Rapport stage VF 2007 Coirié V. PNM
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Rapport stage VF 2007 Coirié V. PNM
Bilan du suivi suivi Vautour fauve dans le Parc National du Mercantour Eté 2007 Photo : Coirié V. Secteur MoyenneMoyenne-Tinée / Massif du Mounier COIRIÉ Vincent SOMMAIRE Introduction 1 Localisation géographique de la zone d’étude 2 Le massif du Mounier : un contexte très attractif pour les vautours a) Situation géographique b) Géologie et géomorphologie du massif du Mounier c) Contexte humain d) Pourquoi la Barre Sud du Mounier 3 Suivi numérique des oiseaux a) Evolution des effectifs de la colonie de vautours fauves depuis 2003 b) Evolution des effectifs de la colonie de vautours fauves en 2007 4. Suivi qualitatif de l’espèce a) Détermination de l’âge des Vautours fauves présents dans le PNM b) Proportion d’oiseaux bagués c) Identification des oiseaux bagués d) Détails sur les vautours fauves identifiés et leurs déplacements 5. Suivi comportemental de l’espèce a) Evolution des déplacements de juillet à septembre b) Les relations interspécifiques 6. Suivi des curées a) La ressource trophique disponible b) Cas particulier 7. Le pastoralisme et les vautours fauves a) Le Loup et le Vautour, une association qui dérange b) La polémique sur les attaques de vautours Quelques problématiques soulevées par les éleveurs locaux 8. Propositions pour un meilleur suivi Conclusion 2 Introduction Des observations ponctuelles de vautour fauve dans les départements des Alpes-Maritimes et de Haute Provence existent depuis longtemps mais concernaient généralement des individus erratiques et seuls dont l’origine était inconnue (Espagne, Pyrénées, Cévennes ?). Durant l’été 2003, 10 à 35 oiseaux ont été ponctuellement relevés sur le Parc national dont le phénomène fut lié à l’existence depuis 1996 de 3 nouveaux sites de lâchers dans les Préalpes du sud-est de la France. Il s’agit, du nord au sud, des sites du Diois/Vercors (2001), des Baronnies dans la Drôme (1996) et des gorges du Verdon dans les AHP (1999). Ces sites ont fait l’objet de lâchers annuels de vautours issus de centres de soins espagnols ou pyrénéens. Ces réintroductions sont pilotées par la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO/FIR) en collaboration avec les différents espaces protégés concernés (P.N. des Cévennes, P.N.R du Verdon et P.N.R du Vercors) et les associations naturalistes locales (Vautours en Baronnies, Vautours en Haute Provence). Depuis 2003, un suivi Vautour fauve est réalisé par le Parc National du Mercantour en collaboration avec la LPO PACA antenne Verdon montrant notamment une présence accrue de l’espèce, au cœur du PNM, sur le massif du Mont Mounier et ses environs. Ce suivi a montré la nécessité d’une étude plus fine au travers d’un stage bénévole de mijuillet à fin septembre 2007 afin de mieux appréhender l’utilisation de l’espace par les vautours, leurs comportements (déplacements, curées, etc.), l’origine des oiseaux identifiés et les relations interspécifiques (Gypaète barbu, Aigle royal, etc.) sur le massif du Mounier. Cette étude aborde également la place occupée aujourd’hui par le Vautour fauve au sein du Parc, notamment auprès des acteurs locaux que sont les éleveurs et les bergers. 3 1Localisation géographique de la zone d’étude Parc National du Mercantour Zone d’étude Source : PNM Le massif du Mounier, qui culmine à 2817m, se situe à l’extrême sud-est de la chaîne alpine, au cœur du Parc National du Mercantour dans les Alpes-Maritimes, sur les communes de Beuil, Guillaumes, Isola, Péone, Roubion, Roure et Saint-Etienne-de-Tinée. 2. Le massif du Mounier : un contexte très attractif pour les vautours a) Situation géographique Le massif du Mounier est située approximativement à 70 kms à vol d’oiseau de la colonie de vautours fauves des gorges du Verdon d’où proviennent les premiers individus bagués identifiés au sein du Parc National. . Cette colonie nicheuse est localisée à 110 kms de celles des Baronnies, elle-même située à 45 kms de celle du Diois-Vercors vers le nord et à 150 kms de la colonie des Causses cévenoles, cette dernière en relation depuis longtemps 4 avec celles des Pyrénées et de l’Espagne. Des échanges d’individus existent désormais entre les différents sites. Cela rejoint l’un des objectifs de la réintroduction du Vautour fauve qui est de recréer un lien important entre les populations ibériques et balkaniques tout en reconstituant dans les Alpes du sud, le cortège des grands rapaces nécrophages Colonie du PNM a) Géologie et géomorphologie du massif du Mounier La zone d’étude est située dans la chaîne alpine des Alpes maritimes. Elle est généralement constituée de roches sédimentaires disposées en couches successives, datant du secondaire et du tertiaire. On y trouve des roches du Crétacé, notamment des marnes et calcaires en altitude (> 2000 m). Entre 1000 et 2000 m d’altitude, les calcaires massifs, dolomies et marnes (« terres noires ») du Jurassique sont dominants. Les sites constitués majoritairement de roches calcaires (Sierra de Guara, Verdon, Baronnies, etc.) sont très favorables à la présence des vautours pour deux raison principales : Les ascendances thermiques ; Les falaises et pierriers calcaires sont particulièrement propices à l’apparition d’ascendances thermiques. Le réchauffement rapide et le refroidissement lent de ces hautes murailles de calcaire permettent leur formation régulière, portant ces grands rapaces. Les falaises calcaires ; celles-ci ont la particularité d’offrir de nombreux reposoirs en hauteur, grâce aux zones érodées. b) Contexte humain Depuis le Néolithique, les hommes ont façonné les paysages du Mercantour, en s’opposant à la dynamique forestière naturelle par le défrichement, le pâturage et l’incendie. Cette influence est illustrée par les paysages sylvo-pastoraux du massif et par les anciennes terrasses de culture, qui permettaient de retenir la terre fertile des versants pour cultiver l’olivier, la vigne et le châtaignier jusque dans les hautes vallées. 5 Aujourd’hui, le pâturage ovin est largement dominant. Ces paysages ouverts associés aux nombreux troupeaux présents de juin à octobre offrent au vautour fauve d’immenses zones de prospection riches en ressources alimentaires. (cf. 6a p. 14) c) Pourquoi la Barre Sud du Mounier ? Malgré une grande quantité de barres rocheuses au sein du Parc National et de ses environs, il semble que la grande majorité des vautours fauves aient choisis la Barre Sud du Mounier comme reposoir nocturne de mi-juillet à la fin de l’estive. Découvert en 2006, ce dortoir réunit en effet plusieurs critères favorables : Une exposition Est Sud-est ; Le soleil réchauffe la barre très tôt le matin (avant 7h) durant l’été, ce qui permet aux vautours un envol dès le lever du jour. Des vires larges et abritées situées à mi falaise ou sur le tiers supérieur constituent de bons reposoirs pour une grande quantité de vautours. Une aérologie propice au vol à voile ; les ascendances thermiques sont favorisées par la roche et les pierriers calcaires au pied de la barre. Elle est située au cœur d’une zone très pâturée (cf. 6a p. 14) Sa situation dominante (2400 m d’altitude) sur la plupart des reliefs permet un envol sans perte d’énergie pour les vautours fauves. 3. Suivi numérique des oiseaux a) Evolution des effectifs de la colonie de vautours fauves depuis 2003 Année Nb d’observations Effectif max. Commune Lieu-dit 2003 11 35 (08/07/2003) Peone-Valberg Tête du Sapet 2004 34 48 (03/09/2004) Roubion Tête de Varélios 2005 88 52 (28/06/2005) Roubion Cime de Tournerie 2006 190 74 (08/08/2006) Beuil Barre du Démant 2007 > 450 163 (28/08/2007) Peone Barre Sud du Mounier Ce tableau illustre bien l’augmentation des effectifs d’année en année. Le nombre d’observations est représentatif de la fréquentation du Vautour fauve au sein du Parc National du Mercantour mais reste très lié à la pression d’observation qui s’est organisée depuis 2003. L’évolution des effectifs maximums a connu une croissance exponentielle ces cinq dernières années ce qui confirme l’attractivité du site durant l’été. 6 b) Evolution des effectifs de la colonie de vautours fauves en 2007 Evolution des effectifs de Vautours fauves de Juillet à Septembre 2007 Barre Sud du Mounier 07 18 /0 9/ 20 07 11 /0 9/ 20 07 04 /0 9/ 20 07 28 /0 8/ 20 07 21 /0 8/ 20 07 14 /0 8/ 20 07 07 /0 8/ 20 07 Barre de l’Illion 31 /0 7/ 20 24 /0 7/ 20 07 180 160 140 120 100 80 60 40 20 0 Effectifs Le 24 juillet 2007, un comptage sous le reposoir de la barre de l’Illion, au sud de la commune de Beuil, a révélé la présence de 65 vautours fauves. La barre de l’Illion, ainsi que la tête de Pérail semblent être les reposoirs les plus fréquentés à la mi-juillet 2007. La prospection des barres du massif du Mounier (Barre nord, barre sud, barre sud-ouest, barres qui cernent la Vionène entre Vignols et Roubion, etc.) n’a pas révélé de reposoir nocturne utilisé en parallèle entre le 16 et le 28 juillet. Le 28 juillet 2007, 80 vautours seront comptés sur la Barre Sud du Mounier, au nord de la commune de Beuil, reposoir déjà utilisé l’année précédente. La ressource trophique s’est vue nettement augmenter avec l’arrivée progressive de plusieurs troupeaux ovins autour de Vignols aux environs du 25 juillet. Ceci peut expliquer le changement de reposoir nocturne, le site offrant des curées quasi-quotidiennement aux vautours. La Barre Sud du Mounier ainsi que celle du Démant rassemblent, semble-t-il, la grande majorité des vautours fauves observés dans le Parc depuis la fin du mois de juillet. A noter que seuls quelques individus isolés (3 max.) ont été observés sur la barre de L’Illion depuis l’arrivée massive des vautours sur la barre Sud du Mounier. Le 19 août 2007, 98 vautours fauves sont observés sur la Barre Sud du Mounier pour atteindre un maximum le 29 août de 163 individus. Les effectifs sont en accroissement dans le secteur, de nouveaux individus venant se greffer sur cette colonie temporaire. Courant septembre et ce jusqu’à la fin du mois, les effectifs oscillent entre 80 et 130 individus. L’existence de reposoirs nocturnes, sur lesquels viennent se greffer de nouveaux individus de passage au cours de la saison, explique la croissance exponentielle des effectifs observés. On pourrait parler également d’une habitude d’estive qui se développe progressivement depuis 2003. 7 4. Suivi qualitatif de l’espèce a) Détermination de l’âge des Vautours fauves présents dans le PNM Détermination de l’âge de 50 Vautours fauves sur la Barre Sud du Mounier (28/07) Age Vautours fauves adultes Vautours fauves immatures (2 à 5 ans) Vautours fauves juvéniles Nb d’individus 20 25 5 % 40% 50% 10% Détermination de l’âge de 40 Vautours fauves sur le Pervoux (curée) (11/08) Age Vautours fauves adultes Vautours fauves immatures (2 à 5 ans) Vautours fauves juvéniles Nb d’individus 7 25 8 % 17,5 % 62,5 % 20 % Détermination de l’âge de 60 Vautours fauves sur la Barre Sud du Mounier (19/08) Age Vautours fauves adultes Vautours fauves immatures (2 à 5 ans) Vautours fauves juvéniles Nb d’individus 20 35 5 % 33,3 % 58,3 % 8,3 % Détermination de l’âge de 80 Vautours fauves sur la Barre Sud du Mounier (19/09) Age Nb d’individus Vautours fauves adultes 24 Vautours fauves immatures (2 à 5 ans) 52 Vautours fauves juvéniles 4 Tableau II. – Structure par classe d’âge des estivants de Vautour fauve Gyps fulvus dates de l’été 2007 % 30 % 65 % 5% à quatre Toutes les catégories d’âge sont représentées, du jeune de l’année précédente à l’adulte. On peut noter un taux important d’individus immatures ce qui traduit bien l’erratisme propre à cette classe d’âge, notamment à l’estive. b) Proportion d’oiseaux bagués Date Commune Lieu-dit 09/08/2007 11/08/2007 22/08/07 15 et 16/09/07 Beuil Roure Roubion Barre sud du Mounier Le Pervoux Balme des Bœufs Beuil Barre sud du Mounier 1 2 contexte reposoir curée charnier reposoir Nb total d’individus 20 40 41 Nb d’individus bagués (Darvic1 + Muséum2) 2 6 (dont 1 Muséum) 9 (dont 4 Muséum) 108 10 (dont 3 Muséum) Bague destinée à la lecture à distance composée de chiffres et/ou de lettres. Petite bague en métal destinée au CRBPO (Centre de Recherches sur la Biologie des Populations d’Oiseaux) 8 Il est difficile de faire ressortir la proportion exacte d’oiseaux bagués par rapport à celle d’individus non bagués. Ces exemples relevés parmi de nombreuses observations permettent d’estimer le taux de vautours fauves bagués à moins de 15 %. c) Identification des oiseaux bagués N° de Bague ATZ (d) AUG (g) AXU (d) BAG (g) BAH (g) BOE (g) BOX (g) BUY (d) Provenance Verdon Verdon Verdon Verdon Verdon Verdon Verdon Verdon Année de naissance 1999 2000 2001 2001 2001 2004 2004 2005 Nb de con tacts 1 1 1 1 2 3 1 1 DLE (g) DLH (g) AO DIR DIM BPE (d) BSI (d) BSU (d) CDU (d) Blanc/Rouge (d) Blanc/Rouge (d) 3LJ (d) jaune 3X6 (g) jaune E ?7 (d) jaune 433 (d) jaune Verdon Verdon Baronnies Baronnies Baronnies Vercors Causses Causses Causses PN des Pyrénées PN des Pyrénées Espagne Espagne Espagne Espagne 2006 2006 1996 2006 2006 2003 2003 2003 2005 Estimé 2001-2002 Estimé 2004-2005 ? ? Adulte Immature 4 4 1 1 1 3 1 4 1 2 2 4 1 1 1 Tableau III – récapitulatif des vautours fauves identifiés sur le massif du Mounier Nous pouvons constater ici une fréquentation du site par une population très hétérogène de vautours fauves. La majorité des individus bagués proviennent de la colonie du Verdon, population source située à 70 kms du massif du Mounier à vol d’oiseau. Comme les lectures de bagues l’attestent, il est fortement probable que les vautours se déplacent régulièrement d’un site à l’autre. Citons ici le cas de « Lauves » (bagué AUG), oiseau nicheur sur la commune de Rougon (04) observé sur ce site le 25/07/07, puis contacté le lendemain sur la commune de Beuil (06). Son jeune étant encore au nid à cette date, on peut supposer que « Lauves » est rapidement revenu dans le Verdon. Les autres bagues lues, provenant des Baronnies, des Causses, du Vercors, des Pyrénées françaises ou d’Espagne ne permettent pas de faire ressortir une proportion de l’origine des vautours fauves estivants. Toutefois, le taux important d’oiseaux non bagués, de l’ordre de 85 % environ, associé à la présence de 4 vautours espagnols peut laisser penser que de nombreux individus sont originaires de la péninsule ibérique. La faible proportion d’individus bagués identifiés ne permet pas d’évaluer en pourcentage l’origine des oiseaux ayant fréquenté le site durant la période d’estive 9 d) Détails sur les vautours fauves identifiés et leurs déplacements (Cf. Annexe Suivi VF Verdon – PNM (Excel) Données : Sylvain Henriquet, LPO PACA antenne Verdon. Le 26/07/07 (17h30) sur le reposoir de la barre de l’Illion (Beuil, 06) : AUG (g) : « Lauves », Vautour fauve mâle bagué né en 2000 et relâché en 2003 dans les Gorges du Verdon. Ce même individu aura été observé la veille sur le charnier d’alimentation de Rougon (04) entre 18h15 et 19h30. Il sera de nouveau contacté le 31/08 et le 04/09 à Rougon. A noter que « Lauves » est reproducteur cette année avec un jeune à l’envol. BUY (d) : « Xérophile », individu bagué et né en nature en 2005 dans le Verdon. Ce vautour n’aura été observé qu’une fois dans le Verdon depuis le mois de juin. 3LJ (d) : bague jaune, vautour provenant d’Espagne. Contacté dans le Verdon le 08/08 sur le charnier de Rougon (04). ?7E : bague jaune (d) + 1 bague blanche (g), oiseau espagnol adulte. Le 07/08/07 (8h30 – 9h30), une curée sur le versant nord du Col des Moulinès (Beuil, 06) a permis la lecture de 4 bagues : 3LJ (d) : Observé le 8 août, entre 17h45 et 18h30 à Rougon (04). DIR (g) : Vautour fauve né en 2006 dans les Baronnies, présent régulièrement dans la colonie du Verdon depuis novembre 2006. Dernière observation le 03/06/07 à Rougon (04). BOE (g) : « Yeble », Vautour fauve immature né en nature en 2004 dans le Verdon. Individu observé fréquemment dans le Verdon. Contacté le 03/08/07 et le 10/08/07 à Rougon (04). DLE (g) : « Wanda », Vautour fauve né en nature en 2006 dans le Verdon. Relativement absent de Rougon (04) depuis le mois d’avril (contacté une fois par mois), il sera vu à plusieurs reprises fin juillet puis le 03/08/07. Le 11/08/07 (10h – 10h20), une curée sur le versant Est du Pervoux (Roure, 06) a permis la lecture de 4 bagues : Déjà contacté : DLE BAG (g) : « Virades », Vautour fauve adulte né en 2001 puis réintroduit en 2003 dans le Verdon. Observé fréquemment à Rougon en juillet, dernier contact le 14/08/07. BSU (d) : « Wisconsin », Vautour fauve de 2003 provenant des Causses. BPE (d) : « Wallace », né en 2003 dans les Causses puis transféré et relâché dans le Vercors, il fréquente le Verdon depuis l’été 2005 par périodes. Le 19/08/07 (11h20 – 15h14), sur la Barre Sud du Mounier (Beuil, 06) : Déjà contacté : BPE DLH (g) : « Weda », Vautour fauve juvénile né en nature en 2006 dans le Verdon. Contacté le 08/08/07 à Rougon (04). Blanc / Rouge (d) (estimé 2004-2005) : Individu provenant des Pyrénées françaises Le 22/08/07 (11h47 – 13h14), le dépôt de 4 quartiers de viande ovine (reste de la viande destinée aux gypaètes réintroduits) a permis 5 lectures de bagues sur une curée : Déjà contactés : DLE + DLH 10 AXU (d) : « Ustensile », Vautour fauve né en 2001, relâché dans le Verdon en septembre 2003. Après une quasi-totale absence depuis fin avril à Rougon (04), il y sera contacté le 10/08/07. Blanc / Rouge (d) (estimé 2001-2002) : Individu provenant des Pyrénées françaises 3X6 (g) jaune : bague jaune, vautour provenant d’Espagne. - Les 15/09 (17h44 – 19h30) et 16/09/07 (7h40 – 9h20) sur la Barre Sud du Mounier (Beuil, 06) : Déjà contactés : BOE + BSU + 3LJ + Blanc / Rouge (estimé 2004-2005) DIM (g) : Vautour fauve né en 2006 dans les Baronnies. Le 19/09/07 (11h20 – 15h14), sur la Barre Sud du Mounier (Beuil, 06) : Déjà contactés : BPE + Blanc / Rouge (estimé 2001-2002) + DLH + BSU CDU (d) : vautour de 2005 provenant des Causses. 433 (d) jaune : bague jaune, vautour provenant d’Espagne. Pas d’informations complémentaires. AO (blanc sur fond bleu) : Vautour fauve réintroduit en 1996 dans les Baronnies. Le 20/09/07 (11h20 – 15h14), sur la Barre Sud du Mounier (Beuil, 06) : Déjà contactés : BSU BAH (g) : « Vooutour », vautour né et réintroduit en 2002 dans le Verdon. Individu qui a fréquenté régulièrement le charnier de Rougon (04) cette année. Dernier contact le 25/08 dans le Verdon. BOX (g) : « Yemen », vautour né et réintroduit en 2004 dans le Verdon. Observé peu de fois cet été dans le Verdon mais de façon relativement régulière. Dernier contact le 04/09 à Rougon (04). ATZ (d) : « Taloire », vautour né en 1999 et réintroduit en 2002 dans le Verdon. Individu présent jusqu’à fin juin dans le Verdon, puis aucun contact à partir de juillet. BSI (d) : « Waal », vautour de 2003 provenant des Causses. Le 24/09/07 (7h – 8h17), sur la Barre Sud du Mounier (Beuil, 06) : Déjà contactés : BAH + DLE + DLH + 3LJ 5. Suivi comportemental de l’espèce a) Evolution des déplacements de juillet à septembre Les déplacements observés autour du massif du Mounier, principalement concentrés entre 9 et 14 h, sont très variables. On peut toutefois noter une légère dominance des déplacements en direction du Nord-Ouest depuis Vignols entre le 16 et le 30 juillet. Le massif du Mounier semble être un site de passage propice aux ascendances, plus qu’une zone fréquentée lors de la prospection alimentaire durant cette période. Comme nous l’avons vu précédemment, les reposoirs utilisés sont la Barre de L’Illion et la tête de Pérail (Sud de Beuil) jusqu’à fin juillet. 11 Depuis l’arrivée de nouveaux troupeaux d’ovins au sud-est du Mont Mounier fin juillet, à proximité du hameau de Vignols, des changements comportementaux ont pu être constatés. Cette nouvelle abondance en nourriture s’est traduite par : La fréquentation massive d’un nouveau reposoir nocturne (Barre Sud du Mounier et Barre du Démant) ; Une nette augmentation des observations de vautours fauves en prospection entre le plateau de Longon, la commune de Beuil et le Mont Mounier. A partir de mi-août, une diminution de la fréquentation sur le hameau de Vignols, le plateau de Longon ainsi qu’au sud de la commune de Beuil a pu être constatée (Tête du Pommier, les Cluots, etc.) et ce malgré les effectifs très importants de vautours toujours présents sur la Barre sud du Mounier le soir. On pourrait supposer que les vautours, plus habitués à leur domaine de prospection, ont développé un mode de déplacement plus efficace, directement ciblé sur les zones riches en carcasses, ce qui aurait pour effet de limiter les mouvements aléatoires. D’autre part, l’aire prospectée ayant sans doute augmenté au fil de l’été grâce aux excellentes conditions météorologiques ou pour toute autre cause, cela expliquerait la diminution des observations sur cette période et un nombre plus faible de vautours observés localement même sans diminution globale au reposoir (effet de dilution). Notes sur les déplacements de vautours fauves : On ne peut pas réellement faire ressortir de tendance ni de logique particulières quant aux déplacements liés à la prospection alimentaire des vautours fauves sur le site. Les mouvements sont principalement localisés sur les zones pâturées situées aux alentours du massif du Mounier (Beuil, Roubion, Roure, Saint-Etienne-de-Tinée, Peone, Isola etc.). Le choix du site de prospection est variable lors du premier envol quotidien et parait lié à l’aérologie et la météo du jour. L’envol depuis le reposoir nocturne se fait généralement progressivement, par petits groupes de 5 à 20 individus en moyenne. Il est fréquent de voir des vautours prendre leur envol très tôt (parfois avant 7h) pour aller se percher sur des crêtes. Elles permettent en général une bonne visibilité de l’ensemble de la zone (Crête de Granréon, Col de Moulinès, etc.). L’envol des vautours fauves depuis ce reposoir nocturne a rarement lieu au-delà de 9h30, lorsque les conditions aérologiques sont bonnes. On peut noter une fréquentation plus importante des zones sur lesquelles une ou plusieurs curées ont eu lieu. Cette fréquentation dure généralement quelques jours, même si les carcasses sont totalement consommées. b) Les relations interspécifiques Le Vautour fauve et le Gypaète barbu La réintroduction de deux gypaètes barbus le 22 mai 2007 (Rocca et Fontvieille) au sein même de la zone fréquentée par les vautours fauves, a permis d’observer quelques relations pouvant s’établir entre les deux espèces. - L’aspect territorial : De mi-juillet à mi-août, les gypaètes ont commencé l’apprentissage du vol. A plusieurs reprises, nous avons pu observer ces deux jeunes oiseaux à la poursuite de vautours fauves de passage. Ce comportement peut être assimilé à de la territorialité puisque ce phénomène n’a été constaté que sur le site même de réintroduction. En d’autres lieux, les gypaètes sont pacifiques vis-à-vis des vautours. 12 - Les effets positifs sur la réintroduction des gypaètes : Les vautours fauves ont, cette année 2007, fréquentés de façon importante le site de réintroduction des gypaètes. En dehors du fait qu’il se trouve sur un couloir de passage (entre le massif du Mounier et le plateau de Longon), ce site a été régulièrement utilisé comme reposoir diurne mais aussi comme lieu propice aux ascendances thermiques. La présence de ces vautours semble avoir eu un impact notable sur l’apprentissage du vol des 2 gypaètes. Le tableau ci-dessous donne une idée de l’évolution de la maîtrise du vol des oiseaux tout au long de leur suivi. Ces données font partie des indicateurs de leur degré d’émancipation au moment du départ du site. Les cumuls de temps de vol sont calculés sur une période allant de l’instant où l’oiseau quitte la grotte, jusqu’au 30ème jour après son envol. Une comparaison peut être faite avec les autres oiseaux lâchés sur le site du Parc national du Mercantour les années précédentes de lâcher : Temps de vol cumulés après 30 j. Pelat (BG 275) lâché en 1997 686 min. Gelas (BG 279) lâché en 1997 415 min. Roubion (BG 311) lâché en 1999 503 min Péone (BG 312) lâché en 1999 658 min Larche (BG 369) lâché en 2001 891 min Roure (BG 370) lâché en 2001 467 min Guillaumes (BG 411) lâché en 2003 1675 min Jausiers (BG 413) lâché en 2003 880 min Monaco (BG 452) lâché en 2005 746 min Monte-Carlo (BG 455) lâché en 2005 556 min Rocca (BG 516) lâché en 2007 1223 min Fontvieille (BG 520) lâché en 2007 1209 min Tableau IV-Comparaison des temps de vol cumulés (ZIMMERMAN Laurent) Comme l’indique ce tableau, Rocca et Fontvieille ont eu une activité de vol exceptionnelle. Outre l’effet d’entraînement réciproque des deux oiseaux, qui peut être une hypothèse pour expliquer la remarquable similitude des performances, la présence soutenue des vautours fauves lors de cette période d’envol est loin d’être négligeable pour tenter d’expliquer cette importante activité. On pourrait en déduire que les vautours fauves, étant quotidiennement sur le site de réintroduction pour prendre des ascendances, ont eu un effet stimulant et formateur sur les deux gypaètes. Dans un second temps, le Vautour fauve, prompt à trouver les carcasses disponibles et à les consommer, a permis aux jeunes gypaètes l’accès à une ressource trophique très abondante. Ainsi, nous avons pu, à plusieurs reprises, observer les gypaètes en compagnie des vautours aussi bien sur le reposoir nocturne de la Barre Sud du Mounier que sur des sites où avaient eu lieues des curées. Des cassages d’os ont été constatés en ces lieux. L’apprentissage du vol, la recherche de nourriture et le choix des reposoirs nocturnes ont ainsi été améliorés de par la présence du Vautour fauve. 13 Enfin, la présence des vautours et l’abondance en nourriture qui en découle entraîne vraisemblablement une fixation plus longue des gypaètes sur le massif du Mounier avant leur départ automnal en phase d’erratisme,. Plus cette imprégnation au site sera longue, plus les chances de retour pourraient être importantes. Le Vautour fauve et l’Aigle royal A partir de l’arrivée massive des Vautours fauves sur le reposoir nocturne de la Barre Sud du Mounier, les observations d’aigles royaux se sont faites beaucoup plus rares. Ainsi, du 16 juillet au 25 juillet, une quinzaine de contacts d’aigles a été noté. A partir de cette date, qui correspond à la nette augmentation de la fréquentation du site par le Vautour fauve, et ce jusqu’à mi-septembre, très peu d’aigles royaux ont été vus (certains bergers locaux l’ont également remarqué) il serait intéressant d’étudier l’évolution de l’utilisation de l’espace par l’AR en fonction de l’évolution des effectifs de VF sur une saison d’estive. La diminution progressive de la fréquentation du massif du Mounier par des vautours en prospection semble en lien avec le retour de plusieurs aigles royaux. On a pu constater des « agressions » sur des groupes de vautours par un aigle juvénile au reposoir durant environ 2 semaines. Le 21/09 celui-ci a provoqué l’envol général de plus de 60 vautours à trois reprises ! Le Vautour fauve et le Vautour moine Deux vautours moines non marqués et non bagués, identifiés comme étant deux individus différents grâce à leurs mues respectives, ont fréquenté le site et ont été observés de façon ponctuelle durant l’été. Dans les Alpes, l’espèce est régulièrement observée en compagnie du Vautour fauve, que ce soit dans les massifs de réintroduction ou à distance. Avec l’augmentation dans la chaîne des effectifs de l’espèce, installés ou visiteurs d’été, une fréquentation croissante du Mercantour en général, du Mounier en particulier, est prévisible. 6. Suivi des curées a) La ressource trophique disponible L’observation des vautours fauves sur les reposoirs donne un aperçu de la quantité de nourriture disponible. En effet, la plupart des oiseaux présente chaque jour un plumage souillé par les curées ainsi qu’un jabot nettement rempli. La carte ci-dessous présente le Parc National avec, en bleu, les 7 communes sur lesquelles les vautours fauves prospectent intensément durant l’estive. Le calcul des ressources trophiques qui suit est basé sur cette surface pâturée autour du massif du Mounier. Barcelonnette Saint-Etienne-de-Tinée Massif du Mont Mounier Nice N 14 Une vingtaine d’unités pastorales a été recensée sur les communes de Beuil, Guillaumes, Isola, Peone, Roubion, Roure et Saint-Etienne-de-Tinée soit un total de 28160 ovins et caprins : Commune Nom Unité Pastorale Nb de têtes Beuil Beuil Beuil Beuil Beuil Beuil – Roubion Guillaumes Guillaumes Guillaumes Guillaumes – Peone Isola Peone Peone Peone Peone Roubion Roubion Roure Roure Saint-Etienne-de-Tinée Saint-Etienne-de-Tinée Sallevieille-Adret du Colombet Les Moulines-La Lapierre Le Camp-Le Bosquet Ars-Fraccia Le Melet Démant-Falcon Tête de la Colombière-Cime du Pra-Illion Barels-Amen Roua-Palud-Colette Gaillarde-Rougnoux-Cafans Galestrière L’Alp Montagne de l’Estrop-Septenne-Béoules Charnaye-Fossemagne-Chastellan-La Colle Tête du Sapet-Pra Bataglier-Pinguillet Tournerie-Sadour Vacherie de Vignols-Quartier du Gipé Longon Longon-Rougios-Roure Burente La Salle-Clot Laugier-Les Issarts 2660 1800 2000 1600 1200 1600 1000 1200 400 800 900 1500 1500 300 1200 1350 2000 2500 950 1400 300 TOTAL 28160 On considère un minimum de 2 % de mortalité sur les troupeaux d’ovins domestiques durant l’estive, soit 563 bêtes au total sur les pâturages des communes figurant dans le tableau cidessus. On considère au minimum que la biomasse moyenne disponible pour les rapaces nécrophages sur une brebis est de 15 kg. On a donc (563 x 15 =) 8445 kg de biomasse disponible au total sur l’estive qui s’étale environ du 1er juillet au 15 octobre, soit 107 jours. Un vautour nécessite environ 0,5 kg de nourriture par jour. Sur l’estive, les vautours peuvent consommer (107 x 0,5 =) 53,5 kg de biomasse. Le massif du Mounier et ses environs proches peuvent théoriquement accepter, du 1er juillet au 15 octobre, une colonie de vautours fauves de (8445 / 53,5 =) 158 individus minimum. Maintenant, si l’on considère un maximum de 4 % de mortalité et une biomasse moyenne disponible de 20 kg par brebis, la capacité d’accueil de la zone atteindra 421 individus. N’oublions pas que ce calcul ne concerne qu’une partie de la zone prospectée quotidiennement par les vautours et que la ressource trophique apportée par la faune sauvage, difficile à mesurer, n’est pas prise en compte. Il est donc probable, dans les années à venir, d’observer un plus grand nombre de vautours fauves que les 163 individus maximum comptés cet été 2007. 15 b) Cas particulier Le 30/07/2007, une brebis morte sera déposée entre le hameau de Vignols et les Portes de Longon sur une terrasse enherbée, tout à fait dégagée et accessible. La cause du décès est attribuée à la morsure d’une vipère. Aucun Vautour, ni autre charognard, n’entamera la carcasse en décomposition les 10 jours suivants. Selon les bergers locaux, les bêtes mortes à la suite d’une morsure de vipère ne sont jamais consommées par les animaux nécrophages ou autres espèces opportunistes… 7. Le pastoralisme et les vautours fauves a) Le Loup et le Vautour, une association qui dérange Le vautour fauve est perçu de façon mitigée par les éleveurs et bergers au sein du Parc. D’un côté, il est apprécié pour son rôle de « nettoyeur » de leurs pâturages. De l’autre, l’efficacité et la rapidité avec laquelle il consomme les carcasses posent un problème : comment faire constater des bêtes tuées par le loup dans la nuit dont il ne reste plus que des os au matin ? Beaucoup d’éleveurs qui n’ont pas eu affaire à des attaques ou qu’occasionnellement ne manifestent aucune animosité particulière vis-à-vis des charognards tandis que d’autres affirment que, si cela continue dans ce sens, le retour à l’empoisonnement et au tir ne se fera pas attendre. Des paroles dures, peut-être exagérées et dépassées, mais qui montrent bien la colère que peut susciter le contexte actuel lié au prédateur carnivore. La communication au sujet du loup et du vautour fauve doit donc être constante avec les éleveurs pour éviter d’en arriver à des comportements extrêmes. a) La polémique sur les attaques de vautours La disette créée par la fermeture de charniers dans deux des provinces espagnoles du fait d’une application brutale des normes européennes obligeant à l’équarrissage des animaux morts, associée aux rumeurs d’attaques sur des animaux domestiques, largement amplifiées par les médias, ont rendu les éleveurs locaux plus méfiants vis-à-vis du vautour fauve. Pour la plupart, cela se traduit par une inquiétude liée au grand nombre de vautours qui ont été observés cet été 2007. Inquiétude accentuée par l’augmentation rapide des effectifs depuis 2003. Des questions se posent alors : « Jusqu’à combien de ces vautours vont venir ici ? » mais surtout « Que peuvent-ils bien manger ? ». Certains éleveurs ont leurs propres réponses : « C’est simple, s’ils n’ont plus rien pour se nourrir ils vont forcément se rabattre sur les animaux vivants, comme cela se passe dans les Pyrénées ! » Cette réplique doit bien sûr être modérée mais n’est pas dénuée de sens. Il semblerait en effet au regard d’observations a priori fiables qu’un groupe de vautours puisse occasionnellement s’en prendre à un animal très faible. Une ’information objective est alors primordiale pour désactiver les rumeurs excessives. Pour exemple, sur l’estive, deux cas de « harcèlement » ont été signalés (par l’éleveur) sur le massif du Mounier, sur le même troupeau. Dans le premier, une dizaine de vautours auraient suivi deux brebis boiteuses en file indienne. Deux de ces rapaces charognards auraient pris leur envol pour barrer la route aux brebis et leurs auraient asséné quelques coups de becs. L’éleveur aurait alors fait intervenir les chiens, ce qui a provoqué l’envol des vautours. Dans le second cas, une brebis agonisante a été trouvée couchée au sol, les yeux crevés. Selon l’éleveur et une aide berger bénévole (FERUS), les vautours auraient commencé à consommer la brebis vivante. Il n’est plus question d’affirmer que les vautours sont totalement inoffensifs, car ce discours n’est pas crédible face aux éleveurs. Sans pour autant, bien sûr, parler de prédation, il s’agirait plutôt de nuancer, d’insister sur le rôle nocif des médias dans ce débat et de mettre 16 en avant les expertises réalisées dans les Pyrénées qui font nettement ressortir les problèmes d’interprétation de scènes d’attaques par les vautours. b) Quelques problématiques soulevées par les éleveurs locaux Les propos qui suivent sont rapportés de discussions avec une dizaine d’éleveurs et bergers locaux rencontrés au sein du Parc National du Mercantour ou aux alentours, notamment sur le massif du Mounier : Un métier difficilement rentable. Pour certains, le prix de location du terrain augmente chaque année ce qui alourdit considérablement les dépenses liées à la transhumance. Cela ajouté aux coûts du gasoil et du foin qui, de la même façon, continuent d’augmenter, entraîne des difficultés financières de plus en plus lourdes. Un manque d’intérêt vis-à-vis de leur patrimoine et du travail des anciens. Plusieurs éleveurs parlent du risque de disparition d’exploitations liées aux difficultés financières et aux contraintes de plus en plus fortes de leur activité. Il a été également question de l’abandon de bâtiments à valeur patrimoniale (vacherie de Vignols, Balme des Bœufs, etc.) construits par les anciens qui tombent en ruine ou le seraient sans leurs efforts. Certains pensent que leur activité est considérée par l’espace protégé comme secondaire par rapport à la protection de la faune sauvage et imaginent que le Parc national tente de leur imposer un sanctuaire, une réserve. Des efforts vis-à-vis de leur activité, mais avec une concertation parfois jugée insuffisante. Il ressort parfois que les aménagements réalisés à l’attention des éleveurs sont mal adaptés. On peut citer le cas de cabanes mal aménagées ou même inutilisables, de problèmes liés à l’adduction d’eau, etc. Selon certains, cela pourrait être évité s’il y avait plus de concertation et une prise en compte plus précise de leurs besoins et recommandations avant que les projets soient mis en œuvre. Un manque de communication avec les gestionnaires de leur environnement (PNM, DDAF…). La plupart des éleveurs et bergers déplorent un manque de discussion, notamment avec les agents du Parc national. Ils ont souvent un besoin de considération qui peut être comblé par des visites régulières au cours de la saison. De plus, des malentendus peuvent découler du manque de dialogue, ce qui ne s’arrange pas avec le temps. De simples discussions peuvent alors aisément dénouer les problèmes. Ils se sentent parfois mis à l’écart et ont des difficultés à cerner le rôle du Parc, particulièrement vis-à-vis de leur activité. Des problèmes liés à la faune sauvage. Hormis le loup et le vautour, la plupart des éleveurs considèrent que les populations de chamois, de cerfs, de sangliers et, dans une moindre mesure, de marmottes, sont trop importantes et représentent une concurrence sur leurs pâturages. Leur inquiétude est d’autant plus grande que ces populations augmentent nettement selon eux. 8. Propositions pour un meilleur suivi - Améliorer concrètement le suivi sur le massif du Mounier et ses environs Les lectures de bagues ont lieu, dans la plupart des cas, sur les reposoirs nocturnes ou sur les curées. La Barre Sud du Mounier, de par sa hauteur et son inaccessibilité rend les lectures difficiles. Il est toutefois possible d’en réaliser en certains points, avec un matériel d’observation haut de gamme. La Kowa TSN 823 ne permettait pas la lecture dans certaines situations, alors qu’elle était réalisable avec une lunette de marque Zeiss au même grossissement. 17 Cela étant, la position des oiseaux sur un reposoir rend très souvent la tâche difficile, quel que soit le matériel utilisé. Pour effectuer un suivi régulier et efficace des oiseaux bagués, l’affût sur des curées est tout à fait adéquat. Toutefois, la rapidité d’action des vautours pour consommer une carcasse rend le suivi des curées sur les pertes d’élevages très délicat. C’est pourquoi deux solutions peuvent ici être proposées : - Une meilleure communication : Dans le cas d’attaques de loups, où les bêtes tuées ont pu être bâchées avant l’arrivée des vautours, l’agent constateur prévenu (agent du PNM ou de l’ONCFS) pourrait en informer immédiatement le secteur Moyenne-Tinée ou le stagiaire qui réalise le suivi. Ainsi, une fois le constat effectué, la surveillance des carcasses pourrait mener à l’observation de curées. Cette communication pourrait être élargie à tous les cas de mortalité d’animaux domestiques ou de faune sauvage connus par les agents du Parc. Cet été 2007, des contacts réguliers avec certains éleveurs ou bergers ont permis de faire connaître l’importance du suivi des oiseaux bagués. Des curées ont ainsi été observées grâce à certains de ces acteurs locaux qui nous ont informés de leurs pertes par téléphone. Une sensibilisation à ce niveau pourrait être poursuivie. Elle permet une sensibilisation efficace, des contacts réguliers et une implication de l’éleveur en collaboration avec le Parc. - La mise en place d’une « placette d’alimentation » ponctuelle : Le dépôt de carcasses ou de quartiers de viande, comme cela est effectué lors du lâcher des gypaètes, pourrait être envisagé. Un test a pu être réalisé cette année grâce à quelques restes de viande ovine provenant du lâcher gypaète 2007. Le dépôt de ces quartiers de viande à une centaine de mètres au dessus de la cabane d’observation (en face du site de taquet des gypaètes) a mené à des résultats très concluants, avec plus de 40 vautours fauves présents et la lecture de cinq bagues, soit la totalité des individus bagués sur la curée. Cette opération pourrait être renouvelée, de façon aléatoire et relativement bien espacée dans le temps (1 à 2 semaines). En effet, les vautours prennent rapidement des habitudes qui pourraient fausser le comportement naturel de la colonie. La seule difficulté réside dans la configuration du terrain, qui ne permet pas le dépôt de la viande sur une zone plane. - Un réseau d’observateurs optimisé Les informations obtenues lors de ce suivi sur le massif du Mounier sont intéressantes, mais le seraient plus si elles étaient mises en parallèle avec des données récoltées sur d’autres sites durant l’estive. Cela concerne principalement les sites sur lesquels se trouvent d’importantes colonies (Pyrénées, Causses, Baronnies, Verdon) mais aussi ceux où la fréquentation en été est forte. Un suivi régulier est bien sûr déjà réalisé sur les sites de réintroduction du Vautour fauve, mais celui-ci mériterait d’être concerté et organisé entre tous les organismes concernés (PNM, LPO PACA antenne Verdon, LPO Grands Causses, Vautours en Baronnies, PN Pyrénées et Vercors, etc.). La pression d’observation pourrait notamment être plus forte de juillet à septembre, période durant laquelle les déplacements sont importants. Le croisement des données recueillies pourrait, au final, être très enrichissant. 18 Conclusion Le retour du Vautour fauve dans les Alpes françaises du Sud-est est une importante reconstitution de la biodiversité locale, faunistique et écologique, au niveau du cortège des grands Rapaces nécrophages. L’estivage de plus en plus important de l’espèce dans le massif du Mercantour contribue puissamment au rétablissement de flux d’oiseaux entre populations et participe au comblement du hiatus de plusieurs centaines de kms qui existe encore entre les populations nicheuses des Préalpes françaises et celles vers l’Est du Frioul (Alpes orientales italiennes) et des Abruzzes. La présence du vautour fauve dans le Mercantour va continuer d’évoluer géographiquement, numériquement et sans doute comportementalement. Un suivi étroit de cette évolution en liaison avec les différents sites de réintroduction-reproduction français et les zones d’estivage dans les Alpes est primordial pour bien comprendre la dynamique de ce merveilleux grand rapace. Affaire à suivre donc, avec passion. Rapport établi avec les conseils avisés de Sylvain Henriquet (LPO Verdon), Daniel Demontoux, Albin Liborio (Parc national du Mercantour) et Jean-Pierre Choisy (PNR Vercors). Photo : Coirié V. 19