Six tortues polynésiennes, équipées d`émetteurs satellites

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Six tortues polynésiennes, équipées d`émetteurs satellites
« L’esprit de l’océan » - « Ocean’s Spirit »
Six tortues polynésiennes, équipées d’émetteurs satellites, deviennent
les stars de centaines d'écoliers dans le monde
C'est une grande expérience pédagogique, ludique et écologique qui regroupe 200 écoliers de
Polynésie, des îles Cook, de Nouvelle-Calédonie, de France métropolitaine et plus encore. Ces classes
suivent, pratiquement en direct grâce au GPS, les voyages de six tortues polynésiennes à travers le
Pacifique.
Mené par l’association polynésienne Te mana o te moana (www.temanaotemoana.org), le projet s'appelle "Bula Honu, suivons les tortues marines du Pacifique". Il se place dans la continuité d'études
scientifiques polynésiennes, américaines et océaniennes sur la
migration des tortues. Bula Honu a commencé en installant
des émetteurs satellites sur six tortues vertes capturées dans ce
but dans les eaux polynésiennes : à Tikehau, Hao, Tetiaroa et
Moorea. Dans les deux atolls des Tuamotu, ce sont d'ailleurs
les habitants eux-mêmes qui ont permis la capture des spécimens.
Ensuite venait la partie éducative. 14 classes de Polynésie, et
d'autres élèves du Pacifique Sud et de métropole, ont pu suivre leurs voyages à travers le Pacifique en direct sur le site bulahonu.org. Toujours pour se familiariser avec l'outil informatique, ils ont aussi interagi avec la page Facebook du projet,
sur laquelle étaient partagés les lettres et dessins des enfants. Plusieurs des classes participant au projet se sont aussi échangé des courriers. Une relation épistolaire qui leur a
permis de travailler leur français, leur reo maohi et leur anglais.
Des animateurs se sont déplacés dans les classes pour "délivrer un programme pédagogique sur les espèces marines (tortues, cétacés, récifs) et transmettre aux enfants des
livrets éducatifs." Il s'agit surtout de la présentation de deux livrets en français et anglais créés par l’association Te Mana o te Moana. Il s'agit de « Tohorä, baleine à bosse
qui es-tu ?» et du « Livret sur les tortues marines en Polynésie française ».
Dans le cadre du projet Bula Honu, la présidente de Te mana o te moana, Cécile Gaspar,
et Mark Eddowes, archéologue spécialiste de la Polynésie, ont pu aussi se rendre sur
Aitutaki et Rarotonga (îles Cook), afin de faire des présentations pédagogiques dans les
écoles et sensibiliser la population à la protection des tortues marines. Des échanges très
fructueux ont également pu être réalisés avec les scientifiques et associations locales (Aitutaki Conservation Trust, Center for cetacean research and conservation, Dr Michael
White,…).
Enfin, à Moorea, la classe de CM2A de Paopao, qui s’est portée volontaire pour participer à ce projet
scientifique pendant toute l’année scolaire, s’est déplacée en mai en Nouvelle Calédonie. Les enfants
ont ainsi suivi la direction prise par Purotu et Mahina rahi, deux tortues balisées à Tetiaroa, qui ont
parcouru des milliers de kilomètres vers l’ouest. Pendant une semaine, les enfants de CM2 ont ren-
contré des élèves néo-calédoniens, ont échangé avec les scientifiques du Centre d’initiation à l’environnement et de l’Aquarium des lagons à Nouméa et ont même participé à la relâche d’une tortue
imbriquée baptisée Moorea.
La réalisation du projet Bula Honu a été permise par le soutien précieux de nos partenaires : le Fonds
Pacifique, The Brando, la Fondation Total, le Fonds Biome, la Fondation Maud Fontenoy, le Moorea
Dolphin Center, l’Ifrecor, le CNES, Paul Gauguin Cruises et le gouvernement de Polynésie française
(Présidence, Vice-rectorat, DGEE, Ministère de l’Environnement, …).
Toutes les informations sur ce projet sont disponibles sur le site www.bulahonu.org
Que nous apprend le trajet des six tortues équipées d’émetteurs satellite ?
Les tortues marquées à Tetiaroa
De décembre 2014 à mars 2015, trois tortues vertes femelles ont été marquées sur l’atoll de Tetiaroa
(Archipel de la Société) après la ponte. Cet atoll, qui est l’un des derniers sites de ponte fréquentés
régulièrement par les tortues vertes dans l’archipel, fait l’objet d’un suivi à long terme mené depuis
2007 par Te mana o te moana. De précédents marquages satellites, menés en 2011-2012 sur les tortues
vertes pondant sur cet atoll, avaient conclu à une migration des tortues femelles vers le Pacifique Sudouest (îles Fidji principalement) où se situeraient leurs zones de nourrissage.
L’une des tortues marquées cette année à Tetiaroa dans le cadre du projet Bula Honu, une femelle
nommée Tarita, n’a émis que pendant environ un mois. Dans ce laps de temps, elle est restée à proximité de sa zone de ponte, avec des déplacements entre l’océan, le lagon et la terre ferme suggérant
de nouvelles tentatives de ponte. Les déplacements effectués par cette femelle pendant les intervalles
entre les pontes étaient restreints à une zone de quelques kilomètres carrés. Les raisons d’un arrêt
d’émission de l’émetteur satellite peuvent être liés à un choc sur le récif ayant endommagé l’émetteur
ou au braconnage de l’animal.
Les deux autres femelles marquées à Tetiaroa cette année, Purotu et Mahina rahi, ont effectué des
trajets respectifs de 2800 et 3300 km en direction du Pacifique sud-ouest. Purotu et Mahina rahi ont
toutes les deux cessé d’émettre dans les eaux internationales des Tonga après un temps d’émission
de 60 et 83 jours, une durée anormalement basse en comparaison de la durée de vie des batteries des
émetteurs qui est de plus de 6 mois.
Elles ont suivi approximativement la route migratoire constatée lors des trajets des tortues marquées
deux ans auparavant. Sur 7 tortues femelles marquées à Tetiaroa entre 2011 et aujourd’hui, 5 ont
migré vers le Pacifique Sud-ouest en prenant la direction des îles Fidji. Les deux restantes, dont Tarita, ont arrêté d’émettre avant de quitter les eaux côtières de Tetiaroa.
Les tortues marquées dans les Tuamotu
Pour la première fois en Polynésie française, deux tortues vertes ont pu être équipées d’émetteurs
satellite dans l’Archipel des Tuamotu.
La première, un mâle adulte nommé Tuherahera, a été capturé dans la lagon de Tikehau en mars, en
dehors de la saison d’accouplement et de ponte. Tikehau est un atoll situé à l’extrême ouest de l’Archipel des Tuamotu. Après trois mois de suivi, Tuherahera n’a pas quitté l’atoll et montre des déplacements restreints entre les tombants sableux du lagon et la pente externe. L’absence de migration
et la faible ampleur de ses déplacements suggère que cet adulte mâle pourrait être résident de l’atoll
et y aurait établi sa zone de nourrissage.
Le deuxième individu, un juvénile de tortue verte nommé Poerani, a été capturé sur la pente externe
de Hao (Tuamotu Est) en mars. Comme Tuherahera, Poerani a montré des déplacements restreints
dans la zone nord de l’île. Ces déplacements sont similaires à ceux déjà observés pour les tortues
vertes juvéniles relâchées dans l’Archipel de la Société, qui indiquaient à chaque fois une zone d’habitat restreinte sur un récif.
Une tortue blessée à Rangiroa, soignée puis relâchée à Moorea
Le trajet le plus surprenant vient de Tereori, une tortue retrouvée blessée sur l’atoll de Rangiroa dans
les Tuamotu et rapatriée à la Clinique des tortues de Moorea, un centre de soins géré par l’association
te mana o te moana. Après plusieurs mois de soins, cette tortue verte juvénile est relâchée par le
Président de la Polynésie française, M. Edouard Fritch, au large de Moorea. Contrairement aux autres
tortues vertes juvéniles suivies jusqu’à maintenant qui ont montré des déplacements restreints et se
sont installées sur une zone de récif, Tereori entreprend après sa relâche un trajet en zigzags qui pointe
vers le nord. Moins d’un mois après, elle arrive à la latitude des Tuamotu dont elle est originaire mais
continue sa route. Elle se trouve actuellement à plus de 1000 km au nord de Moorea, à la latitude des
Iles Marquises. Jusqu’où ira-t-elle ?