Reconnaissance et exécuti - Unité de droit judiciaire

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Reconnaissance et exécuti - Unité de droit judiciaire
DROIT JUDICIAIRE INTERNATIONAL
CINQUIÈME LEÇON : RECONNAISSANCE ET EXÉCUTION DES JUGEMENTS
INTRODUCTION
Importance fondamentale en pratique car il est vain d’obtenir un jugement dans un Etat s’il
n’est ensuite pas possible d’exécuter celui-ci dans l’Etat dans lequel la partie condamnée
possède des biens.
Distinction entre exequatur (enforcement) et exécution s.s. (execution itself)
SOURCES APPLICABLES
- Avec exequatur
-
droit interne : en Belgique : art. 22 et s. CODIP
conventions bilatérales ou multilatérales : Convention (de Bruxelles et) de Lugano (art.
25 et s.)
règlement (CE) 44/2001 – art. 32 et s.
- Procédures avec obtention d’un titre pouvant circuler librement
-
règlement (CE) 805/2004 du Parlement et du Conseil du 21 avril 2004 portant création
d’un titre exécutoire européen pour les créances incontestées
règlement (CE) n°1896/2006 du 12 décembre 2006 instituant une procédure
européenne d’injonction de payer
règlement (CE) n°861/2007 du Parlement Européen et du Conseil du 11 juillet 2007
instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges (pour mémoire)
- Règles concernant « l’exequatur » et non l’exécution proprement dite qui relève de la loi
nationale de chaque Etat membre (Hoffmann) sous réserve du respect du droit communautaire
général (Mund & Fester)
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RÈGLEMENT (CE) 44/2001 : ARTICLES 32 ET S.
But : faciliter la libre circulation des jugements en allégeant les formalités de passage frontalier
du titre exécutoire et en réduisant les causes de refus d’exécution
RECONNAISSANCE
-
Reconnaissance de plein droit (autorité de chose jugée et opposabilité) sans procédure
(art. 33-1)
En cas de contestation, procédure principale prévue pour l’exécution ou procédure
incidente devant le juridiction saisie (art. 33-2 et 3)
Possibilité de surseoir à statuer sur la reconnaissance lorsque la décision étrangère fait
l’objet d’un recours ordinaire dans l’Etat d’origine (art. 37)
EXÉCUTION
-
-
Décisions exécutoires (même par provision) dans un Etat membre (art. 38)
Procédure partiellement uniforme :
o Compétence territoriale : domicile de la partie contre laquelle l’exécution est
demandée ou lieu de l’exécution (art. 39)
o Requête unilatérale avec élection de domicile + expédition jugement + certificat
(art. 53)
o Pas de contrôle des motifs de refus mais uniquement du respect des formalités
(art. 41)
o En cas de refus, recours possible mais convocation de la partie adverse (art. 43)
o En cas d’obtention, signification de la déclaration à la partie contre laquelle
l’exécution est demandée qui dispose également d’un recours (art. 43)
o Déclaration constatant la force exécutoire emporte autorisation de procéder à
des mesures conservatoires (art. 47-2) même si déjà possibles avant (47-1)
o Pas d’exécution provisoire (art. 47-3) – attente de l’expiration du délai de recours
ou de l’examen du recours avant de procéder à l’exécution s.s.
o Possibilité de surseoir à statuer sur le recours lorsque la décision étrangère fait
l’objet d’un recours ordinaire dans l’Etat d’origine ou si délai n’est pas expiré (art.
46)
Montant de l’astreinte doit avoir été liquidé dans l’Etat d’origine (art. 49) – importance
du caractère déclaratoire de la décision dans l’Etat requis
MOTIFS DE REFUS DE RECONNAISSANCE OU D’EXÉCUTION
-
-
Interdiction de la révision au fond (art. 36)
Absence de contrôle de la compétence (35-3) sauf (35-1) en cas de violation des règles
de compétence exclusive (art. 22) et relatives aux compétences protectrices en matière
d’assurance (art. 8 à 14) et en matière de contrats conclus par les consommateurs (art.
15 à 17)
Motifs de refus (art. 34) :
o Contrariété manifeste à l’ordre public (34-1) : Krombach et Renault
o En cas de défaut, régularité de la signification de l’acte introductif d’instance et
temps utile pour se défendre (34-3) sauf si recours possible et non utilisé
o Inconciliabilité avec une décision du for (34-3)
o Inconciliabilité avec décision étrangère antérieure rendue entre les mêmes
parties dans un litige ayant la même cause et le même objet (34-4)
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RÈGLEMENT (CE) N°805/2004
But : supprimer pour les créances incontestées les formalités prévues par le règlement 44/2001
pour l’obtention de la déclaration de la force exécutoire (article 5) – le titre délivré dans un Etat
est directement et sans procédure exécutoire dans les autres Etats membres. A cette fin, on
établit des normes minimales de procédure qui doivent avoir été respectées dans l’Etat
d’origine pour certifier le titre exécutoire
CHAMP D’APPLICATION
Matière civile et commerciale avec exclusions (art. 2-1 et 2)
Tous les Etats membres sauf le Danemark (art. 2-3)
NOTION DE CRÉANCE INCONTESTÉE
Définition complexe (art. 3) : sont en particulier visés les créances reconnues devant un tribunal
ou un notaire (acte authentique) ou encore l’absence de contestation par le débiteur cité en
justice (jugement par défaut)
CERTIFICATION EN TANT QUE TEE
- Conditions (art. 6)
- Autorité compétente en Belgique : circulaire de juin 2005 : greffier
- Forme (art. 9)
- Procédure de rectification ou de retrait (art. 10)
NORMES MINIMALES
- Principe (art. 6-1, c) et 12)
- Modes de signification de l’acte introductif d’instance (art. 13 à 15)
- Information du débiteur sur la créance – contenu de l’acte introductif d’instance (art. 16)
- Information du débiteur sur les formalités pour contester la créance – contenu de l’acte
introductif d’instance (art. 17)
- Possibilité de régulariser la procédure (art. 18)
- Possibilité de réexamen de la décision en cas de circonstances exceptionnelles (art. 19) :
difficultés en droit belge – refus de certains tribunaux de certifier des jugements belges
PROCÉDURE D’EXÉCUTION
- Principe : loi de l’Etat de l’exécution (art. 20-1)
- Formalités à respecter (art. 20-2)
- Refus d’exécution uniquement en cas d’inconciliabilité (art. 21)
- Suspension ou limitation de l’exécution (art. 23)
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RÈGLEMENT (CE) N° 1896/2006
Même principe que le règlement n°805/2004
CHAMP D’APPLICATION
La procédure d’injonction européenne de payer est réservée, en matière civile et commerciale
(art. 2)1, aux seuls litiges transfrontaliers (art. 3)2 et permet au créancier d’obtenir une injonction
de payer européenne exécutoire dans tous les Etats membres sans exequatur et sans qu’il soit
possible de contester sa reconnaissance (art. 1-1 et 19). La procédure s’applique pour le
recouvrement de créances pécuniaires liquides et exigibles (art. 4). Elle est facultative et
coexiste avec les procédures nationales et communautaires disponibles (art. 1er-2).
COMPÉTENCE
La compétence est régie conformément aux dispositions du règlement Bruxelles I (art. 6-1).
Lorsque la créance se rapporte à un contrat conclu par un consommateur et si le défendeur est
le consommateur, seules sont compétentes les juridictions de l’Etat membre dans lequel il est
domicilié (art. 6-2).
PROCÉDURE
- Tous les actes ou décisions sont réalisés au moyen de formulaires type figurant en annexe du
règlement. Le cas échéant, ils peuvent être accomplis par la voie électronique et leur traitement
peut être automatisé.
- La procédure débute par une demande d’injonction de payer européenne qui est adressée par le
créancier à la juridiction compétente (art. 7-1) qui doit contenir un certain nombre d’éléments
(art. 7-2) dont la description des éléments de preuve étayant la créance (art. 7-2, e))3. Cette
demande est examinée par la juridiction saisie qui vérifie si les conditions d’application du
règlement sont remplies et si la créance paraît « fondée et recevable » (art. 8). Le cas échéant, le
demandeur peut être invité à compléter ou corriger sa demande dans un certain délai (art. 9) ou
encore à la réduire à une partie du montant réclamé (art. 10).
- En cas de rejet de la demande, le demandeur ne dispose d’aucun recours (art. 11-2) mais peut
engager une procédure judiciaire ordinaire pour la même créance (art. 11-3).
- Si les conditions sont remplies, la juridiction saisie délivre une injonction de payer européenne
(art. 12-1) qui est signifiée ou notifiée au défendeur (art. 12-5) et l’informe des possibilités qui
s’offrent à lui : soit payer la dette, soit introduire une déclaration d’opposition contre
l’injonction (art. 12-3) ainsi que de la nature de l’injonction de payer et des conséquences de
l’absence ou de l’exercice d’une opposition (art. 12-4). Le règlement prévoit aux articles 13, 14 et
15 les normes minimales applicables à la signification ou à la notification de l’injonction de
payer en s’inspirant directement du règlement (CE) n°805/2004 sur le titre exécutoire européen.
1
Certaines matières civile et commerciale sont exclues du champ d’application du règlement, notamment les
créances résultant d’obligations non contractuelles sauf dans certains cas limités (art. 2-2).
2 C’est-à-dire un litige dans lequel au moins une des parties a son domicile ou sa résidence habituelle dans un Etat
autre que l’Etat membre de la juridiction saisie (art. 3-1) au moment de l’introduction de la demande d’injonction de
payer (art. 3-3). Le domicile est déterminé conformément aux articles 59 et 60 du règlement Bruxelles I (art. 3-2).
3 Dans sa demande, le demandeur doit déclarer qu’à sa connaissance, les informations fournies sont exactes et
reconnaître que toute fausse déclaration intentionnelle le rendrait passible des sanctions prévues par le droit de
l’Etat membre d’origine (art. 7-3).
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- L’opposition du défendeur doit être formée dans les trente jours de la signification ou de la
notification de l’injonction de payer (art. 16-2) au moyen d’un formulaire type transmis au
débiteur en même temps que l’injonction (art. 16-1). En cas de déclaration d’opposition, la
procédure se poursuit devant les juridictions compétentes de l’Etat d’origine conformément
aux règles de la procédure civile ordinaire sauf si le demandeur a expressément indiqué dans sa
demande qu’il souhaite qu’il soit mis à la procédure dans cette éventualité (art. 17-1).
- En l’absence d’opposition dans le délai, compte tenu d’un délai supplémentaire nécessaire à
l’acheminement de la déclaration d’opposition, la juridiction d’origine déclare sans tarder
l’injonction de payer exécutoire au moyen d’un formulaire type (art. 18-1)4. Elle envoie au
demandeur l’injonction de payer européenne (art. 18-3).
- Un réexamen de l’injonction de payer peut être demandé par le défendeur dans des cas
exceptionnels limitativement énumérés (art. 20-1 et 20-2). Dans ces hypothèses, la juridiction de
l’Etat d’exécution peut suspendre ou limiter l’exécution de l’injonction de payer européenne
(art. 23). Le défendeur peut également s’opposer à l’exécution de l’injonction européenne de
payer dans l’Etat membre d’exécution lorsqu’elle est incompatible avec une décision rendue
dans cet Etat (art. 22-1) ou lorsqu’il a versé au demandeur le montant fixé dans l’injonction de
payer (art. 22-2). L’injonction de payer européenne ne peut en aucun cas faire l’objet d’un
réexamen au fond dans l’Etat membre d’exécution (art. 22-3).
- Enfin, le règlement reprend les dispositions d’ordre général telle que l’absence d’obligation de
représentation par avocat pour la demande d’injonction de payer ou l’opposition (art. 24), les
frais de justice (art. 25) et le rôle subsidiaire du droit procédural national (art. 26).
CODIP : ARTICLES 22 ET S.
PRINCIPES
Extension du régime actuel des jugements en matière d’état et de capacité des personnes.
Faisant preuve d’un esprit d’ouverture vis-à-vis des jugements rendus à l’étranger, le Code
innove considérablement en étendant à l’ensemble des décisions étrangères rendues en
matière civile le régime qui était actuellement réservé, en droit commun, aux seuls jugements
rendus en matière d’état et de capacité des personnes . Il consacre en effet la reconnaissance de
plein droit des décisions étrangères et supprime la révision au fond.
Reconnaissance de plein droit. A l’instar du régime prévu par les instruments de droit
communautaire, le Code prévoit que tout jugement étranger est reconnu de plein droit en
Belgique sans aucune procédure (art. 22, §1er). Cette modification emporte des conséquences
importantes. Ainsi si l’on admettait auparavant qu’un jugement étranger ne permettait, en
l’absence d’un traité, que de procéder, comme tout titre privé, à une saisie-arrêt conservatoire ,
il y a lieu de considérer aujourd’hui que, même en l’absence de convention internationale, tout
jugement étranger, reconnu de plein droit, permet de pratiquer sans autorisation préalable du
juge des saisies, n’importe quelle saisie conservatoire sur la base de l’article 1414 du Code
judiciaire .
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Contrairement à la proposition initiale, l’injonction de payer européenne ne peut donc jamais être assortie de
l’exécution provisoire.
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Suppression de la révision au fond. L’article 570 ancien du Code judiciaire obligeait le juge
belge à procéder à la révision au fond de la décision étrangère, c’est-à-dire à refaire le procès en
vérifiant tous les éléments de fait et de droit tranchés à l’étranger. La Cour de cassation n’avait
admis une dérogation prétorienne à ce contrôle qu’en matière d’état et de capacité des
personnes . Cette révision est à présent expressément interdite pour l’ensemble des décisions
étrangères par l’article 25, §2. Tout contrôle de la « qualité » du travail du juge étranger n’est
cependant pas écarté puisque le Code maintient plusieurs motifs de refus de reconnaissance
qui impliquent nécessairement une appréciation, certes marginale, du contenu de la décision
étrangère. Tel est notamment le cas de l’exception d’ordre public, du respect des droits de la
défense et de la fraude à la loi normalement applicable. Dans tous ces cas, les éléments de fait
et de droit pris en considération par le juge étranger seront pour le juge belge non plus « l’objet
de sa décision » mais celui de « sa réflexion » .
COMPÉTENCE, PROCÉDURE ET MESURES CONSERVATOIRES
Compétence matérielle. En cas de contestation portant sur la reconnaissance d’une décision
étrangère, celle-ci est tranchée soit par la juridiction belge devant laquelle la question se pose
de manière incidente (art. 22, §1er), soit par le tribunal de première instance au terme de la
procédure prévue à l’article 23. Le Code consacre à cet égard expressément l’action en
opposabilité ou en inopposabilité du jugement étranger : toute personne qui y a intérêt ainsi
que, en matière d’état d’une personne, le ministère public, peut faire constater que la décision
doit être reconnue ou ne peut l’être (art. 22, §2). La demande en déclaration de la force
exécutoire est quant à elle toujours portée devant le tribunal de première instance et, en
matière d’insolvabilité, devant le tribunal de commerce (art. 23, §1er). Elle suppose bien
entendu que la décision étrangère soit exécutoire dans l’Etat où elle a été rendue (art. 22, §1er) .
Compétence territoriale. La demande en reconnaissance, formée à titre principal, ou en
déclaration de la force exécutoire est portée devant le tribunal de première instance du
domicile ou de la résidence habituelle en Belgique du défendeur ; à défaut de domicile ou de
résidence en Belgique, ce tribunal est celui du lieu d’exécution (art. 23, §1er) .
Procédure sur requête unilatérale. Le Code modifie également profondément l’introduction
et l’instruction de la demande en reconnaissance (principale) ou en déclaration de la force
exécutoire. Celles-ci ont désormais lieu conformément aux articles 1025 à 1034 du Code
judiciaire (art. 23, §3), c’est-à-dire selon le régime de droit commun de la requête unilatérale. Le
requérant doit en outre faire élection de domicile dans le ressort du tribunal. Le juge doit quant
à lui « statuer à bref délai ».
Pièces à produire et légalisation. L’article 24, §1er, du Code, au texte duquel il est renvoyé,
énumère de manière précise les pièces qui doivent être produites par la partie qui invoque la
reconnaissance ou demande la déclaration de la force exécutoire de la décision étrangère. Le §
2 de la même disposition réserve le pouvoir du juge d’impartir un délai pour la production de
ces documents, d’accepter des documents équivalents voire même, s’il s’estime suffisamment
éclairer, d’en dispenser. En vertu de l’article 30, §1er, l’expédition de la décision étrangère
produite en Belgique doit être obligatoirement légalisée .
Interdiction de l’exécution provisoire. Par dérogation à l’article 1029 du Code judiciaire,
durant le délai de (tierce) opposition contre l’ordonnance autorisant l’exécution et jusqu’à ce
qu’il ait été statué sur ce recours, il ne peut être procédé qu’à des mesures conservatoires sur les
biens de la partie contre laquelle l’exécution est demandée (art. 23, §5) .
Jugement étranger exécutoire par provision. A l’instar de l’article 46 du règlement Bruxelles I,
le Code prévoit que lorsque le jugement étranger, exécutoire par provision, peut faire ou fait
l’objet d’un recours ordinaire dans l’Etat d’origine, le juge peut subordonner son exécution «
provisoire » en Belgique à la constitution d’une garantie (art. 23, §4) .
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MOTIFS DE REFUS DE RECONNAISSANCE ET D’EXÉCUTION DES JUGEMENTS
Liste exhaustive. Aux termes de l’article 22, §1er, du Code la décision étrangère ne peut être
reconnue ou déclarée exécutoire que si elle ne contrevient pas aux conditions de l’article 25,
§1er . Ce dernier énumère, de manière exhaustive, les motifs de refus de reconnaissance et
d’exécution d’une décision judiciaire étrangère (1° à 9°). Certains de ces motifs sont purement et
simplement repris de l’ancien article 570, alinéa 2, du Code judiciaire, d’autres sont totalement
nouveaux. L’article 25, §1er, 9°, réserve par ailleurs expressément les motifs de refus spéciaux
prévus par le Code dans des matières particulières .
Contrariété manifeste à l’ordre public. Le Code consacre expressément la théorie – déjà
admise par la Cour de cassation – du caractère « atténué » de l’exception d’ordre public en
matière de reconnaissance de situations valablement créées à l’étranger. Ce sont donc les effets
de la reconnaissance ou de l’exécution de la décision étrangère – et non la décision elle-même –
qui doivent être manifestement incompatibles avec l’ordre public international belge. Le Code
précise encore que cette incompatibilité s’apprécie en tenant compte, notamment, de
l’intensité du rattachement de la situation avec l’ordre juridique belge et de la gravité de l’effet
produit (1°) .
Violation des droits de la défense. Le Code conserve bien évidemment la vérification du
respect des droits de la défense (2°), tels qu’ils sont conçus en droit belge mais aussi et surtout
tels qu’ils sont garantis par l’article 6, §1er, de la Convention européenne des droits de l’homme.
Fraude à la loi normalement applicable. S’il supprime la révision au fond, le Code, maintient,
mais uniquement dans les matières où les personnes n’ont pas la libre disposition de leur droit,
un contrôle de la loi normalement applicable (3°) afin de sanctionner la partie qui se déplace à
l’étranger afin d’y « obtenir un résultat au fond qu’elle n’aurait pas pu obtenir devant son juge
naturel » .
Inconciliabilité de décisions. Le Code apporte de manière heureuse une réponse aux conflits
de décisions en édictant que le jugement étranger ne sera ni reconnu ni exécuté s’il est
inconciliable avec une décision rendue en Belgique ou avec une décision rendue
antérieurement à l’étranger et susceptible d’être reconnue en Belgique (5°) . Afin d’éviter une
éventuelle « course au jugement » , la loi prévoit que la reconnaissance et l’exécution seront
aussi refusées lorsque la décision a été obtenue à la suite d’une demande introduite à l’étranger
après l’introduction en Belgique d’une demande, encore pendante, entre les mêmes parties et
sur le même objet (6°).
Contrôle de la compétence indirecte. Le Code prévoit encore deux motifs de refus liés à la
compétence du juge d’origine. Le premier vise l’hypothèse où le jugement étranger aurait été
rendu dans une matière qui relève de la compétence « exclusive » des juridictions belges (7°) .
Le second concerne le cas où le juge étranger n’a pu fonder sa compétence («exorbitante ») que
sur la simple présence du défendeur ou de biens sans relation directe avec le litige (8°).
Recours ordinaire dans l’Etat d’origine. La décision étrangère qui peut encore faire l’objet
d’un recours ordinaire dans l’Etat d’origine ne peut être ni reconnue, ni exécutée . De manière
assez contradictoire, le législateur a néanmoins prévu que cela n’excluait pas que la décision
étrangère puisse être « provisoirement » exécutée en Belgique ; le juge pouvant subordonner
cette exécution à la constitution d’une garantie (art. 23, §4) .
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