Comment motiver les élèves en difficulté à prendre la parole
Transcription
Comment motiver les élèves en difficulté à prendre la parole
Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite Sonia MEHDI PLC2 IUFM Créteil Centre du second degré Comment motiver les élèves en difficulté à prendre la parole ? Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite TABLE DES MATIERES INTRODUCTION ................................................................................................................2 I] Premiers pas pour lever les obstacles liés à la prise de parole. ..................................4 a) De la nécessité de créer une atmosphère propice à l’échange.....................................4 b) Dédramatiser l’effort du tout anglais...........................................................................6 c) L’importance des rituels..............................................................................................8 d) Mise en place d’une remédiation...............................................................................11 II] Créer une dynamique de classe................................................................................13 a) Eveiller la curiosité des élèves. .................................................................................13 b) Quand notation rime avec valorisation… ..................................................................15 c) L’importance du guidage ..........................................................................................17 III] Réussites et limites observées au sein de la classe. ................................................18 a) Une meilleure perception de soi. ...............................................................................18 b) Vers un regain d’intérêt pour l’anglais. .....................................................................19 c) Là où tout ne baigne pas dans le meilleur des mondes : Limites aux stratégies employées.....................................................................................................................20 CONCLUSION...................................................................................................................22 BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................23 1 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite INTRODUCTION Comme le souligne Michel Tozzi, professeur des universités à Montpellier III, « Notre fonction de professeur n’a de sens que par rapport à l’élève. La parole de l’élève est comme un baromètre : plus les élèves demandent la parole, plus le cours est intéressant. » Avoir à affronter le silence est donc la pire des frustrations pour un professeur de langue vivante. Et c’est pourtant contre cette angoisse que j’ai dû lutter dès mes premiers jours de cours face à une classe de 4èmeLV1 au collège Le Parc à Aulnay/Sous/Bois (93600). Dès les premiers jours du mois de Septembre, je me suis trouvée confrontée à une classe où seuls deux élèves étaient disposés à « collaborer » et prendre la parole en anglais. Quand je sollicitais un des dix-neuf autres élèves, j’essuyais un refus systématique et ce, quelle que fût la phase du cours. Je n’avais alors d’autre choix que d’essayer d’analyser les causes de ce mutisme. La réponse m’a partiellement été apportée par les élèves. Un grand nombre d’entre eux avait en effet eu le même professeur en 5ème, lequel professeur a eu des ennuis de santé, et les élèves, pas moins de quatre remplaçants! J’ai donc pu rapidement me rendre compte que j’avais affaire à des élèves totalement démotivés pour qui apprendre l’anglais était loin d’être une priorité. En revanche, et fort heureusement, ils ne semblaient pas pour autant « allergiques » à cette langue. Au contraire, une grande majorité d’entre eux aimaient l’anglais, notamment grâce aux chanteurs anglo-saxons pour qui ils se passionnent. Ce premier élément de réponse constituait pour moi une première lueur d’espoir car il éliminait d’emblée le risque de rejet total de l’anglais. Forte de ce constat, je décidai ensuite de glaner quelques informations auprès de mes collègues d’autres disciplines qui les avaient eus sous leur responsabilité les années précédentes. J’eus droit alors systématiquement à la même et bien vaste réponse : « Ce sont des élèves en difficulté », expression reprise dans le titre du mémoire et qui mérite que l’on s’y attarde. Car en effet, qu’est-ce qu’un élève en difficulté ? Selon Bernard Charlot, enseignant chercheur, pour permettre à ces élèves là aussi « d’accéder à des savoirs nouveaux et de construire du sens sur leur vie, sur leur société et sur leur monde, il faut que les 2 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite enseignants soient très au fait de ce que sont leurs élèves. » De même, les Instructions Officielles soulignent : « Avant de choisir la forme que prendra l’aide, il faut chercher à comprendre pourquoi l’élève est en difficulté et il faut identifier la nature de l’obstacle.1» Ainsi, afin de mieux repérer les différents types de difficultés que rencontraient mes élèves, je décidai de les soumettre à un sondage (cf :annexe A). Ce sondage allait m’aider à analyser leurs lacunes et leurs besoins. Une étude attentive de leurs réponses m’a permis de lister plusieurs caractéristiques d’un élève en difficulté. La caractéristique la plus frappante et la plus récurrente dans le sondage est celle de la difficulté à capitaliser le savoir : les élèves ont du mal à retenir le cours, à mémoriser les structures et le vocabulaire. Un autre point qui est ressorti du sondage est le manque de confiance dans les connaissances anciennes. L’absence de connaissances antérieures solides auxquelles il convient de se référer contribue chez ces élèves à un manque d’organisation et d’intégration des savoirs nouveaux. Citons également l’absence de projet de réinvestissement. Le sondage montre clairement que pour une majorité d’élèves, apprendre l’anglais « ne sert à rien. » La lassitude et le manque d’investissement constituent une difficulté supplémentaire et sont à mettre en relation avec un manque de méthodes. Ce dernier rend plus difficile le travail à la maison, lors de l’apprentissage des leçons par exemple. Enfin l’ensemble de ces difficultés est souvent à l’origine d’un défaut de confiance dans la réussite et d’un problème de représentation de soi de l’élève. En effet, leur situation d’échec scolaire contribue à leur donner une image dévalorisée d’eux-mêmes. Aussi me devais-je de proposer à mes élèves des situations d’apprentissage prenant en compte ces caractéristiques spécifiques si je voulais les remotiver et les inciter à prendre la parole. Je cherchai donc d’abord à répondre aux premières contraintes liées à une classe en difficulté, non motivée, à trouver les moyens de créer une dynamique de classe, puis à analyser les réussites et limites des stratégies mises en œuvre. 1 Ministère de l’Education Nationale, Enseigner au collège : programmes et accompagnements – anglais LV1/LV2, CNDP, 2002, p.57 3 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite I] Premiers pas pour lever les obstacles liés à la prise de parole. Une fois les principales difficultés de mes élèves mises à jour, il me fallait trouver des stratégies efficaces pour bannir au plus vite le silence pesant qui régnait au sein de la classe. Les « premiers pas » me semblaient être les plus difficiles. J’avais en effet sous ma responsabilité des élèves pour la plupart démotivés, en décrochage scolaire, avec qui il semblait que tout était à refaire, à reconstruire. Je n’avais donc pas droit à l’erreur puisqu’un faux pas de ma part ne m’aurait amenée qu’à les « perdre » un petit peu plus. Dès lors je pris encore davantage conscience que la qualité de la relation que je m’apprêtais à établir avec eux et celle qui allait s’instaurer entre eux étaient primordiales. « En effet, […] il n’y a pas d’expression sans risque […]. Le climat de confiance est donc le terreau indispensable à l’expression2 ». a) De la nécessité de créer une atmosphère propice à l’échange. Comme je l’ai souligné en introduction, la réticence des élèves à communiquer et à s’exprimer était, entre autre, due au fait qu’ils manquaient de confiance en eux, qu’ils avaient le sentiment que prendre la parole en anglais relevait de l’impossible. Par ailleurs, en plus d’avoir une piètre opinion d’eux-mêmes, certains élèves avaient une peur panique de prendre la parole en public. Il n’y avait pourtant pas une mauvaise ambiance dans la classe mais certains craignaient le jugement et les moqueries de leurs pairs. Ils préféraient donc garder le silence plutôt que d’avoir à ressentir la peur de s’exprimer et de perdre la face devant les autres. Cette attitude est largement compréhensible dans la mesure où prendre la parole est aussi une façon de se dévoiler, de se placer sous le regard des autres. C’est une démarche que nos élèves adolescents font difficilement la plupart du temps, peut-être même encore moins quand ils se savent en difficulté scolaire. En effet, « […] nous ne nous hasardons à cet exercice 2 Julié K., Enseigner l’anglais, Hachette Education, 1994, p.83 4 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite difficile que si les conditions extérieures et intérieures le permettent, autrement dit si nous avons une certaine confiance en notre environnement, et si nous avons envie d’entrer en interaction avec celui-ci.3» Mon premier objectif fut donc d’essayer de leur redonner, voire même de leur donner confiance afin de leur montrer que, loin d’être impossible, la réussite était au contraire à leur portée. Pour ce faire, il me fallait essayer d’installer un climat de confiance et d’écoute réciproques. Je dois admettre que je n’avais pas de « recette miracle » et que dans cette situation précise, seul le dialogue avec eux m’a été d’un grand secours. J’essayai donc d’abord de les encourager en dédramatisant la situation. Je soulignai que toute tentative de prise de parole était louable. J’entendais par-là redonner du crédit à leurs propos car force est de constater que bien souvent, les élèves sont habitués à se comparer aux autres et surtout aux meilleurs. C’est ce qui crée chez eux une forme d’inhibition car ils sont persuadés que ce qu’ils disent eux n’est pas intéressant ou contient trop d’erreurs. Leur attitude m’a donc permis de me rendre compte que si je voulais éviter qu’ils se sentent en situation d’inconfort, il me fallait d’abord changer ma propre attitude face à l’erreur. En effet, un professeur a souvent tendance à valoriser toujours plus volontiers les productions correctes et à rectifier les autres. Bien souvent, ce qui inhibe la prise de parole des élèves en difficulté, c’est cette tension que nous créons en reprenant sans cesse les erreurs commises par souci de bien faire. Je leur expliquai donc qu’ils ne pourraient progresser que s’ils s’exerçaient, que le fait de se tromper et commettre des erreurs faisait partie intégrante de l’apprentissage et qu’ils devaient tirer les enseignements de ces erreurs pour pouvoir avancer. Par-là même, je redéfinissais partiellement mon rôle de professeur en leur disant que j’étais là pour les aider, pas pour les assommer de reproches. Enfin pour lever la barrière de la timidité si présente chez certains, j’insistai sur le fait que la classe devait permettre à chaque élève de se réaliser pleinement et que la parole de chacun devait être profitable à tous. Nous avons donc conclu, ensemble, que « se lancer » était la 3 Julié K., Enseigner l’anglais, Hachette Education, 1994, p.83 5 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite condition sine qua non pour pouvoir progresser. Ainsi, créer un climat de confiance propice à l’échange a consisté à montrer aux élèves que le cours d’anglais devait être conçu comme un lieu de vie, de ressources et d’imagination, comme un travail collectif pendant lequel on cherche à résoudre ensemble les difficultés, à améliorer les énoncés, chacun apportant sa contribution. Pour que le cours puisse être organisé comme tel, il fallait que les élèves s’habituent à recourir à la langue cible exclusivement. b) Dédramatiser l’effort du tout anglais Il me paraissait impératif de mettre en place le plus rapidement possible un « lexique de classe » qui donnerait aux élèves les moyens de réagir en toute circonstance. Je décidai donc de leur proposer une fiche de classroom English sur laquelle figuraient des éléments pouvant être utilisés en warm-up, tels que le temps ou encore la façon d’exprimer son humeur du jour. Ces éléments étaient accompagnés d’illustrations afin de faciliter leur utilisation et d’éviter tout recours au français. J’ai également ajouté sur cette fiche des outils permettant aux élèves de prendre la parole même dans des situations où ils pensaient ne pas être en mesure de la prendre. Ces phrases étaient dans un premier temps simples et minimales afin qu’elles puissent être mémorisées par tous. Ainsi j’ai pu constater que les élèves se sont peu à peu « déridés » et que le simple fait de substituer un « I don’t understand » à un « J’sais pas moi ! » ou encore d’avoir recours à « Sorry ! I can’t hear ! Can you repeat please ? » plutôt que de dire « J’ai rien entendu » constituait un vrai progrès pour ces élèves. Ils ont progressivement pris conscience que parler anglais n’était pas insurmontable et qu’il suffisait de partir de petits détails pour déjà effectuer de grands pas. Ces groupes lexicalisés leur ont permis d’acquérir davantage de confiance. Les élèves se sont intéressés à la possibilité de formuler en anglais leurs excuses pour leur arrivée tardive en cours, leur désir d’ouvrir la fenêtre, d’emprunter un stylo, de jeter un papier à la corbeille… En résumé, des situations 6 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite courantes de leur quotidien. Pour que les élèves puissent s’approprier cette fiche, je n’ai pas exigé qu’ils l’apprennent par cœur. En effet, je sentais que je commençais tout juste à les rallier à ma cause. Leur demander d’apprendre la fiche par cœur n’aurait fait qu’ajouter à leur difficulté et les auraient découragés. Ils ont donc été autorisés à garder cette fiche sur leur table pendant un mois. J’avais estimé qu’une fois cette période écoulée, vu qu’ils n’avaient pas été réticents à utiliser la fiche, ils seraient en mesure de réagir sans l’avoir sous les yeux. Et c’est effectivement ce qui s’est produit. A force d’entendre leurs camarades et également à force de répéter les énoncés, les élèves se sont petit à petit approprié le contenu de la fiche. Ils en font désormais un emploi naturel. Pour faciliter plus encore leur possibilité d’expression, il m’a semblé opportun d’avoir recours à un codage auquel ils ont dû se familiariser. Ainsi, leur ayant souligné l’importance de s’exprimer, dans un premier temps, ils prenaient la parole mais en même temps. Ceci engendrait nécessairement une certaine confusion. Mais sans doute était-ce pour « noyer » les difficultés de chacun, pour que chaque réponse se fonde dans la masse et que le professeur ne puisse véritablement savoir qui étaient les auteurs des bonnes ou mauvaises réponses. J’ai donc été contrainte de procéder à une régulation de ces prises de parole désordonnées et d’anticiper en levant moi-même le doigt pour leur montrer qu’ils devaient agir de même et attendre que je leur octroie la prise de parole. Cela ne s’est pas fait sans mal mais ce premier codage en a impliqué d’autres auxquels les élèves ont été très réceptifs. Ainsi par exemple, lorsque je veux obtenir des répétitions chorales, je mime le chef d’orchestre ; quand je veux qu’ensuite la répétition soit individuelle, je pointe l’élève du doigt. Ces codages me sont d’une extrême utilité lorsque les élèves produisent des énoncés. Le fait par exemple de brandir trois doigts leur fait prendre conscience qu’ils ont oublié un « s » à la troisième personne du singulier et leur permet de se corriger. De même, autre exemple, lors de l’emploi du génitif, le fait de passer l’index devant le pouce leur fait tout de suite comprendre qu’ils doivent mettre 7 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite le possesseur devant l’objet possédé. Je tiens à souligner que ce système est réellement efficace. Outre l’intérêt qu’il présente pour guider les élèves, il permet parallèlement un gain de temps non négligeable. Il présente néanmoins un inconvénient : les élèves changeant de professeur chaque année, ils doivent sans cesse se familiariser avec des codages différents, ayant une signification différente. Sans doute faudrait-il une concertation entre professeurs en début d’année afin qu’il y ait une harmonisation à ce niveau. Par ailleurs, dans ma démarche de dédramatisation de l’utilisation du tout anglais, la phonologie m’a été d’une aide précieuse. En effet, je crois que ce qu’il ne faut pas changer, même avec les élèves en difficulté, c’est l’entrée dans la langue par l’oreille. Pour rendre la langue anglaise plus familière et réduire son caractère étranger, je n’ai pas hésité à jouer avec elle, avec ses sonorités, son rythme, sa mélodie. J’ai mis en valeur le caractère « vivant » de la langue en faisant preuve d’exagérations. Celles-ci ont eu pour effet de provoquer des sourires, voire des rires, ce qui a contribué à « détendre » l’atmosphère et peut-être à permettre aux élèves de percevoir leur enseignant de manière un peu différente. Progressivement, les élèves sont entrés dans le jeu et ont voulu calquer le modèle phonologique. J’ai le sentiment que désormais, les mots porteurs de sens n’ont plus de secret pour eux. c) L’importance des rituels. Face à des élèves désorientés, n’ayant aucune habitude d’entrée en classe ou de salutations par exemple, il s’avérait nécessaire de mettre en place des rituels auxquels il n’était plus question de déroger. En effet, plus encore que les autres, les élèves en décrochage scolaire ont besoin de repères précis, d’habitudes, de règles leur indiquant dans quelle direction aller. Cela permet de créer un environnement sécurisant. C’est pourquoi chaque entrée en classe est ponctuée par le « good morning ! » de chacun des élèves. Les élèves ont pour consigne de ne pas s’asseoir 8 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite avant que je ne les y aie invités. Et ce n’est d’ailleurs qu’après les avoir salués et attendu leur réponse chorale que je les invite à s’asseoir. Le rituel se poursuit ensuite avec l’appel. Un élève pose la question « Who’s absent today ? » ou encore « Who’s missing today ? », et un autre répond soit par « Nobody’s missing today », soit par « X’s missing today ». Dans ce dernier cas, les élèves émettent des hypothèses sur les raisons de l’absence de leur(s) camarade(s) : « Maybe he’s ill », « I think she’s late ». Spontanément l’un d’eux donne ensuite la date du jour. Les rituels contribuent non seulement à rassurer les élèves mais présentent également bien des avantages. En effet, les élèves savent, avant même de franchir le pas de la porte, qu’ils vont devoir s’exprimer en anglais, ce qui constitue les premiers pas vers une autonomie. De la même manière, ce procédé les invite à se passer du professeur puisque chaque leçon commence de la même façon. Enfin ces rituels leur permettent d’acquérir des réflexes mais aussi d’enrichir leurs connaissances linguistiques. En effet pour éviter que les habitudes ne riment avec lassitude, je prends soin d’injecter une nouvelle structure ou du vocabulaire à chaque fois que la situation s’y prête. A titre d’exemple, un des élèves de la classe a été amené à partir en stage. Cette situation a été l’occasion d’introduire « will » et « how long » qui ont également été rebrassés au moment du départ en voyage scolaire de certains des élèves de la classe. De la même manière, certains élèves sont sélectionnés chaque année pour passer les épreuves du Brevet de Sécurité Routière. Ces épreuves m’ont permis d’effectuer le rebrassage de « have to » et « must ». La phase de warm-up fait également partie du rituel. Elle constitue une « mise en bouche » tant au niveau linguistique qu’au niveau phonologique. Grâce à ce « petit échauffement », j’ai obtenu des résultats très satisfaisants. En effet, la phase de warm-up crée l’opportunité d’introduire différentes structures. Ainsi à titre d’exemple, les élèves ont été, tôt dans l’année, habitués à utiliser le present perfect sans même en être conscients. Ainsi, j’ai posé en jalon 9 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite des énoncés tels que « I’m sorry ! I haven’t done my homework », « I’ve forgotten my copybook », « I think I’ve lost it ». Ces groupes lexicalisés ont l’avantage de pouvoir faire l’objet d’une utilisation dans la vie quotidienne des élèves. Par ailleurs, ils permettent un rebrassage du matériel scolaire et servent à fixer quelques participes passés de verbes irréguliers. Ainsi lorsqu’au mois de février nous avons abordé le present perfect, les élèves se sont une fois de plus sentis en terrain connu, donc sécurisés, ce qui a largement facilité la prise de parole. La phase de warm-up est suivie de la restitution de la leçon. Cette phase du cours a été l’occasion pour moi de réellement passer d’un extrême à l’autre. Les premières semaines, il m’a semblé que cette phase du cours « terrorisait » les élèves. A ce moment précis, le silence régnait plus encore qu’à un autre moment. J’ai rapidement pris conscience que la réaction des élèves était due au fait que la restitution du cours repose en partie sur l’apprentissage de la leçon. Or, la majorité de la classe n’avait absolument aucune méthodologie pour apprendre leurs leçons. Certains élèves ne prenaient même pas la peine d’ouvrir leur cahier en rentrant chez eux. Mais une fois la méthodologie mise en place (j’aborderai cet aspect dans la souspartie suivante), la restitution de la leçon s’est avérée être la phase du cours préférée des élèves. En effet, ils ont petit à petit appris à envisager cette phase autrement que comme une contrainte. Au contraire, ils se sont sentis plus à l’aise quand ils ont pris conscience que leur prise de parole durant cette phase s’appuyait su du « réchauffé ». Il leur suffisait d’apprendre leur leçon et de suivre le guidage de leur professeur pour reconstituer ce qui avait été dit à la séance précédente. Je dois admettre que les premiers mois ont été laborieux mais je savoure aujourd’hui le plaisir d’obtenir une restitution de leçon étoffée et de voir mes élèves fiers de pouvoir participer. Je n’aurais pas pu obtenir ces résultats sans la mise en place d’une remédiation. 10 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite d) Mise en place d’une remédiation. En ce qui concerne l’apprentissage des leçons, la mise en place d’une remédiation a d’abord été le fruit de ma propre remise en question. En effet, en début d’année, je suis, à tort, partie du principe qu’apprendre la leçon était un travail effectué par les élèves en dehors de la classe. Ce travail faisait, selon moi, partie de leurs tâches personnelles et consistait pour eux à « apprendre » à la maison la trace écrite du cahier. Une fois le cours terminé, j’estimais que j’avais rempli mon contrat et qu’il appartenait ensuite aux élèves de remplir le leur à la maison. Je supposais donc que le travail proprement dit d’apprentissage de la leçon allait plus ou moins de soi dans la mesure où il ne s’agissait que de revoir ce qui avait été vu en classe. Or, je constatai que les élèves étaient en grande difficulté lorsqu’il s’agissait de restituer le cours lors de la phase de vérification orale des connaissances. Afin d’explorer la démarche et le vécu de mes élèves en situation d’apprentissage, je décidai de leur demander comment et dans quelles conditions ils apprenaient leurs leçons. Ce sondage fut fort intéressant car il m’a révélé que certains apprenaient devant leur télévision ou en écoutant la radio. En outre, pour eux, apprendre une leçon, c’était la lire deux ou trois fois. Certains commençaient à faire leurs exercices avant même d’avoir pris connaissance de la leçon. Une action de remédiation s’imposait car « Pour pouvoir poursuivre l’étude de la langue, l’élève […] doit disposer d’une certaine autonomie dans le domaine méthodologique disciplinaire. Il doit être en mesure de […] connaître les tâches usuelles d’apprentissage (leçons, types d’exercices, etc.) et les différentes démarches qui permettent de les mener à bien.4» J’ai donc consacré deux séances à la méthodologie pour l’apprentissage des leçons. Il ne m’a pas semblé que ces séances aient été une perte de temps. Au contraire, elles ont été très motivantes : les élèves ont été surpris de voir que je ne m’attachais pas seulement à leurs résultats mais aussi à leur manière d’apprendre. 4 Ministère de l’Education Nationale, Enseigner au collège : programmes et accompagnements – anglais LV1/LV2, CNDP, 2002, p.18 11 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite J’ai conseillé le passage à l’écriture, très fécond. Les conseils prodigués lors de la formation IUFM m’ont également été d’un très grand secours. Je n’ai pas hésité à communiquer aux élèves les fiches de méthodologie que j’ai jugées très intéressantes. Pour que le stockage des informations par les élèves se fasse de manière optimale, je jugeai utile d’associer cette méthodologie d’apprentissage des leçons à un renforcement des répétitions individuelles et collectives lors des séances. « Si cet entraînement est convenablement conduit, les élèves peuvent facilement prendre conscience des progrès accomplis, ce qui est un puissant facteur de motivation.5» Il me semble que « l’archivage » se fonde beaucoup sur la répétition. Ces répétitions permettent à l’élève d’intégrer de façon implicite certaines structures. C’est un moyen de les fixer dans la mémoire des élèves. Pour rendre ces répétitions moins rébarbatives et plus efficaces, j’ai pensé que la phonologie devait jouer un rôle prépondérant. Ainsi, plusieurs procédés, qui ont déjà révélé leur efficacité, m’ont été d’une aide précieuse. J’ai usé et abusé du humming qui a suscité certains rires au départ mais qui a finalement aidé les élèves à se désinhiber. De même, commencer par la fin de la phrase ou du groupe de mots (backward building) a permis une meilleure fixation et a joué un rôle dans un début de mémorisation. Dans ce même esprit, j’ai invité les élèves à battre la mesure. Ainsi ces premiers pas pour lever les obstacles liés à la prise de parole ne se sont pas fait sans mal mais ont fini par payer puisque les élèves ont accepté de coopérer. Cette première étape franchie, il me fallait accroître leur désir de participation et les inciter à se servir de ces premiers pas pour acquérir davantage de confiance. 5 Ministère de l’Education Nationale, Enseigner au collège : programmes et accompagnements – anglais LV1/LV2, CNDP, 2002, p.58 12 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite II] Créer une dynamique de classe. Face à des élèves qui subissaient le cours, il me fallait agir pour qu’ils en deviennent partie prenante. Il semble que pour motiver les élèves à prendre la parole, il faille toujours chercher à éveiller leur curiosité : « Quelle que soit la nature des difficultés, l’aide doit toujours se situer dans un contexte de pédagogie de l’encouragement. Toute aide technique serait inopérante si le professeur n’avait pas constamment le souci de susciter chez l’élève l’envie, le désir de dire quelque chose.6» a) Eveiller la curiosité des élèves. Bien souvent, les élèves en grande difficulté n’aiment pas l’école, d’où la nécessité de faire preuve d’imagination pour les réconcilier si non avec l’Institution, du moins avec les cours d’anglais. Le choix des supports m’a donc semblé primordial. Travaillant sur le manuel Action 4 (Dominique P., Lacoste B., Nathan), très peu de supports m’ont semblé susceptibles de déclencher une quelconque motivation chez des élèves faibles. Outre des documents piochés dans certains manuels (The New Apple Pie, Lemarchand F., Julié K., Hachette Education / Spring, Lemarchand F., Julié K., Hachette Education), j’ai privilégié l’utilisation de documents authentiques extraits de magazines pour adolescents, de journaux, … tout ce qui était rattaché à leur vécu, à leur univers. En effet, il m’a semblé judicieux de prendre en considération leurs intérêts et le monde dans lequel ils évoluent. Utiliser leur propre culture comme accroche pour les motiver me paraissait astucieux. Cette idée a notamment été développée dans un article du Monde de l’Education : « La répétition des situations engendre un effet de lassitude. Face à des élèves en situation de décrochage, l’enseignant doit réagir et devenir la prostituée du savoir, en faisant de son enseignement un objet de désir. D’autant que dans la relation triangulaire élève – enseignant – savoir, à l’ennui du premier correspond celui du 6 Ministère de l’Education Nationale, Enseigner au collège : programmes et accompagnements – anglais LV1/LV2, CNDP, 2002, p.57 13 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite second. […] L’école doit récupérer cette capacité de désirer. Cela passe par l’approche de traits culturels plus proches de ces jeunes.7» Forte du premier sondage auquel je les avais soumis et qui s’était avéré très utile pour ma pratique, je décidai cette fois de diagnostiquer leurs centres d’intérêts. Je leur ai tout simplement demandé quels thèmes ou quelles activités seraient susceptibles de les intéresser. Parmi les réponses : les activités extrascolaires (en particulier le sport), les voyages (de nombreux élèves sont issus de familles d’Afrique du Nord ou d’Afrique noire et retournent, l’été, dans les pays d’origine de leurs parents), l’immigration, le racisme, la musique, ou encore le cinéma. Je me suis donc attachée à leur proposer, aussi souvent que possible, des documents en rapport avec leur quotidien car pour reprendre les propos de Kathleen Julié, « […] les élèves ne parleront que si nous leur proposons des tâches et des activités qui les touchent affectivement ou intellectuellement.8» Ainsi nous avons étudié une chanson de R. Kelly, « If I Could Turn Back the Hands of Time », qui a remporté un vif succès car les élèves se sont sentis directement concernés. Cette chanson traite d’une douloureuse rupture amoureuse. Les élèves se sont alors placés dans un contexte concret et réel pour eux : l’adolescence et ses premiers émois amoureux. Cela a permis de leur offrir l’occasion de parler d’eux et surtout de se rendre compte de l’utilité de l’anglais car ils ont pu dépasser le cadre fictif proposé par le manuel. Ainsi avoir quelque chose à dire parce qu’on le vit tous les jours est sans nul doute source de motivation. Cela m’a permis de prendre conscience de la nécessité de réemployer les points travaillés en les adaptant au vécu des élèves car ceux-ci prennent alors la parole avec beaucoup plus d’enthousiasme. Tenir compte des intérêts des élèves, c’est aussi ne pas oublier leur penchant pour les activités ludiques. J’ai pu, à travers le jeu, introduire une structure complexe, un « point de grammaire délicat ». Les élèves apprécient tout particulièrement ces occasions de pouvoir apprendre en 7 8 Bonperaux C., « Voyage au bout de l’ennui », Le monde de l’Education, n°310, janvier 2003 Julié K., Enseigner l’anglais, Hachette Education, 1994, p.84 14 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite s’amusant. Le fait d’avoir, de temps en temps, recours au jeu a créé dans la classe une ambiance à la fois ludique et stimulante. A titre d’exemple, j’ai utilisé un poème pour support. J’ai écrit l’intégralité du poème au tableau. J’ai d’abord fait un travail sur le rythme en procédant à plusieurs répétitions chorales. Une fois ce travail effectué, un à un, les élèves ont dû réciter le poème mais à chaque fois qu’un élève avait terminé, j’effaçais un mot ou un groupe de mots, si bien que, plus les élèves récitaient, moins il y avait d’éléments au tableau. Ce travail a été particulièrement fructueux car il a constitué pour les élèves un véritable défi. En plus d’avoir stimulé leur motivation, il a exercé leur mémorisation et facilité la fixation et la consolidation des structures et du lexique. En outre, il m’a apporté la satisfaction de voir toutes les mains se lever. b) Quand notation rime avec valorisation… Cette prise de parole demande à être récompensée et soutenue par un système de notation en adéquation avec les risques pris par les élèves. Après quelques semaines de cours, j’ai mis en place le système des fiches de participation orale, empruntées à une formatrice IUFM (cf : annexe B). Celles-ci se sont révélées particulièrement utiles pour motiver les élèves à prendre la parole car elles ont permis d’instaurer une émulation au sein de la classe. Les élèves doivent en effet noter une barre sur la fiche à chaque fois qu’ils prennent la parole. Lorsque leur production est particulièrement bonne, je leur indique de noter deux, voire trois barres. Je dois avouer que j’ai d’abord été réticente à l’utilisation de telles fiches car je craignais que les élèves « trichent » en rajoutant des barres par-ci par-là, et que les résultats soient faussés. Mais aujourd’hui, je pense sincèrement qu’un climat de confiance s’est instauré entre mes élèves et moi, et, à ce jour, je n’ai jamais constaté d’aberrations après avoir ramassé ces fiches de participation. Les élèves se sont réellement piqués au jeu et ils se sentent valorisés de pouvoir, en quelque sorte, « participer à leur propre évaluation ». En 15 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite effet, par le biais de ces fiches de participation orale, ils contribuent à mesurer leurs efforts, ce qui leur permet de pouvoir, au fil des semaines, constater leurs progrès. Par ailleurs, il règne désormais une véritable compétition entre eux : c’est à celui qui sera intervenu le plus grand nombre de fois durant une séance. Néanmoins, et heureusement, cette compétition reste positive et bon enfant. Afin d’optimiser encore davantage le rôle de ces fiches de participation et donc, d’inviter plus encore les élèves à intervenir, j’ai privilégié une technique largement préconisée et qui s’est avérée très efficace : l’inter-correction, tant sur le plan linguistique que sur le plan phonologique. Outre le fait qu’elle m’a servi à maintenir les élèves attentifs pendant les productions de leurs camarades, elle m’a permis de les voir prendre une certaine assurance. Ils se sont sentis en effet très valorisés de pouvoir, à certains moments, « prendre la place du professeur » et servir de modèle. Cette notion de valorisation me paraît fondamentale et est intimement liée à la question de la motivation. Comme le dit Claudine Martina, « pour redonner confiance à l’élève, il faut lui montrer qu’on a confiance en sa capacité de progrès et donc veiller à mettre en valeur toute amélioration si minime soit-elle.9» Le professeur doit donc veiller à ne pas être avare de compliments et à savoir apprécier les efforts et les progrès de ses élèves. En effet, j’ai rapidement pu me rendre compte que mes commentaires à leur égard, à la suite d’une de leur production, avaient énormément d’impact. Ces commentaires agissaient sur l’opinion qu’ils avaient d’eux-mêmes, et, par conséquent, sur leur motivation. La manière d’approuver ou de désapprouver l’intervention des élèves est donc primordiale car elle influence leur engagement ainsi que leur persévérance dans les activités que l’enseignant propose. Aussi est- il impératif que les commentaires de l’enseignant permettent aux élèves non seulement de savoir ce qui est à améliorer dans leurs productions, mais aussi ce qu’ils ont bien réussi à faire. Je n’hésite donc pas à gratifier d’un « very good !!! » ou encore d’un « excellent !!! » toute prise de risques. J’apprécie considérablement de pouvoir faire ce genre 9 Martina C., Animer la classe d’anglais au collège, Belin, 1997, p.339 16 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite de commentaires de plus en plus régulièrement alors que je n’en avais pas du tout l’occasion en début d’année tant la prise de parole de mes élèves était quasi-inexistante. Force est de constater que la mise en place d’un important guidage à jouer un rôle prépondérant dans la motivation à cette prise de parole. c) L’importance du guidage Pour reprendre les propos de Kathleen Julié, « les élèves ne prennent de risques que si le professeur, par son attitude personnelle, les sécurise. » Mes élèves étant, de surcroît, en difficulté, je me devais encore plus de trouver des moyens pour les guider au maximum. L’utilisation de prompts au tableau a rapidement fait ses preuves et créé des automatismes chez les élèves. Ainsi, lors d’une activité de compréhension orale, le simple fait de voir des déclencheurs tels que « Who ? Where ? When ?... » a entraîné chez eux des associations que j’avais injectées en début d’année ; les expressions « The characters are… » ou « The scene takes place… » ont permis de lever quelques obstacles à la prise de parole. De même les dessins au tableau m’ont permis de remarquer que mes élèves étaient particulièrement « visuels ». Le fait de voir des dessins permet de réactiver aisément du vocabulaire car les élèves font appel à leur mémoire visuelle. Ces dessins, au même titre que les prompts, jouent donc le rôle de véritables déclencheurs. Comme mes élèves étaient très sensibles à l’utilisation de ces dessins, j’ai également décidé d’avoir recours aux flashcards. Mes « talents » de dessinatrice sont en effet très limités (ce qui a d’ailleurs parfois donné lieu à des situations assez cocasses !) C’est pourquoi les flashcards sont très pratiques. Elles sont une source de motivation et d’expression pour les élèves parce qu’elles sont colorées et attrayantes. Je veille à en utiliser le plus souvent possible car elles ont beaucoup de succès. Ainsi, j’ai fait étudier un texte en compréhension orale à mes élèves dont le thème principal était « les jeunes et leur futur métier ». Dans ce dialogue, la jeune Rachel avait bien du mal à 17 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite se décider quant au métier qu’elle voulait exercer. Pour faire accéder mes élèves à l’implicite du texte, je les ai invités, avant de passer l’enregistrement, à imaginer les différents métiers auxquels Rachel avait bien pu songer. Peu d’entre eux ont spontanément levé la main. Cette réaction est incontestablement due au manque de confiance dans les connaissances anciennes que j’évoquais en introduction. En effet, dès que j’ai « brandi » mes flashcards, la quasi-totalité des élèves a voulu prendre la parole. J’ai obtenu des productions telles que « I suppose she wanted to be a dentist » ( cf: annexe C) ou « In my opinion she wanted to be a baker » (cf: annexe D). Une fois encore, les flascards ont été les éléments déclencheurs de parole et les élèves, se prenant au jeu, ont ensuite essayé de trouver des productions personnelles sans besoin d’être orientés. En dernier lieu, il m’a fallu m’improviser « actrice » pour mimer certaines situations qu’il m’était impossible de représenter autrement. Là encore, le mime a eu un rôle très évocateur. Parfois d’une simple production de mots, ils sont parvenus avec mon aide, à formuler des énoncés plus complets. Toutes ces stratégies ont réellement contribué à optimiser la participation de mes élèves. Elles montrent que « […] le professeur dispose d’un espace de liberté qui lui permet d’utiliser au mieux le sens de l’émulation de ses élèves, de les aider à développer leur autonomie et à accroître leur capital de confiance.10» III] Réussites et limites observées au sein de la classe. a) Une meilleure perception de soi. J’ai pu remarquer que le fait d’avoir été à l’écoute des attentes et des intérêts de mes élèves avait aidé à modifier, dans une grande majorité, l’image dévalorisée qu’ils avaient d’euxmêmes. Prêter attention à leurs centres d’intérêt m’a permis de leur montrer que je 10 Ministère de l’Education Nationale, Enseigner au collège : programmes et accompagnements – anglais LV1/LV2, CNDP, 2002, p.105 18 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite m’intéressais à eux, à leurs goûts, à leurs préoccupations. Ils se sont, dès lors, sentis davantage considérés, mis en confiance, valorisés. Je pense ne pas me tromper en disant avoir ressenti une certaine reconnaissance de leur part pour m’être intéressée à leur univers. Par ailleurs, le fait de les encourager et de valoriser leurs productions les a progressivement amenés à retrouver le goût de l’effort et à me faire part de leurs connaissances. Par-là même, ils ont appris à faire confiance à leurs quelques connaissances des années antérieures et ont pris conscience que prendre la parole en anglais n’était pas aussi insurmontable qu’ils l’imaginaient. Petit à petit, j’ai pu voir, de nouveau, s’éveiller en eux le désir de s’exprimer. J’ai pu apprécier de les entendre prendre des risques et faire des efforts pour s’impliquer davantage dans leur apprentissage. Ils sont, en outre, assez fiers de la responsabilité qui leur incombe dans le processus d’évaluation de l’oral grâce aux fiches de participation. Le recours à un tel système a favorisé un investissement beaucoup plus important de leur part. b) Vers un regain d’intérêt pour l’anglais. Dès lors que j’ai adapté mon enseignement aux intérêts des élèves et au monde dans lequel ils évoluent, j’ai pu observer un regain d’intérêt pour l’anglais. Désormais, certains élèves n’hésitent pas à venir me trouver, occasionnellement, à la fin de l’heure pour me demander de les aider à comprendre quelques paroles de chansons par exemple. De même, j’ai été très surprise du comportement d’une élève, d’ordinaire peu encline à la participation, qui est venue à ma rencontre à la sortie des cours, sur le parking de l’établissement, car elle voulait envoyer une « déclaration d’amour » en anglais et voulait s’assurer que son message ne contenait pas d’erreurs ! Ce genre d’anecdotes tend à prouver que le cours d’anglais peut ne pas être un « lieu clos ». Bien au contraire, à ma grande satisfaction, j’ai pu constater que les élèves prolongeaient leur apprentissage même en dehors de la classe et que certaines situations favorisaient le transfert. Aussi l’exemple donné précédemment illustre-t-il parfaitement les propos de Mireille Quivy et Claire Tardieu : « Un dernier type de transfert est axé 19 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite sur la situation personnelle, la mise en situation de l’élève lui-même dans un contexte nouveau duquel surgira un imprévu que l’élève devra gérer. La situation devient problème à résoudre et l’on passe des schémas de reproduction aux schémas de production autonome. L’élève prendra ainsi progressivement confiance en luimême.11» C’est ainsi que le cours d’anglais revêt un sens aux yeux des élèves. En outre, accroître leur motivation en cours m’a permis de rendre certains plus ouverts au monde anglo-saxon. A titre d’exemple, lors d’un récent warm-up, une élève a fait part à la classe qu’elle était allée au cinéma, voir le film « Honey ». Ce film aborde le thème de la danse, activité pour laquelle l’élève en question se passionne. Elle a souligné que pour la première fois, elle avait vu un film en version originale. Ainsi, le fait d’avoir su, parfois, piquer leur curiosité en cours a entraîné un regain d’intérêt pour l’anglais même dans leur vie quotidienne. Le bilan est donc globalement très positif mais il serait malhonnête de ne pas admettre que j’ai eu parfois à essuyer quelques écueils. c) Là où tout ne baigne pas dans le meilleur des mondes : Limites aux stratégies employées. Force est de constater que la motivation n’est pas l’unique clé du problème. Un professeur doit, en effet, parfois se résoudre à l’idée qu’il n’existe malheureusement pas de recette miracle. Si les stratégies que j’ai mises en œuvre m’ont, la plupart du temps, permis d’éveiller le désir de parler des élèves, je dois avouer que je n’ai pas toujours rallier la totalité d’entre eux à ma cause. D’une part, il est difficile de pouvoir répondre aux attentes de chacun. Il ne faut pas oublier que la motivation est une caractéristique individuelle et que, la diversité des goûts des élèves est parfois telle qu’il s’avère impossible de satisfaire tout le monde. D’autre part, j’ai parfois été ramenée à la dure réalité qui veut que les adolescents qui composent nos classes sont tous issus de la « génération zapping ». Leurs préoccupations changent souvent au gré de leur humeur et leur motivation fluctue donc sans cesse. Par ailleurs, j’ai dû 11 Quivy M., Tardieu C., Glossaire de didactique de l’anglais, Ellipses, 2002, p.276 20 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite apprendre à accepter que ma responsabilité se limitait aux seuls facteurs sur lesquels je pouvais agir. En effet, si je suis capable de redoubler d’efforts pour rendre ma pédagogie plus motivante, je ne peux, en revanche, influer sur des facteurs tels que l’environnement social ou familial. Or, ces paramètres jouent également un rôle fondamental sur la motivation des élèves. En dernier lieu, il faut savoir que la motivation est certes un puissant moteur, mais qu’elle ne suffit pas, à elle seule, pour assurer un bon apprentissage en classe. 21 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite CONCLUSION Pour conclure, face au peu d’intérêt manifesté pour l’anglais par une écrasante majorité de mes élèves de 4ème, il m’a paru impératif de mettre en œuvre des stratégies visant à les remotiver. Il m’a fallu en premier lieu me remettre en cause et essayer de redoubler d’imagination pour trouver ce qui serait susceptible de provoquer en eux un déclic, une implication plus importante dans leur apprentissage et notamment dans leurs interventions orales. Je pense que certains d’entre eux se sont, en tout cas, réconciliés avec l’anglais alors qu’ils étaient très dubitatifs quant à leurs possibilités de réussite ou, du moins, d’amélioration. Ceux-là, à mon sens, éprouvent aujourd’hui un certain plaisir à s’exprimer en anglais. Leur inhibition a disparu et désormais, ils osent. D’ailleurs, combien de fois leur ai-je répété : « Il faut oser ! » Pour d’autres le bilan est certes plus mitigé. Mais il n’en reste pas moins que ma réussite dans mon projet de susciter et d’entretenir la motivation chez ces élèves, même si elle n’a pas eu d’effet à cent pour cent au sein de la classe, a contribué à rendre ce métier d’enseignant, dans lequel je fais mes premiers pas, très enrichissant. Le bénéfice a été pour une grande partie des apprenants et, de manière certaine, pour l’enseignant. 22 Mémoire publié sur le site langues de l’IUFM de Créteil en 2006 – Reproduction interdite BIBLIOGRAPHIE ♦ Bonperaux C., « Voyage au bout de l’ennui », Le monde de l’Education, n°310, janvier 2003 ♦ Julié K., Enseigner l’anglais, Hachette Education, 1994 ♦ Martina C., Animer la classe d’anglais au collège, Belin,1997 ♦ Ministère de l’Education Nationale, Enseigner au collège : programmes et accompagnements – anglais LV1/LV2, CNDP, mai 2002 ♦ Quivy M. et Tardieu C., Glossaire de didactique de l’anglais, Ellipses, 2002 23