Les premiers pas de Macron dans l`arène présidentielle
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Les premiers pas de Macron dans l`arène présidentielle
Les premiers pas de Macron dans l’arène présidentielle jugés par les experts, Présidentielle 2017 Le départ de Bercy d’Emmanuel Macron est jugé réussi, mais il lui reste encore à élaborer une stratégie cohérente. Il y a un mois, Emmanuel Macron claquait la porte de Bercy, pour « retrouver sa liberté », avec l’Élysée dans un coin de la tête. « Les Échos » ont interrogé trois experts – Jean-Daniel Lévy, directeur du département politique et opinion chez Harris Interactive, Roland Cayrol, directeur de recherche associé au Centre de recherches politiques de Sciences po, et Jérôme Sainte-Marie, président de PollingVox pour décortiquer ses premiers pas politiques. Quel bilan un mois après sa démission ? De l’avis général, Emmanuel Macron a réussi sa sortie. « Quand il a quitté le gouvernement, tout le monde doutait qu’il puisse immédiatement transformer son incroyable popularité, surgie à une telle vitesse, en intentions de vote présidentielles des Français. Et le voici mesuré à 12 à 16 % de ces intentions – plus que le président sortant. Une prouesse incontestable », note Roland Cayrol. Jean-Daniel Lévy apporte toutefois quelques nuances. « Du point de vue du message, il s’agit d’une réussite. D’un point de vue de confiance à son égard, c’est un peu moins net, car il a perdu 5 points depuis sa sortie du gouvernement. Et cette baisse est caractérisée à gauche comme à droite. Va se poser la question de la perception par les Français de son motif de départ : pour une ambition personnelle ou au service d’un projet politique ? » estimet-il. Quid de son potentiel électoral ? « Malgré le reproche de déloyauté qui pouvait lui être adressé depuis la gauche, il préserve et même développe sa ressource essentielle, la faveur de l’opinion. Il est vrai que celle-ci est liée à une présentation généralement très flatteuse dans les médias et à un appui ostensible de la part de certains milieux d’affaires. Sans avoir déclaré sa candidature, il maintient donc intacte la possibilité de rentrer un jour dans le jeu », estime Jérôme Sainte-Marie. Comment apprécier sa stratégie ? Pour l’instant, Emmanuel Macron n’a rien dévoilé du fond de son projet. Il est très attendu. « Une élection présidentielle n’amène pas les électeurs à voter pour un candidat uniquement en fonction de ce qu’il est, mais également de l’ensemble de l’offre électorale des propositions des différents compétiteurs. Et aujourd’hui, nous ne connaissons pas son offre électorale réelle », confirme Jean-Daniel Lévy. Le pari d’Emmanuel Macron de sortir du clivage traditionnel droite-gauche est un challenge. « Est-il imaginable qu’un candidat soit capable de ne pas s’appuyer sur les structures organisées des partis, des militants, des élus locaux et des parlementaires, et se fonde essentiellement sur l’opinion ? Cela arrivera. Emmanuel Macron est le premier à le faire croire. De là à atteindre l’Elysée, à battre donc, Alain Juppé, Marine Le Pen, et aussi François Hollande, on en est quand même loin », précise Roland Cayrol. Enfin, il ne faut pas oublier que la mécanique d’une élection est aussi le résultat des forces en présence. « Sa stratégie dépend essentiellement de l’offre politique à gauche et à droite. François Hollande sera-t-il candidat ? Et, surtout, Alain Juppé l’emportera-t-il sur Nicolas Sarkozy ? Cette dernière question est essentielle, car il est évident que la victoire du maire de Bordeaux durant la primaire laisserait bien peu d’espace à Emmanuel Macron », ajoute Jérôme Sainte-Marie. Où sont ses forces, où sont ses faiblesses ? Ses forces sont connues : talent, incarnation du renouveau. Ses faiblesses aussi, à commencer par le manque de troupes et de relais… « Ses forces sont ses faiblesses : le dépassement de la division droite-gauche, l’ambition de rassembler les « progressistes », le désir de croire que les législatives ne sont pas un obstacle dans la marche vers le pouvoir, le manque de soutien des réseaux politiques et militants structurés, l’absence de réponse à la question « Avec qui gouverneriez-vous ? » » estime Roland Cayrol. « Sa force est de correspondre à l’esprit du temps, celui de l’amalgame des réformistes de gauche et de droite, de la réconciliation assumée des libéralismes. En plus, son discours anti-système, aussi surréaliste qu’il puisse apparaître du fait de sa biographie, touche les Français, au point que, dans les intentions de vote, on s’aperçoit qu’il réussit à détourner certains électeurs du vote Le Pen ou Mélenchon », constate Jérôme Sainte-Marie. L’ancien ministre de l’Économie n’échappe pas non plus aux critiques sur le bilan de l’exécutif auquel il a appartenu et sur son inexpérience à l’international. « Jusqu’à présent, les Français ne l’imaginent pas, par exemple, représenter la France au niveau international. Dans un pays qui se rêve d’accorder une place plus importante aux jeunes, mais jusqu’à présent vote pour des responsables politiques fortement expérimentés, ce déficit constitue aujourd’hui indéniablement une difficulté », ajoute Jean-Daniel Lévy. Reste une faiblesse : l’adhésion à son offre. « Candidat idéal de second tour, il aura cependant du mal à y parvenir. Son espace idéologique propre, celui de la bourgeoisie libérale votant à gauche, est de l’ordre de 6 %, le reste se fait par agrégation. Il n’a pas pour l’heure d’organisation vraiment constituée, ni de maillage territorial. En un mot, il lui manque un parti, ce qui est un handicap sérieux pour la présidentielle, comme les élections précédentes l’ont montré », estime Jérôme Sainte-Marie. Source :© Les premiers pas de Macron dans l’arène présidentielle jugés par les experts, Présidentielle 2017