Maternité et licenciement : une protection absolue
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Maternité et licenciement : une protection absolue
Maternité et licenciement : une protection absolue La femme enceinte bénéficie de dispositions protectrices en droit du travail, notamment contre les mesures discriminatoires et contre le licenciement. Mais est-elle protégée de la même façon avant, pendant le congé maternité et à son retour dans l'entreprise ?La Cour de cassation vient de lever le voile sur certaines incertitudes.. C'est pour nous l'occasion de faire le point sur la question. Que dit le code du travail L'article L 1225-4 dispose « qu'aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constaté et pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu'elle use ou non de ce droit, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l'expiration de ces périodes » . Combien de temps dure le congé maternité ? Il est variable en fonction du nombre de naissances et du nombre d'enfants dont la salariée, ou le ménage, a la charge. Pour le premier ou le second enfant, le congé prénatal est de six semaines et le congé postnatal est de dix semaines (L 1225-17 CT). La salariée bénéficie-t-elle de la même protection avant, pendant et après le congé maternité ? Non, la loi instaure une distinction entre deux périodes. D'une part, pendant le congé maternité à proprement parlé, il existe une protection absolue : le licenciement est totalement interdit. D'autre part, une protection relative qui commence dès le constat de l'état de grossesse jusqu'au départ en congé maternité, et dans les quatre semaines qui suivent le congé : le licenciement est possible dans des cas strictement encadrés par le code du travail. Concernant les quatre semaines postnatales, le doute avait longtemps plané. La Cour de cassation a cependant récemment tranché : la protection est aussi relative (Cass. soc. 17 février 2010, no06-41.392). En période de protection relative, le licenciement est possible pour deux motifs seulement : en cas de faute grave de l'intéressée, non liée à l'état de grossesse, ou d'impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement. Si licenciement il y a, à partir de quel moment peut-on le notifier ? L'article L 1225-4 précise qu'en cas de faute grave ou d'impossibilité de maintenir le contrat, " la rupture du contrat ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail ", c'est-à-dire pendant l'intégralité du congé maternité, mais cela reste possible pendant les quatre semaines suivant le retour dans l'emploi de la salariée. Que se passe-t-il si l’employeur ignore l’état de grossesse de la salariée au moment où il la licencie ? La salariée peut alors faire annuler le licenciement si elle fournit à son employeur (soit par remise en main propre contre récépissé, soit par lettre recommandée avec accusé de réception) un certificat médical attestant son état de grossesse et la date présumée de son accouchement, dans les 15 jours à notification du licenciement (art. L 1215-5CT). Attention, cependant, cette possibilité n'est pas ouverte pendant la période d'essai. On vient de voir que le licenciement ne pouvait en aucun cas être notifié pendant le congé maternité, mais l’employeur peut-il commencer à organiser le départ de la salariée ? Non, vient de répondre la Cour de cassation (Cass. soc. 15 septembre 2010, no0843.229). Dans cette affaire, une salariée part en congé maternité du 15 août au 3 décembre 2005, puis en congés payés. Elle reprend le travaille 2 janvier 2006. Le 4 janvier, elle est convoquée à un entretien préalable à son licenciement pour inaptitude qui prendra effet le 27 janvier. La salariée décide de contester le licenciement car elle estime qu'une salariée a été engagée pendant son congé maternité dans le seul but de la remplacer à titre définitif. L'organigramme de l'entreprise a d'ailleurs été modifié en ce sens : le nom de la salariée en congé maternité a disparu de celui-ci au profit de la salariée remplaçante. La Cour lui donne raison : la cour d'appel aurait dû vérifier" si l'engagement d'un salarié durant le congé de maternité de l'intéressée n'avait pas eu pour objet de pourvoir à son remplacement définitif, de sorte qu'il caractérisait une mesure préparatoire à son licenciement ". Toute mesure préparatoire au licenciement, comme le remplacement définitif de la salariée pendant le congé maternité, est donc formellement interdite, et entraîne la nullité du licenciement. Attention à ne pas confondre avec le remplacement temporaire pour la durée de l'absence, qui est, lui, autorisé. L’employeur peut-il mener l’entretien préalable au licenciement durant le congé maternité à condition de le notifier à l’issue de celui-ci ? La jurisprudence l'admettait jusque maintenant. Mais il y a fort à parier que ce raisonnement ne pourra plus s'appliquer Pour résumer : Il existe 2 types de protection : une protection absolue (pendant le congé maternité) et une protection relative (dès que l'employeur a connaissance de l'état de grossesse et pendant les quatre semaines qui suivent le retour de la salariée dans l'entreprise). Pendant la période de protection absolue, le licenciement est totalement interdit et pendant la période de protection relative, il est possible seulement en cas de faute grave de la salariée ou d'impossibilité de maintenir son contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement. Durant la période de congé maternité toute mesure préparatoire au licenciement est formellement interdite. Le non-respect de ces règles entraîne la nullité du licenciement prononcé. La salariée pourra donc obtenir la réintégration dans son poste.