Le vieillissement des personnes handicapées mentales vivant à
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Le vieillissement des personnes handicapées mentales vivant à
Agnès BOREY IRTESS de Dijon DIPLOME SUPERIEUR EN TRAVAIL SOCIAL LE VIEILLISSEMENT DES PERSONNES HANDICAPEES MENTALES VIVANT A DOMICILE : UN DEFI POUR LES SAVS (L’évolution des besoins et des réponses) Directeur de mémoire : Patrick GUYOT Février 2009 Tous mes remerciements vont Aux personnes qui ont accepté de témoigner A celles qui ont prêté leur concours à l’élaboration de cette recherche A mon directeur de mémoire Et tout particulièrement à Geneviève SOMMAIRE INTRODUCTION ……………………………………………………………………………….Page 1 Première partie CHAPITRE 1 : HANDICAP, VIEILLESSE ET VIEILLISSEMENT ……………………..…Page 6 1.1. A propos du handicap ………………………………………………………………………Page 6 1.1.1. La loi de 1975 ………………………………………………………………………....Page 7 1.1.2. La classification internationale du handicap (CIH) ………………………………..….Page 7 1.1.3. La classification internationale du fonctionnement (CIF) …………………………….Page 8 1.2. A propos de la vieillesse et du vieillissement dans notre société………………………….Page 9 1.2.1. Approche démographique ………………………………………………………….….Page 9 1.2.2. Approche générale ………………………………………………………………..….Page 11 1.2.3. Approche sociologique …………………………………………………………..…..Page 14 1.2.4. Approche médicale …………………………………………………………………..Page 15 1.3 Le vieillissement chez les personnes handicapées mentales ……………………………..Page 16 1.3.1. Un phénomène évolutif ……………………………………………………….….…..Page 16 1.3.2. Un effet cumulatif : de la déficience s’ajoute à la déficience ………………………..Page 17 1.3.3. Des besoins spécifiques aux personnes handicapées mentales ………………..……..Page 19 1.3.4. ... mais aussi des besoins similaires à ceux des personnes âgées ………………….....Page 20 1.4. Quelques repères législatifs et règlementaires ……………………………………….…..Page 20 1.4.1. La loi n° 2002-2 ………………………………………………………….…………..Page 20 1.4.2. Le décret n°2005-223 …………………………………………………………….…..Page 21 1.4.3. La loi n° 2005-102 ……………………………………………………………….…..Page 22 1.4.4. Les services d’assistance à domicile ……………………………………………..…..Page 24 1.4.5. L’allocation personnalisée d’autonomie ……………………………………………..Page 24 1.5. Conclusion …………………………………………………………………………...……..Page 25 CHAPITRE 2 : L’ACCOMPAGNEMENT : de la théorie à la pratique ………………..…..Page 26 2.1. L’accompagnement tel qu’on le définit……………………………………………….…..Page 26 2.2. Quelques soutiens et repères de l’accompagnateur ……………………………………..Page 29 2.2.1. Le partenariat ………………………………………………………………………...Page 29 2.2.2. Différentes figures relationnelles ……………………………………...……………..Page 30 2.2.3. Une éthique commune …………………………………………………………...…..Page 31 2.2.4. Des compétences ……………………………………………………………………..Page 33 2.3. L’accompagnement : pour quoi et quels intérêts le soutiennent ? ……………………..Page 34 2.3.1 Un soutien à l’identité …………………………………………………….…………..Page 34 2.3.2. La visée : l’autonomie ………………………………………………………………..Page 35 2.3.3. L’inscription dans l’espace commun ………………………………………….……..Page 36 2.4. Conclusion ………………………………………………………………………….……..Page 36 CHAPITRE 3 : DES BESOINS LIES AU VIEILLISSEMENT DES BENEFICIAIRES, DANS LES SAVS DU DOUBS ? ……………………………………………………………………...Page 38 3.1. Présentation de l’enquête quantitative …………………………………………….……..Page 39 3.2. Analyse des « fiches service » ……………………………………………………...……..Page 40 3.2.1. L’équipe des professionnels de l’accompagnement …………………….…..………..Page 40 3.2.2. Le nombre d’accompagnement par équivalent temps plein…………………………..Page 41 3.2.3. La population accueillie par les services d’accompagnement………………………..Page 42 3.2.4. Entrées et sorties en 2004, 2005 et 2006 ……………………………………………..Page 45 3.3. Analyse des « fiches individuelles » ………………………………………………….…..Page 45 3.3.1. Fréquence et évolution des interventions par domaine d’accompagnement pour les personnes de 50 ans et plus en 2005 et 2006 ………………………………………………..…..Page 45 3.3.2. L’existence, le renforcement ou la création des différents partenariats en 2005 et 2006 ………………………………………………………………………………………………..…..Page 47 3.3.3. La coordination…………………………………………………………………….....Page 51 3.4. Conclusion et hypothèse…………………………………………………………………...Page 52 Deuxième partie CHAPITRE 1 : METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE ET DEROULEMENT DES ENTRETIENS ………………………………………………………………………………...Page 54 1.1. Objectif de l’enquête …………………………………………………………….…..Page 54 1.2. Choix de la méthode ……………………………………………………….….……..Page 54 1.3. Choix des interlocuteurs ……………………………………………..……………..Page 55 1.4. Le guide d’entretien …………………………………………………….….………..Page 56 1.5. Déroulement des entretiens …………………………………………………….…..Page 57 1.5.1. Les entretiens avec les usagers …………………………………………………..Page 58 1.5.2. Les entretiens avec les professionnels………………………………….………..Page 59 CHAPITRE 2 : ANALYSE DES RESULTATS DE L’ENQUETE ……………………...…..Page 60 2.1. Caractéristiques des personnes enquêtées …………………………………………..Page 60 2.2. Près d’un tiers des bénéficiaires nécessitent un accompagnement prioritairement pour le suivi de leur santé …………………………………………………………………...Page 65 2.2.1. Besoins principaux : maintien de la santé et suivi médical …………………………..Page 66 2.2.2. Besoins associés : vie quotidienne et………………………………………….……..Page 67 2.2.3. …suivi de la situation de travailleur.……………………………………………..…..Page 69 2.3. Pour près d’un tiers des personnes, l’évolution des besoins a lieu simultanément dans deux domaines : vie quotidienne et santé………………………………..………….Page 71 2.3.1. Besoins principaux : vie quotidienne et………………………………...…………….Page 72 2.3.2. …maintien de la santé et suivi médical ………………………………………….…..Page 75 2.3.3. Besoins secondaires : suivi de la situation de travailleur………………………..….…..Page 77 2.4. Pour une minorité de notre échantillon (mais un tiers des travailleurs), les besoins concernent essentiellement le suivi dans l’emploi …………………………………..…..Page 77 2.4.1. Besoins principaux : suivi de la situation de travailleur ……………………………..Page 78 2.4.2. Besoins complémentaires : vie quotidienne et …………………………………...…..Page 81 2.4.3. …soutien à la santé et suivi médical ………………………………...……………....Page 82 2.5. Pour près d’un quart des bénéficiaires, il n’est pas noté d’augmentation des besoins…………………………………………………………………………………………..Page 83 2.5.1. Besoins en matière de maintien de la santé et de suivi médical ……………………..Page 84 2.5.2. Besoins en matière de vie quotidienne ………………………………………..……..Page 84 2.5.3. Besoins en matière de suivi de la situation de travailleur ……………………..……..Page 85 2.6. Conclusions de l’analyse …………………………………………………………...…..Page 87 Troisième partie DES BESOINS EMERGENTS ET DES PRATIQUES QUI S’ENRICHISSENT…………Page 90 CONCLUSION GENERALE ……………………………………………………………..Page 96 ANNEXES GLOSSAIRE BIBLIOGRAPHIE INTRODUCTION Educatrice spécialisée, je travaille depuis une dizaine d’années dans un Service d’Accompagnement à la Vie Sociale (SAVS). Nous accompagnons des personnes handicapées mentales (déficientes intellectuelles) qui résident en appartement de droit commun sur l’ensemble de la ville. La plupart d’entre elles travaillent, souvent en ESAT1, mais aussi en milieu ordinaire. Elles sont orientées vers notre service par la CDAPH.2 Depuis 3 ans nous accompagnons des personnes qui ne travaillent plus et ont dépassé l’âge de 60 ans. Pour d’autres, le travail à mi-temps et la retraite sont envisagés dès l’âge de 55 ans, en fonction de leurs relevés de carrière et du règlement de fonctionnement de l’ESAT. Dans les deux cas, les changements induits dans leur mode de vie par la fin de l’activité professionnelle questionnent l’accompagnement du SAVS quant à sa poursuite ou aux adaptations à y apporter, en fonction des nouveaux besoins identifiés. Actuellement la plupart des usagers souhaitent, pendant leur retraite, continuer à vivre en « milieu ordinaire », avec le soutien du service. Cette possibilité est confirmée par les textes qui encadrent la mise en œuvre de l’action sociale et médico-sociale, notamment la loi 2002-2.3 Concernant leur accompagnement par les SAVS, aucune limite d’âge n’est fixée par la loi et ses décrets d’application. Pour autant, certains professionnels s’interrogent sur les capacités de ces usagers à maintenir leur mode de vie à domicile après le passage à la retraite. La disparition des repères établis autour du travail et les évolutions liées au vieillissement ne les mettent-ils pas en danger ? 1 ESAT : Etablissements et Services d’Aide par le Travail 2 CDAPH : nous rappelons que la CDAPH, au sein des MDPH, a remplacé la CDES et la COTOREP 3 Loi 2002-2 1 Ce questionnement, établi à partir de mon expérience professionnelle, s’est trouvé conforté au gré des échanges avec des partenaires et des professionnels d’autres SAVS. Tous confirment que l’accompagnement des personnes handicapées mentales vieillissantes suscite de nombreuses interrogations. De fait, les phénomènes liés au vieillissement sont nouveaux pour des structures, elles aussi, relativement récentes. Il leur faut les aborder à partir de connaissances théoriques, législatives et sociologiques. Ensuite il leur appartient d’adapter leurs pratiques professionnelles existantes en les complétant voire en innovant. Ces observations m’ont amenée à poser différentes questions : qui sont les personnes handicapées mentales vieillissantes ? Présentent-elles des caractéristiques spécifiques dans leur vieillissement, par rapport à la population générale, du fait de leur handicap4 ? En conséquence, ont-elles des besoins spécifiques, différents de ceux des personnes âgées en général ? Si oui, peut-on les identifier ? Quels sont le rôle et la place des SAVS, actuellement leur interlocuteur privilégié pour le maintien à domicile? Que recouvre le terme d’accompagnement ? En quoi les dernières lois orientent-elles la prise en charge de ces personnes ? Pour résumer, la question de départ pour cette recherche est la suivante : Quels sont les besoins d’accompagnement générés par le vieillissement des personnes handicapées mentales et en quoi ces besoins transforment-ils les pratiques des professionnels en SAVS ? Cette étude va nous5 permettre de mieux identifier la population des personnes handicapées mentales vieillissantes ainsi que leurs besoins et de voir en quoi leur accompagnement par les SAVS serait spécifique et évolutif. Elle contient trois grandes parties. Dans la première partie, nous verrons tout d’abord comment, dans notre société, les notions de handicap et de vieillesse sont déterminées et quelles sont les classifications qui leur sont associées. Nous examinerons ensuite la population concernée par les deux phénomènes. En complément, une approche des principaux textes législatifs et règlementaires nous donnera le cadre de l’exercice des pratiques professionnelles. Ensuite, sachant que, face à ce phénomène récent, nos services interrogent leur pratique et donc 4 5 Reconnu par la CDAPH Pour faciliter la compréhension de ma démarche, au cours de cette étude, j’ai utilisé l’alternance de deux formes pronominales : - la première personne du singulier pour exprimer ma position personnelle - la première personne du pluriel lorsque j’associe d’autres personnes à ma réflexion (notamment le lecteur ou mon directeur de mémoire) 2 l’accompagnement, nous approfondirons ce que recouvre le terme d’accompagnement. Nous verrons, dans ce chapitre, que cette pratique s’inscrit dans une relation entre un usager et un intervenant, base nécessaire à l’exercice de la mission de l’accompagnateur. Cet accompagnateur sera amené, successivement, à évaluer des besoins, aider à la formulation de la demande d’accompagnement et à la construction de réponses. Il sera appelé à adapter sa pratique à chaque situation. Nous le considérons donc comme un observateur et un vecteur de l’expression des besoins probablement nouveaux et spécifiques des personnes handicapées mentales vieillissantes ainsi que des réponses existantes, à développer ou à créer. Cet accompagnateur sera donc un interlocuteur incontournable pour les deux enquêtes menées. Effectivement après avoir étudié les phénomènes liés au vieillissement pour la population6 qui nous intéresse ici, j’ai cherché à savoir dans quels domaines d’accompagnement ils se manifestent, et s’ils ont une incidence sur le fonctionnement des services. J’ai donc mené une enquête quantitative auprès des sept SAVS pour personnes handicapées mentales du département du Doubs. Celle-ci a concerné leurs 109 usagers de 50 ans et plus. Cette enquête m’a permis d’étayer l’hypothèse que, dans le cadre de l’accompagnement par nos services, des besoins nouveaux surviennent effectivement chez les personnes handicapées mentales en lien avec le vieillissement. Evalués quantitativement, ils se traduisent par une augmentation des interventions auprès des bénéficiaires. Pour compléter mon investigation, j’ai souhaité connaître plus précisément la nature de ces nouveaux besoins : comment se manifestent-ils chez les usagers ? Quelles en sont les conséquences en termes d’adaptation de l’accompagnement pour les professionnels ? Dans le cas ou l’accompagnement se poursuit et se transforme, quelle est la valeur ajoutée des SAVS par rapport à d’autres services d’aide à la personne ? Autrement dit, qu’est-ce qui légitime l’intervention des SAVS pour les personnes handicapées mentales vieillissantes alors qu’il existe des réponses de droit commun pour les personnes âgées (aide à domicile par exemple). Ainsi une enquête complémentaire s’imposait. La deuxième partie présente l’enquête qualitative par entretiens menée également dans des SAVS du Doubs, auprès de 13 bénéficiaires et de leurs accompagnateurs respectifs. Nous verrons tout d’abord les choix méthodologiques de cette enquête. Ensuite, à partir des résultats, nous analyserons les différents 6 Les personnes handicapées mentales Nous avons distingué ce que le vieillissement a comme effets similaires avec la population globale ( sur la santé, le mode de vie …), mais aussi ce qu’il a de spécifique pour les personnes handicapées mentales ( c’est un phénomène évolutif, et qui a un effet cumulatif avec la déficience). 3 types de besoins liés au vieillissement. Pour terminer, la troisième partie permet d’aborder un « inattendu » de l’enquête : la notion de crise identitaire. Puis à partir des besoins repérés de préciser les adaptations, en cours ou envisageables, des pratiques professionnelles et les compétences à développer pour les accompagnateurs. 4 Première partie 5 CHAPITRE 1 HANDICAP, VIEILLESSE ET VIEILLISSEMENT : leur détermination dans notre société Ces notions ont chacune leur propre histoire. Au cours du dernier demi-siècle, les personnes handicapées et les personnes âgées ont fait l’objet de prises en charges qui se sont différenciées. Aujourd’hui, le vieillissement des personnes handicapées, et plus particulièrement celui des personnes handicapées mentales en SAVS, met en cause cette séparation. Nous allons essayer d’en comprendre les raisons en approfondissant successivement les notions de handicap, de vieillesse et de vieillissement puis en reprenant les quelques études portant sur le vieillissement des personnes handicapées mentales, ainsi que les textes qui encadrent les pratiques professionnelles. 1.1. A propos du handicap Dans les années 1950, la notion de handicap a été empruntée au domaine sportif (hippique). Elle témoigne d’une discrimination positive au profit des personnes infirmes qui dorénavant commenceront à être considérées comme des « ayant droit de la solidarité collective » et non plus comme des « malheureux que le sort a marqué, devant émarger essentiellement à l’assistance publique si ce n’est à la charité individuelle » (Henri-Jacques STIKER.2004). Cet auteur nous fait remarquer que dans les années 1920, apparaissent en parallèle des mots défectifs (infirmes, in-capables, in-valides…), et les mots du retour (ré-adaptation, ré-insertion …). Ils permettent une nouvelle approche de l’infirmité, tant dans les représentations sociales que chez les personnes concernées. Les termes de handicap et handicapés en découlent. De plus, ces vocables introduisent l’idée d’égalisation des chances dans la logique productiviste de la société industrielle. Chacun va pouvoir ainsi participer à la compétition, redevenir performant grâce aux compensations, à la rééducation… La culture intègre l’infirmité, permet d’apprivoiser la non-conformité des personnes concernées en les re-situant face aux mêmes exigences que tout autre citoyen. Le terme de handicap permet aussi de regrouper dans une même notion celle d’infirmité, exprimant un point de vue sanitaire, et celle d’inadaptation, exprimant un point de vue social. En France, ce processus conduit à la promulgation de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 dite « d’orientation en faveur des personnes handicapées ». 6 1.1.1. La loi de 1975 Pour cette loi « la prévention et le dépistage des handicaps, les soins, l’éducation, la formation et l’orientation professionnelle, l’emploi, la garantie d’un minimum de ressources, l’intégration sociale et l’accès aux sports et aux loisirs du mineur et de l’adulte handicapé physiques, sensoriels ou mentaux, constituent une obligation nationale ». La mise en œuvre se fait notamment par l’intermédiaire des institutions sociales et médico-sociales qui se développent ; elles sont régies par une autre loi datant du même jour. A noter qu’aucune barrière d’âge plafond n’est fixée. Les personnes sont « reconnues handicapées » par deux commissions : la Commission Départementale de l’Education Spéciale (CDES), pour les enfants et adolescents jusqu’à 20 ans et la Commission Technique d’Orientation et de Reclassement Professionnel (COTOREP), pour les adultes. En fonction de la nature et du degré de handicap, elles orientent les demandeurs vers les institutions adaptées. Bernard ENNUYER (2005) nous fait remarquer que « le handicap est alors défini comme attribut de la personne sous forme d’un déficit physique, sensoriel ou mental ». A ce moment, les efforts engagés par l’Etat français s’inscrivent dans le développement de filières spécialisées. Ces orientations se construisent sur le plan national parallèlement à une réflexion internationale. 1.1.2. La Classification Internationale du Handicap (CIH) Le médecin britannique Philip WOOD, missionné par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), réfléchit à une nouvelle définition du handicap qui aboutit à la Classification Internationale Déficience, Incapacité, Handicap (CIDIH) appelée en France Classification Internationale du Handicap (CIH). Celleci est adoptée par l’OMS en 1976 et publiée en anglais en 1980. Le modèle est le suivant : Maladie ===> déficience ===> incapacité ===> Handicap (désavantage social) Les conséquences de la maladie sont définies ainsi (dans la CIH): Déficience : dans le domaine de la santé, la déficience correspond à toute perte ou altération d’une structure ou fonction psychologique, physiologique ou anatomique. Incapacité : dans le domaine de la santé, une incapacité correspond à une réduction (résultat d’une déficience), partielle ou totale, de la capacité d’accomplir une activité d’une façon ou dans les limites considérées comme normales pour un être humain. Handicap, ou Désavantage social : dans le domaine de la santé, le désavantage social pour un individu donné résulte d’une déficience ou d’une incapacité qui limite ou interdit l’accomplissement d’un rôle normal (en rapport avec l’âge, le sexe, les facteurs sociaux et culturels). La classification de WOOD, limitée au domaine de la santé montre ses limites. aussi l’approche de la notion de handicap continue-t-elle à évoluer dans le sens d’une prise en compte des facteurs sociaux dans la production du handicap. 7 1.1.3. La Classification Internationale du Fonctionnement (CIF) Dans les années 1990, les travaux de révision de la CIH s’organisent pour la recherche d’un consensus sur une terminologie qui se veut internationale et sur une perception multidimensionnel du handicap prenant mieux en compte l’environnement. La CIH est donc restée une référence internationale jusqu’au 21 mai 2001 où, par vote de l’assemblée mondiale de la santé, elle est remplacée par la Classification Internationale du Fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF). La CIF est articulée avec la Classification Internationale des Maladies 10ème version (CIM 10) de l’OMS qui décrit et classe les pathologies, considérées comme une des composantes de la santé. Les autres composantes appartiennent à la CIF : - les fonctions (physiques ou mentales) et la structure corporelles qui peuvent être déficientes - Les facteurs contextuels qui peuvent être environnementaux (physiques, culturels, dispositifs sociaux…) ou personnels. - Les activités et la participation à la vie sociale (marcher, faire ses courses, communiquer…). Une personne peut être limitée dans sa capacité à réaliser certaines activités et restreinte dans sa participation à la vie sociale du fait des autres composantes de la santé. La situation de handicap est donc dans cette approche due à l’interaction entre ces différentes composantes de la santé. Rappelons que pour l’OMS, la santé est « un état de bien-être physique, mental et social complet et pas simplement l’absence de maladie ou d’infirmité ». La CIF est venue répondre au besoin de l’OMS de perfectionner son classement international des systèmes de santé. Pour François CHAPIREAU (2001), elle est aussi utilisable dans ses applications qu’il définit ainsi : elle est un « outil de recherche, outil clinique, outil de politique sociale et outil pédagogique ». Cette idée fait écho à la pensée de Christian ROSSIGNOL (2004) pour qui « la CIF » est un outil destiné à classer des personnes qui constituent des clientèles actuelles ou potentielles des professions médicales, paramédicales et médico-sociales ainsi que celles des institutions correspondantes ». Ce résumé de l’évolution de la notion de handicap amène à considérer de plus en plus ce dernier à la lumière des facteurs environnementaux, ceux-ci ayant une place « dans la production d’une situation de handicap » (Patrick GUYOT. 2004). Aux facteurs médicaux et déficitaires propres à la personne viennent se mêler des facteurs sociaux tels que l’accessibilité de l’espace public et les politiques sociales. Ainsi le degré de handicap varie en fonction de l’importance de la déficience, de l’étendue des compensations qu’elles ont acquises et des exigences de la vie sociale. 8 Ce sont les liens ou les interactions entre ces deux pôles (personnel et extérieur) qui déterminent « les activités et la participation de la personne » (Bernard ENNUYER. 2005). Cette nouvelle approche du handicap est à l’œuvre dans les revendications des associations et influe sur les nouvelles politiques sociales et médico-sociales, notamment dans la loi « handicap » de 2005. Dite « pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées », cette loi donne la définition suivante du handicap : "constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant. » (Article 2, Art. L. 114 du CASF). Cette définition du handicap s’inspire clairement de la CIF sans toutefois reconnaître pleinement le rôle des facteurs environnementaux. La loi repose sur deux piliers pour lesquels elle met en place diverses dispositions : - L’accessibilité sous toutes ces formes : scolarisation, emploi, bâtiments, voirie, transports… - La compensation qui consiste par des aides individuelles (aides humaines, techniques, aménagements du logement, aides animalières…) à compenser les conséquences du handicap. Petit à petit le monde du handicap sort de son isolement. L’évolution perceptible au travers des textes cités, sur la manière de considérer les personnes handicapées, leur permet de prétendre à un nouveau statut. « Du statut d’éternel enfant, d’assisté ou d’incapable majeur, la personne handicapée, désormais visible, vient s’inscrire de plein droit sur la scène sociale où elle réclame la citoyenneté qui lui revient et le droit de vieillir au milieu de tous dans la dignité » (Bernard AZEMA et Nathalie MARTINEZ, 2005). Ce modèle, en privilégiant la responsabilité individuelle une fois la compensation et l’accessibilité mises en œuvre, est exigeant en terme d’autonomie. Pouvons-nous considérer que les aspirations et les possibilités de décision des handicapés mentaux sont semblables à celles handicapés moteurs ou sensoriels ? « L’importance récente donnée aux droits individuels ne risque-t-elle pas, si elle se cantonnait au »fais-le toi-même et décide ce qui est bon pour toi », à se transformer en abandon social et perte de solidarité collective ? » (Gérard ZRIBI 2005). 1.2. A propos de la vieillesse et du vieillissement dans notre société 1.2.1. Approche démographique Les chiffres de la population française au 31 décembre 2006, mis à disposition par l’Institut National d’Etudes Démographiques (INED. 2007), nous ont permis d’établir le graphique ci-dessous : 9 -1- Répartition par sexe et tranches d’âges de la population française de plus de 19 ans 25 20 15 10 5 0 FEMMES HOMMES (En centaine de mille) Un complément d’étude nous montre que dans la population française : En 1900 : les personnes âgées représentaient 13% de la population. En 1995 : les personnes de : + de 60 ans étaient 11 millions (20% de la population) + de 75 ans étaient 4 millions + de 85 ans étaient plus de 1 million En 2010 : les personnes de : + de 60 ans représenteront environ 22,8% de la population + de 75 ans représenteront environ 8,9% de la population + de 85 ans représenteront environ 2,5% de la population en 2050 : les personnes de : + de 60 ans représenteront environ 33,7% de la population + de 75 ans représenteront environ 15,2% de la population + de 85 ans représenteront environ 6,9% de la population. Ces dernières décennies, la société française, comme les autres sociétés occidentales, a vu sa structure démographique subir d’importantes modifications. Cela se traduit par un renversement de la pyramide des âges, avec une population d’aînés de plus en plus importante tant en nombre que rapportée à la population jeune. Ce phénomène est lourd de conséquences et rend nécessaire une réflexion sur les incidences en matière d’action sociale et médico-sociale. 10 1.2.2. Approche générale Il nous parait utile de rappeler avec Patrice BOURDELAIS (1997) que « avant les années soixante, vieillards et handicapés étaient regroupés sous un même ensemble de vocables : infirmes, invalides ou handicapés ». Leurs besoins étaient l’objet d’une politique commune : l’assistance aux pauvres, que ce soit en termes d’aides ou d’institutionnalisation (hospice). C’est le rapport LAROQUE (1962) qui « met en évidence une vision négative du vieillissement » (Karine CHAUVIN.2003) et définit la vieillesse comme « une catégorie d’âge sociale » : le 3ème âge. Les travaux de recherche des décennies suivantes ont permis de montrer l’hétérogénéité de la population concernée tant du point de vue économique que de celui du « processus d’entrée et d’expérience du handicap » (CHAUVIN). La Prestation Spécifique Dépendance (PSD) va créer une nouvelle catégorie : le 4ème âge, qui rassemble les problèmes de la vieillesse au travers d’une image déficitaire et de coût. Ajoutons que ces dernières années est évoquée la notion de 5ème risque : la dépendance. Le développement des classifications témoigne de la complexité à définir la vieillesse et traduisent la mobilité de cette notion. Pour mieux comprendre ce qui est en jeu dans son évocation, nous allons utiliser plusieurs angles d’approche formulés sous forme de questions pour indiquer la relativité de leur présence et de leur importance chez chaque individu. La vieillesse : une question d’âge ? L’entrée dans la vieillesse ou dans la catégorie des « Personnes Agées » est symbolisée par l’arrêt d’une activité professionnelle ; nous pouvons donc la situer au moment de la retraite entre 60 et 65 ans. Cette frontière de la soixantaine est aussi celle présente dans notre législation pour un certain nombre de droits7 (allocations, prises en charge spécialisées …). Mais l’étendue de cette tranche d’âge et l’inégalité des situations a amené, à la suite d’études, à procéder à un nouveau partage et à désigner « les personnes âgées dépendantes » comme participant d’un nouveau groupe rejoignant une tranche d’âge des 80 ans et au-delà. La vieillesse : Une question physiologique ? Afin de compléter ce qui est dit plus haut du processus de vieillissement, nous ajouterons que la vieillesse amène une fragilité physique, mais que celle-ci se manifeste de façon très hétérogène et avec une intensité variable selon les personnes. Un autre élément est l’altération des traits et de l’apparence. Ces données sont devenues dans notre société des critères dépréciateurs. 7 65 ans pour l’aide sociale ou 60 ans en cas d’inaptitude au travail 11 Mais les années (la maturation) permettent aussi l’accumulation de connaissances, utiles en terme de mémoire collective et de lien entre les générations. Ces qualités sont davantage valorisées dans les civilisations de culture orale. La vieillesse : Une question économique ? Une grande disparité caractérise la situation économique des personnes âgées pour qui, depuis le milieu des années 80, le niveau de vie relatif a « rattrapé voire dépassé celui des actifs… » (Jean FOUCART. 2003). Cette donnée alimente les représentations sociales d’une classe d’âge ayant de bonnes ressources financières et tend à faire oublier toute une tranche de cette population bénéficiant des minima sociaux. La vieillesse : Une question de statut et de reconnaissance ? Ceux-ci sont liés au rôle que l’individu joue dans la société : est-il producteur de gains ? Se rend-il utile ? Les réponses conditionnent le regard qui est posé sur lui et lui permettent d’être reconnu, valorisé et considéré par ses pairs. De plus, une place importante est accordée à l’image et comme nous l’avons dit, celle-ci peut être fortement altérée par le vieillissement physiologique. Ainsi pour certaines personnes, « l’avancée en âge génère une mise à mal du narcissisme » parce que « se plaire à soi-même devient de plus en plus difficile » (Cécile AGUESSE. 2003). La vieillesse : Une question relationnelle ? Les changements de statut induisent inévitablement des modifications dans le réseau relationnel. Celui-ci pourra et/ou devra être réorganisé, mais il risque souvent d’être réduit. S’y ajoute, avec le temps, la disparition d’une partie de ses membres. Jean FOUCART note, en lien avec la réduction des échanges avec l’extérieur chez les couples très âgés, « la réduction de l’espace personnel » qui demande de redéfinir « la bonne distance conjugale ». Celle-ci relève d’un équilibre à trouver entre deux tendances : celle de la fusion et celle de l’indépendance. Cet équilibre peut aussi être mis en péril par des intervenants extérieurs, notamment dans le cas de la prise en charge d’une dépendance pour l’un des membres du couple. La vieillesse : Une question d’isolement et de solitude ? La maladie et des ressources économiques faibles au sein d’un réseau relationnel pauvre sont les conditions majeures pour créer une situation d’isolement. Et cela d’autant plus que ces personnes sont souvent peu demandeuses envers les services sociaux. Ces situations rassemblent des facteurs importants d’accélération du vieillissement. Christian Van ROMPAEY (2003) précise la nuance avec le sentiment de solitude qui existe dans les situations d’isolement, mais qui peut aussi se manifester chez les personnes entourées dont les relations avec l’entourage sont insatisfaisantes. 12 La vieillesse : Une question de pertes ? Celles-ci peuvent se situer dans trois registres qui peuvent se cumuler : il s’agit de la perte d’une relation affective, d’un proche, puis de celle de fonctions physiques qui confronte aux limitations et aux défaillances voire à une dépendance, et enfin les pertes sociales activées par l’entrée en institution. La perte est liée au changement. Lorsque celui-ci est violent ou se surajoute à d’autres, il peut provoquer une situation de crise. L’adaptation nécessaire peut être difficile à mettre en œuvre ; elle se manifeste par l’acceptation du décalage entre l’avant et le présent et passe généralement par de nouveaux investissements. La vieillesse : Une question de dépendance ? La dépendance peut prendre différentes formes : - la « dépendance positive » (Julien Del FABRO. 2003) qui caractérise tout individu social, qui concerne sa croissance pendant l’enfance, puis sa vie affective, ses activités, ses besoins économiques, ses relations sociales dans leur ensemble. Elle est inévitable mais elle varie selon les périodes de la vie. - la dépendance des personnes vieillissantes qui se particularise par le fait qu’elle induit un investissement obligé de l’entourage, éventuellement croissant et s’inscrivant dans la durée. S’y joint la question du sens et de l’avancée inéluctable vers la mort. - la dépendance qui instaure l’être dans un lien de transmission des générations et donc dans un rapport au temps. Se pose alors la question de notre rapport au temps et des raisons de la mise à distance puis plus particulièrement celle du traitement de la dépendance de la personne âgée. La vieillesse : Une question d’autonomie ? L’autonomie consiste chez tout individu à un droit et à une capacité à l’autodétermination, à choisir sa vie et notamment son lieu de vie. Son respect par les aidants et les professionnels amène ceux-ci, d’abord à écouter, ensuite à construire avec la personne aidée, un plan d’action satisfaisant. L’exercice de ce droit fondamental s’avère ardu face à des formes de vulnérabilité telles que la dépendance ou la déficience mentale. Il nécessite donc une grande vigilance et une réflexion permanente. Olivier de DINECHIN (2006) résume à la suite d’un rapport du Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE) trois niveaux du concept d’autonomie : l’autonomie d’action, l’autonomie de pensée et l’autonomie de volonté. Il relève toute la complexité de cette question et les difficultés auxquelles les professionnels seront confrontés dans chaque situation particulière. 13 Les différentes notions que nous venons d’aborder ne permettent pas, répétons le, de définir une catégorie de personnes afin de les classer par rapport à une norme qui justifierait des interventions types. Au contraire, elles soulignent toute la complexité des différentes combinaisons possibles et donc des réponses à apporter dans le respect des individualités. Elles témoignent aussi de la réaction de la société face à une période de la vie considérée comme inquiétante, posant de nombreux problèmes d’ailleurs relayés médiatiquement. En résumé nous pouvons dire que la notion de vieillissement implique celle du temps qui passe, d’une chronologie, d’un mouvement inéluctable. Du point de vue biologique, il s’agit d’une évolution naturelle qui concerne tout être vivant et qui par un ensemble de phénomènes modifie les fonctions et la structure d’un organisme. Ce processus de vie a la même fin pour tous, mais il connaît un développement singulier chez chaque individu. A cela s’ajoute une multitude d’influences qui vont conditionner cette évolution : niveau de soins disponibles, caractères héréditaires, évènements, situation économique, situation affective et relationnelle … La prise en compte des personnes vieillissantes concerne ainsi plusieurs domaines dont le domaine médical et le domaine social. Nous rejoignons alors la pensée de WOOD et l’idée fondamentale de la CIF qui soulignent l’interaction entre le champ sanitaire (pathologie / déficience) et le champ social (environnement). Ainsi les notions de « vieux » et de « vieillesse » vont prendre des connotations en lien direct avec les modèles de la société concernée. Nous allons donc tenter de préciser ce qu’il en est pour nous. 1.2.3. Approche sociologique Le phénomène du vieillissement a amené, progressivement avec le temps, la construction de catégories : les vieux, les personnes âgées, les retraités, le 3ème âge, le 4ème âge, qui sont à la fois le fruit de l’évolution culturelle et le support de la réflexion et de l’organisation de la société à l’égard de cette population. P. PIETQUIN (2003) nous confirme que « la signification donnée aux différentes étapes de la vie est directement liée au modèle culturel de l’époque et du lieu dans lequel elle s’inscrit. La vieillesse (ou du moins ce que nous nommons comme telle) ne fait pas exception à la règle ». Ainsi s’est construite une vision globalisante et stéréotypée qui masque la diversité interne évidente de ce groupe. Les classifications établies servent de référence pour les conduites adoptées et les valeurs défendues. L’évolution culturelle s’est faite en lien avec l’évolution de la société. Nous sommes passés d’un « modèle social de type industriel » avec des valeurs fondées autour du travail, de l’utilité sociale à un nouveau modèle plus individuel, de réalisation de soi au travers de normes voire de performances, plus proches de celles de la jeunesse que de celles de la vieillesse (santé, apparence physique, autonomie…). Ainsi cette mutation ne va pas sans générer des tensions chez les « personnes vieillissantes » partagées, du 14 fait de leur âge, entre ces deux modèles. De plus dans les années 80 la crise économique et la politique de l’emploi ont avancé l’âge de la « vieillesse professionnelle » (Patrick PIETQUIN (2003)), alors que l’accroissement de l’espérance de vie sans incapacité continue à progresser grâce à l’amélioration générale du niveau de santé. Nous pouvons noter là un paradoxe entre cette amélioration et la représentation négative de la période post-professionnelle. Nous pouvons toutefois affirmer que cette période peut provoquer des sentiments d’inutilité, de coût, de peur de la déchéance physique ou mentale et qu’elle renvoie au cheminement vers la fin de vie, vers la mort. Ce terme n’invite pas à s’y confronter volontiers. Une telle perception favorise des idées et des comportements d’exclusion qui peuvent prendre le nom d’âgisme. « L’âgisme est bien une forme d’hétérophobie à l’égard des plus âgés, puisqu’il souligne les différences dues à l’âge, il stigmatise et marque la perte de ce qui a été …» (J.FOUCART. 2003). Comme le racisme, il procède du refus de l’altérité, enferme dans des catégories, des stéréotypes, il engendre la méconnaissance de l’autre et réduit de ce fait les échanges intergénérationnels. Cette attitude qui éloigne toute différence pourtant source d’échange, de rencontre et de créativité est néfaste pour tous : personnes âgées, population active, professionnels … Par exemple, cette considération est en partie responsable du manque de formations proposées après un certain âge. Ceci bien qu’ « il a été prouvé que même les personnes âgées ayant perdu le plus d’aptitudes sont capables, si on leur donne la possibilité, de regagner un grand contrôle sur leur vie » (Alan WALKER 2003). Pour J. FOUCART « accepter la différence des âges est impératif », car « figer un groupe dans une forme discréditante signifie la mort sociale ». Nous pouvons conclure que malgré un discours globalisant, les personnes âgées, au sens large, constituent un groupe social très hétérogène en termes de santé, de mobilité, de statuts, de revenus … et donc de conditions de vie et de besoins. 1.2.4. Approche médicale Le processus de vieillissement et ses effets ont été étudiés par les gériatres depuis les années 70 afin d’établir des repères scientifiques de l’avancée en âge. Cette approche par le secteur médical a provoqué une vision médicale du vieillissement, assimilé rapidement à une maladie porteuse de séquelles. Ces dernières sont identifiables, évaluables à partir de « l’observation des pertes d’activités de l’individu ». Cette orientation amène l’utilisation du terme de dépendance qui va se substituer à ceux d’invalidité et de handicap et va s’imposer dans les années 80 comme repère commun pour qualifier l’évolution de l’état de santé des personnes âgées. A partir de cette notion, validée par d’autres champs (politique, économique …), les professionnels construisent des outils de mesure et notamment la grille AGGIR8. Elle doit permettre d’évaluer à la fois l’état de dépendance des individus et leur besoin d’aide. Promue par le 8 Autonomie Gérontologique, Groupe Iso Ressource 15 secteur gérontologique, cette grille utilise des variables témoignant d’une représentation médicale du handicap. Un examen des items retenus montre que par rapport à la CIH, ils correspondent au registre des incapacités et uniquement au niveau corporel. Les variables sociales viennent les illustrer, mais ne sont pas déterminantes. La grille valorise donc un modèle individuel, évaluant le niveau d’incapacités de la personne âgée, considérant donc que celui-ci est un facteur intrinsèque à cette personne. Sa conception est restrictive vis-à-vis de la définition de la santé, envisagée de façon plus globale et plus complète par la CIH puis la CIF. De manière plus générale, les différentes grilles et la place prise par les gériatres dans l’appréhension de la question de la dépendance des personnes âgées ont permis à ces professionnels d’acquérir un véritable pouvoir d’experts pour l’évaluation du besoin d’aide des personnes âgées dépendantes. Cette définition médicale présente trois avantages majeurs : elle offre des moyens de mesure aux pouvoirs publics, elle synthétise la vision de l’appréciation de la dépendance par l’observation d’activités de la vie quotidienne de la part de nombreux professionnels, et enfin elle propose aux pouvoirs publics des outils informatisés, faciles d’usage, aux informations riches et utilisables dans le cadre de la politique gérontologique. Par contre, elle privilégie davantage la notion de dépendance que celle d’autonomie. L’étude des notions de handicap et de vieillissement nous montre qu’elles recouvrent des réalités très hétérogènes d’un individu à l’autre. Ainsi les réponses apportées aux personnes concernées nécessitent d’être étudiées de façon individuelle pour être adaptées aux besoins particuliers. Néanmoins dans le cadre d’un SAVS, les demandes correspondent aux besoins d’une population ayant des caractéristiques identifiées. Pour ce qui nous concerne, il s’agit de personnes handicapées mentales, vivant en milieu ordinaire et sollicitant notre accompagnement pour conserver ce mode de vie. Nous allons donc continuer par la recherche de précisions concernant l’identification et les besoins de notre population. 1.3. Le vieillissement chez les personnes handicapées mentales Différentes études permettent de rassembler des données sur le phénomène récemment étudié du vieillissement chez les personnes handicapées mentales. Elles en éclairent les manifestations et permettent de dégager quelques orientations de travail pour les professionnels concernés. 1.3.1. Un phénomène évolutif Les personnes handicapées connaissent depuis quelques décennies un gain sensible de leur espérance de vie dans tous les pays développés. Elles subissent de la même façon les influences sociales et affectives 16 qui marquent sensiblement le processus de vieillissement. Celui-ci apparaît de façon superposable à celui de la population globale, hormis chez les personnes porteuses de troubles génétiques ou moteurs. Alan WALKER (2003) remarque toutefois que ces personnes sont classées beaucoup plus tôt dans la catégorie des personnes âgées du fait du cumul de stéréotypes des deux population : « impuissance, dépendance, besoin de soin » pour le handicap mental et « désengagement des rôles sociaux » pour l’avancée en âge. Deux études, l’une écossaise l’autre australienne, montrent une influence du niveau intellectuel sur l’espérance de vie : moins la déficience intellectuelle est importante, plus l’espérance de vie s’accroît. Par ailleurs Thierry de THIBAULT et Daisy POPULAIRE (2003) rapportent qu’en l’absence de causes organiques, les preuves du déclin intellectuel restent rares jusqu’à l’âge de 70 ans. D’autre part les personnes atteintes d’une déficience légère ou modérée manifestent des capacités d’adaptation en évolution jusqu’à l’âge de 40 ans. Celles-ci déclinent légèrement après l’âge de 50 ans. Par contre chez les malades mentaux, il demeure une surmortalité massive par rapport à la population générale, liée à des facteurs de risques spécifiques ainsi qu’à un moindre accès aux ressources de santé. CARTER et JANCAR (1983) donnent, à propos de l’espérance moyenne de vie de handicapés mentaux, les chiffres suivants : En 1930 : 19,9 ans pour les hommes et 22 ans pour les femmes En 1980 : 58,3 ans pour les hommes et 59,8 ans pour les femmes GABBAÏ (2003), pour une population de personnes atteintes de déficience moyenne et légère et/ ou de maladie mentale, note un âge moyen de décès à : - 64,46 ans entre 1972 et 1979 - 70,23 ans entre 1980 et 1990 Ces deux études confirment l’idée que pour les personnes handicapées mentales, la longévité est liée à la qualité des soins, des prises en charges successives, de l’harmonie de cette succession ainsi que des composantes personnelles. « Comme en population générale, le gain de longévité se réalise avec une meilleure santé chez les survivants de la cohorte » (B. AZEMA et N. MARTINEZ 2005). 1.3.2. Un effet cumulatif : de la déficience s’ajoute à la déficience Toujours en se référant à B. AZEMA et N. MARTINEZ, nous pouvons dire que de manière générale, en raison de leur handicap, ces personnes sont exposées à une moins bonne surveillance de leur santé et de leur hygiène de vie. Ainsi les maladies chroniques invalidantes (cardio-vasculaires, musculo-squelettiques ou atteintes sensorielles) observées dans la population générale comme faisant partie du processus de vieillissement normal peuvent avoir un impact plus important chez les personnes handicapées du fait de leur effet cumulatif avec les déficiences existantes. Les mêmes ralentissements et dysfonctionnements progressifs face à une moindre capacité adaptative contribuent à les vulnérabiliser davantage. 17 Pour les mêmes raisons une attention particulière est attirée sur les risques de confusions entre des signes de vieillissement et des épisodes morbides, notamment dépressifs. La question du suivi de la santé prend ici tout son intérêt et explique la mise en évidence de l’importance du milieu social et physique dans lequel vivent ces personnes. Ces observations ont mis en évidence des points de vigilance et d’aide au suivi de la santé des personnes handicapées. Tout d’abord il s’agit de la négligence ou l’inattention à des besoins physiques et physiologiques tels que le régime alimentaire, le non respect des rythmes, les troubles du sommeil, la santé bucco-dentaire, les troubles sensoriels, des maladies dégénératives et spécifiquement le cancer, les troubles liés à la ménopause et enfin les troubles mentaux évolutifs. Les problèmes posés sont bien sûr liés à l’ensemble du processus dépistage-diagnostic-traitement qui se voit toujours complexifié du fait des déficiences et, parfois, mis en échec. En effet, les difficultés, notamment d’expression et de communication, rendent les démarches délicates, la qualité de l’adhésion au traitement incertaine alors que toutes deux conditionnent l’efficacité des soins. Ensuite, signalons les relations affectives. Les personnes handicapées mentales sont, ou se vivent, souvent désinsérées par rapport à l’histoire passée et surtout présente de leur famille. L’étayage familial comporte rarement une descendance et devient précaire du côté des parents éventuels eux-mêmes vieillissants. Elles peuvent avoir besoin d’un soutien pour gérer au mieux les relations restées possibles. La majorité de ces personnes handicapées sera confrontée à une solitude grandissante. Pour cette raison, les autres liens qui auront pu être créés antérieurement seront à favoriser et à entretenir. Un troisième point concerne les projets et les investissements correspondants aux besoins, aux souhaits et aux rythmes de la personne. Ils sont indispensables car ils participent du bien-être, génèrent des satisfactions, cultivent l’évolutivité et l’adaptation et sauvegardent la liberté et la dignité de l’individu. Ils doivent être modulables dans le temps, en fonction de l’évolution de chacun. Enfin, Bernard AZEMA et Nathalie MARTINEZ portent une attention particulière au passage de la vie active à la retraite. Pour ces auteurs « la mise à la retraite peut être vécue comme une forme d’exclusion, comme une perte de reconnaissance sociale pouvant aboutir à une véritable crise identitaire ». Le travail a un rôle certain pour l’estime de soi du fait de la place sociale qu’il donne. De plus, de par la sédentarité professionnelle, se sont créés parallèlement des « habitudes de vie », des « repères socio-spatiaux » et un « ancrage affectivo-relationnel » qui structurent la vie globale des personnes handicapées mentales. Les modifications, voire les ruptures ne sont pas sans répercussions sur le bien-être et l’existence. Elles méritent donc d’être au cœur de l’accompagnement de ces personnes, pour les soutenir face à ces pertes successives : leurs capacités, leur emploi, leur rôle social, leurs relations … Ces observations permettent de dégager un certain nombre de besoins caractéristiques. 18 1.3.3. Des besoins spécifiques aux personnes handicapées mentales... Nous citerons pour commencer, la préparation à l’interruption de la vie professionnelle. En raison de l’importance de l’étayage que constitue l’activité professionnelle, les relations qui en dépendent et le rythme qui lui est rattaché, le passage à la retraite mérite une préparation minutieuse. Il peut être l’occasion d’une réflexion sur la question de l’âge. De nombreux travailleurs en ESAT sont appelés « les jeunes ». Restituer la personne dans sa temporalité, dans son histoire » (T. de Thibault et D. Populaire 2003) lui permettra d’envisager la retraite comme une nouvelle étape. Justifiée par les raisons et dans le temps, elle pourra être envisagée au travers d’un nouveau mode de vie, c'est-à-dire avec de nouvelles orientations en terme de réseau relationnel, d’investissements et d’une nouvelle gestion du temps. Faisant suite, il pourra être nécessaire d’aider à la gestion du temps. Un nouveau mode de vie, qu’il soit lié à des modifications d’ordre professionnel, relationnel, affectif, d’habitat … peut être déstabilisant. Un soutien, plus ou moins important, permettra de le restructurer plus confortablement en fonction des nouveaux besoins, des habitudes antérieures et éventuellement des représentations de la personne. Un troisième point est lié aux nouveaux apprentissages. Les changements dus à l’avancée en âge impliquent des adaptations, qu’elles soient souhaitées, acceptées ou forcées. Afin de les positiver au mieux, des propositions choisies peuvent être judicieuses. En font partie, par exemple, des informations sur la compréhension du corps ou l’hygiène au sens large, une ouverture sur des activités socio-culturelles intra mais aussi extra-institutionnelles : clubs du 3ème âge, ateliers de gymnastique, chorale … Ce repérage, non exhaustif, basé sur l’écoute de la personne engendrera questionnements, adaptations et innovations chez les acteurs de la mise en place de réponses. Les intérêts recherchés sont divers : créer et/ou entretenir un réseau relationnel, se situer dans les générations, percevoir les difficultés éventuelles liées à l’âge, faciliter leur compréhension et les aménagements possibles … Dans ce contexte, les observations et les évaluations de l’entourage de la personne handicapée mentale ont un intérêt particulier ; elles facilitent le repérage, enrichissent et précisent l’identification et la définition des problèmes de santé éventuels. La fonction de médiation va à son tour trouver sa place pour le suivi de la santé et le soutien aux personnes concernées. Cette fonction, partie inhérente aux missions des SAVS, implique de fait un partenariat régulier avec, selon les situations, les familles, les professionnels des ESAT ou des autres établissements ou entreprises employeurs, les services fréquentés par les personnes vieillissantes, leurs soignants. Cette ouverture est appuyée par Ariane VIENNEY (2003) pour qui « il est essentiel que nous luttions contre nos filières et institutions hermétiques liées à l’habitat et à la vie sociale ». Nous pouvons dire à nouveau que les personnes handicapées mentales vieillissantes ne forment pas une catégorie de population présentant des caractéristiques homogènes induisant des réponses uniformes et standardisées tout comme dans la population générale. D’ailleurs au-delà des besoins qui leurs sont 19 spécifiques, les personnes handicapées mentales vieillissantes présentes des besoins convergents avec ceux de certaines personnes âgées dépendantes9. Il nous semble à ce titre utile d’en relever quelques-uns. 1.3.4. …mais aussi des besoins similaires à ceux des autres personnes âgées La gérontologie générale française évolue dans le sens de la mise en place de formes de prise en charge au plus près des « habitudes de vie antérieures des usagers « (Pascale ROUSSEL. 2003). Quitter son domicile et entrer en institution n’étant envisagé que lorsque la perte d’autonomie et les problèmes médicaux le nécessitent. Nous assistons à une « diversification très large des réponses à apporter » (Gérard ZRIBI. 2003) sous la pression tant économique que de l’évolution des mentalités. Le maintien à domicile se développe notamment grâce au renforcement des aides (aides ménagères, repas et soins à domicile …), à la création de centres d’accueil de jour et à la médicalisation des foyers logements. Ces mesures veulent répondre à la nécessité d’adaptations successives aux difficultés liées au vieillissement et au respect du choix très largement exprimé par les personnes âgées de vivre chez elles. Elles évitent le déracinement humain et physique. L’aide médico-sociale, dans ce mouvement, tend à prendre en compte de façon de plus en plus affirmée les souhaits des personnes. Leur implication dans les décisions prises est recherchée selon toute légitimité. Nous venons de voir la prégnance de l’évolution de notre culture dans la manifestation des besoins sociaux et dans les adaptations développées pour leur prise en compte. Nous allons compléter cette perception par une approche du contexte dans lequel agissent aujourd’hui les professionnels des SAVS. Nous aborderons donc les derniers textes juridiques concernant ces services et les personnes qui y sont accompagnées, puis quelques-uns concernant les personnes âgées de façon générale. Construits à partir des besoins évalués chez les usagers, et donc toujours susceptibles d’évolution, ces textes encadrent la mise en œuvre des politiques sociales et médico-sociales. 1.4. Quelques repères législatifs et règlementaires 1.4.1. La loi n°2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale Entre la fin des années 70 et les années 2000, le secteur social et médico-social s’est développé mais il est resté face à des demandes non satisfaites : mixité, accueil de jour, petites unités de vie, nouvelles problématiques … Il est constaté que les prises en charge sont longues et insuffisamment tournées vers l’individu. 9 L’objet de cette étude n’étant pas la dépendance chez les personnes âgées, nous n’approfondirons pas cette notion ici. 20 Toutefois, l’évolution des pratiques et leur adaptation à de nouveaux publics conduit à la création de divers services « de suite » ou « d’accompagnement ». Cette nouvelle loi a pour objectif de permettre une réponse adaptée aux besoins de chacun, « dans le respect de l’égale dignité de tous les êtres humains » et en « garantissant un accès équitable sur l’ensemble du territoire » (Article 3. Art.L.116-2 du CASF). De nouveaux établissements et services sont reconnus, tels que les services d’accompagnement à la vie sociale (SAVS), des établissements d’hébergement, éventuellement médicalisés et sans limite d’âge, ou des structures expérimentales. Ces dernières peuvent soit délivrer « des prestations à domicile, en milieu de vie ordinaire, en accueil familial ou dans une structure de prise en charge », soit assurer « l’accueil à titre permanent, temporaire ou selon un mode séquentiel… » (Article 15. Art. L. 312-1). Elle affirme des droits nouveaux ou mieux garantis à l’usager et à sa famille par une prise en charge ou un accompagnement individualisé respectant son « consentement éclairé » (ou celui de son représentant légal), et son « libre choix entre les prestations » proposées, ainsi que par sa participation directe à l’élaboration et à la mise en œuvre de son projet. Des garanties nouvelles sont créées au travers d’une charte, du livret d’accueil, du contrat de séjour ou document individuel de prise en charge et du choix possible d’un médiateur (personne qualifiée) en cas de différend avec la direction de l’établissement ou du service social ou médico-social . Ces actions s’inscrivent dans les nouvelles modalités de planification médico-sociale et répondent à des exigences d’évaluation que nous ne détaillerons pas ici. Plus particulièrement, il nous faut souligner ici l’encadrement par un décret des Services d’Accompagnement à la Vie Sociale (SAVS) et des Services d’Accompagnement Médico-Social pour Adultes Handicapés (SAMSAH) inclus dans les services cités au paragraphe 7 de l’article 15 cette loi. 1.4.2. Le décret n° 2005-223 du 11 mars 200510 Codifié dans la partie règlementaire du CASF, « relatif aux conditions d’organisation et de fonctionnement » des SAVS et des SAMSAH, il précise leurs missions, la composition de leurs équipes pluridisciplinaires, leur organisation et leur fonctionnement. Les SAVS « ont pour vocation de contribuer à la réalisation du projet de vie des personnes handicapées par un accompagnement adapté… ». Ils « prennent en charge des personnes adultes, y compris celles ayant la qualité de travailleur handicapé… » Les SAMSAH, associent à cette même vocation des prestations de soins. 10 Voir en annexe 21 Ces deux services interviennent sur décision de la CDAPH, « au domicile de la personne ainsi que dans tous les lieux où s’exercent ses activités …. ». Les professionnels élaborent avec les usagers « un projet individualisé de prise en charge et d’accompagnement » qui « tient compte de son projet de vie et des préconisations » de la CDAPH. Une « évaluation périodique des besoins de la personne » doit permettre de procéder « aux adaptations nécessaires ». Des prestations complémentaires peuvent être fournies par des partenaires ayant conclu une convention avec le service. En complément, le législateur recense les différentes modalités de coordination des interventions entre les services sociaux et médico-sociaux par le décret n° 2006-413 du 6 avril 2006 relatif aux différentes formes de « groupements » possibles. 1.4.3. La loi n° 2005.102 La loi du 11 février 2005 dite « pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » comporte une centaine d'articles dont un grand nombre est codifié dans la partie réglementaire de divers codes : Code de l'Action Sociale et des Familles, Code de la Santé Publique, Code du Travail... Pour la population des personnes handicapées mentales vieillissantes accompagnées par les SAVS, nous noterons plus particulièrement deux points : elle crée une nouvelle institution, la MDPH, puis elle précise les modalités de fonctionnement de la CNSA. La Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) Cette nouvelle structure, maillon important de la loi, est créée dans chaque département à compter du 1er janvier 2006. Guichet unique, elle a une mission d'accueil, d'information, d'accompagnement et de conseil auprès des personnes handicapées et de leurs familles, ainsi que de sensibilisation de tous les citoyens au handicap. Chargée d'organiser les équipes pluridisciplinaires d'évaluation, ainsi que la CDAPH, elle assure la gestion d'un fonds départemental de compensation du handicap et abrite une équipe de veille de soins infirmiers. La MDPH est sollicitée par les personnes accompagnées par les SAVS concernant leurs demandes d’accompagnement par un SAVS, de reconnaissance de leur qualité de travailleur handicapé, d’orientation professionnelle ou d’aides en lien avec leur projet de vie. Celles-ci sont examinées par la CDAPH qui prend des décisions relatives à l'ensemble des droits de la personne handicapée, sur la base de l'évaluation réalisée par l'équipe pluridisciplinaire, des souhaits exprimés par cette même personne handicapée, (ou son représentant légal) dans son projet de vie et du plan personnalisé de compensation. La compensation est désormais établie comme un droit visant à répondre, pour une personne, aux conséquences de son handicap, quels que soient l’origine et la nature de sa déficience, son âge ou son 22 mode de vie. Elle doit favoriser la pleine participation à la vie sociale et l'accès à la citoyenneté au travers du principe d'égalité des droits et des chances. Elle consiste donc à répondre aux besoins de la personne. Dans le cas des personnes handicapées vieillissantes, nous pouvons citer ceux d’aménagements du domicile ou du cadre de travail, ceux d’aides de toute nature à la personne ou aux institutions pour vivre en milieu ordinaire. Les besoins de compensation de la personne handicapée figureront dans un plan personnalisé. Les besoins sont évalués par l’équipe pluridisciplinaire, parallèlement à la demande de reconnaissance de handicap. Ils donnent droit dans son aspect individuel à l'attribution de la prestation de compensation du handicap (PCH). L'âge limite d'attribution de cette prestation est fixé à 60 ans, mais pour la population qui nous concerne, elle fait l'objet avec l'APA, d'un droit d’option. Choix rendu possible du fait du bénéfice antérieur de la prestation de compensation. Ces allocations doivent être harmonisées d'ici 2010. La loi affirme ainsi la prise en charge du droit à compensation par la solidarité nationale. Par ailleurs, les conditions d'attribution de l'AAH ne sont pas modifiées : cette allocation reste une prestation subsidiaire. Selon la situation de la personne, elle peut se cumuler avec d’autres ressources : le complément de ressources ou la majoration pour la vie autonome. La Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie (Art. L 14.10 et suivants du CASF) La Caisse Nationale de Solidarité pour l'Autonomie fut créée par la loi N° 2004 - 626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. Elle a pour mission, de "contribuer au financement de la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées dans le respect de l'égalité de traitement des personnes concernées sur l'ensemble du territoire" et d’assurer un rôle d'expertise technique, de proposition, d'appui dans les domaines de l'évaluation des besoins de compensation, et de programmation des réponses (APA, Prestation de Compensation). Le législateur a fixé les critères de répartition entre les départements des concours de la CNSA tant pour le secteur du handicap que de celui des personnes âgées. Dans chacun des cas, cette répartition tiendra compte du nombre de bénéficiaires des prestations concernées, de la population du département et de ses ressources. Nous venons de dessiner, au travers d’une brève synthèse des textes législatifs, un panorama des principales institutions et des services concernés par notre étude, dans le seul secteur du handicap. Pour parler des personnes handicapées vieillissantes, un complément s’impose par la présentation de services du milieu ordinaire puis de l’APA. 23 1.4.4. Les services d’assistance à domicile Ils font parties des services cités aux paragraphes 6 et 7 de l’article 15 de la loi 2002-2, mais les textes les encadrant se trouvent dans le Code de l’Action Sociale et des Familles (CASF). Ces services sont réglementés par le décret n°2005-1135 du 7 septembre 2005. Ils sont au nombre de trois : - les SSIAD, Services de Soins Infirmiers A Domicile qui ont une mission spécifique de soins médicaux, sur prescription. Ils relèvent du champ sanitaire. - les SAAD, Services d’Aide et d’Accompagnement à Domicile, appelés plus communément services d’aide à la personne. Leurs prestations « s’inscrivent dans un projet individualisé d’aide et d’accompagnement » et sont réalisées par « les aides à domicile » comme les auxiliaires de vie ou les aides ménagères. - les SPASSAD, Services Polyvalents d’Aide et de Soins A Domicile qui assurent des missions regroupant celles des deux services précédemment nommés. Le financement des prestations de ces services relève soit de l’assurance maladie soit de la personne ellemême. Pour faciliter leur accès par un maximum de personnes en ayant besoin, des aides ont été organisées, dont la principale est l’APA. 1.4.5. L’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA) La loi n°2001-647 du 20 juillet 2001 permet depuis le 1er janvier 2002, aux personnes âgées en perte d’autonomie de percevoir l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA). Comme nous le disions, cette aide financière permet d’avoir recours aux services compétents et nécessaires pour effectuer les actes de la vie quotidienne. Pour les personnes résidant à domicile, son octroi est soumis à une évaluation du niveau de perte d’autonomie réalisée par une équipe médico-sociale du département, au moyen de la grille AGGIR11. Cette évaluation constitue la base sur laquelle cette même équipe élabore un plan d’aide précisant les besoins de la personne et, en conséquence, le montant de l’allocation. Ce montant est fonction d’une part du groupe GIR dans lequel est classé la personne, ensuite des dépenses réellement engagées parmi celles prévues dans le plan d’aide, puis de la participation restant à charge du bénéficiaire en fonction de ses ressources. Ces différents textes constituent le cadre juridique national12 dans lequel s’inscrivent les SAVS et leurs 11 Autonomie Gérontologique, Groupe Iso Ressource 12 Il convient de noter que le règlement départemental d’aide sociale (RDAS) peut préciser les règles relatives aux établissements et services implantés dans le département, et sous la compétence du Conseil général. 24 professionnels. Il fait écho aux besoins identifiés chez les usagers. 1.5. Conclusion Les notions de handicap et de vieillesse peuvent être traitées séparément pour leur compréhension, mais la réalité du vieillissement des personnes handicapées nous contraint à réfléchir sur leur association et à la prise en charge des personnes concernées. Que les besoins des personnes handicapées mentales soient spécifiques ou convergents avec ceux des personnes âgées dépendantes, ils nécessitent un « accompagnement collectif ou un traitement de l’environnement pour compenser les effets négatifs d’un déficit de regard, de reconnaissance et de soutien qui constituent souvent des facteurs déterminants du processus d’exclusion » (rapport de l’ODAS 2003). On notera qu’une harmonisation des dispositifs de politiques publiques pour personnes handicapées et personnes âgées dépendantes est en cours, préfigurée par la CNSA qui concerne les deux publics, et prévue par la loi « handicap » de 2005. Déjà cité à plusieurs reprises, le mot accompagnement figure dans de nombreux textes concernant les personnes handicapées ou les personnes âgées. De plus il fait partie de la dénomination des services qui servent de cadre de référence à notre étude. Il nous parait donc indispensable de nous pencher sur ce qu’il recouvre. 25 CHAPITRE 2 L’ACCOMPAGNEMENT : de la théorie à la pratique Utilisé dans de nombreux champs disciplinaires tels que la santé, la formation, les transports…le mot « accompagnement » est devenu incontournable tant dans le monde du handicap que dans celui de la vieillesse ou de l’exclusion. La relation d’accompagnement est un outil fortement utilisé par le législateur : les lois du 2 janvier 2002 «rénovant l’action sociale et médico-sociale », du 4 mars 2002 « relative aux droits des malades » et du 11 février 2005 « relative aux personnes handicapées », l’ont inscrite dans le code de la santé et le code de l’action sociale et des familles. Avec Marie Odile BRUNEAU (1999) nous pouvons noter que la notion d’accompagnement se développe dans le passage d’une société traditionnelle à une société individualiste pour pallier la perte des liens communautaires et faire face à l’exclusion. Dans ce mouvement de mutation, elle se révèle être contemporaine du phénomène d’individualisation c’est à dire d’une attente plus grande concernant la singularité de la personne et le développement de son autonomie. S’y ajoute la volonté d’aider l’usager soit à accéder comme citoyen à la reconnaissance et à l’usage de ses droits soit à les maintenir. Le contexte culturel ainsi précisé nous allons nous attacher à éclaircir ce que recouvre le terme accompagner. Après une approche de la notion d’accompagnement nous présenterons quelques supports pour le professionnel et terminerons par trois des raisons pour lesquelles il est mis en place. 2.1. L’accompagnement tel qu’on le définit Nous trouvons l’idée d’un concept imprécis chez Claude MACQUET et Didier VRANCKEN (2006) qui le relient à la multiplication des catégories de personnes auxquelles il s’adresse, et des dispositifs qui l’utilisent. Pour eux, il renvoie à une conception plutôt « pragmatique » de pensée dans l’action. Cependant, les auteurs repèrent deux idées centrales qui sont, d’une part, de considérer la personne handicapée non plus comme « l’objet d’une catégorisation » mais comme « une personne » et, d’autre part, de mettre cette personne « au centre du processus ». Après avoir identifié les ressources et les compétences de la personne handicapée, l’intervenant se doit de les solliciter dans un accompagnement individualisé. Parmi ces compétences, celle d’entrer en communication est primordiale. 26 Simultanément, est constaté le passage des politiques de prise en charge du « faire à la place de » dans un « idéal adaptatif », à des politiques d’accompagnement du « faire avec » dans un « idéal actif ». Dans ces nouvelles pratiques, la personne handicapée vit investie de la responsabilité de ses choix et de ses actes. La valeur principale mise en avant est la confiance, confiance en soi, mais aussi en l’autre, car elle est partie intégrante de la relation praticien-usager. Le concept clé est le réseau qui environne la personne et que celle-ci devra pouvoir solliciter en cas de difficulté. A cet effet, il doit être réseau de liens, de compétences et de savoir-faire. Son bon fonctionnement est assujetti à la relation de confiance établie avec la personne afin qu’elle soit en mesure de s’impliquer et de créer du lien. Dans un esprit de reconnaissance réciproque cette relation permet de s’adapter au rythme et aux perspectives qui sont donnés par la personne accompagnée et d’éviter l’écueil, sous prétexte de prise en charge, de l’anéantissement de l’être social. Roland Ramzy GEADAH (2000) y ajoute l’idée de prendre soin dans une proximité-distance maîtrisée, permettant d’être touché mais non troublé. Maela PAUL (2004) nous propose dans son ouvrage une exploration sémantique de l’accompagnement. L’évolution de ce terme au fil des siècles permet à l’auteur de dégager trois grandes idées dans son emploi actuel : celle d’un ajout, puis celle d’un support, d’une protection asymétrique et enfin celle d’une dynamique et d’un déplacement en commun. L’étude étymologique du mot ajout permet de repérer deux principes simultanés : celui de réparation et celui d’alliance. Nous trouvons ainsi associées l’idée de lien à celle d’étayage et de partage. Son application nécessite donc au minimum deux personnes liées par une situation définie et temporaire, pour un cheminement partagé où chacun, d’inégale puissance, a une place spécifique. Afin de compléter la signification du nom, l’auteur nous propose de repérer les problématiques à l’œuvre dans l’action d’accompagnement. Le « déploiement du sens littéral d’accompagner » permet d’élargir le champ d’action selon trois dimensions : - relationnelle : en se joignant à la personne, à une place modulable pour l’accompagnant au fil des évènements ; c'est-à-dire qu’il peut aller avec elle de différentes manières : à côté, devant, derrière, …son rôle étant de fournir les repères et les outils. Le principe de similitude que contient cette dimension implique la primauté d’un accord, d’un « ensemble » autour de la question de l’autre dont on peut rappeler qu’il est le seul auteur. - temporelle : il s’agit d’aller au rythme de l’autre, de se synchroniser avec lui en respectant la place de chacun. L’auteur relève un principe d’altérité, générateur de symétrie/dissymétrie : il y a l’un et l’autre et les deux sont distincts. - de spatialité : car il y a une idée de changement de place : pour aller où il va. 27 Ce mouvement implique un principe dynamique de transformation et donc une modification non pas simplement de la situation de la personne accompagnée, mais surtout de son positionnement. L’étymologie du mot compagnon (partager le pain) permet d’identifier pour l’accompagnant la qualité de passeur et de celui qui partage. L’accompagnateur est celui qui aide à dépasser une étape. Quant au partage il est celui d’une « nourriture », en vue d’élever, de permettre une évolution et de favoriser la création. Dans cette situation de partage, deux existences distinctes occupent le même terrain, construisent un espace commun: il n’appartient qu’à eux et il est mitoyen. Pour une définition plus complète du mot accompagnement, il est utile de chercher ce que nous dit le verbe accompagner. Il a de nombreux synonymes. Leur étude montre que l’idée d’accompagner se trouve mise en opposition avec l’idée d’abandonner ou de délaisser. La qualité de la relation établie se trouve ainsi mise en évidence dans une symbolique positive. Une notion supplémentaire est introduite : la sollicitude, en opposition à l’indifférence. Il devient alors utile d’explorer le « champ sémantique d’accompagner ». Maela PAUL l’organise autour de trois synonymes du verbe accompagner, qui de ce fait participe de trois dynamiques différentes : - conduire : ce verbe contient lui-même trois idées : faire aller vers, avec soi, mais en étant à la tête du mouvement. Il y a influence sur l’autre et donc exercice d’un pouvoir. Dans ce cas on trouve une dynamique de progression selon une ligne de conduite. - guider : il s’agit d’éclairer pour permettre le choix d’une orientation ; nous avons une dynamique de développement. - escorter : ce verbe introduit l’idée de protection apportée à autrui, considéré par conséquent en position de faiblesse ou de difficulté. Cela implique un dynamique de construction ou de rétablissement. Ces trois « régions synonymiques » présentées dans leurs différences sont ensuite articulées entre elles par des zones de recoupement identifiées sous les termes de surveiller, veiller sur et éveiller. L’idée de veille en constituerait donc le noyau tout en étant implicite. La notion d’accompagnement se révèle donc être une notion complexe, réciproque et asymétrique, mettant en jeu des compétences et des responsabilités différentes. Pour l’accompagnateur, il s’agit toutefois de ne pas confondre les inévitables risques à envisager, car liés à la liberté de l’autre et à toute vie, avec les dangers qu’il doit identifier et éviter autant que possible. Pour ce faire, en tant que professionnel, il bénéficie d’un certain nombre d’appuis que nous allons maintenant présenter. 28 2.2. Quelques soutiens et repères de l’accompagnateur Nécessaires à tout professionnel, ils sont ce qui garantit la qualité de la relation d’accompagnement en lui permettant d’ajuster sa place. Nous allons les aborder au travers de 4 thèmes : le partenariat, différentes figures relationnelles, une éthique commune, des compétences. Cette diversité traduit des points de vue énoncés de places différentes qui se complètent dans la perspective d’une approche plus globale. 2.2.1. Le partenariat Pour Marie Odile BRUNEAU, le travail en partenariat ou en réseau est la meilleure garantie de réussite face aux risques présents dans la fonction d’accompagnateur. Cela permet d’éviter « le piège de la relation duelle qui est d’instaurer un lien de dépendance ». Le rôle de l’accompagnateur est de médiatiser les relations sociales, qui permettront à la personne accompagnée de « trouver un entourage », puis de veiller à la coordination de divers intervenants. Pour Charles GARDOU (1997), le partenariat résulte de la réunion de professionnels aux fonctions spécifiques, qui ne se superposent pas et encore moins ne se confondent, autour de la vulnérabilité des personnes qu’ils accompagnent. Son but est de privilégier une approche globale de la personne au lieu d’interventions compartimentées. Nous percevons chez ces deux auteurs les avantages que présente le partenariat tant pour le professionnel que pour l’usager. Il en est de même pour Jean Michel BELORGEY (1999) qui aborde la question du partenariat comme l’une des « figures possible de la réciprocité ». Dans un essai de définition, il apparaît que ce terme désigne celui qui joue avec, comme celui qui joue contre, à la fois le coéquipier ou l’adversaire. L’expression partenaires sociaux a d’ailleurs différentes utilisations. L’auteur en arrive à penser que ce qui fait avant tout le partenariat c’est l’accord sur la règle du jeu. Ces deux pivots orientent la façon de penser le partenariat qui signifie alors : - Tout d’abord, faire quelque chose ensemble, sur la base d’un accord minimal (les moyens) et sans nécessaire égalité des forces. Le partenariat aide chacun à se positionner et permet des approches différentes du fait des places différentes. Il implique d’accepter les différences et la concurrence, de « sortir du narcissisme et du fantasme de toute puissance », de s’ouvrir à l’autre, d’évaluer les divergences, les résistances et les opportunités. Les partenariats peuvent être multiples car construits sur la complémentarité des acteurs. - Puis, comme indiqué précédemment, établir un minimum de règle du jeu et veiller à son respect. Dès lors, qui peuvent en être le(s) auteur(s) et le(s) garant(s) : un tiers ou les joueurs eux même ? Pour Jean Michel BELORGEY les deux options peuvent être envisagées. Mais la meilleure garantie repose dans les « partenariats réglés », c’est à dire déjà éprouvés. 29 Ainsi, nous pouvons considérer que le partenariat concerne, bien sûr, les relations entre professionnels, mais peut aussi être une forme relationnelle de l’accompagnement. Cette possibilité amène l’idée que la place accordée à l’usager oriente l’accompagnateur dans sa pratique. D’autres places ou représentations de la personne accompagnée peuvent aussi lui permettre d’ajuster ses interventions. 2.2.2. Différentes figures relationnelles Laurent BARBE (2006) examine différentes facettes de la relation entre structure et personne accompagnée. Celles-ci au nombre de six peuvent se décliner comme suit : L’usager comme objet d’une intervention professionnelle. Cette figure est la plus évidente puisqu’elle s’établit entre un professionnel et une personne « en difficulté ». La professionnalité implique des connaissances et de la technicité qui fondent les compétences dans la spécialisation demandée. La relation s’appuie sur le besoin d’aide des usagers d’une part et sur les principes qui l’encadrent d’autre part. Des tensions peuvent apparaître lorsqu’il y a désaccord entre les intervenants sur la compréhension de la situation, en fonction de l’adhésion de la personne aux interventions professionnelles. Dans ce cas, il peut y avoir « danger éthique », c'est-à-dire un risque d’influence, de non respect de l’autonomie de l’usager. L’usager comme sujet de droit. Cette affirmation est désormais au cœur de nombreuses lois et règlements. Elle soumet chacun à une même règle sociale supérieure (notamment la loi 2002-2). Cette figure relationnelle protège donc de l’arbitraire. Elle donne un cadre de référence auquel il convient de s’adapter. L’usager comme sujet politique. Nous vivons en démocratie, cela implique un droit intangible pour chacun de s’exprimer et de participer à la vie collective. Cette évidence devrait irriguer les modes de fonctionnement de l’action sociale en général. Ceci passe par plus de concertation, par la mise en place d’instances de débat entre professionnels et usagers, avec une attention particulière à la manière de donner accès aux informations nécessaires. L’usager comme être social. Cette figure amène le professionnel à positionner son travail d’accompagnement en fonction des appartenances multiples, de l’identité plurielle de l’usager. Il s’agira d’accepter de jouer les rôles de passeur, de médiateur, de négociateur. Ce positionnement est pris dans un équilibre à trouver entre les informations nécessaires à l’exercice de la mission et le respect, la préservation, de l’intimité de l’usager. L’usager comme figure fraternelle du prochain. 30 Cette figure relationnelle se situe en dehors du professionnel dans le sens où elle fait référence à des valeurs ou principes supérieurs. (Droits le l’Homme, religion, désir de faire le bien de l’autre…). Dans certains cas, elle peut amener à dépasser le cadre légal, faire agir au nom d’une simple humanité. Pour autant, elle n’autorise pas à ne fonctionner qu’à la conviction. L’auteur note qu’il reste utile pour penser l’action de se référer à la distinction établie par Max WEBER entre éthique de conviction (centrée sur la validité de principe) et éthique de responsabilité (centrée sur la validité des effets). Une façon d’éviter les dérives est de faire référence, en parallèle, aux autres figures relationnelles. L’usager comme mystère. Cette dernière figure évoque la nécessité de ne pas réduire la personne accompagnée à son symptôme et à ses difficultés mais de lui laisser une part non dévoilée. Elle permet une attitude d’ouverture, d’accueil de l’imprévu, de découverte, propice à l’expression et au développement de nouvelles potentialités. Aucune de ces figures relationnelles n’est idéale pour penser la relation d’accompagnement, mais chacune est porteuse de possibles et de limites. L’intérêt se trouve dans leur confrontation et dans le repérage de leur place dans l’analyse du rapport à l’usager et de l’alliance passée avec lui. Laurent BARBE les définit comme des « éléments pour une éthique relationnelle ». Si nous définissons l’éthique comme « un questionnement sur la pratique », nous pouvons considérer qu’elle est indissociable de la pratique d’accompagnement et qu’elle l’encadre. Que peut-il en être de l’éthique en travail social ? 2.2.3. Une éthique commune Pour Jacques LADSOUS (1999), ce terme définit une « espèce d’attitude commune » dans le but d’un accord complexe. Pour ce faire, l’auteur ouvre quelques pistes : Le retour aux origines Le travail social est une mission de service public. Il nécessite de s’engager, de faire en sorte que « ceux qui sont exclus ne soient plus objets de missions mais sujets et acteurs de missions ». Ce qui est de la responsabilité des travailleurs sociaux. Cela peut prendre forme tout d’abord au travers des textes, des logiciels professionnels qui, au lieu de parler des personnes qui ont un handicap à partir de leurs déficiences ou incapacités, le feraient à partir de leurs potentialités positives. Ensuite c’est dire que l’accompagnement est avant tout un partage et un échange sans hiérarchie de rôle. 31 C’est aussi se rappeler que l’usager que nous accompagnons est une personne, un être singulier relié aux autres par un lien qui fait qu’il appartient à du social, ce qui le rend solidaire et responsable. Pour l’auteur il demeure une croyance importante, dans le fait qu’il existe dans tout homme un élan vital qui le conduit dans le sens d’un développement. Le sens de l’équipe Le social est fondamentalement un travail d’équipe. Il nécessite des compétences différentes donc des formations et des personnalités différentes. Chacun y a son rôle, sa fonction, d’importance équivalente au sein d’une organisation. Ceci n’exclut pas une hiérarchie coordinatrice mais exige en premier lieu une mise en commun entre les membres de l’équipe pour que fonctionne et s’exprime la pluridisciplinarité. Le travail en équipe est aussi ce qui permet d’appréhender l’usager dans sa globalité, dans son unité. Le travail morcelé ne permet pas à l’individu en difficulté de se retrouver. De plus, cette référence multiple garantit la réalisation du travail d’accompagnement au-delà de l’absence des « personnes » professionnelles. Les rôles peuvent être maintenus, des relais trouvés pour assurer la continuité. Nul n’est irremplaçable. La dialectique en action Il est fait référence ici à la notion antique d’agora comme espace de débat. Espace de débat comme espace de vie où il est possible d’échanger sur la perception réciproque de « qu’est ce qui est bon, qu’est ce qui est mauvais » pour chacun, dans une tentative de réelle compréhension de l’autre et de sa pensée. Le développement comme projet. Le travail social ne s’inscrit pas dans la gestion mais dans le développement ; C'est-à-dire que l’impératif premier est d’améliorer la situation des personnes et de les accompagner dans leur développement, dans leur projet de vie. Les nécessités et qualités gestionnaires viennent au second plan comme moyen au service de cette mission. Pour cette mission, bénévoles et professionnels ont leur place à condition de faire preuve de compétences ce qui « ne peut pas aller sans une certaine forme de qualification » et un « processus de formation continuée ». Ces différentes pistes développées nous permettent de comprendre comment une éthique commune donne un sens à la pratique, comment elle peut servir de guide dans la construction des interventions du travail social. Sa présence est sous jacente et constitutive de la façon dont s’établit la relation d’accompagnement avec les personnes en vue de la réalisation de leur projet. En parallèle vient d’être soulignée la question des compétences de l’accompagnateur déjà évoquée par d’autres auteurs et qui mérite d’être reprise. 32 2.2.4. Des compétences Nous disions précédemment avec Jacques LADSOUS que la pratique prolongée du travail social nécessite des compétences s’acquerrant au cours de formations et aboutissant à des qualifications. En effet, la vie a la caractéristique de toujours avancer, de se développer, de provoquer des changements…Ainsi les travailleurs sociaux sont obligés de s’adapter aux modifications du contexte et doivent donc réajuster leurs savoirs influençant leur savoir faire et leur savoir être. Nous retrouvons aussi ce besoin de compétences et de savoir énoncé par Roland Ramzy GEADAH. Il demande à l’intervenant de mettre l’usager sur le chemin d’une solution à un problème qui parait crucial. Cela implique connaissances et réflexion. Le professionnel doit aussi se remettre en cause afin de s’adapter à tout moment à la situation. Il y a donc nécessité de s’armer de méthodologie fiable et de rigueur particulière de la pensée. Pour lui, ces qualités gagnent à être doublées d’un « optimisme réaliste », c'est-à-dire d’un centrage sur les potentialités plutôt que sur les manques des personnes accompagnées, mais tempéré par les précisions du savoir acquis De même, Marie Odile BRUNEAU souligne que « la première exigence éthique de l’accompagnant c’est d’être un professionnel compétent ». Cette compétence, en intégrant travail éducatif et relation d’aide, les dépasse en les enrichissant de « la croyance dans les capacités de la personne accompagnée ». Ses compétences lui permettent de décrypter et d’évaluer les besoins et les difficultés de chaque usager afin de chercher avec lui les manières d’y répondre et les soutiens qui lui seront nécessaires. Ensuite, il doit le guider dans ses choix en lui donnant un « avis d’expert » pour l’aider à prendre conscience des exigences du réel et des limites dues à son handicap. Ceci tout en sachant la stimuler pour l’aider à activer et développer ses potentialités. Enfin, c’est à lui de coordonner le réseau mis en place et de veiller à sa cohérence. Tout cela ne va pas sans risques. Risques que sa responsabilité lui impose de mesurer et de prendre de façon éclairée car ils sont liés à la liberté de l’autre et aux incertitudes de toute vie. Dans ce cas, accompagner dans une prise de risque ne veut pas dire mettre l’autre en situation de courir des dangers. « Au bout du compte, empêcher le risque, c’est empêcher la vie. Il n’y a pas de vie sans risque, pas de liberté non plus, parce que laisser quelqu’un faire un choix, c’est prendre un risque avec lui, lui faire confiance, mais aussi lui donner le droit de se tromper et de revenir sur sa décision ».(Paulette GUINCHARD-KUNSTLER. 2006) Ces compétences présentent des exigences sur deux plans : professionnel et personnel. Le professionnalisme s’appuie essentiellement sur les qualifications, le travail d’équipe et la formation continue. Quant aux ressources personnelles elles sont propres à chacun. La nature de l’accompagnement 33 fait qu’elles sont fortement sollicitées et parfois même mises à l’épreuve. Il s’agit de trouver et de garder la place juste du « savoir être » face aux projections, manipulations et autres exercices abusifs de pouvoir. C’est la raison pour laquelle une autre exigence du travail d’accompagnement est d’accepter un travail sur soi-même. Ce dernier point est évoqué à plusieurs reprises dans certains ouvrages13 ; il nous semble inévitable de le noter, mais nous ne l’approfondirons pas dans notre réflexion actuelle. Au travers de la pensée des différents auteurs rencontrés, nous avons maintenant une idée de ce qu’est l’accompagnement et de la façon dont il existe. Sa raison d’être a été évoquée mais elle mérite que nous y revenions. 2.3. L’accompagnement : pour quoi et quels intérêts le soutiennent ? L’accompagnement tel qu’il s’est développé, répond à une demande forte et multiple. Nous aborderons ici trois thèmes qui nous semblent refléter ses principaux objectifs. 2.3.1. Un soutien à l’identité Pour Michel AUTES (2000), une priorité du travail social est « l’accueil de l’Autre », c'est-à-dire sa reconnaissance comme sujet à partir de sa demande. Toute demande est avant tout demande de reconnaissance. La réponse ne peut donc se situer que dans une relation de partage. Le grand risque avec les politiques sociales libérales serait de traiter le besoin sans entendre la demande et par là de nier le sujet. Pour Maela PAUL, le contexte actuel définit l’individu comme acteur et sujet, et donc nécessairement réfléchissant. Ainsi, les conditions d’intégration sont soumises à une nouvelle norme. La démarche d’accompagnement a pour tâche de permettre à l’usager d’accéder à une posture « réflexive et délibérante ». Avec la modernisation de la société et donc la disparition d’une référence indiscutable pour tous, le consensus devient le seul recours pour les sujets libres. Celui-ci constitue le ressort interactif de la « libre discussion ». Maintenant, un homme « parlant et agissant » (terme de Paul RICOEUR) délibère sur des choix de vie qui renvoient à un désir de conformité, avec un idéal de vie. Restreindre la délibération au choix des moyens réduit cette conformité à une normalisation, ce que rien ne justifie, et constitue une première impasse. 13 Marie Odile BRUNEAU, Roland Ramzy GEADAH ainsi que Claude MACQUET et Didier VRANCKEN dans les textes et ouvrages cités en bibliographie. 34 Une deuxième impasse consiste à « substituer à une quête de sens », une « quête des possibles » comme but à atteindre. Ces impasses ne sont-elles pas sous-jacentes à l’accompagnement, parfois contraint à devoir « bricoler » du désirable et du réalisable ? 2.3.2. La visée : l’autonomie Maela PAUL constate le développement de l’utilisation du terme d’autonomie. Cette dernière est souvent définie comme « capacité globale à subvenir à ses propres besoin, à assumer son « atomisation » (terme de CASTORIADIS). Elle devient alors synonyme d’indépendance (financière et matérielle) et renvoie à une conception instrumentale de l’homme. Son développement fait partie d’une nouvelle normalisation au sens d’une injonction collective. D’ailleurs elle est amenée à se prouver et à se vérifier. L’autonomie post-moderne nécessite d’être en capacité de décider ; ce qui, dans notre société aux repères devenus plus flous, amène un certain nombre d’individus à solliciter de l’aide. Nous pouvons le traduire par « autonomie assistée ». Mais l’autonomie peut aussi être le fruit d’une réflexion critique et faire appel dans son exercice à l’usage de la liberté. Celle-ci est liée à la liberté d’arbitrage passant par l’identification des contraintes et l’interprétation des héritages culturels. Ainsi l’accès à l’autonomie du sujet se travaillerait au travers d’un affranchissement de tout pouvoir institutionnel ainsi que d’une « activité communicationnelle » consistant à réfléchir, délibérer, imaginer à propos de l’ensemble du contexte relationnel. Se pose dès lors la question de l’ambivalence du lien. La modernité a bousculé les repères sociaux. L’éclatement de la norme en plusieurs modèles renvoie les individus à eux-mêmes en même temps qu’à l’obligation de choix. Le délitement du lien social a donc provoqué la nécessité, pour les plus fragiles, de la création de prestations d’aide sur fond de communication. L’accompagnement se comprend donc par une réflexion sur l’ambivalence du lien à la fois source d’aliénation et/ou d’autonomie. L’autonomie implique à la fois d’admettre les critères qui rendront une décision valide aux yeux de la société et d’être en capacité de les justifier. Elle est donc simultanément dépendance et non dépendance. De plus le lien d’accompagnement est ce par quoi l’accompagnateur pourra travailler l’autonomisation. Pour Alan WALKER (2003), la promotion de l’autonomie des personnes handicapées mentales passe tout d’abord par la résistance aux stéréotypes sur le handicap et l’âge. Ensuite, elle passe par une approche centrée sur la personne et ses aptitudes qui maintient des aspirations et des attentes, et non sur son 35 handicap. Pour terminer, elle passe par leur participation aux côtés de leurs aidants à l’organisation de leurs vies. 2.3.3. L’inscription dans l’espace commun Pour Roland Ramzy GEADAH, l’accompagnement ne se réalise vraiment qu’au nom d’un corps social, d’une communauté de destin. La vie s’inscrit dans « l’être ensemble », dans « l’agir sur l’ensemble » et « l’inter-réagir ». De par ses origines, l’accompagnement se voit assigner deux missions : rappeler les mécanismes de la vie active en société au demandeur d’aide et stimuler chez lui l’envie de partager l’existence de ses contemporains pour l’inscrire dans l’espace social. A partir de là pourra être travaillée la citoyenneté. Sylvie HENNION-MOREAU (2006), résumant plusieurs auteurs, souligne que les travailleurs sociaux ont une fonction « d’intermédiaire » auprès des personnes en difficultés quant à la connaissance de leurs droits et à l’exercice de ceux-ci. Différentes lois14 ont récemment réaffirmé ces droits, déjà inscrits dans des textes plus anciens15, mais demeurés éloignés du secteur sanitaire et social. Les obligations de l’accompagnateur dans ce domaine vont de pair avec l’évolution de la reconnaissance des usagers : comme citoyens à part entière et non plus comme assistés. Cette analyse nous montre que l’esprit de la Loi (des lois) est conforme aux nouveaux rapports humains établis dans notre société, entre les individus eux-mêmes, et entre les individus et leur environnement. De la même façon, l’accompagnement s’y est adapté en se centrant sur la personne, en ayant comme but la construction et le soutien de l’identité des bénéficiaires, avec une perspective d’autonomie et dans le respect de leur citoyenneté. Dans le cas des personnes vieillissantes, ce rôle suppose beaucoup de vigilance face aux modifications des capacités qui pourraient entraîner vers la considération d’une moindre autonomie des sujets. 2.4. Conclusion Notre objectif consistait à clarifier la notion d’accompagnement tant au niveau de la définition que de ce qu’elle recouvre dans la pratique. Avec l’apport des auteurs, nous pouvons conclure que l’accompagnement s’inscrit bien dans l’évolution des pratiques sociales, elles-mêmes inscrites dans une contexte sociétal et législatif donné. 14 15 Lois 2002.2 du 2 janvier 2002, 2002.303 du 4 mars 2002 et 2005.202 du 11 février 2005. Dans le Code Civil, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 36 Il contient les idées de passage, ensemble, dans le respect de la trajectoire incertaine de la personne accompagnée, à partir d’une relation duelle de qualité construite sur l’écoute et l’échange. Il nécessite, pour l’accompagnateur, un environnement ressource. Celui-ci est constitué par l’appartenance à un réseau professionnel et par des compétences acquises et actualisées, le tout englobé dans une éthique. Enfin, l’accompagnement a des visées d’autonomisation et de socialisation sur la base d’une individualisation. Cette approche nous a permis de préciser ce qui se joue à l’intérieur de l’accompagnement. Nous n’avons qu’évoqué le contexte dans lequel il se développe, les normes auxquelles il fait référence et les exigences extérieures auxquelles il est soumis. Mais nous percevons que le soutien à une évolution du sujet, auteur de lui-même, n’est pas déconnecté de ce cadre. De même, la création ou le renforcement des liens sociaux impliquent une adaptation aux normes sociales. De ce fait, l’accompagnateur peut se trouver dans la situation paradoxale d’aide à la construction d’un individu singulier et d’une normalisation dans la lutte contre l’exclusion. Ce paradoxe peut paraître inhérent à la relation d’accompagnement. Comment, dans ce cas, l’accompagnateur ajuste-t-il son intervention ? Comment le professionnel peut-il être respectueux de la personne et respecter en même temps la demande qui lui est faite au travers de sa mission ? L’analyse plus formelle des réponses mises en œuvres sur le terrain en fonction des besoins évalués va permettre de compléter notre réflexion. 37 CHAPITRE 3 DES BESOINS LIES AU VIEILLISSEMENT DES BENEFICIAIRES, DANS LES SAVS DU DOUBS ? Notre recherche bibliographique nous a permis de mieux caractériser les personnes handicapées mentales vieillissantes, et de rendre compte des multiples facettes de la notion d’accompagnement. L’affinement de la compréhension des conséquences du vieillissement des bénéficiaires des SAVS passe maintenant par une étude de terrain. Nous avons choisi de mener dans un premier temps une enquête quantitative. Notre objectif est de repérer, d’une part, si de nouveaux besoins apparaissent véritablement en lien avec le vieillissement, et, d’autre part, comment les professionnels adaptent leur pratique face à ces nouveaux besoins. Qu’entendons-nous ici par besoin ? Pour le Petit Robert le besoin est « une exigence née de la nature ou de la vie sociale » et avoir besoin de, c’est « éprouver, voir la nécessité, l’utilité de. » Dans cette étude, les besoins correspondent à deux points de vue. Tout d’abord à celui des bénéficiaires (besoins ressentis) au travers de ce qu’ils en disent, de ce qu’ils expriment comme leur étant nécessaire. Ces besoins peuvent concerner des aspects aussi différents que la santé ou les loisirs, correspondant ainsi à la définition donnée par le dictionnaire cité ci-dessus. Ensuite ils correspondent à l’évaluation que peuvent en faire les professionnels (besoins évalués). Celle-ci peut se calquer sur celle exprimée par les bénéficiaires, mais elle peut aussi la compléter. Dans les deux cas, la satisfaction des besoins tend à préserver au mieux le bien être de la personne, y compris son autonomie et son indépendance. Dans cette recherche, nous nous centrons sur les besoins des bénéficiaires des SAVS âgés de plus de 50 ans. Les besoins exprimés concernent essentiellement une aide à la gestion de leur vie quotidienne dans ses différentes dimensions : santé, logement, budget… nous pouvons les traduire en « besoins d’aides humaines ». La question de leur positionnement dans la pyramide de Maslow reste ouverte. 38 3.1. Présentation de l’enquête quantitative Notre enquête porte sur l’ensemble des SAVS pour personnes handicapées mentales du département du Doubs. Nous avons adressé notre questionnaire aux 7 services qui nous ont tous répondu. Sur les 114 usagers de plus de 49 ans déclarés, 109 fiches individuelles ont pu être enregistrées et traitées. Pour chaque service, notre questionnaire (voir en annexe) comporte deux parties : une fiche service et des fiches individuelles. La fiche service16 nous renseigne sur le service : sa date d’ouverture, la composition de son équipe de terrain, la répartition par tranches d’âge de 5 ans de la population accueillie et les mouvements éventuels (entrée, sortie) de personnes de 50 ans et plus durant les 3 dernières années. La fiche individuelle17 concerne chaque usager de 50 ans ou plus. Elle aborde, d’une part, les interventions du service à son égard, par domaine d’accompagnement, dans leur fréquence et leur évolution durant les 2 dernières années, et, d’autre part, les partenariats dans leur diversité, leurs modifications et leur coordination ou non par le service. Le traitement de ces fiches nous permet, après la présentation des services, d’analyser la nature et la fréquence des interventions effectuées auprès des usagers concernés, puis, les partenariats activés par les accompagnateurs et, enfin, de mesurer la coordination existante. Le département du Doubs regroupe 7 SAVS pour « personnes handicapées mentales », qui couvrent l’ensemble du territoire départemental depuis 1998. Cette couverture est le fruit d’une politique départementale conjuguée avec des demandes de création de SAVS de la part d’institutions. Les négociations menées aboutissent à l’ouverture de nouveaux services pour les zones de Valdahon, Morteau, Maîche et Baume-les-Dames, rattachés aux structures existant localement : publique pour le premier et privées (ADAPEI) pour les trois autres. Il n’y a pas de création dans les trois zones urbaines, mais un renforcement des services existants de Pontarlier (1977), Montbéliard (1981) et Besançon (1984). Pour ces derniers, la politique départementale a laissé la possibilité d’établir des conventions partenariales avec les institutions demandeuses de ce type de service et situées dans le périmètre d’intervention défini. Faisant suite à cette organisation, le Conseil Général a souhaité que les SAVS utilisent une trame commune pour établir leur rapport d’activité. Le travail réalisé et l’accord trouvé permettent aujourd’hui de se référer à des domaines identiques dans l’accompagnement proposé par chaque service. 16 cf fiche en annexe 17 cf fiche en annexe 39 Cette homogénéité nous a permis de construire un questionnaire compréhensible par tous les professionnels auxquels il s’adressait. Il n’était en effet pas envisageable, pour cette étape de notre travail de se rendre sur le terrain pour récolter les données. Celles-ci sont donc déclaratives et leur analyse a pu être complétée par quelques précisions demandées par téléphone. Nous avons donc tenté de collecter des informations aussi explicites que possible concernant notre problématique, sur notre unité géographique et politique. 3.2. Analyse des « fiches service » 3.2.1. L’équipe des professionnels de l’accompagnement -2- Répartition des « professionnels de terrain » des SAVS du Doubs Autres (M.E. et E.T.S.) 7% Psychologues 2% Animateurs socioculturels 8% Conseillères en économie sociale et familiale 19% Educateurs spécialisés 58% Assistants de services sociaux 6% Ce graphique nous montre une présence majoritaire de professionnels ayant une formation « d’éducateur spécialisé ». En effet, les équipes ont souvent été composées sur la base de services éducatifs, proches de celles des institutions du monde du handicap (19 ETP) : éducateurs spécialisés, éducateur technique spécialisé, moniteur éducateur et psychologue) dont elles font partie. Puis elles se sont ouvertes aux autres professions du social, que l’on rencontre davantage dans les services sociaux de secteur ou dans l’action sociale de façon plus globale (9,5 ETP : conseillères en économie sociale et familiale, assistants de service social et animateurs socioculturel). Cette pluridisciplinarité permet une diversification des approches ainsi 40 que des apports réciproques de connaissances et de savoir-faire, propices à une adaptation élargie aux différentes situations d’accompagnement. De plus, elle facilite la création des partenariats. -3- Composition des équipes par SAVS 100% 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% MD P MU ME V BD Educateurs spécialisés Assistants de services sociaux Conseillères en économie sociale et familiale Animateurs socio-culturels Psychologues Autres (M.E. et E.T.S.) B (Chaque équipe=1) Les équipes les plus diversifiées sont aussi celles des équipes les plus nombreuses : Montbéliard (MD), Pontarlier (P) et Besançon (B). 3.2.2. Le nombre d’accompagnement par équivalent temps plein (ETP) De façon globale ce chiffre est établi par le département selon deux modèles : - environ 25 pour les services les plus anciens, qui se sont progressivement développés et qui se situent en zone urbaine ou l’autonomie est facilitée par l’accès aux moyens de transport, aux services … - environ 15 pour les services crées en 1998, plus jeunes, plus petits et situés en zone rurale ce qui amène davantage de déplacements plus lointains. 41 3.2.3. La population accueillie par les services d’accompagnement Analyse par service : -4- Tableau récapitulatif du nombre d’usagers accueillis par les SAVS du Doubs HOMMES MD P MU ME FEMMES V Moins de 25 ans 39 1 1 1 1 De 25 à 29 ans 22 4 1 3 2 De 30 à 34 ans 23 1 1 2 De 35 à 39 ans 24 7 2 De 40 à 44 ans 25 7 De 45 à 49 ans 16 De 50 à 54 ans BD B MD P MU ME TOTAL V BD B MD P MU ME V BD B 18 61 17 1 0 3 2 13 36 56 2 1 1 4 2 31 97 3 12 47 17 3 2 4 2 13 41 39 7 1 5 6 5 25 88 1 0 19 47 15 4 1 0 2 0 9 31 38 5 2 2 3 0 28 78 1 3 2 8 47 16 0 1 1 2 1 8 29 40 7 3 2 5 3 16 76 0 1 6 3 4 46 9 6 2 0 1 2 4 24 34 13 2 1 7 5 8 70 10 0 2 2 10 40 15 5 4 3 2 3 32 31 15 4 5 4 0 13 72 16 6 1 4 1 9 37 12 4 3 2 1 3 25 28 10 4 6 2 0 12 62 De 55 à 59 ans 5 6 3 1 2 3 20 8 2 1 2 0 2 15 13 8 4 3 2 0 5 35 De 60 à 64 ans 1 1 2 0 2 1 7 3 1 1 1 6 1 4 2 1 3 0 2 13 1 1 2 1 1 1 1 4 0 1 1 2 1 0 1 6 Plus de 64 ans Total 171 43 12 16 20 8 84 354 109 29 12 12 17 7 57 243 280 72 24 28 37 15 141 597 % plus 49 ans 13% 30% 58% 38% 25% 0% 15% 19% 18% 34% 33% 50% 18% 0% 12% 21% 15% 32% 46% 43% 22% 0% 14% 19% En grisé, population sur laquelle porte l’enquête par fiches individuelles (chapitre suivant) Nous constatons une forte hétérogénéité dans la répartition par âge de la population des différents SAVS. Les personnes de 50 ans et plus représentent une proportion qui varie entre 0% et 48% de la population globale du service pour une moyenne de 19% sur l’ensemble des services. Pour les deux services dont le pourcentage est le plus élevé (Morteau et Maîche), nous avons calculé que l’âge moyen à l’entrée au service des personnes actuellement âgées de plus de 49 ans est respectivement de 52 et 53 ans. Il s’avère que ces personnes furent prioritaires à l’ouverture en 1998. Les sorties étaient attendues par les foyers, et des familles étaient demandeuses d’un soutien en relais des parents. Un troisième service créé en 1998 (Valdahon), donne une moyenne d’âge à l’entrée de la population étudiée qui est équivalente, mais dans ce cas, ces personnes ne représentent que 0,2.% de l’effectif total. Le quatrième service créé en 1998 (Baume les Dames) reçoit des personnes qui ont toutes moins de 45 ans. Pour les trois services les plus anciens, nous obtenons une moyenne d’âge à l’entrée, pour les personnes de 50 ans et plus, comprise entre 30 et 40 ans. Effectivement peu de personnes arrivent à plus de 50 ans : 14 dans les 10 dernières années pour les 3 services confondus. 42 Analyse globale -5- Population globale accueillie par les SAVS du Doubs en 2006 70 60 50 40 30 20 10 0 M ns oi de 25 s an De 25 à 29 s an De 30 à 34 s an De 35 à 39 s an De 40 à 44 s an De 45 à 49 s an De FEMMES 50 à 54 s an De 55 à 59 s an De à 60 64 s an us Pl de 65 s an HOMMES Nous observons que l’ensemble des services reçoit une majorité d’hommes : 59% sur le total de la population. La comparaison de ce graphique avec celui présenté au premier chapitre sur la population française, met en évidence une sur-représentation des hommes ainsi qu’un déficit dans les tranches d’âges des plus de 60 ans. Cette dernière apparaît très clairement dans le schéma suivant. -6- Population des SAVS : pourcentage des usagers de 50 à 59 ans et de 60 ans et plus De 50 à 59 ans 16% 60 ans et plus 3% Moins de 50 ans 81% 43 L’écart existant se réduira dans les années à venir. L’analyse par tranches d’âge montre un effectif faible de personnes de plus de 60 ans (3%), mais il s’intensifie rapidement dans les tranches précédentes. En effet les personnes de 50 ans et plus représentent 18% de la population globale accueillie ; si nous y ajoutons progressivement les tranches précédentes, nous obtenons 31% de personnes ayant 45 ans et plus, et 43% de personnes de plus de 39 ans. Ces chiffres confirment ceux du « rapport de Monsieur Paul BLANC » (2006) sur l’évolution de la structure par âge des établissements pour personnes handicapées constatant qu’en moins de 20 ans, l’âge médian y a augmenté d’une dizaine d’année et qu’un quart des personnes avait en 2001 plus de 43 à 48 ans selon les structures. Cette observation pose une question d’ordre quantitatif quant à la capacité d’accueil des établissements et services puis d’ordre qualitatif quant à la prise en charge des conséquences du vieillissement. Parmi ces conséquences nous pouvons tout d’abord noter la situation professionnelle, représentée dans le graphique ci-dessous. -7- Situation professionnelle des personnes de 50 ans et plus accueillies dans les SAVS du Doubs Tem ps partiel 9% Retraite 26% Tem ps plein 52% Sans em ploi 13% Dans la population que nous étudions, les 18 personnes de plus de 59 ans sont en retraite ainsi que 11 autres ayant entre 56 et 59 ans. Nous constatons aussi que 10 personnes de moins de 60 ans sont à temps partiel, dont 8 entre 50 et 55 ans. Par ailleurs 13 personnes sont déclarées sans emploi, mais nous n’avons pas d’indication sur les motifs. L’analyse fait apparaître une majorité de femmes parmi les travailleurs à temps partiels (6 pour 10) ainsi que chez les retraités de moins de 60 ans (7 pour 11). Par contre les personnes sans emploi sont majoritairement des hommes (9 pour 13). 44 3.2.4. Entrées et sorties en 2004, 2005 et 2006 Au cours des 3 dernières années, nous comptons 4 entrées et 4 sorties qui ont concerné 7 personnes. Les entrées se font généralement avant l’âge de 50 ans, et peu de personnes sont réorientées après cet âge. La plus grande longévité explique le peu de décès, aucun durant cette période. Le vieillissement de la population fait donc bien partie de la réalité des SAVS. Nous allons maintenant nous pencher sur l’étude de l’accompagnement qui est mis en œuvre par les professionnels pour les usagers des tranches d’âge que nous avons définies. 3.3. Analyse des « fiches individuelles » Rappelons que ce travail se base sur les 109 fiches enregistrées, concernant les usagers ayant 50 ans et plus, et accompagnés par les 7 SAVS du Doubs. Nous allons tout d’abord présenter, par domaine d’accompagnement, la fréquence des interventions et leur évolution sur les deux dernières années que nous complèterons par l’étude des partenariats et la présentation des besoins de coordination. Notons que pour apporter plus de précision à l’enquête, nous avons créé un domaine d’accompagnement que nous avons intitulé « vie sociale post-professionnelle ». Nous voulions tenter d’identifier s’il existe des besoins spécifiques liés à la retraite. La forme questionnaire ne semble pas avoir convenu pour une bonne prise en compte de cet ajout. 3.3.1. Fréquence et évolution des interventions par domaine d’accompagnement pour les personnes de 50 ans et plus en 2005 et 2006 Nous avons essayé de rassembler des informations sur le contenu des accompagnements et sur son évolution au cours des deux dernières années. Celle-ci nous parait pouvoir être mise en lien avec le phénomène de vieillissement. Nos observations porteront donc plus particulièrement sur les domaines où les interventions sont signalées comme étant en hausse. 45 -8- Fréquence et évolution de l’accompagnement par domaine d’intervention Evolution sur les deux Fréquence de l'intervention Plusieurs Une fois dernières années Une fois Une fois par par par fois par Quotidien semaine semaine quinzaine mois Autre Stable 1 8 41 26 21 6 63 5 35 0 2 9 7 32 46 52 8 36 Logement 2 1 9 14 27 19 48 3 21 66% Administratif 0 2 13 15 45 15 74 3 13 83% Gestion du budget 0 1 7 13 43 16 67 3 10 73% Transports 0 0 2 4 9 32 42 1 4 43% Loisirs et vacances 0 1 2 4 21 52 56 2 22 73% Emploi 1 0 4 9 16 31 34 1 26 56% 1 0 2 3 7 8 7 0 14 Vie quotidienne Santé et suivi médical Vie sociale postprofessionnelle En En baisse hausse % personnes concernées 94% 88% 19% Il apparaît d’emblée que les professionnels interviennent pour presque tous les usagers (103) dans le domaine de la vie quotidienne, et ce, de façon amplifiée ces deux dernières années pour le tiers d’entre eux. Le même nombre de personnes bénéficie d’un accroissement des interventions dans le domaine de la santé et du suivi médical qui, lui, concerne 96 personnes. Une différence entre ces deux domaines d’accompagnement apparaît dans le rythme. Pour la vie quotidienne il est donné comme très régulier et majoritairement hebdomadaire. De ce fait près de la moitié des usagers (50) bénéficient d’une intervention au moins une fois par semaine. Dans le domaine de la santé et du suivi médical, les interventions sont également régulières pour près de la moitié des personnes, mais majoritairement de façon mensuelle. Pour les autres, nous pouvons penser qu’elles sont plus épisodiques. En effet, en fonction de l’autonomie des personnes ou des autres soutiens dont elles bénéficient, les actions consistent en des entretiens d’informations ou de conseils, en des prises de rendez-vous, des bilans périodiques avec les médecins ou en accompagnements plus ou moins fréquents chez les praticiens. Ces deux dernières actions permettent d’assurer la compréhension des explications médicales, le suivi des démarches et traitements ainsi que la transmission des informations nécessaires aux partenaires concernés. Nous noterons également une hausse des interventions dans le domaine de l’emploi pour près du quart de la population globale, mais plus du tiers de la population active (67 personnes). 46 Des tris ont été réalisés à partir de ces données. Nous avons choisi de nous intéresser aux trois domaines pour lesquels la hausse du nombre d’interventions apparaît le plus fort : la vie quotidienne, la santé et l’emploi ; nous y ajoutons le logement, étroitement lié à la vie quotidienne. Nous obtenons alors 66 personnes concernées par une hausse dans au moins un des domaines d’accompagnement sélectionnés. Le tri à partir du domaine de la santé, montre une hausse simultanée dans les autres domaines pour : - 18 personnes dans le domaine de la vie quotidienne (51%) - 13 personnes dans le domaine de l’emploi (50%) - 14 personnes dans le domaine du logement (66%) Une hausse du nombre d’interventions dans le domaine de la santé correspond donc pour la moitié au moins des personnes concernées à une hausse dans les trois autres domaines. Cet élément semble révélateur d’un accroissement des besoins d’accompagnement. Les autres tris réalisés ne permettent pas d’établir de corrélation entre une hausse dans ces quatre domaines et l’âge, la situation professionnelle ou le sexe. Ils ne font que mettre en correspondance, logiquement, un renforcement ou une création de partenariat dans le même domaine d’accompagnement, ce que nous allons voir au paragraphe suivant. En effet, les chiffres que nous venons de donner traduisent l’activité globale évaluée par les accompagnateurs. Celle-ci peut avoir lieu en relation simple avec les usagers, mais aussi dans le cadre d’un partenariat avec d’autres intervenants, extérieurs aux SAVS. A ce titre, l’étude des partenariats existants, renforcés ou créés nous a semblée susceptible de donner des indications complémentaires sur l’existence de besoins spécifiques ou non des personnes handicapées mentales vieillissantes. 3.3.2. L’existence, le renforcement ou la création des différents partenariats en 2005 et 2006 La présentation du questionnaire à ce sujet a permis que des partenaires soient cités dans différents domaines, sans restriction. Ainsi certains partenariats apparaissent d’emblée très centrés dans leur domaine, alors que d’autres sont cités dans plusieurs domaines et méritent d’être regroupés. Nous les avons donc étudiés tout d’abord par domaine pour conclure par une analyse plus globale. Pour la construction des graphiques, nous n’avons retenu que les partenaires cités plus de 5 fois, afin d’obtenir une représentation minimale de 5%. Trois graphiques illustrent ce paragraphe, les autres sont donnés en annexe. 47 -9- Le partenariat dans le domaine de la santé 0,800 0,700 0,600 0,500 0,400 0,300 0,200 0,100 0,000 m Fa il l e é G l ra né te is Sp ia éc te li s P i ch sy re at Se Existant Renforcé e ic rv de in so s Em o pl u ye r Créé (Population totale=1) Les données les plus significatives de l’importance du partenariat apparaissent d’emblée et très clairement dans le domaine de la santé, pour le médecin généraliste et les spécialistes. En effet le partenariat existe déjà pour de nombreux usagers, de plus il est noté comme renforcé pour 12 d’entre eux, avec le médecin généraliste et pour 11 avec les médecins spécialistes. Il est créé pour 10 personnes avec les différents intervenants médicaux. -10- Le partenariat dans le domaine - 11- Le partenariat dans le domaine du budget administratif 0,400 0,700 0,350 0,600 0,300 0,500 0,250 0,400 0,200 0,300 0,150 0,100 0,200 0,050 0,100 0,000 es Fa qu m i ll e Ba n u te ra Cu Cu r at eu ro u Fa m il l tu te u r e 0,000 Existant Renforcé Existant Créé rs ou u te tu Se r es ic rv Renforcé ad m i s tif ra st i n créé ( Population totale =1) Considéré en fonction du nombre d’usagers concernés, le partenariat avec les curateurs apparaît en 48 deuxième position, dans le domaine du budget. Mais nous devons noter aussi son importance dans le domaine administratif. C’est un partenariat très majoritairement stable et préexistant dans ces tranches d’âge. Dans le domaine de l’emploi, le partenariat concerne moins d’usagers que dans les domaines précédents ; mais sachant que 29 d’entre eux sont en retraite et 13 sans emploi, la proportion des travailleurs concernés par des relations avec l’employeur est importante (près de 80%). Il est aussi noté un renforcement pour 14 personnes. Dans le domaine du logement, il s’effectue principalement avec les bailleurs, mais en lien étroit avec les curateurs pour les personnes sous protection juridique. Nous notons l’intervention de services pour l’aménagement du logement. Des informations complémentaires seraient nécessaires pour en comprendre les raisons. Le partenariat dans le domaine des loisirs et vacances est souhaité par beaucoup d’usagers qui ont besoin d’interlocuteurs avertis pour les aider à organiser leur temps libre et bénéficier d’activités de loisirs adaptées. Il existe pour environ la moitié d’entre eux et a été créé pour 10 autres personnes. Les intervenants dans ce domaine se voient particulièrement sollicités par et pour les personnes en baisse d’activité professionnelle. Dans le domaine de la vie quotidienne, nous notons que les aides ménagères et auxiliaires de vie interviennent auprès de 31 personnes (dont 5 répertoriées dans le domaine du logement) dont 6 pour lesquelles l’intervention est renforcée depuis 2 ans et 12 pour lesquelles elle a été créée. Des difficultés liées à la santé et à l’âge peuvent être évoquées. C’est dans ce domaine que nous constatons la présence la plus importante de la famille, mais celle-ci intervient dans les 7 domaines, notamment aussi dans celui des loisirs et du logement. Il s’agit là essentiellement d’un partenariat existant. De façon globale, tous domaines confondus, nous notons un renforcement du partenariat pour 36 usagers (33%), selon une fourchette de 1 à 7 partenaires par personne. Les diverses moyennes (d’interventions renforcées) effectuées sur l’ensemble de la population et par tranches d’âge ne montrent pas d’évolution spécifique à l’une d’elles. Par contre calculées sur le nombre des personnes concernées dans chacune d’elles, nous obtenons un renforcement des actions partenariales un peu plus important dans la tranche 5054 ans : 3,0 par personne, puis 2 à 2,5 dans les tranches suivantes. La création d’un partenariat intervient quant à elle pour 37 usagers (34%), dont 15 déjà concernés par un renforcement. La moyenne (d’interventions créées par personne concernée) la plus élevée est observée pour les 2 personnes de plus de 64 ans (3,5), sinon elle est de 1,5 dans les tranches 55-59 ans et 60-64 ans puis de 1,9 dans la tranche 50-54 ans. 49 Les institutions pour personnes âgées apparaissent dans des relations créées, pour 5 personnes. Elles sont un interlocuteur assez récent, mais ce sujet ne peut pas à ce stade de notre enquête être davantage approfondi. Nos différents tableaux montrent des partenariats nombreux dans les domaines d’intervention les plus denses. Ils confirment l’hétérogénéité des situations en mettant en évidence des différences notables entre les usagers, quelle que soit la tranche d’âge à laquelle ils appartiennent. Toutefois, sachant que l’effectif de chacune d’elle décroît lorsque l’âge progresse, nous avons calculé, pour chaque tranche, la proportion de personnes concernées par un renforcement ou une création de partenariat. Les courbes suivantes en sont l’illustration. -12- Pourcentage par tranches d’âge des partenariats renforcés, créés, renforcés et créés 0,45 0,40 0,35 0,30 0,25 0,20 0,15 0,10 0,05 0,00 50/54 55/59 60/64 Renforcé Créé 65 et plus R+C (Part dans la tranche d’âge) Ce schéma met en exergue les personnes pour qui il y a eu un alourdissement de l’accompagnement, soit par renforcement des interventions partenariales (en bleu) soit par création (en rouge), sachant qu’il y a cumul des deux pour une partie d’entre elles (jaune). Nous constatons un accroissement lié à l’âge, jusqu’à 64 ans. L’analyse précédente pourrait nous inciter à penser qu’alors un certain nombre de partenariats nécessaires sont en place. Pour autant, étant donnée la taille de notre échantillon, cette observation nécessiterait d’être approfondie. Cette étude nous montre aussi que le volet du partenariat est une donnée incontournable de l’accompagnement en SAVS. Consécutivement elle nous a amené à soulever la question de la coordination. 50 3.3.3. La coordination Dans cette partie, le questionnaire avait pour but principal de quantifier le nombre d’usagers pour qui une coordination était nécessaire soit entre lui-même et un partenaire, soit entre différents partenaires intervenant autour d’une même situation. Une réponse complémentaire nous permet d’identifier d’éventuels autres coordinateurs. -13- Les différents types de coordination 58% 5% 16% 21% Usagers - Partenaires Sans coordination Partenaires - Partenaires Usagers - Partenaires - Partenaires Nous avons obtenu : - 17 usagers (16 %) pour qui une coordination n’est pas nécessaire (dont 6 dans un même service). - 90 usagers (84 %) pour qui une coordination est nécessaire, dont : *22 entre l’usager et les partenaires *5 entre les partenaires uniquement *63 entre l’usager et les partenaires ainsi qu’entre les partenaires. Pour ceux-ci sont aussi donnés comme coordinateurs possibles, 5 fois le curateur, 2 fois l’employeur et 1 fois la famille. Concernant les personnes handicapées mentales vieillissantes, nous constatons que la coordination fait partie des besoins repérés, dans une majorité des accompagnements. La densité de cette mission étant directement liée au nombre d’intervenants et au rythme de leurs interventions, il nous parait judicieux d’analyser, d’interroger et d’essayer de comprendre la part prise par cette mission dans la pratique des professionnels, notamment pour les situations dont nous venons de mettre en évidence l’évolution. 51 3.4. Conclusion et hypothèse La faible représentativité de notre échantillon et l’absence de comparaison avec un groupe témoin d’usagers de moins de 50 ans rendent nos résultats incomplets. Néanmoins, nous pouvons en tirer quelques conclusions indicatives : Cette enquête quantitative nous montre, dans les SAVS enquêtés, une augmentation en cours de la population des tranches d’âges au-dessus de 50 ans. Pour les usagers actuellement âgés de 50 ans et plus, nous remarquons: - Une densification de l’accompagnement pour environ un tiers d’entre eux, notamment dans les domaines de la santé, de la vie quotidienne et de l’emploi. - Une hausse simultanée de l’accompagnement dans le domaine de la santé et dans d’autres domaines. - le renforcement ou la création de partenariats, en particulier avec les professionnels du secteur médical, mais aussi avec les employeurs et les aides ménagères. - Une coordination avec les partenaires pour la majorité des usagers. Son intensité n’a pas été mesurée, mais nous pouvons avancer l’hypothèse qu’elle est en lien avec l’évolution du recours au partenariat. Notre enquête, en rassemblant des informations sur l’ensemble du département, nous donne quelques éléments de réponse de manière quantitative. Il est effectif que de nouveaux besoins apparaissent avec le vieillissement des personnes handicapées mentales. Nous les avons repérés au travers de l’intensification de l’accompagnement pour une partie d’entre eux. Nous avons identifié les domaines à l’intérieur desquels ils nécessitent un accroissement des interventions (santé, vie quotidienne…) et des partenariats (santé, emploi….). On peut, à partir des recherches présentées dans cet écrit et des éléments de l’enquête quantitative, formuler l’hypothèse suivante : Les besoins des personnes handicapées mentales de plus de 50 ans suivies par les SAVS ne nécessitent pas simplement un surcroît d’heures d’accompagnement mais une forme d’accompagnement spécifique obligeant les professionnels de SAVS à repenser leur pratique, à acquérir de nouveaux savoirs, et à renforcer leur partenariat avec, notamment, le secteur sanitaire et, probablement, aussi avec le secteur gérontologique. Une enquête qualitative par entretiens va nous permettre d’étayer cette hypothèse. 52 Deuxième partie 53 CHAPITRE 1 METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE ET DEROULEMENT DES ENTRETIENS 1.1. Objectif de l’enquête L’enquête quantitative m’a permis de repérer des modifications dans l’accompagnement, par les SAVS, des personnes handicapées mentales de plus de 50 ans. Tout d’abord, il se densifie, notamment en lien avec la question de la santé. Puis, il nécessite le renforcement ou la création de partenariats ainsi que la coordination entre ces partenaires. Cette étude a validé les observations éparses faites par les professionnels de terrain et a précisé leurs contours. La recherche par questionnaire m’a donné des résultats pour l’ensemble de la population concernée dans le département du Doubs. Cette échelle présente une unité pour la lecture sociopolitique et une diversité géographique, du fait qu’elle couvre des zones tant urbaines que rurales. Cette méthode m’a permis, en toute logique, d’obtenir des réponses aux questions que je me posais. Toutefois elle ne m’a pas renseignée précisément sur la teneur de l’évolution des besoins des usagers de cette tranche d’âge. Je n’ai eu d’indications ni, sur les souhaits ou les (non)projets de ces personnes pour les périodes de fin d’activité professionnelle et de retraite, ni, sur leurs attentes en matière d’accompagnement. De même, du point de vue des services, je n’ai pas pu discerner les points sur lesquels avait porté l’adaptation aux nouveaux besoins ou ceux sur lesquels elle serait souhaitée. L’objectif de ma recherche qualitative était donc d’affiner mes résultats, de trouver des éléments de compréhension qui en donnent le sens, et de repérer quelques orientations prises par les SAVS dans leur accompagnement des personnes handicapées mentales vieillissantes, puis de dégager les nouveaux besoins liés à ces adaptations nécessaires. 1.2. Choix de la méthode Les résultats attendus concernaient les besoins liés au vieillissement des usagers des SAVS à deux niveaux : celui des personnes elles-mêmes et celui de l’accompagnement du fait de la nécessité d’adaptation. Nous allions avoir besoin d’informations émanant à la fois des bénéficiaires et des professionnels. En même temps, sachant que la caractéristique principale de la population concernée est 54 la déficience intellectuelle, une inquiétude portait sur la fiabilité des informations recueillies auprès d’elles, dans le temps et sur leur contextualisation. Un complément d’information devait donc être recherché auprès des professionnels. Il devenait incontournable de nous adresser à des personnes appartenant à chacune des deux catégories. En fonction de la population concernée, et notamment de ses difficultés face à la lecture et à l’écriture, j’ai éliminé la possibilité d’une investigation par questionnaire écrit et j’ai choisi de procéder à une enquête par entretiens individuels. Je souhaitais bien sûr vérifier les résultats de l’enquête quantitative, mais il s’agissait également d’établir un climat de confiance pour permettre une expression suffisamment libre sur les thèmes sélectionnés et pour que surgisse éventuellement de l’imprévu. Une trame me permettrait de collecter les réponses aux questions que je me posais, sans diriger de façon trop contraignante le discours des personnes. Celles-ci ne devaient pas se sentir prisonnières d’un question-réponse, mais avoir la possibilité d’être écoutées dans leur logique de pensée et de discours. Ainsi l’ordre dans lequel les thèmes allaient être abordés serait à la convenance de mes interlocuteurs. Du fait de ma pratique professionnelle, cet élément me paraissait nécessaire pour faciliter l’expression, voire éviter d’éventuels blocages. J’ai donc choisi de procéder par entretiens semi directifs. Cette démarche qui « soumet le questionnement à la rencontre, au lieu de le fixer d’avance» (Alain BLANCHET et Anne GOTMAN 1992) répond à ces exigences. Allions-nous les recevoir ensemble ou séparément ? En fonction du cadre que je me suis fixé pour ces entretiens, ceux-ci ne pouvaient être qu’individuels; nous avons donc choisi de procéder à une série d’entretiens parallèles. Cette méthode permet de garantir la confidentialité à chaque interlocuteur. 1.3. Choix des interlocuteurs J’ai déterminé des critères de sélection des personnes que j’allais rencontrer, afin que celles-ci soient représentatives de la diversité de la population concernée : - mixité hommes-femmes - travailleurs et personnes en retraite - éventail entre « 50 ans » et « plus de 64 ans » - répartition entre milieu urbain et milieu rural Très rapidement il fut évident que pour garantir la confidentialité et éviter les interférences entre ma fonction d’enquêtrice et mon statut d’accompagnatrice, mon enquête ne pouvait pas être menée sur le lieu 55 de ma pratique professionnelle. Puis en fonction de la dispersion géographique et de la proportion des bénéficiaires des zones urbaines et rurales, j’ai décidé de m’adresser à deux services en milieu urbain ainsi qu’à un service en milieu rural. Chaque responsable de ces trois services a été le destinataire d’un courrier18 explicatif de ma demande puis, à la suite d’une rencontre présentant ma démarche, a servi d’intermédiaire auprès de ses usagers et de leurs accompagnateurs pour obtenir des accords d’entretiens. Ma demande était que les usagers pressentis par les équipes soient représentatifs, par leur situation, des questions qui se posent à elles concernant notre problématique. Les rencontres pouvaient avoir lieu, soit au SAVS, soit à domicile, selon le choix des personnes rencontrées. 1.4. Le guide d’entretien19 Il était, dans sa trame, commun à tous les enquêtés mais il n’a pas été utilisé de la même manière avec les usagers qu’avec les professionnels. En effet, avec les bénéficiaires, il a été un support discret à l’entretien. Par contre en direction des accompagnateurs, il fut enrichi de questions précises et renommé « étude de situation »20. Il fut envoyé au responsable de chaque service qui en a assuré la transmission. Ainsi ces entretiens furent plus structurés et ont répondu plus systématiquement à tous les items. Ce guide a été construit à partir des domaines d’accompagnement utilisés dans l’enquête quantitative, qui servent de références au niveau départemental pour les sept SAVS accompagnant des personnes handicapées mentales. Puis, avec l’éclairage de la CIF (Classification Internationale du Fonctionnement), nous l’avons enrichi de données contextuelles. Rappelons que cette classification adopte une approche situationnelle du handicap ; celui-ci résultant d’une interaction entre des facteurs personnels et des facteurs environnementaux. Cette appréhension demande d’avoir une perception globale de la situation des bénéficiaires afin de décrypter les mécanismes qui la constituent. Elle propose une analyse construite de façon élargie, prenant en compte le temps (l’histoire de la personne) et l’espace (son réseau relationnel et celui des professionnels). Ainsi j’ai défini sept grands thèmes qui permettent d’identifier la personne, ses conditions de vie personnelle, professionnelle, le contexte environnemental au sein duquel elle vit, puis si ces données ont évolué au cours des dernières années, de quelle façon, pour terminer avec les perspectives d’avenir. Ce guide d’entretien permet de considérer la personne dans une trajectoire et prend en compte le caractère évolutif de sa situation. Le double entretien étend la collecte des données, du fait des positions 18 En annexe 19 En annexe 20 En annexe 56 complémentaires des interlocuteurs. Il permet d’avoir des regards différents sur les faits. 1.5. Déroulement des entretiens Les trois services contactés ont répondu favorablement à ma demande. Pour deux services la présentation de ma recherche a eu lieu avec le chef de service, pour le troisième elle s’est faite en présence de l’équipe. Chaque responsable m’a confirmé que le choix des usagers susceptibles d’être interrogés s’est fait en fonction de leur représentativité des questions soulevées autour du thème du vieillissement. Toutefois une légère sélection s’est faite autour de la capacité à fournir un discours audible. J’ai mené 13 entretiens avec des usagers et le même nombre avec leurs accompagnateurs. La population des usagers interrogée se répartit ainsi : - 5 femmes et 8 hommes - 6 personnes retraitées, 6 personnes en activité professionnelle (plus de 50 ans) et 1 personne en invalidité complète - 5 travailleurs à plein temps et un à mi-temps Mon identité et les objectifs de mon enquête ont été énoncés avec quelques nuances selon qu’ils s’adressaient aux usagers ou aux accompagnateurs : - pour les accompagnateurs, cette enquête faisant suite à celle de l’an dernier. Les professionnels avaient déjà connaissance de ma démarche. Les entretiens se sont, de fait, inscrits dans des relations entre collègues, tout en sauvegardant l’aspect de la recherche par le respect de la confidentialité et le centrage sur la situation concernée, à partir du guide transmis. - Pour les usagers, j’étais une inconnue. Face à eux, je me suis présentée comme suivant une formation dans une autre région, en omettant d’indiquer ma profession. Ceci afin d’éviter au mieux les interférences avec ma fonction d’accompagnatrice dans un autre SAVS, et de me protéger autant que possible de réflexes de reproduction d’un entretien de type professionnel. L’enquête fût présentée comme outil servant exclusivement à la réalisation d’un document de recherche sur la façon dont s’organise la vie pour les personnes de plus de 50 ans, accompagnées par un SAVS ainsi que sur leurs projets d’avenir. Pour chaque entretien après avoir recueilli la confirmation de l’assentiment de l’enquêté, je redéfinissais les conditions de l’entretien et de son utilisation. Je garantissais à chaque personne l’anonymat, je lui demandais confirmation de son accord pour l’enregistrement, puis je fixais la 57 durée de l’entretien à environ une heure, modulable par l’intéressé. La garantie de confidentialité établie à ce moment ne m’a pas autorisée à transcrire un entretien en annexe. Les professionnels auraient été à même de reconnaître le bénéficiaire concerné. Les entretiens avec les bénéficiaires et ceux avec les professionnels se sont alternés en fonction des disponibilités de chacun, sans priorité des uns par rapport aux autres. 1.5.1. Les entretiens avec les usagers Suite à la possibilité de choix du lieu de la rencontre, deux personnes ont souhaité me recevoir à leur domicile. Ma présentation faite, la personne était amenée à s’exprimer sur l’organisation de sa vie actuelle, puis en fonction des informations, j’élargissais le discours sur le passé et l’avenir. Le choix des questions posées et des relances se faisait en référence à la grille d’entretien Parfois le début d’entretien fut hésitant ; pour certaines personnes l’entrée en matière a nécessité quelques questions précises, donnant un cadre peut-être plus rassurant. Puis le discours se faisait plus fluide. La difficulté a consisté à me maintenir dans mon rôle d’enquêteuse et de ne pas dévier dans celui de professionnelle de l’accompagnement. M’appuyant sur la méthode choisie, des entretiens semi-directifs, et sur mon expérience professionnelle, j’ai privilégié un déroulement d’entretien qui utilise la progression de la personne dans son discours ; toute interruption pouvant rompre la fluidité de l’échange et l’accès au mode de pensée de mon interlocuteur. Si la plupart du temps les relances ont permis d’obtenir des réponses à mes questions, il est arrivé que je me trouve face à un défaut de mémorisation ou d’évaluation ou alors face à ce que j’appellerai soit des impossibilités de verbalisation soit des stratégies d’évitement. Le complément d’entretien auprès des professionnels confirmait alors son utilité dans la perspective de l’analyse. Concernant l’utilisation du guide, j’ai été amenée après quelques entretiens à accentuer ma vigilance sur deux points. Tout d’abord sur une écoute plus fine des relations familiales, puis sur une attention particulière aux réponses concernant l’avenir. Ces dernières provoquant parfois un retour systématique sur le passé, ou restant sur une non réponse, j’ai, d’une part, alterné le mot « projet » avec le mot « imaginer », et, d’autre part, questionné les représentations du grand âge. En fin d’entretien, la plupart des personnes ont manifesté de la satisfaction, voire du plaisir à avoir parlé de leur vie. Certains ont proposé une autre rencontre. La durée des entretiens a varié entre 35 minutes et 1 heure 15, la majorité se situant aux environ de 45 minutes. 58 1.5.2. Les entretiens avec les professionnels Comme je l’ai dit plus haut, ils se sont déroulés selon le plan donné par l’ « étude de situation ». Ils ont ainsi permis de répondre à tous les items, mais sans exclure d’autres informations sur le sujet. Ainsi, à partir d’une situation donnée, les échanges se sont prolongés par une réflexion plus générale et ont offert l’occasion de témoigner du questionnement du service ou des projets et actions en cours. 59 CHAPITRE 2 ANALYSE DES RESULTATS DE L’ENQUETE 2.1. Caractéristiques des personnes enquêtées La retranscription des 26 entretiens m’a permis de rassembler de nombreuses informations sur le mode de vie et les besoins des bénéficiaires constituant notre échantillon, ainsi que sur l’accompagnement mis en place au sein des trois SAVS qui les accueillent. Ces informations concernent plusieurs domaines de la vie des personnes, de façon différente pour chacune d’entre elles Afin de rendre compte de façon synthétique d’un maximum de données, je les ai rassemblées dans le tableau récapitulatif présenté ci-dessous : E1 E2 E3 50 54 55 59 60 64 ESAT 1/2 temps Mariée Célibataire Enfants Invalidité 2 ans Veuve Enfants Curateurfamille; aide à domicile; médecins; loisirs 32 ans Aide à domicile; infirmière; médecins; administration Environ 15 ans Curateur; aide à domicile; médecins; maison de retraite 32 ans 60 Réseau relationnel Aides au quotidien Partenaires médicaux Coordination SAVS avec … Ancienneté SAVS Situation familiale Ancienneté retraite Emploi Tranche d’âge -14- Tableau récapitulatif des caractéristiques et des formes d’accompagnement des 13 bénéficiaires Spécialistes CHU; CMP Mari; curateur; famille; aide à domicile Famille; loisirs ADAPEI; quartier Spécialistes CHU; médecin psychiatre, médecin généraliste Infirmière, aide à domicile; enfants; SAVS Enfants; ADAPEI Hôpital de jour Infirmière; aide à domicile; enfant; curateur Enfants; hôpital de jour 60 64 2 ans E5 65 69 6 ans E6 55 59 2 ans E7 65 69 3 ans E8 65 69 6 ans E9 55 59 Entreprise adaptée E10 55 59 Milieu ordinaire E11 50 54 ESAT Divorcé Célibataire Réseau relationnel Aides au quotidien Partenaires médicaux Coordination SAVS avec … Ancienneté SAVS Situation familiale Ancienneté retraite Emploi Tranche d’âge E4 38 ans Curateurfamille; médecins; infirmière; établissements de retraite 14 ans Curateur;aide à domicile; loisirs ADAPEI Psychiatre Aide à domicile; SAVS Curateurfamille; SAVS Parents, cousins; quartier; loisirs ADAPEI Infirmière; médecin psychiatre, spécialistes; généraliste; dentiste Infirmière; aide à domicile; famille Frère-curateur Voisinage; loisirs ADAPEI Célibataire Plus de 10 ans Curateur; médecin; loisirs Psychologue; médecin généraliste Célibataire Depuis la retraite Médecins; loisirs ADAPEI Spécialistes CHU SAVS Fratrie; loisirs ADAPEI; connaissances Marié 10 ans Aide à domicile; médecin; curateur Médecin généraliste; dentiste Aide à domicile; SAVS Voisinage; loisirs milieu ordinaire Célibataire 25 ans Employeur; médecins Spécialistes SAVS Connaissances; loisirs ADAPEI 32 ans Employeur; aide à domicile; curateur Aide à domicile; voisinage Village ; loisirs milieu ordinaire 32 ans Curateur; loisirs ADAPEI Curateur; famille Famille; loisirs ADAPEI; quartier SAVS Soeur Célibataire Marié E12 55 59 ESAT Célibataire E13 55 59 ESAT Célibataire Curateur; partenaires pour l’achat et Environ l’aménagement 20 ans du logement 8 ans Employeur; médecin Selon les besoins Fratrie ; ADAPEI L’analyse des données collectées nous permet de dégager quelques grands types de besoins chez les bénéficiaires. J’utilise ici le termes de « type » de besoins dans le sens où cela correspond à un support de classification des données collectées. Le choix des besoins identifiés n’a pas de référence théorique particulière. Toutefois, la terminologie que j’ai retenue rejoint, à la fois, celle utilisée par les SAVS pour identifier leur pratique (cf l’enquête quantitative) et celle utilisée dans les grilles d’évaluation par les CDAPH (la grille GEVA). 61 Les trois types de besoins identifiés sont les suivants: - les besoins en matière de soutien à la santé et de suivi médical - les besoins en matière de vie quotidienne - les besoins en matière de suivi de la situation de travailleur Cette classification m’a permis d’organiser et d’affiner la compréhension, d’une part, des besoins des personnes enquêtées, et, d’autre part, des adaptations nécessaires en termes d’accompagnement. Très logiquement ces dernières dépendent des premiers, mais de façon spécifique selon les personnes. Chaque bénéficiaire ayant des demandes particulières, il nécessite des prestations individualisées de la part du SAVS et de ses partenaires. A nouveau, une grande hétérogénéité caractérise l’ensemble des situations21 pour chaque type de besoins. J’ai alors construit un tableau permettant de faire apparaître une évaluation de l’intensité des besoins exprimés à partir d’un indicateur : la densité du nombre d’interventions d’accompagnement selon la typologie définie, et pour chaque bénéficiaire. Quelle est la pertinence de cet indicateur ? Nous avons postulé que les interventions répondent à un besoin et que leur nombre y est proportionnel. Par ailleurs les informations collectées permettent plus précisément de dénombrer les interventions que d’évaluer leur durée. De plus, pour les professionnels, l’intensité de l’accompagnement utilise globalement cet indicateur qui est considéré comme représentatif. Cette évaluation est donc le résultat de la synthèse des informations collectées auprès du bénéficiaire luimême et auprès du professionnel référent de son accompagnement. La lecture du tableau m’a alors permis, dans une quatrième colonne d’identifier le type de besoins prépondérant pour chaque personne. 21 Je rappelle que le fait d’avoir eu deux interlocuteurs pour me parler d’une même personne, m’a amenée à parler de « situation ». Je faisais alors la distinction entre mes deux sources d’informations. L’analyse m’amène à utiliser l’ensemble des données sur la situation d’un bénéficiaire sous son identité, qu’il soit l’auteur ou non des informations. 62 -15- Tableau des catégories de bénéficiaires en fonction de l’intensité de l’accompagnement, par domaine Vie quotidienne Santé E5 + + Q+S E3 + ++ S E4 + ++ S E9 = + E6 + + Q+S E7 + + Q+S E8 + + Q+S E2 ++ ++ S E1 ++ ++ + S E11 = = = E E12 = = = E E10 + = + T E13 = = = E Travail Catégories + T + : besoins importants ++ : besoins très importants = : besoins stables La quatrième colonne du tableau ci-dessus, m’oriente alors vers le repérage de quatre groupes de personnes, caractérisés par le type et l’intensité des besoins prépondérants. Sur cette base, je définis alors quatre catégories de bénéficiaires : - « S » où les bénéficiaires ont des besoins en matière de soutien à la santé et de suivi médical prépondérants et conséquents. Nous trouvons ici deux personnes en invalidité, l’une complète et l’autre à 50%, ainsi que deux retraités pour qui la teneur du suivi médical est à l’origine d’une orientation vers une maison de retraite. - « Q.S » où les bénéficiaires ont des besoins qui ont évolués à la fois dans le domaine de la vie quotidienne et dans celui du maintien de la santé. Les quatre bénéficiaires de cette catégorie sont en retraite. Depuis cette date, leur accompagnement s’est ajusté à un accroissement de ces deux types de besoins 63 - « T » où les bénéficiaires ont des besoins prédominants en matière de suivi de leur situation de travailleur. Les deux personnes concernées sont en situation d’emploi. Des aménagements de poste ont été nécessaires et la retraite est en perspective. - « E » où les besoins des bénéficiaires apparaissent comme relativement stables. Cette catégorie rassemble trois bénéficiaires, en situation d’emploi et pour qui l’accompagnement a peu évolué ces trois dernières années. Cette répartition est une construction qui rassemble dans une même catégorie des individus concernés prioritairement par un même critère, défini préalablement. Elle est utile à mon analyse, mais ne traduit pas l’ensemble de la réalité des personnes. Elle ne signifie pas une étanchéité du type de besoin identifiant la catégorie, avec les autres types de besoins. Nous verrons qu’ils sont, au contraire, souvent en lien les uns avec les autres, notamment dans le cas de problèmes de santé. L’influence des difficultés de santé sur les besoins d’accompagnement dans les autres domaines que celui de la santé faisait partie des conclusions de mon enquête quantitative. Je l’ai à nouveau constatée au travers des entretiens. La constitution des catégories nous montre d’ailleurs que les besoins en matière de santé sont primordiaux pour quatre personnes et associés pour quatre autres. Nous verrons aussi que la situation complexe des quatre bénéficiaires de la catégorie « S » met en évidence ces interdépendances entre les types de besoins. Leur analyse apportera, de plus, un éclairage pour celle des catégories suivantes. Cet enchaînement est à l’origine de l’ordre de classement de mes quatre catégories, tel que nous l’avons présenté ci-dessus. 64 2.2. Près d’un tiers des bénéficiaires nécessitent un accompagnement E1 E2 E3 E4 50 54 55 59 60 64 60 64 ESAT 1/2 temps 2 ans 2 ans Réseau relationnel Aides au quotidien Partenaires médicaux Coordination SAVS avec … 32 ans Curateurfamille; aide à domicile; médecins; loisirs Spécialistes CHU; CMP Célibataire Enfants 32 ans Aide à domicile; infirmière; médecins; administration Spécialistes CHU; Infirmière, médecin aide à psychiatre, domicile; médecin enfants; Enfants; généraliste SAVS ADAPEI Veuve Enfants Curateur; aide à domicile; médecins; Environ maison de 15 ans retraite Infirmière; aide à domicile; Enfants; enfant; hôpital de jour curateur Divorcé CurateurInfirmière; famille; médecin médecins; psychiatre, Infirmière; infirmière; spécialistes; aide à établissements généraliste; domicile; Frèrede retraite dentiste 38 ans famille curateur Mariée Invalidité Ancienneté SAVS Situation familiale Ancienneté retraite Emploi Tranche d’âge prioritairement pour le suivi de leur santé Hôpital de jour Mari; curateur; Famille; famille; loisirs aide à ADAPEI; domicile quartier -16- Tableau récapitulatif de la situation des bénéficiaires de la catégorie « S » Cette catégorie regroupe quatre bénéficiaires dont les besoins prédominants concernent le soutien à la santé et le suivi médical. Pour ces quatre personnes, la situation médicale a une incidence importante sur l’organisation de leur vie. 65 2.2.1. Besoins principaux : maintien de la santé et suivi médical Pour ces quatre bénéficiaires, les dernières années furent marquées par un accroissement important des besoins en matière de suivi médical. Ceux-ci ont généré une augmentation du temps d’intervention, mais aussi, une diversification des actions du fait des partenariats à construire. Tous sont concernés par la question des soins psychiatriques. Une période de rupture (santé, statut professionnel) a provoqué un grave déséquilibre, ou accentué un état préexistant. Chacun nécessite un suivi régulier par un médecin psychiatre. L’analyse plus détaillée nous en donne l’illustration : Deux femmes ont subit une recrudescence de leurs problèmes de santé qui a abouti, à 51 ans pour l’une et 52 ans pour l’autre, à une prise en charge au titre de l’invalidité. Pour la personne qui travaille à mi-temps, la ménopause a été citée comme facteur déclencheur de l’accentuation d’une déficience sensorielle et de la fragilité psychologique qui l’a accompagnée. Pour la deuxième de ces femmes, à un équilibre psychique déjà précaire, se sont ajoutées diverses maladies organiques évolutives. Si le lien a été fait dans le premier cas entre l’aggravation d’une déficience, une nouvelle fragilité et la ménopause, nous constatons également cette correspondance dans le deuxième cas. Sans généraliser, mais en m’appuyant sur d’autres expériences professionnelles, je soulignerai la particularité de cette période pour la population féminine. Pour elle, la densification de l’accompagnement médical est manifeste à ce moment. « vers les autres (autres médecins que son généraliste), je demande qu’on m’emmène, pour qu’ils expliquent mieux, et qu’ils puissent mieux m’expliquer après »(E2) Cette remarque vaut pour ces deux personnes, qui ont de lourdes pathologies organiques. Mais beaucoup ont exprimé de façon similaire leur difficulté à expliquer des symptômes, ainsi que le besoin d’une oreille complémentaire et d’une mémoire pour reprendre le discours des médecins. En effet, après une consultation il est souvent nécessaire de traduire et ré-expliquer les informations reçues. L’accompagnateur compense alors la déficience sous deux principales facettes : langagières face à des professionnels non aguerris et cognitives pour transmettre des informations adaptées et comprendre celles de l’interlocuteur. De plus, ces déficits génèrent un sentiment d’insécurité qui demande à son tour d’être pris en compte. Pour les deux autres bénéficiaires de cette catégorie, les besoins médicaux sont essentiellement d’ordre psychiatrique et se sont accrus depuis le passage à la retraite, il y a deux ans. Ces deux personnes sont dans l’incapacité de gérer leur solitude et leur nouveau rythme de vie, et elles l’expriment ainsi: « ça va très mal, … j’ai du mal à me plaire toute seule »(E3) « un peu perdu, voila, … il me manque une activité, par contre on a moins de stress »(E4) 66 A cela, peuvent s’ajouter des considérations personnelles concernant les traitements: « Je fais attention à ce que je fais parce que les docteurs ils appuient les doses, … des fois un peu moins, parce que s’il fallait les écouter tous ces spécialistes … » (E4) Quant aux conséquences, elles nous sont données par les professionnels : « depuis la retraite, il est totalement désorganisé par rapport à l’hygiène de vie, aux rythmes » « … ne s’alimente plus correctement, se laisse complètement aller … sa santé s’est beaucoup dégradée en 2 ans» Le maintien du bien-être et la sécurité de ces personnes sont mis en péril. L’ajustement des interventions aux exigences croissantes de ces situations devient de plus en plus difficile : « on met des béquilles en place en attendant la maison de retraite, pour qu’il ne se mette pas en danger , tout en restant à domicile» Dans ces quatre situations, les SAVS ont été très impliqués dans l’accompagnement vers les soins et leur suivi, qu’ils soient physiologiques ou psychologiques. Ils sont intervenus à différents niveaux : la vigilance sur l’état de santé, le suivi et/ou l’organisation de la prise des traitements médicamenteux, la médiation entre les personnes et les référents médicaux (médecins spécialistes, médecin généraliste, infirmière …) et la coordination entre ces différents partenaires. Le partenariat établi a permis le maintien à domicile jusqu’à maintenant, mais l’évolution des pathologies et les réponses à apporter font sentir les limites de ces services. Pour trois personnes, une réorientation est envisagée, voire en cours de réalisation pour l’une d’entre elles. Compte tenu de leur âge et de l’offre existante sur le territoire, les choix se font en direction d’établissements pour personnes âgées : foyers logements ou maisons de retraite. La personne qui travaille encore a retrouvé un équilibre qui ne remet pas en cause, actuellement, le maintien à domicile. Sa santé est stabilisée et les aides apportées lui permettent de s’organiser de façon satisfaisante. Pour elle, il faut noter la place indispensable des aidants : mari, fratrie, auxiliaire de vie… De fait, les questions de la santé, de sa prise en compte, de la nature des répercussions sur la vie quotidienne sont en lien étroit avec le contexte de vie. Alors qu’en est-il pour ces quatre personnes ? 2.2.2. Besoins associés : vie quotidienne et … Nous remarquons, dans ce domaine, l’intervention d’au moins trois personnes au domicile pour la réalisation des tâches de la vie quotidienne: une aide à domicile et une infirmière, ainsi que la famille pour trois d’entre-eux et le SAVS pour la quatrième. Le passage de l’infirmière au domicile pour la préparation des piluliers, est en lien direct avec l’importance de la médication, et la difficulté des trois personnes de la gérer. 67 L’intervention d’une aide à domicile est nécessaire pour assurer, selon le temps disponible, l’entretien du linge et de l’appartement. Les accompagnateurs notent un déclin par rapport à l’hygiène, aux repas, au ménage… Il est certain que le travail impliquait une régulation au niveau de l’hygiène et des repas ainsi qu’un rythme de vie qui ont disparu. Pour les personnes en retraite, le financement personnel ne permet pas une augmentation des heures d’intervention qui s’avèrerait profitable. Par contre, la prise en charge financière d’heures au titre de l’invalidité, permet aux deux personnes concernées de bénéficier d’un soutien complémentaire autour de l’alimentation et pour quelques courses. Pour elles, le passage à la retraite nécessitera de reposer la question du financement des aides existantes. L’équilibre actuel est lié à l’intensité du soutien établi. « J’espère que ça va continuer comme ça … j’ai un bel appartement, je m’y plais, j’en suis fière, … je voudrais en profiter encore un petit peu » (E2) La comparaison de ces deux types de situation montre ce qu’elles ont en commun : un besoin important de présence pour l’organisation des tâches quotidiennes et leur réalisation. Faute de quoi la personne peut se trouver en grande difficulté. La forte intrication des besoins en matière de santé et de vie quotidienne nécessite de considérer les deux domaines conjointement. D’ailleurs si les uns se plaignent de la solitude, les autres disent, en parlant de la relation à l’aide à domicile : « Ca permet de discuter … » (E1) Il y a ainsi une notion qualitative qui se joint à une notion quantitative. Il y a la question des tâches effectuées, mais aussi celle du contexte. Je veux parler de la nature du lien qui s’établit avec l’intervenante et de ses effets. Il est dit concernant E1 : « Pendant un an ça s’est super bien passé, c’était toujours la même … le changement a été difficile, ça s’est ressenti » La bonne entente avec l’aide à domicile apporte déjà la satisfaction d’une relation privilégiée qui se noue. Ensuite cette intervention, si elle est suffisante en terme de durée, permet de s’investir dans des occupations qui prennent de l’intérêt. E1 trouve du plaisir à prendre le temps de cuisiner, de demander des conseils… Ces expériences positives vont permettre de nouveaux investissements, source de reconstruction22. Ce phénomène est exprimé clairement à propos de cette situation, mais il apparaît aussi dans d’autres. Sa lisibilité et son effectivité sont proportionnelles au temps de présence de la personne aidante et à sa permanence. Sur le même registre, dans cette catégorie, nous constatons la nécessité d’interventions complémentaires conséquentes. Elles sont assurées par la famille et/ou le curateur et, enfin, par le SAVS pour la personne qui n’a pas de protection juridique et pour qui le service en « fait office ». 22 Cours de Jacky RIGAUX sur la souffrance. 68 « Je peux compter sur ma famille, elle m’aide beaucoup … ceux qui sont seuls ils ont personne pour discuter, alors ils ont besoin du service, tandis que moi on est deux » (E1) « J’ai bien ma famille, mais … ils ont assez à faire à eux, ils veulent pas … » (E4) « Je comptais beaucoup sur elle (sa fille), elle m’emmenait partout … je ne la vois plus » (E3) « J’ai le petit, j’ai ma p’tite fille, ma belle fille, le service, c’est bon » (E2) Pour terminer, nous noterons que le rapprochement de ces quatre personnes est fonction de l’intensité des besoins qu’elles manifestent. Nous voyons ici que les possibilités de prise en compte, et l’appréciation des relations aidantes présente une disparité. La pérennité et les limites de ces différents appuis participent aussi de la nécessité d’envisager ou non une orientation vers une autre prise en charge. Y aurait-il d’autres solutions ? On peut penser qu’un SAMSAH pourrait répondre plus longtemps aux besoins de ces personnes, du fait de la présence de personnel médical dans l’équipe des accompagnateurs. On pourrait aussi imaginer des structures innovantes qui proposeraient des appartements regroupés autour d’un lieu ressource. 2.2.3. … suivi de la situation de travailleur Une seule personne de cette catégorie est encore en situation de travail. Nous allons voir les conséquences, dans ce domaine, des besoins importants dans les deux autres que nous venons de détailler. Mais nous parlerons aussi de l’expérience du départ en retraite des deux bénéficiaires concernés de cette catégorie, qui pourra nous éclairer dans l’analyse des catégories suivantes. Concernant la personne en invalidité complète, le SAVS s’est fortement mobilisé dans un partenariat avec l’employeur autour des aménagements de postes successifs, avant de passer aux démarches de demande d’invalidité. Les problèmes de santé de E1 ont commencé par provoquer plusieurs arrêts maladie dans les deux ans qui ont précédé la déclaration de son invalidité. Le partenariat avec l’employeur a permis d’ajuster le temps de travail et le poste de E1 à l’évolution de sa maladie et à ses moindres capacités de travail. Pour elle, le travail à mi-temps : « ça s’est fait tout naturellement …je me sens bien, moins fatiguée … tant que je peux travailler, je continuerai »(E1) Pour les professionnels, E1 a pu tirer profit de cette répartition du temps : « Elle fatigue moins avec le mi-temps, et a pu décrocher d’avec l’ESAT » 69 Cette remarque fait écho à ce que nous disions précédemment concernant son « accrochage » avec son aide à domicile qui lui a permis d’investir d’autres formes de reconnaissance et de satisfactions. Sans doute, cela simplifiera-t-il le passage à la retraite, car des pistes sont ouvertes. D’ailleurs E1 fait partie des quelques personnes qui peuvent parler de ce qu’elles feront quand elles ne travailleront plus. Ceci nous amène à la question de la préparation et de la décision du départ en retraite. E4, qui a toujours travaillé à plein temps, a eu la possibilité de prendre sa retraite à 59 ans. « 40 ans de travail, je commençais à en avoir assez … j’avais plus envie de continuer» (E4) Il a donc décidé de faire valoir ses droits. Le SAVS n’était pas favorable à ce départ en retraite, même s’il reconnaissait que le travail n’était pas valorisant pour E4. Il aurait préféré le préparer davantage à l’absence d’activité. C’est d’ailleurs ce que E4 regrette : « j’aurais pas dû partir si tôt que ça … pour un homme, vaut mieux avoir un travail que de rester comme ça … par contre on a moins de stress » (E4) La situation précédente nous fait penser que, peut-être, une proposition de temps partiel aurait pu convenir à chacun. A la fois à E4 pour moins fatiguer et au SAVS pour l’aider à réorganiser ses journées. Quant à E3, son référent, en accord avec les paroles de E3 me signale que : Sa « mise à la retraite s’est fait très rapidement, de façon administrative ». Elle ne l’a pas acceptée, et « à la fin, elle n’allait plus travailler » Parlant de son travail, elle utilise encore le présent, et me dit : « j’aime mon boulot » (E3) Sans doute eu-t-il fallu préparer davantage ce départ, mais comment ? Combien de temps avant ? Le peu d’expérience des SAVS à ce sujet apporte plus de questions que de réponses. Nous allons continuer notre réflexion au fil des catégories suivantes. Cette catégorie nous a présenté des personnes qui ont en commun des besoins en matière de soutien à la santé et de suivi médical qui sont prioritaires et déterminants. L’analyse de ces besoins fait apparaître la diversité des actions nécessaires à mettre en œuvre pour y répondre, ainsi que les limites des missions et des compétences des SAVS face à l’évolution des situations. Pour les quatre bénéficiaires, le SAVS remplit à la fois des fonctions de veille, de soutien personnel, de médiation et de coordination avec les différents partenaires du suivi médical et de la vie quotidienne. 70 Ces observations nous rappellent les notions développées par Maela PAUL autour du verbe accompagner : conduire, guider et escorter qui s’articulent autour de l’idée de veille23. Nous voyons qu’elles sont ici pleinement exploitées, jusque dans leurs limites du fait de la spécificité des besoins et des missions du SAVS. En effet le maintien de conditions de vie satisfaisantes et sécurisées risquant de ne plus être assuré pour trois personnes, les professionnels travaillent à l’orientation de ces personnes vers une prise en charge institutionnelle. Pour la quatrième personne, le maintien à domicile n’est pas remis en cause, du fait de la présence régulière d’aidants. L’existence, la nature et l’évolution récente de ces besoins étant posées, pouvons-nous dire qu’elles sont liées au vieillissement ? Rappelons que chez deux femmes, la pathologie s’est amplifiée autour de la cinquantaine, et que pour les deux autres personnes, ce fut à partir de la retraite. Dans le premier cas, l’âge est la cause directe. Dans le deuxième cas, nous dirons que c’est la fin de l’activité professionnelle ; pour autant celle-ci est bien en lien avec l’âge. 2.3. Pour près d’un tiers des personnes, l’évolution des besoins a lieu simultanément dans deux domaines : vie quotidienne et santé Sont concernés par une prédominance de ces catégories de besoins que j’ai associées, quatre bénéficiaires retraités depuis deux à six ans. Chacun a construit, avec plus ou moins de difficultés, un nouveau rythme de vie. Parallèlement, la santé est devenue plus fragile et ces personnes demandent plus de suivi dans ce domaine. Mais, globalement, elles parviennent à s’organiser et elles ont des activités qu’elles choisissent. 23 Première partie 71 Réseau relationnel Aides au quotidien Partenaires médicaux Coordination SAVS avec … Ancienneté SAVS Situation familiale Ancienneté retraite Emploi Tranche d’âge -17- Tableau récapitulatif de la situation des bénéficiaires de la catégorie « Q S » 65 69 Curateur;aide à domicile; 6 loisirs ans Célibataire 14 ans ADAPEI E6 50 59 Plus de 10 2 ans Célibataire ans Curateur; médecin; loisirs E7 60 64 Depuis la 3 ans Célibataire retraite Médecins; loisirs ADAPEI Spécialistes CHU SAVS Fratrie; loisirs ADAPEI; connaissances 6 ans Aide à domicile; médecin; curateur Médecin généraliste; dentiste Aide à domicile; SAVS Voisinage; loisirs milieu ordinaire E5 E8 65 69 Marié 10 ans Psychiatre Aide à domicile; Voisinage; SAVS loisirs ADAPEI Parents, cousins; Psychologue; Curateurmédecin famille; quartier; loisirs généraliste SAVS ADAPEI 2.3.1. Besoins principaux : vie quotidienne et … Pour les quatre bénéficiaires, le SAVS apporte son aide dans ce domaine sous différentes formes. Premièrement, il participe aux courses une à deux fois par mois. Il y a à cela plusieurs raisons. Tout d’abord, cette démarche est l’occasion de faire le point sur la liste des achats nécessaires et donc d’assurer une veille par rapport aux produits qui sont consommés ou non. Ceux-ci peuvent être de nature alimentaire, mais aussi d’hygiène et d’entretien. Il est certain que pendant toute la vie professionnelle, l’ESAT était attentif à la prise d’un repas équilibré chaque jour, et informait le SAVS en cas de problème d’hygiène. A la retraite, cette vigilance tierce et régulière disparaît. Ensuite, cette démarche offre un cadre propice à l’échange d’informations sur le quotidien ainsi qu’à la transmission de conseils. « le plus gros je fais avec elle, pour le ménage, les grosses choses … elle conseille … ça va plus vite, j’ai pas de voiture. » (E5) Enfin, comme le dit E5, et ce n’est pas anodin pour elle, il y a la question du transport des courses. Effectivement, celles-ci sont devenues plus importantes depuis la retraite, pour des personnes dont la 72 motricité est moins aisée, qui n’ont pas de voiture et habitent relativement loin des magasins de grande surface. Un deuxième point concerne la mise en place d’une aide à domicile au moment du passage à la retraite pour trois de ces bénéficiaires. Cette intervention a été supprimée pour l’un d’entre eux pour des raisons financières, mais une reprise est à l’étude. L’aide à domicile apporte le soutien nécessaire pour pallier les manques liés à la fin de la vie professionnelle dont nous venons de parler ci-dessus. « ça la tenait d’aller au travail, elle faisait attention à se tenir propre, maintenant elle se néglige un peu, elle a besoin qu’on lui dise … » (professionnel) Mais elle est aussi la possibilité d’une relation individuelle, régulière et structurante. Elle devient un nouveau repère. Il est évident que son intervention doit s’inscrire dans les projets du bénéficiaire, au-delà des normes personnelles, et dans l’obligation d’assurer sa sécurité. « Ils ont eu la même pendant des années, maintenant avec la remplaçante, il y a plus de décalage entre ce qu’elle veut et ce qu’eux veulent de leur vie chez eux » De ce fait, nous comprenons l’importance de la permanence de cette personne, ainsi que de la coordination avec le SAVS. Troisièmement, nous remarquons que, dans cette catégorie, les bénéficiaires ont un réseau relationnel étendu au delà de la famille et du SAVS. Tous ont des loisirs, que ce soit au sein de l’ADAPEI ou en milieu ordinaire. Pour une personne, le réseau constitué de relations de voisinage pré-existantes s’est renforcé. Pour les autres, il est le fruit d’une construction visant à occuper le temps libéré et à compenser la perte relationnelle du lieu de travail. « C’est depuis que je suis en retraite que je vois du monde. Avant, quand je travaillais, je vivais là-bas pratiquement. Maintenant je vois des dames que j’ai connues en retraite. Tout le monde me connais, vu que je sors tout le temps » (E5) « Tous les matins je vais boire mon café avec ... Je suis pas souvent chez moi, parce que je donne des coups de mains aux voisins … et je suis souvent avec ma femme. J’aime encore bien rendre service aux gens, depuis l’âge de 14 ans … j’ai toujours fait comme ça» (E8) Pour E8 et E5, les relations établies reposent sur des services rendus dans le voisinage, et souvent, à des personnes âgées. De plus, ils y trouvent une reconnaissance certaine. L’investissement dont le travail était l’objet a été déplacé sur ces nouvelles activités. Pour E8, qui avait déjà des contacts, ce déplacement s’est opéré facilement. Mais pour E5, qui a du trouver et construire ces nouvelles occupations, la transition a été plus longue et douloureuse. C’est à ce prix qu’elle a trouvé son nouvel équilibre. « Elles sont contentes de me voir, elles sont pas seules. Je pense qu’elles m’aiment bien. » (E5) 73 Si J se satisfait de sa vie de couple et des relations au sein de son village, les autres, célibataires, cherchent un autre complément. « je me sens de plus en plus seul maintenant, ça commence à me peser … je suis toujours tout seul, il n’y a personne … » (E7) Ainsi, dans l’un des SAVS, nous pouvons noter la création, à la demande des bénéficiaires, d’un club de retraités, auquel beaucoup d’entre eux participent régulièrement. Des sorties touristiques sont organisées ainsi que diverses animations. D’autre part, le SAVS anime pour eux un groupe de parole. Ces innovations font parties des adaptations mises en place ces dernières années. Parallèlement, une aide est apportée pour l’inscription à des activités en milieu ordinaire : club informatique, club du troisième âge … Ces réponses ont une action à deux niveaux. Elles proposent une activité qui passe le temps, qui occupe, mais elles sont aussi un médiateur relationnel et socialisant. « On fait plein de choses, ça fait du bien. Comme on n’a pas de voiture on profite » (E5) E6 parlant du club informatique en milieu ordinaire : « ça permet d’écrire, (avec le correcteur orthographique), je suis au journal … je connais pas leur nom, mais rien qu’en se voyant » (E6) termine-t-il avec émotion. La question de l’univers affectif de chacun est ici soulevée. Pour notre population, tout un pan des critères de ce qui donne le sentiment de « réussir sa vie »24 est peu présent. « ce que j’ai toujours regretté c’est de ne pas avoir une descendance directe … j’ai pas fait ma vie » (E7) François de SINGLY constate également que « l’essentiel de la vie semble être devenu l’existence affective, émotionnelle, amoureuse »25. La proportion de personnes de 50 ans et plus ayant une descendance est faible, et celles vivant en couple sont peu nombreuses. Les citations qui précèdent (dans cette catégorie ainsi que dans la précédente) traduisent la place de ces liens familiaux et du vide qui est ressenti par les personnes chez qui ils font défaut. Les solutions proposées seront alors investies si elles fournissent, au moins partiellement, des moyens dont chacun voudra ou pourra s’emparer pour faire face à ses frustrations, et à sa souffrance. 24 Claude DUBAR dans la crise des identités cite une enquête sur la signification de « réussir sa vie ». les réponses n’abordent très majoritairement que deux thèmes : l’emploi (« avoir un emploi bien payé, qui me plaise, stable, .. ») et la famille (« avoir une famille qui m’aime et que j’aime … ») 25 Dans le même ouvrage C. DUBAR cite cet auteur dans individualisme et lien social. 74 Les diverses demandes d’aide participent à la fois des besoins liés au handicap, par sa compensation, et au maintien de l’autonomie par la facilitation et le respect des choix de chacun. Les réponses apportées sont un support à la réorganisation de la vie quotidienne. Nous avons relevé ce que le passage du statut de travailleur à celui de retraité génère comme modifications organisationnelles et relationnelles. Maintenant nous allons voir ce que ce phénomène a comme conséquences dans le domaine de la santé. 2.3.2. … maintien de la santé et suivi médical Les quatre bénéficiaires ont un suivi médical qui ne répond ni à un état de crise ni à un problème de santé évolutif, comme dans la catégorie précédente. Il nécessite néanmoins un accompagnement qui a évolué ces dernières années, car le maintien de la santé est devenu fragile. Cette fragilité est commune à tous, mais les raisons en sont différentes. Je relève deux tendances, une plutôt psychique et l’autre plutôt organique. Naturellement, elles peuvent être combinées. Pour deux personnes, un soutien psychologique existe. Il a été mis en place au moment du passage à la retraite, qui a provoqué une forte déstabilisation. Un nouvel équilibre a été trouvé et chacune a progressivement géré seule ce suivi. Le partenariat s’est allégé, mais le SAVS a maintenu sa vigilance. Ainsi, en raison du décès très récent d’un parent pour E6, le contact avec le psychologue a été repris. Nous n’avons jusqu’ici pas encore abordé la question du deuil. Pour Nancy BREITENBACH (1999), elle fait aussi partie de « l’héritage du vieillissement ». « Atteignant une longévité proche de celle de la population générale, les personnes handicapées mentales ont d’importantes chances maintenant de survivre à leurs parents. Elles peuvent en outre voir des pairs décéder ». Et si, dit-elle l’idée que « les vieillissants deviendraient un jour des mourants » est acquise, la nécessité de les accompagner en tant que « survivants » reste à développer. Il s’avère nécessaire d’accompagner les personnes déficientes intellectuelles dans leur travail de deuil. Si celui-ci n’est pas fait, il prive la personne de moyens, tirés de l’expérience, pour affronter un nouveau travail de deuil lors des inévitables pertes à venir. Face à cette prise de conscience, je constate au travers de mon expérience une orientation privilégiée vers des professionnels tels que les psychiatres ou les psychologues. Y aurait-il d’autres formes d’aide possibles ? Lesquelles ? Dans quel contexte ? Les questions restent ouvertes. 75 Quelques en soient les raisons, nous pouvons dire que la valeur du partenariat avec les soignants réside dans la spécificité de l’aide qu’il apporte mais aussi dans sa capacité à s’adapter à la fluctuation des besoins. Chez les deux autres personnes les besoins sont davantage liés au vieillissement physiologique: problèmes dentaires, d’arthrose, de suivi d’une intervention chirurgicale suite à une pathologie liée à l’âge, problème de chutes et des peurs consécutives … « depuis que j’ai eu ce problème, que je me suis cassé la figure dans les escaliers, je me méfie …je ne suis plus sûr de moi du tout … j’ai peur que ça revienne … ça a tout arrêté » (E7) Outre le suivi des problèmes en cours de traitement, avec les bénéficiaires de cette tranche d’âge (ils ont ici plus de 60 ans), les SAVS sont confrontés à la prise en compte de symptômes nouveaux ou qui s’accentuent du fait du vieillissement. Le partenariat médical devient alors globalement plus dense et l’accompagnement davantage centré sur ce domaine. « Nous en avons de plus en plus le souci médical, car c’est quelqu’un qui ne se préserve pas beaucoup … il y a une dégradation physique … j’appelle toutes les semaines pour demander comment ça va … sinon il attend (pour aller chez le médecin) … besoin d’appuyer de plus en plus … il y a plus de partenariat avec le généraliste » (un professionnel) L’objectif étant de maintenir la santé et de prévenir d’atteintes plus graves, le rôle de médiation et de coordination entre les différents intervenants prend une place croissante dans l’accompagnement. Mais cette remarque traduit aussi la nécessité d’alerter les personnes sur la prise en compte des dégradations de la condition physique et sur les modifications à apporter aux habitudes de vie. Cette prise en compte peut se concrétiser par ce que nous avons appelé « les nouveaux apprentissages26». L’idée est que les changements dus à l’avancée en âge impliquent des adaptations, qu’elles soient souhaitées, acceptées ou forcées. Afin de les positiver au mieux, des propositions choisies peuvent être judicieuses ; par exemple : informations sur la compréhension du fonctionnement du corps et des phénomènes de vieillissement, informations sur le thème de l’hygiène, ouverture sur diverses activités : ateliers de gymnastique, d’équilibre, … Dans le département du Doubs des organismes tels que l’IRV27 ou l’URCAM28 sont des lieux ressources pour la connaissances des actions proposées en direction des personnes âgées, ainsi que pour la construction de nouveaux partenariats. 26 Première partie, à propos des besoins spécifiques aux personnes handicapées mentales. 27 Institut Régional du Vieillissement 28 Union Régionale des Caisses d’Assurance Maladie 76 2.3.3. Besoins secondaires : suivi de la situation de travailleur Les bénéficiaires de cette catégorie étant tous retraités, une analyse dans cette rubrique s’avère sans objet. Cependant la réflexion de l’un deux m’a interrogée : « Je me plaisais bien au travail … j’y serais encore si ç’avait pas été la retraite … tant qu’on travaille on ne se rend pas compte, c’est après que … » (E5) Recueillie lors de mes premiers entretiens, cette citation a orienté mon attention, pour les interviews suivantes, sur la question de la préparation des travailleurs à leur changement de statut, d’organisation de leur vie … 2.4. Pour une minorité de notre échantillon (mais un tiers des travailleurs), les besoins concernent essentiellement le suivi dans l’emploi E9 E10 55 59 55 59 Entreprise adaptée Milieu ordinaire 25 Employeur; Célibataire ans médecins Spécialistes Employeur; aide à 32 domicile; Célibataire ans curateur Réseau relationnel Aides au quotidien Partenaires médicaux Coordination SAVS avec … Ancienneté SAVS Situation familiale Ancienneté retraite Emploi Tranche d’âge -18- Tableau récapitulatif de la situation des bénéficiaires de la catégorie « T » SAVS Connaissances; loisirs ADAPEI Aide à domicile; voisinage Village ; loisirs milieu ordinaire Nous trouvons ici deux personnes pour qui les interventions du SAVS se font majoritairement en relation avec l’employeur, ou dans le cadre de la préparation de la fin de l’activité professionnelle. Pour chacune la question de la retraite a déjà été posée. Si leur point commun est la prise en compte de leur prochain départ à la retraite, un positionnement contraire les sépare à ce sujet. Mais pour le SAVS, ces contradictions alimentent le même questionnement de l’accompagnement à cet important changement à la fois de statut et de mode de vie. 77 L’exposé du point de vue de chacun sur son statut de travailleur puis sur les conséquences en matière de vie quotidienne, nous amènera à une tentative de compréhension des enjeux liés à cette période de transition. 2.4.1. Besoins principaux : suivi de la situation de travailleur Pour une meilleure compréhension, j’ai choisi de présenter les deux situations successivement : Voyons tout d’abord la situation de E10 : E10 est employé dans une grande entreprise depuis un peu plus de 25 ans. Depuis trois ans il occupe un poste « emploi protégé »29, mais sans aménagement du temps. Sa demande de temps partiel n’a pas été acceptée. E10 dit qu’il « commence à fatiguer » et trouve que le travail est « plus fatiguant » ces dernières années. Ayant entendu parler de la possibilité, pour les travailleurs d’ESAT, de prendre leur retraite à partir de 55 ans, il en a fait la demande. Mais le statut de son poste ne lui donne pas accès à cette possibilité : « Encore 6 ans à travailler, normalement … je pense gagner 1 an si je peux … m’arrêter le plus vite possible » (E10) Parallèlement, E10 tire encore des bénéfices de son travail. Tout d’abord financiers, car il n’hésite pas à faire des heures supplémentaires : « Quand ils ont besoin de moi, ils me demandent … les heures sup. ça me donnera des sous de plus pour partir » (E10) Mais aussi de la satisfaction : « Les gars m’aiment bien, c’est bien » (E10) Et son ancienneté dans l’usine lui donne une expérience reconnue ; on lui confie certaines missions que ses collègues ne peuvent pas remplir. E10 est donc quelqu’un qui est dans une dynamique positive par rapport à la retraite. Il apprécie la reconnaissance que lui apporte son travail, mais elle n’est pas essentielle pour lui. Il a déjà des projets pour sa période de retraite, qui sont dans le prolongement de sa vie actuelle. Ces données seront abordées dans le paragraphe suivant, à propos de la vie quotidienne. Du point de vue du SAVS, durant ces dernières années, l’accompagnement de E10 a représenté des démarches de trois types : de partenariat avec l’employeur, de démarches administratives, et, bien entendu, de soutien auprès de E10. 29 Qui demande une reconnaissance de Travailleur Handicapé par la CDAPH 78 Tout d’abord, le partenariat existant avec l’employeur a été renforcé. La fatigabilité manifestée par E10 a été prise en compte dans les changements de postes opérés. Mais l’aménagement du temps n’étant pas envisageable le suivi reste important. Il s’agit à la fois du maintien de la santé, de l’évolution des tâches, de la pose des congés, et de la gestion des heures supplémentaires du fait de la grande disponibilité de E10. Ensuite, la volonté de E10 d’arrêter de travailler a du être étudiée auprès des services compétents, de même que la possibilité de la réduction du temps de travail. Enfin, ces différents évènements ont été l’occasion de démarches communes et d’échanges sur l’avenir. E10 voyait surtout les avantages de la retraite : « Moins de fatigue, moins debout … on se lève à l’heure qu’on veut … » (E10) Par contre les professionnels, ont approfondi avec lui ce qui, de leur point de vue, peut poser problème : « L’oisiveté, la baisse des revenus, la perte des contacts et la récupération par le village » Pour ces raisons, le SAVS ne voit pas d’urgence au départ à la retraite. E10 bénéficie d’une bonne intégration dans son environnement, mais elle reste fragile. Actuellement, la situation de travail participe du maintien à l’équilibre établi. Cette situation met en évidence différents points du contenu de l’accompagnement pour une personne en fin de carrière, prête à étudier les possibilités qui lui sont offertes. A l’opposé, E9 a la possibilité de prendre sa retraite mais il s’y refuse. « Ca fait plus de 40 ans que je travaille, pour m’arrêter ça va être dur … je les plains ceux qui travaillent pas » (E9) Il reconnaît qu’il fatigue, des soucis de santé le gênent, mais l’inactivité l’inquiète beaucoup. Après plusieurs années en milieu ordinaire, il est revenu à l’ADAPEI sur un poste d’Entreprise Adaptée, car « physiquement, ne pouvait plus ». Son poste continue à être aménagé : « Comme j’ai des problèmes de santé, ils m’ont dit de me ménager » (E9) Il sait aussi que les professionnels ont compris son besoin de « bouger », et me transmet ce qu’ils pensent : « … faut pas le laisser sans rien faire, il n’aime pas » (E9) Toutes ces appréciations sont confirmées par l’échange avec son référent. « E9 ne veut pas quitter son travail pour ne pas être seul chez lui » dit-il, « on sent qu’il manque quelque chose ». Mais quelle solution trouver pour qu’il ne « s’ennuie » pas. 79 Repousser l’échéance permet ainsi de gagner du temps pour chacun. Une demande de temps partiel a été faite, mais il n’a pas été accordé par la Caisse de retraite dont il dépend. Donc du côté de l’employeur le travail de partenariat perdure pour continuer à adapter le poste. Mais, concernant cette personne, un autre phénomène m’a frappée lors de l’entretien. La question du travail et de la retraite prochaine ramenait inévitablement et de façon répétée à des souvenirs de sa vie de jeune adulte, voire de son enfance. Il y avait comme une impossibilité de penser le temps postprofessionnel, un effet de mur qui renvoyait vers le passé. Cette observation n’est pas sans faire écho aux situations précédentes où la fin de l’activité professionnelle a provoqué ce que j’appellerai « une crise », à l’origine, pour plusieurs personnes des catégories précédentes, de soins psychologiques ou psychiatriques. Nous savons30, et avons confirmé ci-dessus, que l’activité professionnelle constitue un étayage important en terme de rythme, d’activité et de relations. Pour ces raisons, son interruption mérite une préparation minutieuse et suffisamment anticipée. Quelques pistes peuvent être retenues. Tout d’abord une réflexion sur l’âge, permettant aux personnes de se situer à la juste place dans les générations : on n’est plus jeune à 55 ans. Ce constat implique aussi un travail sur des regrets ou des frustrations possibles : la majorité des bénéficiaires de notre population n’ont pas d’enfants, tous n’ont pas une vie de couple … alors que ces critères font partie des normes en vigueur dans notre société. Ensuite, envisager la retraite comme une nouvelle étape ; c’est une réalité individuelle nouvelle pour chaque bénéficiaire ; je dirai que c’est aussi une nouveauté pour les professionnels qui vont y faire référence dans les projets de vie des personnes qu’ils accompagnent. Cette étape est justifiée pour les mêmes raisons que pour tout un chacun dans la population globale, et sera envisagée au travers d’un nouveau mode de vie : nouvelle gestion du temps, nouveaux investissements, modification du réseau relationnel, adaptation aux éventuels problèmes médicaux. Enfin, encourager et soutenir précocement des investissements qui pourront être renforcés le moment venu et permettront de contrebalancer la perte du statut de travailleur. Nous avons pour exemples les situations, vues précédemment, de E8 et de E1. Ce débat vient dans la rubrique des besoins en matière de situation professionnelle, car il est directement lié à l’investissement des bénéficiaires dans leur statut de travailleur. Mais nous voyons qu’il prend appui, nécessairement, sur la réalité de la vie quotidienne. Nous allons voir ce qu’il en est pour E10 et E9. 30 Première partie 80 2.4.2. Besoins complémentaires : vie quotidienne et … Il n’y a pas d’évolution marquée des besoins des deux bénéficiaires dans ce domaine. Mais l’analyse de l’existant apporte des éléments de compréhension sur leur façon de se projeter dans la période de retraite. JE10 est propriétaire de sa maison qu’il a construite dans son village natal. Avec l’aide du SAVS, il y apporte actuellement des modifications en prévision de l’avenir où il aura moins de revenus : installation d’une douche, rénovation du système de chauffage … Depuis plusieurs années, il bénéficie d’une aide mise en place par le SAVS pour des courses mensuelles, sinon il fait seul ou s’arrange avec le voisinage. Il a toujours gardé son réseau au sein de son village et de ceux environnants. Ainsi, il fait partie de plusieurs clubs d’activités (pétanque, foot, pêche …), part en vacances tous les ans avec le même organisme, mais, surtout, entretient de bonnes relations avec le voisinage à qui il donne de nombreux coup de mains. Il trouve ainsi sa place et de la reconnaissance. Il sait qu’il ne s’ennuiera pas, et projette de continuer à profiter de tout cet environnement, à son rythme. En ce qui le concerne, l’organisation actuelle de la vie quotidienne répond à ses besoins, elle le satisfait et il n’envisage aucune modification à court terme. Quant à E9 son autonomie implique peu d’interventions du service dans ce domaine. Pour la même raison, il participe peu aux loisirs proposés. Par contre, son réseau relationnel est très restreint : « J’aime pas être embêté et puis moi j’aime pas embêter les autres » (E9) Il ne fait donc partie d’aucun club et n’est pas intégré dans son quartier. Il participe sporadiquement à quelques sorties proposées par le SAVS, sans intérêt pour le groupe constitué. De ce fait le SAVS, au travers de l’accompagnement individualisé occupe une grande place, et la relation qu’il entretient depuis 25 ans avec son référent est très importante. Au vu de ce descriptif, nous percevons qu’il manque des appuis pour construire un projet de retraite. De plus les éléments qui apparaissait avec nostalgie durant notre entretien croisent très peu ce qui caractérise son contexte de vie : ville/campagne, appartement en « bloc »/maison avec jardin, isolement/communauté villageoise, … Il habite dans un immeuble de zone urbaine, alors que ses racines sont du côté de la campagne et de la nature. Les besoins exprimés à propos de ces deux situations sont peu importants et stables. Ainsi, les interventions du SAVS ou des autres intervenants n’ont pas changé ces dernières années. 81 Par contre, nous avons des questions par rapport à l’avenir, et en lien avec la situation professionnelle que nous venons d’évoquer. 2.4.3. … soutien à la santé et suivi médical Le tableau nous permet de repérer que E10 ne manifeste pas de besoin particulier dans ce domaine, ce qui lui fait me dire : « Y’a les visites du travail » (E10) sinon, il contacte son médecin en fonction des problèmes courants éventuels. Le SAVS n’assure pas de coordination, mais reste attentif. Pour E9, la coordination s’intensifie du fait de symptômes liés au vieillissement : rhumatismes, trous de mémoire. L’accompagnement s’avère alors parfois nécessaire pour les rendez-vous auprès des spécialistes. Toutefois, le suivi avec le généraliste n’a pas besoin d’être médiatisé. Cette catégorie nous a permis d’aborder le thème du suivi dans l’emploi pour notre population de personnes de plus de 50 ans. Il est constitué d’actions diverses, telles que l’éclaircissement de la question administrative, l’étude des différentes possibilités d’aménagement du poste ou du temps de travail, la prise en compte des projets des personnes et des exigences des employeurs, l’étude de la modification des ressources … La réflexion nous a alors permis de dégager quelques points de questionnement : - quel est le positionnement de la personne par rapport à son âge et à sa génération ? - quel est son investissement dans le statut de travailleur ? - comment inscrit-elle les évènements dans son parcours de vie ? - quels appuis a-t-elle construits pour le présent et l’avenir, à partir de son expérience personnelle? Ces questions ne se veulent pas exhaustives, mais reprennent les éléments qui me sont apparus les plus stratégiques pour compléter l’accompagnement des travailleurs handicapés vers la fin de leur vie professionnelle. Pensée à partir de cette catégorie de bénéficiaires, car elle centre le sujet, cette réflexion s’élargit aussi aux autres catégories. Je pense notamment à celle que nous allons aborder maintenant et qui regroupe des bénéficiaires pour qui aucun changement dans le mode de vie n’est prévu à court terme. 82 2.5. Pour près d’un quart des bénéficiaires, il n’est pas noté d’augmentation E11 50 54 E12 55 59 E13 55 59 ESAT ESAT ESAT Marié 32 ans Curateur; loisirs ADAPEI Curateur; partenaires pour l’achat et Environ l’aménagement Célibataire 20 ans du logement Célibataire 8 ans Employeur; médecin Selon les besoins Réseau relationnel Aides au quotidien Partenaires médicaux Coordination SAVS avec … Ancienneté SAVS Situation familiale Ancienneté retraite Emploi Tranche d’âge des besoins Curateur; famille Famille; loisirs ADAPEI; quartier SAVS Soeur Fratrie ; ADAPEI -19- Tableau récapitulatif de la situation des bénéficiaires de la catégorie « E » Cette quatrième catégorie regroupe trois bénéficiaires, en activité professionnelle, sans modification significative des besoins ces deux dernières années. L’accompagnement est resté équivalent d’une année à l’autre. Le tableau présente davantage l’hétérogénéité des trois situations que des points communs. Effectivement, nous voyons apparaître la spécificité de chaque accompagnement, ainsi que les aides et les partenariats mis en place qui s’en trouvent diversifiés. Mais le mode de construction de mes catégories est basé, d’une part, sur l’évolution des besoins, et d’autre part, sur un classement, en fonction de l’intensité de ces besoins. Ces personnes ont donc en commun la non-intensification de leurs besoins, et la non-priorité d’un besoin commun par rapport aux autres. Toutefois, l’enquête a été l’occasion de quelques interrogations dans les différentes catégories de besoins. 83 2.5.1. Besoins en matière de maintien de la santé et de suivi médical Ces trois personnes ne font l’objet d’aucune pathologie physiologique lourde. Nous voyons plutôt ici des soucis courants liés à l’âge : « J’ai du cholestérol et de l’hypertension … » (E11) « J’ai arrêté la tapisserie parce que les yeux et le dos … » (E12) La question soulevée est celle de la détection des signes de vieillissement de la prévention. Notre population n’est pas toujours en mesure de faire part des petits dysfonctionnements, de prendre en charge la surveillance nécessaire, ou de gérer la modification des conduites à tenir. La déficience intellectuelle complique la reconnaissance et l’accompagnement de ces évolutions ordinaires. Actuellement le suivi des pathologies citées est bien pris en compte médicalement. Mais leur traitement relève aussi d’une prévention par l’hygiène de vie qui est du domaine de la vie quotidienne. Un deuxième axe de prévention concerne la réponse aux informations et convocations de dépistage pour les femmes et les hommes qui ont passé 50 ans. La difficulté peut être d’aller faire des examens, sans être malade. A propos de E12, une professionnelle constatait : « c’est difficile avec elle, elle ne veut pas prendre de rendez-vous. Pas de mammographie ni de suivi gynécologique depuis 5 ans … », la ménopause : « on n’en a jamais parlé » Cela implique que les personnes comprennent le sens de ces indications, qu’elles les situent dans le fonctionnement de leur corps, et dans les modifications qu’il subit avec le temps. Nous en revenons à la nécessité d’un accès aux informations et à des connaissances dont nous avons parlé plus haut. Sur les mêmes bases, le repérage des signes de vieillissement pourra être facilité. Si l’accompagnement leur en donne les moyens, ces personnes auront une meilleure capacité à identifier leurs difficultés, à avoir les mots pour le dire et à oser en parler. Mais si nous parlons de connaissances pour les bénéficiaires, il en va de même pour les professionnels des SAVS dont la formation intègre peu de données sur ce thème. Des connaissances minimales de base permettent des échanges argumentés, des observations ciblées, parfois des investigations plus précises pour conseiller les démarches utiles ou nécessaires. Il s’agit d’anticiper autant que faire se peut le repérage des troubles et de les situer dans le déroulement de la vie et de ses étapes. Le partenariat éventuel établi avec les médecins généraliste est alors un bon support. 2.5.2. Besoins en matière de vie quotidienne De façon globale, chacun se plait chez soi et l’organisation actuelle de la vie courante convient. 84 Nous noterons cependant qu’une personne a demandé des travaux d’aménagement de sa salle de bain, par anticipation des problèmes de mobilité liés à l’âge. En terme de prévention, les conduites alimentaires sont un sujet qui mobilise souvent les équipes des SAVS. Comme nous l’avons vu plus haut, l’accompagnement pour les courses alimentaires est souvent l’occasion de conseils. Une autre forme d’aide est pratiquée dans l’un des services, sous forme d’ateliers de cuisine et de conseils diététiques, conduits par un membre de l’équipe, qui a une formation de Conseillère en Economie Sociale et Familiale. Celle-ci me faisait remarquer que sa formation est un atout supplémentaire pour sa sensibilité à certaines questions concernant l’hygiène de vie et pour le développement de pratiques de soutien, à l’intention des usagers : apport de conseils sur l’alimentation en individuel ou en groupe, animation de cours de cuisine … Concernant leurs loisirs, ces personnes s’appuient sur le SAVS pour leur organisation. 2.5.3. Besoins en matière de suivi de la situation de travailleur Dans ce domaine également, aucun besoin particulier n’est signalé. Les paroles que j’ai entendues témoignent de la place du travail pour ces personnes. « c’est la coutume maintenant pour moi, l’usine ; depuis le temps que j’y suis (33 ans) … ils sont contents mes chefs … je sais à peu près tout faire … dans les jeunes, il n’y a que moi » (E11) « Ne reste qu’une médaille à avoir : le gros or, va être dure à avaler car on sait que c’est la dernière … ne plus voir les collègues ça va être très très dur) (E12) Comme d’autres auparavant, E11 et E12 mettent en valeur leur savoir-faire et leur disponibilité. Ces qualités fondent leur reconnaissance par leurs responsables, comme par leurs pairs. Ce regard des autres participe à leur construction personnelle et à leur estime de soi. Nous retrouvons ici les notions, développées par différents auteurs31, de « dépendance positive » et de « reconnaissance sociale ». Leur enracinement fortement majoritaire dans le statut de travailleur peut être une cause de refus de départ à la retraite ou de forte déstabilisation. On peut penser que la précocité de ce repérage chez les travailleurs pourrait permettre de les aider à trouver d’autres sources de reconnaissance et ainsi de prévenir certaines difficultés telles que celles présentées par exemple dans les situations de E3, E5, E4 ou E9. Par contre les situations de E1, E8 et E10 nous ont montré qu’un report ou un glissement d’investissement est possible. 31 Julien Del FABRO, Bernard AZEMA et Nathalie MARTINEZ en première partie 85 A la lumière des analyses ci-dessus, il pourrait être proposé que les dernières années de vie professionnelle soient l’occasion d’échanger sur les modalités de ce départ. Je veux parler des conditions administratives, financières, des exigences de l’employeur, le tout mis en regard avec les projets des personnes. En parlant du temps de travail ou des perspectives: (le temps plein) « tant que je peux … c’est le médecin qui va décider » (E12) « Le mi-temps, j’y ai pensé … je ne me suis pas renseigné … lui demander avant pour voir qu’est-ce qu’elle (la curatrice) en dit … oui ça me ferais du bien de me reposer un peu » (E11) « même s’ils me la donne pas, je m’arrête ; j’ai assez travaillé … de toutes façon à l’ESAT ils sont pas d’accord que je travaille deux ans de plus » (E13) Ces paroles traduisent davantage une soumission aux décisions d’ « autres » qu’une concertation entre les différents partenaires. Quant aux professionnels, ils confirment que cela se traite déjà avec l’employeur ou le curateur : « à certains moments, je trouve qu’il est fatigué … le mi-temps n’a pas été évoqué avec lui pour l’instant …il ne le demande pas …il faut voir au niveau de ses revenus » La question des revenus a déjà été évoquée (E10). Pour certains (les salariés du milieu ordinaire), elle peut modifier les conditions de vie matérielles qui sont alors à prévoir et peut-être à réorganiser. Ceci relève d’un partenariat étroit avec les curateurs puisque tous les travailleurs interviewés bénéficient d’une protection juridique, et une large majorité sur l’ensemble de la population des SAVS. Dans le cadre de l’accompagnement, cela peut aussi nécessiter des démarches auprès des services administratifs pour, par exemple, obtenir des projections de revenus ou établir des relevés de carrière. Puis il y a toutes les informations concernant les droits et contraintes des travailleurs à approfondir, à faire connaître aux intéressés pour leur permettre un choix. Enfin il reste le travail de partenariat avec les employeurs qui existe souvent et se renforce en cas d’étude d’aménagement du poste, de démarches administratives ou de suivi concernant la santé. Soulignons à nouveau le rôle majeur de la médiation et du partenariat que jouent les SAVS. La particularité de cette catégorie s’inscrivant plutôt du côté de la régularité, fait penser un peu à une période de latence. Pour autant il n’est pas évident quelle soit suivie d’une crise importante. Mais l’analyse des catégories précédentes nous montre que de nombreuses adaptations aux divers besoins liés au vieillissement seront nécessaires. Cette connaissance peut être une force pour prévenir, dès que possible, certains risques de déstabilisation future. 86 2.6. Conclusions de l’analyse La répartition des bénéficiaires dans les quatre catégories en fonction de l’intensité de leurs besoins et de la prédominance d’une catégorie de besoins par rapport à une autre (santé, vie quotidienne et travail), nous a permis d’avoir un échantillonnage de ces divers besoins. Pour chaque catégorie de bénéficiaires, commençant par la catégorie des besoins les plus conséquents nous avons terminé par celle des moins prégnants, voire ce qui, non identifié encore en terme de besoin, pourrait bénéficier d’une prévention. L’analyse des situations a permis de détailler la nature de ces besoins : soins du corps ou du psychisme, accompagnement dans les démarches, veille ou vigilance, informations, médiation avec les intervenants, coordination entre ces intervenants qui deviennent partenaires des professionnels … Elle nous a aussi montré en quoi ils sont liés au vieillissement et en quoi ils sont similaires à ceux de la population globale ou spécifiques à notre population (personnes handicapées mentales de plus de 50 ans). Présentant les réponses apportées par les SAVS, nous avons vu parallèlement les implications pour les professionnels en termes de compétences, d’adaptation, d’innovations, dans les limites des missions du service et des possibilités offertes par le contexte institutionnel. La synthèse de ces différents éléments fait l’objet du tableau ci-après : 87 Catégories de besoins Santé Vie quotidienne Situation/Travail Prestations mises en oeuvre Points qui ont soulevé ma réflexion Compensation du manque d'activité et de la disparition des repères; Proposition d'autres sources de reconnaissance; Accompagnement chez les médecins; Organisation du suivi des soins et traitements; Interventions accentuées du SAVS auprès des bénéficiaires et des partenaires; Aides à domicile; Partenariats renforcés ou créés; Orientation vers des maisons de retraite; Quelle préparation au changement de rythme de vie? Quelles solutions intermédiaires entre le SAVS et la maison de retraite? Anticipation de la nécessité d'objets d'investissements alternatifs; Quel financement pour les interventions à domicile lourdes chez les retraités; Soutien pour le transfert de l'investissement sur le travail vers d'autres objets; Courses avec le SAVS; Aides à domicile; Médiation avec les intervenants; Recherche et soutien pour la mise en place de loisirs adaptés; Partenariat avec les prestataires de loisirs; Vigilance médicale et partenariat avec les soignants; Partenariat avec le secteur des personnes âgées; Le travail sur "l'histoire de vie"; La cessation progressive d'activité; Les ajustements et le renforcement des partenariats avec le secteur des personnes âgées; Partenariat avec l'aide à Soutien à propos du domicile; changement de Médiation avec les artisans; statut et de mode de Médiation et coordination vie; avec le secteur médical selon Médiation avec les la demande; services Médiation et partenariat avec administratifs/retraite; l'employeur; Médiation avec Médiation pour les l'employeur; démarches administratives; Vigilance sur l'existence d'objets d'investissement hors activité professionnelle; Réflexion et soutien autour du parcours de vie; Catégories de bénéficiaires S Médiation; Coordination entre les soignants; Aide pour le suivi des soins et traitements; Aide pour le maintien de la santé; QS Aide pour le maintien de la santé; Accompagnement du deuil; Aide pour la compréhension et la prise en compte des effets du vieillissement; Coordination avec les soignants; T E Aide pour le maintien du bien-être; Aide pour la gestion du quotidien: alimentation, tâches ménagères, temps libre …; Aide pour les tâches ménagères; Permanence et adaptation des intervenants; Soutien pour les loisirs; Coordination avec l'aide à domicile Soutien autour de la prise en compte des troubles liés au vieillissement; Aide pour la réalisation de travaux d'aménagement de l'habitat; Coordination avec l'aide à domicile; Soutien pour le suivi des campagnes de dépistage; Aide pour la compréhension et l'appropriation de conduites de prévention de certaines maladies; Aide pour la compréhension, le repérage et la prise en compte des troubles liés au vieillissement; Aide pour la réalisation de travaux d'aménagement de la salle de bain; Aide pour la modification des conduites alimentaires; Veille ; Partenariat avec l’employeur Atelier cuisine; Vigilance pour le suivi des traitements; Soutien pour la gestion des loisirs; -20- Synthèse des conclusions de l’enquête qualitative 88 Amélioration des connaissances de notre population sur les changements physiologiques et les troubles liés au vieillissement; Préparation progressive au passage à la retraite; Troisième partie 89 DES BESOINS EMERGENTS ET DES PRATIQUES QUI S’ENRICHISSENT Au travers de cette analyse, nous avons pu constater l’existence de nombreux besoins liés au vieillissement des bénéficiaires. Nous avons aussi soulevé des points de questionnement sur des phénomènes particuliers. L’un d’eux retient particulièrement mon attention car je l’ai perçu dans ma pratique professionnelle. Il a été évoqué par mes collègues, mais surtout, il m’a été transmis massivement lors de certaines interviews avec les bénéficiaires. Je veux parler des liens qui sont faits entre la façon de penser l’avenir et des expériences antérieures appartenant essentiellement à la vie affective, souvent dans leur aspect douloureux. Rapidement, au fil des entretiens avec les bénéficiaires, j’ai le sentiment que la façon de parler de la retraite, la possibilité de se projeter ou la manière de le faire dépendent de leur histoire. En évoquant les projets possibles, plusieurs personnes font des allers et retour avec leur vie de jeune adulte voire de leurs souvenirs d’enfance. «Quand j’étais jeune, je ne comprenais rien du tout, je ne pensais pas, je me laissais vivre … c’est quand on vieillit qu’on se dit qu’est-ce qu’on a fait comme conneries » (E5) « Je ferai du crochet, j’adore le crochet, c’est ma maman qui m’a appris … » (E12) «Je vais peut-être trouver une petite maison, avec un petit jardin, il y en avait trois chez moi, ma maman … » (E9) Pour trois personnes, le questionnement sur l’avenir aboutit de façon répétée à un retour nostalgique sur le passé et à une impossibilité à s’engager dans une réponse sur le futur : « j’y pense pas non, je vis au jour le jour » (E5) « je sais pas, on peut rien dire … c’était quand même mieux avant que maintenant » (E9) « au début ça allait (il y a plus de 20 ans), j’avais mes enfants, et puis …si seulement je pouvais mourir demain » (E3) Je suppose que quelque chose se passe autour des relations affectives anciennes, qu’elles soient familiales, conjugales ou amicales. Leur nature et la façon dont elles ont évolué influent sur la manière d’aborder les changements dans l’organisation de sa vie. Les personnes qui auraient conservé des relations satisfaisantes seraient mieux armées pour organiser ou au moins faire face à la recherche du nouvel équilibre à trouver en fonction des changements dus au vieillissement. 90 Je suis alors plus attentive à la façon dont les interviewés me relatent leur histoire de vie, et aux liens qu’ils font entre le passé et le présent. Cela m’amène aussi à questionner davantage les professionnels sur les liens familiaux des bénéficiaires, ce qu’ils en savent et éventuellement s’ils y font référence dans leur travail d’accompagnement et, éventuellement, comment. La suite des entretiens confirme que vivre ou envisager cette période de rupture correspondant à la fin de l’activité professionnelle, réveille ou ravive des souvenirs, fait écho à des crises douloureuses parfois enfouies depuis de nombreuses années. « Des projets j’en ai jamais bien faits, je vivais avec mes parents, alors j’étais la p’tite gâtée. Après ça a été très dur quand ils sont morts. Je me suis retrouvée sans travail, sans argent. Il a fallu partir. Alors ça a été très dur déjà là. … » (E5) « j’ai perdu mon mari, et puis on m’a foutu dehors … avant, ma fille j’allais chez elle … ma maman à la maison de retraite … » (E3) « ils m’ont beaucoup rendu malade, des trucs de famille, j’en ai assez … » (E7) « elle a perdu sa mère très jeune, elle n’en avait jamais parlé jusque là … »(un professionnel) Ces souvenirs ressurgissent à un moment de nouvelle fragilité. Pour certaines personnes, ils semblent se surajouter au déséquilibre présent et bloquer leurs capacités à en construire un nouveau. Pour d’autres, un passé difficile ou les diverses expériences peuvent au contraire servir de moteur : « … j’aime encore bien rendre service aux gens, depuis l’âge de 14 ans … j’ai toujours fait comme ça … j’ai vécu dans la misère, si je prends une femme c’est pas pour la rendre malheureuse … » (E8) « quand je serai en retraite, je continuerai les activités … continuer pour pas se refermer sur soi » (E1) « j’ai réussi à élever comme il faut mes deux enfants, c’est le principal ; ma mère elle me prenait tout, et puis elle est partie … Pour moi, je trouve que c’est une bonne chose de préparer ma retraite comme ça … il ne faut pas attendre le dernier moment, parce que après, si je me retrouve loin, mes enfants comment ils viendraient voir leur mère » (E2) Le premier constat est donc que cette tranche de vie (plus de 50 ans), qui est caractérisée par des données objectives telles que l’âge, la situation par rapport à l’emploi, ou l’état de santé, est aussi à appréhender au regard du vécu des personnes. Le ressenti des évènements et les souhaits pour l’avenir s’enracinent dans les expériences, et ainsi les décisions seront prises ou acceptées en fonction des émotions induites. Aux besoins d’accompagnement dans les domaines cités, s’ajoutent des besoins plus complexes d’aide à l’inscription du vieillissement et de ses conséquences dans la trajectoire personnelle de chacun. L’objectif de l’accompagnateur sera de permettre à chaque bénéficiaire de se préparer à faire face aux divers changements de sa situation et à prendre en compte les nouvelles contraintes pour éviter de les subir. 91 Nous percevons alors la nécessité pour les professionnels d’avoir des connaissances adaptées pour faire face aux états de crise éventuels ou pour les anticiper. Ma réflexion et mes recherches m’ont orientées vers l’approfondissement de la notion de « crise d’identité », qui a été traitée par Claude DUBAR (2000). Pour l’auteur, les crises renvoient à l’idée d’une rupture d’équilibre ; elles peuvent être pensées comme des perturbations de la relation entre les éléments structurants de l’identification. Le changement de normes, de terminologie provoque une déstabilisation des repères et des systèmes symboliques antérieurs. Alors le fonctionnement psychique et la subjectivité sont remis en question. Lorsque « l’identité statutaire précédente vient d’être détruite, invalidée par autrui, qu’on ne peut être rien d’autre, il ne reste que l’identité primitive », celle qui vient des liens familiaux, communautaires … Pour l’individu, ne subsiste que son passé et ses racines. Ainsi toute crise identitaire renvoie à ces liens « premiers » de l’existence, provoque un retour aux sources pour combler le vide engendré par la perte. Celles-ci, correspondant à la relation avec la mère puis la famille et le groupe d’origine, sont revivifiées par la nostalgie. Mais si la crise implique « le double risque de repli communautaire et de fuite de soi », elle implique aussi « une double opportunité, celle de nouveaux liens sociaux et personnels et d’un nouveau souci de soi ». La chute ne peut être surmontée que par la clarification des relations entre l’ancienne et la nouvelle identité. Le rôle de l’accompagnateur est alors de « servir d’intermédiaire entre les anciennes identités en faillite et les nouvelles en gestation » et ainsi de permettre la reconstruction identitaire. Celle-ci se fera à partir de nouvelles références, de nouveaux repères, d’une « nouvelle définition de lui-même et donc des autres et du monde ». En conséquence, elle va consister à gérer d’une part de nouvelles relations avec les autres, et d’autre part la continuité de son histoire : passé, présent et avenir. L’identité personnelle est un processus qui compte l’appropriation de ressources, la construction de repères, un apprentissage expérientiel … qui peut permettre de rebondir, grâce aux crises dépassées. Toujours en mouvement, elle peut être soutenue par différents supports. Tout d’abord, nous avons vu que sur les treize bénéficiaires enquêtées, huit ont un suivi auprès d’un psychiatre ou d’un psychologue. L’objectif est de donner à ces personnes un lieu de parole privilégié. Raconter sa vie implique d’argumenter le fait que son histoire personnelle a un sens, c'est-à-dire une direction et une signification. Le tout étant rendu compréhensible par autrui. La même logique est à l’origine de la mise en place des groupes de parole pour les retraités, dans l’un des SAVS. Pour les mêmes raisons, cet exercice personnel peut représenter des risques pour certaines personnes. S’ils sont estimés trop importants, d’autres méthodes devront être trouvées et proposées : pratiques artistiques par exemple. 92 Ensuite l’accès des bénéficiaires à différentes informations (diététique, troubles du vieillissement, statut professionnel …), et à des activités adaptées peut permettre l’acquisition de connaissances et de savoirsfaire, favoriser le développement de nouveaux investissements et donner l’accès à des choix. Certains points font partie de l’accompagnement individualisé (échanges, démarches …) ou des activités développées de façon collectives (cuisine). La réflexion se poursuit au sein des SAVS, afin de proposer de nouvelles prestations ou de nouveaux partenariats adaptés aux nouveaux besoins, notamment en lien avec le secteur des personnes âgées. Ces supports sont proposés et mis en œuvre par divers professionnels. Au sein des SAVS, concernant l’accompagnement des personnes vieillissantes, les compétences se sont développées bien souvent au travers de l’expérience. En général, en termes de professionnalisation, les éducateurs spécialisés sont formés pour faire progresser des jeunes. Même lorsqu’ils accompagnent des adultes, ils se situent dans une logique d’apprentissages ou de maintien des acquis. Ce phénomène est semblable pour les assistant(e) s de service social ou les conseillères en économie sociale et familiale qui constituent aussi les équipes. Pour mémoire, je rappelle que l’enquête quantitative nous donnait la constitution des équipes des SAVS du Doubs. Avec le temps, il s’agit d’accepter certaines limites inévitables, ce qui peut entrer en contradiction avec son identité professionnelle. L’accompagnement est moins celui des acquis que celui de la « déprise ». De plus, l’avancée en âge des bénéficiaires va confronter les accompagnateurs au soutien de ces personnes dans des deuils éventuels, mais peut-être aussi dans leur fin de vie. Cette nouvelle étape de la vie fait courir un risque « d’abandon par anticipation » de la part des accompagnateurs qui pourraient estimer « que ce n’est plus la peine de mobiliser des efforts puisque la réparation du handicap n’est plus possible et la vieillesse est sans recours »32. Il convient alors de regarder différemment les personnes handicapées mentales : non plus comme des « jeunes » éternels, mais comme des adultes et des « aïeuls potentiels ». Toutefois, l’acceptation des limites et de leur accentuation doit aussi être l’occasion de la recherche permanente de solutions qui maintiennent l’autonomie33, en dépit de l’éventuelle progression de la dépendance. Pour cette raison, l’accompagnement des personnes handicapées mentales vieillissantes relève de compétences qui se croisent avec celles des professionnels du secteur des personnes âgées. La multiplication des partenariats établis par les SAVS permet progressivement son enrichissement. A la suite de l’évolution des compétences des professionnels, les besoins liés au vieillissement de la population des SAVS provoquent la recherche de nouvelles solutions institutionnelles. En effet, l’analyse des besoins des bénéficiaires de la catégorie « S » a mis en évidence les limites de l’accompagnement par 32 Nancy Breitenbach. Une saison de plus. 33 Thématique développée dans la première partie 93 ce type de service. Afin d’assurer leur sécurité, ces personnes sont orientées vers les maisons de retraite du milieu ordinaire. Toutefois nous percevons bien que d’autres possibilités plus adéquates seraient nécessaires. Cette idée est accentuée par l’obligation du fait de la loi,34 de proposer des réponses individualisées en matière de prise en charge. Les personnes que nous accompagnons sont habituées à leur autonomie et souhaitent généralement maintenir leur mode de vie, même si leurs besoins s’intensifient et nécessitent une aide plus régulière et plus soutenue que celle apportée et coordonnée par les SAVS. C’est dans cet esprit que j’ai évoqué plus haut deux autres formes d’accompagnement : celle des SAMSAH qui associent aux prestations des SAVS, des prestations de soins, et celle de structures innovantes basées sur le regroupement géographique d’appartements individuels. Ce type de projet a été proposé au schéma départemental du Doubs. Une création est en cours d’élaboration par une association du département. L’idée est d’allier un maintien à domicile, avec un soutien de proximité par différents professionnels dont les qualifications et les temps d’intervention restent à définir. Cet accompagnement se situerait entre celui des SAVS, devenu inadéquat, et celui des établissements, pas encore nécessaire dans sa totalité mais choisi par défaut. Il pourrait faire penser à celui des foyers logements, mais il se laisse la possibilité d’être plus éclaté et proposera des prestations plus adaptées à la déficience intellectuelle ; il recevra donc un public plus jeune et plus fortement porteur de handicap. Mes questions de professionnelle, associées à mes impressions d’enquêtrice ainsi qu’à la réflexion sur la crise identitaire m’amènent à répondre que nous pouvons parler de besoins émergents. La question de la construction identitaire de personnes handicapées mentales n’est qu’effleurée, au travers du repérage de crises. Nous avons parlé essentiellement de celle survenant chez certains bénéficiaires au moment de la fin de l’activité professionnelle. Mais au-delà de la perte du statut professionnel et du vieillissement qui apparaissent comme des composantes majeures de cette crise, les causes en sont plus complexes. Leur étude pourrait être l’objet d’une autre enquête. Néanmoins, face aux nouveaux besoins identifiés, nous pouvons noter une constante adaptation des réponses apportées. Celle-ci s’appuie sur les diverses compétences des professions représentées. Toutefois, le vieillissement n’a pas fait partie du contenu de formation de ces professionnels. Cette carence est compensée de diverses manières. Tout d’abord par la formation continue : participation à des groupes de réflexion, à des colloques ou des stages sur ce thème, qui sont de plus en plus nombreux Ensuite par le partenariat qui, nous l’avons vu, se développe. Il est établi avec des services d’aide et de soins à domicile, des médecins, et, ce qui est plus récent, en direction de structures relevant du secteur des personnes âgées. 34 Loi 2002-2 présentée dans la première partie 94 Arrivés au terme de l’analyse des besoins liés au vieillissement chez les personnes handicapées mentales, et des conséquences en matière d’accompagnement, nous pouvons formuler, de façon synthétique et non exhaustive cette confirmation de notre hypothèse : Au-delà d’une intensification de l’accompagnement, le vieillissement des personnes handicapées mentales nécessite également de: - former les professionnels sur le phénomène du vieillissement et son accompagnement - renforcer leurs connaissances sur la construction identitaire et sa dynamique, ainsi que sur la prévention et l’accompagnement des crises - proposer et développer de nouvelles réponses institutionnelles - construire des partenariats avec les différents secteurs d’intervention pouvant compléter l’accompagnement de ces bénéficiaires qui passent du monde du handicap à celui des personnes âgées. 95 CONCLUSION GENERALE Cette étude avait pour point de départ des observations et des questionnements concernant l’accompagnement par les SAVS des personnes handicapées mentales vieillissantes. Nous en avons dégagé deux axes de réflexion. Tout d’abord, il s’agissait d’identifier les besoins en lien avec l’avancée en âge, pour les bénéficiaires de ces services. Ensuite, nous avons souhaité repérer les adaptations mises en œuvre par les professionnels ainsi que les exigences, en termes d’accompagnement, pouvant émaner de ces nouveaux besoins. Notre recherche nous a permis de contextualiser cette réflexion et d’y apporter des précisions au travers des données de deux enquêtes. Dans un premier temps, au travers d’une étude bibliographique, nous constatons que les notions de handicap et de vieillesse évoluent parallèlement à la société qui les définit et que ce mouvement influence les orientations et la mise en œuvre des politiques sociales et médico-sociales. Les textes législatifs et règlementaires cités en sont l’expression de même que le développement de services tels que ceux évoqués. C’est également dans cette mouvance que le terme d’accompagnement est apparu et a été largement adopté. L’étude du vieillissement chez les personnes handicapées mentales nous montre pourquoi ce phénomène est récent, bien que les auteurs s’accordent à penser que la déficience mentale n’influe pas sur la longévité. En nous référant à la structure par âge de la population française, il est intéressant de faire des projections pour les années à venir. Il est évident que les tranches d’âge de la vieillesse vont voir leurs effectifs continuer à augmenter pour la population que nous avons étudiée. En conséquence, la question des besoins tant d’ordre quantitatif que qualitatif se pose dès à présent. Dans un deuxième temps, les enquêtes, sur le département du Doubs, nous donnent une approche quantitative puis qualitative des nouveaux besoins. Ils sont repérés dans trois grands domaines d’accompagnement et se déclinent avec une intensité très variable selon les bénéficiaires. Les besoins en matière de maintien de la santé et de suivi médical s’échelonnent depuis une simple vigilance à l’égard de la personne pour le maintien de sa santé, jusqu’à l’accompagnement chez les médecins, la coordination entre ces différents partenaires et l’organisation du suivi des soins et des 96 traitements. L’étude de la situation de trois bénéficiaires nous a permis d’évoquer les limites des interventions du SAVS dans ce domaine. Les besoins en matière de vie quotidienne se manifestent sous diverses formes qui se combinent de différentes manières selon les personnes. Nous avons parlé de besoins d’interventions de soutien en termes d’échanges, d’aide pour certaines démarches, de médiation avec les intervenants (aide à domicile, référents pour les loisirs, curateurs, …) et de mise en place d’actions collectives. Les besoins en matière de suivi de la situation de travailleur ne concernent que sept bénéficiaires. Selon leur âge et leurs difficultés par rapport à l’emploi, leurs besoins en termes de médiation avec l’employeur, de démarches administratives ou de préparation au passage à la retraite varient de manière significative. L’analyse permet de préciser dans quelle mesure ces besoins sont liés au vieillissement. Elle nous montre que, dans notre population, les processus ou les signes du vieillissement sont proches de ceux relevés dans la population globale. En revanche, leur repérage est moins aisé et leurs conséquences sont plus délicates à traiter. Sur ce point également, l’action des professionnels tend à organiser la compensation du handicap au travers de l’accompagnement personnalisé. Celui-ci est bien le cadre adapté pour apporter le soutien nécessaire à chacun : pouvoir repérer, nommer, comprendre, accepter, traiter les troubles liés au vieillissement, s’y adapter … puis assurer la médiatisation et la coordination avec les nouveaux partenaires. Nous avons aussi constaté que cette nécessaire adaptation aux nouveaux besoins des personnes handicapées mentales vieillissantes est toujours en réflexion et en construction. Elle se manifeste par la multiplication des interventions et par leur diversification, du fait de la proposition de nouvelles prestations ou de l’établissement de nouveaux partenariats. Nous avons aussi pointé la nécessité de réfléchir à de nouvelles formes de prise en charge compte tenu du nombre encore restreint des possibilités d’orientation offertes aux personnes qui nécessitent un accompagnement dépassant les missions du SAVS et parfois insuffisamment adapté dans les autres structures. Un dernier point mérite d’être précisé, il concerne la méthodologie. Celle-ci laisse apparaître ses limites : absence d’un groupe témoin et utilisation de données déclaratives notamment, mais elle a aussi permis de mettre en lumière des éléments peu développés dans les supports d’enquête. Effectivement, nous étions centrés sur les besoins d’aides pour les actes de la vie quotidienne, et sur les réponses apportées. Les données recueillies ont nourri leur analyse et leur compréhension. Mais parallèlement, les bénéficiaires ont fortement exprimé des besoins d’un autre ordre : estime de soi, appartenance, reconnaissance. Chaque service développe, face à cela, diverses formes d’accompagnement. Celles-ci font partie des missions spécifiques aux SAVS, et peuvent de façon globale être considérées être considérées comme leur plusvalue par rapport à d’autres services intervenant dans le secteur des personnes âgées. Certes, les personnes 97 handicapées sont amenées à passer, administrativement, du monde du handicap au monde des personnes âgées. Pour autant, leur bien-être et le respect de leur autonomie nécessiteront toujours un accompagnement spécialisé. Son exercice gagnera à la poursuite du travail de collaboration entre les différents professionnels et les décideurs du secteur social et médico-social. 98 Décret n° 2005-223 du 11 mars 2005 relatif aux conditions d'organisation et de fonctionnement des services d'accompagnement à la vie sociale et des services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés NOR: SANA0424257D Le Premier ministre, Sur le rapport du ministre des solidarités, de la santé et de la famille, Vu le code de l'action sociale et des familles, notamment son article L. 312-1 ; Vu le code de la santé publique ; Vu le code de la sécurité sociale ; Vu le code du travail ; Vu le code de l'éducation ; Vu le décret n° 2002-194 du 11 février 2002 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'infirmier ; Vu l'avis de la section sociale du Comité national de l'organisation sanitaire et sociale en date du 9 septembre 2004 ; Vu la saisine du conseil de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie en date du 15 novembre 2004, Décrète : Article 1 La sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre Ier du livre III du code de l'action sociale et des familles est complétée par un paragraphe 10 ainsi rédigé : « Paragraphe 10 « Services d'accompagnement à la vie sociale et services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés « Sous-paragraphe 1 « Services d'accompagnement à la vie sociale « Art. D. 312-155-5. - Les services d'accompagnement à la vie sociale ont pour vocation de contribuer à la réalisation du projet de vie de personnes adultes handicapées par un accompagnement adapté favorisant le maintien ou la restauration de leurs liens familiaux, sociaux, scolaires, universitaires ou professionnels et facilitant leur accès à l'ensemble des services offerts par la collectivité. « Art. D. 312-155-6. - Les services mentionnés à l'article D. 312-155-5 prennent en charge des personnes adultes, y compris celles ayant la qualité de travailleur handicapé, dont les déficiences et incapacités rendent nécessaires, dans des proportions adaptées aux besoins de chaque usager : « a) Une assistance ou un accompagnement pour tout ou partie des actes essentiels de I l'existence ; « b) Un accompagnement social en milieu ouvert et un apprentissage à l'autonomie. « Art. D. 312-155-7. - Dans le respect du projet de vie et des capacités d'autonomie et de vie sociale de chaque usager, les services définis à l'article D. 312-155-5 organisent et mettent en oeuvre tout ou partie des prestations suivantes : « a) L'évaluation des besoins et des capacités d'autonomie ; « b) L'identification de l'aide à mettre en oeuvre et la délivrance à cet effet d'informations et de conseils personnalisés ; « c) Le suivi et la coordination des actions des différents intervenants ; « d) Une assistance, un accompagnement ou une aide dans la réalisation des actes quotidiens de la vie et dans l'accomplissement des activités de la vie domestique et sociale ; « e) Le soutien des relations avec l'environnement familial et social ; « f) Un appui et un accompagnement contribuant à l'insertion scolaire, universitaire et professionnelle ou favorisant le maintien de cette insertion ; « g) Le suivi éducatif et psychologique. « Les prestations énumérées au présent article sont formalisées dans le cadre du dispositif mentionné au quatrième alinéa de l'article L. 311-4. « Art. D. 312-155-8. - Les prestations énumérées à l'article D. 312-155-7 sont mises en oeuvre par une équipe pluridisciplinaire comprenant ou associant tout ou partie des professionnels suivants : « a) Des assistants de service social ; « b) Des auxiliaires de vie sociale ; « c) Des aides médico-psychologiques ; « d) Des psychologues ; « e) Des conseillers en économie sociale et familiale ; « f) Des éducateurs spécialisés ; « g) Des moniteurs-éducateurs ; « h) Des chargés d'insertion. « Sous-paragraphe 2 « Les services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés « Art. D. 312-155-9. - Les services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés ont pour vocation, dans le cadre d'un accompagnement médico-social adapté comportant des prestations de soins, la réalisation des missions visées à l'article D. 312-155-5. « Art. D. 312-155-10. - Les services définis à l'article D. 312-155-9 prennent en charge des personnes adultes handicapées dont les déficiences et incapacités nécessitent, en sus des interventions mentionnées à l'article D. 312-155-6, et dans des proportions adaptées aux besoins de chaque usager : « a) Des soins réguliers et coordonnés ; « b) Un accompagement médical et paramédical en milieu ouvert. « Art. D. 312-155-11. - Le projet individualisé d'accompagnement comprend, en sus des prestations mentionnées à l'article D. 312-155-7, tout ou partie des prestations suivantes : « a) La dispensation et la coordination de soins médicaux et paramédicaux à domicile ou un accompagnement favorisant l'accès aux soins et l'effectivité de leur mise en oeuvre ; « b) Un accompagnement et un suivi médical et paramédical en milieu ordinaire de vie, y compris scolaire, universitaire et professionnel. Les prestations mentionnées au présent article sont formalisées dans le cadre du dispositif II mentionné au quatrième alinéa de l'article L. 311-4. « Art. D. 312-155-12. - Les prestations mentionnées à l'article D. 312-155-11 sont mises en oeuvre par une équipe pluridisciplinaire comprenant, en sus des personnels mentionnés à l'article D. 312-155-8, tout ou partie des professionnels suivants : « a) Des auxiliaires médicaux régis par le livre III de la quatrième partie du code de la santé publique ; « b) Des aides-soignants. « L'équipe pluridisciplinaire comprend ou associe dans tous les cas un médecin. « Sous-paragraphe 3 « Dispositions communes « Art. D. 312-155-13. - Les services définis aux articles D. 312-155-5 et D. 312-155-9 prennent en charge et accompagnent des personnes adultes handicapées de façon permanente, temporaire ou selon un mode séquentiel, sur décision de la commission mentionnée à l'article L. 146-9. « Les prestations correspondantes sont délivrées au domicile de la personne ainsi que dans tous les lieux où s'exercent ses activités sociales, de formation, y compris scolaire et universitaire, et ses activités professionnelles, en milieu ordinaire ou protégé, ainsi que, le cas échéant, dans les locaux du service. « Art. D. 312-155-14. - Les services mentionnés aux articles D. 312-155-5 et D. 312-155-9 sont autonomes ou rattachés à l'un des établissements ou services mentionnés aux 5° et 7° du I de l'article L. 312-1. « Tout service mentionné à l'alinéa précédent, autonome ou rattaché à un établissement, doit disposer de locaux identifiés permettant d'assurer son fonctionnement, d'organiser les prestations et de favoriser la coordination des personnels. « Ces locaux peuvent être organisés sous forme de plusieurs antennes. « Art. D. 312-155-15. - L'usager de l'un des services mentionnés aux articles D. 312-155-5 et D. 312-155-9 participe, avec l'équipe pluridisciplinaire mentionnée aux articles D. 312-155-8 et D. 312-155-12, à l'élaboration de son projet individualisé de prise en charge et d'accompagnement. Ce projet tient compte de son projet de vie et des préconisations de la commission mentionnée à l'article L. 146-9. « Art. D. 312-155-16. - Le service doit être doté des personnels mentionnés aux articles D. 312-155-8 et D. 312-155-12, dont le nombre et la qualification sont appréciés en fonction de la qualification du service, de sa capacité, de ses objectifs et de ses modalités d'organisation et de fonctionnement, tels qu'ils ont été définis dans le projet de service. « En outre, l'équipe pluridisciplinaire de chaque service peut comporter, en tant que de besoin et dans le respect du projet de service, tout professionnel susceptible de concourir à la réalisation de sa mission. « L'ensemble des intervenants susmentionnés participent à la réalisation du projet individualisé de prise en charge et d'accompagnement de la personne adulte handicapée. « Art. D. 312-155-17. - Les membres de l'équipe pluridisciplinaire des services mentionnés aux articles D. 312-155-5 et D. 312-155-9 possèdent les diplômes ou les titres à finalité professionnelle nécessaires à l'exercice de leurs compétences. « Les personnels mentionnés aux articles D. 312-155-8 et D. 312-155-12 peuvent être salariés du service ou de la structure à laquelle il est rattaché ou exercer en libéral lorsqu'ils sont habilités à pratiquer ce mode d'exercice. Dans ce dernier cas, les professionnels libéraux concluent avec la personne morale gestionnaire une convention précisant notamment III l'engagement du professionnel libéral à respecter le règlement de fonctionnement et le projet de service, ainsi que les modalités d'exercice du professionnel au sein du service visant à garantir la qualité des prestations. « Sans préjudice des dispositions de l'alinéa précédent, des conventions fonctionnelles peuvent être passées, avec des personnes physiques ou morales intervenant dans les secteurs social, médico-social et sanitaire proches du domicile de la personne adulte handicapée, pour la réalisation de prestations complémentaires ou de proximité. « Art. D. 312-155-18. - Lorsque le service défini aux articles D. 312-155-5 ou D. 312-155-9 intervient sur un lieu de formation ou de travail, une convention, signée par la personne handicapée, est passée pour la durée de l'intervention avec la personne physique ou morale de droit public ou privé responsable de l'établissement accueillant la personne handicapée ou employant celle-ci. « Cette convention précise les conditions d'intervention du service, la liste des personnels amenés à intervenir auprès de la personne handicapée avec leur qualification et leur statut, ainsi que leurs modalités d'intervention sur les lieux où s'exercent l'activité de formation, y compris scolaire et universitaire, et l'activité professionnelle. « Dans le respect des dispositions de l'article L. 311-3 ainsi que des attributions et des contraintes de chacun, la coopération entre le service d'accompagnement à la vie sociale ou le service d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés et la personne physique ou morale de droit public ou privé visée au présent article doit permettre : « a) D'informer l'ensemble des personnes composant l'environnement de la personne handicapée des besoins de celle-ci ; « b) D'identifier les difficultés susceptibles de survenir et de définir les actions permettant d'y mettre fin ou de les éviter ; « c) De conduire une évaluation périodique des besoins de la personne handicapée afin de procéder, le cas échéant, aux adaptations nécessaires. « Art. D. 312-155-19. - Les services mentionnés aux articles D. 312-155-5 et D. 312-155-9 doivent satisfaire aux conditions techniques d'organisation et de fonctionnement prévues par le présent paragraphe dans un délai de trois ans à compter de la publication du décret n° 2005223 du 11 mars 2005 relatif aux conditions d'organisation et de fonctionnement des services d'accompagnement à la vie sociale et des services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés. » Article 2 Le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité, la ministre déléguée à l'intérieur et la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française. Fait à Paris, le 11 mars 2005. IV Enquête sur l'accompagnement des personnes handicapées mentales de 50 ans et plus par les SAVS du Doubs en 2006 Fiche Service Nom du service : Année d'ouverture : Adresse : Téléphone : Mél : L'équipe : Qualification des professionnels Educateurs spécialisés Assistants de services sociaux Nombre (en ETP) Conseillère en économie sociale et familiale Animateurs socio-culturels Psychologues Autres (à préciser) Autres (à préciser) Nombre d'accompagnements par ETP: Les bénéficiaires : Population totale accompagnée par le service Hommes Moins de 25 ans De 25 à 29 ans De 30 à 34 ans De 35 à 39 ans De 40 à 44 ans De 45 à 49 ans De 50 à 54 ans De 55 à 59 ans De 60 à 64 ans De 64 à 69 ans De 70 à 74 ans De 75 à 79 ans Plus de 79 ans Total V Femmes Total Les entrées dans le service des usagers de 50 ans et plus en 2004, 2005 et 2006 Utiliser le numéro identifiant créé sur la fiche individuelle Pour chaque personne, plusieurs choix sont possibles (utiliser une numérotation croissante de 1 à x par ordre décroissant d'importance) Origine de la demande d'accompagnement Identifiant Usager Famille Curateur Tuteur ESAT Autre employeur EA MO Autre service Lequel? Autre origine Lequel? Prestations contenues dans la demande d'accompagnement Identifiant Nommer les prestations attendues Commentaires VI Les sorties du service pour les usagers de 50 ans et plus en 2004, 2005 et 2006 Utiliser le numéro identifiant créé sur la fiche individuelle Pour chaque personne, cocher la case décès ou indiquer le type de structure qui a pris votre relais Identifiant Décès Type d'accueil suivant Les demandeurs du changement de structure Pour chaque personne, plusieurs choix sont possibles (utiliser une numérotation croissante de 1 à x par ordre décroissant d'importance) Identifiant Usager Famille Service Autre Qui? Les causes du changement de structure Pour chaque personne, plusieurs choix sont possibles (utiliser une numérotation croissante de 1 à x par ordre décroissant d'importance) Identifiant Comportements à risques Suivi de la santé Solitude Commentaires: VII Autres Lesquels? Enquête sur l'accompagnement des personnes handicapées mentales de 50 ans et plus par les SAVS du Doubs en 2006 Fiche individuelle Homme Femme Numéro identifiant pour ce premier questionnaire (de 1 à x selon le nombre de personnes concernées) Année de naissance Année d'entrée au service Sortie en 2006 Oui Non Protection juridique Oui Non Temps partiel Retraite Sans emploi Temps de travail Temps plein Les interventions par domaine d'accompagnement Cochez les domaines et la fréquence moyenne des interventions Evolution sur les deux dernières années Fréquence de l'intervention Quotidien Plusieurs fois par semaine Une fois par semaine Une fois Une fois par quinzaine par mois Vie quotidienne (pratique et relationnelle) Santé et suivi médical Maintien dans le logement Administratif Gestion du budget Transports et moyens de communication Loisirs et vacances Emploi Vie sociale postprofessionnelle (si différente de celle extra-professionelle) Autre Autre Observations: VIII Autre Stable En baisse En hausse Les différents partenariats Indiquez, pour chaque domaine, le partenariat existant Utilisez les lettres suivantes: E pour existant, stable R pour renforcé en 2005 et 2006 C pour créé en 2005 et 2006 Autre:………………….. Autre:………………….. Institution pour personnes âgées IX Employeur Autre Taxi Autre Sociétés de transport Vie sociale postprofessionnelle (si différente de celle extra-prof.) Banques Emploi Services administratifs Gestion du budget Transports et moyens de communication Loisirs et vacances Curateur ou tuteur Administratif Services pour l'aménagement intérieur Logement Bailleurs Service de soins Psychiatre/psychologue Médecin spécialiste Médecin généraliste Organisme pour les vacances Organisme pour les loisirs Famille Auxiliaire de vie Aide ménagère Vie quotidienne (pratique et relationnelle) Santé et suivi médical La coordination des différents intervenants Oui Non Selon les domaines Une coordination est-elle nécessaire ? Entre l'usager et les intervenants Entre les partenaires Si oui, assurez-vous cette coordination ? Si non, existe-t'il une autre possibilité de coordination? Si la fonction de coordination est assurée par d'autres personnes et services, pouvezvous les énumérer? Commentaires: X Employeurs 6% 22% 72% Existant Renforcé Créé -12- Le partenariat dans le domaine de l’emploi : avec les employeurs Logement 0,350 0,300 0,250 0,200 0,150 0,100 0,050 0,000 F am ill e Ba e ill ur s Se es ic v r r Cu Existant e at Renforcé XI s ur ou u te tu créé r Ba u nq es -13- Le partenariat dans le domaine du logement Loisirs et vacances 0,400 0,350 0,300 0,250 0,200 0,150 0,100 0,050 0,000 m Fa il l e an rg O m is es de rg O Existant l rs si i o m is an es de s ce n ca va ur te a r Cu Renforcé ou r eu t tu Créé -14- Le partenariat dans le domaine des loisirs et des vacances Vie quotidienne 0,350 0,300 0,250 0,200 0,150 0,100 0,050 Existant tu te u r e i ll m ro u Fa at eu ai il i Cu r Au x Ai d e m re én de ag èr vi e e 0,000 Renforcé XII créé -15- Le partenariat dans le domaine de la vie quotidienne Besançon, le 12 janvier 2008 Agnès BOREY Tel. personnel: Tel. professionnel : e.mail : SAVS de Bonjour, En mai-juin 2007, je vous ai sollicité pour répondre à une enquête concernant l’accompagnement des personnes handicapées mentales de 50 ans et plus. La participation des 7 SAVS concernés dans le département du Doubs m’a permis de remarquer pour cette population : - une densification de l’accompagnement pour environ un tiers d’entre eux, notamment dans les domaines de la santé, de la vie quotidienne et de l’emploi. - Une hausse simultanée de l’accompagnement dans le domaine de la santé et dans d’autres domaines. - Le renforcement ou la création de partenariats, en particulier avec les professionnels du secteur médical, puis avec les employeurs et les aides ménagères. - Une coordination avec les partenaires pour la majorité des usagers. Son intensité n’a pas été mesurée, mais nous la savons en lien avec l’évolution du partenariat. Cette brève enquête quantitative semble donc étayer l’hypothèse que le vieillissement, chez les personnes handicapées mentales accompagnées par les SAVS, génère des besoins nouveaux. Je souhaite maintenant, par une enquête qualitative, déterminer la nature de ces nouveaux besoins : d’une part ceux concernant les personnes handicapées mentales elles-mêmes et d’autre part, ce qui en est la conséquence, ceux concernant l’accompagnement proposé. Je fais l’hypothèse que les professionnels, s’adaptant à chaque situation, sont amenés à faire évoluer leur accompagnement et que celui-ci s’ouvre à de nouvelles formes, nécessite de nouveaux savoirs ainsi qu’une diversification des partenariats … Je sollicite donc à nouveau votre aide pour cette enquête complémentaire. Afin de recueillir les informations nécessaires à une analyse, j’ai choisi de faire quelques études de situations. J’utilise le terme situation car je souhaite pouvoir travailler, non XIII seulement avec les données concernant les personnes elles-mêmes, mais aussi avec des données contextuelles. La lecture se fera en référence à la CIF, et intègrera la notion de « projet de vie ». Pour ces raisons, que nous pourrons approfondir si vous le souhaitez, mon enquête nécessitera deux types d’enregistrements : celui d’un ou deux entretiens que je mènerai avec chaque bénéficiaire, puis un autre d’un professionnel de votre service qui me permettra de récolter des données plus précises sur la trajectoire de la personne, les projets en cours ou envisagés et les spécificités développées dans l’accompagnement pour y répondre. Les éléments ayant trait à la trajectoire de vie sont pour moi ceux qui relèvent de son histoire tant familiale, sociale que de sa dépendance ou non par rapport aux institutions. Ceux aussi qui influencent son mode de vie et ses choix, ceux qui trop faibles ou n’ayant pas été valorisés pénalisent la construction de la période de la retraite. Il sera intéressant pour moi de faire correspondre les souhaits des personnes avec les projets évoqués, ceux mis en place et de repérer les raisons des choix qui ont été faits (faisabilité, compétences utilisées chez chacun, disponibilités diverses, limites rencontrées …) Auprès de vos bénéficiaires, je me présenterai en tant que personne venant de l’université de Dijon et faisant une étude sur l’accompagnement des personnes de 50 ans et plus. Je leur dirai que je cherche à comprendre comment se passe leur vie, quels sont les éventuels changements survenus ces dernières années, et comment ils envisagent les années à venir. Vous trouverez ci-joint, à titre indicatif, le document qui me servira de guide pour les entretiens de récolte des informations auprès des professionnels. Je vous laisse le soin de le compléter au gré des besoins relatifs à chaque situation, en attendant notre rencontre prochaine. Je reste à votre disposition pour toute précision complémentaire, et vous remercie encore pour votre précieuse collaboration. Cordialement, XIV GUIDE D’ENTRETIEN 1. IDENTIFICATION Madame Mademoiselle Monsieur Année de naissance Situation professionnelle : - Salarié depuis l’année … - Ouvrier d’ESAT depuis l’année … - Retraité depuis l’année … Types de revenus : - Salaire - Rémunération garantie (ESAT) - AAH - APA - Autres, à préciser : Situation familiale : Célibataire Marié Concubin Séparé, divorcé, veuf Vit seul : Si non, autres personnes vivant au foyer et leur lien de parenté - Existence d’une famille Protection juridique : Aucune Curatelle Si curatelle ou tutelle, gérée par : Famille organisme de tutelle Tutelle Privé Date d’entrée au SAVS 2. LOGEMENT XV Type de logement A préciser Urbain Statut: Locataire Rural Semi-urbain Propriétaire Autre, à préciser Aménagements du logement : - déjà réalisés Etude, initiative, coordination : qui ? - à envisager : Lesquels ? demande, étude, décision, coordination : qui ? Déménagement à envisager : Si oui, pourquoi ? demande, étude, décision, coordination : qui ? Positionnement et antécédents /logement /mobilité 3. CONTEXTE ENVIRONNEMENTAL Accessibilité des services (commerces, banque, coiffeur …) : - Oui (seul), pour lesquels ? - Non, pourquoi ? - Avec difficultés, lesquelles et pour quels services ? Les habitudes de vie par rapport à ces services ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui, quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement. Accessibilité des soins (médecins, kiné….) : - Oui (seul), pour lesquels ? - Non, pourquoi ? - Avec difficultés, lesquelles et pour quels soins ? Les habitudes de vie par rapport à ces services ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui, quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement. Transports : Véhicule personnel Si oui, quel type ? Transports en commun : - Inexistants - Existants - Utilisés - Non utilisés, pourquoi ? XVI Autres moyens de transport utilisés Les habitudes de vie par rapport à ces services ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui, quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement : Intégration sociale - loisirs : milieu ordinaire ou SAVS - existence de relations dans le milieu ordinaire ? - habitudes de vie/milieu ordinaire /SAVS 4. PARCOURS PROFESSIONNEL Personne encore en activité : Si oui, quelles sont les perspectives ? Descriptif du parcours (non)professionnel des 20 dernières années : Quelle est l’importance du travail ? Le poste de travail a-t-il été aménagé ? Si oui, quand, pourquoi ? Le temps de travail a-t-il été aménagé ? Si oui, quand et pourquoi ? Interventions du SAVS auprès de l’employeur Si oui, lesquelles, quand, pourquoi, à quelle fréquence ? 5. SITUATION MEDICALE Difficultés de santé ? Si oui – lesquelles ? - depuis quand ? - quelles en sont les conséquences ? Comment et par qui ces difficultés sont-elles actuellement prises en compte (spécialistes, SAVS, famille, …) ? Ces difficultés sont-elles amenées à évoluer ? Quelles sont les perspectives ? Y a t il une coordination médicale? Par qui ? XVII 6. VIE DOMESTIQUE - besoin d’une aide ménagère d’une auxiliaire de vie ou d’autres intervenants. Pour quelles tâches ? - gestion des repas (fabrication, conservation, courses …) - gestion des traitements médicamenteux - gestion du linge (entretien, achat…) - hygiène de vie - gestion des imprévus - réseau relationnel Les habitudes de vie dans ce domaine ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui, quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement ? « Le vieillissement » : qu’est-ce que cela évoque ? 7. L’AVENIR 7.1. Les points d’appuis ou faiblesses Quels sont les éléments du parcours de vie qui alimentent les choix ainsi que les projets ? Quelle (in)dépendance/SAVS ? 7.2. Quelles projections pour les années à venir ? XVIII ETUDE DE SITUATION 2. IDENTIFICATION Madame Mademoiselle Monsieur Année de naissance : Situation professionnelle : - Salarié depuis l’année : - Ouvrier d’ESAT depuis l’année : - Retraité depuis l’année : Types de revenus : - Salaire - Rémunération garantie (ESAT) - AAH - APA - Autres, à préciser : Situation familiale : Célibataire Marié Concubin Séparé, divorcé, veuf Vit seul : - Oui - Non, dans ce cas préciser le nombre de personnes vivant au foyer et leur lien de parenté : - Existence d’une famille Protection juridique : Aucune Curatelle Tutelle Si curatelle ou tutelle, gérée par : Famille organisme de tutelle Privé XIX Date d’entrée au SAVS : 2. LOGEMENT Type de logement : Domicile personnel Autre, à préciser : Urbain Statut: Locataire Institution pour personnes âgées Rural Semi-urbain Propriétaire Autre, à préciser Aménagements du logement : *déjà réalisés : - Non, sans objet - Oui, quand et lesquels : Etude, initiative, coordination : qui ? *à envisager : - Non, sans objet - Oui, lesquels et dans quels délais : Demande, étude, décision, coordination : qui ? Déménagement à envisager : - Non - Oui, pourquoi : Demande, étude, décision, coordination : qui ? Positionnement et antécédents /logement /mobilité 3. CONTEXTE ENVIRONNEMENTAL Accessibilité des services (commerces, banque, coiffeur …) : - Oui (seul), pour lesquels : - Non, pourquoi : - Avec difficultés, lesquelles et pour quels services: XX Famille d’accueil Les habitudes de vie par rapport à ces services ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui, quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement : Accessibilité des soins (médecins, kiné….) : - Oui (seul), pour lesquels : - Non, pourquoi : - Avec difficultés, lesquelles et pour quels soins: Les habitudes de vie par rapport à ces services ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui, quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement : Transports : Véhicule personnel : - Non - Oui, quel type Transports en commun : - Inexistants - Existants - Utilisés - Non utilisés, pourquoi : Autres moyens de transport utilisés : Les habitudes de vie par rapport à ces services ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui, quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement : Intégration sociale -loisirs : milieu ordinaire ou SAVS -existence de relations dans le milieu ordinaire ? -habitudes de vie/milieu ordinaire /SAVS XXI 4. PARCOURS PROFESSIONNEL Personne encore en activité : - Non - Oui, quelles sont les perspectives : Descriptif du parcours (non)professionnel des 20 dernières années : Quelle est l’importance du travail pour cette personne ? Le poste de travail a-t-il été aménagé ? - Non - Oui, quand, pourquoi : Le temps de travail a-t-il été aménagé ? - Non - Oui, quand, pourquoi (âge, fatigabilité, perte de compétence …): Interventions du SAVS auprès de l’employeur : - Non - Oui, lesquelles, quand, pourquoi, à quelle fréquence : 5. SITUATION MEDICALE Difficultés associées à la déficience intellectuelle : - Non - Oui, lesquelles (mobilité, équilibre psychique, addiction, communication …), depuis quand et quelles en sont les conséquences : Comment et par qui ces difficultés sont-elles actuellement prises en compte (spécialistes, SAVS, famille, …) : Ces difficultés sont-elles amenées à évoluer ? Quelles sont les perspectives ? Y a t il une coordination médicale? Par qui ? XXII Quelles sont les limites repérées dans le suivi médical par le SAVS ? 6. VIE DOMESTIQUE -besoin d’une aide ménagère d’une auxiliaire de vie ou d’autres intervenants. Pour quelles tâches ? -gestion des repas (fabrication, conservation, courses …) -gestion des traitements médicamenteux -gestion du linge (entretien, achat…) -hygiène de vie -gestion des imprévus -réseau relationnel Les habitudes de vie dans ce domaine ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui, quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement : « Le vieillissement » : est-ce une notion abordée par cette personne ou avec elle? Pour quelles raisons ? Comment ?… 7. L’AVENIR 7.1. Les points d’appuis ou faiblesses de la personne Quels sont les éléments du parcours de vie de cette personne qui, à votre avis, alimentent les choix de la personne ainsi que les projets évoqués et mis en place (habitudes personnelles ou familiales, sources de satisfaction, évènements marquants, intégration dans l’environnement, changements dans la situation personnelle ou environnementale…)? Quelle (in)dépendance/SAVS 7.2. L’évolution pressentie des besoins pour les années à venir - pour la personne - dans l’accompagnement en termes de compétences, de partenariats, de préparation à la période post-professionnelle … 7.3. Informations complémentaires Afin de permettre à cette personne un déroulement de sa vieillesse qui allie à la fois ses souhaits et sa protection, auriez-vous des propositions complémentaires à formuler ? XXIII ANNEXES Décret n° 2005-223 du 11 mars 2005 ……………………………………………Pages I à IV ENQUETE QUANTITATIVE Fiche service …………………………………………………………………………..Pages V à VII Fiche individuelle ……………………………………………………………………..Pages VIII à X GRAPHIQUES COMPLEMENTAIRES Partenariat dans le domaine de l’emploi : avec les employeurs ………………………. Page XI Partenariat dans le domaine du logement ……………………………………………. Page XI Partenariat dans le domaine des loisirs et vacances …………………………………... Page XII Partenariat dans le domaine de la vie quotidienne ……………………………………. Page XII ENQUETE QUALITATIVE Courrier ………………………………………………………………………………..Pages XIII à XIV Guide d’entretien …………………………………………………………………….Pages XV à XVIII Etude de situation …………………………………………………………………Pages XIX à XXIII GLOSSAIRE ADAPEI : Association Des Amis et Parents d’Enfants Inadaptés CDAPH : Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées CHU : Centre Hospitalier Universitaire CIF : Classification Internationale du Fonctionnement CMP : Centre Médico-Psychologique ESAT : Etablissements et Services d’Aide par le Travail IRV : Institut Régional du Vieillissement SAMSAH : Service d’Aide Médico-Sociale pour Adultes Handicapés SAVS : Service d’Accompagnement à la Vie Sociale URCAM : Union Régionale des Caisses d’Assurance Maladie BIBLIOGRAPHIE Livres et revues : AGUESS C. (2003), La vieillesse : entre respect et âgisme, in Doc’Animation en gérontologie n°13, octobre-décembre 2006. AUTES M. (2000), in Actes des 14èmes journées nationales de formation, M.A.I.S. AZEMA B. et MARTINEZ N. (2005), Les personnes handicapées vieillissantes : espérances de vie et de santé ; qualité de vie. Une revue de la littérature, in Revue Française des Affaires Sociales n°2, avril-juin 2005. BARBE L. (2006), Une autre place pour les usagers ? Intervenir dans le secteur social et médicosocial, La Découverte, Paris. BELORGEY JM. (1999), Actes des 13èmes journées nationales de formation, M.A.I.S. BLANCHET A. et GOTMAN A. (2005), L’enquête et ses méthodes, Collection 128 BOURDELAIS P. (1997), in CHAUVIN K. (2003), le vieillissement des personnes handicapées mentales, Editions ENSP ZRIBI G., et SARFATY J. BREITENBACH N. (1999), Une saison de plus (Handicap mental et vieillissements), Desclée de Brouwer BRUNEAU M.O. (1999), Comprendre et accompagner les parents avec une déficience intellectuelle, Gaëtan Morin, Europe. 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NOM : BOREY PRENOM: Agnès DATE DU JURY: 5 et 6 février 2009 FORMATION : Diplôme Supérieur en Travail Social TITRE : Le vieillissement des personnes handicapées mentales vivant à domicile: un défi pour les SAVS RESUME : Ces dernières années, les Services d’Accompagnement à la Vie Sociale (SAVS) pour personnes handicapées mentales voient une partie importante de leurs usagers arriver à l’âge de la retraite. A l’image de la population globale, ces personnes bénéficient d’un allongement de leur espérance de vie et souhaitent le plus souvent maintenir leur mode de vie en milieu ordinaire. Les SAVS se trouvent alors confrontés à une nouvelle problématique: quels sont les besoins d’accompagnement générés par le vieillissement des personnes handicapées mentales et en quoi ces besoins transforment-ils les pratiques des professionnels ? Ces questions nous ont conduit à approfondir tout d’abord la notion de handicap puis les notions de vieillesse et de vieillissement, et enfin celle d’accompagnement. Leur étude nous montre que leur perception et leur prise en compte progressent en lien avec l’évolution de la société. Du point de vue de l’histoire des politiques sociales, le monde des personnes handicapées et celui des personnes âgées se sont développés dans une relative ignorance réciproque jusque dans les années 80. Chacun avait construit parallèlement sa propre politique sociale catégorielle correspondant à sa culture. Depuis lors, les personnes handicapées bénéficient d’une longévité nouvelle qui bouscule les pratiques et les représentations. Elles atteignent et dépassent l’âge de la retraite ; elles intègrent ainsi le monde des personnes âgées. Ce passage d’un monde à l’autre force les limites de chaque politique catégorielle et impose la nécessité d’établir des passerelles. Ensuite, une réflexion autour du terme accompagnement permet d’en préciser le sens et la traduction dans les pratiques professionnelles. Ces dernières s’inscrivent dans un soutien à la construction du sujet et à sa socialisation. A la suite de cette recherche bibliographique, deux enquêtes menées auprès des bénéficiaires et des professionnels des SAVS du Doubs situent les besoins dans trois domaines: la santé, la vie quotidienne et la situation professionnelle. Ces besoins génèrent non seulement une densification des interventions mais aussi une nouvelle adaptation des pratiques. Celle-ci passe par l’acquisition de nouveaux savoirs et le renforcement des partenariats, notamment avec les services permettant le maintien à domicile et avec le secteur gérontologique. NOMBRE DE PAGES : 98 VOLUME ANNEXE : 0 CENTRE DE FORMATION : IRTESS de DIJON