les n o u v e a u x év êch é s d es P a y s-B a s e t c e lu i d e L iège.
* P ie r re G em elli. V oir p lu s h a u t . p . 4.
4 A u d iv il, in flu e n ce, écoute?
* D a la ir e , le p re m ie r officier de la U a tc rie , lieu h Hom e où se fo n t les e x p é d itio n s des bénéfices
c o n s is to r ia u x , etc.
* Haie, so ttis e , e r r e u r .
’ L ouis P isan o ou P is a n i, é v é q u e de P a d o u c , re ç u t le c h a p e a u d e c a r d in a l en 1 5 6 5 e t m o u ru t le
51 m ai 1 570. Son o ncle, F ra n ç o is P isa n o , é g a le m e n t c a r d in a l, m o u r u t le 2 9 ju in 1 5 7 0 . Ce so n t les
d e r n ie rs c a r d in a u x d u nom de P isa n o . Ni l’u n n i l’a u tr e ne p e u v e n t, d ès lo rs, a v o ir é c rit, e n 1 5 7 4 ,
la le ttr e d o n t M orillon p a rle . P e u t- ê tr e v e u t-il d é s ig n e r le c a rd in a l R icci, a rc h e v ê q u e d e P isc , m o rt le
5 m ai 1 5 7 4 .
* D o n J u a n de Ç u n ig a, frè re de R e q u csen s e t a m b a s s a d e u r de P h ilip p e II à R om e.
I)U CARDINAL D E GR AN VEL LE .
219
et aux Jesuitez, et mesmez Trigosa qui al tant crié contre ledict Gemelli.
J e adjousle q u e cependant, je ne fauidray d ’en a d v e rtir Vlre llln,e S ‘‘e.
J e renvoie la lettre du p rie u r Dannest (?) avec la réponse des proviseurs
d u collège de Savoie '. d e laquelle Vtre lllmB Srie se polroil faire faire ra p p o rt
par q uelc’un de ses g e n s ; le d i c t p r ie u r a to rt se plaindre d u p a ie m en t: car
j ’ay veu les quiclances escriptez par ses religieulx en apvril d e r n i e r ; mais
ilz ne distin g u en t les term es p o u r em bro iller; et je tiens qu e l’on ne leur
d o n n e ra u n g solz j u s q u e ilz soient esclerciz. Ces Savoiens sont estranges
gens
L’on at tenu les o rd re s à L o u v a in , où sont estez xvi soubdiacres,
xii diacres et xvn prebstres. Si en at-on rejecté neuf, et entre iceulx deux
Cordeliers, tan t p a r faulte de sçavoir, qu e d ’eaige. P lu sie u rs v enoient avec
dim issoires *, et il y avoit beaucop d ’Anglois. L’Université de Louvain
d o n n e aussi beaucop de gens Dieu d o in t q u e tout red o n d e à son service.
P. S. L’on se m e u re fort à G and, à T o u rn a y et en Anvers; Louvain,
Diest. Z icchene sont aussi entam m ez. et ceste ville q u e lq u e peu. Ce q u e je
c raindz plus p o u r l’infection, est q u e l’on se m eure de la m aladie c o n ta ­
gieuse quasi en tous les villaiges cy à l’e n to u r cincq lieuez de loing, de
sorte q u e l’on ne sçait pas où aller s e u re m e n t’. Si pensons nous p a rtir p o u r
la lin de ce mois vers S ^A m and, en cas qu e le contaige* y cesse, com m e il
faisoit q u a n t nous y estions s u r la fin du mois passé : mais l’on se m eure
fort à T o u rn a y . et à Malines, encores q u e lq u e peu.
Encores ne m ’at Jongelinc rien resp o n d u s u r mes lettres, il est trop
paresseux.
Le conte de B a rlaim ont at ces jo u rs passez esté bien dang e re u se m e n t
m alade, et d o ib t r e to u r n e r icy p o u r c h e a n g e r d’air.
1 I.c collège d e S a v o ie , cré e à L ouvain p a r C h a p p u is.
* D im issoires, le ttre p a r la q u e lle u n év ê q u e co n sen t q u ’un «le sus d io césain s so il co n sacré p a r un
a u tr e é v ê q u e .
* A c e tte é p o q u e ré g n a it en B elgique u n e m alad ie co n tag ieu se q u e R e q u esen s d é sig n e so u s le nom
d e p este d a n s u n e le ttre a d re ssé e a u Roi le 16 s e p te m b re 1 5 7 4 . V o ir Correspondance de Philippe I I ,
t. III, p. ISO. « La p este, d it- il, rè g n e b e a u c o u p p lu s e n ce m o m en t q u ’elle n ’a ac c o u stu m c d e ré g n e r :
d a n s ce tte v ille (A n v e rs), q u i est u n e d es p lu s sa in es d u p ay s, p lu s d e 1 5 0 m aiso n s en so n t in fe c té e s; à
(ia n d et en q u e lq u e s a u tr e s villes de F la n d re , c ’c s t p ire e n c o re , e lle rè g n e de m êm e en H o llan d e, en
( iu e ld re , à r t r e e h t e t d a n s les a u tr e s p ro v in c e s. » C’é ta it, p a r a it-il, u n ty p h u s.
* Contaige, co n tag io n .
CORRESPONDANCE
220
LXI.
LE
PRÉV Ô T
M O R ILL O N
AU
C A R D IN A L
DE
Ü IU N V E L L E .
( Slibliolhéque de Kesmçou. — Lettres de di ver s, l. I l , fol. 294 à 29(j j
B ru x e lle s , le 19 s e p te m b re 1574.
M onseigneur. J e resp o n d ra y aux billetz d u xi° et x v n e d u mois passé,
m erciant Dieu qu e j u sq u e s ores il n’y a t r i e n de p e rd u , et seroie m arri qu e
le C o m m endador Maior nous y feicts q u e lq u e fourbe [ q u e je ne sçay si les
Jésuites tro u v e ro n t b o n ] avec lesquelz il est enferm é la p lu p a rt du te m p s:
et l’on pense q u e à le u r occasion il ne bougera cest h y v e r de là où il est.
Il ne pe u lt estre q u e V. I. S. ne soit g ra n d e m e n t occupé, aiant tan t
d ’hostes avec lesquelz il fault com plir, q u e ne se faict sans p e rd re de tem ps,
et s u rto u t a u ra i fort à faire à se desvellopper de Don Joan en m atière d ’a r ­
gent, et à raison de l’arm ée ennem ie.
Dieu d o in t q u e le Roy envoie sa résolution p o u r ce mois, laquelle ne
p olrat estre qu e b o n n e si elle est selon le m érite et gran d z services de
V. 1. S. avec ce q u e sa p rudence la ferat b o n n e quelle q u ’elle soit. Je
craindz q u e le T u r c q ferat c h a n g e r beaucop d e desseings, m esmes s’il
h y v e rn e à la G o u le tte ; ce qu e l’on d it il at proposé de faire et renvoier la
p lu sp a rt des vasseaulx au x p ortz de Marseille et de T o lo n ; et d it le P ré si­
de n t Viglius, qu e le R oy de F ra n ce y at q u e lq u e obligation, selon les
traictez q u ’ilz ont p a r ensam ble; q u e seroit u n e bien m auvaise entrée po u r
u n g Roy Très-Chrestien.
J e me g a rd e ra y bien de faire s a m b la n t à qui q u e ce soit de ce que
V. I. S. m ’escript de la d am e grosse.
Dieu d o in t victoire à ceulx qu e sont au fort de T h u n es et à fa Golette,
q u e sont lieux ta n t im p o rta n tz à la C hrestienté et mesmes à l’Espaigne.
Les b a tte au x q u ’estoient sortis de Zéelande avec b r u ic t q u ’ilz estoient
allé à L a rre d o p o u r y b ru sle r les vasseaux, sont reto u rn ez de la pesche à
laquelle ilz profficteront plus q u e à faire ledit exploict. J ’avoie crem eu
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
q u ’ilz fussent allé ren c o n tre r la (lotte des Indes, qu e l’on dit estre arrivée
à Séville avec deux millions et quelques milliers de ducatz, qu e v ie n d ro n t
bien à propoz en cesle saison.
Les Genevois ont faict v enir vc mille escuz de la forge de Gennes, q u e
sont doubles escuz de d u r or. Hz y gaigneront en plusieurs endroitz, et
nous re m p liro n t le payz de m aulvais o r et d ’usures.
Il n ’y at ju sq u e s ores nouvelles de q u e lq u e s levées de gens contre nous
en Allemaigne, ny de Casim irus 1 ny d ’a ultre. T rop bien qu e (’E m p e re u r,
pressé p a r les électeurs de l’E m pire et des Estatz d’icelluy, escript au R oy
p o u r faire accord, et dit le L andgrave avec aultres Princes q u e ce pays
d o ib t beaucop au P rince d ’Orenges de ce q u ’il les at préservé de la tira n n ie
des Espaignolz. Ce seroit chose de mauvaise conséquence, ad ce qu e ju g e n t
plusieurs, si Sa Majesté se lessoit c o m m a n d e r p a r les A llem andz: et je pense
bien q u e le Conseil d ’E spaigne ne le Ireuvera bon : si seroit-il bien de par
tous m oiens possibles m ectre bas ceste cruelle g u erre, m esmes aiant S. !H.
assez à faire co n tre le T urcq.
J e renvoie les copiez q u e V. I. S. m ’at envoié, q u e j ’av leut plus d ’une
fois, tant m ’ont-elles pleut et don n é de contentem ent. Et ne veoidz poinct
ce q u e l'on sçauroit ou polroit d ire d ’advantaige. Les offices sont gran d z et
noblez. Dieu d o in t q u ’ilz profïiclent. Et je tiens q u ’ilz a u ro n t plus de c rédict et d ’efTecten Espaigne q u e icy ; c a r nous avons à faire à u n g ho m m e
trop soudain et variable. J e ne feray a u lc u n g s a m b la n t desdicles copies. Je
m e suis fort esbahi véant ce q u e V. I. S. me escript de la tentative que
Villa V in c e n z io ’ at fait au sieur Saganta 3 q u a n t au gouvernem ent, si V. I. S.
y vo u ld ro it e n tendre, faisant sa m b la n t q u ’il ne le d iro it sans sceu ou adveu
d u Roy ; car je tiens q u e icelluy en escripveroit bien lu y -m e sm e s à V. 1. S.
* Je a n -C a s im ir, co m te P a la tin , p rin c e d év o u é a u p ro te sta n tism e . V oir
H
oynck
t. Il, p a r t. II, p p . 5 0 1 , 5 2 1 , e t n o tre t. IV , p. ICO. Il est au ssi so u v e n t c ité d a n s
t er er
‘
,
van
G
P
a pen d rech t
roen
van
P
r in s
,
-
t. I II , IV e t V.
H oynck
van P a p e n d re c h t
(t. I , p a r t . II, p. 5 2 7 , m e n tio n n e ce p erso n n a g e de la m a n iè re s u iv a n te :
« L a u re n tiu s V illa -V in c e n tiu s X e rc z a n u s H isp a n u s, ere m ita A u g u stin ia n u s, d o c to r th co lo g u s L o v a n ii,
v ir s tir p e e t e r u d itio n e n o b ilis, v ix it m ag n am p a rte m B ru g is F la n d r o ru m , d o n e c su b in itiu m tu m u ltu u m B c lg ico ru m in H isp a n ia m secessit, re g iis ib id e m co n siliis in tim is a d h ib itu s , in q u it
sc rip t, sec. X V I. « V o ir au ssi
S a k d e ris,
F landria illustrât a, t. I l , p. 115.
* L ’a b b é S ag an ta, se c ré ta ire d u R oi, à M adrid.
M iræ u s
iit
CORRESPONDANCE
s'il e n «voit la volunté, cl qu'il la presseroit aussi bien com m e il feicl le
C o m m en d a d o r Maior lo rsq u ’il fui question de le faire succéder au Duc
d ’Albe. E l faull q u e cela se face à a u ltre fin, ainsi q u e Vostre I. S. le co n ­
sidère fort bien, y aianl resp o n d u p a r ledict Saganta ainsi q u ’il convient.
Il y at trop à faire p o u r d r a p p e r avec ceulx d’Espaigne et ceulx d ’icy.
J ’entendz q u e les Estalz de B rabant o n t présenté une requesle au Comm e n d a d o r Maior, co n le n a n t les services q u ’ilz ont faict despuis certaines
années en chà, avec term es doulx et m odestes; mais q u e la conclusion
jeele feug et flamme, disanlz qu e ces pays ne sont p o u r esln> gouvernez
p a r telz com m e ledit C o m m en d a d o r et son prédécesseur; mais q u ’il failli
q uelc’un du sang. Le m esmes dienl o u v e rte m e n t ceulx d ’Espaigne q u e sont
icy, et que le Roy at miz en une si g ra n d e caige, com m e est ce g o u verne­
m ent, ung trop petit oiselet, dénolantz le C om m endador, d u quel ilz se
m o c q u e n t à pleine gorge, et le hayssent p o u r ce q u ’il p o u rsu it ceulx q u e
se d esro b en t en France, où ceulx que y sont appellent p a r lettres ceulx q u e
sont icy, disantz q u ’ilz se hastent de venir et q u ’ilz seront fort bien Iraictez. Aussi j ’entendz q u e Son Exce se fâche du gouvernem ent, et qu'il dit
avoir prié le Roy po u r son d é p a rt qui peult-estre s’en treuve em p e sc h é;
mais s’il pren o it l’u n g n e de celles q u e V. I. S. dit, ce seroit le vray q u ’elle
fut adjoinct p o u r les seconder, puis q u e c’est en vous faire g o u v e rn e r ung
haston. p ourveu q u ’il creut conseil. Ce qu e si Mad. de P a rm e h e u l faict,
non luboraremus ; et p e u lt-estre qu e si Son Allèce ' r e to u rn o it, Jebus m peret. T ousiours le tiendroie-je plus à propos q u e le Duc de Médina, q u e
touttefois ces Estatz affectent fort; mais je tiens s’il y fut six mois qu e l’on en
seroit tost soucq *, et q u ’il a u ro it aussi ses m arm osetz. Si ceulx qui ont
charge fussent advisez, com m e Vostre I. S., de se servir de ceulx du p r o ­
pre pays et gaigez p a r le Roy, les affaires s’en po rte ro ie n t mieulx. Si l’on
envoioit Don Jo a n , ce serait le p e rd re et nous aussi, p u isq u ’il at telle suyte,
qu e l’affollera. Aussi il faict à croire que, su iv an t plus ses plaisirs q u e la
volunté du maistre, il s’en desgoustera sans l’e n trem ectre plus avant.
L’on d o ib t tant de tous costez, q u e son Exoe ne sçait de quel bois faire
flèche; ce qu e je tiens être cause q u ’elle se fâche, se véant sans argent et
1 M a rg u erite, d u ch esse de P a rm e .
* Soucq, assez.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
225
le payz tant rongé et m angé p a r faulte d ’avoir paié le soldat, q u e je ne
sçay où les Eslatz p o lro n t lever ny tre u v e r c e q u ’ilz offrent et pro m e c le n t
de paier.
C e st beaucop qu e sûm es quicles des gens du Duc E rich et des Suisses.
Les W allons q u e se sont d esbandez n’o n t faict tout le mal d o n t on se
d o ub toit, et sont estez bien ayses de se veoir hors de povreté et de dangier,
et se retirer chascun en sa cha sc u n e : car il n ’est créablc com bien l’on se
m e u re par l’Hollande et U lrecht . . . d o n t le Sieur Don F e rn a n d e s’est
retiré avec sa famille à Amersffort p o u r esloingner le dangier. Le bestial
q u e l’on at retiré au x villes engendre la c o rru p tio n , el l’on lient qu e le tiers
ho m m e soit m ort.
Les Espaignolz se de sro b e n t de temps à aultre, q u e leur est g rand d e s h o n ­
n e u r d ’h a b a n d o n n e r leur Roy p o u r servir ung e s lr a n g ie r 1. L’on afferme que
l’on n ’en sçauroit m ectre en sam b le tout c o m prins trois mille. Les A llem andz
tiègnent bon el sont ceulx à qui l’on doibt le p lu s; et l’on se passeroit bien
de si g ra n d n o m b re , car il ne faict à croire qu e si le P rince d O renges face
q u e lq u e invasion, e stant son e^tude de se m a in te n ir en Hollande et
Zéelande, qu e vaillent bien ung bon appoinctem ent, p o u r eslre une vaiche
à laict, com bien qu e les Espaignolz l’estim ent peu, disantz q u ’il les fault
n o ie r; et G e rtru y e m b e rg h e nous sert de réveil m atin, p o u r ce q u e c’est la
la rro n n iè re q u ’infeste la C am pigne et u n e g ran d e partie du B ra b a n t II sera
lard avant q u e la recouvrons ainsi que Bom m ele et G orcum , e stant passé
l esté sans rien faire; et cest esté passé polroit bien avoir ensuite de sem ­
blables q u e l’on gaignera aussi peu com m e l’on at faict ju sq u e s ores,
q u ’est la Iroisiesme année q u e travaillons en vain p o u r re c o u v re r ce q u'en
at esté perd u . J e prie Dieu nous faire grâce q u e Sa Majesté le p uist
considérer, et q u ’elle a v t pitié de son povre p e u p le si longtem ps affligé.
Il est certain q u ’avez tousjours m ain te n u q u e les confiscations ne p o rte roient le g ran d prolïict à S. iM. com m e le Duc d ’Albe et Vargas crioient
hault, a iant S. M. s u r ce fondem ent faict les encommiendos, récom penses
et pensions q u e y r o n t tout en fumée; et il y a t piz qu e l’on at si mal amesnaigé les biens confisquez, et usé de tan t d ’anticipations, sans a voir r egard
a u x rentiers hypo th ée q u e z , q u e l’on do ib t à a ulcuns vm années, et aultres
* B on n o m b re d ’E sp ag n o ls a lla ie n t p r e n d re se rv ic e en F ra n c e a c d t e é p o q u e .
CORRESPO ND ANC E
que vien d ro n t ung joui-, en verlu de leur h ypothccque, évaincre ie
fond, si tanl est qu e l’on veuille g o u v e rn e r le pays p a r justice, com m e l’on
at faict du passé, ou il sera force que Sa Majesté les dé b o u tte de leurs
renies, qu e eng e n d re ro it une g ra n d e crierie.
Elle he u t paie m illeu r m archiet les debtes des seigneurs, pourveu que
avec ce ils heussent po u rv eu à leurs affaires p o u r tousjours d e m o re r hors
de d ebtc; mais cela ne failloit actendre d ’e u lx ,p u is q u e les rançons de France
ne les avoient p e u lt aider.
Je ne sçay si le Conte de Mansfeld ' sera allé en Allem aigne; peult estre
q u a n t il a u ra i le congié qu e la m onnoie luy fauldra. Il at d o n n é assez
b o n n e a udience à l’abbé de Saincl-Ghislain *, q u e al esté envoie vers luy
p o u r traicter d ’a p p o in te m e n t de la p art du Prince d ’Antoing 5 p o u r son
frère le sieur de R y sb o u rg *, que at tué le filz d u d ict Conte, qu e at resp o n d u
q u ’on le trouverai traictable, si ainsi soit qu e le Irespassé ayt heu le tort.
C ependant ledit de R ysb o u rg se tient s u r sa garde au chasteau de Vallers s
s u r le Cambrésiz, avec vingt chevaulx h a rcquebouziers, qu e luy m angent
les oreilles, et vad d ro it à l’hospital, si ne parvient au m ariaige de la vicontesse de G and, qu e fut esté achepvé sans ledict accident.
M onsieur de C h a m paigney s’excuse fort qu e ce n’est de luy q u e Mgr le
Duc d’Arschot al sceu le secret, qui d irai bien de qui il Pat e n te n d u , et
polroit estre qu e ce seroil du C o inm endador Maior luy-m esm e, q u e parle
beaulcop.
Le conseillier M ic a u lt 11 me vient de dire que, sans actendre l’inform alion
de ceulx du G ra n d Conseil, l’on passera de b re f oultre en ce du renouvelle­
m en t des m agistralz de iMalines et Valenchiennes, el qu e loul se faict prest
p o u r estre envoié de b r e f à Son Excellence. Ledict Micault at envoié son
x ii
.
' l’ ic rre -E rn c s t, co m te (le M ansfeld, né en 1 517, m o rl en 1004. Il fut su c c e ssiv e m e n t g o u v e r n e u r
d e L u x e m b o u rg e t des P ay s-B a s. Sa v ie est p u b lié e d a n s to u s les re c u e ils d e b io g ra p h ie s.
1 M athieu M o u la rt, a b b é de S t-G h is la in , e n s u ite év ê q u e d ’A rra s . V oir t. IV, p. 1 0 t .
’■ P ie r re d e M elun, p rin c e d ’É p in o y , m a rq u is de R ie h e b o u rg , b a ro n d 'A n to in g , sé n éch al d e H a in a u t,
g o u v e rn e u r de T o u rn a i, co m m an d a l'a rm é e d e s E ta ts en 1561. Il a v a it ép o u sé : 1“ P h ilip p o tle -C h ris tin e
de L a la in g , 2» H ip p o ly tc de M o n tm o ren cy .
* R o b e rt de M elun, Sr de R ie h e b o u rg . V o ir p lu s h a u t, p . 1 0 9 , et les p p . 120, 121 e t 1 5 7 , o ù il est
q u e stio n d e ce m e u r tre .
1 W a lle r s , d a n s le d é p a r te m e n t d u N ord.
* D u C onseil p r iv é . V o ir p lu s h a u t , p. 103.
DU CARDINAL DE GR AN VELLE.
lilz aisné à Naples p o u r y p o u rsuivre ses estudes q u ’il a fort bien en c o m m en c h é , el le faict d eniorer avec ung ciloien, aiïin q u ’il ne vacque à a u llre
chose q u e au droict. C ependant je supplie Voslre lllmeSgrie le tenir soubz
sa protection.
Ce seroil b o n n e œ u v re q u e le m agistrat d’Anvers fut b ien redressé, et la
ju stice rem ise, et qu e l’on tint m iilcur soing en l’adm in istra tio n du revenu
q u e l’on n’at faict du passé. Hz doibvent p a r m illions et ne paient p e r­
sonne, aiant déclairé Son E x ce que nnlz bourgeois d ’Anvers ne seroient
p o u r six mois arrestables.
Le secrétaire E stie n n e G irard 1 m ’asseure qu e Du T a rtre \ q u ’est en
Espaigne, at présenté u n e requesle à Sa Majesté p a r luy couchée au nom
de la plus p a rt et saine partie de la noblesse de B ourgongne, contre les
nouvelles ord o n n an c e s ’, et que Sa Majesté l’ai envoie* p a r deçhà, q u e soubz
correction av a n t toutte chose debvoit c o m m a n d e r a u d ic t T a rtre de la s o u b scrire au nom de ceulx d o n t il at charge, a (fin q u e s’il se soil adv a n ch é le
chaslier co m m e il convient.
D epuis mes pénultiesm es ay-je e n te n d u qu e l'offre de ceulx de H a y n n a u lt,
d o n t j ’avoie adverti, n’est q u e d e livres du pays, q u e sont x paltarlz po u r la
livre, et q u e la présentation de ceulx d ’Artois est m o in d re de ce q u e l’on
m ’avoil dit.
J ’envoie le billet c y -jo in ct q u a n t à ee q u e concerne la convocation des
Eslatz de B ourgongne, p o u r ce que je ne sçauroie m ieulx d ire qu e ce que
porte le contenu.
Q uant à la ren d itio n de L eyden, je n ’en croira y rien ju sq u e s je veoie plus
seures nouvelles. Le b r u ic t en al esté icy doibz h ie r seoir, cl s'il y fust
q u e lq u e chose, Monsr de Sainct-Bavon el le Chancellier de B ra b a n t en
1 S e c ré ta ire d e l'a rc h e v ê q u e de C a m b ra i. V oir I. I, p. 107.
’ J e a n D u T a r t r e , é c u y c r, lie u te n a n t-g é n é ra l d u b a illia g e d ’A val. V o ir G ü l i . i t , Mémoires de la répu­
blique sequanoise, col. 1755.
5
11 e s t s o u v e n t q u e s tio n d e s d é m a rc h e s faites p a r les B o u rg u ig n o n s a u p rè s du g o u v e rn e u r g é n é ra l
e t d u Roi à p ro p o s d es n o u v e lle s o rd o n n a n c e s de le u r p ay s, d u n s la C o rre sp o n d a n c e e n tr e Y ig liu s c t H o p ­
p e r u s . V o ir
Moynck
van
P
a pe n d h e c iit
,
t. I, p a r t. II, p p . 7 9 5 , 7 9 0 , 7 9 7 , 7 9 9 ,8 2 1 , 8 3 5 . Ces o rd o n n a n c e s
a v a ie n t p o u r b u t d e r é p r im e r c e rta in s a b u s d a n s l'a d m in is tr a tio n . A cet effet Je a n d e B lacsere a v a it
reçu u n e m issio n p a r tic u liè re , d o n t il est so u v e n t p a rlé d a n s n o tre v o lu m e p ré c é d e n t c l d a n s
van
P
a pe n d r e c iit
,
ré v is e r ces o rd o n n a n c e s , D u T a r tr e fu t c h arg é de fa ire des r e p ré s e n ta tio n s a u Itoi lu i-m êm e.
T
ome
V.
H
oynck
t. I, p a r t. I l, p. OiO. A p rès a v o ir essu y é d es re fu s d e la p a r t d u g o u v e rn e u r p o u r
29
226
CORRESPONDANCE
au ro ie n t q u e lq u e advertissem enl. Ce q u e l’on adjouste q u ’ilz au ro ic n l
d o n n é cent hoslagiers ju sq u e s ilz a c com pliront la délivrance de Monsr de
Boussut, cela m e faict croire q u ’il n’en est r ie n ; car il ne seroit en leur
puissance, s’estantz to u rn e z co n tre le Prince d ’Orenges, délivrer celluy
q u ’est en la sienne, et q u ’il ne laschera facillement. L’on at dit ledit P rince
m ort, et q u ’il a t la teste eniïlée. J e ne sçay si gaignerons à sa m ort, car il
sera tousiours traictable p o u r ravoir son bien, et luy m o rt q u e lq u e Anglois
ou F rançois se polroit e m p a tro n n e r de Vlissinghe et de Zéelande p o u r son
m aistre avec qui l’on se tro u v e ro it en plus g ran d e difficulté. J ’entendz
q u ’E lb e rtu s est depuis huict jo u rs vers Son Excellence, qu e je tiens serat
envoié plus loing.
C ra in g n a n t q u e Monsr le P résident polroit escripre à Vostre Illme Sgne
qu e je seroie entre les cincq q u ’il a dén o m m é p o u r Arras, et q u e p a rla n t
Vostre lllmoSgrie polroit p e n ser qu e j ’y auroie q u e lq u e inclination, et que
cela seroit cause de re ta rd e r la fabveur q u e Voslre Illme Sgrie d o ib t aux
siens, je vous déclaire qu e je n ’ay veine qu e tire
LXII.
L E C A R D IN A L D E G R A N V E L L E AU DUC
d ’ü
R B IN .
(A rchives d ’Urbino. — Cl. I, div. G, t. I , liasse cxxi.)
N a p le s , le 2 5 s e p te m b re 1 8 7 4 .
111° Duca. Sua Maestà ci o rd in a et com a n d a con sue lettere ehe d e b b ia m o
convocare li b a ro n i et p ro cu ra to ri dell’ université dem aniali di questo suo
regno, per conferirli alc u n e cose ehe ci scrive im portant! al suo real servitio
et al beneficio universale, g u a rd ia et conservatione del detto regno. E t p e r
essere voi u n o delli b a ro n i principal! et solito sem pre con singulare affettione dem ostrarsi verso il servitio della p redetta Mli p rontissim o,vi dicem o
et o rd in ia m o ehe p e r li 24 del mese di otto b re prossim o v e n tu ro vi d e b -
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
227
biale ritro v a re in quesla cilia di Napoli nel luogo solito di San Lorenzo
nel p a rla m e n lo generale. E t rilrovandovi im p e d ito , m an d a re te p ro c u ra
bastanle a persona che com parä da voslra p a rle nel dello di con anipla
potestä di poler concludere et fare tullo quello ehe si trattarä nel detto
p a rlam enlo generale.
LX11.
ANALYSE.
S. SI. ayant décid e île co n v o q u er les n ob les et les proviseurs d es universités du
ressort royal d a n s ce ro yau m e (N a p le s ), à l’elTel d e conférer sur d es affaires im p o r ­
tâm es, le Cardinal requiert le d u c d ’Urbin d e se rendre dans ce but à N ap les, le 2 4 du
m ois d ’octobre p rochain, ou en cas d ’em p èclierncnt d e se faire représenter avec pleins
pouvoirs.
LXIII.
LE
PRÉV Ô T
M O R IL L O N
AU
C A R D IN A L
DE
GRANVELLE.
( Bibliothèque de Hesanço». — L ettres d iv erses, t. I l , fol. 2 8 2 )
B ru x e lle s , le 2 7 s e p te m b re I K 7 i.
M onseigneur. J ’ay receu la lellre de Vostre IIIme et Révme Seigrie du
xxmi® d u mois passé, q u e m ’at fort contristé et inopinéem ent, véant les
affaires de la G oulelte en tel estât q u e je n’en ose a tte n d re bo n n es n o u ­
velles, si ce n ’est p a r m iracle, p u isq u e les e n n e m y z avoient désià si g ra n d
advantaige p a r la sape, et q u ’il y at advertissem ent q u ’ilz avoient gaigné
de u x b o u llew ars et les rehaulsé de terre s u r les assiégez, q u e je p rie Dieu
CORRESPONDANCE
de conserver s’ilz sont encores en estre. Mais j e craindz q u ’ilz n’a u ro n t
tan t duré, et q u ’estant l’e n nem y le x m ie d ’aoust avec si g rand advanlaige
s u r eulx, le secours de Don J o a n , q u e p a rtit seullem ent le x x m e de Naples,
sera venu tard. Il y avoit nouvelles en Anvers q u e le secours q u ’avoit
envoié le Duc de T e rra n u e v a de T ra p a n a 1 estoit a rrivé en ladite Goulette ;
m ais qu e l’une galère avoit esté p rin se au retour. J ’ay envoié au Sr Don
F e rn a n d e le do u b le de ce q u e Vostre lllme Sgr‘e m ’en avoit eseript, avec
le discours jo in c t à ses lettres, qu e je luy ay aussi envoié.
Si noz affaires vont mal en Affricque, aussi font-ilz p a r deçà; car au
lieu que Leyden se debvoil et voulloit ren d re , l’on disoit en Anvers
q u ’elle estoit revictaillé, et que noz gens ont p e rd u deux prin c ip au lx
fortz en Hollande, aiantz h a b a n d o n n é l’ung, et s’estant recouvert l ’a u ltre
p a r force s u r noz gens. Ce que n’at esté sans g ran d e effusion de sang et
pe rte des ennem is, qui o n t aussi gaigné u n g pont de gran d e im portance,
aiantz poulssé devant eulx q u e lq u e légicre artillerie s u r roues, attaché
ensam ble, où ilz avoient miz force sacqz de laine dessus p o u r se g a ra n d ir
contre le traict de noz gens. Le jeu sn e Boisot ’ al esté fort blessé en u n e
ja m b e au re n c o n tre du fort gaigné p a r force.
L’on diet d ’advantaige qu e Valdez et Ju lia n , q u e se tenoient ta n t asseurez
de la p rinse et d u sacq de Leyde, sont enferm és avec leurs gens ; de sorte
q u ’ilz se tre uvent bien empeschez. A ulcuns d ien t q u ’ilz traictent avec le
Prince, et q u ’il polroit bien faire avec eulx com m e il a faict avec trois centz
Espaignolz, au x q u e l il at d o n n é passaige par A ngleterre p o u r aller servir
en France, et q u ’il leur fera grâce, les ren voiant s u r nous p o u r ce q u ’il ne
nous sçauroit envoier plus ru d e tra icte m e n t q u e p a r leurs m ains 3.
Il n ’y at plus question d ’a ulcun accord. T out cela d o r t et est rejecté. Le
tem ps polroit bien v enir de b rie f q u e l’on prieroit p o u r y recouvrer.
L’on diet q u e le P rince d ’Orenges at heu la peste en d e u x lieux, et q u ’il
' C h arles d ’A rag o n , d u c d e T e rr a n o v a , q u i lu i e n v o y é à l’c n lre v u c de C ologne d a n s le L ut de
p a c ifie r les P ay s-B a s.
* L ouis B oisot. V o ir I. IV, p. 3 0 5 , e t T e W
5
atek,
t. I l, p p . 24!) c ts u iv .
T o u s ces b r u its d e n ég o ciatio n s avec le P rin c e d ’O ra n g e é ta ie n t fau x : q u a n t au x su ccès des
assiégés de L e id e n , ils s o n t trè s v ra is. V o ir à ce s u je t les o u v rag es q u e n o u s av o n s cités p lu s h a u t,
p . 137, à p ro p o s de ce c é lè b re siège, e t la Correspondance de P hilippe I I , t. I ll, p p. 140, 158 et s u iv .,
1 6 6 , 168 e t su iv .
I)U CARDINAL DE GRANVELLE.
229
se refaict; aultres d ie n t q u ’il est em poisonné, et q u ’il ne peull vivre ung
mois *. P eult estre qu e s u r celte buffe l’on ne veult e n tre r en accord. T o u t lefois s’il m eu re avant q u e aions recouvert ce q u ’est p e rd u , je ne pense
p o in c t qu e faisons g ra n d proulïict à sa m o rt
Ceulx qu e re to u r n e n t en v ertu du p a rd o n d ien t q u e H ollande est re c o u ­
vrable si l’on lessoit faire à ceulx du pays mesmes, en faisant seullem ent
d e u x fortz p o u r e m pescher les com m erces aux villes; mais l’Espaignol ne
se fie en p ersonne, et veult to u t faire luy-m esm es p o u r avoir l'h o n n e u r
seul; aussi gaste-il tout. Aulcuns dient q u e c’est p o u r faire d u r e r sa solde,
q u e luy grèveroit p e rd re par u n e paix.
Noz povres Malinois n ’avoient poincl heu assez de m a l; ilz o n t encores
p e rd u cincq petilz b a tte au x près d ’Anvers, chargez de m oluez *, scardischs *
et auItrès provisions de poisson secq, in compectu nostrorum H ispanorum ,
q u e ne sont hardiz, si non où il y at à p r e n d r e et co n tre les femmes.
Il y at ad v e n u u n g m aulvais acte à Valenchiennes, où qu e s’estant c o m ­
b a ttu u n g A llem and et u n g Espaignol, et l’Allemand p o u r ses plaies p orté
en l’hospital, l’Espaignol avec ses com paignons y sont s u r v e n u ; et après
avoir faict p a r s a m b la n t leur dévotion en la chapelle, se sont après m iz
à h a sc h e r en pièces le povre Allem and, cou ché en son lict; q u ’est u n g très
m aulvais et cruel acte, et ne se doibvent e s b a h ir si ilz sont a b h o rr iz *.
L’on al rebaptisé les boullevoardtz du chasteau d’Anvers, q u e deb v ro il
avoir d o n n é son nom , p u isq u e elle at payé les esteulz.
J ’ente n d z q u e l’on est après p o u r co n te n ter aulc u n g z chiefz de c o m p a ignies des seigneuriez confisquées, et qu e l’on at d o n n é en p aiem ent à u n g
Conte de S c h a u e m b u rc h 8 les biens de B a tte m b u rc h ; q u e l’on at prése n té
Vianen q u ’estoit au S ie u r de B rederode au capitaine S chinck, qui at re s p o n d u q u ’il avoit à faire d ’a rg e n t et non pas de seigneurie p o u r p a ie r s e s
gens, et q u ’il n ’avoit m oien de les co n te n ter sans deniers. L’on v e u lt d o n ­
1 R e q u escn s, s a n s y a jo u te r foi, fît p a r t a u Roi de ces b r u its . V o ir Correspondance de Philippe I I ,
t . III, p . 1 6 9 . N é a n m o in s le P rin c e é ta it trè s m alad e.
(G
roen
v u
P
r in st e r e r
,
t. V, p p. 5 8 e t su iv .)
* M olucs, m o ru e s.
* Scardisch, c a b illa u d séch é.
* C ette n a tio n , d it M orillon a u tr e p a r t, » se faict a b h o r r ir p a r son in so len ce, d e so rte q u e l'o n tie n d ra
* in fâm es celles q u e s’a llie ro n t avec e u lx . » (Ibid., 2 9 0 v«.)
* L e co m te O th o n d e S c h a u c n b o u rg . V o ir la Correspondance de P hilippe I I , t. III, p . 8 0.
CO RRESPONDANCE
230
n e r Gaesbecque 1 au Duc Erich, auquel ou doibt 1111e m ille florins, p o u r
lesquelz il n’a t faict a u ltre service q u e de destru ire le pays. Cecy sera
renouveller les dou leu rs de la D am e d'E g m o n t, q u e les at passé en partie
a udict Gaesbecque. Les gens du Duc E rich sont en partie en F ra n ce , où
sont allé, p o u r le service d u d ic t Roy de France, 4,000 chevaulx qui n’y
vond p o u r bien faire.
L’on traicte le m ariaige de la fille aisnée de Madame d ’E gm ont avec le
Conte de H a u ltk e rk e ’, lilz du feu seigneur de G aesbecque; mais l’on envoie
p rem ier au Roy p o u r avoir aggréation du m ariaige et q u e lq u e dot p o u r la
D a m lle.
J ’ay e n tendu, estant en Anvers, q u e Sa Majesté envoye p a r deçà Monsr
H opperus p o u r estre président du Privé Conseil, et que l’advocat fiscal
de B ra b a n t vad en son lieu \ Q ue si ainsi est, sera p rac tic q u é p a r le Duc
d ’Albe, q u e ad ce compte, seroit rem iz s u r ses piedz; ce qu e je ne sçauroie
croire, s’il est vray ce qu e a u lc u n s bien privez d u Roy escripvent q u e
q u a n t ledict Duc en tra vers Sa Majesté, ilz se regardèrent tous deux, sans
p a r le r ung seul mot.
J e n ’entendz p o in ct qu e le m a rq u is C happin Vitelli parle encores. Il est
peu content, et selon q u ’il rencontre, il dégorge mille choses. J e vouldrois
q u ’il ne fust logé si près de M1 de C ham paigney, q u ’est cause q u ’ilz se
veoient souvent.
Il n ’y at plus m ention de la venue de Pierre de Melendes *, q u e fust
esté m eclre les affaires en trop g ran d hasard.
C’est merveille q u ’avez si peu de nouvelles du Roy en telle con ju n c tu re ,
1 G ac sb e e k , t e r r e d o n t L a m o ra l, co m te d ’E g m o n t, a v a it fait l’a e q u isitio n le 4 o c to b re
1503.
E rick
de B ru n sw ic k en a v a it o ffe rt u n p r ix de 2 1 0 ,0 0 0 flo rin s C a ro lu s ; m ais elle fu t a d ju g é e à d ’E g m o n t.
W
a u ter s
,
Histoire des environs de B ruxelles, t. I,
p. 150.
* É lé o n o re d ’E g m o n t, l’ain é e d es e n fa n ts d u co m te d ’E gm ont, é p o u s a G eorges de H o rn e s, co m te d e
l lo u tk c rk e , v ico m te d e F u m e s , s e ig n e u r de G a c s b e e k , S ta v e lc , B ra in e -lc -C h à tc a u . La com tesse d ’E g m o n t d e m a n d a it p o u r sa fille u n e d o t e x a g é ré e , se lo n R e q u e se n s. L es d e tte s d u co m te so n t c o n s id é ­
ra b le s, d it il, e t p e r m e tte n t à p e in e de p a y e r à sa v eu v e les 1 2 ,0 0 0 flo rin s q u ’e lle p e rç o it a n n u e lle m e n t.
L e je u n e h o m m e q u i p r é te n d à la m ain d ’É lé o n o re n ’a p as de v a le u r p e rs o n n e lle ; il est trè s tr a n q u ille .
V o ir Correspondance de Philippe I f , t. I II, p p . 1 4 7 , 148.
* J e a n B oischot. V o ir t. IV, p . 1 1 9 .
4
V o ir p lu s h a u t, p . 4 8 , a u s u je t d e ce p e rso n n a g e . Il ne p o u v a it p lu s ê tr e q u e stio n d e lu i a u m o ­
m e n t où M orillon é c riv it c e lte le ttre . M elendez é ta it m o rt d e p u is le 0 s e p te m b re 1 5 7 4 .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
251
com m e l’on se treuve à présent. 11 est certain q u e de ce costel là d o rm itu r in
v tra m q u e aurem '. Mais il polroit bien estre qu e de d a n s peu de tem ps ilz
seroient resveillé, et q u ’ilz a u ro ie n t leur to u r to u t ainsi com m e les aultres
o n t beu. Vostre IIIme Sgrie faict g ran d e c h arité de faire si g ra n d z et contin uelz offices vers Sa Majesté p o u r rem ectre ces povres estatz en repoz,
sans lequel ilz y r o n t à pe rd itio n . Et sont désià les choses si advanchéez
q u ’il faict à c ra in d re q u e tous rem èdes v ien d ro n t tard. Aussi c’est longue­
m e n t atte n d u de v a n t q u e les a p p lic q u e r; et je tiens q u e n e fût q u e la
peste est tan t générale en p lusieurs lieux, q u e désjà se seroient levez qu e l­
qu e p o p u la c e ; et encores q u e ledit mal s’a u g m e n te à G and et autres lieux
de F la n d re s, si n ’y sont p o u r ta n t dom ptez a u lcungz m aulvais espritz q u e
co m m e n ce n t à m o u v o ir, d o n t les Estatz o n t assez adverti Son E x ce, luy
r e m o n s tra n tz q u ’il se p e u lt souvenir en quelle peine elle s’est treuvée avec
ceulx de sa nation en A n v e rs; m ais q u e si le m al vient en Flandres, q u ’il
ne le s ç a u ra t si tost n y si bien rem édier, com m e il a t faict ce d ’Anvers. Le
p o in ct est q u e l’on a t envoié le com m iz Reingot p o u r in d u ire les q u a ltre
m em b res de F la n d re s d ’accorder, au lieu d u service au x chevaulx légiers,
n e u f florins p a r mois à c h a c u n e teste, sans de ce faire déd u c tio n s u r leu r
cote a u x de u x m illions, q u e seroit u n e a u tre ayde; car l’on y envoieroit
tous les chevaulx-légiers. D ie u ld o in t b o n conseil à Son Excellence, et à
Vostre Illme Sgrie très longue et b o n n e vie.
1 L es a ffa ire s s'e x p é d ia ie n t d ’u n e m a n iè re d é s e sp é ra n te en E sp ag n e. V o ir ce q u e n o u s e n cito n s
a u t. IV , p ré fa c e , p p . v e t v i.
CORRESPONDANCE
232
LXIV.
LE
PRÉV Ô T
M O R ILL O N
AU
CA R D IN A L
DE G R A N V E L L E .
(ftib lio tlièq ue île liesançon. — L f t l r e s d e Hivers, I. II , 2K(>-->87.)
B ru x e lle s , le ÜS s e p te m b re 1571.
M onseigneur. Je me suis bien apperceu qu e le C o m m endador iMaior et
Monsr de C hainpaigney se picquent. q uelque sainblant q u ’ilz se monsIre n t
T a n t y at q u e le D uc d ’Albe ne h a y t jam ais tan t votre frère qu e le
C o m m e n d a d o r ne le liayt encores dadvantaige. E t ne se peult tenir Roda
de d o n n e r a u lc u n e fois là où il se treuve qu e lq u e touche à iMonsr de Champ a igney, com m e le luy r a p p o rte Arias 2, auquel encores q u ’il se d ém onstre
peu content de Roda, je ne me vouldroie confier si j ’esloie au lieu de
Monsr de C ham paigney, qui n ’at esté a p p e llé a u Conseil d ’Eslal depuis q u e
le C o m m en d a d o r est là; m ais souvent y est appellé son émule, le cliasleilain 5, p o u r lequel Son E x ce at faict vers ceulx des Eslatz de B rabant ce
q u ’il at peult, alfin q u ’ilz le vouldroienl habiliter p o u r le term e de trois
mois à d e m o re r avec sa charge *, ou de en son lieu recepvoir son filz, que
n ’at qu e de u x ans, et qu e luy d e m o r e s o n lieutenant. Il est resp o n d u q u a n t
au p re m ie r poinct q u ’ilz ne p eulvent c o n trevenir au x privilèges et q u ’ilz
o n t escript au lio y , et q u a n t au second, q u e q u a n t il serat en eaige p o u r
taire serm ent, q u ’ilz feront voluntiers ce d o n t l’on les requiert. Aulcims
estim ent q u e aiant le C o m m en d a d o r d e m a n d é si c o u rt term e, q u ’il ne doibt
icy d e m o re r da d v a n ta ig e ; et desjà d ien t ses gens q u ’il s’en vad. J e croidz
1 D és le 10 ao û t 1 5 7 4 , R e q u e se n s in s is ta it a u p r è s du lto i p o u r q u ’il é lo ig n â t C h am p ag n ey d ’A n v ers.
( Correspondance de Philippe I I , p. 128.) P lu s la r d , le C se p te m b re 1 5 7 4 , il p ro p o se, p o u r s ’en d é b a r­
ra ss e r, de l’e n v o y e r à l ’é tr a n g e r . V o ir ibid., p. 1 5 7 . C h a m p a g n ey é ta it à la fois p a trio te et s e rv ite u r
fidèle d u R oi. Il n ’é ta it n i E sp ag n o l, ni G u e u x , m ais B elge, p e u t- ê tre u n p eu léger.
’ A rias M ontanus. V oir p lu s h a u t, p. 5 1.
* L e c h â te la in , c’e s t-à - d ire S an ch o d ’A vila, c h â te la in d ’A n v e rs . V o ir p lu s h a u t, p . 9.
* L es E ta ts d e B ra b a n t a v a ie n t in sis té a u p r è s de R eq u esen s p o u r q u e les fo n c tio n n a ire s d u B ra b a n t
fu ssen t B ra b a n ç o n s a v a n t to u t, se lo n le d r o it p u b lic.
255
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
plus lost que s’il h e u t u n e fois obtenu Icdicl ten u e , il lieul après prorogué
bon cj
ü;ré m algré
tout le m onde.
o
Lesdits Eslatz ont envoie en Espaigne leurs requestes; m ais j ’enlendz qu e
c’est p a r u n g h om m e fort im p e rtin e n t q u e je ne congnois. Il s’appelle
H ille ; et l’on me dit qu e le D u c d ’Albe al aultrefois c o m m a n d é q u ’il fust
chaslié, et q u ’il luy fera une trousse pardelà, où l’on dit qu e le Duc de
Médina 1 al crédit s’il fut p o u r s’en bien servir.
L’on parle fort à Anvers q u e Monsr d’H avret d o ib t succéder à Monsr de
C h a m p a ig n e y ; et o n t dit a u lc u n s c o u rtis a n t/ q u e le C o m m en d a d o r se vouloil loger en son lo g is,q u i d it leur avoir re s p o n d u q u ’il en seroit bienaise,
m o ie n n a n l q u ’il se p e u lt re tire r en sa m aison. S u r ce q u o y je luy respondis
s’il pensoit s’y tro u v e r bien, et q u ’il debvoit penser q u ’il se treuveroit
hoguiné* là, si l’on sçavoil q u ’il fust sorli d ’icy avec m auvaise grâce. Il resp o n d it q u ’eslant d an s sa m aison, il seroit hors de ce d an g ier et qu e p lu s ­
tost se y roit-il ten ir en Italie ju sq u e s ce m o n d e se cliangil. Mais j ’ay congneu à q u e lq u e propoz, auquel il s’est c o p p é , q u ’il d o ib l p a rle r plus loing
de sa pensée; car je l’ay veu en peine de ce q u e l’u n g de ses gens, que
Vostre lllmeS g 'ie lieul bien voulu avoir d e m a n d é u n g estai, c ra in d a n t q u ’il
l’h a b a n d o n n il; s u r ce qu e je lui respondis q u ’il y al plus de d a n g ie r qu e
vous l’iiahandonnez, puis q u e parlez de vous r e tire r: car lors n’auriez vous
à faire de lu y ; et je tiens que ne vouldriez q u ’il vous suivit : car ce seroit luy
faire p e rd re son tem ps ; ad ce q u e l’on dem ora muèl.
M onsieur d ’Ilavret publie q u ’il parle vers Espaigne p o u r d e m a n d e r au
Roy récom pense, qui p enserat avoir assez faict p o u r luy, l’aianl ho n o ré du
tiltre de M arcquis. J e me d o u b le q u ’il y proufficlerat peu, et q u ’il se fera
congnoistre com bien il est légier.
J e me suis riz aiant veu R o d a logié chez les Fouceres *, p o u r ce q u ’il al
e n te n d u qu e Voslre llImeSg ri8 et feu son père y logeoient. il y avoit u n g
Conte qui y d e m a n d o il estre, mais l’on disoit q u e c’esloit u n g lieu qu e l’on
avoit lousiours e xem pté; mais le susdict n ’at cessé ju sq u e s il y al esté miz.
J ’ay tenu propos à Monsr de C ham paigney s u r l’opinion q u e l’on at qu'il
1 J u a n d e la C c rd a , d u c de A ledina-C cli.
* Hnguiitc, c h a g rin e , im p o rtu n é .
1 Los Fouggcr.-, b a n q u ie rs c é lè b re s é ta b lis en A llem agne cl à A n v e rs. V oir t. IV . p . 4 3 1 .
T
om e
V.
50
CORRESPONDANCE
descouvrit sa charge à Mgr le D uc d ’Arschot. Il dict q u e ce fut le D uc d ’A rschot qui luy en parla, et q u ’il tient que cela venoit de la maison de Berth y 1 où se faisoient les despesches. C’est u n g poinct d o n t ces honnesles
gens le b attent et qu e d’Avila com pte là oùil se trouve, qui est fort en
grâce de S o nnius qui at faict ce q u ’il al peult vers certains abbez p o u r
seconder la d e m a n d e q u e le C o m m en d a d o r Mayor faisoit p o u r luy; dont
lesdiclz abbez o n t repeins v e rd e m en t Iedict Sonnius, q u e com m ence à
rafiner. Les Estalz hayssenl d ’Avila, el vouldroient avoir Monsr de C h a m paigney.
Il est, com m e Vostre lllme Sgr!e dit souvent, qu e noz gens ne veuillent
servir et e nra ig en t de ce qu e après l’on ne les prie. Je le ditz à propoz de
ce q u e iMonsr de B e rla y m o n t s’est retiré p o u r q u e lq u e temps en ce lieu.
Il devient roigneulx et est traveillé de la goutte. Je liens q u ’il at faict des
excès aux lieux où il est allé renouveller les loix, et q u ’il suivera N oircarmes.
iMons1' d ’Ilierge* est parti passez huict jo u rs p o u r aller délivrer le Sr Don
F e rn a n d e , que sera bien ayse de se veoir hors d’enfer. Le Conte de Meghe*
s’en vad en G heldres p o u r y ten ir le lieu de son frère.
Ainsi q u e j ’ay rec o m m a n d é l’affaire d ’Arras à M onsieur d ’Assonleville
p o u r le p rotonotaire ", je luy diclz q u e Mr d ’Y pres 6 avoit faict b o nne rescriplion de luy et de Mr d e F ro m e ssa n l 7. Je luy nom raay aussi ceulx que
l’on at desnom m ez p a r dessus les deu x susdictz, q u e sont Pori ", le Doien
d u d ict lieu 9 et le prévost de C am bray
qu e sont cincq, p a r où Voslre
I ||m c g g r i e pcult veoir qu e Mr le P ré sid e n t at mis u n e b o u rd e en mes m ains,
je ne sçay à quelle fin ou p r o p o z ; car je suis se u r qu e je ne luy ay jam ais
faict d é m onstration ny à hom m e qui vive q u e m on b u t vad là. Mais je suis
' Je a n -B a p tis te B e rty , se c ré ta ire d u C onseil d ’É ta t. V o ir t. I, p. 58.
* F ra n ç o is S o n n iu s, év ê q u e d ’A n v e rs de 1 5 7 0 à 1 573.
s G illes de B e rla y m o n t, Sr d ’H ierges, so u v e n t c ité d a n s les v o lu m es p ré c é d e n ts .
4 C h a rles de B rim e u , com te de M eghcm .
* P ie r re M ouchet, p ro to n o ta irc , Sr d e C h à te a u -R o u illa rd , n ev e u de G ra n v e lle . V o ir p lu s h a u t, p. 1 41.
* M artin R ie th o v c n , év ê q u e d ’Y p rc s d e 1 5 6 2 à 1 5 8 3 .
7 F ro m e ssa n t. C ette fam ille, o rig in a ire d ’A rto is, a é té allié e au x de B e au llo rt.
* L ouis P o ri ou P o ry , a rc h id ia c re h A rra s.
8 N icolas l.e n g a in e , d o y en à A rra s , m o rt le 7 o c to b re 1 5 8 6 . V o ir Gallia c h nstiana, t. III, col. 3 6 8 .
10 R o b e rt de F o rv y , p ré v ô t d u c h a p itre d e C a m b ra y e n 1 5 6 2 . V o ir ibid., col. 6 8 .
23o
DU CARDINAL D E GRANVELLE.
bien ayse qu e la chose vad ainsi, alïin que Voslre Illme Sgr‘° soit plus résolue
p o u r son n e p v e u r qui le mérite. Je d ira y bien un e chose qu e si Voslre
11lme Sglie le treuvoit bon, je diroie à Mr le P résident, un e fois en divisant,
q u e ledict Assonleville m ’a u ro it nom m é les susdictz cincq incidanunent,
p o u r voir ce q u ’il diroit, com bien q u e j e pense q u ’il treuveroit son é c h ap ­
patoire, disant q u e luy n’a u ro il no m m é p a r ses lettrez, et q u e si son o pinion
n ’avoit esté suivie, q u e du m oingz auroit-il faict ollice d ’a m y ; c a r q u a n t je
luy ay dict q u e Vostre lllmo Sgrie estoit joieulse q u e l’on avoit retreuvé les
papiers de R e n a rd ' et q u ’il eslim oit q u e l’on en feroit m illeure garde, non
pas p o u r n u ire a u x deffunct ou aux siens, mais p o u r au ltre o ccurrence que
polroit surv e n ir, il me dict q u ’il ne sçavoil si c’estoient les papiers que
Voslre 11lmo Sgrie pensoit, mais trop bien qu e l’on avoit treuvé des papiers
chez le vieil V ander Aa sans sçavoir ce q u e c’esloit.
Si H opperus vient, l’on verra com m e il s’accordera avec Viglius. T a n t y
a q u ’ilz sont F risons tous d e u x et c o n sé q u a m m e n t Anglosaxoues, qu e jo u e n t
voluntiers de la q u e u e ; et ad ce que je puis veoir Mr le P ré sid e n t se do u b le
q u e Vostre lllme Sgrie soit appellée en Espaigne. Ce qu e me le faict croire
est que, depuis q u e lq u e temps, il a t e s c r i p t plus souvent à Voslre IIIme Sgrie
q u ’il ne soloit.
Les G ueux nous m enassent q u ’ilz v ie n d ro n t e n fo n d re r le Sas de G and
p o u r in u n d e r la ville, q u e a l d u mal assez p a r la peste. La chose est faisable,
et s’en sentiroit T e rm o n d e et aultres villes. Dieu nous en garde.
Le B redenraed d’Anvers 3 ne s’est encores résolu q u a n t à la pétition,
com bien q u ’ilz o n t esté plusieurs fois ressam blez. Ceulx de ceste ville
m ectent p o u r condition que l’on fera deslogier les estrangiers, q u e irrite ra i
beaulcop. Mais les cucurs sont si cnflambez p a rtout, q u ’ilz ne sçavent plus
dissim uler.
1 Sim on R e n a r d , d ip lo m a te . V oir sa n o tic e , t. I, p. 3 0 3 , n o te 4 , c l T rid o n , Sim on R enard, ses
ambassades, e tc B esançon, 1 8 8 2 .
*
P
a i' e m
J e a n V a n d e r A a, s e c ré ta ir e d u C o n seil p riv é en 1 5 0 2 , p u is s e c ré ta ire d ’E ta t. V oir
>r e c i i t ,
H
ovnck
t. I, p a r t. II, p. 4 2 0 .
‘ hredenraed ou la rg e conseil d ’A n v ers, s u r leq u el n o u s d o n n o n s d es e x p lic a tio n s t. IV, p. 5 5 1 .
van
CORRESPONDANCE
23 6
LXV.
LE
PRÉVÔ T
M O R IL L O N
AU
C A R D IN A L
DE
GRANVELLE.
(Hihliothèque de Besançon. — L ettres de divers, t. Il, fol 2!'7.)
S ans d a te (s e p te m b re 1574).
' .... p o u r debtes de la ville, d o n t les créanciers et rentiers se p laiudent
p a rto u t.
J e faietz ce q u e je puis p o u r solliciter l’im m u n ité du clergié de Malines.
D ieu d o in t q u ’il proulïïcte.
Ce al esté le rnaistre d’hostel de Madame d ’A rrem b e rg h e q u e m ’at dict
q u e doibz F r id b e r g h e elle avoit dévotion de visiter Noslre-Dame de
Loraitle, et m é rite r le ju b ilé de Rome. Je m e ra p p o rte ad ce q u ’en serai.
V. I. S. a raison de faire l’oreille so u rd e à Arias Montanus. qu e le P ré ­
sident at tousjours dict qu e c’est magnus ardelio. Il gouverne le C o m m a u d a d o r paisiblem ent, et touttefois n’est a m y des Jésuytes, q u e so n t p o u r le
paier. Il receoipt plus de lettres et pacquectz du Roy q u e le C o m m an d a dor. J e l’ay tousjours tenu p o u r legier, com m e sont ceulx q u e p arlen t sans
cesse, com m e il faict, fondé d u tout s u r la gloire, ainsi qu e se veoidt p a r
ce q u ’est passé p a r ses mains. E t je tiens qu e la Bible q u e feil im p rim e r
le cardinal Xim enez ne d o ib t rien ou peu à celle q u ’il at m iz avec si g ra n d
ap p a ra t en lum ière, qu e couste c h ie r à Plantin. Le susdit souffriroit bien
q u e l’on le h o n n o r it de touttes singularitez. J e tiens p o u r m oy q u ’il at
plus de cotdpe à la statue d u D uc d’Albe 1 [q u e u n g fort p r iv a d o 5 d u R oy
escript estre hoslé p o u r non offenser dadvantaige ceulx de pardeçà], que
le Duc mesmes, lequel touttesfois l’on escript estre mal veu et traicté de
Sa Majesté; et q u e encores q u ’il c o m pare jo u rn e lle m e n t en court, il n ’entre
au conseil, d e m e u r a n t en u n e a v a n t- c h a m b re ou garderobe, où les officiers
1 L e c o m m en cem en t et la lin de c e tte d é p ê c h e m a n q u e n t.
* A rias M o n tan u s é ta it l'a u te u r de l’in sc rip tio n tra c é e s u r le p iéd estal de la s ta tu e d u d u c d'A lbo.
* P rivado, fa m ilie r.
DU CARDINAL DE G R A N V EL L E
257
d ’icelle luy p o rte n t peu de respect, et à peine se lèveroient, eslantz bien
assiz, p o u r luy faire place. A ulcuns m 'ont dit a voir veu lettres qu e ses
affaires et celles de son filz ne sont en guères s e u r estât, et qu e de Vargas
n’y at non pi us de m ention q u e s’il ne fut j a m a is esté au m onde.
Les prélatz et nobles de B ra b a n t sont d ’accordz avec Son Exce. Aussi
sont a ulcuns prem iers m em bres icy et en Anvers. J ’espère bien de Boisle-D uc. Mais je ne sçay com m e l’on sera convenu q u a n t au cenliesm e. Si
est ce q u e je tiens q u e Mr de B e rlaym ont et le Président ne tro u v e ro n t
tous les m oiens qu e les feroient m ectre la m ain à la boursse, et q u e où
eulx passeront, V. I. S. passera aussi.
Ledit P ré sid e n t m e dit q u e Mr de B e rla y m o n t se vanle q u ’il at le mot
du C o m m en d a d o r p o u r T o u rn a y , que touttefois est le coup du m aistre.
Le P ré sid e n t dit q u ’il veult tout avoir, et q u ’il se ren d p a r ce bo u lt fort
odieux, q u e seroit peu, si p o u r y p arv en ir, il ne lessoit de en plusieures
choses faire son debvoir. T ro p bien le faict-il à h o n n ir en derrière.
P o u r ce q u e je ne liens m in u te de ce qu e j ’escriplz, et m esm es de ce
q u e concerne A lïleghem , je désireroie qu e voslre secrétaire m ’envoiast
coppie de l’article c o n te n a n t ce que me sam bloil lors se d e b v o ir escripre
a u x m oisnes; car estant désià q u e lq u e temps passé, je ne me souviens si
bien de tous les poînctz, avec ce que j ’ay la m ém oire fort cou rlte, et je
feray p o u r l’a d v c n ir dresser les m inutes p a r M onsieur le doien de S,e-GoeIe
ou le secrétaire de cesle vostre court.
P u isq u e l’on n ’at nouvelles d ’Affricque, j ’espère que, com m e vous dictes,
c’est bon signe; car s’il y avoit a u llre chose, les T u rc q z en feroient voler
le b r u ic t p a r tout.
L ’on ne dict poinct où q u ’est le Roy de F rance. L’on v errat tost quel
pied il p r e n d r a doibz q u ’il serat en F ra n ce . Je tiens avec V. I. S. q u e luy
et les siens a u ro n t peu de crédict en Poloigne, p o u r y faire u n g nouveau
R o y à sa poste.
Mr de R assenghien ', ad ce q u e je puis veoir, s’est d espétré de la com ­
m ission q u e tient le se ig n e u r D on F e rn a n d e , au lieu d u q u e l y r a t M onsieur
d e Hierge, en ce q u e Mr de C h am paigney a t traveillé affin q u ’il pa rte tost.
J e v e rra y voluntiers le S ie u r Don F e rn a n d e hors de sa si p é n ib le et d a n 1 Maxim ilien de G a n d , d i t V ilain, Sr d e R a sse ng hien. V o ir sa notice, t. Il, p. 76 .
CORRESPONDANCE
238
goreuse charge: q u a n t ce ne seroit que p o u r la question qu e je veoidz se
lever entre luy et V a ld e z 1, que, q u e lq u e doulx et saige q u ’il soit, est de la
n a tu re des aultres avaritieulx et vindicatifs, aiant em pesché par sa pre­
su m p tio n que l’ap p o in c tem e n t qu e ce u 'x de L e y d e n , d u m oings aulcuns
p rin c ip a u lx bourgeois catholicques prac tic q u o ien t vers ledit Sgr Don F e r ­
n a n d e 8 p a r quelques bourgm estres d ’icelle ville q u e se sont retirez à
Utrecht, n’at heu succès, aiant detïendu à Marco C a r d u i n i 5 q u ’il ne lessast
passer la tro m p e tte d u d it Sr, accom paigné d ’u n g bourgeois de ladite ville;
et ledit Marco at plustosl obey a u d it Valdez q u e au capitaine général et
go u v e rn e u r d ’icelluy, cra in d an lz tous d e u x que, p a r ce boult, le sacq leur
eschapperoit; q u ’est bien ce q u e ces bonnes gens o n t bien en plus g ran d e
rec o m m a n d a tio n , sans avoir esgard au service de S. M. et bénéfice du
pays. Toutlefois ilz ne peulvent mal faire. J ’entendz qu e Son Excellence
dit q u ’elle aim eroit m ieulx p e rd re le bras q u e de veoir ce sacq, q u e seroit
divertir la dévotion q u e les aultres villes polroient avoir de se ren d re ,
p u isq u ’il n’y a u ro it espoir d ’e schapper le saccaigem ent d ’u n g n e nation si
avare et cruele. Ad ce q u o y Son Ex 08 peult rem édier si elle escript ausdits
Valdez et Marco en telle sorte q u ’elle d o ib t p o u r ré p rim e r un e telle o u ltre cuid a n c e ; et je tiens q u ’elle l’au ra t faict, s’il soit vray ce q u e l’on nous at
diet hier qu e Valdez a u ro it perm iz q u e ceulx qu e le se ig n e u r Don F e r­
n a n d e avoit envoié vers Leyden polroient p a rle m e n te r et traicler. Aultres
dient que ladite ville at esté revictaillée p a r une m arée, q u e l’on dit en
flam mcng Sprinck Vloel. Si cela fut vray, Valdez debvroit estre chaslié
d ’avoir em pesché, p a r sa convoitise et audace, le rec o u v re m e n t d ’ung n e si
im p o rta n te ville: d o n t je ne d ira y dadvantaige, estim ant q u e ledit S ie u r
' La q u e stio n d o n t il s’a g it se r a p p o rte au x d ém êlés e n tre V aldez e t D on F e r d in a n d d e L an n o y ,
avec lequel les b o u rg e o is d e L ey d en d é s ira ie n t t r a ite r de le u r so u m issio n de la v ille sa n s l’in te rv e n tio n
d e V aldez, c o m m a n d a n t de l’a rm é e esp ag n o le d e v a n t ce tte v ille . V oir
M
bndoça
,
t. Il, p . 20
t.
1 P a r u n e le ttre d u 21 s e p te m b re 1 S 7 4 , le n ie s trc de cam p V aldès in fo rm e R e q u csen s q u e, d e p u is
cin q jo u rs , le co m te d e La R oche a à W o rm o n t u n tro m p e tte e t d e u x b o u rg m e s tre s av ec lesq u els il
p a rle m e n te . V o ir Correspondance de Philippe / / , t. 111. p. I C I . L es h a b ita n ts d e L eiden a v a ie n t re fu sé
de tr a i te r avec V a ld è s; m ais ils v o u la ie n t e n ta m e r des n ég o ciatio n s avec le com te de La R oche. V o ir
ibid , p. 11)7, et
M
bndoça
,
t. I l, p. 2 6 1 . V aldès p r é te n d a it, d ’a p rè s
M
endoça
,
q u ’à lui seu l a p p a r te n a it le
d r o it de tr a ite r.
*
M arco C a rd u in i, c o m m a n d a n t d ’un ré g im e n t de W a llo n s a u se rv ic e d ’E spagne p e n d a n t le sièg e de
L eid en .
M
enooça
,
t. I l , p p . 2Ö5, 2 0 3 .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
239
en a d v e rtil V. I. S. Et si elle est un e lois revictaillée, il y a u ra i bien
à faire de la recouvrer, pu isq u e le lem ps fera doresm ais p o u r elle. Et ne
sera la feste passée qu e nous gens n’y aient receu dom m aige s’ilz ont
vaillu u n e p reune.. .
LXV1.
L E P R É V Ô T M O R ILL O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
( Bibliothèque rie Besançon. — L ettres de d iv e rs, t
II, fol. 310, 5 1 2 , 513.)
B ru x e lle s , le 4 o c to b re 1574.
M onseigneur. J e n’ay e n te n d u a u lc u n e conqueste de villes im p o rta n tes
laicte p a r C happin Vitelli, qui n ’at esté plus avant q u e G orcum et Bom m ele,
a iant le Sgr Don F e r n a n d e m anié ce de Leyden, où l’on avoit b o n n e envie
de r e to u rn e r soubz l’obéissance de Sa Majesté si Valdez et Marco C a rd u in i
ne l’h eussent em pesché
Aussi ny al y heu g ra n d e discorde entre les
E spaignolz et W allons. Du su rp lu s d o n t l’on avoit si lib é rale m e n t escript
p a r delà, j ’ay dit ce q u ’en estoil par mes précédentes, m esmes to u c h a n t
l’accord, d o n t ne se parle plus. Il est v ray q u e Don B ernardin de Mendoça *
at esté fort encaressé de la R o y n e d’A n g le te rre ; elle sçait p o u r q u o y elle
l ’a t l’a ict.
L’on at parlé qu e le P rin c e d ’Orenges vouloit .faire q u e lq u e levée au
P a la tin a t; mais cela ne s’est continué, et est m a in te n a n t tard. Son E x nc
sam ble voulloir h y v e rn e r en Anvers, au regret des officiers et courtisantz,
p u is q u ’il y faict si ch ie r et da n g e re u lx p o u r la peste, a ia n t esté infecté le
logis de M onsieur D a m h o u d re * q u e s’est icy retiré. Touttefois a u lc u n s
dien t q u ’elle se d o ib t tre u v e r icy le xie d ’octobre.
■ V o ir à la p ag e p ré c é d e n te .
*
B e ru a rd in o M e n d o ça, a u te u r d e s Commentaires s u r la g u e r re d e s P a y s-B a s. D a n s la n o tic e q u i
p ré c è d e le to m e I " d e s M émoires de M endoça, tr a d u its en f r a n ç a is , l’é d ite u r d o n n e p. xv des r e n ­
se ig n e m e n ts s u r la m issio n d e ce d ip lo m a te e n A n g le te rre .
5 Jo sse d e D a m h o u d e r, c o n s e ille r d u C onseil des fin an ces, m o rt le 2 2 ju in 1 5 7 5 . V o ir t. IV , p . 1 5 8 .
210
CORRESPONDANCE
Si le Roy de F ra n c e aiine le repoz p o u r son indisposition et s’a d o n n e r à
ses plaisirs, cela luy polroit faire à faire q u e lq u e m aulvais m arc h ie t avec
les H ugonotz, d o n t Dieu le g a r d e ; l’on dit q u ’il ne veult o u y r p a rle r de
la nouvelle religion. Je cra in d z qu e p r o c u r a n t le repoz de son royaulm e, il
nous jecte la g u e rre p a r cy p o u r oc c u p er sa noblesse.
J ’ay veu la lettre tl’H opperus et son discours que certes me sem blent
bien gonflez avec beaucop de répétitions et subdivisions *. Il n’est pas
l’h om m e p o u r d o n n e r des g ra n d z expédiens, et ce q u ’il dit a-t-il en partie
de Vostre llln,° Sgrie. Il me sem ble q u ’il at oblié ung principal m oien, qu e
seroit de ren d re les biens indifférem m ent, avec condition que ceulx que
ne vo u ld ro ie n t vivre selon l’a ncienne religion rom aine, se d e b v rio n t retire r
en aultre pays : cela rappaiseroit beaulcop de troubles, et les g ran d z ne
v o u ld rio n t icy reto u rn e r, c ra in d an tz q u e avec le tem ps, l’on leur polroit
faire q u e lq u e m aulvais tour. Si l’on adjoustoit q u e les estrangiers ne seroient
entrem iz en eslatz ou olïices, je tiens qu e ces deux pointz rap paiseroient
tout le m o n d e et q u e l’on verroit nouveau siècle. J e suis e sbahi q u e H oppe­
ru s laisse so rtir un escript de ses m ains si mal fagotté et d’u n g s i povre stil
et langaige. J ’a d jousteray q u ’il faict fort à p laindre q u ’ung aussi g rand Roy
n’at aultres gens près de soy. 11 est certain qu e H opperus n’at pas tousjours
tenu tel langaige du Duc d ’Albe q u ’il al flatté desm esuréem ent. pe n san t par
là faire l’ap p o in c tem e n t de son genre % et de sorte qu e le Duc le désestim oit
avec ses lettres. Vostre lllme Sgrie faict fort saigem ent de ne se mesler de ce
je u que polroit couster chier à H opperus, estant ledit D uc ung d o c te u r p o u r
luy r e n d re son cheange, e tÇ a y a s ne do rm ira . Aussi ne fera Roda, qu e je suis
esbahi q u e ledit H opperus ose lo u ch er si o u v e rte m e n t; d o n t il ne peult
estre que le C o m m e n d a d o r ne se ressente, qui al aussi sa p art au discours,
et mesmes en ce q u ’il au ro it adjousté au p a rd o n , q u ’est m ectre sus une
belle dispute, d o n t il les l’ault lesser convenir. Car je pense bien qu e le Roy
a u ra t c o m m u n ic q u é ledit discours au C o m m endador, qui cherchera et
peult estre tre u v e ra eslouffe p o u r d o n n e r u n g coulp de baston à Hopperus,
1 11 s'a g it du m é m o ire s u r la p acificatio n d e s P ay s-B a s, e n v o y é p a r le Hoi a u G ra n d C o m m an d eu r
le 1!) a o û t 1 5 7 4 , e t d o n t celui-ci r e n d it co m p te à so n so u v e ra in le 10 se p te m b re su iv a n t. L’a n a ly s e
q u ’en d o n n e R e q u e se n s e s t im p rim é e d a n s la Correspondance de Philippe / / , t. III, p. 152.
*
Genre p o u r g e n d re . C o rn e ille V a n d c r Myl é ta it le g e n d re de H o p p e ru s. Voit ce q u e n o u s e n av o n s
‘•il p lu s h a u t, p. 1 7 0 , n o te 5, à p ro p o s d e l’am n istie .
DU CARDINAL DE GR AN VE LL E
q u e Saincte-A ldegonde d it estre ou avoir esté m e tn n o n is le '; ce q u e s’il vient
à congnoissance, soulfiroit p o u r le deflerrer, encores q u e je pense q u e ce
soit calum nie, com m e telz belittres sont bien aises de m a c liu re r *les gens de
bien. Il osit bien d ire à feu J\Jonsr d ’Arras q u ’il sçavoit m ie u lx q u ’il ne
disoit, ul notam inureret. Toultesfois tout le m o n d e sçait com m e il at esté,
et com m e il est m ort.
Dieu nous d o in l b o nnes nouvelles de la G oulette, et q u e D on J o h a n la
p uisl secourir en temps. L’on dict icy q u e les T u rc q z sont estez reboutez
le xx® du mois passé de l’a s s a u ll5. J ’actendz avec exlresm e désir ce q u e en
d ira Vostre lllme Sgrie p a r ses prem ières. C om m e Vostre lll “18 Sgr)e m ’at
d o n n é licence de p arler du c o n te n u du discours qu e dessus, sans dire d o n t
il venoil. j ’ay ce seoir d e m a n d é à Mr le P résident ce q u e c’estoit de la venue
de H opperus, et quelles lettres il avoit de luy. 11 me dit q u ’il en avoit du
x x ix e d u mois passé; mais q u ’il n’y avoit a u lc u n e m ention de sa venue Je
ditz qu e j ’avoie ouy p a rle r et veu q u e lq u e discours p o u r rem é d ie r à ces
troubles, q u e l’on disoit estre de H opperus. Il me d e m a n d a quelz poinctz
il y avoit; je lu y dilz a u lc u n s , et mesmes de ce que l’on avoit clieangé au
p a rd o n . Il m e dict : q u e I on n’y avoit changé chose au lcune et qu e q u ic o n q u e
disoit cela, q u ’il avoit tort, et q u e seullem ent y avoit-on miz ad ce q u ’estoit
venu d ’E spaigne la clause de comm ittim vs, sans rien loucher, a d jo u sle r ou
d im in u e r à la su b sta n c e ; mais q u ’il estim oil q u e tel escript q u e j ’avoie veu
esloil forgé p a r deçà, co m m e il s’estoit faict p a r c y d e v a n t c o n tre V ostre Ulme
Sgrie. E t o ia n t ce, je ditz q u ’il p o u rro it bien estre, p o u r le lesser en son
opinion. Il se p lainct fort de H opperus, et dit q u ’il luy at esté do u b le et
desléal, tant vers les S eigneurs q u ’en Espaigne; et n ’est de h ier ni d ’a u jo u r ­
d’hui q u ’il se dé m o n stre m éc o n ten t de luy.
. Mr d ’H avret m a l dit q u e depuis x n jo u rs il avoit escript à Vostre lllme
Sgrie. Ad ce com pte il a u ro it cheangé de vo lu n té q u ’il m ’at dict aultrefois
estre de non plus luy escripre. 11 m ’at dict q u ’il vad en Espaigne, m an d é
du Roy et d u du c de Medina-Celi, quod v ix credo, et non pas p o u r se
' M cmnotiisle, m c n n o n itc , c ’c s l-à - d irc d isc ip le d e M ennon, a n a b a p tis te p a c ifiq u e , q u i r é p u d ia it
jes c rim e s re p ro c h é s à scs c o re lig io n n a ire s m ilita n ts , tels q u e J e a n d e I.cid cii, etc.
* Macliurer, m e u r tr ir .
5 l,c 2 2 j u ille t, les T u rc s c o m m e n c è re n t le siège de la G o u le tte c l la p r ir e n t d ’a s sa u t le 24 a o û t.
Tomf. V.
5i
CORRESPONDANCE
c h a rg e r d a u lcune com m ission des E s la lz , m ais p o u r d e m a n d e r les
x x v i i i m ille florins qu e le R o y luy doibt, d u q u e l il d it q u ’il ne vouldroit
p re n d re en paiem ent le m a rq u isa t, mais q u ’il e n te n d d e m a n d e r terres p o u r
son d e u b l. Ses gens o n t très mal vescu, e tc e u lx de Monsr de C ham paigney
ne leur d o ib v e n t riens, et ont faict des actes exécrables et pires q u e n’at
encoires faict a u lc u n e com paignie W allonne.
Mr de B erlaym ont hoigne ‘ plus q u ’il ne feict o n eques, et se dit povre,
et qu e l’on traicte mal son filz aisné. luy d o n n a n t seullem ent d e u x mil
oscuz, là où Don F e rn a n d e et Mr de Noircarm es ont h e u si g ra n d tra ictem ent, et dict qu e p o u r éviter celluy, l’on at accordé à Don F e rn a n d e son
congié \
J e craindz q u ’il n ’a u ra t gueres de gré vers le C ornm endador Maior et
Roda ; et l’on vad justilliant Valdez q u ’il at faict ce q u ’il debvoit de ne
lesser passer la trom pette vers ceulx de Leyde, p u is q u ’il n’estoit adverti de
son chief ledit Sr Don F e rn a n d e , q u e l’on dit luy avoir oscript, mais q u e
les lettres ne sont estez addresséez. Ainsi le com pte Mr de B erlaym ont,
a brevé de ceulx qui o n t desguisé ce faict, d u q u e l ledit Sgr D on F e rn a n d e
s’est m erveilleusem ent resse n tu ; mais ceulx d ’E spaigne ne p eulvent mal
faire *.
J e renvoie la lettre et discours de H opperus, d u q u e l Mr le P ré sid e n t se
plainct q u ’il luy at esté double el desloyal tan t vers les Seigneurs q u ’en
Espaigne. L’on verra, s’ilz s’entrevoienl, quelle m in e ilz tie n d r o n t; mais ce
n ’est d ’hier n y de a u jo u r d ’h u y qu e Mr le P ré s id e n t s’est desm onstré mal
c o n te n t de luy.
Les chevaulx légiers, q u e sont x x u com paignies, aiantz en te n d u qu e l’on
les voulloit licentier, se sont am utinez, et o n t chassé le capitaine Vargas et
aultres chiefz avec les com m issaires q u e leur a p p o rto ie n t x mois de paie­
m ent, au lieu q u ’ilz dient q u e l’on le u r en d o ib t x l h . H z sont vers T erm onde,
où l’on lient les portes serrées, et au q u a rtie r de W aes, où les villaigeois
leur p olroient bien faire un e venue, s’ilz sont tro p traveillez.
Les G eldrois o n t e n v o i é leurs députéz vers Son Excellence, la re q u e r ra n t
1 Hoigne, g ro n d e .
* V oir a u x A p p en d ices.
* « J e ne sçay q u e lle so lu tio n l’on d o n n e ra a d ce q u e lc d ic t V aldez a t r e te n u les le ttre s q u e le c a p i» ta in e d e L ey d c a t e s c rip t en re sp o n se de celles d u Sgr D on F e r n a n d e . » (N ote de M orillon .)
24.3
DU CARDINAL DR GR A1NVELLE.
de leur te n ir le traicté de Venloo, d o n t l'on se soucie p e u , qu e polroit
couster \
1 V o ir a u x A p p en d ices. N ous d o n n o n s ici u n e a u tr e re p ré s e n ta tio n d es É ta ts de G u c ld re du
5 0 m a rs 1Ö7S, p a r la q u e lle ils fo n t c o n n a îtr e la tris te s itu a tio n d e le u r p ro v in c e e t r é p è te n t ce q u ’ils
o n t d it a n té r ie u re m e n t. L e tr a ité d e V en lo o , du 12 se p te m b re 1 5 4 5 , est p u b lié d a n s
D
ümont
,
t. IV ,
p a r t. Il, p . 261 :
« llo ic h v c rm o e g c n d e F u rs l, G en cd ig c l i e r . Na o n s c r b c re y tw illig c n d ie n ste s e rb ie d in g e lo t U. F . G.,
tw ijv c lc n n y e t d iesclv c a lsn o ch in fris s c h e r m em o ric n h e b b e n su llc n , w e le k e r g estalt w y v a n w egen
d e s e r F u rs te n d o m b s G clre e n d e G racffschaps Z u tp h e n , in d ie m n e n t van O cto b ri le stle d e n , n y e t s o n d e r
g ro o te m c rc k e lik e k o ste n U. F . G . v e r lh o in t e n d e g e r e m o n s tr e e r t h e b b e n g e h a t d en e rb a rm e lic k e n ,
eelen d ig cn e n d e c a lam ito sc n sta e t, d a e r in n e die b e d ro o ftd e o n d e rd a n e n o b g e m e lte r F u rs te n d o m b s
G e lre e n d e G raeflsch ap s Z u tp h e n a ls d o e n w a re n e n d e v e rs e e rd e n v e rm its v c rs c h e y d e n e x a c tie n , co n ­
tr ib u tio n ,
u u y tlc n d is c h e n d ie n s te n , lie n in g e n , d o o rto c h te n van r u y t e r e n d e k n e c h te n ,
d a e rm e d e
d ie sc lv e o n d e rd a n e n o n ly d e lie k w o rd e n b e z w a c rl e n d e g e p re ss e rt, b id d e n d e II. F . G. d ie selven in
s ta t en d e van w eg en C. M., o n se n a lle rg e n c d ig stc n H e re n , d e s e r la n d e n w ild e e r b a r m e n , e n d e v an
su lc k c in to lle ra b iie o n m en sclic lic k e la s te n e n d e b o o rd e n v e rlie b te n e n d e so u la ig e rc n . NVaerop U. F . G.
o n s b y a p o s tille b elo efte e n d e d ie v e rtro e s in g e gegeven als d a t m en , na o m g an ck d e r m a e n d e n van
N o v em b er e n d e D e c e m b e r, v a n d e lie n in g e d e r k n e c h te n oick o n tle d ic h t sa l w e rd e n , d a t o i c k so b a ld c
a n d e re S. M. la n d e n ccn ig c c o n tr ib u tie n h a d d e n b e w illic h t, m en van d icselv e d ie v e r s tr e c k te lie n in g e
so u d e re s titu e r e n , e tc ., m it d ie rg e ly e k e g o ed e bclo fften . E n d e alh o cw cl d ie v e rlic h to n g e d e r lie n in g h e
d a e r n a e r lic k c r m aten g c v o llic h t, soe ist n o c h ta n s d a t o n la n c x d a c r n a e een gro o to n a n ta l m eu tisc h e
S p a n ie r in d esen la n d e n g ev allen e n d e la n g e r als cen m a e n t b ly v e n lig g en , d e n w elck en m en , v e rn iits
ro o v e n , b r a n d e n e n d e m o o rd e n , een en g ro o te n p c n n in c k h elft inoten o p b re n g e n to t g ien e g e rin g e b esy n .
g e v o lc h t sev en v en len H o ic h d u y tsc h e k n c c h te n d a c r v a n n u m e re n d e e l a 1noch in d e G racffsch ap Z u tp h e n lig g en . E n d e soo m en U. F . G. d a c r v a n d u rc h e e n e n e x p re sse n C ourier schrilT tlick v e rs te n d ic h t
h a d d e n , d ieselv e b elaelft b in n e n c o rte d aeg en g elt te se n d e n , d a e rm e d e sy g e se d ic h t g c c o n te n le rt en d e
alT gcdauct so lle n w e rd e n , d a c r op n o c h ta n s o v eral n y c t g e v o lc h t; tw elck m en n y e t g en o ich cn k an
v e r w o n d e r e n , n y c t w e te n d e in w a t m e y n in g e su le x a lle s in v e rg e te n g e s ta lt; ja e d a t m e h r is, so
h e b b e n d ie sp a c n sc h e S oldaten itso n t b in n e n A m c rsfo o rt in g a rn iso e n lig g en d e en d e J u lia n o lio m e ro
d en g e tro u w e n o n d e rd a n e n d a c r o m b a re n t b ero o fft, o e r h u y s e r, b e rg e n e n d e n io clen a f tg e b r a n t, d ie
lu y e n g ev an g en e n d e v ia n tlic k e r w y se r a n s o n t, w ie d a n oick d ie r u y te r o n d e r c a p ite y n A u re lio in
o e re n a fT to c h td a t b este d e e l van d e n d o rp e E edc (H cd cl) a ffg e b ra n t. T w elck d ie H o ic h d u y tsc h c n m it
b r a n d e n e n d e fan g en oick o n d e rs ta e n to d o e n . T e n c o n s id e ra tie v a n tw c lc k e e n d e m ede gelet o p te
iiu y tc rs te d e s o la e th e y t e n d e a rm o c t d e s e r la n d e n , d ie m e c r n y c t ly d e n o ft d ra e g e n en k ö n n e n , b id d e n
s e c r d ic n s te lic k e n d e o e tm o e d c lic k d u U. F . G ., in n aem e h o ic h st g e d a c h te r C. M., g elicv en w ille d ese
la n d e n v an so d a n in g e n v a n g e n , s p a u n e n , b r a n d e n , ro o v e n , m o o rd en e n d e v ia n tlic k e ra n ts o n in g e
g e n e d ic h lic k to v e r lic h tc n , sc h u tse n e n d e sc h e rm e n , v o lg c n d e d ie c o n in c k lic k e b c la c ffte n en d e
to esaeg en , d a e r u u y t m e n m o c h t sien e n d e sp o e re n d a t m en v a n w eg en S. M. n y e t g e m e y n t cn w e re
d ie lan d e n e n d e d e r s e lv e r in g eseten g e tro u w e o n d e rd a n e n in t g eh ccl ten b e s te n to g even e n d e laetcn
v e rw u e ste n . E n d e a l sy n n u w y d e r o n g ^ tw y v e lte r v e rh o p in g e su le x also to su llc n g esch ied en , b id d e n
d a n n o c h U. F . G. tro o stc lic k a n tw o e r t... » (Archives de l’A udience, lia ss e I4 S .)
CO KR ESP O iM M NC E
Les villes qui ont preste au x Espaignolz 1 o n t envoié leurs députés à Alost,
où ilz consultent com m e ilz d e b v ro n t recouvrer leur prest s u r la prochaine
ayde, et y sont les d é p utez de Lille, T o u rn a y , C o u rtra y , Valenchiennes,
Tillem ont, B ois-le-D uc, Maestricht, Deventer, Cam pe et Sxvolle. Je suis
esbahi que l’on ne tiègne au ltre regard de m ectre tan t de gens ensem ble. Si
ladite déduction se faict, ce sera u n e g ra n d e bresche à l’ayde, laquelle soit
(elle q u e l’on vouldra sera de peu de valeur, selon q u e tout est im pignoré
et em broillé; et l’on vient si avant q u e de deffendre de ne paier nulles
debtes ny rentes q u e Sa Majesté doibt, tan t s u r son d o m ain e et les aides que
s u r les biens confisquez, sans te n ir a u lc u n g regard a u x h y p o th e c q u e s pré­
cédentes ladite confiscation, d o n t il y at g ra n d m escontentem ent. Enfin je
veoidz qu e tant plus nous allons plus avant, et piz est-il.
L’on parle de la venue de l’arm ée de m er, encores qu e Pierre Melendes
soit mort* et q u e soubz u m b re d'assiéger E n c h u se du costé de Tessele’; c’est
p o u r jecter encores des Espaignolz p a r deçà. S’ilz ne viègnent m ieulx dissiplinez et q u ’ilz ne font m ieulx qu e ceulx qu e sont présentem ent, il v a u ld ro it
m ieulx p o u r Sa iMajesté et p o u r nous qu e l’on les h e u t emploie en lieu où
l’on en at plus de besoing. S’ilz viègnent ce serai en bien m aulvaise con­
j u n c t u r e et saison, avec d an g ier de se pe rd re , si les forces des ennem iz les
ren c o n tre n t.
1 Les villes e t m êm e d e s co m m u n es r u ra le s fa isa ie n t a u x tro u p e s esp ag n o les d es a v a n c e s so it en
a rg e n t, so it en v iv re s, d o n t le to ta l, so u v e n t c o n te ste p a r le G o u v e rn e m e n t, d e v a it ê tre d é fa lq u é des
aid e s co n sen ties au so u v e ra in p a r les É ta ts. N ous d o n n o n s p lu s lo in en n o te l'acte r e la tif à cette
ré u n io n .
* Il é ta it e n effet m o rt le 6 se p te m b re 1 574-.
* T c sse l ou T e x c l, lie e n tr e la Z u id c rz é e e t la m e r d u N o rd .
DU CARDINAL D E GRANVELLE.
245
LXVII.
LE
PRÉV Ô T
M O R IL L O N
AU
C A R D IN A L
DE
GRANVELLE.
(Bibliothèque «le Besançon. — L ettres île Morillon, t I I , fol 510.
B r u x e 'le s , lu I I o c lo b rc 1574.
M onseigneur. Aiant resp o n d u ailleurs à u n e partie de la lettre de Vtre
IlImee t R me S rie d u ixe d u mois passé, je re p re n d ra y a u lc u n s poinctz d ’icelle
c o n c e r n a n t Mr de C ham paigney, du quel je me suis bien apperceu estre
véritable ce q u e Vtre lllme Srie dit de luy, q u ’il ne pense rien m oings q u e à
sa re tra ic te , encores q u ’il en face ouverte d é m onstration, tant de bouche
q u e p a r lettres vers Louis de Requesens et le Roy 1 m esmes ; et p o lro it
estre q u ’il se tro u v e ro it bien esbahi si l’on le preg n o il au mot, et q u ’il se veit
p o u r toutte sa vie escarté de Court, et q u e l’on ne tie n d ro it com pte de luy ;
ce q u e Morillon luy at représenté, auquel il a respondu ce q u e Granvelle
en a u ra t en te n d u p a r ses précédentes. Le dict Morillon at opinion q u e
Mr de C ham pagney s’a p p u it d u d u c de Medina Celi, q u e je tiens trop
faible p o u r le so u btenir, et q u e q u a n t il v o u ld ra t faire olïice, le Roy luy
p o lra t m o n stre r les lettres p a r lesquelles Mr de C h am pagney luy d e m a n d e
si e xpressém ent son congié; ce q u ’il ne deb v o it faire sans l’advis de G ra n ­
velle, q u i at raison de d ire q u ’il est subit en ses résolutions. Dieu d o in t
q u ’il luy en pregne bien, mais il ne d ebvroit estim er honte de c o n su lter
son aisné tan t expérim enté, et qui gouverne roiaulmes. Morillon me d it luy
a voir pa rlé to u sjo u rs clèrem ent et ro n d em e n t, q u a n t il lu y a d e m a n d é advis
q u ’il tient a voir esté en choses q u e Mr de C h a m p a g n ey avoit d é libéré de
faire, com m e de re to u r n e r en Anvers et aultres m enutés, p o u r ga ig n e r opi­
n io n de suivre conseil, a ia n t dem a n d é le m esm e et pe u lt-estre à m esm e
lin à Viglius, Bave et Roda. J e le veoidz mal satisfaict d u P ré sid e n t F ro issard * et doibz longtem ps, e t d it q u ’il tient form elem ent le parti de^B esan­
1 V o ir la le ttre d e C ham p ag n ey a u R oi, d u 2 0 a o û t 1 5 7 4 , d a n s la Correspondance de Philippe I I ,
t. III, p. 158.
1 J e a n F ro is s a rd d e B roissia, d ’a b o rd p ro fe sse u r à l’U n iv e rsité de D ole, fu t a p p e lé à la p ré sid e n c e d u
246
CO RR ESPONDANCE
çon et du conte de Vergy 1 ; je n’ay rien en te n d u q u e Colotte * seroit licentié ny les causes p o u rq u o y .
S u r ma foy, je m e suis bien d o u b lé encores q u e je n’en voulluz faire
sa m b la n t à Granvelle, q u e ce du testam ent s u r lequel l'on at consulté
p a r Morillon E lbertus *, estoit une ruse; mais je m ’asseurai bien qu e en ce
G ranvelle verroit c le r; et s’il ne luy faict sa m b la n t de rien, com m e si Moril­
lon ne luy en e u t poinct escript, Mr de C ham pagney sera tro m p é : car je
liens qu e à celle fin luy at-il d é c lairéce poinct, nllin q u ’il le feit so n n e r au x
oreilles de son m aistre. a u to risa n t son invention p a r l’advis d u d ic t E lb e r­
tus, que procède à b o n n e foy.
Le bon est qu e l’on n’osera d e m a n d e r à Morillon s’il en at adverti G ra n ­
velle; et si l’on luy d e m a n d e ,il m ’a dit q u ’il resp o n d ra qu e non p o u r ga rd e r
le secret, p u isq u e l’on ne luy avoit d o n n é charge d’en faire sam blant.
J e crainds com m e vous q u ’il n’y a y t de la co u v e rtu re en ce des m eubles,
et je v ouldroie q u ’escripveriez u n e lettre bien expresse à V iron et à m oy,
de les d e m ander et recepvoir p a r inventaire, et q u e procédons sans dila­
tion à celle de la m aison soubz le bénéfice de d ro it \ Mais il sera bien q u e
ce poinct soit en un e a u ltre lettre à part, aflin q u e si les deu x fussent jo inctz
en une, cela ne luy d o n n it altération, p o u r non vuyder ses m ains des m eu­
bles ausquelz il ne p e u lt rien préte n d re , sinon ce q u e luy est d e u b t en
v ertu des partaiges; d o n t sera bien q u e Vtre lllme Srie a djouste u n g m ot
q u ’il en soit rem b o u rsé p ro m p te m e n t des deniers de l’hoirie, com m e elle
at désià escript plus d’un e fois; et lors il n’a u ra t cause raisonnable de dif—
P a rle m e n t en c e tte v ille en 1 5 7 2 . Il m o u r u t le 2 7 ja n v ie r 1 5 7 5 . ( ü o l l u t , co lo n n es 2 5 8 , 1 7 5 8 .) Scs
q u a lité s e t ses d é fa u ts y s o n t é n u m é ré s d ’a p rè s des e x tr a its d es p a p ie rs d e G ra n v e lle . « Son o rg u e il, y
e st-il d it, d é p la it à D ie u e t au x h o m m e s; le fo n d e m e n t de l'h u m ilité e s t p lu s s û r p o u r y fa ire u n b â t i ­
m e n t dessus. II besoigne fo rt s u r la re fo rm a tio n d e la ju s tic e ; il m o n tre q u ’il e s t h o m m e q u i e n te n d
e t q u 'il y a e n c o re d es g en s d ’e s p r it a u p ay s. » ( I b i d col. 1 7 5 8 , n o ie 4.)
' F ra n ç o is d e V erg y , S ' de C h a m p lile , n o m m é com te p a r P h ilip p e II. V o ir sa n o tic e , t. III, p. 3 0 .
’ Le d o c te u r C o lo tti é ta it u n d e s h o m m es de co nfiance de H élèn e de B re d c ro d e , v eu v e d u co m te
d e C a n le c ro ix . V o ir t. IV , p. 3 9 0 .
5 11 s’a g it d u te s ta m e n t d u p è re d e G ra n v e lle . V oir t. IV , p. 5 2 3 .
4 E lb e rtu s L e o n in u s, p ro fe s se u r à l’U n iv e rsitc de L o u v a in , so u v e n t c ité d a n s ce v o lu m e et les
p ré c é d e n ts .
*
L es m eu b les m e n tio n n é s d a n s ce passage re n fe rm a ie n t d e s b ijo u x e t d es v aisselles, d o n t la p ro ­
p r ié té é ta it co n testée p a r les m em b re s de la fam ille P e r re n o t.
DU CARDINAL DE GRAKVELLE.
247
férer la rendition desdictz m eubles, et l’on luy polroit d e m a n d e r l’intérest
de ce q u e l’on en p o lro il proililer, en les v e ndant, q u e s e r o i t le plus seur
q u a n t à la vasselle b la n c h e et dorée q u e reste, ne fut qu e l’on v o u lu t rése r­
v e r qu e lq u e s pièces qu e m éritent d ’estre gardez en la m aison. Si nous
povons tirer avec b o n n e grâce lesdicts m eubles et jo y a u lx , lors nous po lrio n s p ro cé d e r audict inventaire avec les solennitéz req u ise s; et q u ’il s’o p posit qui vouldroit, nous p a sserionsoullre. El si Vtre lllme Srie le trouvoitbon^
j e désireroie q u ’elle le re q u it p a r ses lettres, de v y d e r ses m ains desdicts
m eubles, desquelz désirez faire le plus g ran d pro u (lit d u r a n t la m inorité
des p u p ille s ; et vous servir de to u t p o u r faire am as de deniers, et d é c h a r­
ger la m aison d u dot de Mlle P éroné
En ce q u ’il fault user, p a rd o n n e z moy ce qu e je dilz p a r vraie affection, user de plus de diligence sans les­
ser couler le tem ps. Voicy la (roisiesme a n n é e qu e m ad a m e la Comtesse
leur m ère * est décédée, et si a t-on encores peu faict; d o n t l’on se riro it
après soubz le b o n n e t, et p a r t a n t faull-il d ire elèrem ent qu e les ralonges
sont dom m ageables, et q u ’il y fault m ectre fin, ca r ledief dot c o u rre et
m angera.
J e ne trouveroie, soubz c orrection, la ga rd e des coffres, où l’on m eclroit
l’a rg e n t et jo y au lx , si seure en la trésorie de l’église de Malines com m e au
chasteau de Vilvorde, où Mr l’A m m an de cette ville est capitaine, q u e je
tiens y avoir heu en g a rd e q u e lq u e chose de Viglius. L’on en veult au x
églises, e t le lieu où l’on m ict la trésorie de Malines n’est tro p s e u r n y
capable p o u r y m ectre coffres ; et je vouldroie m ectre ung g ra n d coffre à
trois se rru re s com m e vous dictes, q u e ne se peult r e m u e r ou e m p o rte r com ­
m odém ent q u e p a r d e u x ou trois hom m es, y m eclanl u n g coffret dedans
avec l’a rg e n t et m eubles, ensam ble la spécification p a r billet, aussi à trois
s e rru re s ; a d jo u sta n t a u ltre chose p o u r rem ploige d u d ic t g ra n d coffre p o u r
le re n d re de poix. N éantm oings rien ne se fera en ce, sans vostre sçeu et
adveu. C ependant il y a lieu s e u r chéans et au c abinet de Malines p o u r en
faire b o n n e g arde, j u s q u e l’on ente n d ra vostre bon plaisir.
J e n ’y plus o u y p a rle r d e s x v m m ducats q u e l’on disoit q u e auriez reçeu
1 P é ro n n e P e r r e n o t , fille d e T h o m a s e t é p o u se d ’A n to in e d 'O y s e le l, c h e v a lie r , b a ro n d e V ille­
n e u v e , g o u v e r n e u r d e D o le. V o ir t. IV , p. 5 2 5 .
* H élèn e d e B re d c ro d e , v eu v e d e T h o m a s P e r r e n o t, co m te d e C a n tc cro ix .
CORRESPONDANCE
de Milan, ny des x ou x im ducals desquelz l’on Irouvoit voslre lettre; et je
suis s e u r q u e si en ce Vtrc lllme Srie se Irouvoit tenue, q u ’elle se raccuseroit
soy-m esm es sans a tte n d re q u e l’on la sommit.
Si l’on ne peull o b te n ir à Home la confirm ation du bien de Lobbe, je ne
veoidz poinct q u e y avons g ra n d intérest, car il est acheté assez h a u lt; et y
a iant pensé plus d ’une fois, il m e sam ble q u e si povons venir à ravoir,
nous dirions qu e ferions bien a u ltre prou (lit à acheter B uggenhoute, q u ’est
bien aultre chose et seignorie, u n g beau revenu qu e se p e u lt a u g m e n te r;
et feroit un e g ran d e b resche la som m e furnie p o u r le d ict Lobes q u e porte
x x x v u m vc florins, d o n t il fault dé d u ire les n m q u ’avez profïité s u r le
cheange, y ad jo u sta n t aultres x u n m vc; ce seroient Lm qu e l’on d o n n e ro it
com ptent, et telle adjection se fera tost des deniers q u ’avons icy, et ne serat­
on em pesché au besoing de tro u v er encores x m, s i d’a d v e n lu re en d o n n a n t
Lxm co m p ta n t, cela nous polroit a d v an taig er s u r le m a rc h ie l; c a r l’on fera
tousiours xxm florins de S ^ A m a n d et de Basserode qu e sont d u m a r c h ie l;
de sorte qu e si l’on p o lro it avoir le tout p o u r 1111“ ou 1111“ et x m florins, au
ju g e m e n t de ceulx qu e s’y en te n d e n t, l’on n'y feroit m auvais m arc h ie l; et
ne cousteroit tant com m e faict le bien de Lobbes, auquel l’on ne gaigne
a u ltre chose q u e la situation, q u e Viron et voz olficiers ont tan t e stim é ; et
si l’on a du bien ailleurs, ce me sam ble tout ung, et q u ’il fait bon d’avoir
voisins et vassaulx riches sans vouloir tout a p p ro p rie r au Sr. Cecy ditz-je,
alïin que ne soiez en peine p o u r avoir le co n sen te m e n t à R o m e ; e spérant qu e
polrons tro usser le dit m a rc h ie t q u e je désire de tout m on c œ ur, et y ferons
ledict Viron et m oy tout bon et léal debvoir. Le Sr de P ie n n e aiant exposé
p u b l i q u e m e n t en vente so n d ic t bien, ne trouve poinct q u e l’on est fort
a p r è s ; aussi c’est u n g g ra n d m archiet, et l’on trouve peu de gens qui ont
envie d ’a c h ete r m a in te n a n t, si ce n’est MMrs de Liekerke et R e in g o t; qui
nous faict plus de traversse p o u r l’a m ortissem ent d u bien q u e l’a b b é de
Lobbe at acheté du dict Sr en F la n d re s, et p o u r les droiclz seigneuriaux,
q u e l’on ne faict à Vtro lll,ne Srie à R om e; et ce p a r despit q u e le dict abbé
at ru é s u r son m arc h ie t q u ’il pensoit faire de B oschure, où q u e l’ho m m e
d u d ic t abbé feroit m arc h ie t p o u r luy de B u g g h e n h o u te à i ii i« m florins; ce
q u ’il luy avoit pro m is et n ’at sçeu achever. Le dict Reingot nous fera b e a u ­
cop de ruse p o u r se vanger, et d e m a n d e d o u b le droietz seigneuriaux p o u r
le R o y ; ce que, p o u r d ire la vérité, nous fâche, et ne vouldrions e n tre r en
241)
DU CARDINAL DE GR AN VEL LE .
contention avec luy. Si la difficulté co n tin u e à Rome, nous ne p e rd ro n s
g u e rre à r e p re n d re voz deniers p o u r en faire m ille u r prouffit.
P . S. Je suis après p o u r recouvrer les com ptes et valeur de B u ggenh o u te , qu e l’on at faict n c x x mille florins, q u e at estonné tout le m onde.
LXVIII.
L E P R E V O T M O R IL L O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(B ibliothèque de Besançon. — L ettres de d iv e rs, t. I l , fol. 314.)
................... .. le lï! o cto b re IS 7 4 .
Monseigneur. Le tiers m em bre 1 ne veult riens d o n n e r, disant qu e tout
ce q u e l’on at d o n n é j u s q u e s ores n’at rien profïiclé qu e p o u r faire d u r e r la
g u e rre ; qu e ceulx qui o n t charge d ’icelle ne c h e rc h e n t p o u r leur p articulier
prollict qu e de la faire d u r e r et fom enter ; q u ’il fault le u r hoster belli nervum ,
et m e dit l’on q u ’ilz l’o n t ainsi couché p a r escript, du m oins quelques
n a tio n s ; qu e aultres dien t q u e les affaires de pardeçà r e q u iè re n t la présence
de Sa Majesté, et si icelle vient, q u ’ilz tiègnent p o u r certain q u ’elle a m m e nera la paix, et q u e p o u r re c o u v re r icelle, ilz b a ille ro n t leur sang et s u b ­
stance. E t q u e si Sa Majesté ne pe u lt venir, ilz p rie n t qu e l’on advise qu e lq u e
inoien d ’accord, et q u ’ilz feront d ebvoir de léaulx subjeclz, ne lessant leur
P rince naturel avoir faulte de chose q u e soit en leur pouvoir; mais q u ’ilz ne
veuillent poinct dadvantaige n o u r r ir ces sangsugues q u e o n t affollé les
villes et plat païs, et feront da d v a n ta ig e , si l’on leur d o n n e m oien p o u r
I’a d v e n ir com m e l’on a t faict du passé. Ces propoz tro tte n t p a r to u t, et
certes me desplaisent. C ar je craincdz q u e lq u e g ra n d in co nvénient p a r cecy,
e l q u e Sa^Majeslé et Son Kxoe s’en m alc o n te n lero n t avec raison.
1 V o ir, a u s u je t des d ifficu ltés so u le v ées p a r les E ta ts de B ra b a n t, la Correspondance de P hilippe / / ,
t. III, p . 184. Les E ta ts de B r a b a n t, d it R e q u e s e u s , so n t les p lu s difficiles d e to u s , e t p ro b a b le m e n t
ceux q u i e x c ite n t les E ta ts d e F la n d r e et les a u tr e s . L es villes d e v a ie n t d o n n e r le u r ré p o n se à la fin
d e s e p te m b re . Il le u r a tr a n s m is de n o u v e a u x o rd re s à cet effet^
T
ome
V.
32
CORR ESPONDANCE
D ’aullre p a rt les ennem iz o n t secouru Leyden, et ont b a tlu nous Espaignolz, desquelz il en est d e m e u ré q u e lq u e n o m b re s u r les cham ps. Hz font
c o u r r i r le b ru ie t qu e les villaigeois les ont tra h i, q u e sont d i s a i n c s 1. Les
villaigeois n’o n t pas estez les m aistres des cham ps. C’est ho n te auxditz
c o m plaindantz d'avoir esté si mal s u r leur g a rd e ; car c’est p a r leur q u a r ­
tier qu e les ennem iz sont venuz. Et peu de villaigeois se treuvenf
m ain te n a n t p o u r le m aulvais traictem ent q u ’ilz souffrent depuis qu e l­
ques années enchà et sont m orlz ou relirez aux villes. P uisq u e u n e ville
sans garnison at tenu bon ung entier esté, qu e feront celles qu e seront
pourveues de gens? Qui heust lessé faire au S eigneur Don F e rn an d e , elle
se fut re n d u e à lu y ; ce q u e ll e ne voulut faire au C om m en d a d o r Maior,
n y à ceulx de sa s u ite ; car elle estoit m alcontente d u peu de secours
qu e luy faisoit le P rince d’O renges, qu e y at rem édié p a r ledict revicluaillem ent, et dit l’on que le capitaine Mario C arduini at eslé p rin s audict
rencontre.
11
sam ble q u e Valdez et les Espaignolz ont la lest vers Utrecht, où l’on ne
les veult poinct, et aussi peu ceulx du clergié q u e les b ourgeois; et s’ilz se
résolvent e nsam ble, ledict Sr Don F e rn a n d e se treuvera en p e in e ; car, ad ce
q u e j ’enlendz, ceulx de la ville d ien t q u ’ilz seront bienlost maislres du
chasteau, q u e ne sçauroit souffrir une volée de canons, tan t est-il fendu et
crevé de toulles p a rtz ; et si dient ceulx d ’Utrecht q u e q u a n t ilz vo u ld ro n t
se servir de certain ancien canal q u i vad soubz ledict chasteau, doibz le
tem ps qu e le R h in avoit son cours p a r U t r e c h t s, q u ’ilz feront to m b e r ledict
chasteau et tout ce q u e y est dedans. J e vouldroie veoir ledit Sr Don F e r­
na n d e icy, car il est peu au goust du C o m m en d a d o r et des siens, et
Monss de Hierge ne se haste po u r luy succéder. Aussi ne faict le conte de
Meghe, son frère, g ran d e diligence p o u r aller en Geldres.
Si nous gens h a b a n d o n n e n t H ollande, ce qu e je ne puis croire, Harlem
se p erdra de rechief, et A m sterdam ne p olrat p lu s lo n g u em e n t soubslenir;
* Disuines p o u r disanccs, b a v a rd a g e s .
* L e ch âteau d e V re d c n b o u rg ou V re e b o u rg fut c o n s tru it en 1 5 2 8 , s u r r e m p la c e m e n t du c o u v e n t
d e S te -C a th e rin e , à U tre c h t. Il a v a it u n e fo rm e q u a d r a n g u la ire fla n q u é e d e q u a tr e to u rs et fu t d ém oli
en 1 5 7 8 p a r la b o u rg e o isie ; m ais il en e x iste e n c o re q u e lq u e s v estig e s p rè s de la b a r riè r e de C a th e ­
r in e . E n ce q ui c o n c e rn e le c o u rs an cien du R h in , on p e u t c o n s u lte r
atque osliis. L e id e n , I C H , i n - i “.
C
l iv e r il s
,
De tribus R hcni alveis
DU CARDINAL DE GRAN VEL LE
car le D im m e rd y c k ' une fois h a b a n d o n n é , les enn e m y z v ien d ro n t ju sq u e s
à U trecht. Et ilz sont ta n t obstinez qu e à Delfl, ilz o n t perse la dicque, de
sorte q u e la force de l’eau at em porté un e porte et q u e lq u e partie des
m u ra ille s ; et lorsque l’eaue in u n d a, le b o u rg m e stre de la ville, q u ’estoit s u r
la m uraille, dit à ceulx q u ’esloient près de luy, q u ’il p erdoit en prairies et
terres la valeur de x x x n m florins ; mais que encoires aim eroit-il m ieulx
veoir copper la gorge à son filz et à sa fem m e, qu e de veoir la ville en tre les
inains des Espaignolz. Ceulx de R otterdam sont aussi fort intéressez p a r
ladite in u n d a tio n ; et est to u rn é e dessus dessoubz une partie d e la teste; et
l’on c ra in t qu e u n e g ra n d e partie de la ville se p e rd ra t et em porterat.
Aussi ont-ilz com m encé de pe rc e r les Hont-Bosch * q u e l’on at e n tre te n u
‘ D ic m c rd ijk , d ig u e d an s le A m ste lla n d , p ro v in c e de la H o lla n d e se p te n trio n a le . E lle s’é te n d de
Z c c b o u rg j u s q u ’à M u id e rb e rg , le long d e l’IJ.
’ llo u t-B o s c h ou Ilo n t-B o sc h . Le H o n t-B o sc h est d a n s la p ro v in c e de la H o lla n d e s e p te n trio n a le ;
m ais le H o u t-B o sc h n o u s est in c o n n u . V oici ce q u e nous tro u v o n s d a n s les ré so lu tio n s des É ta ts de
H o llan d e au s u je t d u p e rc e m e n t d e s d ig u es en 1 5 7 4 :
« 1 8 7 i . A ug. 2 6 . G c c o m m itte e rd e n om te G ouda en d a a r o m ire n t te d o en o p e n e n a ile d e slu is e n ,
d y k e n en k a d e n , d ie b e t w a te r h e t nicest in b e t lan d v e rs p rc id c n s u lle n to t o n tse t v a n L eyden.
1 5 7 4 . A ug. 5 1 . T o t o n tse t v a n L ey d en nog te o p en en ecn g a t o m ire n t S t-llc llc h r c c h t en tu ss c h e n
K o ltc rd a m e n S c h o o n d c rlo o , e n nog de tw e e re e d s b e g o n n c n g a a tc n .
1 5 7 4 . S e p t. 2 . Mr P . B uys te in sp e c le e re n a lle o p en in g cn v an d y k e n , slu is e n en k ad en in S ch ielan d
en D elflan d en a n d e r e n o o d ig c d o o rg ra v in g e n tc d o e n ; to c s ic n d e rs te inogen stc llc n om de g ra v e rs en
a rb c id e rs to t d e v o ir te h o u d e n .
1 5 7 4 . S ep t. 8 . G eco m m itt. te S c h o o n d c rlo en op de K a v e n d y k le o r d o n n e e rc n de le d o e n e o p en en g en in d e n d y k to t o n ts e t v an L ey d en , ook de g e m a a k tc g a a te n en h e t v c rla a t doen afste e k e n en
w ydcn.
1 5 7 4 . O ct. 4 . B illie tte n g e m a a k t to t b esteed in g van de s lo p p in g w eeg en s h c t h o u d b y ad v is van
S yn E x c e lle n c e d e r g a a tc n o m ire n t B o ltc rd a m in d e L eu v en d o o rg e g ra a v e n e n in d e n d y k g eo p en t.
1 5 7 4 . O ct. 2 4 . G c c o m m itte e rd e n om tc R o tte rd a m te b e ste c d e n [d e s to p p in g v an ] de g a a te n v an den
Y sscl en d en d y k a ld a a r d o o rg e g ra v e n en o v e r h e t a rb e id slo o n te v e rd ra a g c n op a f k o rtin g h a a r c r
p o r tie in d e 6 0 ,0 0 0 k ro o n c n .
1 5 7 4 . Nov. 1 1 . A ile d e g a te n in d e n Y sscld y k of Z eed y k to t o n tse t van L ey d en d o o rg eg ra v en
e e rstd a a g s te s to p p e n , e x c e p t h e t g a t b y G o u d a, d a a r d o o r de sc h eep en g e p a s s e e rt zy n .
1 5 7 4 . N ov. H . D e slo p p in g en o p m a a k in g d e r v o o rsz. g a te n to b e ste c d e n b y d y k g r a a f c n heem r a a d c n v an S c h ie la n d te n m in ste n 's L an d s k o ste , R o tte rd a m d e noodege p e n n in g e n u it lia a r p o rtie
in d c 6 0 ,0 0 0 k ro o n e n te f u rn c e rc n .
1 5 7 4 . D ec. 1. D ie v a n R o tte rd a m om tc fu rn e c re n de n o o d ig e p e n n in g e n to t sto p p in g d c r g a te n in
den Y sse ld y k o f Z eed y k d o o rg e g ra a v e n lo t o n tse t v a n L ey d en , se e k e re g ra a n e n op te rm y n e n te m ogen
v e rk o o p c n .
1 5 7 4 . D ec. 11. D e r e p a r a tie d e r d y k e n en slu isen d o o r last v an dc S ta a te n d o o rg eg ra v en en g c o p e n t
t o t ’s L an d s k o ste n to d o e n . »
252
CORRESPONDANCE
de lout temps avec si g ran d e sollicitude et despense, qu e l’on appel loi t ung
des miracles de ces P a y s -B a s; et disent les en n e m iz q u ’ilz n ’ont besoing de
la terre, et q u ’ilz ont assez de b a ü e a u x p o u r se m a in te n ir en la mer. Ce
sont les term es ausquelz l’on se retrouve après avoir p e rd u tout Testé et
faict u n e despense incroiable. Nos gens ont p e rd u deux canons devant
ladite ville, en ont jecté deux en l’eaue, et heul peine de saulver le surplus,
si intentifve fust la p lu sp a rt à p r e n d r e la fuite. Ces m auvaises nouvelles
font d e m o re r Son E xce en Anvers, au lieu q u ’elle debvoit estre icy c ejourd ’hu y . E t d ic t-l’on q u ’elle at la teste vers Bois-le-Duc; et tout est de
besoing, si l’on ne d o n n e plus de c o n te n te m e n t aux Geldrois, qu e parlent
e n tre les d e n lz ; mais l’on ne se soucie de riens ju s q u e s le mal est advenu,
lorsque l’on est bien péneulx q u a n t il est trop tard.
L ’on avoit relaxé Saincte-A ldegonde p o u r le c o n d u ire à D o rlh ; mais il at
esté rete n u s u r q u e lq u e b ru ic t q u e ledit P rin c e seroit m ort, qu e je liens
estre u n e baye
Il at retiré beaucop de nos W a llo n s, qui avec les Gascons
ont faict ledit revictuaillem ent, et mis en ro u p ie nous gens, desquelz je
craindz q u e la p e rd te soit plus g ran d e q u e l’on ne dit. Mais les hom m es
sont plus recouvrables q u e les villes, et j ’entendz de bon lieu qu e si l’on
he u t reco u v ert et bien traicté Leyden, q u e auItrès villes fussent suivi, quoyq u e le b o u rgm estre de Delft et ses semblables p u issent b rav ise r: ca r le
m en u peuple se v é a n ts a n s gaignaigc s o u b z le P rince, v o u ldroit re to u rn e r
deçà s’il y avoit q u e lq u e asseurance de benigne traictem ent. M aintenant ledit
P rin c e est au-dessus, et avec les m alveuillantz d e m e u re ra m aistre, ausquelz
il vad peu, si Hollande se p e r d t ; car ilz ne p e n se n t y d e m o re r et n y ont
poinct de b ie n , ne se soucient si elle s’in u n d e ou conserve.
Nous fumes icy avec exlresm e désir a lte n d an tz les nouvelles d ’Affricque.
Dieu, p a r sa saincte grâce, nous les d o in t bonnes, p u is q u ’elles e m p o u rte n t
tant au bien universel de la C hrestienneté et à la g r a n d e u r de nostre Roy.
Dieu doint b o n n e vie à Vostre Illme Srie p o u r ta n t de bons oflices q u ’elle
faict p o u r ce povre pays, q u ’en at ta n t de besoing et se vad p e rd a n t à veue
d ’œil. Le mal est qu e le R oy dem a n d e et at advis de tous coustelz et passé
longtem ps, et ne les suyt. Les dissim ulations d’E sp a ig n e nous ont afîollé et
1 B aye, so ttise. — L e p rin c e d ’O ran g es a y a n t é té trè s m a la d e ,
r é p a n d u s en B elg iq u e. V oir, au su je t de sa m a la d ie ,
G
roen van
P
des b ru its de sa m o rt f u re n t
r i .m s t e r e r
,
t. V, p p . 58 e t su iv .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
253
eulx n’y g a igneront guerre, et ont p erdu crédit avec leurs stratagèm es, e t
bourdes, et en est le Roy mesmes m oingz aim é et estimé. Je crois bien que
com m e il est saige, il se co n d u ic t selon conseil; mais il do ib t re g a rd e r de
q u i il le pren d . L’on d it icy q u ’il rem ect souvent s u r le tre n c h o ir de son
Conseil les malvais advis q u ’il luy at d o n n é et q u ’il at suyvi c o n tre son c u e u r
et op p in io n \ Il me souvient q u e lorsque feu l’E m p ereu r, qui cognoissant
l’h u m e u r des Espaignolz, les avoit tenu court, résigna ses Estatz au Roy,
l’Espaigne dressa in c o n tin e n t les cornes, et dit q u e son to u r estoit venu au
g ouvernem ent, ce q u ’elle at depuis exécuté magno suo et noslro malo. Le
desseing d é m o n stre assez avoir esté de ré d u ire ce pays en p ro v in c e ; mais
cela est p e rd r e tem ps. J ’e ntends que l’A rchevesque de C ordoue
qui at
souffert u n g tem ps p o u r s ’avoir m onstré affectionné à ce pays, rem e ct au
d u c d’Albe bien souvent ce q u ’il luy avoit p ré d it s u r ses em prinses, et q u ’il
n ’en v ien d ro it jam a is à chief, et que le Roy y p e rd ro it plus q u ’il n ’y gaigneroit.
Vostre lllme Srie fera u n e g ra n d e euvre si elle faict tan t q u e R oda ne
de m e u re icy. Car c’est u n g da n g e re u lx hom m e, h a ultain et h a rd y , a sp irant
o u v e rte m e n t à l’estat d u Président Viglius, et plus p e rnicieulx q u e Vargas.
q u e ne se mesloit d u g ouvernem ent, mais des troubles, avec lequel ledict
am b itie u lx ne s e p o u v o it a c c o rd e r; ca r il veult rég n e r seul.
1 C’e s t u n e ju s tic e à r e n d r e à P h ilip p e II. E s p rit é tr o i t, p arfo is tr o p égoïste, faible e t f a u x , il se
la is s a it a lle r a u x c o n seils d ’h o m m e s p eu s c ru p u le u x , q u i ne v o y a ie n t d a n s les affaires p o litiq u e s q u e
le u r p r o p re in té rê t, ja m a is celu i d u p a y s , ni m êm e celu i d u Roi. Si le d é fa u t d e ju g e m e n t l’a p e r d u ,
scs c o n s e ille rs n ’o n t p as m o in s c o n tr ib u é à sa p e rte .
* B e rn a rd d e F re sn e d a , a rc h e v ê q u e de C o rd o u e d e 1571 à 1581.
CORRESPONDANCE
m
LXIX.
LE
C A R D IN A L DE G R A N V E L L E AU
P R IN C E
d ’ü
R B IN .
(A rchives d ’U rbino, Cl. I, div. G, liasse cxxi.)
N a p le s , le 11) o c to b re IS 7-Î.
Essendo stato se m p re devotissimo servitore dell’ Illmo e lE c c mo Sr Duca di
b o n a m e m o r i a e t d e tutla la casa, m ancaria del d e b it o m î o s ’havendololevato
Iddio da questa vita, non me condolesse con V. E ccza di tal perdita *. Et
ancora che non possa farsi che V. E ccïa non la senta, tuttavia tengo per
certo che usa rà délia solita sua pru d en z a per sotloporre il voler suo a quel
d ’lddio, con sperare c h ’ havendo fatto vita et fine tan christiani godera
adesso dell’ eterna quiete. E t se p rim a m ’era dato a V. Eccza p e r affmo ser­
vitore, tanto più vengo adesso a offrirmeli p e r tale p rontissim o a servirli in
q u a n to io po trô et lei vo rrà c o m m a n d arm i con pregare Iddio perdoni
al buon defunto, et che a V. Eccia doni longhissim a vita.
LXIX.
ANALYSE.
A titre de très d év o u é serviteu r d e l’illustre et e x c ellen tissim e d u c de b on n e m ém o ir e
et de toute la m a iso n , le Cardinal croirait m an q u er à son devoir s’il ne prenait part à la
perte que le prince d ’U rb in v ien t de faire par la m ort d e son père. Il esp ère q u ’il
jouira de l’éternel repos.
1 G ui U lb ald II, d u c d ’U rb in , v e n a it de m o u r ir le 2 9 s e p te m b re 1 8 7 4 à S essaro.
255
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
LXX.
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L DE G R A N V E L L E .
(liibliothèque de Besançon. — L ettres de d iv ers, (i e t 7.)
A flligliem , le 17 o c to b re 1 5 7 4 .
M onseigneur. J'envoie à Vostre llme Slie la response q u ’ont faict les n a ­
tions de Brucelles, q u e font le tiers m em bre. Je ne sçay si se servantz du
tem ps, le revictaillem ent de Leyden les a re n d u plus h a rd iz ; mais je suis
s h e u r q u e Vostre Illme et R me Sgrie la trouvera par trop aigre et picante, et
ce q u e je regrette le plus est q u e les copies trottent p a r t o u t 1, et q u ’il n’y at
quasi p o in ct u n g p r o c u r e u r en la chancellerie de B ra b a n t qui n ’en face
lecture au x estrangiers, ausquelz ils servent, com m e si l’on v o u ldroit faire
so n n e r cette réponse a u x oreilles des aultres villes; et m ’esbahis g r a n d e ­
m en t q u e M o n sr le C hancellier *, qui le sçait très bien, s’il le vouloit sçavoir,
n y at au ltre regard. Touttefois l’affaire luy touche de près, estant si g r a n ­
d e m e n t noté p a r ledit escript; car si le peuple se levoit, et q u ’il fut en leur
povoir, je craindz q u e en m oings de trois jours, ils luy feroient un m auvais
tour, sans q u e son beau e tb e a u c o p dire le sceust g aran d ir. Q uoy q u ’il en
soit, je nous veoidz en bien g ra n d da n g ie r, si l’on n’y pourveoie tost p a r
bon conseil, q u ’il ne fault a tte n d re de ce costel. Si l’on pèse bien les motz
et la conclusion, il a p p e rt q u e tout vad en ung extrêm e dé sesp o ir; et certes
les foulles sont estez in su p p o rtab le s qu e l’estrangier at faict d u passé et
faict encores p résentem ent, sans q u ’il soit po u rv eu s u r tan t de plainctes et
prom esses q u e l’on en al faict. Le m enu p e u p le ne gaigne rien : la c herté
est in croiable et a u g m e n te jo u rn e le m e n t, parce q u e l’on exécute rig o re u 1 L ’Histoire de H ruxclles, p a r
H
e .v n e
et
W
auters
,
fait m e n tio n d ’u n e ré c la m a tio n a d re ssé e
au
C om ­
m a n d e u r à A n v e rs p a r le b o u rg m e stre , l’éch ev in T ’S crclacs e t le s e c ré ta ire M elyn (t. I , p . 4 3 0 ) ; m ais
i l n ’y e s t p as q u e s tio n d e la ré p o n se d e s n atio n s.
’ J e a n S ch y fv e, c h a n c e lie r d e B ra b a n t. V o ir sa n o tice, 1.1, p . 2 9 7 .
CORRESPONDANCE
sem ent les plaeardz ' de ne rien achepter de ce qu e vienl des enneiniz,
com m e si les im postz q u e le P rin c e d ’Oranges m ecl s u r les vivres, qu e so r­
tent d ’Hollande, fussent si grandz qu e p o u r soustenir la g u e rre contre nous,
q u e aulcuns font entendre, qui font g r a n d e m e n t leur prolïict p a r l’exécu­
tion des ditz placcardz, tant capitaines qu e g o u v e rn e u rs, au d é trim e n t du
c o m m u n , auquel les Anglois et François, qui ne peulvent estre c o m p rin s
p a r ledit placcard, si l’on ne veult c o n trevenir au traictié de paix, le sallent
au double.
P o u r revenir a u d it escript, je craindz q u ’il ne procède d u d it m em b re
seul, que ne p e u ll avoir cognoissance si parfaicte des privilèges du pais.et
qu e l’on leur faict dire ce qu e les aultres ne veuillent dire, ou l’on suit le
pied de la requeste q u e fut présentée p a r les pensionnaires des q u a ttre
villes l’an 65 et 66, lorsque l’on esplucha lesdits privilèges p o u r résister à
l’inquisition d ’Espaigne : ce q u e fut depuis e x te n d u à l’inquisition o rd i­
naire, d o n t m on b e a u -frè re de Louvain * tom bit en conlest contre le p e n ­
sionnaire de Louvain, luy m a in te n a n t en visaige en pleine assem blée [que
l’advoua de ce] q u e jam ais n ’avoit esté parlé de l’inquisition ordinaire,
fondée en droict, qu’avoit tousjours esté exercée en ce pays, mais bien de
celle d’Espaigne, et q u e ledit p e nsionnaire s’es ta ni eslargi si préju d icia b le m ent, avoit excédé sa charge. Dieu p a rd o in t au x pensionnaires vifz et
m orlz qui eslargirent lors leur plum e, en ce q u o y W asteel 5 ne fut deffailla n l; de si pernicieuses gens fut lors servie la ré p u b licq u e , desquelz l’on
asche encores rem ectre a ulcuns et mesrnes ledit p e nsionnaire de L ouvain *!
Il
sera bien venu si l’on a l m eilleure response du qu a lriesm e m em b re de
Louvain, et d u B re e d en ra ed t d ’Anvers !, qui a requis, a v a n t qu e voulloir
* Les p la c a rd s q u i d é fe n d e n t le co m m erce avec les in su rg é s so n t les su iv a n ts : 12 m a rs 1 5 7 4 (C ollec­
tio n de l'a u d ie n c e a u x a rc h iv e s du R o y a u m e , reg . 8 8 , fol. 1 9 1 ), 19 a v r il 1 5 7 4 , p re s c riv a n t d e re p u b lie r
e t o b se rv e r les o rd o n n a n c e s d es 21 n o v e m b re 1 5 7 2 et 16 ja n v ie r 1 5 7 4 (R e g istre de la C h a m b re des
com ptes n 0 58, fol. 5 1 0 ), l ,r a o û t 1 5 7 4 (d a n s la C ollection d es o rd o n n a n c e s e n o r ig in a l) , 2 5 ao û t
1574 (d an s le R e g istre d e la C h a m b re d es c o m p te s, n° 5 8 , fol. 5 1 2 .)
* D idier T ’S estich , b e a u - f rè r e de M orillon e t p ro fe s se u r à l’U n iv c rsité de L o u v ain . V o ir sa no tice,
1.1, p. 2 7 4 .
* P ie r re W asteel, p e n s io n n a ire de M alines e t p lu s ta r d m e m b re du C onseil d ’É ta t en H o llan d e. Son
nom et scs gcsles so n t so u v e n t cités d a n s les v o lu m es p ré c é d e n ts .
4 V o ir p lu s h a u t, p . 2 0 7 .
* V oir p lu s h a u t, p . 140, les e x p lic a tio n s au s u je t d u Breedenraad d ’A n v ers.
257
DU CARDINAL DE G I U N V E L L E
o u v r ir la b o u c h e ou resp o n d re su r la d e m a n d e de Son Exce,q u e l’on rem ecte
leur m agistral s u r l’ancien pied, q u e le g o u v e rn e u r et conseil de justice
soient hostez, et les privilèges réin tég re z; et cela faict, si l’on leu r propose
q u e lq u e chose, qu'ilz resp ondroient. Ce q u ’at fort lasché Son E xce, d e m a n ­
d a n t s’il est h e u re m a in te n a n t de p a rle r de privilèges; et je liens q u e ces
troisiesme et q u a triesm e m em b res des villes estim ent qu e c’est m a in te n a n t
heure de presser s u r les privilèges. J ’ay veu le tem ps, qu e si l’on h e u tv o u llu
croire conseil, q u ’ilz fussent estez m odérez et restrainclz avec le bon gré
des Eslatz. Sa Majesté est en possession contraire q u a n t aux aides, contre
lesquelles, de m ém oire d ’hom m e, n’at esté allégué ce q u e se propose m a in ­
te n a n t p a r ledit escript. T ro p bien a y -je to u jours o u y d ire que S. M. ne
povoit lever aide, sinon du consentem ent des Eslatz et trois m em bres
d ’iceulx 1 ; et q u a n t a b bez et nobles o n t accordé avec certains m em bres de
c hascune des q u a ü r e villes, l’on n ’ai regardé s u r la rép u g n a n c e des troi­
siesme ou q u a ttrie s m e m em bres d ’aulcunes des dictes q u a ttre villes, des­
quelles je veoidz le peuple fort irrité et incliné à p r e n d r e les arm es. Ce
q u e si se faict, tous gens d ’Eglise, serviteurs de Sa Majesté, m inistres de
justice et tous gens d’estal a u ro n t g r a n d e m e n t à souffrir; ca r le peuple
cherchera le pillage, et ne d o rm iro n t les m auvais esprilz pour, s u r u n g
désespoir, in tro d u ire les sectes; et j ’entendz de ceulx q u e sont icy fugitifz
d’Hollande, q u e q u a n t les villes s’y révollarent, ceulx q u ’avoient estez plus
calholicques, en m o in g s d e x xim heures, e n tr a re n t en telle raige et fu re u r
d ’hérésie et de toutte m auvaislié, q u ’ilz feirent piz et furent plus rudes a u x
bons q u e ceulx qu e de long-temps l’on avoit tenu p o u r suspeetz. Dieu
nous veuille g a rd e r ; mais si u n e fois nous villes p re n d e n t les arm es, tout
sera p e r d u , et se verra un e révolte et confusion générale; et qui sera le
plus esloingné, sera le plus heu re u lx .
Il
n’y at plus question q u e Son Exce doibve v e n ir à B rucelles: l’on dit
q u ’elle d o ib t aller vers B ois-le-D uc p o u r estre plus près d ’Utrecht. J e liens
q u ’elle ne bougera d ’Anvers p o u r sa sheurlé, el q u e l’on ne faicl poincl
p o u r riens Irois cenlz nouvelles maisons en la citadelle, q u e ne liendroil
g u e rre si le pays s ’esm ouvoit, et seroit facille p a r trenchéez les te n ir serrez
et en nécessité de vivres. L’on dict q u e A m sterdam parle m e n te avec le
1 C’é ta il u n p r in c ip e de d r o it p u b lic , g é n é ra le m e n t en v ig u e u r d a n s nos p ro v in c e s. V oir
Histoire politique interne, p. 5 3 7 .
T
ome
V.
33
P
o lllet
,
CO RRESPONDANCE
P rin c e
el qu e ung des bourgm estres est venu en diligence p o u r en d o n n e r
advertance, et q u ’ilz ne p eulvent plus c o n te n ir le peuple. Si cela s’effectue,
il ne faidt plus p e n ser à l’Hollande : car Harlem et la Haie ne peulvent
soubstenir, et serat besoing p o u rveoir à U trecht, q u e je veoidz en très
g ra n d bransle. Et ne plaincdz au ltre, sinon q u e le 8 gr Don F e r n a n d e n’en
est pas encoires de retour. N o usgens ont levé le siège de v a n t B om m ele avec
leur d o m m a ig e ; car ceulx de dedans ont d o n n é dessus, lorsque se faisoil la
retraicte. Ainsi s’est passé ceste année et belle saison, sans rien conquesler.
Pleust à Dieu qu e ce fust sans pe rd re si I a rg e m en t ! Ce qui vient de l’avarice
de ceulx qui n’a iant au ltre regard qu e de pillaige el leur particulier proffit,
selon leur naturel e la c c o u slu m é, l’ont empesché; ca r ladite ville estoit preste
se re n d re au Sr Don F e r n a n d e *, et lieut tiré des aullres avec elle, si l’on
l’he u t bien traicté et beussions heu l’advantaige, où m ain te n a n t nous sûmes
a p p a re n tz de p e rd re le pays d ’Utrecht, Frise et O uverissele; et je ne
m ’assheure de Geldres, com bien qu e a u lc u n g z dien t q u e Son Exce pense
aller à N iew m eghe, qu e ne seroit le pire conseil p o u r faire leste et contenir
lesdictes provinces en ollice. Elle al m andé le capitaine V a ld e z; mais il
sem ble n’avoir volunté d ’h a b a n d o n n e r ses g e n s ; et l’on dit q u ’il a respondu
d ’avoir sa com m ission du Roy, et non de Son E x ce. Touttefois, aulcuns
p ensent que q u a n t ores il viendroit, que l’on ne luy feroit si g ra n d mal
com m e il at m érité.
Ce q u e faict plus à regretter en ce q u e dessus, est q u e tan t de bonnes gens
q u ’estoient à A m sterdam , Harlem et aillieurs se p e rd ro n t, et q u e les h é ré ­
sies infecteront to u t et déchasseront tan t de gens catholicques et de religion ;
ca r il y at en A m sterdam plus de xvn cloistres de femmes. J e m ’esbahis qu e
le Conseil de Sa Majesté et Son Excellence ont si peu de regard su r u n e
chose ta n t im p o rta n te et considérable, et de laquelle il fauldra re n d re si
estroict c o m p te à Dieu.
Si Son Exce fust venue à Brucelles, l’on dit q u ’elle am enoit dix enseignes
1 V oir à ce suje t les A p p en dices.
’ Selon u n e l e t t r e »le Gilles de B e r l a y m o n t d u 26 s e p t e m b r e 1 8 7 4 , a d r e s s é e à R e q u e se n s , il y av ait
eu des p o u r p a r l e r s e n t r e la g a r n i s o n de Bonm iel e t d e s gens d u g o u v e r n e m e n t espagn ol : « Le p o r t e u r
de ce ste, d it-il, e s t u n g d e ceulx q u e Do n B e r n a r d i n o d e Me ndoça a v o it e m p lo y é s ici p o u r t r a i c t e r
q u e l q u e chos e av ec les c a p itain es et soldatz e s ta n t d a n s la ville de B om m cl. » (Archives de l’audience ,
l i a s s e 141.)
DU CARDINAL DE G R A lNVELLE.
23!>
d ’Espaignolz, que ne veuillent estre a u x petites villes, mais a u x g ra n d e s ;
et q u e à Malines fussent estez logiez six enseignes, et les chevaulx légiers
à H aulx ', Alost, Ninove, G ra n tm o n t, T erm o n d e , Vilvorde. et q u e Louvain
ne fust esté exem ple de gens, p o u r avoir sa ga rd e proche de tous coutelz.
Je ne sçay si ceulx de Brucelles fussent estez contentz se veoir c h a rg e r de
dix enseignes, p o u r l’exem ple de Anvers, et qu e l’on dict q u e les Espaignolz
sont de rechief a m u tin e z en Hollande, ou près de Utrecht, p a r faulte de
paie. Il he u t esté inieulx q u ’ilz heussent ga rd é S parendain et aultres lieux
fort im p o rta n tz à la garde d ’A m sterdam [laquelle at p e rd u l’usaige de la
rivière] et d ’U trecht, q u e sont m ain te n a n t occupez p a r les ennem iz, q u e se
sont m onstrez d e v a n tB e rg h e s-o p -d e n -Z o o m , seglorifiantz de leurs succès et
m enassantz de plus g r a n t exploict. Ce qu e je tiens ilz exécuteront, non
o b sta n t l’hyver, p u is q u ’il ne se parle plus d ’accord, sans lequel il n’est pos­
sible rem é d ie r au x im m in e n tz inconvénientz, selon qu e le re m o n stre n t
fort vifvem enl ceulx de F la n d re s, persistantz s u r l’accord, et disants que,
q u a n t ores Son Excellence a u ra t tout ce q u ’elle a dem andé, cela ne sera
p o u r paier, à beaulcop près, les excessives debles, m oingz p o u r re c o u v re r
ce q u ’est p e rd u ou p o u r m a in te n ir la guerre, p o u r ce q u ’il faull faire c om pte;
q u e furnissant l’ayde présente, il ne leur fault d e m a n d e r de trois ou q u a ttre
ans a u ltre chose, p o u r ce q u ’il ne seroit possible au pays d ’y fu rn ir. Et l’on
c o n tre d it a u lta n t le centiesm e q u e l’on at faic tle X e, et cela p o u r la reb u sque. q u ’at si peu prolïité à Sa Majesté. Ceulx d ’Artois p rése n ten t au lieu
d u d it xc, i i c mille florins. Il y at liuict j o u r s jo u r s q u ’il y he u t g ra n d e altéra­
tion à A uldenarde, où a u lc u n s des chevaulx légiers cu id o ie n t se jecter
dedans, avec la faveur de ceulx qui y sont doibs q u e lq u e temps, d o n t les
bourgeois se d o n n a re n t ga rd e , s e rrè re n t leurs p ortes et se m ire n t en arm es,
sans faire violence à leu r garnison, encoires q u ’elle bravisoit et q u ’il le u r
fust esté facile de les bien frotter et je c te r dehors.
Les villes qu e so n t venues à Alost * y sont estez m andéez p a r Son Exne,
' l i a i , a c t u e l l e m e n t p r o v i n c e de B r a b a n t .
*
Nou s r e p r o d u i s o n s ici l ’acte r e l a t i f à cette a s sem b lée : « C o m m e les d é p u t e z d e p l u s i e u r s villes
d e p a r d e ç à , a s sem b lez p a r ch a r g e de M on s eig n eu r le G r a n d C o m m a n d e u r de Castille, l i e u t e n a n t , etc.,
en la ville d ’Alost, d oiz le x x v i j ' d u m ois p assé, o n t r e m o n s t r é à S. E. co m m e ilz se ri o n t esté pr estz
p o u r d o n n e r p a r d é c l a r a t i o n les d e b t e s d eu es a u s d its villes et h a b i t o n s d ’icclles r e s p e c ti v e m e n t p a r la
cavalloric légère et en d é l i v r e r a u x c o m m iss aire s p o u r ce d é n o m m e z p a r s u r e r é p o n s e les en seig nem en ts,
2(i()
CORRESPONDANCE
affin de juslHier leurs debtes et ce q u ’ilz ont preste a u x soldatz et capitaines
Espaignolz, desquelz aulcungz ont voulu n ier le u r signature et taché la
ravoir par force. Les com m issaires qui e n re g istren t lesdicts prestz et debtes
o n t aussi voulu avoir lesdictes obligations, disantz q u e leur registre en
feroit foy. Mais les députez o n t respondu n ’avoir telle charge, aulcungs
desquelz estim ent q u e ceey se faict p o u r le ra b b a ttre p a r Son Excellence
au x soldatz et capitaines, mais non p o u r le re n d re a u x villes q u e viègnent
en despence p o u r envoier si souvent leurs députez p o u r u n e mesme chose,
q u e sont aussi estez à Marche en F am ine et q u e lq u e au ltre ville. Celles qui
o n t prin s signatures des capitaines sont estez bien adviséez, ca r au x aultres
q u e n ’o n t nul escript, l’on leur nie qu'ilz o n t furni selon leurs m ém oires.
Il m e desplaicst d ’estre molesté à Vostre Illme Si>rie d’u n g n e s i triste lettre,
c ra in d a n t q u e du coustel d ’Affricque elle n ’at si bonnes nouvelles com m e
elle v o u ld ro it; mais il fault tout com inectre à Dieu, q u e je supplie de nous
re g a rd e r de son œil de pitié, u sa n t vers nous de sa m iséricorde, et q u ’il
d o n n e à Vostre Illme Sgrie, etc.
C e u lx q u i viègnent de Brucelles dient q u e A m sterdam a t faict le sault.
Si cela est, il ne fault plus penser à la navigation, et le bled rem ontera.
co m p tes, es talz, cédullcs c l p a p p i e r s q u ’ilz en peuv en t a v oir, m o y e n n a n t luultcfo is q u e dcs d ictes d eb tes
ilz en s e r o n t p ay ez et co ntentez, d u m o ins q u e l e u r so i t d o n n e a s s e u r a n c e d e le u r en t e n i r c o m p te s u r
les ay d e s accord ées ou à a c c o r d e r ; à q u o y les co m m iss aire s ay o n s passe z les m o n tre s de ladicte cavallerie, estons p r é s e n t e m e n t a u d i t Alost, n ’o n t ch a r g e ni p o v o ir sufïissant, q u ’es t cause q ue lesdits d ép utez
n ’o n t peu aller av an t, n y cu lx d e s g a r n i r d esd its e n s e i g n e m e n t s , céd u les e t e s t a t z , c o m m e au ssi ilz n ’en
o n t la c h a r g e de ceux q u y les o n t e n te n d u z , a u m o y en d e q u o y ilz se so n t r e p ré s e n t e z vers S. E. p o u r
la s u p p l i e r q u e d u i s t à icelle o r d o n e r q u e d e to u ttes les so m m e s et p a r t i e s q u e les capitain es, officiers
et soldatz s e r o n t t r o u v e z debvablcs, e t q ue l e u r s e r o n t d cscom ptcz, l e u r se ra t e n u c o m p t e e t e s t â t e t
é v a l u é s u r les a y d e s à p a y e r et de ce e n faire d o n n e r acte p e r t i n e n t , signé d e S. E. a u s d i t s d é p u t e z ;
icelle S. E. d é s i r a n t m o n s t r e r co m b ien son in t e n t i o n es t si n c ère en ccst e n d r o i c t à la dicte e m p r i n s e des
dictes villes de ce q u e l e u r p e u l t e s tre j u s t e m e n t d eu , dict, dé c la ir e e t p r o m e c t p a r cest q u e de toutes
telles so m m es e t p a r t i e s , d o n t p a r certification sign ée de Christoffle V asq uez p r e m i è r e m e n t d e la ville
de Z u t p h c n et sa n s fa ire le d e s c o m p le av ec lad icte cavallerie lé gère se t r o u v e r a les c a p ita in e s , officiers
et so ldatz d ’icelle e s tre red ev ab les, e t q u i l e u r s e r o n t des com ptez au p r o u fit de S. M., se ra t e n u com pte
et es tât, et q u e to u tes celtes réserves, so m m es e t p a r t i e s s e r o n t év alu ées a u p ro ufit d e s d ite s villes et
q u e l e u r e s tre faictcs b o n n e s et defalcquées s u r l e u r s q u o les et p o r t io n s à c o m p t e r s u r les ay d es a c c o r ­
d ées ou à a c c o r d e r à S. M., e t qu 'icellc l e u r fera b o n p a r a u l t r e v o y e ce q u e lesdictes ay d e s n e sc eu ss ent
f o u r n i r , d e sorte q u e p a r u n g bo ut o u a u l t r e lesd ic te s villes p o u r r o n t es tre d r e s s é e s e t le t r o u v e r av ec
e n t e n d e m e n t e n d r o i t l e u r deu. F a i t en F l a n d r e , le sixièm e j o u r d ’o cto b re 1 5 7 4 . » (A rchives de l’A u ­
dience, liasse 141.)
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
261
LXXI.
LE P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L DE G R A N V E L L E .
(Bibliothèque do Besançon.— Lettres de divers, t. Il, fol. 1,5.)
Afllig hem, le 17 o c t o b r e 1574.
M onseigneur. P a r ce qu e je ditz, par aultres, se p e u lt veoir com m e nous
en sûm es, d o n t je me treuve en peine; c a r p lusieurs d u clergié me pressent
d ’e s c rip re a u P a p e q u e la religion périt p a r faulte de ceulx du g o u vernem ent,
que les âmes se pe rd e n t, d o n t je me suis excusé p a r beaucop de raisons,
disant q u ’il ne fault r e c o u r rir à prince estrangier, mais au Roy m esm e s; et
qu e q u a n t ores au ltre en ce luy vo u ld ro it d o n n e r loy, qu e p e u lt-estre il ne
la v o u ldroit su iv re ; et a ia n t les arm es en m ain et estant souverain, il gardero it bien q u e l’on exécutât chose en ses pays contre son gré, et q u e peu
avoient prolfité les censures fulm inées contre le roy d ’A ngleterre; q u e en
affaire si im p o rta n t, rien ne se povoit faire sans vostre sceu, com m e p r i n ­
cip a l; qu e les trois évesques de Flandres, celluy d ’Arras et A nchin 1 avoient
faict assez de debvoir, et s u rto u t Vostre IUme Srie; q u e le du c de Medina-Céli
avoit em p o rté u n g m o n d e d ’advis et d ’a ttestations; q u e beaulcop d ’aultres
avoient faict le mesme, et qu e ju sq u e s ores cela n’avoit prolfité, pe u lt-estre
p o u r noz peschez, et qui q u e m ’en parle, je ne me m ectray en ce je u , veoir
non p o u r tous les six com provinciaulx ensam ble : car tous rem èdes vien­
d r o n t la r d ; et de p a rle r au C om m en d a d o r est travailler en vain. Il at p e rd u
le sens, et ne souffre q u e ceulx qui luy p a rle n t achèvent leur propoz, tant
est-il so u b d a in et précipité à leur copper la parole, c ra in d a n t qu e l’on ne
p a rle d ’argent, et se lesseroit plus tost a rr a c h e r les dentz qu e d o n n e r ung
escu. D epuis les nouvelles de Leyden, il n’est plus le m esm e ho m m e : il
c o u rre le m atin à veoir q u e lq u e esglise; estant en sa c h a m b re il chiffle
1 Les trois év ê q u e s d e F l a n d r e so n t : à B r u g e s , Remi D r i u t i u s (156!) à 1 5 9 4 ) ; à G a n d , C o r n e ille
Jansenius (1568 à
1 5 7 6 ) ; à Y p r e s , M a rtin de R ieth ov e ( 1 5 6 2 à 1 5 8 3 ) .
F r a n ç o i s R ic h a rd o t (1561 à 1 5 7 4 ) ; l’a b b é d ’A n ch in , W e r n e r d e D a u r e .
L ’é v ê q u e d ’A r r a s était
“2G2
CORRESPONDANCE
qu e lo u o n s j u s q u ’à la >alle: ce qu'il n’ai jam a is l a i d ; et n'est à croire c o m ­
bien il at se n tu le renvictaillem ent; ca r il avoit fort asseuré le Roy du
reco u v re m e n t de ceste ville et pluslost par force et fam ine q u ’accord. L’on
d it q u ’il luy at despesché u n g c o u rrie r secret, p o u r Padvertir qu e tout est
p e rd u s’il n ’y p ourveoit tost, et ceulx d ’Espaigne dient o u v e rte m e n t q u ’ilz
p erd en t tout espoir de recouvrer ce q u ’est p e rd u p a r a rm e s; et se plainct
ledit C om m en d a d o r qu e le P rin c e d ’Oranges n’at faulte de conseil et bonnes
testes; mais q u e le Roy n’en pe u lt avoir. S u r ce q u o y l’on polroit respondre
avec vérité q u ’il en y at assez si l’on les vouloit o u y r ; mais l’on ne se veult
fier en eulx, et cela sçaivent-ilz et l’ont pieça c o n g n e u ,et partant n’ont c u e u r
ny affection de servir. Et est plus accrediclé Roda, q u e ne cognoist le païs,
qu e tous les originelz d’icelluy qui y o n t à p e r d r e ; et le Président Viglius
dit qu e l’on parle de faire Roda g ran d Chancelier de B ourgoingne. et a u lcuns d ien t q u e le C om m en d a d o r at escript avec ch a lleu r p o u r luy faire
avoir la b a ro n n ie de Gaesbeck, alfin q u ’il soit des Estats de Rrabant. qui ne
souffreront q u ’il y en tre estant d u Conseil d ’Estal. Aussi en p a rla n t flanim eng, com m e l’on y faict co m m u n é m e n t, il sera plus de deux ans devant
q u ’il puist raccuser l’eschole. L’on dit q u ’il retient le C o m m en d a d o r
Maior en Anvers p o u r ce q u e Mr le Président le précède à Bruxelles. Ceulx
de F landres o n t deffendu p a r exprès à leurs députez de n’a c q u e t e r 1 ou faire
la c ourt a u d ic t R o d a ; ce q u e font ceulx de B ra b a n t et d’Artois.
Le C o m m endador Maior at d o n n é response à ceulx d ’U trecht fort bonne,
qui disent q u ’ilz en sont tenu a u re v ic tu a ille m e n t de Leyden. L’on se plainct
en F landres fort des exactions qu e y faict le conte de Reulx 1 et les siens,
qu e V7iglius d it estre porté de Mr de B erlaym ont, et je tiens q u ’il dit vray.
L ’on parle fort p a r icy des altérations qu e sont en Espaigne, mesmes en
A rragon, Valence et Catheloigne, et q u ’il se couve q u e lq u e chose. Il y at
longtem ps q u e l’on en at parlé, et que je n’y ay adjousté foy, parce q u e je
tenoie q u e telz bruictz procédoient plustost d ’a ulcuns m auvais espritz de
p a r deçà, q u e p o u r chose q u e fut p a r delà. M aintenant a ulcuns en escripvent
de là, et n o m m é e m e n t qu e Villa Hermosa en seroit chief ; ce q u e je ne veulx
1 V o ir à ce s u j c l la le t t re de Iteq u esen s a u l l o i , d u 22 s e p t e m b r e 1 8 7 4 , d a n s la Correspondance du
Philippe I I , t. I II , pp. 16 6, 4 6 7 , 168.
* N ’acqueter , a c q u é r i r , se m e t t r e bien.
J e a n de Croy, com te de Roeulx, s o u v e n t cité d a n s les v o lu m es p récéd en ts .
DU CARDINAL DIS GRANVELLE.
203
croire, esp éra n t q u e le Roy a u ra i soullisant conseil p o u r y rem é d ie r en
tem ps.
Baptista de Tassis 1 est re to u rn é fort bien despesché et à son c o n tente­
m ent. Il diet d ’avoir baisé les m ains à Sa Majesté lorsque le d u c d ’Albe le
p résenta à icelle; mais q u ’il ne luy at jam a is parlé, et louttesfois elle luy a t
d o n n é le s tâ t de g e n tillh o m m e de sa m aison, avec c in c q u a n te escuz p a r mois,
six centz content p o u r faire son voiaige, et p a r dessus ce u n g habit. P l u ­
sieurs sont en o p in io n q u ’il a t esté si bien traiclé p o u r en faire relation p a r
deçà et d o n n e r couraige à beaulcop de gentilzhom m es, qui p ensent q u e
S. M. a b h o rr it ceulx de ces Payz-B as. Son Excellence l’avoit fort re c o m ­
m a n d é p a r ses lettres et supplié S. M. le renvoier tost p o u r ce q u ’il est
ho m m e de service.
L’on d it qu e Son E xce est tousjours après p o u r licenlier trois régim entz
d ’Allem andz et les x x i i com paignies de chevaulx légiers. Ce q u e d o n n e con­
je c tu re à a u lc u n s q u ’elle d o ib t estre s u r q u e lq u e accord, lequel d ’a u lta n t
q u ’il se différera plus, se fera avec plus g ra n d désadvantaige et de sré p u ta ­
tion nostre. Mais cela seroit-il difficile faire à croire à ceulx q u e d i i n t q u ’il
fault c o p p e r l’Hollande et Zéelande des aultres pays, et les lesser p o u r
dérelict *, que el Rey tienne hartos reynos s ; q u ’il vault m ieulx non avoir
telz pays qu e si rebelles subjeetz, et qu e q u a n t ores le P rin c e d ’O renges
a u ro it conquesté tous ces Pays-B as, il seroit tousjours bien aise recepvoir
tel app o in c tem e n t q u e Sa Majesté luy vo u ld ra faire. Je me d o u b le q u ’ilz se
forcom ptent beaucop de ce d e rn ie r poinct, et j ’espère q u e Sa Majesté n ’at
telle o pinion, et est celle q u e y p e rd ro it le p lu s ; et je ne pense poinct que
ceulx qui sont si indiscretz à ten ir telz propos a u ro ie n t à plaisir q ue, q u a n t
q u e lq u e leur m em b re fut intéressé, l’on le couppât, et q u ’ilz ne v o u ld ro ie n t
1 J e a n - B a p t i s t e d e T a x i s , o u T a s s i s , d o n t la b i o g r a p h i e es t p u b lié e d a n s I I o y n c k
van
P apendrecht,
t. Il, p a r t . Il, p. 1 2 1 , es t a u t e u r d e c o m m e n t a i r e s s u r la g u e r r e a u x P ay s- B a s ( Comm entarii de tum ul-
tibus Uelgicis sui lemporis), p u b l i é s ibid. P e n d a n t son sé j o u r e n E sp ag n e, le Roi le c h a r g e a , le C se p ­
t e m b r e 1 5 7 4 , d e se r e n d r e à N a n t e s , afin d e p o u r v o i r à t o u t ce d o n t la flotte es p a g n o le , c o m m a n d é e
p a r P i e r r e M e l e n d e z , a u r a i t b es o in si les v e n t s la f o rça ie n t à r e l â c h e r d a n s q u e l q u e p o r t fran ç ais.
( Correspondance de P hilippe I I , t. III, p. 14-7.) II r e m i t au ssi a u Roi u n m é m o i r e d a n s l eq u el il d é v e ­
lo p p a ses idées p o u r r e c o u v r e r les villes d e H o llan d e (ibid., fol. 1 4 8 ) , tr a v a i l s u r lequel R e q u escn s
d o n n a so n a v i s le 10 o c to b r e (ibid., p. 175).
* Dérelict, a b a n d o n n é .
* T r a d u c t i o n : q u e le Roi a assez d e r o y a u m e s .
COURESPONDANCE
quicter leurs terres et seigneuries |>our la m alice d a u lc u n s , mais qu'ilz
cherclieroient tous m oiens p o u r p o u rveoir à tous accidentz concernant*
leurs corps et bien tem porel sans le perdre.
Blasere doibt p a rtir lendem ain de la Toussainct fort mal content et
désespéré du m aulvais Iraictem ent q u ’il at receu, d o n t Sclietz est cause.
Et ad ce qu e je puis avoir e n te n d u de luy, puisque Mr le P ré sid e n t at si
peu go u stéso n besoingné et le b o n d e b v o ir q u ’il at faict au p re m ie r v o ia g e 1,
il est délibéré de lesser couler l’eau au val, sans s’en d o n n e r tan t de peine,
com m e il a faicl du voiaige précédent, encoires q u e tout y voise piz ad ce
q u ’il dict q u e du passé, et qu e F roissard 5 a u ro il g r a n d e m e n t to u rn é les
ordonnances nouvelles à son particulier proullict, ju sq u e s à g ran d e et
notable som m e; ce qu e je ne sçauroie croire. Q u o y q u e Son Excellence ayt
com m andé le paier de ce q u e l’on luy doibt, qu e porte deux mille trois
ccntz florins, il n ’at sceu avoir que sept cenlz, tant sont basses les finances:
toultesfois le trésorier avec les com m iz Reingot et O y e n b ru g h e c h e rc h e n t
tous moiens p o u r faire arg e n t, p ro c u ra n t congié a u x François p o u r vendre
leurs biens de pardeçà, com m e I on at faict au sieur de Maulde \ à l’a ppétit
de n m florins q u e en o n t levé lesdicles finances. iMais le greffier d u g ran d
conseil de Mal ines * qui en at esté le c o u rtier, at heu po u r sa p a rt xvi° flo­
rin s et qu e lq u e s aultres x m i c florins sont allé de coslel; car Blasere dit
(ju’il sçait bien qu e ledit congié couste a u d it sie u r de IVJauldebien v™ florins,
d o n t la vérité se d é scouvrerat avec le tem ps. E t s’est obtenu ce congié en
[ab se n c e de Mr* de B e rla y m o n t et de Saint-B avon, qui l’avoient trouvé
mauvais, disantz q u e ceulx d ’Artois ne seroient contentz, p o u r ce qu e adven a n l une g u e rre contre les François, il n’y au ro it plus p o u r les récom penser
encores q u ’ilz p e rd e n t tout, p o u r ce qu e le plat païs d ’Artois gist près de
F rance, a iant les villes à doz. Blasere m ’at d ict q u ’il avoit charge de d o n n e r
la to rtu re à C happuis et son nepveur, s’il trouve q u ’ilz aient s u b o rn é des
tesmoingz. Il sera besoing q u e Vostre Illme Sgrie luy escripve, encoires q u ’il
m ’at dict q u ’il ne v iendrat à telle extrém ité.
Monsr de B erlaym ont s’est com plainct à m oy des flatteries desquelles at
1 CVst-à -d irc sa mission cil B o urg o gn e. Voir p lu s h a u t , p. 191.
* P i e r r e l-’r o i s s a rd . V o ir p l u s h a u t , p . 24 5 .
1 G u illau m e d e Maulde, Sr d e M a n sart.
* E n 1574, il y a v a i t d e u x greffiers a u G r a n d -C o n se il d e Malines : B u y s sc t el N o r m a n d .
203
DU CARDINAL DE f.KANVELLE.
usé vers luy ciel Rio, luy veuillant p e rs u a d e r q u ’il debvoit p ré te n d re au
go u v e rn e m en t. J e ne sçay si ce at esté p o u r p a r ce bo u lt e n te n d re ce que
j e diroie. Je passay ce propoz d o u lce m en t: m ais luy dém onstrois d’en avoir
esté fort fasché, et (dict) q u ’il l’avoit rejecté, en ce q u ’il faict saigem ent : car
le du c d ’Arschot ne luy p o rle ro it re s p e c t; aussi ne feroit la noblesse, ny les
Estatz des pays, q u e ne l’a im ent guères, et q u e sont beaucop plus affection­
nez à Madame de Parm e, pou rv cu qu e Vostre III“ 0 Sgrie luy s o it j o in c t,
estim antz q u ’elle cognoist la faulle q u ’elle feit de p u is son pa rle m e n t, q u ’est
de plus en plus regretté des gens de bien, qui o n t ferm e opinion q u e si
Vostre llme Sgrie reto u rn o il, elle redresseroil les affaires ; ce qu e jam a is aullre
ne fera, et m oingz ceulx d ’E spaigne qu e n ’en o n t la volunté. Le P ré sid e n t
m e dit q u e l’on luy escript q u e le D uc d ’Albe se r é s jo u y l et glorifie de ce
q u e son successeur n’at pas m ieulx faict q u e luy, qu e n ’est sa faulte, mais
celle d u d ic t D uc, qui n’at lessé le pays en tel estât q u ’il l’avoil receu de
Madame de Parm e.
J ’adjousle la copie d’un e lettre que at esté s u rp rin se , affin que. si avez
temps p o u r la lire, v e o ir e n quelle destresse esloient lors les ennem iz, qui
p a r n oslre p ro p re faulte o n t eslevé la teste et gaigné le poinct. L ’on parle
fort de rechief qu e H opperus reto u rn e et q u e le d u c d ’Albe at p ro cu ré qu e
l’advocat fiscal de B ra b a n t ' vad en son lieu, q u e seroit signe q u e son crédit
n e s e r o it du tout failli, com m e aulcungz ont dict et escript. Si le choix est
faict d u d ietadvocat, Dieu d o in t q u ’il to u rn e m ieulx au service de Sa Majesté
et bénéfice du païs qu e plusieurs n’en o n t l’opinion.
1 Jua n de Boisscliot. V oir plu s liant, p. 3 5 .
T
ome
V.
34
CORR ESP ON DA NC E
266
LXXII1.
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU CA R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(Bibliothèque <!t> Besançon. — L ettres tli' d iv ers, t III, fol. 13 r i 14.)
( B r u x e l l e s ) , le Üîi o cto b re 1574.
Monseigneur. Le C om m en d a d o r Maior est ici venu fort inopiném ent.
Mr de B erlaym ont dict q u e c’est p a r force p o u r a p p ro c h e r Mr le Président,
qui ne peult b o u g e r et s’a p p esan tit fort. Le C o m m en d a d o r Maior les at
visités tous deux A ulcuns afferm ent qu e le C o m m en d a d o r Maior véant
q u ’il p ro lü to it pe u là où il estoit, et q u e le B re e d en ra ed l tient bon po u r
la Joieuse E n tré e et les privilèges de leur ville, q u e a y a n t aussi veu l’escript
de ceulx d ’icy q u ’aye envoyé à Vostre lllme Sglie, q u ’il s’est in co n tin e n t
enchem iné p o u r cy venir, où Monsr de B e rla y m o n t crainct qu e lq u e esm otion. Hz sont beaucop de soldatz icy à l’e n t o u r , l’on ne sçait à quelle fin:
mais ad ce q u e l’on m ’a t d i t , le peuple est s u r sa garde. L ’on at m a n d é les
Estatz de B rabant, selon qu e verrez p a r la lettre qu e m ’at esté dressée.
Ceulx de F landres, d ’Artois, T o u r n a y et T ournesiz y sont avec ceulx de
Lille et D ouay
Ceulx d ’Artois consentent leur q u o te a u x deux millions
p o u r les six ans q u ’avoit d e m a n d é le d u c d ’Albe, qu e e x p ire ro n t en aoust
prochain, et encores p o u r d e u x aultres m illions à paier en d e u x ans, et au
lieu d u centiesme, présentent-ilz 11e mille florins com ptent.
Ceulx de Geldres sont venuz sans estre appeliez, à sçavoir les députez
des villes et ridderscap *, q u e se p la in d e n t fort qu e l’on leur at si mal tenu
1 Morillon se fait ici l'écho (le B e rl a y m o n t . Le sé j o u r à A n v ers, d i t le G r a n d - C o m m a n d e u r , plaît p e u
a u x m in istres. Il ne lui a pas é t é possible d ’y r e t e n i r B e rl a y m o n t , q u i d it p a r t o u t q u ’il ne c o m p r e n d
c o m m e n t le C o m m a n d e u r est à A nv ers, si ce n ’es t p o u r se m e t t r e a u château . (Correspondance de P h i­
lippe I I , t. III, p. 170.) R e q u esen s écrit, le 5 o c t o b r e , q u ’il se p r o p o s e d e r e t o u r n e r à B rux elles, p o u r
y r e j o i n d r e B e r l a y m o n t , Viglius e t le d u c d ’A erscho t.
*
Voir, au su je t de la r é u n i o n d e ces É t a t s , la Correspondance de P hilippe I I , t. III, pp. 181 e t suiv.
R e q u e se n s y d o n n e d e s d étails très i m p o r t a n t s s u r l e u r s offres.
1 L ’o r d r e éq ues tre.
DU CARDINAL DK GRANVELLE.
267
le traicté de Venloo 1 ; qu e le pays est povre, niangié et pillé des soldatz, de
sorte q u e le p a y sa n t délesse le labeur, et q u e à peine y at-y en tre A r n ­
heim e tN ie u m e g h e , q u ’est le plus fertile du pa y s, xx v a c h es; et m a t dit
Monsr de B e rla y m o n t q u e lesdictes deu x villes avec Venloo et s u rto u t
R e m u n d e sont p o u r faire le sault si l’on n’y p o u rv eo it tost. Lesdits d é p u te z
p arlen t de la grosse dent, disa n t que si l’on ne les traicte m ieuix, q u ’ilz
p r e n d r o n t a u ltre seigneur. Ce q u e nous affolleroit; c a r ce seroit p o u r nous
forclore d ’U trecht, Overyssel et Frise et aussi de l’Hollande, et seroit B r a ­
b a n t frontière.
Ceulx d ’A m sterdam o n t serré les portes au x E spaignolz, leu r c r i a n t:
fo ra , fo ra , vellaco ! *. L’on parle encores q u ’ilz traictent secrètem ent avec
l’ennem i, q u e n’at encores S paredam n y aultres fortz qu e ceulx q u ’estoient
auprès de L eyden, qu e sont esté vilainem ent h a b a n d o n n e z , tan t du capi­
taine Mario q u e aultres, sans cop férir ou veoir l’e n n e m i; et p o u r d e s g u iser cela, l’on fait acroire q u e l’eaue venoit j u s q u ’au pied de la ville de L e y ­
den, q u ’elle n’at a p p ro c h é de dem ie lieue. Et p o u r ce q u e ung B ourgm estre
d’A m sterdam et aultres ont dé m o n stré p a r vives raisons q u e l’eaue n’ai peu
a p p ro u c h e r si près, l’on les appelle traytres. T a n t il y a q u e le C o m m en d a d o r ne les croyt, et ad ce q u e j ’entendz, l’on excuse Valdez q u i se doibt
avoir e n te n d u avec luy C om m endador, qui ne s’est ga rd é de d ire depuis
q u ’il a sceu le revictaillem ent de L eyden, q u ’elle ne m érito it d’estre reçue
avec conditions; à q u o y se conform e q u e V a l d e z a t d i t q u ’il ne souffreroit qu e
u n g aultre cueillit ce q u ’il avoit semé. Touttefois, il fut esté m ieulx faire
u n g bon parti à u n e ville, q u e p a r o p iniâtreté avoir ré d u it les affaires a u x
term es q u ’ilz sont à présent. Mais il sem ble qu e l’on veult tout p e rd re ou
p a rv e n ir au desseing q u e dit H opperus p a r ses lettres E spaigne avoir en
teste, qu e n ’y p a rv ie n d ra jam ais. Et at Vostre Illme Sgrie escrit vray au R o y
q u ’il polroit plus facillement c o n q u e rre ce pays q u e luy le re te n ir contre
sa volunté. Dieu doint q u e les bons olïices q u ’avez jà faict tant d ’années,
proflitent.
1 Le t r a i té d e Venloo conclu, le 12 s e p t e m b r e 1 5 4 5 , e n t r e C h a r l e s - Q u i n t e t les h a b i t a n t s d u d u c h é
de G u e l d r c f o r m a i t en q u e l q u e so r t e la b ase d u d r o i t p u b l i c d a n s ce p a y s , d e p u i s sa s o u m is sio n à la
m aiso n d ’A u tr ic h e . Cet a c te es t p u b l i c d a n s
D i'm
ont
,
P
ontanus
Corps diplom atique, t. IV, 2 e p a r t i e , p . 2 0 0 ;
p. 4 0 0 , etc. Voir p l u s h a u t , p. 2 4 5 .
* T r a d u c t i o n : D eh ors, d e h o r s , v ila in !
,
I/isto ria G elriœ, liv. X I I , p. 8 5 4 , et d a n s
S
lich ten h o rst
.
,
Getdersclie k ro n y k , liv. X I I ,
•
1
268
CORRESPONDANCE
Cliascun se plainct de la g ra n d e cholère du C o m m e n d a d o r Maior, et que
lors il dit et parle fort in d iscrètem ent; il e n tre tie n t beaucop de gens de la
g r a n d e u r et noblesse de sa maison, il at pu b lié la p e rd te de la Golleltc, et
dit q u e p a r le p rem ier il atlerul celle de H ollande, ad ce qu e l’on lieut bien
po u rv eu qui heust creud conseil. Ce serat tard avant q u e l’on la recouvre,
ou la n a vigation; et si l’arm ée d ’E spaigne 1 vient, d o n t ju sq u e s ores il y at
plus de b ru ic t qu e d ’apparence, elle serat reçue et co m b a ttu e tost; car l’on
l’attend avec g ra n d e dévotion. Le P rince d ’O range licencie les Anglois et
Allemandz, rete n an t seullem ent les François, Espaignolz et W a llons qu e le
sont allez servir. L’on at icy nouvelles qu e le Roy de F ra n ce at l a i d ung
général pardon sans rien réserver, et q u ’il rend tous les biens confisqués, à
condition de ten ir la foy catholicque, et q u e ceulx qu e ne le vo u ld ro n t
faire, so rtiro n t le ro y au lm e faisantz le prouffit de leur bien.
Monsr de B e rla y m o n t at o p p in io n qu e le D uc d ’Albe se rem ectrat su r
pied, p o u r ce qu e le Roy n ’at aultre. Il se m alcontente, et non seul, que
Roda, Arias M ontanus et d ’Avila sont du conseil d ’Estat, et dit q u e cela ne
d u re ra ny se soufl'rera, et q u ’il y at d a n g ie r q u e ces Estatz polroient q u e lq u e
j o u r eulx saisir du gouvernem ent, com m e ilz feirent du temps de Maximi­
lien. Si cela se faisoit, ilz se feroient républicque.
Monsr le Duc d ’A rschot n ’at encoires veu le C om m en d a d o r Maior depuis
son retour, et s’est excusé s u r son indisposition, et q u ’il s’est mis en q u e lq u e
diette. L ’on dict q u ’il at m an d é au C o m m en d a d o r Maior q u e si l’on heust
suivy bon conseil, l’on ne se retrouveroit pas en ces termes.
Les Allem andz se rassam blent à l’e n to u r d ’Anvers, et se vantent q u ’ilz
sç a u ro n t aussi bien recouvrer leur p a ie m en t com m e les Espaignolz ont
faict, dont le m agistrat at ad v erty Son E x ce, protestant/, qu e si cela advenoit, tous h a b a n d o n n e r o n t la ville. Mais il les a t a ssheuré, le p r o p re jo u r
de son p a rte m e n l, ad ce q u e l’on m ’at dit, q u ’ilz ne d o ibvent avoir p a o u r
de cela, et qu e le chasteau tiendra bon. Le m enu peuple d’Anvers m ect en
avant qu e la ville soit close de m urailles, selon q u e le Duc d ’Albe le le u r at
p ro m iz , depuis la joincte ju sq u e s au chasteau.
Il ne p e u lt estre q u e toulte l’Espaigne ne soit estonnée de la perle de la
Colette, si im p o rta n te à toutte la C h re stie n té ; car l e T u r c q ne cessera q u ’il
1 La flotte a r m é e en Biscaye, c o m m a n d é e p a r P i e r r e Melendes, m o r t le 7 s e p t e m b re i 57 4 .
DU CARDINAL DE GRAiNVELLE.
269
ne rase tous les aultres Ibrtz qu e nous avons en Affrique; el estant si puis­
sa n t de batteaux, ne fauldral de se je c te r s u r Maiorque, M inorque, S a rdaigne, selon que p lusieurs disc o u re n t icy, p o u r se faire m aistre de la m e r
M éditerranée. L’on dit q u ’il luy est venu secours de cent galères nouvelles.
Si ce pays fust esté rappaisé, les hulcques d ’Hollande n ’h eussent mal servi
p o u r le secours. L’on dict elèrem ent qu e la G ouletle s’est p e rd u e p a r f a u lte
de gens, et que le Roy y at esté servi com m e il est p a rto u t; q u ’il y pensoit
a voir 4000 testes dedans, et q u ’il n ’y en at poinct beu 1200; q u e le capitaine
P o rto c a rre ro ' n ’at voulu recepvoir les 10 0 0 soldatz q u e Voslre Illn,e Sgrie
vouloit. q u ’il prin st, a iant avec dilïiculté receu les m un itio n s q u ’il luy at
envoié, et refusé le secours q u e luy présentoit le Viceroy de SiciIle, esti­
m ant gloire de tenir avec peu de gens.
L’on n’at jam a is piz Iraicté les ecclésiasticques, le Conseil de B ra b a n t et
tous gens d ’h o n n e u r qu e ceste fois. La fabricque de Saincte-Gocle, où l’on
refaisoit les verrières de l’église, est logée. Aussi est Madame de T holouse s.
et je ne scay si M onsieur Bave o b tie n d ra t exem ption. Vos olïiciers l’ont
heu to u sio u rs; mais Son Excellence m esm es a dict q u ’elle ne veult p e r­
s o nne a voir exem pte. Toutlesfois le m agistrat l’est. Q u a n t il at veu la liste
des officiers, il at dict q u e c’estoit trop, com bien q u ’ilz ne sont q u e onze
Il n’at q u e u n g n e poignée de gens, et tout le m o n d e en est torm enté, q u ’est
p o u r encores plus p e rd re les bonnes voluntez.
E lb e rtu s m ’at com pté q u ’il at m ené bien avant le faict de l’a c c o rd ; mais
q u e l’on n ’en veult poinct, et qu e nostre bravesse nous pe rd ra . 11 dit que
l’H ollande ne se r e n d r a t jam a is si elle n ’est assheuré, et q u e le v ray seroit
d ’en d o n n e r le g o u v e rn e m en t à Monsr de B uren, qui avec bon moien polro it rem ectre la Religion; je ne suis esbahi si l’on n’at trouvé bon cest advis.
Si est ce q u e , si cest h y v e r l’on ne treuve q u e lq u e expédient, q u e tout sera
p e rd u , et m esm es la Religion, q u e faict le plus à regretter.
L’on at com m is le beaufrère* avec certain a u d ite u r p o u r congnoistre de
1 P o r t o - C a r r c r o , p e r s o n n a g e d é v o u é à D o n J u a n , a v a i t é t é é tab li p a r celu i-ci c o m m a n d a n t d e la
G o u l e t l e en 1 5 7 5 . Il é t a i t a u n o m b r e d es 5 0 0 p r i s o n n i e r s é p a r g n é s p a r les T u r c s lors de l’a s s a u t de
c e tte f o rt e r e s s e .
*
(P
a l l is sie r
,
E xploration de l’ Algérie, t. IV, p p . 1 0 2 e t 105.)
M arie d e B o n n ièrcs d e S on aslre, v e u v e de J a c q u e s de M a r n i x , ch ev alier, s e i g n e u r de T o u lo u s e.
V o ir 1 . 1 , p. 129, noie 1.
5 D i d i e r van T ’S estich , b e a u - f r c r e d e Morillon, s o u v e n t cilé d a n s ce v o l u m e e t les p r é c é d e n ts .
270
CORRESPONDANCE
la préhension qu e aulcungz Espagnole font s u r les m eubles de voslre c o n ­
cierge Voeyns, el aussi les exécuteurs de C im bron ; et si Vostre Sgrie lllm,,
n ’en escript au C o m m en d a d o r Maior, je le vois inclin à les fabvoriser. Et si
cela n’ayde, j e suis d ’advis q u e Voeyns face procès co n tre eidx devant la
Chancellerie de B rabant. L’on ne peult refuser justice.
Rode est d e m euré en Anvers, p o u r faire argent.
LXXIV.
L E P R É V Ô T MO RILLON AU CA R D IN A L DE G R A N V E L L E .
( b ib lio th è q u e de ISrsançon. — I .c u r e s île d iv e rs, I. I I I , loi
22 à 24.)
( K r u x c l l c s ) , le 5 0 n o v e m b r e 1 5 7 4.
M onseigneur. Nos affaires vont de mal en piz. Le tiers m em bre de celle
ville s’excuse d u m auvais escript pu b lié en leur nom , affirm ant c o nstam ­
m en t de n ’y avoir jam ais p e n sé; mais les Estatz de B ra b a n t o n t e m prins
les arres p o u r eulx, aiantz dressé u n e fort longue rem o n stra n ce avec copie
de leurs anciens privilèges *, et q u ’ilz o n t povoir, q u a n l le Duc ne ga rd e sa
prom esse et serm ent, de m ectre u n g r u a r d ou g o u v e rn e u r de p a r e u lx ; et
dien t q u e après avoir e xhibé les rem onstrances, ilz ne sont déliberez de
plus rien escripre. J e prie D ieu de susciter q u e lq u e bon esprit p o u r hoster
toutles ces a m e rtu m e s des de u x costelz, et q u e l’on p uist v e n ir en u n e b o n n e
et m utuelle intelligence. Le povre Monsr d’Anvers se d o ib t tre u v e r en peine,
estant suspect aux abbez, m esmes de Parc et S a in ct-G e rlru d , q u e ne veul1 Un g r a n d m ém o ire , r é d ig é d a n s ce sens, est p u b l i é d a n s
D o d t
van
F
lensblrg
, A rc liic f vnor ker-
kelijk en wtreldsc/te gcschiedenissen , t. I I , p p . 1 5 8 e t su iv . Il e s t suivi d ’u n e ap ostille d u G r a n d C o m ­
m a n d e u r , d u 12 d é c e m b r e 1 5 7 4 . D a n s cet a c t e , R e q u escn s p r o m e t d e fa ire a u t a n t q u e p o ss ib le d r o i t
a u x réc la m a tio n s des États. Nou s lie v o y o n s pas f ig urer d a n s la r e q u ê t e la décision des É t a t s d e « né
p l u s rien s es c rip r e . »
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
271
lent v enir disnvr là où luy se d o ib l tre u v e r
si peu de cas font ces b onnes
gens des évesques, disantz o u v e rte m e n t q u e tout re to u rn e ra en son p r e ­
m ie r estre, q u e se feroit bien tost, s’il m ésadvenoit de nostre bon R o y ; et
e u lx sont si im prudent* q u e de ne penser si les évesques souffrent, ilz
a u r o n t leur part. Le C hancellier de B ra b a n t se treuve en peine p o u r avoir
scellé la com m ission de Cicoigne *, pour ce q u e lesdictz Estatz re p u te n t ce
faict crim inel. II diet p o u r son excuse qu e son ho m m e l’at faict à son
desceu, q u ’est re n tr e r de fiebvres en c hauld mal.
Ceulx de H a y n n a u lt o n t m a n d é à Son E xce qu e si elle ne leur tient sa
promesse, ilz rév o c q u e n t leur accord, et ne veuillent paier u n g solz ju sq u e s
l’on casse la C h a m b re des troubles, ou qu e d u m oings tout ce qu e concerne
les confiscations d u H a y n n a u lt soit rem iz à le u r haulte Court, avec povoir
de ven d re les héretaiges s u r lesquelz sont hipo th e c q u ez les ren tiers, a u x quelz l’on d o ib t q u asi a u lta n t com m e le fond vault. T o u t cela leur avoit
esté ac co rd é ; mais ilz d ie n t q u e le sieur Roda at faict dresser un e o r d o n ­
nance p a r Son E x ce q u e l’on a tte n d ra t d e u x ans sans vendre lesdils fondz,
estant a p p a re n t q u e le tem ps sera lors plus à propoz p o u r v e n d re ; mais
aussi seront ilz p lu s chargez p a r les cours de rentes q u e c sch e rro n t ce
pe ndant.
Ceulx d’Artois, q u ’o n t furni q uelques deniers p o u r paier les frontières,
co m m e n ce n t à ten ir sem blable langaige et s e rre r leurs botirsses.
S u r tout c ra in d z -je ceulx de Flandres, vers lesquelz at esté envoié Mr de
R assenghien ‘ p o u r les in d u ire à fu rn ir deniers. Mais ce at esté sans fruict.
Car ilz d ien t a b so lu m e n t q u ’ilz veullent paier eulx mesmes la g e n d a r­
m erie, s’estant si mal acquicté le Duc d’Albe en l’em ploy de tant gran d e s
som m es q u ’il a receu, qu e sont estez donnez au x Espaignolz, et noz gens
m e u re n t de faim. L ’on d o ib t à ceulx des frontières dix ans six mois. L’on
le u r faict m a in te n a n t p a ie m en t de trois mois, et ceulx de B ra b a n t et de
F la n d re s se font fortz d ’e n tre te n ir six mille hom m es d ’arm es, les trois mil
1 L ’é v é q u c S o n n iu s. L a c o n d u i t e des a b b é s de P a r c e t d e S te - G e rtr u d e à L o u v a i n , les frères V a n d e r
L i n d e n , n ’a r i e n d ’é t o n n a n t . Ils a p p a r t e n a i e n t a u p a r t i d u p r i n c e d ’O ran g e.
* J e a n - A n d r é Cicogna a v a i t é té c h a r g é de p e r c e v o i r les c o n t r i b u t i o n s d estin é es à l ’e n t r e t i e n des
so ldats. V o ir
H
oynck
van
P
a pendrecht
,
t. II, p a r t . I l , p. 2 9 2 . La c o n d u i t e d e ce p e r s o n n a g e u ’a pas
to u jo u rs été e x e m p t e d e r e p r o c h e s . V o ir t. IV, p. 5 3 4 .
* Maximilien d e G a n d , dit V i l a i n , Sr d e R a s s e n g h i e n . V o i r sa no tice, t. I l , p. 7 0 .
272
CO RR ESPONDANCE
avec pleins gaiges, el les aultres trois mil com m e apperceuz, d o n n a n tz a u x
gentilzhom m es, qui a u ro n t de u x chevaulx, c in c q u a n te florins p a r a n ; à
ceulx qui a u ro n t trois chevaulx, cent florins, à c o n d itio n qu e en tout
tem ps q u e on les s o m m e ra it de servir, ilz se délivraient Ire u v e r preslz et
m o n te z ; lors q u ’ilz a u ra ie n t pleins gaiges com m e les aultres. Aussi e n tre tiendroient-ilz sept à huicl mille piedlons s u r la frontière, bien paiez, q u e
recepvroient doubles gaiges ju sq u e s ilz se ra ien t pleinem ent paiez des dix
années q u e l’on leur doibt. S e raie n t tenuz les ungz et les aultres vivre en
discipline, sans p re n d re ung pollet aux p a y s a n tz ; el p a r ce m oien esti­
m ent lesditz Estatz, s’il y avoit paix, de povoir m ectre le pais tan t foullé
au-dessus. Mais ilz veuillent m an ie r eulx-m esm es les deniers, sans q u e les
finances y a u ro n t rien q u e veoir. Et veuillent avoir b a n n iz les Genevois et
tous financiers qui m an g e n t le Roy et le païs, et pro m e tte n t de tro u v e r
paiem ent aux estrangiers en cas q u e l’on les casse. E t jà se parle q u e les
Allemandz sont licentiez, a iant le Sieur Roda trouvé en Anvers 80 mille
escuz de finances, q u e serat p o u r les renvoier chez eulx. paiant le su rp lu s
avec atte rm in a tio n . Son Excellence faict tout ce qu elle peult p o u r des­
c h a rg e r le païs.
Plusieurs gentilzhom m es flam mengs des o rdonnances se sont treuvez
à Garni près des députez des Estatz, m alcontentz de ce qu e l’on ne les
paie; et aiantz a u lc u n s d ’eulx volu v e n d re leurs chevaulx, les aultres ne
l’o n t volu perm ectre, disantz q u e com bien qu e le Roy ne les paie, il fault
néanlinoings servir la patrie. Il en y at aussi p lusieurs icy bien m alcon­
tentz. Ce q u e faict plus à c ra in d re , sont les paysantz de Flandres, qu e sont
tous em hastonnez 1 et prestz p o u r se lever à u n g chifllet ou son de cloche.
Ilz ont frotté un e com paignye de chevaulx-légiers à Deinze s u r le chem in
de G and à C ourtray. Les paysantz de M eerhout en la C am pigne o n t chassé
les W allons et en navré et coppé en pièces plus de cent. Ce sont tous maulvais présaiges.
Les F risons sont s u r le poinct de se m u tin e r p o u r ce q u e le sieur de
Billi y veull p ra c tiq u e r et exécuter, p a r l’em p riso n n e m en t des paysantz,
les aides, d o n t il ne v ie n d ra t jam a is à chief. Ce p e n d a n t les Espaignolz se
sont de rechief a m utinez en H ollande et se sont saisiz de la perso n n e de
27.1
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
leur colonel Valdez
Hz ont cuidé se jec ter hors de Hollande et s u r ­
p r e n d r e , p o u r assh e u re r leur passaige, S p a ren d a m s u r les gens de Mr de
Licques, a u m oien de x l Espaignolz q u ’estoient avec eulx a u d it S p a re n ­
dain. Mais, com m e l’on s’en est d o nné g a r d e , les gens d u d it S ie u r de
Licques ont chassé lesdit x l E spaignolz dehors, avec force coupz d ’espées
et de pistoletz.
Aussi ont les ennem iz prins q u e lq u e fort près d u d it S p a ren d a m avec
occision de plusieurs E spaignolz; et le p rin c e d ’O renge ne d o rt : ca r il
appreste cent basteaux et en at prins six venanlz d ’Espaigne, desquelles
l’on dict q u e les trois vailloient c h a scnng c in c q u a n te m ille livres de gros.
Les Allem andz sont estez en arm es co n tre les Espaignolz à cause du
paiem ent qu e les Espaignolz voulloient avoir seulz, d o n t ilz ne se sont
trouvez bons m a rc h a n d z ; et com m e Son Excellence avoit rep a rti les
Espaignolz qui ont Testé passé tenu assiégé Bom m ele et G orcum , p o u r
tenir garnison à R h enen , W y c k , A m m ersford où il y avoit des Allem andz, les bourgeois se sont accordez avec eulx, et o n t tenu lesdits
Espaignolz dehors, q u e c e p e n d a n t ont eslez m altraictez p a r les paysanlz.
Nous sûm es aussi p a r icy esté en craincte de q u e lq u e esmotion, p o u r ce
q u e le peuple at c o n tra in c t 200 Allem andz h a b a n d o n n e r le bois q u ’ilz
estaient allé c o p p e r près de la ville, et aussi p o u r la force q u e a ulcuns
Espaignolz ont faict à la maison de la fabricque de Sainete-Goele, où ilz
sont en tré p a r force, a ia n t ro m p u les portes de devant et derrière. C’est le
lieu ou l’on m ect les jo ia u lx de l’église, où l’on faict les cires et où l’on al
refaict les verrières d e rn iè re m e n t gastt ez p a r la pouldre, lesquelles c om m oditez l’on p e rd t p a r ce logement. Si peu de respect p o rte l’on ad ce que
a p p e rlie n t aux Eglises; et ne s ervent à rien les rem o nstrances q u e l’on faict.
C ependant l’on parle q u ’il se traicte q u e lq u e paix et q u e Mr de Hierges
a u ro it désjà résolu a ulcuns poinctz,si com m e de la religion et de l’auclorité
de Sa Majesté, q u e le S r Don F e r n a n d e et Mr de C ham paigney avoient désià
concerté. P a r ce boult, se forclod cestu y -cy de la négociation. L ’on at icy
1 Celle m u t i n e r i e c l l 'e m p r i s o n n e m e n t d e F ra n ço is Valdes s o n t l o n g u e m e n t détailles d a n s M e n o o c a ,
l. I l , p p . 2!)0 e t su iv . V o ir a u s s i d a n s la Correspondance de Philippe I I , t. I I I , p. ISI6, la le t t r e de
Kcqucscns. Elle t race d e lu s i t u a t i o n d u p ay s, des p lain tes q ui a r r i v e n t d e tou s côtés, d es m u t i n e r i e s des
E sp agn o ls, des A llem an d s et d e s W a llo n s , un t a b l e a u des p l u s s o m b r e s , s u r p a s s a n t de b e a u c o u p les
faits r elatés p a r Morillon.
T om e V .
3»
274
CORRESPONDANCE
appelle Mrs d ’Y pres et de B r u g e s '; Mr de S ainct-O m er y at esté appelle,
m ais son g ra n d eaige et indisposition ne l’o n t perm iz. Lesdictz deu x
Sgr» Evesques sont esté icy q u e lq u e tem ps sans q u e l’on le u r at parlé, et y
sont encores. Aussi y sont le Chancellier de Geldres et président d’Hollande ausquelz le séjour ne convient p o u r estre povres à cause de la p e r­
dition d ’Hollande, qui estoient a u p a ra v a n t fort opulentz. Hz sont estez
ensam ble. L’on ne dit poinct p o u rq u o y ilz sont appeliez; m ais aulcuns
so u b ç o n n e n t q u e c'est p o u r avoir leur advis si Sa Majesté peult avec b o nne
conscience tra icte r paix avec les héréticques et rebelles, et si se peult faire
avec sa réputatio n. S u r ce qu e je tiens, q u e si ainsi est q u e l’on at p o u r
ce rappellé lesdits Sgr9, ilz feront lost un e bonne résolution, estant la
réputation de Sa Majesté de conserver ses subjeclz en paix et repos, et sa
conscience obligée, p o u r tenir le lieu q u ’il tient, à conserver les âmes dont
s’en sont p e rd u tan t de milliers en Hollande et Zéelande, desquelles Sadicte
Majesté debvra re n d re com pte à Dieu.
P le u t à Dieu q u e heussions une b o n n e trêve; car si q u e lq u e chose se
résoult p a r ces Sg r9 Evesques et P résidentz, il sera besoing de l’envoier à
Sa Majesté, vers laquelle on dit q u e l’E m p e re u r at envoié p o u r la tierce
f o is 3, afïin de m o ie n n e r q u e lq u e accord, et q u ’il sem ble q u e l’on y preste
plus l’oreille qu e du passé. Aulcuns tiegnent q u e ce soit dissim ulation p o u r
tir e r deniers : en ce q u e l’on p erdra temps.
Les Estatz en général persistent q u e l’on dresse u n e paix, et j ’entendz
q u e aulcuns de ceulx q u e o n t crédict en Court les o n t encouraigez d ’insister
ad ce. Ceulx de B ra b a n t sont fort fondez s u r les privilèges, et qu e Sancho
Davilla soit desm is de son Estât, et q u ’il y ait un g o u v e rn e u r du sang.
1 Ces p rélats étaien t M artin R iethove, év ê q u e d ’Y p r e s j Re mi D r i u l iu s , év ê q u e d e B r u g e s ; G é r a r d
d ’H a m e r i c o u r t, év e q u e d e S t O m c r .
* A r n o u l d S a s b o n t , c h a n c e li e r d e G u e l d r e , c t Corneille S u y s , p r é s i d e n t d u Conseil d e H ollan de,
a v a i e n t été in v ités p a r R c q u c s e n s à se r é u n i r à B r u x e lle s av ec les é v êq u es p récités e( les g o u v e r n e u r s
des p ro vin ces p o u r y d é l i b é r e r s u r les r e m è d e s à a p p o r t e r a ux m a u x . P l u s i e u r s d e ces perso n n ag e s
s ’e x c u s è r e n t , m ais enfin ils a r r i v è r e n t , sa u f l ’é v è q u e de S t -O m e r. R e qu esens v o u l a i t l e u r m o n t r e r
q u e l q u e confiance e t fa ire c o n n a î t r e les p r o p o s i t i o n s de d iffé rents p r i n c e s en v u e d e pacifier les P a y s Ba s. V o i r la Correspondance de Philippe / / , t. III, p p. 1 9 8 e t 2 0 4 .
* L e com te de M on te ag u d o d e v a i t a r r i v e r a u x P a y s- B a s, e t R u m p f f é t a i t c h a r g é d e la p a r t de l’E n ip c r c u r d 'a lle r t r o u v e r P h i l i p p e II h M a d rid . Il y a r r i v a le 18 n o v e m b r e . V oir la Correspondance de
P hilippe H , t. III, p p. 17 8 , 2 0 0 .
DU CARDINAL DE G RANVELLE.
27d
Monsr le m arq u is d ’Havret et le Sieur de Cappres 1 font de nouveau chasc u n a u l c u n e s com paignies en Artois, qu e a ulcuns dient n’estre signe de
paix. Si l’on licentie les Allemandz, le pais ne peult estre en telle c o n ju n c ­
tu re sans gens de guerre. Plus me faché-je de ce qu e l’on p re n d si aigre­
m e n t qu e les povres gens de la Cam pigne, q u e sont tous les j o u r s volez
p a r les ennem is de G e rtru y d e in b e rg h e, se sont secrettem ent b ranscattez 1
vers les G ueux et le P rin c e d ’Orenge, aiantz Cicoigne et Baptiste de Taxis
trouvé aux coffres de ces povres gens, q u e l’on vad jo u rn e lle m e n t fustant
et cro c h e ta n t, qu e lq u e s saulvegardes du Prince, d o n t le C om m en d a d o r et
Roda font g randes exclam ations et avec peu de raison : car, ou il fault
deffendre la povre C am pigne, ou perm ectre q u e les povres gens se b ra n s cattent p o u r rete n ir leur vie, de leurs femmes et enffantz et conserver leur
lab e u r et bestial, ou il fault parto u t m ectre le feug au x m aisons. L’on at
d o nné au beau-frère la com m ission de s’aller inform er, et veult-on q u e l’on
les pren d e et pende p a r douzaines. Il trouvera à qui p a rle r e lq u e les Réverendissimes d ’Anvers et Bois-le-Duc sc rac h a tle n l ny plus ny m oingz q u e les
aultres p o u r m a in te n ir leurs censiers, et je luy ay dict q u e p a r son ra p p o rt
il les m ecte in capile libri. L’on veult avoir les aydes, et l’on ne veult con­
server le paysant. D u tem ps de Martin van Rossem 5, q u ’il passa p a r B ra ­
bant, la R oyne deffendit q u e l’on ne b ran schata avec les ennem iz, aulcungz
villaiges fu re n t bruslez ; ce q u e véanlz les aultres, ilz se r a c h a p ta re n t tous,
et la R o y n e ne s’en ressentit oneques, ny en feit a u lc u n e inform ation. Mais
le tem ps de lors et de m ain te n a n t est bien divers.
L ’on m ect h u ic t com paignies d ’Espaignolz en Anvers, non obstant q u e
l’on avoit prom is, lo rsq u ’ilz pa ia ren t les 1 0 0 m ille florins, q u e l’on n’y mectro it ny Espaignolz, ny aultres. Il y en at d e u x com paignies à Lire, un e à
Vilvorde et q uelques chevaulx légiers à G rim b e rg h e, logiez u n e partie en
1 O u d a r t d e B o u r u o n v i l l e , S r d e C â p r e s , g o u v e r n e u r d ’A r r a s , m o r t le 2 8 d é c e m b r e
t. III, p. 5 8 5 , e t t. IV, p. 11 1 .
1 5 8 5 . Voir
;
* B ra m c a tlc z, p r é l e v e r u n i m p ô t , so u s peine d 'i n c e n d i e r la p r o p r i é t é . Les i n s u r g é s branscattaicnt
s o u v e n t les h a b i t a n t s des localités d o n t ils s'e m p a r a i e n t , o u q u e l’a r m é e es p a g n o le ne d é f e n d a i t pas.
Ces i m p ô ts é t a i e n t f r é q u e n ts d a n s la C a m p in e et d a n s le n o r d d e la F l a n d r e .
* M a rtin v an R o s s e m , c é l è b r e g é n é r a l g u c l d r o i s , q u i a v a i t e n v a h i les P a y s- B a s, lo r sq u e C ha rles Q u in l é t a i t en g u e r r e a v e c la G u e l d r e . Voir sa b i o g r a p h i e d a n s
denboek ,
et D
e
P
a pe
,
Gcschiedenis van M aartcn Van R osm m .
V
ander
A
a
, Biographisch Wour -
276
CORRESPONDANCE
l'abbaye. J e tiens qu e c’est p o u r la sheurté de Son E x ce et avec raison. Mais
si elle les in tro d u ic t q u e lq u e j o u r p a r auclorilé ou subtilité en ceste ville,
je craindz q u e la fin n ’en sera bonne, car le peuple est fort altéré. Aulcuns
[ad ce que l’on dit] luy font à croire q u e aiant gens et le m arcquis Vitelli
à Bois-le-D uc, et le chasteau et garnison en Anvers, q u e se faisant fort en
ceste ville, il rengera les Eslatz de B r a b a n t; ce q u e polroit eslre p o u r ung
tem ps, mais il fault reg a rd e r la fin; et vault m ieulx faire les choses avec
bénévolence p o u r gaigner les ce u rs; mais de ce se soucie l’on peu, et Roda
faict tout, Le président Viglius le souffre et devient pesant et inutile, et ne
vad plus loing qu e ju sq u e s sa salette. Il fuyt les affaires que le fuvent aussi.
L’on dit que l’Enrapcreur at ob ten u trêve avec le T u rc q p o u r hu ict ans.
Cela nie faict croire q u ’il v ouldrat reto u rn e r p a r m er, y aiant treuvé bonne
amorsse.
Il sem ble q u e la F ra n c e est p o u r s’appoincler. Touttefois ilz sont encoires
en bien grandes garboilles du coustel de Poictou et L anguedoc, et s’y desvalisent a ullanl de c o u rriers q u ’il y passent : est encoires ru é ju z u n g qu e veuoit
avec despesches d ’E spaigne depuis huict jo u rs . Ilz d e b vroient p ren d re le
c hem in par Angleterre p o u r venir à Nantes et passer en Espaigne d e contra.
Les Anglois se m o c q u e n t de nous. II y at venu u n g agent de la R oyne
p o u r parachever le traicté e nco m m en c h é à Bruges où vont nous députez '.
Capitaine Ju lia n at esté q u e lq u e tem ps hors de sens; mais il est revenu
à soy 4.
Il s’est icy espars u n g b ru ic t p a r ceulx d ’E spaigne contre Vostre Illme S g 'ie
luy im p u tan s la perdte d e là G o ulelte,dont est principal a u c te u r Del G a d illo 1,
disant que le D uc d’Albe le m aintient, et le m esm e faict Don Jo a n , et que
le R oy est fort fasché contre Vostre Illme Sgrie, luy a iant miz en m ains Porto
C arrero ‘ qui s’est si mal acquicté, aiant lessé p e rd re la place ce p e n d a n t q u ’il
d isnoit; que n’est chose créable. Aullres dien t q u ’il avoit d e m a n d é gens à
1 Le m é m o ire d u d o c t e u r T h o m a s W i l s o n , a m b a s s a d e u r de la r e i n e d ’A n g le te r re , p r é s e n t é a u G r a n d
C o m m a n d e u r d e Caslille le l ,r o c to b r e 1574- et la r é p o n s e d o n n é e p a r R c q u cscn s s o n t an aly s és d a n s la
Correspondance de P hilippe II, t. III, p p. 2 0 0 , 2 0 t .
* D a n s u n e le t t re d u 18 n o v e m b r e 1 8 7 4 , R c q u e se n s d it a u R o i : « J u l i a n Rom ero, qu i était à to ute
e x t r é m i té , a r e c o u v r é le j u g e m e n t ». ( I b i d p. 199.)
• H e r n a n d o Del G a d i l l o , s e c ré ta ir e du d u c d ’Albe. Voir t. III, p. 2 2 7 .
1 Voir p lus h a u t , p. 2 6 9 .
I)U CARDINAL DE GRANVELLE.
277
Vostre Illme Sg,ie, et q u ’elle ne les luy at voulu donner. Del Gadillo adjouste
q u e Don J o a n succède à Vostre lllm« Sgri<!, qui reto u rn e à R o m e ; de tout
ce q u e je ne faictz que rire. Il fault lesser gazoiller ces petitz causeurs.
L’on d it aussy q u ’ilz sont passez des estranges propoz à Palerm e s u r la
p e rd te d u fort de Tliunes et de la Goulette; qu e l’on at jo u é q u e lq u e farce
m ocqueuse à F e r ra r e et à Naples, q u e l’on at semé qu e lq u e s médailles à
Rome, aiantz nostre Roy d ’u n g costel et au revers q uelques asnes dénotans
Je Conseil d ’Espaigne : q u e sont choses q u e ne vaillent rien, lo u c h a n t ainsi
la h a u ll e u r d e s princes et de leurs m inistres, et povons d ire qvod m undus
et maligno positus. Je veoidz q u e le C om m endailor vad aussi p e rd a n t au c lorité, n’estant estimé des siens propres.
J ’entendz de bon lieu qu e le Duc d ’Albe dessert tous ses estatz, et entre
d ans tous les consaulx. saulf q u e I on n ’at voulu q u ’il ait son lict en C ourt,
ce q u ’il prétendoit, et q u ’est perm is au du c de Médina, auquel le Roy at
faict g ran d h o n n e u r à son arrivée, luy a iant d o n n é estât près de la Royne,
mais q u e c e p e n d a n t il m e u re de faim, et tous ses gens l’habandonnent.; que
C inlhio 1 s’est relo rn é à Milan désespéré; q u e ledict Duc porte g ran d e co n ­
doléance à ce payz, mais q u ’il n’en ose p a rle r au R o y ; m oings luy at-il osé
m o n stre r tant d’escriptz et advis q u ’il avoit em p o rté icy, de sorte que je ne
doibz c ra in d re p o u r ce qu e je luy d o n n a y à son p a rte m e n t d'icy. J ’entendz
toutlefois q u ’il at c o m m u n ic q u é plusieurs choses à H o p p e ru s : mais a ullant
en em porte le vent. Certes, q u a n t j ’entendz cecy, il me sem ble q u e H o p p e ­
ru s at faict g ran d e folie d ’avoir ainsi escripl d u D uc d ’Albc, qui le paiera
sans luy croire longuem ent. J ’ay opinion q u e le D uc d ’Albe c h erch era de
se rap a telin er avec Vostre Illme SgrIe p o u r se fortilïier contre ses ém ulateurs.
Il faut dire q u e H op p e ru s cognoist peu l’h u m e u r de son maistre. L’on di
aussi q u e la femme d u R oy at esté m alade de regret qu e son mari est
q u e lq u e s fois u n g mois, veoires deux et trois, sans la veoir, encores q u e sa
d e m e u re ne soit distante de celle de sa femme si loing qu e d ’icy à la Fontaine*.
M onsieur de R eulx 3 est icy, q u i dict g ran d bien de Vostre lllme S g ':el’e x h a ulceant et lo u a n t g ra n d e m en t, et confesse q u e ce q u ’il en at dict
1 C i n l h i o , s e c ré ta ir e d u d u c d e M edina-C eli, so u v e n t cité d a n s le to m e IV.
1 Nom de la m aiso n d e plaisa nce d u c a r d i n a l à Saint-Joss e-ten-N oode.
* J e a n de C roy, co m te d e R œ u lx. V o ir t. I , p. 2 7 7 .
CORRESPONDANCE
278
aultresfuis esloil p a r la suggestion du P rince d ’Orenges et du l’eu Comte
d'E gm ont.
J ’ay parlé au chanoine m aistre Eustace de La Salle *, qui m at dict q u ’il
est content de p r e n d re la charge de Mr vostre n e p v e u r s’il vous plaicst.
J ’a c te n d ra y vostre advis, et s’il ne vous plaicst, je m ’en sçauray bien
deffaire h o nnestem ent, n’a iant en tré en a u lc u n e condition q u e de sçavoir
sa volunté.
Il n’est à croire les m a u lx q u e se font icy p a rto u t d esro b an t gens ju sq u c s
devant les portes de Louvain, et depuis là ju sq u e s ceste ville, dedans
laquelle l’on at levé gens à co u leu r d ’aller veoir q u e lq u e beau ja r d in , et les
a t-o n p ro m e n é hors de la ville, et là tenu serrez en q u e lq u e cha m b re, et
depuis faict tra n s p o rte r la nuicl en G e rtru y d e m b e rg h e et rançonner. Telles
inventions tre uvent l’extresm e povreté. L’on en m e u r d r it aussi beaucop hors
et dedans la ville, m esm e receveurs, q u e l’on tient p o rte r argent.
LXXV.
LE CA R D IN A L D E G R A N V E L L E A L ’A R C H ID U C C H A R L E S D’A U T R I C H E 2 .
( Itibliolhèque royale de Bruxelles. — Manuscrit n" 9 47 3, fol. 380.)
Naples, le 15 d é c e m b r e 1574.
Serenissime Princeps. Culpa praefectorum Cam erae regii aerarii factum
est ne priu s in negocio p e cuniario Cels. V. ad ejus votum d e c erneretur,
acceptis enim p rim is Regiae Majestatis litteris et illis q u as Cels. V. ad me
* Enstaclic de la S a l l e , c h a n o i n e d e Soignies. Il fut d u n o m b r e des d élég u és choisis p a r les E ta ts
d e H a i n a u t p o u r se r e n d r e en E sp ag ne e t y d e m a n d e r l’e x e m p t i o n d u 1 0 ' d e n i e r . V oir t. IV, p . 105»
* C ha rles, a r c h i d u c d ’A u trich e, fils d e l’e m p e r e u r F e r d i n a n d I et d ’A n ne, fille d e L adislas, ro i de
H o n g r ie et d e Bohêm e, n a q u i t en 1 5 t 0 e t m o u r u t le 3 a o û t 1 5 9 0 , a p r è s a v o i r é p o u s é M arie,
fille
d ’A lb ert II, d u c de Bavière, q u i le r e n d i t p è r e d e p l u s i e u r s en f a n ts e t e n t r e a u t r e s d e l’e m p e r e u r
F e r d i n a n d II.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
279
dederat, u tra s q u e tradidi cam erariis exa m in an d a s, qui d einde de m ore de
iis ad me defferrenl : eas illi a u t negligentia, a u t fortassis nim ia diligentia,
ne dicam culpa praefecti, qui ja m officio suo d e functus est, sic eas conserv a r u n t , u t qua te n u s institerim hactenus inveniri non p o tu eru n t, q u a de
re m onui agentes Cels. Y. hoc autem vitio a d m inistrationis neque lui jus
regni factum est, q u o tem pore in d u stria m , fidem et indicium m in is tro ru m
s e q u e b a r; acceptis secundis litteris cavi diligentius ne perirent, m o x q u e de
eis ad m e cum e o ru m volo referri m andavi q u o d autem sit c o nstitutum ,
q u o desiderio Cels. V.satisfial a b a gentibus suis intelligel,obsecro ne alior u m c u lp a m m ihi im p u te tu r, sed m em o r sit Cels. V. veteris mei erga fam iliam A ustriacam observantiae, cui q u a n lu lu s sum totum debes, sibique
persu a d e a t nem inem vivere qui m ajore studio h a n c colat neque ullum fore
qui paratiore v o luntate servire cupiat Cels. V. cui me totum ofïero devotiss im u m servitorem .
Note au-dessous : Se ha d a d o o rden q u o el lesorero pague al S° Sr A rc h id u q u e Carlos todo lo corrido de la rata de los cient mille duc a d o s de a y u d a
de costa hasta p o r todo o tubre, y q u e co n tin u e a pagarle, mes p o r mes, la
rata q u e le tocare hasta q u e sea del todo pagado.
LX XVL
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
( bibliothèque de Besançon. — Leltres de diver s, l. I l l , fol. 38 e t 59.)
B r u x e l l e s , les 13 e t 14 d ô c e m b i c
1 8 74 .
M onseigneur. J ’a y veu ce q u ’il at pleu t à Vostre IIIme et Rme Sr!e m ’esc rip re le xi® d u m ois passé s u r les affaires de B a rbarie. Ce q u e j ’ay c o m ­
m u n iq u é à Monsr de Sainct Bavon, F onch, Bave et Viron, q u e se s o n t
tre u v é en peine p o u r le b r u ic t q u i c o u rt p a r ceste ville d u m escontentem en t de ceulx d e Naples alFencontre de Vostre lllme el R me Sgr*e, et aussi
280
CORRESPONDANCE
du resentem cnl q u e Sa Sainclelé at all'cncontre d icelle, jusques, scion
Obsignanus
elle a u ro it tenu consistoire et proposé si n’aviez m érité
d ’estre d égradé du c a rd in a la t et louttes auItrès dignitez *. J ’ay délessé faire
p a rt de ladite lettre à Mons1' d ’Assonleville, c ra in d an t (|ue com m e il est
assez désireux d ’avoir et libéral à re p a rtir nouvelles, il les feit so n n e r aux
oreilles de ceulx que ne v e rro ien t voluntiers c h a rg e r leur nation, et de
ceulx qui a u ro n t plaisir de povoir rejecter la faulte su r ceulx q u e l’ont
faict. Ce q u e sont choses q u ’il fault éviter sans d o n n e r occasion d ’offense à
qui q u e ce soit.
Certes, c’est chose dé p lo ra b le de considérer Testai auquel se retreuve
p o u r le présent la Chrestienté de tous costelz. Et p u isq u e le T u rc q at
accordé les trêves de hu ict ans à l’E m p e re u r depuis q u ’il at conquesté la
Golette, c’est signe q u ’il veult parachever le je u et r u e r s u r les isles de
l'Italie et s u r elle-m esm es 5; p a r où je regrette de veoir Vostre Ilme Sgrie;
m a in te n a n t en perpétuel souci et sollicitude, se tro u v a n t frontière et à la
geulle des lo u p s; et n ’y at a u ltre rem ède que rec o u rir a u x arm es de l’Eglise,
qu e sont prières, jeu sn e s et aulm osnes, qu e j ’ay co m m a n d é estre faictes par
vostre diocèse, et que se c o n tin u e ro n t p a r temps, sans trop fâcher le p e u ­
ple. Je regrette qu e le m aistre n’at près de soy conseil plus réso lu tif p o u r
adviser s u r les rem èdes des m aulx voisins, et q u e l’on veoid à la porte,
affin q u ’il y soit pourveu sans p e rd re temps, mesmes q u a n d il en est p ré adverti de b o n n e he u re et de longue m ain, com m e il al esté p a r Vostre
1 J é r ô m e O l sig n a n o , p r o fe s s e u r à F r i b o u r g , p uis à l’U niv ersité de Dole. Il él a i t d 'o r i g i n e m i l a ­
naise et fu t a p p e l é à s ié g e r au Conseil des tro u b le s. C 'était 1111 p e r s o n n a g e très d é v o u é au d u c d'A Ibe
et p a r co n s é q u e n t e n n e m i d e G r a n v e lle . Voir t. IV, p. 5 8 2 . — Le p a p e était v i v e m e n t c o n t r a r i é de la
co n q u ê t e d e T u n is , c o m m e le d é m o n t r e n t les ac tes p ub liés p u r le P.
T
ein eh
d a n s les A nnales ecclesias-
tici, t. I, p. 5 1 4 ; m ais il ne p a r a i t pas a v o i r eu l’idée d ’en r e n d r e G r a n v e l l e re sp o n s a b le . Il es t p lutô t
d isp o s é à j e t e r d u b l ê m e s u r P h i l i p p e II.
*
« P a r c e q u e je lu y a y e n v o y é , il a u r a veu co m b ien to u t cccy e s t fa ulx et m c s c h a m m c n l co u -
t r o u v é . » (Noie m a r g in a le , é cr ite de la m a in de M. d e G r a n v e lle .) — L o rs q u e T u n i s fu t p r i s d 'a s s a u t
p a r les T u rc s , le 15 s e p t e m b r e 1574, le g r o s t e m p s r e t e n a i t Don J u a n e t sa flotte à T r a p a n i . En a p p r e ­
n a n t ce d é s a s t r e , il en é c r iv it au Roi, lui r a p p e l a ses n o m b r e u s e s e t v ain es d e m a n d e s d ’h o m m es et
d 'a r g e n t . Il n ’a v a i t r ien p u o b t e n i r . P h i l i p p e se consola de la p e r t e d e T u n is , ta n d is q u e les P ri n c e s
i talien s e t la F r a n c e s u r t o u t se r é j o u i s s a i e n t de l’h u m ilia tio n d e l ’E sp ag n e. S eu l le p a p e G rég o ire X III
p o u ss a un cr i d e d étresse.
■ Au m o m e n t d e son r e t o u r d e la G oulettc Aludji-A lli
entière.
(C
iu k r ik h e
,
Négociations d u L eva n t . t. III, p. 5 8 0 .)
m enaça C orfou
e t fit t r e m b l e r l’Italie
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
28-1
£ t p u is q u a n t on s’advise à un g instant, l’on veult q u e l’im pos­
sible soit fait le possible, à peine de s’en p re n d re à ceulx q u e n ’o n t moien
de l’exécuter, et a u squelz l’on l’at plus tost hoslé qu e donné. C’est un e
m o r t qu e d ’eslre c o m m a n d é de gens si violenlz et b r u ta u x ,q u i ne s e m b le n t
de c h e rc h e r au llre q u e de paier les bons serviteurs p a r ingratitude. Une
chose me console q u e Vostre Illme Sgrie at procédé si p r u d e m m e n t et ju s tiliem ent en toultes ses actions q u ’elle ne doibl c ra in d re ses p ro p res e n n e ­
m i/, et q u e p o u r un tem ps l’on p e u ll souffrir, et q u e après la vérité se d e s ­
couvre.
D ieu veulle c o n d u ire le S eigneur Don J o h a n si tan t est q u ’il soit p a rti.
Il n ’at. ad ce q u e je veoidz, euvre achevée, ny aussi n ’at Sa Maj'% q u e se
doibt tre u v e r en peine de veoir ses affaires si mal enlablez de tous coustelz.
M onsieur le P ré s id e n t ne fut de long tem ps m oings emploié, et si parle
m oings de successeur à p ré s e n t qu e oneques a uparavant. Je pense bien
qu e le fiscal * s’y a tte n d , ou s’il s’advance fort vers Son E x ce et le sieur
Roda, q u e a lu c u n z tiè g n e n t avoir fort b o n n e opinion du d o cteu r E lb e rtus. qu e se augm e n tero it si Dieu luy d o n n o it grâce de bien besoigner
en la paix q u e l’on veult traicter. Il est fort sincère en la religion et je
le tiens très favorable à l’estat ecclésiasticque, et ne le sçauroit estre m oings
qu e ledit Président. Aussi est Monsr F onch a, p erso n n aig e de x tre et de g ra n d
esprit. Si Assonville y parvient, ce ne sera son bien, ny celluy du p a ys; il
est trop légier \ Je tiens q u e c’est à bon escient qu e Mr le P ré sid e n t s’est
p lainct d ’H opperus; mais p o u r cela je n ’ay p o in ct esté oblié, et je mercie
m on Sgr et m aistre de ce q u ’il lui plaist m ’a d v e rtir de ce qu e je p o u rra y ,
avec le tem ps, e n te n d re de la résolution d u Roy.
L’on a t faict faire inform ation p a r les fiscaulx de F la n d re s de ceulx qui
ont contracté avec les ennem iz, d o n t s’en treuve p a r registre 400 et plus s.
I ||m e S g r ’-e.
1 Le p r i n c e p as sa lo u l l’h i v e r à Naples, c n s u ile des o r d r e s d u Roi.
* J e a n de Uoisscliot. V o ir p l u s h a u t , p . ôb.
5 J e a n F o n e k . V o ir p l u s h a u t , p. 4 0 .
* A différen tes r e p r i s e s , Mor illon insiste s u r la lég èreté d ’A s s o n l e v i l l e , e s p r i t v i f et p é t i l l a n t , niais
p eu positif.
5 11 s’agit d ’in d i v i d u s qui, p o u r é c h a p p e r à l’in cen d ie et a u p illa g e , p a y a i e n t a u x insurg és des c o n ­
tr ib u t i o n s . Voir au x A n n e x e s u n e le ttre a u s u j e t d e ces a r r a n g e m e n t s .
Tome V.
36
CORRESPONDANCE
282
Les Espaignolz ont h a b a n d o n n é La Haye et tous les fortz d’Hollande, et
l’on dit que si Monsr d ’Hierge ne le u r b e u t o uvert s o u d a in e m en t le H arlem m er, q u ’ilz fussent allé d roict vers le P rin c e p o u r se ren d re , et ne seriont, ad ce qu e l’on dit, les p rem ieis. et at don n é libre passaige p o u r aller
par A ngleterre en F ra n c e ou Espaigne. Ledit P rin c e est p o u r le présent
bien brave et plus h a u lt q u ’il ne fut oneques. Il nous a d o n n é la nu îct pas­
sée u n g réveille-m atin en Anvers avec x l ou l batteaux, a iant lire contre la
ville p o u r faire une b r a v a d e L e s Espaignolz en esloient sorti trois ou
q u a ttr e jo u r s a u p a ra v a n t, e ts e m b lo it q u ’ilz se e m b a rq u o ie n t voluntairem ent
vers la Goes. Mais doibz q u ’ilz estoient liors de veue, ilz se firent m ectre en
terre à Eckre, où ilz vivent à discrétion. Ilz ont cuidé re to u r n e r en la ville;
mais l’on leur al faict visaige de bois, ainsi que font ceux d ’Ulrecht aux
com paignies re to u rn a n tz de La Haie.
C ependant Monsr de C ham paigney d o ib t estre en bien gran d e peine et
traveil. Ces bonnes gens s’advisarenl u n e nuict faire l’alarm e en ladite ville
d ’Anvers et c rie r: Prince d ’Orenge, Prince d ’Orenge ! Ce q u ’ilz d ien l avoir
ainsi crié de faict advisé, p o u r veoir, si le P rince venoit, quelle m ine que
ceulx d ’Anvers liendroient, les appelanlz m eschants, p o u r ce q u e audit cris
nul ne sortit de sa m aiso n ; et si q uelc’un fust sorti, ilz beussent dit q u ’il
venoit au secours d u d it P rin c e : et d ien t o u v e rte m e n t q u ’ilz saccaigeront
A nvers et v ien d ro n t p o u r le m esm e effect en ceste ville. Certes, ilz se font
m erveilleusem ent b a y r ; et leur sem ble q u ’ilz ne p eulvent mal faire et q u ’ilz
sont les maistres.
Je me suis c e jo u rd ’h u y treuvé en com paignie de Mr de Naves *, qui me
dict plus de trois fois q u ’il estoit joieulx m ’avoir ren c o n tré p o u r me
d e m a n d e r du p ortem ent de Vostre Illme Srie et si elle estoit sortie de son
1 L 'e n tre p ris e d irig é e p a r le P rin c e d ’O r a rg e c o n tre la v ille d ’A n v ers est ra c o n té e p a r B o b , liv . V I I ,
fol. 8 0 v°. L e P r i m e en é c riv it au ssi nu com te J e a n de N assau , le 2 5 d é c e m b re 1 5 7 4 : • L ’e n tre p ris e
d ’A n v e rs, d it- il, a failli et n ’a e u t tel succès q u e d é s irio n s . La ca u se a é té la p u ss ila n im ilé des b o u r ­
geois, n ’a ia n t a u tem p s p réfix e osé m e ttre les m a in s au x a r m e s , com bien q u e noz b n tlc a u x et g en s de
g u e r re e s to ie n t a r riv é à le u r se c o u rs ». (G hoen van P iu m s te h e r , t. V, p. 1 1 0 .) V oir p lu s loin d ’a u tre s
d é ta ils s u r cette affaire, p. 2 8 4 .
*
J e a n II de N av es, fils d e N icolas I , n é le 15 novem bre 1 8 2 5 , m o rt à L iège le 2 0 a v r il 1 8 7 9 . Il
é ta it c o n s e ille r d ’É ta t e t co m m issa ire des v iv re s de l'a rm é e d es P ay s-B a s. D an s scs fo n ctio n s il p u t se
c o n c ilie r la re c o n n a iss a n c e d u g o u v e rn e m e n t e t des so ld a ts. (N e y e n , Biographie lux<mbovrgeoise,
t . Il, p. 8.
DU CARDINAL DE GRAIN VELL E.
283
go u v e rn e m en t, et q u a n t j ’avoie heu lettrez d ’elle; ce q u e je luy dictz et que
n’avoie sinon bonnes nouvelles de son p o rte m e n t et nulles q u ’elle fust allée
ailiieurs, d o n t il se m o n stra joieulx.
Ceulx q u e l’on at com m is de ce costel p o u r traicter la paix so n t: Mr de
Rassenghien, les chancellier de Geldres, p résident d ’H ollande et d o c te u r
E lbertus, q u e se d o ibvent tre u v e r à B reda \ De l’a u ltre costel, d it-o n . sont
députez : S a incle-A udegonde, Charles Boisot, J e h a n de J o n g h e et u n g p e n ­
sionnaire de L eyde ’, qui at la vogue et cré d it p a r dessus les aultres, e stant
estimé com m e ung chancellier, et asseurent aulcuns q u ’il n’est de m auvaise
religion, d o n t je me ra p p o rte au pappier. T a n t y at q u e q u a n t l’on v ie n d ra t
à jo in d re , l’on trouvera qu e le Prince d ’O renge n ’est pas maistre, et q u ’il at
bien à faire à se m ain te n ir, aianl esté par cy de v a n t les Hollandois p o u r eulx
révolter contre luy et le je c te r dehors. Ung peu de tra icte m e n t et de do u lc e u r
nous he u t m ené bien avant. Les q u a ltre susdilz d o ibvent venir à G e r lr u y dem b e rg h e
L’on parle fort de l’ap p o in c tem e n t de France. Si cela est, je liens se u re m cnl qu e lout v ie n d ra t s u r nous et q u ’a u ro n s bien à faire p o u r nous m ain ­
tenir. Dieu noz veuille a y d e r q u e je prie vous d o n n e r, Mgr, etc.
L’on at nouvelles q u e ce sont esté seullem ent x l batteaux venuz de
Flessinghe, q u e se sont retirez au inesme instant. C’est p o u r m o n slre r ce
q u ’ilz p eulvent faire. L’on at renforcé la ville d ’Anvers de g arnison des
Espaignolz et Allcmandz q u ’en estaient sortiz. C’est du x m i c de décem bre.
1 Morillon e n t e n d p a r l e r d es nég o ciatio n s de B r e d a .
*
I a c o m m issio n d a té e d u 9 f é v ri e r IH 75 e t d o n n é e à Max imilicn V i l a i n , Sr d e R a s s e n g h i e n , à
Arnould
S asb o c t, c h a n c e li e r d e G u e l d r c , Corneille S u y s , p r é s i d e n t d u Conseil d e H o l l a n d e , e t à
K lb ertu s L e o n i n u s , es t i m p r i m é e d a n s le t. I II , p. S 8 I , d e la Correspondance de P hilippe II. M.
chard
G
a
-
y a p u b l i é les p r i n c i p a u x ac tes c o n c e r n a n t les n ég o ciatio ns de B reda. V o ir a u s si B ulletin de la
Commission d ’histoire, 2 ' sé rie, t. XII, p. 4 2 8 , o ù se t r o u v e l’av is d u b a r o n d e R a sse ng hien s u r les
n ég ociation s av ec le p r i n c e d ’O r a n g e et les E ta ts d e H o lla n d e e t d e Z élan d e.
3
D ’a p r è s les l ettre s d e p a s s e - p o rt et d e s a u f- ro n d u i t en f a v e u r d es d é p u t é s d u p r i n c e d ’O r a n g e e t
d es E ta ls d e H o lla n d e e t d e Z éland e, ceu x -ci ét a i e n t : J a c q u e s V a n d e r Does, m e m b r e d u Conseil d ’Eta t,
G u i l l a u m e Van Z u y lc n d e N y v o ld , C h a rles Boisot, P h ilip p e de M a rn ix d e M o nt S t e - A ld e g o n d e , J u n i u s
o u De Jo n g h e , m e n t i o n n é plus h au t, A r n o u l d Vanilen D o r p c , A d r i e n V a n d e r M y l e n , P a u l B u y s , p e n ­
si o n n a ir e de L eid en , N a n n ic k de F o re s t e t Corneille B a cker. V o ir Correspondance de Philippe I I , t. III,
|>. K81, et
G
rokn
van
P
r in st e r e r
,
t. V, pp. 157 e t su iv .
CORRESPONDANCE
284
LXXV1I.
LE
PRÉVÔT
M O R IL L O N
AU
CA R D IN A L
DE
GRANVELLE.
( lîibliolhèque île Besançon. — Lettres i!e d iv e r s, I. III, fol. 47 à 50.)
B r u x e lle s , le 21 d é c e m b r e 1574.
Monseigneur. J e tiens q u e serez adverti du lin ta m a re advenu à Anvers
hier hu ict jo u rs, duquel le b ru ic t at esté plus g rand qu e le faict, d o n n a n t
ad ce occasion la venue de x l o u x l v batteaux qu e se sont présenté le jo u r
s u s d it devant ladite ville, at tenu close ju sq u e s à présent, sans lesser e ntrer
ou sortir aultres q u e gens de cognoissance. Et at heu Monsr de C h am paigney g rand traveil, a iant jo u r et nu ict esté p a r les rues et visité m aisons,
adsislé du capitaine J u lia n q u ’il at p o u r hoste, et qu e polrat d o n n e r tesm oingnaige de ses debvoirs, si l’on les veuille p re n d re p o u r bons '. Hz
sont esté p rin s plus de 2 0 0 personnes, q u e l’on a relaxé j u s q u e s à xvn. saulf
a u lc u n s vagabundes, enffantz de la ville, q u e ne font aultres qu e d’acte n d re l’occasion du pillaige. L’on d o ib t faire exécution d'aulcuns ce jo u r
d ’h u y *. Lesdits x v i i prisonniers sont venuz, ad ce q u e j ’enlendz, à trois, qu e
l’on veult d ire estre gaigez d u P rin c e d ’Orenge, ainsi q u ’il en at beaulcop
p a rto u t. L ’on avoit p rin s en tre les susdits u n g qui se su rn o m m o it yicon te,
natif de Paris. Cela donna occasion q u e l’on dit q u e ung viconte de Paris
avoit c onduict la tra h iso n ; il est relaxé, et en ceste ville. Le G o u v e rn e u r de
Guise avoit d o n n é advertissem ent au chastellain de Cam bresiz, et luy à
1 Le co m plot au suje t de la p r i s e d ’An vers es t r e l a t é d a n s
m e n t d a n s les le t t re s p u b l i é e s p a r
Mr G
a c h a iio
.
M
endoça
,
t. Il, pp. 2 9 5 et su iv ., et sp éciale­
V o ir la Correspondance de Philippe 1 /, t. I I I , pp. 2 1 7
e t suiv an te s. La m ise à ex écu tio n de la c o n s p i ra t i o n d e v a i t a v o i r lieu d u 1 1 a u 1 5 d é c e m b r e . .Mais p e n ­
d a n t la n u i t d u 15 a u 1 4 on d é c o u v r i t e n différen tes m aison s des s o ld a ts é t r a n g e r s . Ils y ét a i e n t e n tr é s
a u n o m b r e ’d e 4 , 0 0 0 , q u i d e v a ie n t ê t r e s o u t e n u s p a r e n v i r o n 1 0 , 0 0 0 à 1 2 , 0 0 0 b ou rg eo is. La flotte des
in s u r g é s s 'av an ça v e r s la ville le 15 et la c a n o n n a p e n d a n t q u e l q u e s h e u r e s . V o ir plus h a u t , p. 2 8 2 .
*
Le p r o c u r e u r Michel V an d e W iele e t Ma thieu, a n cien d o y e n des b o u c h e r s , f u r e n t exécutés. B o r ,
liv. VII, fol. 8 2 e t 8 2 v°, d o n n e des r e n s e i g n e m e n t s s u r l 'i n s tr u c tio n de c e tte p r o c é d u r e cr i m in e ll e et
s u r lcs t o r tu r c s infligées a u x accusés.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
28S
son m aislre, Mons 1 de Cam bray, et luy en cesle Court, q u ’il y avoit emp rin se du P rince d ’O rengc s u r q u e lq u e ville, m esm es s u r Anvers. Aussi en
avoit adverti Monsr de Largilla qui al eslé icy faire q u e lq u e advertence à
Son E x ce, et est reto u rn é se p o rta n t aussi bien q u ’il feict oncques, et m ’at
p rié de présenter ses très h u m b le s rec o m m a n d a tio n s à vostre b o n n e grâce.
Et com m e il y at heu q u e lq u e b ru ic t q u e 2,000 reylers d ebvoient icy venir
de la Picardie, en tre les jo u rs de Sainct Nicaise et Saincte Lucie ’, p o u r
fabvoriser l’em p rin se d ’Anvers, il m at dict q u ’il n’y avoit rien, et q u ’ilz
n’ont poincl u n g piedton. Aussi ce n’est pas tem ps et chem in p o u r venir
de si loing lant de chevaulx q u e s e ra ie n t mal furnis de vivres, el trouve­
raie n t beaucop d’em pescheinent. L’on tient p o u r certain qu e lesdits batteaux du P rince sont estez apprestez p o u r s u rp r e n d re les Espaignolz q u e
debvoient aller à la Goes, qu e sont reto u rn ez avec les A llem a n d / a u d it
Anvers, et q u e n ’ayantz trouvé lesdits ba tte au x ce q u ’ilz c h e rc h o ie n t, ilz
sont venu plus avant p o u r veoir quelle corre sp o n d an c e ilz trouveraient,
pu isque les soldatz Espaignolz a voienl crié une nuict : Orange, Oranqe,
p o u r veoir, com m e ilz d ient, com m e ceulx de la ville se c o n d u ira ie n t à ung
tel criz s’il estoit de vray. disantz ceulx de la ville trayttres, p o u r ce q u ’ilz
ne s o rtire n t de leurs m aisons; et s’ilz fussent sorti, l’on leur he u t m ériloirem ent peult im p u te r q u ’ilz venoient au secours des O rangistes; et les
bourgeois n’avoient qu e faire à e m p re n d re les arm es, p u is q u ’il y avoit p o u r
lors si bonne garnison d ’Espaignolz et Allem ands en la ville, lesquelz ont
faict, et signainm ent les Allemands, ce g ra n d b r u ic t de traïson p o u r venir
au pillaige, aiantz lesdits Alleinandz pillé trois maisons : les deux de su c criers, p o u r ce q u e les véant le seoir tard, depuis la r u e p a r les fenestres
de la cave, besoingnantz, ilz d ire n t qu e c’estoient tra yttres là cachés; et
s u r cesle buffe, ont-ilz saccaigé ces d e u x maisons ! ; s u r ce q u e n ’est ensuivi
a u ltre correction, sinon q u e l’on at publié q u e ceulx q u e o n t acheté q u e l­
qu e chose d u d it pillaige, aient de le rendre ausdits succriers, et q u e l’on
1 C h a rles d e L argilla, g o u v e r n e u r de L andre cic s. V o ir sa no tice, t. I, p. 4 9 .
* La fête de St. Nicaise t o m b e le 14 d é c e m b r e e t celle de Ste L ucie le 13 d u m ê m e mois.
5 Selon u n e le t t r e de C h a rle s de L argilla, p u b lié e d a n s la Correspondance de Philippe I I , t. III, p . 2 1 8 ,
l ’un des fabrica n ts de s u c r e m e n t i o n n é s p a r Morillon a u r a i t été d é p o s i ta ir e d ’u n e q u a n t i t é c o n s i d é ra b l e
d ’a r m e s ; m ais il p a r a i t q u e to us ces faits son t exagérés.
286
CORRESPONDANCE
leur restituera ce qu'il« en o n t paie. L’on al «lit qu e I 011 avoil trouvé b e a u ­
cop d ’arm ures,c o rp ce lez , rondelles, harc q u e b u se s et aultres arm es cachez
en ces maisons, d o n t il n’y at rie n ; car ilz se sont treuvé ès maisons de
ceulx qui font mestier et profession de les vendre p u b l i q u e m e n t . T a n t y
at qu e ce b r u i c t d e la trahison at esté plus g ra n d q u ’il ne m érite
Et est
venu le gardien des Cordeliers et le bourgm estre d’A m sterdam sem er en
ceste ville que, si le concept des traictés h e u t heu succès, qu e la dé lib é ra ­
tion esloit de co p p er les gorges de tous les prebstres, religieux et c a th o ­
liques, des Espaignolz, soldatz et m arc h an lz , ensem ble de tous gens de
bien eslrangiers. L’indiscrétion de lelles gens à sem er telz bruiclz faict
g ran d mal, ca r lelles choses s’escripvent in co n tin e n t en Espaigne, et y
sont receu com m e véritables.; de sorte q u e je ne m ’esbahiz si Sa iVlajle est
fort indignée contre ces pays, et plus, ad ce que d o ib t avoir dit Monsr
d ’Assonleville hors de la bo u c h e de Son Exce, q u ’elle n’ai esté ju sq u e s à
présent. Ce b r u i c t a l servi au chaslelain d ’Anvers, qui at dit qu e sans cette
trahison, il venoit rem ectre icy en tre les m ains des Eslatz de B ra b a n t son
chasteau d ’Anvers; ce q u ’il pe u lt d ire et q u e je ne croy, s’il est vray qu e
Son Exce s’est accom m odée avec lesdits Estatz, saulf que la citadelle d ’A n­
vers de m e u rera s u r pied, e stant au su rp lu s co n te n t leur g a rd e r leuis p ri­
vilèges et la Joieuse Entrée. J e ne sçay si l’on e ntend p a r là leur a ccorder
leur requeste de d é s u n ir les abbayes incorporées au x éveschez, p o u r ce
qu e p a r ladite Joieuse E n tré e il est dit q u e nulle a b b a y e de B ra b a n t ne se
d o n nera en conim iende *. J ’ay d e m a n d é au P ré sid e n t Viglius, s’il n’en avoit
rien e n te n d u ; il dit q u e non et me dem a n d a si c’estoient les abbez seulz
ou tous les Estatz ensam ble q u ’avoient présenté la requeste, qu e je tiens
se u le m e n t q u o y q u il dissim ule, il at veu, et m ’est la chose suspecte q u ’il
la veult ignorer. Assonleville m ’at parlé plus elèrem ent, d isa n t qu e si
l’union n'esloit faite, elle ne se feroit; et q u e cela p o u rro it d u r e r le temps
de Vostre lll,ne Sgrie. Les aultres païs com m e F landres, Artois et N a m u r ne
réclam ent contre les nouvelles éveschés; aussi ne font les Frisons, ceulx
d Overyssel ny Geldres. Lesdits Estatz de B rabant sont licentiez et se doib-
1 11 se m ble, m ê m e en p r ésen c e (le la l e t t r e d u G r a n d C o m m a n d e u r au Roi. q u e la c o n s p ira tio n d ’A n ­
vers n 'a v a it pas u n e b ien g r a n d e im p o r t a n c e . La p l u p a r t des i n d i v id u s a r r ê t é s f u r e n t m is en liberté .
* Commicndc, d e l'espagnol eom itnda, r e v e n u .
DU CARDINAL DE GR ANVELLE
287
vent icv re tro u v e r dedans xv jours. C ependant la ville d’Anvers se p e rd ;
c a r tous ceulx qui ont à p erdre se retirent ailleurs, et se rencliirissent les
m aisons d e Matines et Lire, seinblablem ent en ceste ville. Si les gens de
bien se retirent, les manant/, s e ro n t bienlosl m aistres, et la povre ville est
a p p a re n te d e m o re r chargée to u t cest hy v e r de g ran d e ge n d a rm erie à
pied et à cheval. J ’entendz q u e Son Exce a y a n t tousiours m aintenu q u ’elle
n en te n d o it de c h a rg e r la ville de garnison espaignolle, elle a dit, depuis ce
b ru ic t, q u ’elle ne pouvoit m oings faire p o u r conserver la ville que d ’y
niectre b o n n e garnison, d o n t elle-m esm e, p a r une si g ra n d e conspiration,
at d o n n é si g ra n d e occasion. J ’atlcndz bien q u e le mesm e se ferat icy; car
Son Exce at déclairé, p a r de u x fois, au m agistrat q u ’elle ne se contentoit
du guect q u e les bourgeois tenoient. qui avoient lessé e n tre r deu x Espaignolz de p u is la p orte serrée. Ce qu e l’on avait faict p a r courtoisie, aflin
q u ’ilz n ’heussent occasion de d ire q u e l ’on serroil les serviteurs de Sa
Majlé dehors. L’on tin t icy le xv du présent les portes serréez p o u r c h e r ­
c h e r p a r touttes les hostelleries aulcuns traictres réfugiez d’Anvers. L’on
ne trouva p o in ct u n g h o m m e ; ce q u e at faict p e n s e r a a ulcuns qu e ce
soient esté choses faictes à poste.
Son E xc®sortit d ’icy vendredi m atin, disna à iMalines, et coucha à Lire,
luy ay a n t escript Mon s1' de C ham p a ig n e y de s’y d é te n ir q u e lq u e tem ps,
ju s q u e s il aviroit achevé ses inform ations, qu e je tiens il vouldra faire fort
accompliez p u is q u ’il luy em p o rte tant. Dieu d o in t q u e to u t soit p rin s de
b o n n e p art. L’on at semé p a r icy q u ’u n g sien picq u e u r, B ourguignon, a u ltres d ien t Napolitain, seroit esté du c o m p lo t: mais cela ne continue, et
certes il seroit difficile de p re n d re un e telle ville où tan t de gens ont à
p e rd re , et qu e le P rince d ’O renge, y estant chief en personne, fort accom p aigné de gens de sa sorte, n e s c e u t to u rn e r à sa dévotion l’an (56, estant
en d a n g ie r d ’y lesser la vie. L'on pe u t d ire q u e les cueurs se sont altérez
d e p u is ; m ais ceux qui o n t du bien ne le veuillent p e rd r e ; et il y at u n g
chasteau auquel l’on at faict encores depuis naguères beaucop de m a is o n ­
nettes de bois p o u r y logier tant plus d ’Espaignolz. Bien est v ra y qu e au
d ire de tous gens de g u erre, si la ville se perdit, il ne polroit lon g u em e n t
te n ir, p o u r ce q u e l’on poroit tra n c h e r contre, et eslever des rem p a rtz et
chevalliers p o u r chasser ce q u e y seroit à force de c a n o n s; et cela ont dit
aulcuns anciens capitaines à Son E x ce. Monsr de B e rla y m o n t et les finances
288
CORRESPONDANCE
sont icy d e m o ré ; mais sa personne doibt los' suyvre. Aussi esl icy dem oré
le Conseil privé et la chappelle; car l’on d i c t q u e Son Excellence retourne
dans xi ou xii jours. P e u lt estre qu e ce ne sera si tost.
L’on dit qu e le P rin c e d ’O renge est à Bommele, et le D octeur E lbertus
avec luy p o u r négotier '. Dieu d o in t q u e lq u e bon succès, et qu e cy après
le povre D o c te u r ne se treuve en peine; car plusieurs estim ent qu e ceste
dé m o n stra tio n se faict plustost p o u r d o n n e r contentem ent aux Eslalz que
d e m a n d e n t paix, q u e p o u r envie qu e l’on a y t de traicter. Ceulx de B ra b a n t
do ib v en t p ré s e n te r requeste affin qu e l’on p ro cu re la paix, sans to u ch e r en
façon que ce soit à la Religion et à l’auctorité de Sa Majesté, et qu e plustost
q u e l’on y feit d im in u tio n d ’u n g poil, q u ’ilz sont délibérez d ’y em ploier
corps et biens, q u ’est u n g poinct que j ’ay tousjours d it l’on debvoit déclai­
re r, et le m esm e at tousjours dit l’advocat fiscal de B ra b a n t ’, qui at o pinion
q u e si l’on sçavoit traicter politiquem ent avec la R oyne d ’Angleterre, q u ’il
seroit facile la ré d u ire à nostre ancienne et catholicque Religion. Aussi
dit-il que si q u e lc ’un soit vacillant en icelle, que p o u r le rem eclre s u r le bon
boult, il fault Fenvoier en Angleterre, adin q u ’il veoie com m e l’on y vit, et
q u e c’est p o u r réd u ire ceulx qui font profession des sectes, et q u ’il y en at
ve u beaucop de ce pays qui sont bien soucq d’y estre et qu e vouldroient
r e t o u r n e r icy p o u r vivre c a tholicquem ent. El certes, j ’ay opinion q u e si
avions paix, il seroit facile de réd u ire beaucop de désvoyez, et b a n n ir les
sectes.
L’agent ou A m bassadeur d ’A ngleterre 3 s’en vad fort c ontent et festoié
de Son Exce, nous seigneurs, Mr de S*-Bavon et a u ltres; sam ble estre satisfaict de son despesche, et pro m e c t de faire merveilles à son re to u r p a r delà.
1 K lbertus L e u n in u s n ’e u t a u c u n e n t r e t i e n avec le P r i n c e d ’O r a n g e à B om m el. Il l’a t t e n d i t à D élit.
Voir Com spondance du Taciturne, t. III, p. 4 2 1 .
* J e a n d e Roiselmt. Voir p l u s h a u t , p. 3 5 .
5 I.c d o c t e u r T h o m a s W i l s o n , m e m b r e d u Conseil d e la r e i n e d ’A n g le te r re , a r r i v a à B rux elles v ers
la fin d u mois de n o v e m b r e 1 5 7 4 . Sa miss ion c o n s i s t a i t en tr o is p o ints p r i n c i p a u x : 1° en ce q u e les
n a v i r e s a n g l a i s , charges de m a r c h a n d i s e s , p u s s e n t v e n i r à A n v e r s , m a lg r é la défen se faite p a r le
gouvernem ent des
P a y s - B a s ; 2° l’e x p u ls io n des r eb elles A n g l a i s , réfu giés d a n s nos p ro v in ces et
d o n t il d o n n e la l i s t e ; 5« la r e c o n n a i s s a n c e p a r les p e r s o n n e s réfu giées ici p o u r ca u s e de religio n des
d r o i ts de la r e i n e E li s a b e t h , ou l e u r r env o i. Le p r e m i e r p o i n t fu t a c c o r d é ; les d e u x a u t r e s o n t été
re fu s é s . V o i r la Correspondance de P hilippe I I , t. III, pp. 2 0 0 , 2 0 4 , 2 1 4 . W i lso n fut b ien accueilli p a r
R e qu escn s.
DU CARDINAL DE GR A N V E L L E
Je c raindz q u i l nous tro m p e ra : car c’est eu n g n e fine pièce et cré a tu re de
Sicel q u i est Conte, et c o m m a n d e à la Royne. Il at allié sa fille avec u n g
principal D uc d ’A n g le te rre , a iant belle p a o u r de la p ro p h étie qu e le
m enasse d’estre q u e lq u e j o u r pendu.
L’on escript de Paris q u ’il n’y at aulc u n e app a re n c e d ’ap p o in c tem e n t
avec les H ugonautz, et q u e les 2000 reyters, qu e sont en la frontière de
Picardie, sont ceulx d u je u s n e Conte de Manssfeld \ p o u r e m p e sc h er l’entrée
à ceulx q u e le P rince de Condé poroit ra m e n e r d ’Allemaigne en faveur des
H ugonautz. L’on at dict q u e ledit P rince s’est tenu à Coloigne, et q u ’il n ’at
faict levée p a r faulle d ’a rg e n t 5, et qu e le Vidame de Chartres ‘ est avec le
P rin c e d ’Orenges.
Les Allem andz q u e sont en Anvers o n t a p p rin s a u x Espagnolz de m altraicter leurs hosles et se font habiller à leurs despendz, et d e m a n d e n t
argent p a r d e s s u s leur n o u r ritu r e . Hz objectent a u x Espaignolz leur infi­
délité, d ’estre cause qu e La Haye et l’H ollande sont esté h a b a n d o n n é p a r
eulx ensam ble. L’on ne les lesse encores e n tr e r à Utrecht. où le capitaine
du chasteau. q u ’est Espaignol, at faict s e rm e n t de non les lesser entrer. Je
ne sçay s’il le gardera.
Ad ce qu e je puis veoir de tous costetz, certes, je c raindz avant longtem ps
u n e révolte générale, et q u elle com m encera en Geldres, p o u r ce q u e les
députez, q u e fu re n t icy d e r n iè r e m e n t, d ire n t q u ’ilz estoient contenlz
n o u r r i r les soldatz, po u rv eu q u i l z se contentassent de ra iso n ; ce q u ’ilz ne
feront jam ais, estantz par trop despravez, et a d joustoient qu e si Son Exce
n’y p ourveoit dedens de u x mois, q u ’ilz y pou rv eo iro ie n t eulx-m esm es.
Ceulx de F la n d re s sont très mal c o n te n tz; aussi sont ceulx de B rabant.
E t q u a n t ores tout seroit accordé ce qu e Son Exce d e m ande, je ne veoidz
q u e cela soufiit p o u r paier le passé et p o u rveoir à l’advenir. M onsieur de
Billy at beaucop de contredict s u r les im postz q u ’il at m iz sus p o u r p a ie r
1 G u i l l a u m e Cccil, b a r o n d e B u r l e i g h , se c ré ta ir e d ’E la t e t g r a n d t r é s o r i e r d 'A n g l e t e r r e .
’ C h a r l e s , c o m te d e Mansfcld, fils illég itim e d u com te P i e r r e - E r n e s t et d ’A n n e B o u z e n r a d t , e n s u i te
légitim é. Il m o u r u t
*
à
C o m m a r c le 12 a o û t 1 5 0 4 .
(N
e v e n
,
Biographie luxcmbourt/coise,
1 . 1,
Ces e m b a r r a s p é c u n i a i r e s so n t co n s tatés p a r le P r i n c e d ’O r a n g e l u i-m em e d a n s
é criv it, le
7
septem bre
1574, à
Je an, com te
de
N assau .
(G ro e n
van
P
r in st e r e r
4 Le V id a m e d e C h a r t r e s était p e n d a n t ce tte a n n é e J e a n de la F c r r i c r e .
(D
,
t. V, p.
o y en
,
p. 402.)
une
Histoire de Chartres,
t. I, p. 4 5 0 .)
T
ome
V.
l e t t r e q u ’il
5 5 .)
37
290
CORRESPONDANCE
sa ge n d a rm erie avec laquelle il at conservé le pays au Roy, et d o n t il at le
c o n sentem ent d e là C ourt et d e là p lu s p a r td e ceux de Frise. Mais la m oindre
qui le contredit est si obstinée, q u e l’on en craind g ran d in co n v é n ien t; et
mesmes, il y at a ulcun du Conseil, q u e se dit pa re n t à Mr le Président,
q u ’est de la partie, et à fort résisté à ladicte levée, q u e lq u e nécessaire q u ’elle
soit: il n’y at pa rto u t faulte de m aulvais esprilz.
Mr de B e rla y m o n t m e sam ble avoir peu d’attente de I evesché de T o u rn a y ,
encoires q u e Son Excellence a y t escript p o u r luy, q u e sam ble depuis avoir
rec o m m a n d é l’abbé de Sainct Ghislain ', qui est personnaige sçavant et
de b o nne grâce; mais je n e s ç a y s’il serat à propoz p o u r si gran d e charge.
Ledit seigneur dict qu e Son Excellence s’est ressenlu contre luy de ce q u ’il
a uroil dict à quelc’ung, lorsqu’elle estoil encores en Anvers, q u e plusieurs
estoient esbahiz p o u r q u o y elle y d e m oroit t a n t , et q u ’elle seroit m ieulx
icy, mais q u ’il sam bloit qu e c’estoit p o u r se ten ir m ieulx assheurée au
m oien du chasteaul d ’Anvers, ne se confiant en aultre lieu, et qu e l’on
estoit esbahi q u e le S ieur Roda estrangier g ouvernoit to u t, q u e touttesfois
n ’est estra n g ie r, p u isq u ’il est vassal de Sa Majesté et n atif d'Espaigne.
Ce q u e Son Excellence et ledit S ieur o n t mal prins, et le luy ont re p ro ­
c h é , estantz icy de re to u r de rn iè re m en t. Ledit Sgr de B erlaym ont dict
n ’avoir tenu de telz propoz q u e à O lsignanus * ou à Antonio Del Rio ’,
ausquelz il sçait fort m aulvais gré de ce q u ’ilz en ont faict Padvertence.
P eult-estre q u e c’est p o u r cela q u e Son Excellence ne se logera p o u r ceste
fois à Saint-M ichel, mais s u r la Mere *, à la maison q u e soloit a p p a rte n ir
a u d it Del Rio.
Madame la Contesse, vostre s e u r “, est partie d ’Artois avec sa vasseile et
m illeurs m eubles, et at prins congié du lieutenant de S ainct-W ast, Le Vasseur “, selon q u e m ’at dict son filz le secrétaire, co m m e celle q u e ne pense
r e to u rn er. Il dict aussi q u ’il y at lettres de B ou rg o in g n e com m e le seigneur
Don F e rn a n d e se p orte bien, et q u ’il n ’ai envie de r e t o u r n e r icy. Le secré‘ M athie u Moulai t. V o ir p l u s h a u t , p. 22 4 .
* O lsig n a n u s o u Olsignano. V oir p lus h a u t , p. 2 8 0 .
• A n to in e Del Rio. V o ir p l u s h a u t , p. 40.
4 La p lace d e Meir, à A n vers.
* La fem me de D on F e r d i n a n d d e L n n n o y, com te d e La Roche.
• L e V asseur, lieu t e n a n t - b a i l li de S t-V aast.
Dll CA RDINAL DE GR AN VELLE.
2 1 )1
taire E stienne
qui vient de là, diet q u ’il deb v ro it aller q u e lq u e p a rt au x
bains en Suysse. L’on me dict q u e ladicte D am e at esté fort bien dressée
des assignations q u ’elle avoit p a r deçà; le s u rp lu s est s u r Bourgoingne.
Elle n’at m ené sa belle-fille avec elle, et ad ce q u e j ’ay pe u lt e n tendre, il y
at du m escontentem ent et paroles passé en tre elles et m adam e de Marie 2
q u e m at encoires escript avec sadile fille; mais je n’y ay faict a u lc u n e res­
ponse; car il n’y a u ro it fin avec elles.
Ledit Estienne m ’at confirm é ce que j ’avoie e n te n d u a u p a ra v a n t la g r a n ­
d e u r q u e lient le P r é s i d e n t 5, qu e n’est p o u r le m a in te n ir vers la noblesse,
q u e crie fort co n tre luy à raison des nouvelles o r d o n n a n c e s ; et la noblesse
y est g ra n d e et à sa m ode, et feit la p a rt au feu C ardinal et chancellier de
G attinara *, com bien qu e ce fut son a d v a n ce m en t p a r a u ltre endroicl.
Aussi dit-il q u e la P résidente tient pareillem ent son rang, préc é d a n t les
Dames d u pays et mes mes Madame de T horaise s, l’eaige seul de laquelle
m érite tout respect. L ’on ne trouvera à la fin bon com pte en ceste g randeur.
Le fondem ent de (’h u m ilité esl plus s e u r p o u r y faire u n g b astim en l d u ra b le
dessus. Ladite P ré sid e n te est fort pom peuse en habitz, et porte u n g c h a p peau qu e luy at d o n n é u n g Marini, estimé vailloir 1200 escuz. L ’on dit q u e
ce sont le trésorier B o n n e t 6 et A illepierre [q u e at esté chassé h o n teu se m en t
hors des Estalz], q u e ont mis en leste ceste h a u lte u r à ces deu x gens, d o n t
il me désplaict, car ledit P ré sid e n t est ho m m e d ’e sp rit et de service; mais
Porgeuil désplaict à Dieu el aux hom m es. Ses confrères se p lain g n e n t fort
1 K tie n u c , se c ré ta ir e d e Morillon.
* M ad am e d e M aries, f em m e d ’A d r i e n , S r de Maries. V oir t. IV, p. 4 9 8 .
1 P i e r r e F r u i s s a r d de B r o iss ia , p r é s i d e n t d u P a r l e m e n t de Dole, m o r t le 2 9 j a n v i e r 157b.
‘ M e re u r c de G a l l i n a r a , j u r i s c o n s u l t e i t a l i e n , a u t e u r d u Sacco d i lio m a , né en 1 4 6 5 au cliâteau
d ’A r b o r i o , p r è s d e V c r c e il, m o r t à I n s p r u c k , le 5 ju i n 1550, d e v i n t p r o fe s s e u r à Dole, p u i s co n s eille r
d u d u c de Savoie, e n s u i te p r é s i d e n t d u P a r l e m e n t d e D o l e , en v e r t u d e l ettre s p a te n te s d u H f é v ri e r
1 5 0 8 , d o n n é e s p a r l’e m p e r e u r M ax im ilicn qu i le n o m m a p r e m i e r p r é s i d e n t d u d i t P a r l e m e n t . Au
m o m e n t d e la m o r t d e J e a n le S au vage, il fu t n o m m é ( 1 5 1 9 ) p r é s i d e n t d u Co nseil p r i v é , pu is c h a n ­
celier d e (’E m p e r e u r e t p r i t p a r t à u n g r a n d n o m b r e d e négo ciatio ns d ip lo m a tiq u e s . D e v e n u v e u f , de
G a t t i n a r a e m b r a s s a l ’é t a t ec c l é s i a s t i q u e e t r e ç u t le c h a p e a u d e C a rd i n a l en 1 5 2 9 . V o ir liulletin de la
Commission d ’histoire, 4 ' sé rie, t. VII, p. 15.
s M a rg u e r ite P e r r c n o t , s œ u r alliée d u C a rd i n a l .
‘ B o n n e t- J a c q u e m e t, S r de N an cro y , a n cien se c ré ta ir e d u c h a n c e li e r d e G r a n v e l l e , t r é s o r i e r des
salines de Salins, m o r t en 1 5 8 0 . V o ir t. III, p. 2 1 1 .
292
CO RR ESPONDANCE
île luy, du peu de cas q u ’il tient d ’eulx, et q u ’il at e m p rin s de passer oultre
les nouvelles ord o n n an c e s sans leur en d e m a n d e r ad v is; et ad ce qu e je
puis veoir, il en adv ie n d ra là com m e icy du x°, p a rta n tz p o u r Espaigne
!\Ionr de Besançon 1 avec le b a ro n de C h e v r e a u l x 1 et le conseillier du
C ham ps s qui ne gouste lesdites ordo n n an c e s, com m e ne faict ladite noblesse
ny reste du pays *. Il ne vad poinct bien qu e ledit S ie u r de Besançon
s’esloingne tan t de sa cité, s u r laquelle les b anniz o n t tousiours qu e lq u e s
em prinses, et j ’entendz que d e rn iè re m e n t s’en est descouvert q u e lc ’une que
se debvoit faire s u r une poterne. L’on dit qu e le G rand Doien 5 est fort p r u ­
d e n t et honorable seigneur, et q u e les Estatz sont estez tenus avec g ran d e
s p le n d e u r et magnificence, et tant plus doibt sentir ledit Aillepierre l’affronte
q u e luy at esté faicte. L’on m e dit q u e ledit P ré sid e n t se fait vailloir de la
correspondence q u ’il tient avec Vostre IIIme Seigneurie, m on stran t telle fois
les lettres q u ’il al d ’elle, et qu e cela irrite plusieurs de la noblesse. Aussi
d it-o n que ledit P résident al ung sien frère 6 que faict fort son proflict par
advancher la vuidange des procès, d o n t il p re n d g ran d z présentz en drapz
de soie et chainnes d ’or. T ro p bien adjouste l’on q u e ledit P ré sid e n t n’en
p re n d aulcuns, mais ce q u e faict son frère luy p o u rro it eslre im puté, puis­
q u ’il est si peu a ym é et de ses confrères propres. Je sçay bien qu'il ne
fault croire tout ce qu e l’on dit des gens. Touttefois il rn’at sam blé devoir
d o n n e r p ari de tout cecy à Vostre Illme Sgrie, qu en sç au ra t bien user selon
sa p ru d en c e a c co u stu m é ; et seroie m arri q u e ledit sieur P ré sid e n t se
ineist en d a n g ie r de se p e rdre, com m e il ferai sans do u b le, s il se m ect su r
le h a u lt; et Vostre lllmc Sglie q u ’at prins de la peine p o u r l’a dvancher. le
p o lra ta d m o n e s te r a m ia b lc m c n ts a n s m ’alléguer. Il e s p a rg n e trop son bonnet
ad ce qu e l’on dit, et ceulx de là en sont c o m m u n é m e n t libéraulx, disantz
1 C laud e de la B a u m e , a r c h e v ê q u e de Besa nçon d e 1541 à 1584.
* H e n r i de V ien n e, b a r o n d e C h e v r e a u . V oir t. IV, p. 6 9 9 .
* Nicolas D u c h a m p . V o ir t. IV, p. 2 4 6 .
4 Voir plus h au t, p. 2 2 5 , ce q u e n o u s a v o n s dit d e ces o r d o n n a n c e s e t a u x app en dices.
* F ra n ço is d i t d e G r a n m i o n t d e Vezet, m o r t en 1 5 9 5. ( Gullia christiana, t. X V , fol. 129.) L’on q u a ­
lifiait de G r a n d s Doyens, les d o y e n s de c h a p i t r e s , p a r o pp ositio n a ux d o y e n s de e h r étien n eté.
* P i e r r e F r o i s s a r t a v a i t trois frè res. S im o n e t Hem y, qu i é t a i e n t p r ê t re s , e t J e a n , ch ev alier, Sr de
Broiss ia, M o n ta g n at, F r o n t e n a y , etc., q u i d e v i n t p r e m i e r p r é s i d e n t d u P a r l e m e n t de Dole e t co nseille r
d ’E t a t , m o r t le 5 d é c e m b r e 1 5 9 5 . ( D e
i. a
Ciien ay e-D es bois , Dictionnaire de la noblesse, t. V I I I ,
fol. 6 7 0 .) Il fit a u s s i p a r t i e d u Conseil p r i v é à p a r t i r d u 17 a o û t 1 58 2 .
DU CARDINAL D E GR AN VELLE.
295
ceulx q u e v icngncnl q u e MMrs de Vergi el Ray avec les p iin c ip a u lx d u pays
en sont plus prodigues en u n g j o u r q u e ledit P ré sid e n t en un e sepm aine.
L edit E stienne se louhe fort d u bon receuil q u ’il at receu d u d it Seigneur
de Vergi p o u r vostre respect, et dict q u e M onsieur de Besançon luy at dicl
q u ’il avoit receu beaulcop de plaisirs et de faveurs de Vostre IIIme Sgrie.
Mr de Sainct G laude 1 se mectoit en chem in avec q u e lq u e au tre p o u r venir
p a r deçà faire aussi rem o n stra n ce contre lesdictes o rd o n n an c e s nouvelles.
Mr Blasere esfoit arrivé, mais je n’ay encoires receu lettres de luy.
Ce seoir sont venues lettres d ’Utrecht *, q u e les Espaignolz q u e sont là à
l’e n lo u r ont eschellé la ville, estim antz la s u r p r e n d r e ; q u e les bourgeois se
sont miz en delTense et les o n t repoulssé; q u e le capitaine espaignol 3, q u ’est
1 Marc de l i y e , a b b é d e S l - C l a u d e , en B o u rg o g n e, d e IS til à 1577. ( Gallia elirisliunti, t. IV,
fol. 2 5 5 . )
* E x tr a i t d 'u n e le t t r e de B e rty à Viglius.
A n v e r s , le 2 0 d é c e m b r e 1571.
« Au d e m e u r a n t MM. les E sp ag n o ls m u t i n e z en H o llan d e o n t as sailli la ville d ’U t r e c h t , niais av ec
l e u r p e r t e d e p lu s d e c e n t h o m m e s , sans les b les sez. E t sa n s la p r é se n c e d e M. de Hicrges et le b on
d e b v o i r d u c h a s te a u , ilz y f u r e n t e n t r e z e t a v o i e n t bien d é l i b é r é s d ’y faire b elle b o u c h e r i e e t s a c c a g e r
le to ut. » (Collection des documents in é d its, t. X I II , fol. 5 4 v°.)
8 Ce ca p ita in e se n o m m a i t F ra n ç o i s H c r n a n d e z D a v i l a , qu i o c c u p a it le c h â t e a u a v e c 100 sold ats .
T o u s ces faits s o n t r elatés p a r
M
eivdoça,
t. Il, p. 2 9 1 , e t d ’u n e m a n i è r e p l u s détaillée en c o r e p a r Bon,
liv. v u , loi. 7 0 e t suiv.
A ces in d i c a t i o n s n ou s a j o u to n s la le ttre de Gilles de B e rl a y m o n t ad ress ée à B e q u e se n s le 17 d é c e m b r e
4 57 4 , s u r le m ê m e é v é n e m e n t :
« A v a n t h i e r s o i r (1 5 déc.) j ’a r r i v a y en ceste ville d ’U trech t, où j ’avois faict v e n i r tr o is enseignes
d e g e n s d e p i e d B a s- A lle m a n s q u e W a l l o n s p o u r e m p c s c h e r l’e n t r é e des E sp aig n o lz e n ceste ville, et
les avois faict log er e n u n g d e s la u l x b o u r g z f erm é de m u r a i ll e s e t d ’eau e, o ù d e u x j o u r s a u p a r a v a n t
( 1 5 déc.) les E sp a ig n o lz a l t é r e z e s t o ie n t v e n u s p a r l e r à eu lx et l e u r d i r e q u e s’ilz les v o u lo ie n t la iss e r
e n t r e r a u d i t f a u l x b o u r g av ecq e u l x , q u e j a m a i s n e s'a c c o r d e r a i e n t q u e lesd its B as-A llem an s ne fusent
a s s y d u t o u t p ay ez. A q u o y les d its Ba s-A llem an s firent r e sp o n s e q u ’ilz r e g a r d is s e n t de se r e t i r e r , q u ’ilz
n e v o u l o i e n t a u l c u u e m e n t les laisser e n t r e r là ded en s , e t q u ’i lz d e m a n d o i e n t p o u r le p r é s e n t p o in t de
p a y e m e n t , lequel S. M. l e u r p o u r r o i t faire q u a n d elle en a u r o i t le m o icn e t c o m m o d ité . Ce q u e v o y a n t
les E s p a in g n o lz , v o u l u r e n t m e c t r e le feu à la p o r t e d u fa u lx b o u rg , le v e u i l l e n t a u s s y a s s a i l l i r ; l e q u e l
f u t t e l l e m e n t d é f e n d u p a r les Bas-A llem ans, q u ’ilz f u r e n t c o n s t r a i n c t s se r e t i r e r . E t e n d e m o u r a m o r t
s u r la p l a c e h u i c t ou d i x , sa n s les b lessez. J e le u r fis r e s p o n c e s u r les p oin cts q u e m ’e s to ie n t ven uz
r e m o n s t r e r J e h a n Osorio, e t le c a p i t a i n e A ld a n a , a s s a v o i r q u a n d à la ville f e rm ée q u 'i l z d e m a n d o i e n t
q u e j e n 'a v ois a u l c u n m o ic n d e la l e u r a c c o r d e r , a c t c n d u q u e en to u t t e s les villes de m o n g o u v e r n e ­
m e n t il y a v o i t g e n s d e g u e r r e , lesqu els j e n e liavois a u l c u n m o ien d e les f a ire serv ice, q u e p o u r v u e
q u 'i lz se v o u lu ss e n t r e t i r e r e t loger à d e u x o u tr o is villages q u e j e l e u r n o m r a c ro i e , j e so llicitroi v e r s
294
CORRESPONDANCE
au chasteaul, at leuu bon avec la ville ; qu e beaulcop de gens sonL demorez
d ’u n g costel et d ’a u lt r e ; q u e les Espaignolz se sont retiré d ’eune lieue en
arrière. Ad ce com pte at la ville à se deffendre co n tre les am ys et ennem ys,
et si l’on n’y peult en tre r, il faict â c ra in d re q u e les villes voisines, qu e ne
sont po u r se deffendre com m e ceulx d ’Utrechl. en souffreronl. Geldres ne
se lessera fouller, et il faict à c ra in d re que cestuy effort a lté re rai touttes les
villes et pays. Certes, nous sûm es mal, el il y a u ra i bien à faire d ’h oster
V. E. q u 'i l z p u i ss e n t e s t r e b i e n t o s t p a y é de to u t ce q u e l e u r es t d e u s , co m m e a u s sy q u e j e feroie mon
m icu lx q ue dès as llic u r e le u r s gaiges c o u r r e r o i e n l , p o u r v u q u ’ilz lie lissent a u lc u n d é s o rd r e , e t que,
a t t e n d a n t resp o n ec d e V’. E., j e l e u r ferois d o n n e r v i v r e s ou a r g e n t co m m e ilz aim e r o i e n t niieulx,
c o m m e en effect j e fis à la m es m e h e u r e , le u r a m m e n a n t v i v r e s e t d e u x et trois cens cscus en a r g e n t
q u ’ilz d e m a n d a i e n t . Ilz ne v o u l u r e n t n y m ’o y r p a r l e r d e s m u railles , n y r e c e p v o i r m a r cspo n ce p a r
c.script, sy j e n e so rto is la ville p o u r m e m e e lr e e n t r e eu lx . Ce q u e j e refu s ay , c o m m e j e s u is cncores
d é l i b é r é d e faire p o u r l’a d v e n i r . Ce v oiant, fire nt en m a p r é se n c e fa ire le b a n d e p o u r p a r t i r le l e n d e ­
m a i n à m a l i n . D o n t j e m e d o u b l a y de m a u v a i s e m e s u re , e t le s o i r m esm e , qu 'e sto il h i e r x v i ' de ce m ois,
m e fut envoie u n g b illet d ’u n g p r i n c i p a l sold at e n t r e cu lx p a r le m o icn d u ca p i t a i n e A n d an a, q u i
l’a v o i t sollicité, p a r lequel me a d v c r lis s o il q u e les so lda tz a l t é r e z e s to ie n t d é l i b é r e z d ’as saillir le l e n ­
d e m a i n a u p o in c t d u j o u r la p o r t e d e S t '- C a t h c r i n e vers le chasteau, m esnie s q u ’ilz avo ien t in telligence
av ecq q u e lq u e s soldatz d u d i t cliastc au. Q u i m e caus a de p r i e r a u x Sr Don F e r n a n d o de T o lled o , m a i s t r e
d e c a m p , W a l d e z e t a u t r e s c a p i t a i n e s q u ’e s t o ie n t icy, d e s’a ller m c c U e avecq le u r s u y t e d e d a n s ledit
ch as teau , n ’e n fut fort satisfaicl, sy cs t-ce q u e j ’estim e q u e l e u r allée illccq ne fu t d e p e u d e fru ict. Le
m a l i n e n v i r o n u ne h e u r e d e v a n t le j o u r v i n d r e n t avecq cs chcllcs, h ach es et h o y a u lx à la su s d ictc
p o r t e de S ^ -C ath erin c, e t d é t e r m i n é m e n t c o m m e n ç a r e n l as saillir ces te ville n y p lu s, n y m o ing s q u e
s ’ilz e u s s e n t esté g en s d u p r i n c e d ’O r a n g e s ; d e so r t e q u e s e p t c l e n t r e a u l t r e s u n g des p r i n c i p a u l x ,
q u i estoit l e u r s e r g e n t m ajo r, e n t r a r e n t d e d a n s la ville e t y f u r e n t tuez. L es a u l t r e s f u r e n t r ep o u ss ez
p a r la diligence et b o n d c b v o i r d u chas tcllain e t ceulx d u d i t c h a s te a u , co m m e au ssy d e s bo urgeois, et
en d e m o u r a t a n t m o r ts q u e blessez, à ce q u ’ilz d i se n t culx m esm es, les a y a n t a u s s y cest ap rès d i s n e r
faict r e t i r e r d e s f a u lx b o u rg s p o u r a l l e r v ers S c h a lc k w y c k , o ù ilz o n t dict q u ’ils a t t e n d r o n t e t f e ro n t
to u t ce q u e j e l e u r c o m m a n d e r a y e t l e u r m e s tr e d e c a m p . Ce q u e n e fau lt a u l c u n e m e n t c r o i re q u ’ilz
f e r o n t , v eu q u e t a n t d e fois ilz m ’o n t faulsé la p a r o lle . S’ilz s ’e n c h e m i n e n t v e r s A r n h e m , j e suis
d é l i b é r é de m 'v m r c l r e d e d a n s , e t m o u r i r plu sto s t q u ’ilz y e n t r e n t ; co m m e j e fera y en to u tes a u l t r e s
villes de m on g o u v e r n e m e n t , a c l e n d u q u e V. E. m ’a t c o m m a n d é de les t r a i c t e r c o m m e enn em is , e t les
fa ire p asser au fil de l ’cspée, p l u s t o s t q u ’ilz n’e n t r e n t en villes et p as sen t en B r a b a n t . E t p u i s q u e j e me
vois delTendaiit c o n t r e eu lx , c o m m e j e s ç au ro is faire c o n t r e en n e m is , e t q u e j à d e tu ez q u e blessez il
en es t d e m o u r é b ien cen t e t c in q u a n t e , la raiso n ne v e u l t q u e j e c o m m a n d e n y m e fie a u l c u n e m e n t
d ’e u l x ...... Les b o u r g e o is d e ceste v ille à j a m a i s so nt obligez a u d i t ch astellain e t soldatz d u chasteau,
p u i s q u e sans eu lx es t à c r a i n d r e q u ’ilz fu ssent e n t r e z d e force d e d a n s la v i l l e ...... Les soldatz alté r e z
v ou loien t à to u tte force en c o ir e s d e m o u r e r h i e r a u x f a u l x b o u r g ; m ais le c o n t a d o r A lm e d a l e u r d ict
q u e m on in t e n t i o n estoit q u ’ilz p a r t i s s e n t in c o n t i n e n t , et t r aicta d e so r t e avecq e u l x q u ’ilz e s t o ie n t
c o n t e n t de p a r t i r ......» (A rchives de l’audience, liass e 14 4. )
DU CARDINAL D E GR AN VELLE.
295
l’opinion q u e les Eslalz p r e n d ro n t que l’on h a b a n d o n n e le pays au pillaige,
p u is q u e le soldat ose tout sans q u e a u lc u n e de sm o n stra tio n se face q u ’il
desplaît au maistre. J ’ayr ouy n o m m e r p a r nom et su rn o m dix capitaines
Espaignolz q u e l’on estime riches chascung de centz mil escuz. C ependant
le d u c d’Albe, qui at couvé les ceux, rira soubz son b o n n e t II entre en
go u v e rn e m en t, et il est force q u ’il y entre, p u isq u e l’on ne se peult passer
de luy. L’on d it q u e l’intention desdits Espaignolz esloit de piller la ville
et de c o pper la gorge a u x m anantz, où sont refugiez ceulx d u Conseil et
C h a m b re des c om ptes avec une partie de la noblesse et gens de bien d ’Hollande, qui o n t h a b a n d o n n e leurs dem eures et biens p o u r ten ir léaulté à Sa
Majesté. Le seigneur de Hierges se treuve bien e m p e s c h é ; le se ig n e u r Don
F e r n a n d e est h e u re u lx d’en estre dehors. Les Espaignolz b o u ta re n t de
rec h ief le feug au x portes de la ville, com m e ilz feirent du tem ps du Sgr Don
F e rn a n d e , ce q u e fut cause qu e les bourgeois en h a re q u e b o u s a re n t a ulcuns
qu e y sont dem orez. P o u r e m p êch er plus g ra n d inconvénient le Sgr de
llierges e n lre v in t et rap p a isa les bourgeois; mais lesdits Espaignolz sont
depuis venuz à la cachette, pensantz escheller la ville; mais il y avoit trop
bo n guect, et se sont retirez avec nouvelle perdte, q u e les ferat enraiger, et
se v e n geront s u r ceulx q u e n’o n t offensé. Le Sgr Don J o h a n sera p a rti,
com m e je tiens, avant q u e ceste a rrive II y at plus de xv j o u r s qu e Del
Gadillo est re to u rn é en Espaigne, d o n t vint h ier u n g courrier. Les lettres
sont alléez en Anvers. J ’ay veu p a r la copie ce q u e Voslre lllme Sgr!e at
escript au V ice-R oy de Secille. Il y at du mal p a rto u t. Dieu nous soit en
ayde, et vous doint, M onseigneur, etc
CORRESPONDANCE
LXXVI1I.
LE P R I N C E DE C L È V E S E T DE J U L I E R S 1 AU CA R D IN A L DE GRA N V EL LK .
(Bibliothèque loyale île linixelles. — Manuscrit 11 " 0 i 7 5 , fol. rüri.)
l’o m l i , le 2 0 j a n v i e r 1575.
Re et ll|e in Christo P ater ac P rinceps, D om ine amice charissim e. Pateriiitati Vestræ Rev* et 111* am icissim e signilicare volum us quod lieri felici
itineris nostri successu hue venerim us, u b iq u e liberaliler tractati honores
et olïicia nobis pergrata e x hibita su n t, u t o b id P t! Vestræ R* et 111“ gratias
hab e am u s plurim as. q u ib u s p o terim us o m n ib u s amicissim is studiis g ra titu d in is q u e ofïiciis pro m e ren d i parali sum us.
Et quia Alonzo de la Vega, qui ex P tis Vestræ Rev* et III” o rd inatione
nobis officiosissime in bac nostra profectione adfuit, nobis indicavit q u o d
qu id am suus consan g u in e u s patri suo Rodrigo de C hiroga locum servicii
q u e n d a m quern Piazza de c o n tin u o n om inavit ren u n c iare vellet, si R* Patis
Vestræ assensus accederet, p ro p te rea rogavit ut a p u d eandem pro eo intercedere vellomus : q u a re P em Vestram R am et IIIam etiam a tq u e etiam amice
rogam us. ut eadem illi Rodrigo de eo loco seu Piazza de c o n tinuo providere
su u m assensum d a re et q u a n tu m in se prom overe vellet, ut suo desiderio
et expectatione, nostra de causa eum c o n sequatur. In q u o P as Vestra R 4 et
III» rem nobis cf
gratissim am faciet.■ o m n ib u s studiis et amicissimis ofïiciis
p ro m e ren d i prom ptissim is. Superest ut Pem Vestram Rani et III*01 o ptim us
d iu incolum em conservet.
1
C l ia r le s- F r é d é ric , liN île (îii i l l a u m e , duc de Cléve s, ne le i i i a v r i l 1 5 5 5 , m o r t à Hom e le 9 fé­
v r i e r 1575.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
297
LXX1X.
L E COM TE DE B E R L A Y M O N T AU
CA R D IN A L D E Gfl VNVELLE.
(Itihliolhèrjue de Besançon. — Lettres de divers, i. I II , fol. 07-(>8.)
A n v e r s , le 2 6 f é v ri e r I S 7 5 .
M onseigneur. J ’ay receu vostre lettre du xxv® de jan v ie r, vous m erchiant
du bon espoir qu e me do n n e z q u e le Roy se so u viendra quelquefois de mes
services.Ce m ’est assez de penser que la récom pense tom bera à mes enffantz;
car suis trop viel p o u r cslre rep e u de tel espoir ny p o u r y riens p rétendre.
J e les ay, Dieu m erchi, treuvé voluntaires au service de Sa Majeste ju sq u e s
à présent, auquel espère ilz c o n tin u e ro n t après ma mort.
Les affaires de nostre c a lam iteux pays v o n t de m anière que ceulx qui les
e n te n d e n t e n tre n t en désespoir du rem ède. 11 n’est possible p e rsu a d e r à
ceulx qui ont la p rin c ip ale p a rt au g o u v e rn e m en t, de considérer ce q u ’il
im porteroit de re n d re les Estafz contentz. Pleust à D ieu q u e l’on volsut
peser ce qu e plus va au service d u Roy, de c o n n iv e r 1 avec ceulx de B r a b a n t
et aullres en ce q u ’ilz p ré te n d e n t au faict de la garde des chasteaux, d o n t
p rovient leur principalle difficulté, ou délaissant le tout en telle anxiété,
aliénant les voluntez de g r a n d n o m b re de ceux d u d it p a y s , d o n t l’on voit
e n suyvre m u rm u re , division de l’a n c h ie n n e obéyssance q u e se d o ib t à
Sa Majesté, voires de la Religion q u ’est tellem ent distraicte en Hollande et
Zeelande, q u ’il n’y al u n g s e u l ho m m e d ’Esglizc*.
Vous aurez e n te n d u l’espoir de la pacification q u e l’on conçoit en la
venue du conte de S w a r t s e m b o u r g 2, et com m e noz députez doit le xve de
1 Conniver, ê t r e d e co n n iv e n c e , s ’arra nge r.
2 O t t o n - N e n r i , co m te de S c h w a r t z e n b o u r g , au s e rv ice de l’e m p e r e u r Maximilien II, av ait été ch arg é
p a r son m a î t r e d e r é t a b l i r la p a i x a u x Pays-B as, e t d ’e n t r e r à c e t effet en négo ciation a v e c les in su r g é s .
D a n s ce b u t , il d e m a n d a cl o b t i n t en 1874- u n p a s s e - p o rt p o u r lui e t les p e r s o n n e s q u i d e v a i e n t r a c ­
c om pagn er. Ce S eign eu r e n v o y a , v e r s la fin de d é c e m b r e , à A n v e r s son se cré ta ire, p o r t e u r d ’u n e lettre
d an s laq u elle il p r o t e s t a i t de son d é v o u e m e n t a u Roi e t d e m a n d a i t d e n o u v e a u u n passe-p ort p o u r lui
T
ojif.
V.
ô8
CORRESPONDANCE
ce m ois sont partis p o u r Broda en espoir de résonldrc s u r la fourm e de la
com m unication. L’on leur a d o n n é p o u r s h e u rté en ostaige le sieur de
Maulci, frère de Monsr de Boussut, le sieur de V erdem bourg, fils du Sr de
Hneckelom , qui est de la maison d’A rkele, le filz du Sr de W atines, nepveur
de Mr de R assinghien, de la m aison de M ontm oranci o ultre lesquelz v e u il­
lent Monsr vostre frère *, Sancho Davila, g o u v e rn e u r de la citadelle d ’A n­
vers ou Ju lie n R om ero et nulz a u ltre s ; qu e nous faict c o n je c tu re r q u ’ilz ne
c erchenl q u e subterfuges p o u r d ila y e r et tro u v e r occasion de r o m p lu r e : de
tant qu e scèvent q u ’estant les susdits occuppez à leurs charges tant im p o r­
tantes, ne se pe u lv e n t e m peseher à aultre chose. El néanlm oings s’ilz
insistent avec voloir accepter aultre, leur sera offert ledit Ju lie n R om ero,
encore q u ’il y a y t petit espoir de bon succès. Hz insisteront, à ce q u e je puis
e n te n d re , en deu x pointz fort dillicilz : l’ung sera en la liberté de con­
science et exercice de leur R eligion, q u e p o u r chose q u e adviègne ne leur
p e u lt estre a c co rd é : l’a u ltre qu e les affaires du pays soient gouvernées p a r
n a turelz du pays, selon q u ’ilz estoient au tem ps de feu I’E m p e re u r Charles,
et que les estrangiers, q u ’ilz e n te n d e n t les E spaignolz, se r e tire n t, q u e ne
sera m oings difficil q u e le p re m ie r J ’estime q u ’il n ’y a u ra i aussi petitle
difliculté a d v e n a n t q u e les affaires to m b e n t en a pparence de concorde, su r
e t le com te W o lfg un g de I l o h c n l o h c , m a r i d e Madeleine d e N a s s a u , s œ u r du T a c i t u r n e . ( Correspon­
dance de Philippe I I , t. III, p p . 1 7 8 , 2 4 0 e t suiv ., 2 5 7 , 2 7 8 , 2 8 2 , 0 8 5 et suiv.) So us le g o u v e r n e m e n t
d e D o n J u a n et p l u s t a r d e n c o r e il fit, m ais in u t i l e m e n t , «les offres se m b la b le s. V oir
sterer
,
G roen
van
P rin «
t. VI, pp. 2 8 1 , 4 4 0 , 5 1 8 .
1 Selon les i n s t r u c t i o n s d o n n é e s a u x c o m m iss a ire s d u Itoi c h ar g és d e r e p r é s e n t e r ses i n t é r ê t s a u x
n ég ociation s de B rcda, les otages é t a i e n t : » le s i e u r d e I lau lssv , f rè r e d u c o n t e de Boussu, le s i e u r d e
W c r d c n b u r g e t L ouis de M o n tm o r e n c y , fils aisné d u Sr d e Bcrsées ou a u l t r e s ». ( In s t ru c t i o n s d u 14 fé­
v r i e r 1575, d a n s le t. III, p. 5 8 3 , d e la Correspondance de P hilippe I I .) Le s i e u r d e Ilau lss y était
J a c q u e s de H e n n in L i é t u r d , b a r o n d ’H a u s si o u A u x i , frè re de Maximilicn de H e n n i n - I .i é t a r d , com te
d e Iîoussu, a m i r a l a u s e rv ice esp agn o l. J a c q u e s ép o u s a Marie l l a n n a c r t , vico m tess e d e B ru x elles e t de
L o m b e k e, d a m e de L ic d e k e rk c , L c c u w , S o m b e k c , fille d e J e a n l l a n n a c r t , S r de] L ic d e k e rk c . Le s ie u r
d o W e r d e n b u r g ét a i t C h a rles d ’A rckel, S r d e W m l e n b o u r g , q u i ép o u s a A n n e l l a n n a c r t , a u t r e fille de
J e a n l l a n n a c r t , S r d e L ic d e k e rk c . L ou is d e M o n tm o r e n c y , S r de B e u v ry , n é v e r s 1 5 5 5 , était fils de J e a n
d e M o n tm o r e n c y , b a r o n d e W a s t i n e s , p r e m i e r é ch an s o n de P h i l i p p e , a r c h i d u c d ’A u tr ic h e , plu s tard
d e P h i l i p p e II, ro i d ' E s p a g n e , et d 'A n n e de T r é l o n . L ou is d e v i n t lieu ten an t-co lo n el d u r é g i m e n t de
so n p è r e cl fu t t u é le 3 0 m a r s 1595 d e v a n t O s tc n d e . Il a v a i t é p o u s é , en 1 5 7 7 , J e a n n e d e S t-O m e r,
d o n t il eut d e u x fils, F ra n ç o i s c l J e a n .
(D
e
V
e g ia n o
,
1.1, p. 13 90 .)
* Monsieur voslre frère, c’esl-à-dire F r é d é r i c P e r r c n o t , Sr de C h a m p a g n c y .
DU CARDINAL DE GR AN VE LL E
299
les seurtez tan t d’une p a ri q u e de l’aultre. La relaxation de M arnix 1 a m m è ­
nera plus de m al en ceste p a c ific a tio n q u e l’on n’a p e n sé; et à la vérité c’est
u n g d e s p lu s pervers héréticques qui soit e n tre cy et Rome. Nous verrons
de d e n s peu de jo u rs le ch em in q u e p r e n d r o n t les affaires.
Les pouvres h abilans de Maestricht estim ans q u e les Espaignolz altérez,
qu e se disent de la ligue, estans en garnison au pays d’O ultrem euze, les
ap p ro c h o ien t p o u r s u r p r e n d r e la ville, com m e avoient pensé faire à
Utrecht, o n t prin s les arm es, d o n n a n t d é m onstration tant vers Montisdoca %
leur g o u v e rn e u r , q u e a u ltr e m e n l, q u ’ilz ne le c o m p o rte ro ie n t; ce qu e s’est
appaisé. D epuis, p a r ne sçay quelle révolte en tre d e u x soldatz espaignolz et
deux bourgeois, la feste s’est recom m enchée; de sorte q u e ledit Montisdoca
à deu x fois avoit faict venir m ille h a rq u e b o u s ie rs desdits altérez p o u r faire
e n tre r s’il en e u t eu besoing; mais le tout s’est appaisé. Le C o m m en d a d o r
Major y a t envoie Monsr de Ville 3 et le conseillier Boone * p o u r p re n d re
inform ation d u faict avecq Alonzo de Vargas. Il va très m al q u a n d les s u b gectz se lièvent contre ceux qui o n t la garde des places. P leut à Dieu q u e on
ne leur en d o n n a q u e lq u e fo is plus d’occasion q u e ne convient.
M onseigneur, je c ra in cd z fascher Vostre lllrao S,ie de ma longue lettre,
l’asseurant qu e luy d e m o u re ra y toutte ma vie h u m b le et affectionné s e r­
viteur.
M onseigneur, vous aurez e n te n d u l ’inopiné m ariage de Mlle de V audem o n t 5 avecq le Roy de F ra n ce . J ’espère elle tie n d r a la m ain à la direction
des affaires de nostre Religion catholicque et se so u viendra du passé.
Mlle d ’E g m o n t s’est m ariée à ces caresm eaulx avecq Mr de H o u tk e rc k e 6,
filz aisné de G aesbecque; son frère a iant faict ung to u r vers Madme sa
m ère à G aesbecque, s’en est retiré assez s o u d a in e m en t p a r e n h o rt pos­
sible de ceulx q u i peuvent avoir don n é à ladite Dame q u e lq u e p e u r ou
1 Itcuiis en li b e r té s u i v a n t l'e n g a g e m e n t |>ris p a r M o nd rago n, cil r e n d a n t la place de M idd e lb ou rg .
V o ir p lus h a u t , p. 102, n o te 1.
* l.e ca p i t a i n e F ra n ç o i s Montesdocn, c o m m a n d a n t do M aastrich t.
5 Georges de L a l a i u g , b a r o n d e Ville, etc. V o ir sa notice, t. IYr, p 5Ûü.
1 J a c q u e s B o o n e n , c o n s e ille r d u Conseil de l î r a b a u t . V o ir sa notice, t. IV, p. 5 9 9 .
* Louise d e L o rr a in e , fille d e Nicolas, d u c de Mercueur et com te d e V a u d e m o n t , e t d e M a rg u e r ite
d ’E gn io n l, soeur d u co m te L a m o ra l , dé c a p ité en lî)0 8 .
* V o ir p lu s h a u t , p. 2 5 0 .
500
CORRESPONDANCE
sinistré opinion de chose non pensée. Le P rince de Clèves 1 aura esté joieulx
vous avoir trouvé. J e ne d o u b te il vous sera esté le bien venu, et ne sçauroit avoir receu que tout h o n n e u r et fabveur en vostre com paignie.
Mr de C am bray at receu lettres de Rom e puis naguerres, p a r où son sol­
liciteur luy m an d e qu e ceux de la R o t a ’ o n t p rin s un e b o n n e résolution
en fabveur de son bon droict, et q u ’ilz o n t déclairé les preuves q u e ceux de
Vaucelles 5 ont allégué q u ’il avoit assez de com pétence de biens et à souffisance p o u r e n tre te n ir Testât de son Archevesché n’estre b a sta n tes, ny
acceptables. Il m ’a m a n d é qu e c’est chose que luy vient fort à propoz,
a iant bon espoir q u e la reste succédera tan t plus facillement. Il n ’a tenu et
ne tient à luy q u ’il ne soit en tré en appoinclem ent; mais les religieux ne
font offre raisonnable et d o n t se puisse co n te n ter en m anière quelconque.
M onseigneur, je vous m ercie de la b o n n e affection q u e luy portez et à
nous tous, vous p ria n t l’avoir p o u r rec o m m a n d é q u e sera l’eridroict où finir a y cestes, etc.
LX XX.
L E C A R D I N A L D E GRANVF.LLE AU R O I .
(Bibliothèque de Besançon. — Lettres de d ivers, t. 111, fol. 69.)
N a p l e s , le 2 7 f é v ri e r 1 5 7 5 .
Aia lie recebido de V. M. enc am in a d a â m ano p ro p ria , con la s u p e r ­
scription de Su Real m ano â 27 de d écem bre : no p rete n d o con lo qu e le
1 Ce j e u n e s e i g n e u r C h a r l e s - F r é d é r i c , fils de G u i l l a u m e , d u c de Clèves et de J u l i e r s , q u i avait
e n t r e p r i s le v o y ag e d ’Italie, v e n a i t d e m o u r i r à Rom e le 9 février. V o ir p l u s h a u t , p. 2 9 6 , sa le t t re à
G r an velle.
*
La Uola ou R o te, j u r i d i c t i o n é tab lie p a r le p ape J e a n X X I I e t r é o rg a n is ée p a r Sixte IV. Elle c o n ­
n a î t de to u tes les af faires b én éficiaire s de to u s les p a y s cath o liq u es .
5
L ’a b b a y e d e V auce lles , près de C a m b r a i, fo n dée en 1 1 5 2 p a r S‘ B e rn a r d . (Gallia Christiana, t. I l l ,
col. 175.)
Dll CARDINAL D E GR AN VEL LE
escrivo dela mia encam inada alas suyas crescorle a V. M. trabajo, antes
a judarla a descan<jar mas, si yo pudiesse, y siento on lodo extrem o ver q uc
sean sus trabajos tan grandes y que sia tan poco ajudada. siendo muclios
los q u e atlenden a su p ro p rio interos y delos suyos, y pocos que con la
im presa devida attendan a lo q u e c o m p le a l servilio do V. M. v temo liarlo
q u e tanto y tan conlinuo trabajo offenda la sahid de su persona, q u e <>s para
toda la Cliristiandad de tanla im p o rla n tia ,p o d ien d o se d e z ir c o n v e rd a d ,q u e
en el la sola consiste la salud y com pare d e l a Cliristiandad. Es assi, como
V. M. dize, qu e es m enester a tte n d er alas preventiones y provisiones para
contra el T u rc o y a (odas paries, y q u e las unas ajuden a Ins o tra s; yo lo
p ro c u ra re de mi p a r t e ,y enesto m ere m ittirc , p o r no cansar V. 1Y1. a los despaclios po r los quales vera q u e lo q u e se p retende es liazer en lodo lo qu c se
pudiere, con I’a ju d a de Dios, cuya es la causa, y vera lanbien y consideralo
q u e se puede en los term inos en q u e estam os y sabe Dios qu e yo q u e rria
po d e r liazer mas.
En lo de F la n d re s no oso mas p e n s a r; lemo haver cansado y congoxado
V. iM. con dezirle tantas vezes qu an inal y en q u a n peligroso eslado q u e dava aquello, y preadvertido la de lo que adelante succedera peor. p o r haver
sido mal entendido, y peor enlablado el negocio, haviendost* c o n s u m id o la
su b sta n tia de sus reynos sin fructo, antes con dario; con q u a lq u ie re p a rtido qu e no sea co n tra la religion ny conlra la suprem a au c to rid a d de V.M.
conviene salir deste trabajo, c o b ra r sus tierras, d iv id ir los rebeldes, y que
vuelvan a la obedientia o a lo monos se a p arlen y dexen la mar. p o rq u e se
pueda a lte n d e r a re s ta u ra r el com ercio; a lodo se pierde sin rem edio co m p lazer a los estados con q u e e n tie n d e q u e to d o p ro c e d e dela b u e n a voluntad
q u e V. M. les tiene, y q u e no ganen otros las gracias, como haran cl p r i n ­
cipe d ’O range y los Alemanes,si por sus negociaciones alcamjan los estados,
lo qu e seria m ejo r les veniesse de la liberalidad y b o ndad de V. M.. p a ra q u e
le c o b re n am or, y qu e p ierd a n ellos la falsa o pinion q u e tienen y no se lien
dellos ny V. M. n y sus principales m inistros, p o rq u e despues con negociacion y m ana a c o m o d a n d o s e ,a su h u m o r y na tu ra , qu e hara mas de lo qu e
ja m a s he alc a n c ad o p o r s u fuenja; hago dende aqui lo q u e p u e d o , pero
aprovecho poco, po r el cam ino p o r el qual se recorre lantas y tantas vezes
lo he e scrip to , g o v e rnandolos como en tiem po del e m p e ra d o r de gloriosa
m em oria, q u e yo siento el dano y disgusto q u e dello recive V. M. en los
hecessos.
302
CORRESPONDANCE
LXXX.
ANALYSE.
D oléances sur le triste état îles affaires d e Flandre. Il est d o u lou reu x d e penser q u e
p our les rétablir on y a sacrifié in u tilem en t les ressources du R o ya u m e. L ’e m p l o i des
m oy en s de d o u ceu r produira plus d ’effet q u e la force ouverte. Il faut éviter surtout
de laisser au prince d ’Orange et aux A llem a n d s l’h o n n e u r d'avoir o b ten u , par leurs
négociations, ce dont les populations devraient être u n iq u em en t red eva b les à la bonté
du Roi. Rien n ’est donc plus nécessaire q u e d e s’appliquer à leur don n er la m eilleu re
opinion possible de l’affection de Sa Majesté pour e lles et d es dispositions b ien veillan tes
q u ’e lle leur porte.
LXXXI.
LE
KOI
AU
CA R D IN A L
DE
GRANVELLE.
( liibliothèque de liesançon. — Mémoires de Granvelle , t. XXX, fol. 38.)
S t-L o r c n c o ( E s c u r i a l ) , le S av r il 1 8 7 8 .
Muchos dias ha q u e he y do m ira n d o en personas con desco de a c erta r en
la q u e fuese mas a proposito para ese cargo, y a u n qu e p o r haverse acabado
tan apriesa algunos de los m as viejes y de experiencia q u e lo p u d iera n ser,
y haver q u e d a d o tan p o c o s ,y p o r hallaros vos ay de qu ien yo he siem pre
confiado tanto, me he detenido en la resolucion fasta agora la he tornado ya
c o m o lo entendereis brev e m en te , y a u n q u e no la he m a n d a d o p ublicar,
m e ha parecido avisaros luego desto para q u e lo s e p a n , y sin darlo a
e n te n d e r a nadie hasta q u e se p u b liq u e , vais con disim ulacion disponiendo
las cosas de su cargo de m anera q u e los halle, e q u e ha de y r tan ordenados
DU CARDINAL DE GR ANVELLE.
303
y com puestos como creo yo Io esperaran de vuestra m ano para q u e tanto
m ejo r los pueda governar, como con breve al servicio de Dios y suyo y
com o Io re q u ie re necesidad y la obligacion en qu e nos hallam os, y p rin c ip a lm e n te confio de vos, q u e hareis todas las cosas y provisiones q u e conviene a la defensa de ese rey n o y de los dem as, dela m ism a m anera q u e si
u b iera destar a vuestro cargo esle verano, y asi os Io encargo m ucho, y si
u b ie re algunas cosas de q u e sea m enester advertirle en p a rticu la r, holgare
q u e con se credo hagais u n a p u n ta m y e n to dellas y me le em bien con el
p rim ero, p a ra qu e aviendole yo visto o rd en e Io q u e en ello convenga, y vos
estais cierto q u e te n d re la m em oria q u e es razon delo m u c h o y bien q u e
m e aveis servido, y de q u e se entiendo siem pre la voluntad q u e os tengo
como Io mereceis, y con otro os avisare de adonde me parecera qu e podreis
ir desde ay en q u e voy m y ra n d o con cuydado.
LXXXI.
ANALYSE.
La difliculté d e irouvcr un person n age co n v e n a b le pour rem placer le Cardinal dans
la vice -ro ya u lé de N a p le s , a été la cause q u e le Roi a différé jusqu'à
présent de
d o n n er avis d u ch oix d e son successeu r. C elu i-ci vient d e t r e n o m m é , et le prélat
connaîtra dans peu
qui il est. Mais en attendant la publication officielle de
cette
m e s u r e , il co n v ien t q u e M. de G ran velle dispose de toules ch oses de m a n ière q ue son
su cce s seu r les trouve, à son entrée en fonctions, dans le m eilleu r état possible et n’ait
a b so lu m e n t q u ’à suivre la m arc h e tracée. Si le Cardinal avait q u elq u es avis particuliers
à d o n n er , q u e certains points m éritassen t u n e attention toute spéciale, il serait bon
q u ’il les marquât par écrit et les fit connaître au R oi, qui agirait en c o n s é q u e n c e . Au
r e s t e , S. M. saura reconnaître, à l ’o c c a s io n ,
les services d e M. de G r a n v e l le , de
m a n ière à p rou ver à tout le ro y a u m e quel cas e lle en fait, et lui annoncera p roch ai­
n e m e n t q u el em p lo i e lle lui destin e au sortir de sa vice-royauté.
504
CORRESPONDANCE
LXXXII.
LE CA R D IN A L D E G R A N V E L L E AU
DUC D E S O R A ' .
(Archives d’Urbino. — Cl. I, Div G., liasse cxxi.)
N a p l e s , le U
a v r il 1 57 5.
Vieiulo q u e el Turco, enemigo com un de la C hrisliandad, de algunos
aïïos aeâ haxa en dafio della con m ayor a rm a d a que p o r lo passado, y qu e
|p o r los avisos q u e u ltim am ente se han lenido de Levante] se entiende que
tiene in te n tio n de venir p o r estos m ares, y con m as q u a n tid a d de baxeles
q u e hasta aqui lia tra y d o , y q u e este R eyno puede ser ofl’e ndido délia,
m as que los otros de Su Magd, por estar mas vezino a los stados del diclio
enemigo com un, y q u e po r esto es nescessario a n n a r el m a y o r n u m é ro
de galeras q u e se pudiere para resistirle, y proveer a lo que sera m enester
po r servicio de Su Magd, deffensa y a m p a ro de sus vassalos, me ha p arescido screvir, y o r d e n a r a V. S. [com o lo sieze (sic) el aüo 1572] qu e provea
qu e los que se hallaren coiulenados, y se c o n d e n are n en sus tierras a re m a r
en galera, se em bien luego a las carceles de la vicaria, no em b a rg an te qu e
po r ellos se aya apelado o apelaie con las declaraciones contenidas en la
caria que va con esta despachada p o r cancilleria, y qu e de los qu e estuvieren senlenciados, y se sentenciaren a m u erte natural, no se exsecute la
pena sin p rim ero d a rm e aviso de la q u a lid a d de los delictos, de las per­
sonas, y de lo que constare contra ellas, para q u e visto se de p o r mi la orden
qu e parescerà convenir. Y a u n q u e p o r im p o rla r eslo lo q u e V. S. puede
considerar, y specialm ente la brevedad p o r estar el tiem po tan adelante,
tengo por cierto qu e tendra V. S. en q u e se c u m p la todo lo dicho, la q uenta
qu e es razon y y o m e prom elo, sabiendo q u a n zeloso es del servicio de
Su Magd. Todavia lie qu e rid o significar a V. S. [demas de lo que lo scrivo
1 J a c q u e s B o n c o m p a g n o , lils n a t u r e l d e G rég o ire XI I I , qu i le créa d u c de S o r a , m a r q u i s d e Vig n o l e , clc., n é en 1548, m o r t en I5Ü4. Il ép o u s a C o n s tan ce S p o r a , d o n t il eu t p lu sie u r s en fan ts.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
505
en la ciicha carta d e s p ac h a d a p o r cancilleria] q u e no se le puede h acer mas
acepto, y q u e te n d re c u y d a d o de d a r p a rtic u la r aviso a Su Magd del q u e le
h a ra en esto, y q u e a mi m e p o n d ra V. S. con ello en obligacion pa ra p r o c u ra rle su salisfacion, y darsela en q u a n to se p u d ie re y huviere lugar, la
qual roscebire de V. S. en qu e m e avise del rescibo d ’esla, y de lo q u e en
cu m p lim ien lo della fuere haziendo. G u a rd e N. S. la m u y IIIn,a persona y
stado de V. S. com o puede.
LXXXII.
ANALYSE.
Les T u rcs, e n n e m i s d e la C h r clien ic, arriveront ici par une flotte plus form idable q u e
celle du passé. D ’après les avis v en u s du Levant, ils ont l’intention de lancer dans ces
mers un n o m b re co n sid é r a b le de bâtiments d e g u e r r e , au m oyen d e sq u e ls ils attaque­
ront le r o y a u m e d e N a p l e s , d e préférence aux autres p o ssession s de S. M. D an s le but
d e résister à cette attaque, il serait convenable d’ai m er le plus grand n o m b re de galères
possible, et d e p ren d re toutes les m esu res nécessaires à la d éfen se du pays, c o m m e on
a agi en 1 5 7 2 , et d ’en v o y e r sans retard les co n d a m n é s sur les g a lè r e s , nonobstant tout
appel. N u l l e p ersonn e c o n d a m n ée à mort ne sera ex é c u té e avant q u e l’on en ait averti
le V ic e -K o i. L e cardinal indique au duc de Sora les m es u r e s qu'il prendra ensuite à
l’égard de ces con dam n és.
T
ome
V.
59
CORRESPONDANCE
300
LXXX1II.
LE
M A IT R E
DES
COMPTES
VIRON
AU
CA R D IN A L
DE
GRANVELLE.
(liibliothèquc de liesançon. — Mémoires de Granvelle, l. XXX, fol. 30 v”, 31 '.)
B r u x e l l e s , le 1 " m ai 1S7Ï>.
__ J e ne le trouve (le Com endador) de si ch au d e affection q u e je pensoie
envers Votre Srie lllme. E t 11e fût que le trouve e n e h a rb o u té d ’affaires luy
d o n n e ro n t plus c h a u d e __ De noz affaires en pardeçà nous sûm es sus p a r ­
lem ent de traicté, mais encoires non bien com encés: car noz ostagiers,
assavoir Monsr d ’Aussi
frère de Monsr de Boussu, Monsr de V e rnenburg,
beau fi Iz de Monsr L iekerke com m e ledit d ’Aussy *, Don B e rn a rd in de M end o ç a 5, M ondragon*, encoires un aullre gentilhom m e de pardeçà, sont partiz
p o u r Breda. où se fait l’assemblée. N éantm oins la partie adverse veult
encoires avoir le sieur R odas 5, bien saichant qu e tout le Conseil est en sa
m anche. Je trouve noz e n nem ys plus fins que nouz et q u ’ilz le font p o u r
gaigner tem ps, véant la F ra n ce q u ’est s u r a p p o in te m e n t avec les H u g u e naux. q u ’est nostre ru y n e, p o u r les raysons qu e sçavez; q u e me don n e
plus g r a n t te rre u r qu e le reste et n ’y sçay rem ède que ce q u ’il plaira à
D ieu qui s o i t ...
1 « L’on m ’a d v e r t i t q u e le x v ' du pas sé sc r e t r e u v a r e n t p rès de Brcda Monsr de R usinghien, L o n g a ­
» l i n s , le p r é s i d e n t de H o lla n d e e t le c h a n c e lie r de G h e l d r e s , c o m m is de Sa M ajesté p o u r t r a i c t c r de
» p aix avec le P ri n c e d 'O r a n g e s et les E stais d ’H o llan d e e t Zéland e, p o u r lesquelz s o n t co m m is P h ilip p e
» d e M a r n i x , C ha rles B o i s o t , J u n i u s e t q u e l q u e s a u l l r e s j u s q u e s au n o m b r e d e d i x , où se t r o u v e r a
» au ssi le co m te de S u a r t z c m b o u r g p o u r m é d i a t e u r , co m m is p a r (’E m p e r e u r e t l’E m p i r e , et q u e p l u ­
» sieurs en a t l c n d o i c n t b o n n e y ssuc. C e p e n d a n t l’on avoit p e r m i s q ue v i n g t q u a t r e v a s sa u lx , douze
» de c h a c u n g c o u s tc l, p u i s s e n t v e n i r en A n v e r s a p p o r t e r v iv r es e t a u l t r e s d e n r é e s , et de m esm es d e ­
» v e r s c u l x , e t q u ’ilz ne p o u r r o i e n t v e n i r à u n e fois q u e trois. » ( Ibid ., fol. 2 8 v°.)
* Nous d o n n o n s plu s h a u t , p. 2 9 8 , d es r e n s e i g n e m e n t s s u r ces p e r so n n a g e s.
* Don B c r n a r d i n o d e Mendoça, officier de i’a r m é e es pagnole, é c r iv a in et d iplo m ate. V oir plu s h a u t ,
p. 159, la no tice de ce p e rson nage .
‘ M o n d r a g o n , s u r lequel n o u s d o n n o n s u n e n o t e p l u s h a u t , p. 19.
* J é r ô m e de R od a, m e m b r e d u Conseil d e s t r o u b le s. V oir plu s h a u t , p. 55.
DU CARDINAL DE GRAiNVELLE.
LXXXIV.
LE CA R D IN A L D E G R A N V E L L E AU ROI
(Bibliothèque de Besançon. — Lettres de diver s, t. Il l , fol. 71-75. — Mémoires de Granvelle, I. XXX,
fol. îiO et suiv. — Collection o f autograph tellers and historical documents form ed by Alfred
Morrison.)
.Naples, le 2 mai
1 57 5 .
Obedescienclo, com o devo, à lo que V. M. me m anda, diré lo mas brev e ­
m ente qu e pudiere algunos pu n lo s para el govierno deste Reyno, p o r la
persona qu e hu v iere de v e n ir debaxo de e m ie n d a , y som ettiéndom e
siem pre â m ejor parescer.
Im porta m u ch o qu e la election de la persona sea quai conviene, tem oroso de Dios, zeloso del servicio de V M., amigo de la ju stic ia , no inleressado y q u e tenga con qu e sostener el grado, m a d u ro y de experientia
y v a lo r; diligente, vigilante y q u e de continuo attienda al negolio, zeloso
del servitio de Dios y del de V. M. y qu e para lo uno y lo otro postponga
q u a lq u ie ra otra cosa despojandose de toda otra affection ; y qu e sirva
lim piam ente, sin tom ar de nadie présentés p o r pequenos qu e seau, si no
es frutta y cosa de com er, y esto a u n q u e m o d e ra d a m e n te ,m a s p o r c o n te n tar
la gente qu e p o r m ira r â algun provecho, pues e n lra n d o en présentes y
interesses, a u n q u e sea de p rincipio p o r poco, como cavallos o q u a lq u ie r
otra cosa, vase poco â poco adelante, y adonde ay interesses no se puede
e sp era r cosa b uena, y solo ha de esperar en lu g ar desto rem u n e ra c io n de
V. iM. p o r su bien servir. Que sus criados sean limpios, q u e no los emplée
en n in g u n a m anera en las cosas del govierno ô negolios, ny se encarguen
de m em o ria le s, ny de e n com endarlos, ny vendan fumo em|»léandolos
solo en las cosas de su casa, dandoles salario delo suyo y pagândoselo de
’ Ce m ém o ria l est p r é c é d é d 'u n e le t t r e sou s la m ê m e d ate (Mémoires de Granvelle, t. X X X , p. 37),
d a n s laqu elle le C a r d i n a l r e m e r c i e Sa Majesté de la b o n n e op in io n q u ’elle a de ses se rvices, p r o t e s t a n t
d e son éte r n e l d é v o u e m e n t a u x i n t é r ê t s de la c o u r o n n e d 'E sp a g n e e t s u r t o u t à la p e r s o n n e de son
so u v e rain ac tuel.
508
CORR ESPONDANCE
m anera q u e sin em barcarse en las cosas del reyno, se pucdan lionradam ente
y decentem ente e n tre te n e r; y si les quiziere gratificar, sea en algunas
plaças de continos, de olïicios qu e son p o r el re p a rtim ie n to en su provision.
Que los negotios del R eyno los tracte con los m inistros y officiales que
en el tiene V. M., cada uno po r su qu a lid a d , pues son ju ra d o s â V. M. y
po r V. M. salariados, y son m as plàticos y saben m ejo r lo qu e conviene al
b uen govierno del R eyno q u e h om bres nuevos que b uscan ord in a ria m e n te
de aprovecharse, y pa ra esto lo revuelven todo con gran d e ofï’e nsion de los
vassallos y m ucho prejuyzio del servitio de V. M.
Que en tre los dichos m inistros de V. M. del R eyno, rep a rta los negocios
conform e a la qu a lid a d de cada uno, assi del consejo colateral, regenles,
consejo de Sancta-Clara, présidentes de su m m a ria y otros, tractando los
negotios con los tribunales, con cada uno dellos los qu e son à su cargo
y para qu e son instituidos. dex a n d o hazer su ollicio al thesaureso, scrivano
de ration, m aestro de cam po, ocbedores y olliciales de g u e rra y otros,
m ira n d o sobre ellos y tcniendo cuy d a d o de ver y e n te n d e r si hazen lo que
deven, y como estos son puestos p o r V. M. presuponese que se ha hecho
buena election, y si fallan 110 les terni'i el respecto para la correction
y em ienda que m ucbas vezes tienen los h om bres à sus criados y alleQue re p a rta su tiem po de consejos, audientias, correspondentias con
governadores de provintias y tierras del R eyno y p o r r e p a r tir los m em o­
riales y negotios; y que p ro c u re de observai' este rep artim iento qu a n to
p u d iere conveniblem ente, po rq u e adonde no ay ùrden, ay confusion y se
trabaja m ucho y no se haze nada.
Huelgan m u ch o los deste reyno de ser oydos y se com plazen en ha b la r.
Dâseles agora audientia pùblica sin fallar dos vezes » la semana, â la
mafiana, à esla no vienen h om bres titulados ny otros de qu a lid a d 110 o r d i naria. Destos se oyen x, xn , xv y mas, àntes de la missa, cada dia q u e no
son de audientia publica, y la piden à la tarde, y a la m anana se hallan
senalados los aquclla m anana se pueden oyr.
Los dias de la sem ana p a ra los consejos qu e se tienen despucs de com er
ord in a ria m e n te y d u ra n 5 horas ö mas, conform e â los negotios q u e ay,
son repartidos desla m anera : el lunes, vienen los del consejo de camera,
con las causas q u e a pedim iento de las partes se han de referir al vizerey
D ü CARDINAL D E GR AN VE LL E.
509
en el consejo colateral; el m artes, con los regentes, sobre cosas del reyno
y negotios q u e â su cargo specialm ente tocan; miércoles, viene la vicaria
en cosas c rim inales; el juéves, como el martes. El viernes viene la cam era del
palriinonio, y en esto no ay jam a s fai ta en dias qu e no son fiesta, y àntes
qu e entren los tribunales. L unes, miércoles y viérnes se veen y decrelan
mem oriales. Y a u n q u e sea cosa trabajosa, im porta q u e el vice-rey assista
sin faltar y qu e lea ô se liaga leer todos los despaclios qu e v ienen, p o rq u e
sea inform ado de todo lo q u e passa, y po rq u e en el referir los régentes,
consejeros y otros sean mas sobre si, por 110 d e x a r ô o lvidar nada de lo
qu e im porta, con e n le n d e r qu e el vise-rey lo lia visto como ellos; y esto
da m u ch o contenlam iento â las partes q u e esté presente el m inistro,
q u a n d o enlienden qu e q u iere que la justitia se a d m in is tre derechainente.
sin agraviar â nadie, n y p o r favor ny por otra via, y en osto es m enester
q u e esté con los ojos abiertos, po rq u e en h om bres no faltan o rd in a ria m ente passiones
Ha de teuer g ra n d e a dvertentia en h o n r a r m ucho los m inislros de justitia,
pero qu e tam bien les m ire â las m an o s, ny co m p o rte qu e so color que
pueden tanto en la ju stitia, tiranizen los vassallos de V lM., como algunos
vezes se ha liecho; y en re p re m ir esto ha de ser m uy rigoroso, y a
rem e d ia r si excedcn en eslo los governadores de proviiitias y île las
lierras assi dom aniales como de Rarones, y los eomissarios que po r nogotios
q u e se offrescen, assi conlra foragidos como otros, se em bien po r el reyno,
q u e m uchas vezes exceden, y no se puede e xcusar de em biarlos. y en
castigar los q u e han excedido y se les ha provado se ha usado rigor, q u e
es lo q u e se puede h azer po r el rem edio de la d e s ö r d e n . y tanlo m ajor
castigo m erescen, qu e po r ser letrados peccan q u a n d o peccan p o r malitia
y no p o r ignorantia; y es m u ch o m enester q u e m ire en eslo con vigî—
lantia p o r el favor qu e hallan estos en los juezes, p o r ser de la mesm a
profession, y m uchas vezes antepuestos y favorescidos p o r ellos. Y tam ­
bien es m enester tenga ojo q u e los consejeros entre si tienen sécrétas
am istades, y se a ju d a n unos â otros, y si sobre ello no inira el m inistro y
de m an e ra qu e ellos e ntiendan, suffren las p a rte s y la ju stitia no va
su cam ino. Viéndose aparentia dello, lo ha de r e p re h e n d e r con m u ch a
severidad y si se pudiesse p ro v ar ju rid ic a m e n te se devria castigar con
todo rigor.
510
CGHRESPOiNDANCE
La genie deste reyno tiene m enesler m u ch o freno p o r via de ju stitia,
y si en esto se procédé juslificadam ente, todos lo suffren y passan po r
ello. P ero lam bien es m enester qu e el m inistro sea discreto para tem p e ra r
algunas vezes el rigor segun los casos y circonstantias, como conviene,
cou qu e se haga sin otro lin q u e el de bu en govierno y com unicàndolo
p rim e ro con los del consejo.
Es m uy necessario, con esto h o n r a r m ucho la gente, cada u n o co n ­
forme â su q u a lid a d , en q u e m iran m ucbo, y q u e el m inistro con todo esto
m antenga su a u cloridad y rép u ta tio n sin q u e en el enlienda flaqueza
sino m ucbo ànim o, y que con la razon y justitia ovre sin nin g u n respecto haziéndose te m e r; pero qu e con esto se les m ueslre b u m an o , affable
y traclable, y que entiendan que tiéne cuenta con ellos, con cada uno
conform e à su qualidad y qu e les liene am or, q u e fia dellos y de su fidelid.ul y que no quiere bazer prejuyzio à sus privilegios, pero q u e tam bien
q u iere soslener rau c lo rid a d de V. M. inviolablem enle.
H o n ra r m ucbo los clcctos de la c i u d a d , y q u e entiendan q u e quiere el
bien délia, y q u e de secreto lengan siem pre intelligentia con el electo
del popolo, del quai se vale contra los otros q u a n d o quieren p re te n d e r
cosa q u e no convenga.
T e n e r gran cuyd a d o de que no faite la victual la, que es uno de los
m ajores Irabajos qu e o rd in a ria m e n te se tiene. lYlirar m ucho qu e en los que
traclan dello no aya interesse, q u e p o r el passado ha hecho gran dano
y lia sido estos q u a lro anos, gracias à ü io s, m u y a b u n d a n te con el c u y ­
dado que dello se ha tenido, con m ucho contento de la gente, y esto
im porta i n fi ni lo para el buen y quiéto govierno del Reyno.
Que los m atrim onios sean libres, y que en los ô rp h an a s qu e se ponen
dt-baxo del am p a ro de V. M. 110 aya desirio ny del visorey ny delos consejeros para darlas por favor, y recom pensar parientes, amigos ô servidores; y que en ello entienda el m esmo visorey, inirando à los m anos â
los consejeros para qu e de la parte dellos no aya nada desto.
Si el viserey tiene los tilulados y barones y otros de q ualidad del Reyno
sabrosos, servira pa ra facililar ajudas e x traordinarias, si succédiesse necessidad, y para q u e dellos sea acom panado y ajudado si succediesse alguna
invasion del R e y n o ; y soi cierto q u e dellos saliera e n c a m p a n a g ran n um éro
estos q ualro anos, si se ofïresciera occasion de baver de a c u d ir y o en persona.
I)U CARDINAL D E GRANVELLE.
511
Y para esto com ple m u ch o q u e e ntiendan quo, a u n q u o el g overnador no sea
de su nation, q u e los ama como si della fucra, y quo de q u a lq u ie ra nation
q u e sea qu e no m uestre tanto a m o r a la suya qu e m enosprecie las otras, y
specialm ente esta que govierna, v que pro cu re q u e lo mesino sea de los
de su nation q u e se lu alle g an . porque estos, sino son tem plados po r la
p r u d e n tia de la cabeca, muclias vezes hazen con faltar en esto, y con
h a b la r dem asiado m u ch o dano.
Que los cargos, specialm ente de guerra, no los de p o r favor, sino a
personas qu e lo m erescen, platicas, q u e sepan servir y sean para ello.
Que tenga g ran d e y c ontinua correspondentia con lo so tro s n iin is tro s d e
V. M. y que, para saber lo q u e passa en loda* paries, use de grande
diligenlia, q u e se im agine qu e los enemigos haran lodo lo peor q u e p u d ieren contra el Reyno, para p revenir y proveer, pero q u e no se figure que
puedan hazer cosas im possibles, para que con lal im agination, haga o
fuera, de liem po o m ajores las provisiones <le lo qu e conviene, con ru v n a
de la hazienda, sin fructo, pues tanto im porta g ran g e a rla ; y q u e no se
p e rsu a d a q u e es servir biensacar m u ch o de los vassallos, sino qu e haga
consideration sob re lo quo pu e d e n y lo q u e im porta, qu e entiedan qu e se
tiene cuenta con no cargarlos mas dc lo qu e requiere la pura necessi­
d a d ; y m ire qu e son vassallos patrim oniales. y no de la Yglesia 6 del
im pcrio, para sacar en su tiempo lo qu e pueden, c u ra n d o poco de lo
q u e hallara el successor. Y no es bien d e sperar los vassallos, de d o nde
veemos nascer tantos m ales, sino p ro c u ra r dc tenerlos contentos y sa b ro sos, y es m cjo r sacar dellos poco m cnor con su voluntad, q u e algo mas
con desdenarlos, y q u e p ro cu ra n d o q u e quisen ricos m odianam enle, se
les da com odidad para qu e en liempo de necessidad puedan serv ir m e j o r :
m uestra buena voluntad im porta inlinito conservarsela.
G ran defension para contra l’arm ada del T urco se p u e d e hazer, con no
tanto gasto como alguna vez se ha hecho, te n i e n d o e n o r d e n el tertio.y prevenidos los de la militia, y con los hotnbres d ’arm as y cavallos ligeros, repartiendose y poniendose la gente adonde conviene, con consejo de los platicos
y con ten e r apercevidos los titulados y barones, y y e n d o cresciendo de
fuer^as conform e a la necessidad, con qu e el viserey q u iera a tte n d e r en ello
el m esm o, y a c u d e r en persona adonde fuesse m enester en su tiem po, digo
q u a n d o se p rocura de ten e r los subditos sabrosos y affectionados.
312
CORRESPONDANCE
Para las gale ras. V. M. ha en te n d id a la m anera q u e se ha servido para
pro v ee r las de rerneros y de otras cosas ; en esto sera m enester o c o n lin u a r
p o r la mesma via, o conform e al assienlo q u e V. M. tom arc m u d a r lo q u e
paresciere, con auda de la del consejo.
Ha de e ttender con cuy d a d o al rem edio contra los foruscidos q u e renascen como hongos, po r las causas qu e algunas vezes he escriplo. Y es
m enester no differir la provision y c o rre sp o n d er con m u ch a diligencia y
c u ) d a d o a los qu e entienden en ello, por...
LXXXIV.
TRADUCTION.
P ou r obéir, suivant mon devoir, aux ordres d e S. M., je vais lui exposer le plus
su ccin ctem en t possible q u e lq u e s points relatifs au go u v e r n e m e n t de ce royaum e, afin
de g u id er celui qui doit m e rem placer dans m e s fonctions; le tout sa u f m eilleur avis et
soumettant co n stam m en t m es opinions à c e lles de p ersonnes plus cclairces q u e moi sur
c e tle matière.
U n e ch o se d igne d e lixer avant lout l’attention de V. M., c ’est le choix du go u vern eu r
l u i -m ê m e , qui doit cire un h o m m e craignant D ie u , zé lé pour le service de son maître,
ami de la justice, d ésintéressé, assez riche pour tenir c o n v e n a b le m e n t son rang, plein de
maturité, d ’ex p érie n c e e l de v aleu r; diligent, vigilan t, c o n tin u ellem en t attentif aux
devoirs essen tiels de sa charge, plein d e zèle pour le service d e D ieu et celui d e V . M.,
prél à sacrifier à cet effet toute autre considération cl à se d é p o u iller de toute affection
particulière; servant ave: délicatesse et d é sin té r e ss e m e n l, sans accepter d e présents de
p e r s o n n e , q u elq u e légers q u ’ils puissen t è i r c , à m oin s q u ’il ne s’agisse de fruits ou
d e c o m e s tib le s, et encore avec b eau cou p de r é s e r v e , plutôt par crainte de d éso b li­
ger les gen s q u ’en vue de son bie n -être p erso n n el; en effet, dès lors qu e l’on se met
sur le pied de recevoir d es cadeaux, bien q u ’il s’agisse dans le principe d ’objets peu
consid érab les, tels q u e ch evau x ou autres objets d e ce g en re, on arrive in se n sib lem en t
à q u elq u e ch o se d e co n sid éra ble; cl partout où règn e l’intérêt, on ne p eu l rien espérer
d e b o n , tandis q u ’un ministre pén étré d e ses devoirs doit attendre d e V . M. s e u le la
DC CARDINAL DE GRANVELLE.
r é c o m p e n s e d e ses services. Il faut, en onlrc, q u e ses su b ord o n n és soient aussi d ésin té ­
r e ss é s q u e l u i - m è m e , q u ’il ne leur d o n n e a u c u n e e sp è c e de paît aux affaires du g o u ­
v e r n e m e n t , n e souffrant pas qu ’ils se chargent de lui présenter des m ém o ires ou placets,
d e les a p p u y er près d e lui et d e te n d r e d e la fu m ée, se liornanl à les em p lo y er aux
olliciers d e sa maison, p renant leur salaire à sa ch a rge p erso n n elle et les payant de
telle m an ière que, sans se m êler en r!en des affaires p u b liq u e s, ils puissent vivre
d é c e m m e n t et h o n ora blem ent. Q u e s’il ju g e à propos de leur accorder q u e lq u e gra­
tification, ce soit c o m m e des co n tin o s 1 , ou autres em ploi« dép endant d e sa
n o m i­
nation.
Il devra traiter les affaires du royaum e avec les ministres et officiers d ésig n é s à cet
effet par V . M .; c h a c u n su iv an t l'im portance de son office, car ils ont prêté serm ent
à V . M., so n t salariés par e lle, e l s’e n ten d en t b e a u c o u p m ieu x à l’administration du
roy au m e q u e des h o m m e s n ou veau x qui ne ch e r c h e n t d ’habitude q u e leurs profits
particuliers, et l’introduction d e toute esp èce d'innovations, au grand p réjudice des
sujets d e V . M. et du serv ice d e leur maître.
Les affaires devront être réparties par le V ic e-R o i p ro p ortio n nellem ent à la qualité de
ch aq ue sujet, entre les m inistres de V . M., tels q u e ré g e n ts, m e m b r e s du Conseil co lla­
téral, du Conseil S " -C la ire, p résidents d e (’E nquête et autres, attribuant à chacun des
tribunaux les m atières qui sont d e leur co m p éten ce et pour lesqu elles ils sont institués,
laissant faire leur office au trésorier, au greffier d e la c o u r 2, an m estre de cam p , aux in ­
specteu rs, aux officiers de g u erre et a u tr e s ,s e bornant à veiller sur eu x et à s ’assurer par
lui - m ê m e s ’ils s’acquittent bien ex actem ent de leu r devoir. T o u s ces fonctionnaires
étant d é sig n é s par V. M., le choix qui en a été fait doit être su p p o sé c o n v ena b le, et dans
le cas où ils se trouveraient en faute, la justice du g o u v e r n e u r n ’en sera point entravée
par ces considérations qui arrêtent souvent un h o m m e lo rsq u’il s ’agit d e ses d om estiq u es
ou de ses parents.
Il devra faire u n e juste répartition d e son tem ps en tre les séances des c o n s e i l s , les
a u d ie n c e s , la correspondance avec
les g ou v erneu rs
des
p rovin ces
dépendant
du
r o y a u m e, la répartition des m ém o ire s et des affaires à traiter. C elle répartition sera
m a in te n u e co n sta m m en t, autant q u e possible, parce q u e là où il n'y a pas d ’ordre il y
a confusion inévitable el l’on travaille beaucoup pour n e rien faire en définitive.
L es habitants de ce pays aim en t b eaucoup à être enten du s et se plaisent à exp oser
ve r b a le m e n t leurs affaires. On
leu r d o n n e p résen tem en t u n e a u d ien ce pu b liq u e le
1 Offices s u b a l te r n e s d a n s la m aiso n.
*
L 'escriban de racion, a p p e l é a u j o u r d 'h u i receptor, ét a i t le greffier du t r i b u n a l s u p r ê m e , ch a r g é
p a r son office d ’a l l e r p r e n d r e s u r les lieu x tou s les r e n s e i g n e m e n t s n éces sa ires à l’in s tr u c tio n d ’un p r o ­
cès en m a tiè r e civile ou c rim in e lle .
T ome V.
40
314
CORRESPONDANCE
m alin, deux fois par se m a in e ; rég u lièrem en t à celle-là n'assislent point les h o m m e s
titrés, ni autres personn ages d ’un rang plus q u e ordinaire, q u e l’on entend au nom bre
d e 1 0 , 12, 1 5 et m ê m e p lu s , avant la m e s s e , lous les jo u rs qui n e sont pas d ’audience
p u b liq u e; ceux-là se font inscrire le soir pour cet objet, et dès ce m o m e n t on désign e
ceu x qui d o iv en t èlre en te n d u s le len d em ain dans la matinée.
Les jo u rs de la s e m a in e , con sacrés aux séan ces des c o n seils qui se tiennent ordinai­
re m e n t dans l’a p rè s-m id i et durent trois h e u r e s ou plus, suivant la nature des affaires
à traiter, sont distribués de la m an ière suivante : le lundi, pour le Conseil d e la C am éra
et les causes q u i, sur la d em an d e des parties, d oiven t èlre référées au V ice-R oi dans le
Conseil collatéral ; — le mardi, p our les régents, ainsi qu e pour les affaires du royaum e
et autres m atières qui sont dans leurs attributions spéciales; — le m ercredi, pour la
V ica ria et les cau ses crim in e lles; — le je u d i, c o m m e le m ardi; — le vendredi, vient
la C h a m b re du p a trim oin e, à la q uelle est accordée invariablem ent un e au d ience les
jo u rs non fériés, avant q u e les tribunaux s’a ss e m b le n t; — les lundi, m ercredi et v e n ­
dredi sont consacrés en outre à l’ex am en des m é m o ir e s et à la décision des ch o ses qui
en font l’objet. Q u e lq u e fatigant q u e soit ce travail, il est indispensable q u e le V ice-H o i
y prenne part sans faute, et q u ’il lise ou se fasse lire toutes les d é p ê c h e s qui arriveni,
afin d ’ètre inform é d e tout ce qui se passe, c o m m e aussi pour que les régents, c o n se il­
lers et autres officiers so ien t exacts et scru p u le u x dans leurs rapports, n ’omettant ou
n ’oubliant rien d ’e s s e n t ie l , certains q u ’ils sont que le V iee-R oi a pris c o m m e eu x c o n ­
naissance d e l’affaire.
C’est en o u lre un grand sujet de satisfaction et de tranquillité pour les parties lors­
q u ’elles savent qu e le m inistre intervient p erso n n ellem en t dans leurs affaires, et lient à
ce q u e la ju stice soit ad m inistrée d ’une m an ière im p artia le, sans lésion de qui que
ce soit, et à l’exclusion d e la faveur ou d e toute considération. Le g ou v ern eu r doit èlre
su r ce point d ’une extrêm e v igila n ce; car partout où il y a d es h o m m e s, les passions
sont inévitables.
T o u t en accordant la plus grande considération aux olliciers de ju stice , il aura c o n ­
sta m m en t l’œ il sur e u x , ne souffrant pas q u ’ils ab u sen t en quoi q ue ce soit de leur
autorité pour tyranniser les sujets d e V. M., c o m m e la c h o s e est m a lh eu reu sem e n t
arrivée plus d ’u n e fois. La répression de sem b la b les délits doit èlre im pitoyable, c o m m e
aussi celle des abu s d e pouvoir c o m m is par les gou v erneu rs d e provinces c l des terres
soit d o m aniales, soit appartenant aux barons cl par les com m issaires en voyés dans le
royaum e pour les affaires qui se p résentent, soit con tre les con tu m aces ou autres,
lesq u els c o m m iss a ir e s ab u sen t fréq u em m en t de leur pouvoir et que l’on ne peut,
m algré cela, d isp e n se r d ’en voyer. T o u te s les fois q u e l’occasion s’est présentée de sévir
contre de pareils délits bien e l d û m e n t prouvés, on l’a fait avec rigueur, ainsi q u ’il
con v en ait pour rem éd ier au d ésordre; el des fonctionnaires de ce g en re sont d ’autant
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
515
m o in s d ig n e s d ’in d u lg en ce, q u e leur instruction leur e n lè v e tonte ex cu se et q u ’ils
p èch en t p lu tô t par m a lice q u e par ignorance. Ce cas particulier ex ige du go u vern eu r
une vig ilance d'autant p lu s g ran d e q u e les personn ages dont il s'agit trouvent facile­
m e n t , à raison d e l’analogie de leurs fonctions, du crédit et d e l’appui devant les
tribunaux, où leurs prévarications sont traitées avec b eaucoup d ’in d u lg e n c e . Il faut se
défier égalem ent d es amitiés secrètes de certaines con seillers qui s’en ten d ent pour se
favoriser m u tu ellem en t dans l’o ccasio n ; si le m inistre n ’y prête pas une grande a tten ­
tion, de m an ière q u e c e u x -c i se sen ten t su rveillés d e près, les parties en souffrent et le
cours d e la justice est entravé d’u ne m anière sen sib le. A la m o in d re apparence d ’un
sem b a b le d ésordre, il doit le réprim er é n erg iq u e m en t, et dans le cas où la ch o se pour­
rait être ju rid iq u em en t p rou vée, sévir avec une extrêm e rigu eu r contre les coupables.
L es habitants de ce ro ya u m e ont besoin d être tenus v ig o u r e u s e m e n t en respect
par le m oy en de la ju s t ic e ; et. si l’on procède en pareil cas lé g a lem e n t et avec équité,
tous baissent la tète et s’y so u m e tten t sans rép u gn an ce. Mais il faut d ’un autre côté que
le m inistre ait a ss ez d e pru den ce pour tem pérer q uelq u efo is la rig u eu r des lois, suivant
les cas et les circ onstances qui peu ven t se présenter, pourvu q u ’il n ’ait en cela d ’autre
but q u e le bien du g o u v e r n e m e n t , et q u ’il en réfère p r éala b lem en t aux m e m b r e s du
C onseil.
Il est in d ispensable, en outre, de traiter avec b ea u cou p d ’égards les divers individus,
chacun suivant son rang, c h o se à la q uelle ils tiennent b e a u c o u p ,e t qu e le m inistre sache
n éa n m o in s maintenir son autorité, sans que la m oin dre faiblesse p uisse faire so u p çon n e r
en lui un défaut d ’én e rg ie , et q u e, dans toutes les c irc o n s ta n ces où il aura pour lui la
raison et la justice, il ose a ccom plir son devoir, sans a u cu n e esp èce d e resp ect h u m ain ,
rendant son autorité redoutable aux yeux de tous. Il devra n éa n m o in s se montrer b ien ­
veillant, affable et accessib le à tous, de m anière q u e ch a cu n soit persuadé q u ’il sait
rendre ju stice à c h a c u n , suivan t son rang, qu'il a pour e u x u n e affection sincère, u n e
confiance parfaite dans leur fidélité, mais aussi q u e , sans vouloir porter atteinte à leurs
privilèges, il est d é term in é à m a intenir in v io la b lem en t l ’autorité du Roi son maître.
Il devra tém oig n er é g a lem e n t une grande considération aux élus de la ville, leur
faisant co m p re n d re q u ’il désire sin cèrem en t le bien de c e lle -c i, et en treten ir des rap­
ports suivis avec l’é lu du peuple, dont l'influence pourra lui servir à contrebalancer
c e lle s des autres, lorsq u ’ils élèveront q u e lq u e prétention
du
peu c o n v e n a b le nu service
Roi.
Il
faudra veiller, avec le plus grand soin, à c e qu e les vivres ne v ie n n e n t pas à m anquer;
car c ’est ici l’un des points les plus difficiles d e l’adm inistration d ’un g o u v e r n e u r , et
tenir en outre la m ain à ce q u e les fonctionnaires préposés à cet office ne le sacrifient
point à leurs intérêts p a rticu liers, c o m m e on l’a vu arriver déjà q u elq u efo is, au j;rand
détriment des affaires p u b liq u es. P endant ces quatre d ernières an n ées, grâce à D ie u et
516
CORRESPONDANCE
aux soins particuliers q u e l’on a pris de cet objet, les ap p rov isio n nem en ts ont été fort
abondants; ce qui a sin g u lière m e n t satisfait le p eu p le: car cet article est de la plus haute
im portance pour la bonn e et paisible administration du royaum e.
Les mariages doiven t être en tièr em en t libres, de telle m a n ière q ue les orp h elin es
placées so u s la protection d e V. M . n e soient l’objet d ’a u cun e vue particulière pour le
V ie e -i lo i ou q u e lq u ’un d e s conseillers qui songeraient, par ex e m p le, à disposer d e leur
m ain, à titre d e r éc o m p e n s e , en faveur d e leurs parents, am is o u créatures; le V ic e -llo i
devra, so u s ce rapport, surveiller activem en t les conseillers afin de p révenir de leur
part toute spéculation sem b lab le.
En cherchant à se con cilier les n obles, barons et autres p erso nn a ges consid érab les
du ro ya u m e, il s'assurera leur co n c o u r s pour d es'sub sides extraordinaires, dans qu elq u e
nécessité pressante, c o m m e aussi pour obtenir leur appui personnel dans le cas d ’une
invasion du royaum e. Je suis certain, par e x e m p le , q u e , dans le cours de ces quatre
dernières a n n é es, un grand n o m b r e d ’entre eux se fût m is avec e m p re s sem en t à ma
disposition, si l’occasion s’était p résentée pour moi île m e mettre à la tète de quelq ue
expédition. Mais, pour cela, il faut q u ’ils soient in tim em en t persuadés qu e le g ou v ern eu r,
bien q u ’appartenant ù une autre n ation, les aim e a b so lum en t c o m m e s’il était enfant de
la m ê m e patrie, et q u e son affection pour le pays qui l’a vu naitre ne s’exerce point au
détrim ent d e c e lle q u ’il doit aux autres provinces d e la m onarchie, de c e lle surtout
q u ’il gou vern e au n o m du Hoi. L es m ê m e s dispositions devront se retrouver ch e z ceux
de ses compatriotes qui seront placés près de sa p e r s o n n e : car ees d e r n ie r s , si la
p ru dence du c h e f ne règle leur conduite, peu ven t sou v ent, par défaut de circonspection
et par q u e lq u e s paroles in considéré ‘s, causer aux affaires du maître un d o m m a g e
irréparable.
Quant aux em p lo is d e toute nature, aux em p lo is militaires surtout, ils n e doiven t
point être accordés à la faveur, m ais u n iq u e m en t aux sujets les plus dignes, rec o m m a n dables par leur capacité, leur exp érience et leu r zè le bien c o n n u s.
Il
faudra q u ’il en tretienne des rapports sérieux et suivis avec les autres ministres
d e V . M., usant d e la plus g ran d e activité pour être informé de ce qui se passe d e tous
côtés, afin de prévenir et déjouer les tentatives de l’e n n e m i. T o u tefo is, en se tenant
co n tin u ellem en t sur scs gardes avec eu x, il ne faut pas q u ’il aille leur su pp oser des
projets im possibles, parce q u ’en poursuivant de pareilles c h im è r e s, il s ’exposerait à
faire hors de propos ou sur un trop grand pied des préparatifs de défen se et c o m p r o ­
mettrait, sans aucun fruit, les deniers de l'État qu ’il im porte si fort de m én ag er dans les
circonstances p résen te s. Il devra se p énétrer é g a lem e n t de cette idée q u e le zèle d ’un
bon ministre ne consiste pas à su rch arger les sujets d e son maître, mais q u ’il faut pro­
portionner exa ctem en t ce q u ’ils p eu ven t faire aux b esoin s présents de l ’Ëtat, leur
faisant c o m p r en d r e q u ’on ne son g e point h les grever au delà de ce q u ’exig e la stricte
317
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
nécessité, d ’autant plus q u ’il s’agit ici
de
sujets patrimoniaux et non
de
vassaux
de
l ’E g lise ou d e l’E m p ir e , d e sq u e ls on tire q uelq u efois tout ce que l'on peut, sans trop
s’in qu iéter d e ce q u e trouvera son su ccesseu r. En règle g én érale , c ’est un e faute e x c e s ­
s iv e m e n t grave et féconde eu résultats désastreux de réduire les sujets au désespoir,
lorsq u e l’on devrait s'attacher tout au contraire à leur d o n n er toute la satisfaction p o s­
s ib le ; et il vaut m ieu x tirer d'eux qu elq u e c h o se de m oin s, mais de leur plein g ré, que
b eaucoup p lu s , au risque d e les m écontenter, d ’autant mieux q u ’en leur laissant une
h o n n ête a is a n c e , on les m et en élat de faire d es sacrifices dans les m o m e n ts criti­
q u es et de tém oigner u n e b o n n e volonté q u ’il im porte au plus haut degré d ’entretenir
en eux.
Q uant à l’a r m ée navale des T u r c s , on peut se tenir en garde con tre elle à beaucoup
m o in s d e frais q u ’on ne l’a fait plu sieu rs fois p ré céd em m en t, et cela en m aintenant sur
un bon pied le tercio , la m ilic e, les h o m m e s d ’arm es et la cavalerie légère, en disposant
co n v en a b lem en t ces différentes troupes suivant l’avis des nob les et barons, et a u g m e n ­
tant le d ép lo ie m e n t de fo rc es, suivant la nécessité, m o y e n n a n t toutefois q u e le vice-roi
y veillera par lu i -m è m e et se trouvera p e r s o n n e lle m e n t partout où l’on aura besoin de
sa p résence, s’il a à cœ u r d e s e co n cilier l’e st im e et l’affection des sujets du Roi.
Pou r ce qui c o n c e r n e les galère s, V. M . sait de q u els m o y en s on a fait usage pour les
éq u ip er d e ram eu rs et d es agrès nécessaires. Ici d eux partis se présentent : continuer
les c h o se s sur le m ê m e pied ou introduire par un n ouveau traité, avec la coopération
du C onseil, les m odifications q u ’e lle ju g era c o n v e n a b le s.
U n e d es ch o ses qui méritent d e fixer particulièrement l’attention du nouveau g o u v er ­
neur, ce sont les con tu m aces q u e l’on voit p u llu ler c o m m e les c h a m p i g n o n s , et cela
pour des motifs dont j ’ai p r é c é d e m m e n t entretenu V . M. à diverses reprises. Il est
im portant d e s ’en occu p er sans perle de tem ps, et d e second er a v ec zèle et én erg ie les
efforts de ceu x qui en sont chargés d ’u n e m a n ière sp écia le, en continuant l’em p loi des
expédients et m oyen s dont on a fait usage ces a n n é e s dern ières et jusqu'au m o m e n t
présent.
S on attention devra se porter ég alem en t, avec le concours d es gen s sp é cia u x , sur les
travaux publics, tels q ue fortifications, travaux d e défen se, c h e m in s , ponts et principale­
m e n t su r le s citadelles qui so n t d’une grande utilité pour le ro ya u m e ; ce s divers objets
se trouvent dans un tel état, q u ’avec une attention suffisante on pourra m ain ten ir facile­
m e n t les c h o s e s sur le m ê m e pied.
Ces in structions d o n n é e s dans le temps au duc d’AIcala, et qui m ’o n t servi d e règle
à m o i-m è m e , sont parfaitement sages et bien c o n ç u e s: on pourrait les ren o u v e ler pour le
V ic e -R o i qui m e remplacera. Il conviendrait pourtant, eu égard à la situation d es affaires
du royaum e, de ne point perdre de v u e q u e le ministre a besoin d ’une autorité peu
c o m m u n e , et il n ’y aurait point d ’in c on v én ien t à lui laisser, dans certaines circo nstan ces,
318
CORRESPONDANCE
u n e plus grande lalitude, lant en ce qui con cern e des ollices de m oin d re im portance,
a ctu ellem en t vacants, q u ’à l’égard des em p lo is d e retraite q u e l’on accorde parfois
c o m m e récom pen se à des soldats â gés et m u tilés, m o y en n a n t toutefois q u ’il donnera
im m édia tem ent avis de ce q u ’il aura fait dans ce g e n re, afin q u ’on puisse l’arrêter s’il
allait trop loin. Quant à la su ppression de la c h a p e lle, des hallebardiers, de la provision
des g ardes-de-corps, q u e plusieurs ont m is en a va nt, une telle m esure n e c o n v ie n t , à
m on avis, en au c u n e manière : car toutes ces c h o se s parlent aux yeux du vu lg aire,
contribuent à a u g m en te r la considération et l’autorité personnelle du ministre qui sans
cela pourrait difficilem ent remplir son office à l’égard de celte nation.
L es C o n seils, le greffier d e la Cour, le trésorier d e la Chambre des coin pics et autres
fonctionnaires du m ê m e g en re ont ég a lem en t leurs instructions spéciales, très sag em ent
c o n çu e s. Il y a en outre les pragmatiques et lois particulières du r o y a u m e , dont le
V ie e -H o i surveille l'observation , sans préjudice des lois et ord on n an ces n ou velles dont
le tem ps et la malice des h o m m e s dém on treront su c c e s siv e m e n t la nécessité.
Il aura
soin, to u tefo is, de prendre de temps à autre l’avis de S. M. sur les m esu r es proposées;
car ce qui fait b eaucou p en g é n é r a l, c’est la p r u d en ce et l’habileté du m inistre auquel,
s’il se m ontre d igne de confiance, on peut laisser une latitude extraordinaire. Il im porte,
en effet, que les sujets de ce royaum e soien t p ersuadés q u e le maitre a en lui toute
conliance et lui accorde le plus grand crédit; c h o se in d isp e n sa b le , vu l’é lo ig n e m e n t
de la cour et la distance des lieux qui rend très difficiles des relations su ivies, d ’autant
plus q u ’il p eut se rencontrer chaque jo u r u n e infinité d e cas dans lesq u els il est in d is­
pensable; qu e le m inistre, avec l’assistance du C onseil, doive prendre sp on tan ém en t les
déterm inations et arrêter les m esu res q u ’il jugera c on v en a b les au service du K o i, sans
attendre l'assentim ent explicite d e son maitre.
T e lle s sont les considérations gén érales q u e j ’ai cru devoir e xp o ser ici pour obéir aux
ordres exprès de V . M. et qu e je lui so u m e ts, sa u f m e illeu r avis. A l’arrivée de m on
successeur, j ’aurai le plus grand soin de lui donner, D ieu aidant, tous les re n se ign e m e n ts
d e détail qui pourront lui être n écessaires; et, en attendant, j e suivrai, pour mon com p te,
la m êm e ligne de conduite, ainsi q u e V. M. m e l’ord on ne par la lettre écrite de son
auguste main.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
319
LXXXV.
LE
KOI
AU
C A R D IN A L
DE
GRANVELLE.
( b ib lio th è q u e d e B esa nçon. — L e t t r e s d e d i v e r s , t. l i t , fol. 109 v° e i 110 )
A r n n j u e z , le 5 m ai 1 5 7 5 ' .
P o r la caria qu e os escrivi de Sn L auronço à cinco del passado, os
avisé como havia tornado resolution en la provision d ’este cargo, como
lo enlenderiades b re v e m e n le ; agora me ha parescido dezir en esta, como
la persona en q u ie n lo he proveydo es el Marques de M ondejar qu e
me servia en el cargo de Valenlia, teniendo en te n d id o de sus buenas
parles, a n liq u id a d y e x p e rien lia, y de la buena orden qu e ha dado en
lo de alli, q u e lo sera su govierno en esse Reyno, tanlo mas dexândolo
vos, en la q u e confio q u e d a râ de vuestra m ano. Y a u n q u e yo he m irado
con c u y d a d o en lo qu e p o d ria d e s vos occuparos en otra parte, d e pende la
resolution dello de otras cosas en que no la he p odido tom ar, p o r no estai*
a u n dispuestas n y en el estado que para ello conviene, y po r esto me
paresce sera à propôsito, q u e en tre ta n to os vays ô Roma, y esleis alli, pues
en este tiem po p o d râ a paovechar m ucho vuestra assistentia, para a y u d a r
à mi e m b a x a d o r en las cosas q u e con S. S. se nos ofl'rescen, q u e son de
m ucha im p o rta n tia , y en q u e q u a n d o os hallârades mas lexos, havia
yo de p r o c u r a r q u e assistiérades para lo qu e digo; y assi holgaré m ucho
q u e lo hagais, en tre ta n to q u e os aviso de lo q u e lie dicho a rrib a , y el
1 • Le R oy v e u t d i r e d e m a y , d i s a n t a u c o m m e n c e m e n t d e sa le t t re q u ’il m ’a e s c r i p t à v del pas­
sado. • (Note d u C a rdin al.)
« E t n o u s s û m e s a u j o u r d ' h u y a u xxiij d e j u i n g
e t j u s q u e s o y r e s j e n ’e n t e n s q u ’il soit e m b a r q u é
» e t o y r e s q u ’il a r r i v a d e m a i n à G a e t a , il n e p o u r r o i t e n t r e r icy de h u i t j o u r s , e t il m e f a u ld ra
» a u l t r e viij p o u r l’i n f o r m e r ; o r n ’y a p l u s d ’o r d r e ( m o y e n ) d ’a l l e r à Rom e, sy n on avec d a n g e r de
» la vie j u s q u e s a u m o y s d ’o c t o b r e q u e j ’a c t e n d r a y , s’il p laict à D i e u , à mon a y s e au d i e t G a e l t e , d u
» m o in g s, j e fera y m o n m ic u lx p o u r le p r o c u r e r . » (Note de la m a in d u C a rd in al.)
* V oir p lu s loin, p. 5 2 3 , ce q u e n o u s diso ns de ce p e r s o n n a g e .
320
CORRESPONDANCE
Marques espero esiarâ ay con brevcdad, p o rq u e yo le he dado prissa,
â q u e se pudiesse en ô r d e n , y p o r lo q u e veo lia escriplo enliendo
que lo esta ya.
LXXXV.
T R A D U C T IO N .
D an s nia lettre, écrite d e S a in t-L a u ren t (d e l’E scu ria l), à la date du 5 du m ois d er­
n ier, je vous ai p réven u de la résolu tion q u e j ’avais prise au su jet du g o u v ern em en t de
INaples, en vou s an n on çan t q u e j e vou s la ferais bientôt con n aître. A u jo u rd ’hui je vous
an n o n ce q u e la p erson n e ch a rg ée d e vous rem p la cer est le m arquis de M ondejar, pré­
c é d e m m e n t g o u v e r n e u r d e V a le n c e , d ’après le com p te satisfaisant qui m ’a été rendu
d e ses b o n n es q u a lités, d e son e x p érie n c e et d e l’ordre q u ’il a su m ain ten ir dans son
g o u v ern em en t, ga ra n tie p u issan te de sa b on n e ad m in istration
pour le ro y a u m e de
N a p lcs, surtout en co n sid éra n t l’état d e prospérité dans leq u el j ’esp ère q u e vous lu i en
transm ettrez les affaires. B ien q u e j’aie réfléch i atlen tiv em en t à la m an ière d ont je
p ourrais vous o ccu p er vou s-m èm e d ’un autre cô té, m a d éterm in ation à eei égard dépend
d ’u n e fou le d e circo n sta n ces qui m ’on t em p ê c h é de la fixer ju s q u ’à ce jo u r , parce que
les c h o se s ne son t p o in t en co re dans un état co n v en a b le pour c e t objet. En c o n séq u en ce,
je su is d ’avis q u e d ’ici là vou s parliez pour R o m e, où votre p résen ce sera d ’un grand
seco u rs pour m on a m b assad eu r dans les affaires q u e n ou s avon s a ctu ellem en t à traiter
avec le S '-S ié g e , et qui so n t d ’u n e te lle im p ortan ce q u e , dans le cas m êm e où vous
e u ssiez été fo rcém en t é lo ig n é d e ce lte ville, j'au rais fait en sorte que vous pussiez y
p ren d re part. J e verrai d o n c avec plaisir q u e vous vou s ren d iez p rovisoirem ent au
p oste q u e j e vou s a ssig n e , d ’autant plus q u e le m arquis ne tardera pas d ’arriver à
N ap les, parce q u e je lui ai d on n e l ’ord re de se m ettre p rom p tem en t en ro u le et q ue
d ’après ses lettres j ’a p p ren d s q u ’il y est déjà.
i
DU CARDINAL DE GR AN VEL LE .
321
LX X X V I.
L E M A IT R E D E S C O M P T E S V IR O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
(B ibliothèque de Besançon. — M émoires de G ranvelle, l. XXX, fol. 7 6 )
B ru x e lle s , le 5 0 m ai 1 5 7 5 .
— Le g r a n t Conseil de Son Excellence est C happin Vitelli, q u ’est la
grosse cloche, Sancho d ’Avila, (îonzaga et Rodas, q u ’on tre u v e plus ho rs
de raison qu e Vargas, et g o u verne la m ac h in e des affaires; et est à c ra in d re
q u ’ilz a y m e n t plus la g u e rre q u e la paix, en laquelle n ’y a encoires b o n
com m e n ce m e n t et serc h e n t tousiours les e n n e m y s dilations, disans q u ’il
faut tem ps p o u r a d m o n e s te r et c o nvertir les villes, et o n t p rin s u n g mois.
J e c r a i n t z q u e c’est p o u r veoir com m e la F ra n c e se c o n d u y ra , où l’on dit
l’u n g des jo u rs q u e la paix est faite, l’a u tre q u ’elle est r o m p u e ; et p u isq u ’elle
va balançant, je c rainz q u ’elle se fera p o u r la nécessité du R oy et de ses
ennem ys, qu e seroit n o s tr e g r a n t préjudice, et tu m b e ro n s p a rdeçà en g r a n t
discort et fâcherie, p o u r ce q u e les Estats ne v eullent accorder. E t je d o u b te
q u e ce véant, le g o u v e rn e m e n t n’a u ra reg a rd au x d its Estatz, ains c o m m a n ­
dera et tauxera lui-mesmes sans a u ltre respect, com m e il a désià assez
com m encé, et le p o u ra faire : car il a la force en m ain, com m e il l’a m o n stre
à l’a b b é de P arcq *, q u ’il refusoit de b a ille r les chesnes, luy a envoyé cent
chevaulx logés à son m o n astè re . P o u r n o tre p a rt nous avons auffert à
bailler a rg e n t ne sçay q u ’ilz a u ro n t re s p o n d u z .
Noz a m bassadeurs de B ourgogne s o n t encoires icy, et ne se v eullent
co n te n ter d ’a p p o in te m e n t raiso n n a b le q u e le R oy redressera nouvelles
o rd onnances, abolissant les précédentes, de q u o y ilz ne se c ontentent, v o u ­
lan t q u e les de rn iè re s soient exp re ssé m e n t révoquées.
__ Le b r u y t c o u rt p a r icy q u e le R o y l’a p o u r v u (le cardinal) de
le v e s c h é de Sarragoça.T outtefois j ’ay e n te n d u q u e l’E m p e re u r le d e m a n d o it
p o u r u n son filz et ne m ’en resjoiray q u e je n’en saiche la vérité, etc.
‘ C h a rle s V a n d e r L in d e n , a b b é de P a r c , p rè s de L o u v a in . V o ir sa no tice, t. IV, p. 152.
T
ome
V.
41
CORRESPONDANCE
322
L X XXV II.
L E C A R D IN A L D E G R A N V E L L E A LA D U C H ESSE D E P A R M E .
(A rchives Farnésieim es de Naples. — L iasse n° 173b.)
N a p le s , le 21 j u in
1575.
Madame. J ’ay, p a r l’ho m m e de M adame la comtesse d ’A re m berg.receu les
d e u x lettres de Vostre Altèze, l’une d u iui de sa m ain, et l’aultre de m ain
d u secrétaire de V. A., et veu p a r toutes deux, le con te n tem e n t q u ’elle ha
receu, d’a voir p o u r hostes à PAquila ladite dame, et M onsieur le Comte
son filz. L ’on m ’escript de R om e q u e tost après M onsieur r i l l mB C ardinal
F a rn ez 1 les debvoit loger à Rom e, chez le s ig n e u r J e h a n George Cesarino
et je prie à Dieu que le m al d u d it Comte soit esté si peu, com m e l’on espéroit. Je redepescha in co n tin a n t son h o m m e , avec ce qu e ladite Dame
d em an d o it, q u e d o n n o it g ran d e haste au re to u r vers R om e d ’icelluy, p o u r
gaigner pays de v a n t Penlrée des grandes chaleurs. D espuis je n’en ay heu
nouvelles, et ne seray à m on aise qu e je n’en aye, p o u r so rtir de la penne
en laquelle m e tient l’indisposition d u d it Comte. Il vad fort bien, qu e p e r ­
sonnes de leur qualité et du pays facent pélérinaiges et p ie u x voiaiges, et
v ie n n e n t à R om e au Ju b ilé , où j ’entendz qu e à ceste foys il y en y ha heu
g ra n d e affluence, et q u e les estrangiers y sont estez receuz avec g ran d e
charité.
Nous avons icy, despuis sa m b e d y de rn ie r, M onsieur Don J o a n ; et se
p orte Son Altèze fort bien. J e m ’assheure q u ’il n ’au ra failly d ’a d v e rtir Vostredicte Altèze de sa venue, et faict p a rt de la cause p o u r q u o y il ha dois la
' Le c a rd in a l A le x a n d re F a rn è sc . V o ir sa no tice, t. IV, p. 2 3 i .
*
Je an -G e o rg es C e sarin o ou C e sarin i é ta it fils d e J u l i e n , q u i f u t d é te n u a u c h â te a u S t-A n g e à R om e
p a r le p a p e P a u l IV, à cause d e so n a tta c h e m e n t a u p a r ti e sp a g n o l. A y a n t o b te n u sa lib e rté a u m o ­
m e n t d e la p aix , P h ilip p e le d éd o m m ag ea a m p le m e n t e t P ie IV lu i acco rd a d e s fiefs c o n s id é ra b le s e t
le titr e d e m a rq u is . La fam ille C e sarin o , u n e d es p lu s illu s tr e s d e R om e, p r é te n d a it d e s c e n d re d e
J u le s C ésar.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
323
Spécie dépesché vers E spaigne le secrétaire Scobedo
le r e to u r d u q u e l il
a c te n d ra avec désir, p o u r sçavoir ce q u ’il a u ra à faire. P o u r m on advis il
n ’e u st faict ce voiaige; ca r e sta n t de la q u alité q u ’il est, et a y a n t gagné si
g ra n d e réputation en la baptaille navale, je ne le v o u ld ro y e veoir sortir,
q u ’il ne fit tra m b le r l’O rien t, n y ne v o u ld ra y e q u ’il eslongne le R oy sans
g ra n d e cause. J e ne sçay si tous le voient là voulentiers.
Vostre Altèze a u ra jà e n te n d u q u e Sa Majesté m e faict faveur de m e des­
c h a rg e r de ceste charge, m ’a y a n t n o m m é p o u r successeur le M arquis de
M ondejar *, q u e j ’actendz avec désir, et me faict u n m alvais to u r de tant
ta r d e r ; car il m e forelot d ’aller si tost à Rome, com m e je vou ld ro y e , n ’y
p o u v a n t plus aller dois la fin de ce m oys, p o u r la m u ta tio n de l’aër, j u s ques en octobre. J e faiz m on com pte d ’a c te n d re icy ledit M arquis, p o u r
l’h o n o r e r et recepvoir, et l’inform er de l’estat auquel je laisse les affaires
de ce R oyaulm e, et tost après p a rtir p o u r Gaete, p o u r j u s q u e s a u d it m oys
d ’octobre, q u e lors s’il plait à D ie u , je m ’e n c h e m in e ra y vers R o m e ; où et
en q u e lq u e p a rt q u e je soye je seray p rest p o u r o b é y r ses c o m m a n d em a n s,
lesquelz j ’a c te n d ra y avec désir.
* J e a n E sco b ed o , se c ré ta ire d u R oi P h ilip p e II e t de D on J u a n d ’A u tric h e . Il fu t a p p e lé p a r le Roi
à re m p la c e r a u p rè s d e so n frè r e n a tu r e l le s e c ré ta ire J u a n S o to , q u i e n tr e te n a it ch ez son m a ître les
p rin c ip e s d ’u n e a m b itio n d é m e su ré e . E sco b ed o to m b a m a lh e u re u s e m e n t d a n s le m êm e tr a v e rs . A u
m o m e n t d e son r e to u r d es P a y s-B a s à M a d rid , l’a s sa s sin a t d ’E sc o b e d o fu t ré so lu . A n to n io P c re z fu t
ch o isi p o u r e x é c u te r en se c re t c e tte ré s o lu tio n . E lle le fu t a p r è s les P âq u e s d e 1 5 7 8 . V o ir, à ce s u je t,
L a s obras y rclaciones de A ntonio P crez; Mit.n o t , A ntonio P crez et Philippe I I , le m a rq u é de P id a l,
P hilippe I I , A ntonio P erez et le royaume d ’Aragon, tr a d u c tio n d e J.-G . M agnabal ; A n t o n i o P e r e z ,
Relationes, Cartas, etc. L a c o rre sp o n d a n c e d ’E scobedo av ec D o n J u a n e s t c o n serv é e à la B ib lio th è q u e
r o y a le à la H ay e. V o ir B ulletin de la Commission d ’histoire, l re s é r ie , t. X III, p . 1 7 1 .
* D o n In ig o L opez H u rta d o de M e n d o za, m a rq u is d e M o n d e ja r, fu t n o m m é V ice-R oi de N ap les e n
re m p la c e m e n t d e G ra n v c lle , e t p r i t po ssessio n d e sa d ig n ité le 10 ju ille t 1 5 7 8 . Il y r e s ta j u s q u ’e n
1 8 7 9 , lo rsq u e p a r su ite d e sa c o n d u ite v is-à -v is d e G r a n v e l l e , d e D o n J u a n , q u i le m en aça d e le
p o ig n a r d e r u n jo u r , e t
à
la s u ite d e c e rta in e s in trig u e s , il f u t o b lig é d e se r e t i r e r .
de N aples, t. IV , p . 3 4 4 , e t
V on R e u m o n t ,
V. G u nno,
Neapel unler spanischer H erschaft, t. I l, p . 3 5 8 .
Histoire
324
CORRESPONDANCE
LXXXVIJ1.
L E P R É V Ô T M O R IL L O N AU C A R D IN A L DE G R A N V E L L E .
. (liibliothèque de Besançon. — L eU res de d iv e rs, t. III, fol. 81, 8a.)
B ru x e lle s , le 5 ju il le t 1575.
M onseigneur. J e seray b r e f au x lettres de Voslre lllme et R me Sgrie du
d e rn ie r May, bien saichant q u e icelle ne sera sans gran d z empescliemenlz
à l’arrivé de son successeur, et m ’est u n g pleisir indicible de veoir et
cognoistre, p a r lesdites lettres, celluy q u e Vostre Illme Sgrie receoipt de ce
chean g e m en t, laquelle est he u re u se de lesser ce go u v e rn e m en t tan t floris­
sa n t et e ntier, au con te n tem e n t de Sa Majesté et ceulx du ro y a u lm e q u i ont
g ra n d e cause de p le u re r vostre p a rle m e n t : car ilz sçaivent ce q u ’ilz d é f i s ­
sent, et ne sçaivent ce q u ’ilz a u ro n tj E t au prim es regretteront-ilz vostre
absence si l’e nnem i les assaille l’an qui vient, s’ilz ne tre u v e n t au successeur
la providence, vigilance et diligence desquelz at usé en tout tem ps Voslre
| | | m e Sgrie, a ia n t r e m b a rr é l’ennem i avec d o m m a ig e ; de sorte q u e encoires
q u ’il lieut m au v a ise volunté, il n’at osé m o rd re . Voslre séjour seroit fort
bon à Rom e, si polriez p rév e n ir les g randes c h a lleu rs; mais je c raindz qu e
vostre su c cesseur viendrat tard, et q u ’il ne vous eu d o n n e ra t le moien. L ’on
d it q u ’il faict b o n à Gaieta et q uelques aultres lieux d u roiaulm e; et fera
fort bien Vostre IIlmo Sgrle de se régaler et d o n n e r q u e lq u e peu de bon
tem ps, se t ro u v a n t descom brée de ta n t de traveil. La lettre de Sa Majesté
du ve d ’April, ad ce qu e j ’a y veu p a r les vostres, ne povoit estre m illeure,
et m e faict e sp érer q u e ce de Monsr vostre n e p v e u r se fera. Le b ruict croit
jo u rn é le m e n t de vostre allée en E spaigne et se c o n fe rm e par lettres de là et
d’Italie. Je m ’a rre ste ray ad ce q u e m ’en d ira Voslre Illme SgrieMonsr de B e rla y m o n t est tel q u e vous dites; il hoigne * merveilleusement
s u r ce ces cent ducatz dim e m b re z de Haulx
Que d ira -t-il si le surplus
1 Hoigne, g ro n d e .
* H aulx, lia i.
DU CARDINAL DE GUANVELLE.
525
vad le m esm e c h e m in ? Certes l'in g ra titu d e des S eigneurs at esté tousiours
gran d e . J ’ente n d z q u ’il s’en est plainct au C o m m e n d a d o r M aior; mais cela
em p o rte peu, et il fault faire com m e Vostre lllme Sgrie dict, son proulTict de
l’u n g et l’aultre et aussi de Monsr le P résident, q u e j ’entretiens de tout ce
qu e je p u is; mais je m ’y fie tout a u lta n t com m e a u x susdits.
J ’espère q u e ce de p a lria 1 se p ortera bien, selon q u ’aurez veu par mes
deux lettres précédentes, et encoires m ie u lx y a llant Monsr Ilic h a rd o t * qui
at acquis b o n n e rép u ta tio n en la révision de Balbani *, en laquelle sont esté
cassé deu x sentences ren d u e z p a r ceulx de B rabant, révocatoires l’une de
l’autre, à sçavoir la seconde d e la prem ière, au g ra n d regret des p r in c ip a u lx
conseilliers qu e réc lam a re n t lors et p ré d ire n t q u ’il en a d v ie n d ra it de
l’escla n d re ; mais le C hancellier * et l’advocat fiscal s la passarent tout o u ltre , et d ict-l’on m a in te n a n t qu e la seconde sentence fut escripte de la
m ain d u d it fiscal, n o n o b s la n t q u ’il avoit servi et advisé p o u r l’un e partie.
E t se p la in d e n t o u v e rte m e n t les conseilliers de B r a b a n t d u d it Chance­
lier, q u ’il a t très mal a d m in is tré la justice, m ec tan t tout en confusion
et v e n a n t pe u au conseil, si ce n ’est q u a n t il veult fabvoriser q uelc’ung;
et q u a n t il y vient, q u e lors il faict plus d ’em p e sc h em e n t q u e d ’a d v a n c h e m ent en la justice. E t en est le m alcontem ent si g ran d , q u e des seize c o n ­
seillers, les n e u f ou dix sont estez conform ez avec h u ic t seigneurs réviseurs,
q ui sont estez bien esbahiz d ’e n te n d re q u ’il y at si b o n n o m b re de gens
sçavants a u d it Conseil et si mal co rre sp o n d u de son chief, qui p révéanl ce
q u ’en a d v ie n d rait, s’est r etiré d e b o n n e h e u re en Anvers*. Car il n ’heust ouy
chose q u e luy he u st pieu, et v ie n d ra t encoires en tem ps p o u r a v o ir la teste
1 De p a lria , c’e s t-à -d ire d e la B o u rg o g n e.
’ J e a n R ic h a rd o t.
3 T h o m a s B a lb a n i, fin a n c ie r ita li e n , é ta b li à A n v e r s , y c ré a u n e S o ciété so u s le nom de F ra n c isc o
B a lb a n i, frè re s e t e n fa n ts. A u m o m e n t de p a r t i r p o u r l’Italie , il a v a it fait, e n 1B 73, d e s c o u tr a ts a v e c
Ja c o m o e t A u g u s tin L e rc a ro M onelia. De ce c h e f il fu t p o u r s u iv i e t c o n d a m n é , e n 1 5 6 7 , p a r le t r ib u ­
n a l d e l ’é c h e v in a g e d ’A n v e rs , ju g e m e n t q u i fu t con firm é p a r le C onseil de B ra b a n t. lin e s e n te n c e de
r é v is io n , p ro n o n c é e p a r ce C o n s e il, le 1er ju ille t 1 5 7 5 , ré fo rm a e n tiè re m e n t les d e u x ju g e m e n ts p r é ­
céd en ts. (R e g is tre 6 5 , fol. 1 e t su iv ., d u C onseil de B r a b a n t.)
4 J e a n S ch y fv e. V o ir sa n o tice t. I, p . 2 9 7 .
6 J e a n -B a p tiste d e B oisschot. V o ir p lu s h a u t, p . 5 5 .
6 J e a n S ch y fv e se r e tir a en effet d ’A n v e rs , m ais il d o n n a sa d é m issio n de c h a n c e lie r s e u le m e n t e n
4 5 7 9 , e t re sta sim p le c o n s e ille r.
326
CORRESPO ND ANC E
bien lavée. Hz d ien t q u ’il d e m a n d e grandes m ercèdes, gaiges et pensions
p o u r sa retraicte, et q u ’il m érite plustost u n g syndicat et d’estre destitué
honteusem ent. E t q u e q u a n t il n’y auroil qu e ce d ’Anvers, où il s’est si mal
conduict, estant cause de la ru in e de la ville, q u ’il y a u ro it assez d ’estoufTe
p o u r le bien p lu m e r
Monsr d’A ndelot* est parti avec Saincl-Mauris s, si tost q u ’il sceut que
Besançon avoit esté occupé p a r les b a n n i z , lesquelz au m esm e instant
Monsr de Vergy [qui de bon n e h e u re y estoit] chassa d e h o rs ; et dit l’on
q u ’ilz sont estez tuez xi ou xu , et prin s xv ou xvi, qui d iro n t leurs com ­
plices en la ville et dehors. Certes le Roy a bien occasion, estant ceste cité
enclavée dans son pays et au millieu d’icelluy, d’y d resser ung fort p o u r sa
conservation, com m e je l’ay dit au Président Viglius, qui c rainct l’Em pire,
auquel l’on polroit d o n n e r c o n te n te m e n t et d e m a n d e r congié q u a n t le fort
seroit en delTense. Il faict à croire q u e les F rançois et les Suysses a u ro n t
heu p art à ccste em prinse, qu e s’est dressé vers la S ain ct-Je h a n , lorsque
l’on est accoushim é de renouveller le m agistrat.
Il y a huict j o u r s q u e le S e ig n e u r Don F e r n a n d e et Madame la Contesse,
vostre sœ ur, a rriv a re n t icy. L’on les at logié en vostre c h a m b re, p o u r ce
qu e ledit se igneur ne peut m onter. Il se p o rte assez bien, Dieu m erci, et
do ib t sa vie à ladicte Dame, q u e en lient a u lta n t de soing com m e de la
sienne propre. Hz s’e n tr ’a im e n t gran d e m en t. Ilz sont partiz p o u r Anvers,
et les altendons dans u n g j o u r ou deux. Dieu d o in t q u ’ilz puissent o b te n ir
bon n e a ssignation; et sont assez bien paiez en Bourgoingne. Hz vivent
ehéans à leurs fraitz, sa u lf le p re m ie r seoir q u ’ilz a rriv are n t, et le mesm e
se faict q u a n t ilz pa rte n t, si c’est après disner.
J e vouldroie veoir ce de Gennes * bien appaisé et q u e le R oy s’y résolvit.
1 J e a n S chyfvc d é b u ta e n 1841 p a r u n e p la c e d ’éch e v in d ’A n v e r s , p u is p a r celle de b o u rg m e stre
île la m êm e v ille e n i 5 4 5 . C’est sa n s d o u te à ces d e u x fo n ctio n s q u e M orillon fa it a llu sio n en l'a c c u sa n t
«l’ê tr e la cause d e la r u in e de sa v ille n a ta le .
’ F ra n ç o is C oligni, Sr d ’A n d e lo t. V o ir sa n o tice, t. III, p . 8 9 . — La s u r p r is e d e B esan ço n , d u 21 ju in
1 5 7 5 , est ra c o n té e d a n s les Mémoires et documents inédits de. la Franche-Comlê, t. I, p p . 5 6 6 e t su iv .
5 Ja c q u e s d e S t. M aurice ou M a u rise, p r ie u r d e B e llefo n tain e. V o ir p lu s h a u t, p p . 1 5 0 , 19 2 .
1 M orillon e n te n d p a r le r des a g ita tio n s d e G ên es, q u i o b lig è re n t P h ilip p e II à y e n v o y e r u n e esc a d re .
Ces ag ita tio n s a v a ie n t p o u r p rin c ip e les lu tte s e n tr e les n o u v e a u x e t les a n c ie n s n o b les. T o u te s les p u is ­
sa n c e s s’y e n tr e m ire n t p o u r te r m in e r ces tr o u b le s p a r la c ra in te q u e l’u n e d ’elles n e p û t s’en p ré v a lo ir
p o u r s ’e m p a re r d e c e t É ta t.
DU CARDINAL DE GR AN VEL LE .
527
J e pense b ien q u e les F rançois n ’y d o r m e n t ; mais com m e Vostre lllme Sgrie
dit, ilz sont bas, et ju sq u e s ores y at y peu d ’app a re n c e d ’accord : les ennem itiez et partialitez y sont trop grandes. L’on al dit icy le Roy et le sieur
D a m v il le 1 inortz, mais il n’en est rien.
J e louhe Dieu q u e le T u r c ne arrive ceste année, et je luy prie q u e cela
ne soit cause q u e l’on m a in tie n n e ici la guerre.
Monsr de Hierges at p a r a p p o in c le m e n t rec o u v e rt la ville et chasteau de
B uren * après les avoir canonné. Hz avoient faulte de beaucop de choses, et
e s to ie n tsa n s chief, a ia n t le capitaine esté tué peu de jo u rs a u p a ra v a n t d ’u n g
g e ntilhom m e. Les soldatz s o n t sortiz à enseignes desploiéez, et ont em porté
le leur. Ledit Sgr at fort bien traicté les bourgeois, ra p p e la n t ceulx q u ’estoient de h o rs et leur r e n d a n t leur bien. Cela polroit m o u v o ir ceulx de Bommele et aultres villes, si l’on les traictoit b ie n ; car ilz sont soucqz 5 et las de
la guerre. L ’on b a t p ré s e n te m e n t G orcum . Si elle se recouvre, l’on tie n d rat
de plus c o u rt ledit Bommele. L’on at in c o n tin e n td e sp e s c h é c o u rrie re x p re s s e
au R oy
Dieu d o in t q u e cecy ne re n d e plus insolentz les Espaignolz, que
n ’o n t volunté de s o rtir. Le C o m m en d a d o r et Roda en sont fort enlïlez.
L’on d it q u e le sieur de B u re n 5 at esté aux exlresm es en E spaigne.
J ’entendz q u e Vlonsr de Rassenghien 0 escript q u ’il y at peu d ’espoir
' H e n ri II d e M o n tm o ren cy , m a r é c h a l d e D am v ille, g o u v e rn e u r d u L an g u ed o c, a p p a r te n a it a u p a r ti
d e la lib e r té d e co n scien ce e n F ra n c e . II s ig n a , le 10 fé v rie r 1 5 7 5 , le tr a ité d ’u n io n e t c o n fé d é ra tio n
d e s ég lise s p r o te s ta n te s , à titr e de c h e f e t g é n é ra l des c a th o liq u e s e t r e lig io n n a ire s u n is d u M idi.
(S is m o n d i,
Histoire des Français, t, X I II , p p . 3 7 1 , 3 7 2 ;
t. I, p . 2 31 e t
D uchesne,
D e C roze,
Les Guises, les Valois et Philippe I I ,
Histoire de la m aison de M ontm orency.)
* Le siè g e d e la v ille e t d u c h â te a u d e B u r e n , co m m en cé le 19 j u in 1 5 7 5 , e s t ra c o n té d a n s tous
ses d é ta ils p a r P . B o r , liv . V III, fol. 120. D ’a p rè s c e t a u te u r , les assiég és o n t q u itte la v ille sa n s ta m ­
b o u rs n i en seig n es d é p lo y é e s . Ce p o in t e s t con firm é p a r la r e la tio n d e
to u t à fa it co n fo rm e à celle d e P .
Bor.
M endoça
( t. I I , p . 2 9 9 ) , q u i est
La v ille, p ris e d ’a s sa u t le 2 0 j u i n , fu t e n tiè re m e n t saccagée p a r
les v a in q u e u rs . L e c h â te a u , r e n d u le 2 8 , é ta it co m m a n d é p a r u n c a p ita in e q u i fit « fo rt p e tit d e v o ir » .
V o ir au ssi
G r o e n van P r in s t e h e r ,
t.
V,
pp. 236, 251, 260, 27 9 .
* S ont soucqz, e n a v o ir assez.
* R c q u e se n s é c r iv it au Roi les 2 9 e t 3 0 ju in 1 5 7 4 a u s u je t d e c e tte c o n q u ê te . V o ir la Correspon­
dance de Philippe I I , t. I I I , p p. 3 3 7 , 3 3 8 .
‘ P h ilip p e d e N a s s a u , co m te d e B u r e n , fils d u p r in c e d ’O ra n g e , q u i fu t e n le v é d e l’U n iv e rsilé de
L o u v a in e t tr a n s p o r té en E sp a g n e e n 1 5 0 7 . V o ir t. I I I , p . 7 1 .
* M ax im ilien d e G an d , d it V ilain , b a ro n de R a sse n g h ien , g o u v e rn e u r d ’A rto is. V o ir p lu s h a u t, p p . 7
e t H . Il faisait p a r tie d e la J u n te co n v o q u é e à B ru x e lle s d a n s le b u t d ’a v is e r s u r l 'accord ou les n é g o ­
c ia tio n s d e B rcd a. C’est à c et accord q u e M orillon fa it a llu sio n , e n d is a n t q u e le b a r o n d e R a sse n g h ien
328
CORRESPONDANCE
q u a n t à l’accord. T outtefois noz députez sont encores à Breda. Son E xc u0
ne veult rien céder en la religion, disant q u e si Sa Majesté le veuille faire,
q u e ll e le face p a r u n g a u ltre qu e p a r luy : en ce q u ’il dé m o n stre son bon
zele '. Touttefois, noz Évesques sont estez d ’advis qu e l’on cédât q u e lq u e
chose, affin de p o uvoir ta n t m ieulx gaigner les âmes et r e p la n te r l’ancienne
foy, estantz p lusieurs des rebelles las de la nouvelle. E t o n t dit lesdits
Évesques qu e si l’on d e m a n d e advis à Rom e ou ailleurs, q u ’ilz se tiègnent
seurs que leur opinion sera treuvée bonne. Monsr le D uc d ’A rschot aiant
receu lettres de Son E x c cc s u r ledit accord, est venu de Louvain icy p o u r
l?s c o m m u n ic q u e r à Monsr de Sainct-Bavon. J ’e n te n d z q u ’il at fort pressé
p o u r veoir l’instruction envoié s u r ce p a r Sa Majesté, estant d ’advis q u e si
elle ne conlonoit aultres poinlz secretz pardessus ceulx qu e l’on avoit dit,
q u e l’on les c o m m u’n icq u it aux députez des villes d’Hollande ; et com m e le
sieur Roda afferma q u ’il n ’y avoit p o in ct dadvantaige, q u e ledit Duc luy
d e m a n d a si ledit Roda avoit bien peu veoir lesdites instru ctio n s, et luy
poinct.
11 y at lieu en Anvers g ra n d e d o u b le d ’ung m assacre, com m e celluy de
Pa ris, p a r ce q u ’u n g m areschal avoil dit q u ’il avoit esté req u is de c o m ­
m encer la besoingne, de sorte q u e plusieurs n ’o n t osé d o r m ir de n u ic t; ce
q u e a ianl sceu Son Excce, elle en at esté fort fasché, et je tiens q u e c’est
p o u r cela q u ’elle at m andé lebeaul-frère* p o u r p r e n d re in form ation, encoires
q u ’il soit peu en gré, a ia n t parlé librem ent, ou p lu sto st in d iscreltem ent en
aulcungz poinetz c o ncernante l’a u ctorité du Conseil d e B r a b a n t ;d e sorte que
il at c o u rru u n g b ru ic t q u e l'on le vouloit serrer, d o n t je ne le plaindroie
ta n t com m e sa femme et enffantz, sans lesquelz je m ’en donneroie peu de
peine, luy a ia n t souvent p réd ic t q u e son a m bition et avarice le p e rd ro ie n t
q u e lq u e j o u r , et qu e ceulx desquelz il se faisoit m in istre en u n e charge
n ’y c ro it p as. Il fut aussi d u n o m b re des c o m m issa ire s d é p u té s a u x n ég o ciatio n s d e B re d a . V o ir la
Correspondance de Philippe I I , t. III, p p . 5 7 7 à 8 8 1 .
1 D ans les in s tru c tio n s d o n n é e s au x d é p u té s belges à la co n féren ce de B r e d a , il e s t d it : « L e u r
p o u r re z (aux d é p u té s d es p ro v in c e s in su rg ées) d é c la r e r en g é n é ra l q u e , en d e m a n d a n t ch o ses r a is o n ­
n a b le s e t q u e S. M. le u r p e u lt a c c o rd e r, sa n s o ffen ser l’h o n n e u r d e D ie u e t la re lig io n , le u r s e ro n t c o n ­
se n tie s ». (Correspondance de Philippe I I , t. III, p. 5 8 7 .) V o ir au ssi, a u su je t d e la q u e stio n d e la lib e rté
d e conscience, ibid., p . 1 9 2.
1 Le b c i u - f r è r c de M o rillo n , D id ie r v a n T ’S estich , d o n t la n o tice se tro u v e a u t. I, p. 2 7 4 .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
si odieuse, le p a ieroient de la m onnoie q u ’il m érito it; mais il esl trop à
sa teste.
L’on d it q u e M ondragon at tiré p a r les oreilles et d o n n é soufilelz au
secrétaire de La T o rre \ qui est com m is de p a r Sa Majesté p o u r e n tre v en ir
avec noz d é p uiez à l’accord. Si l’on traicle ainsi ceulx q u e sont de la nation,
q u e ferat-on aux au lires a u x q u e lz l’on p o rle si peu d ’affection? Certes ung
tel l'aict ne d e v ro it pas d e m e u re r im p u n y .
Le d e rn ie r du mois passé to m b il aux Carmes d ’Anvers q u e lq u e vousure
et lua q uelques gens, environ trois heures après q u e Son E xcce y avoit
passé; et n ’y at faulle de gens qui osent dire q u e ce at esté chose m achinée
contre Son Excee si elle se fust bien adressée, ou p e u lt eslre plus lost preste.
L’on dit qu e Son E x c ce est fort mal contente co n tre ceulx d e G a n d e l Bruges
p o u r le faict des aides, q u e larde bcaucop et q u ’elle sent g r a n d e m e n t; car
les debles croissent, el d o ib t-o n aux Allem andz seulz six millions, s’eslantz
rappaisez ceulx q u ’estoienl à D eventer p a r u n g p re s t; et nous en avons
aussi icy qui g a rd e n t la p o rle de C a u b e rg h e; ce q u ’est suspect à plusieurs.
E t Monsr de C h a m p a ig n o y m ’at prom is q u e s’il e ntend q u e lq u e dangier, il
m e p réadvertira en temps. P o u r rev e n ir à ceulx de Flandres, a iant e n te n d u
Paullre j o u r Son E x c ce q u e les d é p utez desdictes villes esloient devant sa
c h a m b re d e m a n d a n lz a u dience, il se nieict en g ran d e cholère, les ap p e llan t
veillacos *, et déclarant q u ’ilz avoienl com m is crim e de lèse-Majesté, et q u ’il
les p u n iro it com m e lelz, c o m m a n d a n t à d’Assonleville de le leur aller dire,
et ne fut contente de luy de ce q u ’il s’en excusa; et d it- l’on q u ’eslant la
c h a m b re ouverte, lesdits députez e n te n d ire n t fort bien le langaige q u ’on
tenoit d ’eulx, et q u ’ilz estoient mal contentz q u e l’on les c o n d a m n o it p o u r
telz sans les o u y r. Et faict à c ra in d re qu e encoires q u e Son E xcoe soit m eute
de ju ste s raisons, touttefois cecy polroit causer g ran d e altération, s’il se faict
hors de term es de justice.
' Ja c q u e s d e la T o r r c , se c ré ta ire d u C onseil p riv é e t du C onseil des tr o u b le s , m o rt le l rr fé v rie r
1ÜS1. Il é ta it fils d e F ra n ç o is e t de M a rg u e rite de Mil, e t v it le jo u r à B ruges, o ù so n p è re é ta it é ta b li
à ti t r e d e c o n su l d e la n a tio n esp ag n o le.
'
Veillacos, v ila in s, h o m m es de r ie n . C’é t a i t , d it-o n , le lan g ag e d o n t le D uc d ’A lbe s ’é ta it se rv i a u
m o m e n t d es r e p ré s e n ta tio n s faites p a r les É ta ts c o n tre le 1 0 ' d e n i e r , m ais il ne se m b le p as a v o ir été
a u ssi in c o n v e n a n t. D ’a p rè s les d o c u m en ts, le D uc d 'A lb e se s e ra it b o r n é à d ir e a u x d élég u és des É ta ts
d e F la n d r e : • D asla, B a sla ! » (S uffit! suffit !) (B ulletin de la Commission d ’histoire, 4 e sé rie , t. X I, p. 2 5 0 .)
T
ome
V.
42
CORRESPONDANCE
350
II y at bien l x voleurs au pais de Liège qu e font beaucop de m aulx.
m enassanlz de, à le u r p a rle m e n t vers les rebelles, piller quelques églises et
m onastères. Hz ont u n g chief, et ne se ose tenir Monsr de Liège sinon avec
guect et garde à Curenge.
LX XXIX .
L E P R É V Ô T M O R ILL O N AU C A R D IN A L D E G R A N V E L L E .
( B ibliothèque d e Besançon. — L ettres d e d iv e rs , I. III, fol. 8 8 ,8 9 , 9 5 à 9 7 , 108, 112, 113, 116, 1 2 1 ,1 2 5 .)
B ru x e lle s , le H
ju ille t 1 5 7 5 .
M onseigneur. Je re s p o n d ra y a u x lettres q u e Vostre IIIme et Rme Sgrie,
publicorum d u v° d u mois passé, mais non selon le désir q u ’elle a de l’accord
et de veoir ce povre païs à re p o s ; car l’on ne veult p re n d re le chem in p o u r
y p arv en ir, n y suivre ce q u e convient p o u r le service du m aistre et bénéfice
de ses Estats. L ’on a ttend la d e rn iè re response ' des députez du P rin c e
d ’Oranges, vers qui estoit allé V anden D o rp e * ; m ais l’on n’en a ttend a u lc u n g fruict, et ad ce q u e m at d it Mr le Conte, vostre b e a u l-frè re !, Son l*.xcC0
en at peu d ’espoir. J ’altendoie u n e a b stinence de g u e rre ; mais B erty me
dict que Son Excce n’en veult poinct si l’on n ’en chasse les prédicanlz, et
q u e nous avons heu la paix en nostre m ain, mais q u e l’on n’en veult poinct.
Les députez d u d it Prince, qui sont catholicques, o n t prié q u e p o u r Dieu
l’on ne insistist p o in ct tan t s u r ce de la Religion * ; q u e l’on se conlentit p o u r
le com m e n ce m e n t q u e l’ancienne Religion c a th o lic q u e fût remise, et que
beaucop de gens de bien, q u e sont sortiz d’H o llan d e e tZ e e la n d e , y r e to u r nissent, et qu e bientost ilz seroient les plus fortz, et q u ’estanlz pourveuz
de bons p rescheurs, les m aulvais se retire ro ie n t d ’eulx m esm es: mais cesluy
1 V oir c e lte r é p o n s e au x A n n ex es.
* A rn o u l V a n d e n D o rp e. V o ir p lu s h a u t , p. 8 0 .
‘ F e r d in a n d d e L a n n o y , com te de La R oche.
1
L es d isc u ssio n s so u le v ées à p ro p o s de la re lig io n p e n d a n t les n ég o ciatio n s à B rcda so n t re p ro d u ite s ,
d ’a p rè s H aræ u s, d a n s
D i e r c x s e .n s ,
Anlvtn-pia Christo nasccns et crescens , t. III, p a r t. I, p p .
2 5 7 et su iv .
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
331
advis n’at eslé gouslé. E t c e p e n d a n t le peuple, q u e se désespère, rejette la
faulle s u r les évesques et ecclésiastiques et p rin c ip a le m e n t s u r les Jésuites
d ’Anvers, où ces jo u rs passez il y at lieu u n e si g r a n d e d o u b le d ’u n g m as­
sacre, q u e à tel j o u r il en s o n t sorti plus de 4 0 0 0 ; et m esmes m ardi de rn ie r,
lorsque Son Excce vint icy p o u r achever son voiage à Haulx *, il e n sortit
p lu s de 5000 qu e sont allé en F la n d re s, à Lire, Malines et u n e p a rtie icy.
E t dil-l’on q u e cela vient p a r les indiscretz propos d ’u n g Cordelier, q u i dit
q u e si l’on ne povoit a voir paix, q u ’il falloit se faire q uicte des héréticques,
com m e l’on avoit faict à P aris. Aultres dien t q u ’il est procédé des Jésuites
aultres, qu e le doien de T a x is 5 l’a u ro it dit : tant y at q u e l’on ne sçauroit
hoster ceste a p p ré h e n s io n au peuple, c o m bien q u e Son Excce s’en soit ressenlu, a iant faict ten ir p lu s ie u rs inform ations. L ’on estim oit q u e Son E xc C0
debvoit h ier r e to u r n e r en A nvers; mais ce ne sera si tost, p o u r ce q u ’elle se
trouve mal d ’u n e ja m b e . L’on dit que c’est la rose *. Elle fut saignée ven­
d red i; l’on l’at trouvé deffaicte et de c oleur maulvaise. J e ne l’ay v e u ; c a r je
ne lu y sçauroie q u e dire, ne fust p o u r vostre assignation et to u ch a n t les
a rbres d ’Aflleghem. Mais l’u n g et l’aultre seroit p eine pe rd u e .
Les Espaignolz sont fort enlïïez d ’avoir regaigné B u re n , et l’appellent
u n g pays en tie r et conté, et d ie n t q u ’ilz a u ro n t bien tost to u t le d e m e u ra n t
d ’Hollande L’on y at lieu q u e lq u e s pratiques su r Vlissinghe et E nc h u se n ,
com m e l’on avoit s u r B uren, laquelle seulle at adressé \ L’on y at trouvé
* C’é ta it u n e e r r e u r , fo rm e lle m e n t c o n tre d ite p a r un passage r e p r o d u it p lu s h a u t, p . 5 2 8 .
' L e G ra n d C o m m an d eu r a v a it fait un p è le rin a g e à N o tre -D a m e de lia i.
5 J e a n R o g c r T a x is , d o y e n d ’A n v e r s ,
né à M alines e n 1 3 1 5 , p ro lo n o ta ire a p o s to liq u e , p ré v ô t de
S t-P ic r r c à L o u v a in , n o m m é doy en à A n v ers en 1 5 i 5 , m o rt en ce tte v ille le 14 m a rs 1 5 9 5 . V o ir d e
R
am
,
Synopsis actorum ecclesiœ A nlvtrp ien sis, p. 145, et p lu s h a u t , p. 105. S elon R c q u c s e n s , le p ro je t
d u m assacre à A n v e rs a u r a it é té co n çu p a r les E sp ag n o ls. « O n a lla , d it - il , j u s q u ’à fa ire c o u r ir le b r u it
* q u e les E sp ag n o ls v o u la ie n t r é u n ir les C a th o liq u e s c o n n u s au x gens d e g u e r r e p o u r tu e r u n e n u it
» to u s ceu x q u i é ta ie n t su s p e c ts en m a tiè re de re lig io n , à l’im ita tio n d e ce q u i se fit à P a ris, il y a
» tr o is a n s . • ( Correspondance de Philippe H , t. III, p . 5 4 5 .) P lu s lo in il c o n sta te q u e le p u b lic l’a c c u ­
s a it d ’ê tr e lu i-m ê m e l’a u te u r de ce p ré te n d u p ro je t d e m assa c re . Q u a n t a u m a g is tra l d ’A n v e r s , il
d é c la ra d a n s u n e p ro c la m a tio n q u e c’é t a il u n e in v e n tio n d e m a u v a ise s gens.
* Rose, l ’é ré sip è le . (D ic tio n n a ire liég eo is, t. Il, p . 6 1 1 , verbo R6*s.)
s D an s u n e le ttre d a té e d u 2 9 ju il le t 1 5 7 5 , le Roi d it q u ’il se r é jo u it d e la p ris e d e B u re n e t des
îles d e K lu n d e rt e t F ijn a a r t. Il en a é c r it à d e H ie rg e s e t à M o ndragon p o u r le u r e x p r im e r sa s a tis ­
fa ctio n . (Correspondance de Philippe / / , t. I II , p p. 5 4 5 , 5 4 6 .)
* Adressé, réu ssi.
352
CORRESPONDANCE
p e u d'artillerie; car le Prince n’en al tenu cas, et sans la poursuite im p o r­
tu n e d’a ulcuns bourgeois altérez, il ne s’en fut saisi, bien saichant q u e l'on
ne toucberoit à cecy q u ’estoit à son (ilz. L’on avoit bien espéré q u e après
Buren gaignée, I on se fut attaché à G o rckem , et plusieurs ont opinion q u ’ilz
heussent traicté. Mais les Espaignolz client q u ’ilz en ont assez faict p o u r une
fois, et se sont retirez à R henen et A m m ersford, aianlz touiours la de n t sur
Utrecht.
Mondragon at jecté les ennem iz hors de C lundert et F i n a r t ; car com m e
l’aoust approche, il se trouve volentiers avec ses gens à la moisson q u ’il
sçaurat fort bien rev e n d re au paysant. T o u t le m onde se m alcontenle fort
de luy, p o u r ce q u ’il at tiré par le nay et les oreilles le secrétaire de La
T orre, et q u ’il luy at d o n n é des soullletz.
L ’on faict c o u rir le b ru ic t q u ’il tient au P rin c e qu e l’accord ne se faict,
p o u r ce q u e les consisloriaulx n’y veuillent a u lc u n e m e n t en te n d re; mais
c’est tout le c o n tr a ir e : car luy ne désire q u e la paix p o u r recouvrer son
bien, et les villes d ’Hollande et de Zeelande sont lasses de la g u e rre ; et l’on
dit q u ’il y at q u e lq u e dissention à D ordrecht, et qu e l’on Iraveille les villes
d ’Ilollande p o u r d o n n e r spellegell 1 à la princesse n o u v e l l e d e laquelle le
P rin c e faict grand cas. E t touttesfois sa fem m e veit et est p riso n n ière au
chasteaul de Bilstein, q u ’a p p a rtie n t à ceulx de Nassau s. L ’on dit qu e le Duc
Auguste * se m alcontente fort de ce nouveau m ariage.
Les députez des Estats de B ra b a n t a tte n d en t le re to u r de Son E x c ce en
Anvers, laquelle y at tenu des g ra n d z consaulx de guerre. L e b e a ul-frère
de Vostre Illme Sgrie 8 luy at faict des bonnes rem o n stran ces, s u r ce q u e I on
b ru ic t q u ’ilz sont apperceuz SOOOreyters et soissante enseignes de piedtons,
’ Spellrgelt, a u jo u r d ’h u i spetdyeld, q ui signifie m ot à m o t : a r g e n t d ’é p in g le, c’c si-à -d irc a rg e n t p o u r
les m en u s p la isirs.
* L ouise J u lin n e , née le 51 m a rs I5 7 ti, m o rte le S m a rs 1 0 7 4 . (V o ste rm a n , van O y en , p. 10K.)
5
G u illa u m e , p rin c e d ’O ra n g c , a p rè s a v o ir ré p u d ié A nne de S a x e , sa seconde fem m e, a v a it ép o u sé
le 12 j u in 1S7K C h a rlo tte d e B o u r b o n , fille de L o u is , d u c de M ontpcnsicr. E lle m o u r u t le 5 m ai
1 8 8 2 . (V o sterm an , v an O y en , p . 102).
4 L ’é le c te u r d e S a x e , oncle d ’A nne, a v a it o b te n u q u ’e lle lui fût re m is e . Il la fa isa it g a r d e r à D re sd e ,
où elle d écéda le 18 d é c e m b re
p . 102.)
* D on F e rn a n d de L a n n o y .
1577 d a n s d e g ra n d s se n tim e n ts de p ié té . ( V o s te r m a n , foc. c/7.»
DU CARDINAL DE GR AN VEL LE .
355
el q u ’il s’en ressam ble cincqitanle aultres du coustel de Mésières et de
S e d a n ; q u e cela p o u lro it a d v e n ir après la moisson, el qu e les e n n e m y z se
p o lro ie n t jecter au c u e u r d u pays, et q u e lors se verroit g ran d e confusion,
p o u r ce q u e les villes ne vouldroient recepvoir garnison p o u r ce q u ’il les
fauldroit paier, ou estre en d a n g ie r d ’en estre pillé; et q u ’estant Pennem y
au pays, il ne fauldroit p o u r nous p erdre sinon une m u tin erie des E spaignoilz ou A llem andz ou de W a llo n s ; et q u e lors l’on seroit bien en peine
p o u r tre u v e r arg e n t ou c ré d it; mais telz advis ne sont aggréables.
J e m ’espouvanle de ce q u e m ’at dit Berly du C o m m en d a d o r Maior, disant
q u e soubz la cappe du ciel il n’y at chose plus inepte et stu p id e et m oings
convenable p o u r g o u v e rn e m e n t q u e lu y ; q u ’il n e n te n d rien en la guerre,
q u ’il n’y a ta u l c u n e providence et q u e quasi il se mectoit en c a m paigne en
aussi povre é q u ippaige q u ’il avoit envoie Hierges, q u ’estoit sans argent,
artillerie, po u ld re et vivres; de m anière q u e ledit Hierges luy m an d il absolu em ent q u e s’il ne le p ourvéoit de ce q u ’il avoit de besoing, q u ’il lesseroit
tout là. Berly d it q u ’il d u i t bien p o u r am ba ssa d eu r, p o u r bien a d v e rtir et
diligem m ent, q u ’il est p o u r conversation, mais poinct p o u r g ran d z affaires;
q u ’il est avare et m inclion 1 ju s q u e s à to u t; ce q u ’il d e m o n stre veuillant
vendre, com m e m ’at dit le P résident Viglius, les anciennes tapisseries de
la co u rt, qu e ne se deb v ro ie n l aliéner p o u r l’a n tiq u ité et histoires des faiclz
des seigneurs de Bourgoingne. E t certes l’on en m u r m u r e r a i fort; car il
sem ble que, p u isq u e tous les m eubles d u Roy se v e ndent, q u ’il veuille
q u ic te r le pays; et ce q u ’en v ien d ra i ne vault la peine \
Aussi dit B e rty q u e ce g o u v e rn e u r ne d e m a n d e rien tant qu e de p a rtir,
et q u ’il liayt ceste nation e xtrêm em ent, disa n t q u ’il n ’y at poinct u n g ho m m e
de bien et c a lholicque; et q u e Boda, q u ’est son âm e et qu e luy faict faire
tout ce q u ’il veult, est encore pire et cruel ; et dict q u e Pung et Paultre o n t
p a rlé pis des députez de G and et Bruges q u e ce q u e eo n ten o ien t mes d e r­
1 M inchon, m in u tie u x , p in g re .
• Le ju g e m e n t d e B e rty à p ro p o s d e R e q u csen s e s t co n fo rm e à
eclu i p o rté p a r de S t-G o u a rd .
Il est, d i t celu i-ci, d ’u n e faib le sa n té , « assez m al h a b itu é e t d isp o sé de sa p e rs o n n e p o u r p r e n d r e le
tra v a il r e q u is en si g ra n d e s affa ires ». Il le tie n t « p o u r u n h o m m e q u i ne sc acco m o d e ra pas m ic u lx
q u e le D u c ; il e s t en r é p u ta tio n de m e ille u r n é g o c ia te u r q u e de g r a n d s o ld a t; e t av ec to u t cela il est
p le in de fu m ée e t p ré so m p tio n e t p en se q u e n u l a u tr e ne le v a ille » . (B aro n
Huguenots el les Gueux, t. 111, p. 5 0 3 .)
K ervyn de L et te n iio v e ,
Les
334
CORRESPONDANCE
nières, et q u e le C o m m e n d a d o r al un e c o uslum e de vouloir in terpréter ce
q u ’il al dit et le pallier, a ia n t faict escripre p a r ledit Berty aux députez
su sd its ses excuses et q u ’il ne l’e nlendoit ainsi com m e eulx faisoient, avec
des inte rp ré ta tio n s bien c o rnues; mais il al affaire à gens qui sçaivent fort
bien qu e c’est à d ire m ino *. Il dil q u ’il est si cholère, q u e l’aultre jo u r il
d é m e n tit bien et beau u n g g e n tilh o m m e allem and q u e luy faisoit q u e lq u e
ra p p o r t au désadvantaige de q uelc’un d’Espaigne, luy disant q u ’icelluy estoit
p lu s h o m m e de bien q u e tous les A llem andz q u e sont au m onde. E t q u ant
ilz viègnent des eslrangiers, q u e lors il se dé m o n stre tel que, s’ilz avoient
q u e lq u e estime p o u r luy, ilz la p e rd e n t entièrem ent.
L’on lient icy p o u r certain qu e le seigneur Don Jo an avec le Marquis
de M ondejar * soient arrivez en Italie, et a ulcuns p a rlr n t q u ’il y auroit
e m p rin se s u r G enua. J e vouldroie q u e vostre successeur fut arrivé de si
b o n n e he u re q u e sans d a n g ie r de vostre santé, de laquelle deppend tant,
polriez eslre venu à Rom e. On m ’escript q u ’il y at de nouveau beaucop de
raillerie contre Voslre Illme Sglie de ceulx d ’Espaigne, qu e la tauxenl de p lu ­
sieurs charges, disanlz q u ’elle vad à Rom e, et que c’est Don Jo a n et le Ducd ’Albe qui lui o n t jo u é cesle baste 5, et q u e Don Jo an est allé exprès vers le
Roy p o u r se p la in d re de vous, d o n t je me r is ; car j ’ay bien veu le contraire
p a r ce q u e ledit Don J o a n a escript à Vostre lllmB Sgrie, de laquelle il at cer­
ta in e m e n t a u lta n t besoing qu e vous de luy, et beaucop dadvanlaige. Et
certes, Voslre IIIme Sgrie luy at escript com m e père, luy o u v ra n t les y e u lx
et d é m o n s tra n t com bien elle d e m a n d e sa g ran d e u r. Toutlefois Berty dit
q u e Roda al dict q u ’il avoit lettres d ’E spaigne q u e Voslre Illme Sgrie esloie
po u rv eu e de Sarragosse *,el q u ’elle alloil là p o u r gouverner, et q u ’il le disoit
avec tel visaige qu e l’on pouvoit f a c ile m e n t veoir q u ’il n ’y avoit grand
plaisir. J ’entendz q u e le C om m en d a d o r at d e m a n d é de Monsr de C ham paigney ce q u ’il avoit de Vostre lllme Sgrie, et en quelle sorte elle parloit de là,
et q u ’il avoit enchargé à son frère de te n ir la main q u e l’expédition de
Sarragosse s’acheva tost; qu e d o n n e conjecture à Monsr de C ham paigney
• Dire mino, fa ire pal te de v e lo u rs.
1 D on Inigo L opez H u rta d o de M endoza, m a rq u is de M o n d e jar. V o ir p lu s h a u t, p . 525.
* Baste, to u r.
4 C’est-à-d ire de l'a rc h e v ê c h é de S aragossc.
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
335
q u e les Espaignolz el le C o m m cn d a d o r c ra in d e u t q u e Voslre lllme Sgrieayl
icy le gou v e rn e m en t, qu e je sçay bien elle ne dem ande. Mais eux, ilz sont
sim ples si pensent q u ’estant Voslre Illm Sgrîe près du Roy, il ne face plus
de bien au pais qu e si elle y fust. Devanl h ie r m e vint tre u v e r le Sieur de
Cleidale ', q u i me dit q u ’il at lettres du p re m ie r d e j u in g p a r lesquelles l’on
lu y conferm e les prem ières nouvelles de vostre provision, et q u e l’a m o d ia le u r l’avoit p rié de p ré s e n te r son service à Vostre lllme SgriB p o u r estre
co n tin u é en sa ferme, q u ’il diet estre de x x x v m livres, dix réaulx p o u r c h a ­
cune livre, q u e seroient plus de l x i " 1 florins; et je pense bien q u ’il y gaingne
largem ent. J ’ay resp o n d u a u d it Sieur q u e je n’entendoie rien tel p a r voz
lettre s; et il me diet le m esm e c o n tenir celles q u e luy avez escript en res­
ponse des siennes, p a r lesquelles il avoit c o ngratulé Vostre Illnie Sgrie.
Berly m ’at diet q u ’il n ’y avoit rien des propoz q u e j ’ay escript R assenghien avoit tenu a u C o m m en d a d o r Maior. Toultesfois de Rave m ’avoit
affermé, et je pensoie q u ’il he u st du Duc d ’A rsc h o t; el je sç au ra y de qui il
l’at sceut.
Il vad bien q u e n’aions g ra n d e occasion de c ra in d re la F rance. L’on dit
q u ’il y at heu q u e lq u e e m p rin se à Paris d ’ung nouveaul m assacre contre
les estrangiers el rnesmes les Italiens, dont l’on sç au ra t de b r e f plus de
certitude.
Si nous eschappons le T u r c q ceste année, ce ne sera peu : il y a heu n o u ­
velles de Venise q u ’il feroit q u e lq u e em prinse. J ’espère q u e cela ne co n ti­
nuerai, com bien qu e del Rio qui at toutte occasion, com m e bien le sç.iyt
Monsr F o n c h , ja p p e contre Vostre lllme Sgrie, diet q u ’il s’est aussi bien fo rcom pté ceste a n née qu e la précédente, lo rsq u ’il a ssh eu ro it q u e le T u r c q ne
feroit riens, s’il est v ray q u ’il vient. Mais il le fault lesser dire.
E stan t parvenu ju sq u e s icy, m ’est venu tre u v e r Monsr d ’Indevelde *, qu e
e n tre aullres propos m ’at com pté d o n t seroit procédé la craincle d u m as­
sacre en Anvers, q u e seroit ad v e n u à raison du s e rm e n t q u e le doien de
Taxis et u n g c h a n o in e P a r d o ont mis en avant,alfin q u e l’on p u ist d isc e rn e r
*
M a rtin A n to in e D el Rio a v a it ac q u is la se ig n e u rie d e C ley d a el de P ie r re V a n d e r S tra te n e n 4S S 7.
Del Rio m o u ru t à L isb o n n e e n 1 S 8 0 . V oir n o tre Notice historique et généalogique de la M aison de
S tra ten , p. 161), e t les Mémoires de M a rlin - A ntoine Del Rio, t. I, où se tro u v e la v ie d e ce p e rso n n a g e .
1 N icolas M ic au lt, Sr d ’In d e v e ld e , m e m b re d u C onseil p r iv é . V o ir sa n o tic e , t. IV , p. 5 3 3 .
33«
CORRESPONDANCE
les catholicques des hùrelicques, s u r ce qu e fut advisé p a r le Conseil privé
q u ’il ne se debvoit faire, p o u r ce qu e l'on n ’y avoil treuvé bon com pte le
p ra c tic q u a n t à Valenchicnnes; et fusl ledit advis si bien arraisonné, qu e le
s ie u r Roda le louha, com m e feit Son Excce. Toutlesfois ledit doien et les
Jésuites o n t tant lire el viré, qu e à la fin Son E xcce s’y est condescendu
et at d éputé le vieil m argrave, le cappitaine V a ria s et q u e lq u e aultrc p o u r
recepvoir ledit serm ent, qui ont refusé cesle charge, q u e Son E xcce, selon
le g ran d zèle q u ’elle al, fut délibéré recepvoir el e x é cuter elle-mesme avec
son secrétaire. Mais il al esté com m is à d ’au lires, et com m e je craindz avec
peu de proulïicl; car u n g hérélicque ne fera cas de son serm ent
M aintenant me vient-on d ire de bon lieu q u e noz dépuiez à Breda ont
escript que ceulx du P rin c e ont rap p o rté q u ’ilz ne veuillent acte n d re a ulc u n e response du Roy, mais bien consentir en une trefve ou abstinence de
g u e rre p o u r (rois mois, avec condition qu e d’u n g coslel et d ’a u ltre tous
dangiers et em priuses cessent, adjoustanlz q u ’il y au ra i g ra n d e m utation
s u r celle des parties q u e serai cause de la r u m p t u r e 1; et est lotit cerlain
q u e ledit P rin c e faict désià de grandes apprestes p o u r la guerre. L ’on parle
aussi que le P rin c e de Condé liève gens en Allemaigne, et q u e dedcns trois
mois nous polrions bien veoir q u e lq u e g ra n d vacherme. Sancho Davila et
M ondragon d ien t à Son E x c ce q u ’elle ne do ib t o u y r ny traicler avec les
enneniiz de nostre foy *. G orcum s’est in u n d é de p a o u r q u e l’on s’y a lta ­
chat. Ledict Indevelde m ’at com pté com m e l’on est en tré en dillidence
contre son cousin T seroskerke 5, p a r cy devant g o u v e rn e u r de Berghes,
d u q u e l le D uc d ’Albe se confioit gran d e m en t. Véant cecy, il s’est retiré à
G and, et ne se veult plus m esler de riens, encoires q u ’il en soit esté requis
de bref. C’est un joly h o m m e et de qui Monsr de C ha m p a ig n e y at fort b o n n e
opinion.
1 D es le ttre s se m b la b le s, m ais conçues d a n s u n to n m o in s a b s o lu , so n t im p rim é e s d a n s la Corres­
pondance de P hilippe I I , I. III, p p . 7 7 5 e t su iv .
1 » L es affa ires s o n t au p is p a r la paix faillie, q u i a cau sée, com m e j ’e n te n s , p a r un s c ru p u le île
» co n scien ce, q u e u n g p e u d ’eau b e n o itc le p o u r r o it o ste r...... Il fa u t v eo ir, o y r e t se ta ire . » V iio n au
C a rd in a l, le 18 ju ille t. (Ibid., p . 103.)
*
P h ilib e rt de T u y l, S r de S e ro o sk c rk e , a p p a r te n a n t à u n e fam ille z é c la n d a is c , é ta it g o u v e rn e u r d e
B erg-op-Z oom , p r i t p a r t a u passage des E sp a g n o ls d a n s l'île de S ch o u w en e t fu t ch a rg é p a r le C o n ­
seil d ’E ta l, en 1 5 7 6 , de n é g o c ie r avec lo p rin c e d ’O ra n g e . V o ir
P iu .\ste k ïr,
t. V, p p . 4 0 0 , 4 0 9 .
T e W ater
, t.
I,
p. 1 9 3 , et
G roe* vas
DU CARDINAL DE GRANVELLE.
Ad ce q u e j e p u i s v e o ir ,I o n n'cnvoieral le c onseiller R ic h a rd o t ‘ nulle p a r t ;
car j ’e n lendz qu e Son Excce al changé de propoz, d isa n t q u ’elle avoit déli­
béré envoier vers le Roy p o u r le bien in fo rm e r des affaires de B ourgoingne,
p o u r ce q u e les pacqueclz et lettres q u e l’on escript sont jectez en q u e lq u e
q u a r r é et y d e m e u re n t trois ou q u a ttre mois, p o u r ce q u e Sa Majesté n’at
pas un h om m e de sorte auprès d ’elle qui les e n te n d e ; qu e H opperus hase *
libros, et q u e p a r ainsi le Roy n ’est adverti, et q u ’e sta n t l’afTaire preg n a n t,
cela l’a voit m eut de vouloir envoier ledit R ic h a rd o t; mais p u isq u e les
députez de B ourgoingne persistent d’y envoier, q u e p o u r non leur d o n n e r
jalousie selon q u ’ilz sont assez e n c lin s , il n’envoierat p o u r m ain te n a n t
ledit R ic h a rd o t qui n ’y p e rd ra i g u e rre : car il lu y lieut con v e n u à ses fraiz
faire si g ra n d v o iage, et Del Rio d o n n a cesl advis qu e fut treuvé bon. Je
croy bien q u e Monsr de Besançon 3 et les a u ltre s , qui o n t envie d ’aller en
E s p a ig n e a u x d e s p e n s d u païs, n ’en seront m arri ‘.Mais ce seroit dom m aige si
ledit sieur de Besançon e s lo in g n e sa c i t é ; c a r l’on d i t q u ’il fe itg ra n d e proesse
p o u r la rec o u v re r s u r les o c c u p a le u rs b a n n iz , te n a n t u n e targe et espée à
de u x m ains, se ten a n t près de la m aison de ville, ce p e n d a n t q u e Monsr de
Vergy traveilla près des portes. J ’ay dit de rechief à Monsr le P ré sid e n t q u e
si l’on lesse passer l’occasion qu e l’on at d ’y dresser u n g fort, qu e l’on p o lra t
bien r e to m b e r en nouveau inco n v é n ien t irréparable, car les b a n n iz ne ces­
se ro n t; et l’on dit q u ’ilz estoient suiviz d ’a ulcuns Suisses, q u e les q u a n to n s
ont désadvoué. Mais s’ilz h eussent adressé, l’on heut veu beau j e u ; et l’on
cl ici qu e Sainct-E slienne 5 est bien p ro p re p o u r y m ectre ung fort à peu de
despens. L edit P ré sid e n t m e d it que l’E m p e re u r le p r e n d r o it mal. J e luy
dis qu e les ecclésiasticques debvoient faire instance p o u r avoir u n g lieu
de seure retraicte p o u r q u a n t sam blable e m p rin se se feroit.
J ’a y faict qu e j ’ay pe u it p o j r so n d e r ledit P ré sid e n t s’il y a u ro it q u e lq u e
espoir d ’accord ou de trêve; mais je m ’appoi ceois bien à son m aintien q u ’il
en y at fort peu. Certes ces gens qui veuillent faire leur p ro u lïit de la
g u e rre nous p e rd ro n t, et eulx-m esm es aussi. Il fui devant h ier avec le Comm e n d a d o r Maior depuis n e u f heures ju sq u e s à douze.
’ Je a n R iclin rd o t. V o ir sa n o tice, t. IV , p. 558.
* P o u r : hacc libros, lie n t les liv re s. Ilucer libros signifie au ssi faire p e a u n e u v e .
5 C lau d e d e ia_ B a u in e , a rc h e v ê q u e do B esançon de 1514- à 1581.
4 V oir, au s u je t d e c e tte d é p u ta tio n , p lu s h a u t, p. 2 9 2 .
s L e M ont S t-É lic n n e à B esan ço n . V o ir
T
ome
V.
G
ollut
,
col. 6 5 .
43
358
( ' 0 R Il ESPON DANCE
Hier devant qiiatlrc heures du m alin p a rtit Son E x c ce p a r la b a rc q u c en
Anvers, com bien qu e l’on «voit <slimé que son sé jo u r seroit plus long; mais
elle ne s’aim e p o in t en ceste ville.
L ’on dit q u e le P rin c e d ’O range at déclairé q u ’il veut aller en Alleinaigne
et lesser faire ceulx d ’Hollande et de Zeelande ainsi q u ’ilz l’e n te n d ro n t,
laquelle déclaration, s’il l’exécute, d o ib t estre suspecte, q u e c’est à intention
de m ectre les F ra n ço is ou Anglois dedens, qu e seroit p o u r faire p e rd re à
nostre R oy le d e m e u r a n t de ses pays, s’il n ’y est saigem ent p o u r v e u ; et
v a u ld ro it m ie u lx , q u o y q u e die S ancho Davila et a u ltr e s , traicter avecq
l’ennem i q u e lq u e a c c o r d , q u e de m ectre tout le pais en tel hazard et
m esm es de c h a n g er de religion. E t m a t dit to u t m a in te n a n t d ’Assonleville
q u e le C o m m en d a d o r dit h ie r q u ’il est m ieulx qu e les François occupent
lesdits païs qu e telle canaille q u e y est à présent, et q u e faisant u n e b o n n e
g uerre au Roy de F ra n c e du coustel d ’E spaigne, q u e l’on luy feroit tost
lascher prinse, et q u ’il paieroit bien les despendz de la guerre, et q u ’il tient
l’âm e de feu l’E m p e re u r en enfer p o u r l'intérim q u ’il feit en Alleinaigne :
q u e sont des a phorism es de Roda, lequel at gaigé, p o u r un ban e q u et, avec
d ’Assonleville, q u e Vostre Illme Sgrie estoit p o u rv eu e de Sarragosse. Le
m esm e m ’est venu d ire u n g Ja co p in venu devant h ier d’Espaigne qu e cela
y est tout notoire. Je d e m eure arresté en ma response q u e je ne sçay riens,
et qu e je n’en croyz riens j u s q u ’à ce qu e m on m aistre le m e mande.
D’Assonleville d it qu e le C o m m en d a d o r est en term es de d ev en ir h y d r o ­
pique. J e sçay q u ’il at sept ou h u ic t trous aux j a m b e s ; estim ant q u ’il veoit
beaucop de choses q u e ne lu y plaisent g u e rre , et auxquelles il \e o it bien
q u ’il ne p e u lt rem édier, et q u ’il en sortira encoires avec beaucop m o in d re
h o n n e u r qu e le Duc d ’Albe. T outtefois le couraige est g ran d , et plustost de
tout p e rd re qu e de n’achepver ce qu e l’on at em prins. Ce q u e p o lro it u n g
j o u r couster ch ie r à celluy d u q u e l l’on p ren d les g ran d z gaiges.
D ’Assonleville at opinion que le seigr Don J o h a n a u ra t ce g ouvernem ent,
et q u e ce sera s u r l’a rriè re saison J e ne sçay s’il ém e n d e ra cestuy-cy qui
v o u llu t hier b a ttre femme et enflans d ’im pacience d ’a v o ir à beaulx dets *
* D ès la fin de l'a n n é e 1 5 7 5 , il é ta it q u e stio n à M ad rid d ’e n v o y e r D on J u a n a u x P ay s-B a s. V o ir
le s M anuscrits de P aris, t. II, p . 4 5 8 .
* Dcts, dez.
DU CARDINAL D E GIlANVELLE
539
p e rd u liuict mille florins 1 co n tre le n e p v e u r de C h a p p in Vitelli, s u r lequel
ve n a n t icy en la b a r e q u e , il en avoit gaingné six mille. Et ce u lx -cy nous
gouvernent! Si fault-il q u e j ’adjouste le bien, q u ’est q u ’il ne p re n d service
de la ville d’Anvers, et q u ’il ne d o n n e passeportz, com m e faisoit le Duc
d’Albe, sans a u lcune vergogne.
J ’ay recouvert la copie de la d e rn iè re response des députez du P rince q u e
n ’est si desguisée, com m e a u lc u n s peu am a teu rs de p a ix crient, faisant
sc ru p u le de conscience de traicte r avec les héréticques 2. D oncques n ’estoit-il besoing de se ressam bler et p e rd r e tan t de tem ps en ce cy ; c a r la
saison passera p o u r nous sans faire g r a n d e chose en H ollande où, s u r le
m ois de septem bre, les fossez se c o m m e n c e n t à r e m p lir ; mais les ennem iz
noz polront bien faire q u e lq u e venue, q u a n t ce seroit plus tard, com m e l’on
at veu les années L X V Ill et LXXll. Il fault tout rem eclre à Dieu, p u is q u ’il
y al si peu d ’espoir du couslel des h o m m e s .....
XC1I.
LE
PRÉVÔT
M O R IL L O N
AU
C A R D IN A L
DE
GRA NVELLE.
(B ibliothèque de Besançon. — L e ttre s île d iv ers, t 111, fol. 88-89.)
B ru x e lle s , le 18 ju ille t 1 5 7 5 .
J e re s p o n d ra y au x d e u x lettres de Voslre lllme Sgri(J pu blicorum , toulles
d e u x de sa m ain et d u xve d u mois passé II esl facillement à veoir que, tant
q u e l’on sera gouverné p a r les discours du du c d’Albe et de l’Espaigne,
com m e l’on se po rte ra icy; c a r l’on at faulle d ’u n g C ardinal de Granvelle
p o u r re n v e rsse r p a r b o nnes et vives raisons les peu fo