Le vieillissement des personnes handicapées mentales vivant à

Transcription

Le vieillissement des personnes handicapées mentales vivant à
Agnès BOREY
IRTESS de Dijon
DIPLOME SUPERIEUR EN TRAVAIL SOCIAL
LE VIEILLISSEMENT DES PERSONNES HANDICAPEES
MENTALES VIVANT A DOMICILE :
UN DEFI POUR LES SAVS
(L’évolution des besoins et des réponses)
Directeur de mémoire :
Patrick GUYOT
Février 2009
Tous mes remerciements vont
Aux personnes qui ont accepté de témoigner
A celles qui ont prêté leur concours à l’élaboration de cette recherche
A mon directeur de mémoire
Et tout particulièrement à Geneviève
SOMMAIRE
INTRODUCTION ……………………………………………………………………………….Page 1
Première partie
CHAPITRE 1 : HANDICAP, VIEILLESSE ET VIEILLISSEMENT ……………………..…Page 6
1.1. A propos du handicap ………………………………………………………………………Page 6
1.1.1. La loi de 1975 ………………………………………………………………………....Page 7
1.1.2. La classification internationale du handicap (CIH) ………………………………..….Page 7
1.1.3. La classification internationale du fonctionnement (CIF) …………………………….Page 8
1.2. A propos de la vieillesse et du vieillissement dans notre société………………………….Page 9
1.2.1. Approche démographique ………………………………………………………….….Page 9
1.2.2. Approche générale ………………………………………………………………..….Page 11
1.2.3. Approche sociologique …………………………………………………………..…..Page 14
1.2.4. Approche médicale …………………………………………………………………..Page 15
1.3 Le vieillissement chez les personnes handicapées mentales ……………………………..Page 16
1.3.1. Un phénomène évolutif ……………………………………………………….….…..Page 16
1.3.2. Un effet cumulatif : de la déficience s’ajoute à la déficience ………………………..Page 17
1.3.3. Des besoins spécifiques aux personnes handicapées mentales ………………..……..Page 19
1.3.4. ... mais aussi des besoins similaires à ceux des personnes âgées ………………….....Page 20
1.4. Quelques repères législatifs et règlementaires ……………………………………….…..Page 20
1.4.1. La loi n° 2002-2 ………………………………………………………….…………..Page 20
1.4.2. Le décret n°2005-223 …………………………………………………………….…..Page 21
1.4.3. La loi n° 2005-102 ……………………………………………………………….…..Page 22
1.4.4. Les services d’assistance à domicile ……………………………………………..…..Page 24
1.4.5. L’allocation personnalisée d’autonomie ……………………………………………..Page 24
1.5. Conclusion …………………………………………………………………………...……..Page 25
CHAPITRE 2 : L’ACCOMPAGNEMENT : de la théorie à la pratique ………………..…..Page 26
2.1. L’accompagnement tel qu’on le définit……………………………………………….…..Page 26
2.2. Quelques soutiens et repères de l’accompagnateur ……………………………………..Page 29
2.2.1. Le partenariat ………………………………………………………………………...Page 29
2.2.2. Différentes figures relationnelles ……………………………………...……………..Page 30
2.2.3. Une éthique commune …………………………………………………………...…..Page 31
2.2.4. Des compétences ……………………………………………………………………..Page 33
2.3. L’accompagnement : pour quoi et quels intérêts le soutiennent ? ……………………..Page 34
2.3.1 Un soutien à l’identité …………………………………………………….…………..Page 34
2.3.2. La visée : l’autonomie ………………………………………………………………..Page 35
2.3.3. L’inscription dans l’espace commun ………………………………………….……..Page 36
2.4. Conclusion ………………………………………………………………………….……..Page 36
CHAPITRE 3 : DES BESOINS LIES AU VIEILLISSEMENT DES BENEFICIAIRES, DANS
LES SAVS DU DOUBS ? ……………………………………………………………………...Page 38
3.1. Présentation de l’enquête quantitative …………………………………………….……..Page 39
3.2. Analyse des « fiches service » ……………………………………………………...……..Page 40
3.2.1. L’équipe des professionnels de l’accompagnement …………………….…..………..Page 40
3.2.2. Le nombre d’accompagnement par équivalent temps plein…………………………..Page 41
3.2.3. La population accueillie par les services d’accompagnement………………………..Page 42
3.2.4. Entrées et sorties en 2004, 2005 et 2006 ……………………………………………..Page 45
3.3. Analyse des « fiches individuelles » ………………………………………………….…..Page 45
3.3.1. Fréquence et évolution des interventions par domaine d’accompagnement pour les
personnes de 50 ans et plus en 2005 et 2006 ………………………………………………..…..Page 45
3.3.2. L’existence, le renforcement ou la création des différents partenariats en 2005 et 2006
………………………………………………………………………………………………..…..Page 47
3.3.3. La coordination…………………………………………………………………….....Page 51
3.4. Conclusion et hypothèse…………………………………………………………………...Page 52
Deuxième partie
CHAPITRE 1 : METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE ET DEROULEMENT DES
ENTRETIENS ………………………………………………………………………………...Page 54
1.1.
Objectif de l’enquête …………………………………………………………….…..Page 54
1.2.
Choix de la méthode ……………………………………………………….….……..Page 54
1.3.
Choix des interlocuteurs ……………………………………………..……………..Page 55
1.4.
Le guide d’entretien …………………………………………………….….………..Page 56
1.5.
Déroulement des entretiens …………………………………………………….…..Page 57
1.5.1. Les entretiens avec les usagers …………………………………………………..Page 58
1.5.2. Les entretiens avec les professionnels………………………………….………..Page 59
CHAPITRE 2 : ANALYSE DES RESULTATS DE L’ENQUETE ……………………...…..Page 60
2.1. Caractéristiques des personnes enquêtées …………………………………………..Page 60
2.2. Près d’un tiers des bénéficiaires nécessitent un accompagnement prioritairement
pour le suivi de leur santé …………………………………………………………………...Page 65
2.2.1. Besoins principaux : maintien de la santé et suivi médical …………………………..Page 66
2.2.2. Besoins associés : vie quotidienne et………………………………………….……..Page 67
2.2.3. …suivi de la situation de travailleur.……………………………………………..…..Page 69
2.3. Pour près d’un tiers des personnes, l’évolution des besoins a lieu simultanément
dans deux domaines : vie quotidienne et santé………………………………..………….Page 71
2.3.1. Besoins principaux : vie quotidienne et………………………………...…………….Page 72
2.3.2. …maintien de la santé et suivi médical ………………………………………….…..Page 75
2.3.3. Besoins secondaires : suivi de la situation de travailleur………………………..….…..Page
77
2.4. Pour une minorité de notre échantillon (mais un tiers des travailleurs), les besoins
concernent essentiellement le suivi dans l’emploi …………………………………..…..Page 77
2.4.1. Besoins principaux : suivi de la situation de travailleur ……………………………..Page 78
2.4.2. Besoins complémentaires : vie quotidienne et …………………………………...…..Page 81
2.4.3. …soutien à la santé et suivi médical ………………………………...……………....Page 82
2.5. Pour près d’un quart des bénéficiaires, il n’est pas noté d’augmentation des
besoins…………………………………………………………………………………………..Page 83
2.5.1. Besoins en matière de maintien de la santé et de suivi médical ……………………..Page 84
2.5.2. Besoins en matière de vie quotidienne ………………………………………..……..Page 84
2.5.3. Besoins en matière de suivi de la situation de travailleur ……………………..……..Page 85
2.6. Conclusions de l’analyse …………………………………………………………...…..Page 87
Troisième partie
DES BESOINS EMERGENTS ET DES PRATIQUES QUI S’ENRICHISSENT…………Page 90
CONCLUSION GENERALE ……………………………………………………………..Page 96
ANNEXES
GLOSSAIRE
BIBLIOGRAPHIE
INTRODUCTION
Educatrice spécialisée, je travaille depuis une dizaine d’années dans un Service d’Accompagnement à la
Vie Sociale (SAVS). Nous accompagnons des personnes handicapées mentales (déficientes
intellectuelles) qui résident en appartement de droit commun sur l’ensemble de la ville. La plupart d’entre
elles travaillent, souvent en ESAT1, mais aussi en milieu ordinaire. Elles sont orientées vers notre service
par la CDAPH.2
Depuis 3 ans nous accompagnons des personnes qui ne travaillent plus et ont dépassé l’âge de 60 ans.
Pour d’autres, le travail à mi-temps et la retraite sont envisagés dès l’âge de 55 ans, en fonction de leurs
relevés de carrière et du règlement de fonctionnement de l’ESAT. Dans les deux cas, les changements
induits dans leur mode de vie par la fin de l’activité professionnelle questionnent l’accompagnement du
SAVS quant à sa poursuite ou aux adaptations à y apporter, en fonction des nouveaux besoins identifiés.
Actuellement la plupart des usagers souhaitent, pendant leur retraite, continuer à vivre en « milieu
ordinaire », avec le soutien du service. Cette possibilité est confirmée par les textes qui encadrent la mise
en œuvre de l’action sociale et médico-sociale, notamment la loi 2002-2.3
Concernant leur accompagnement par les SAVS, aucune limite d’âge n’est fixée par la loi et ses décrets
d’application.
Pour autant, certains professionnels s’interrogent sur les capacités de ces usagers à
maintenir leur mode de vie à domicile après le passage à la retraite. La disparition des repères établis
autour du travail et les évolutions liées au vieillissement ne les mettent-ils pas en danger ?
1
ESAT : Etablissements et Services d’Aide par le Travail
2
CDAPH : nous rappelons que la CDAPH, au sein des MDPH, a remplacé la CDES et la COTOREP
3
Loi 2002-2
1
Ce questionnement, établi à partir de mon expérience professionnelle, s’est trouvé conforté au gré des
échanges avec des partenaires et des professionnels d’autres SAVS. Tous confirment que
l’accompagnement des personnes handicapées mentales vieillissantes suscite de nombreuses
interrogations. De fait, les phénomènes liés au vieillissement sont nouveaux pour des structures, elles
aussi, relativement récentes. Il leur faut les aborder à partir de connaissances théoriques, législatives et
sociologiques. Ensuite il leur appartient d’adapter leurs pratiques professionnelles existantes en les
complétant voire en innovant.
Ces observations m’ont amenée à poser différentes questions : qui sont les personnes handicapées
mentales vieillissantes ? Présentent-elles des caractéristiques spécifiques dans leur vieillissement, par
rapport à la population générale, du fait de leur handicap4 ? En conséquence, ont-elles des besoins
spécifiques, différents de ceux des personnes âgées en général ? Si oui, peut-on les identifier ? Quels sont
le rôle et la place des SAVS, actuellement leur interlocuteur privilégié pour le maintien à domicile? Que
recouvre le terme d’accompagnement ? En quoi les dernières lois orientent-elles la prise en charge de ces
personnes ?
Pour résumer, la question de départ pour cette recherche est la suivante : Quels sont les besoins
d’accompagnement générés par le vieillissement des personnes handicapées mentales et en quoi ces
besoins transforment-ils les pratiques des professionnels en SAVS ?
Cette étude va nous5 permettre de mieux identifier la population des personnes handicapées mentales
vieillissantes ainsi que leurs besoins et de voir en quoi leur accompagnement par les SAVS serait
spécifique et évolutif. Elle contient trois grandes parties.
Dans la première partie, nous verrons tout d’abord comment, dans notre société, les notions de handicap et
de vieillesse sont déterminées et quelles sont les classifications qui leur sont associées. Nous examinerons
ensuite la population concernée par les deux phénomènes. En complément, une approche des principaux
textes législatifs et règlementaires nous donnera le cadre de l’exercice des pratiques professionnelles.
Ensuite, sachant que, face à ce phénomène récent, nos services interrogent leur pratique et donc
4
5
Reconnu par la CDAPH
Pour faciliter la compréhension de ma démarche, au cours de cette étude, j’ai utilisé l’alternance de deux formes
pronominales :
-
la première personne du singulier pour exprimer ma position personnelle
-
la première personne du pluriel lorsque j’associe d’autres personnes à ma réflexion (notamment le lecteur
ou mon directeur de mémoire)
2
l’accompagnement, nous approfondirons ce que recouvre le terme d’accompagnement. Nous verrons,
dans ce chapitre, que cette pratique s’inscrit dans une relation entre un usager et un intervenant, base
nécessaire à l’exercice de la mission de l’accompagnateur. Cet accompagnateur sera amené,
successivement, à évaluer des besoins, aider à la formulation de la demande d’accompagnement et à la
construction de réponses. Il sera appelé à adapter sa pratique à chaque situation. Nous le considérons donc
comme un observateur et un vecteur de l’expression des besoins probablement nouveaux et spécifiques
des personnes handicapées mentales vieillissantes ainsi que des réponses existantes, à développer ou à
créer. Cet accompagnateur sera donc un interlocuteur incontournable pour les deux enquêtes menées.
Effectivement après avoir étudié les phénomènes liés au vieillissement pour la population6 qui nous
intéresse ici, j’ai cherché à savoir dans quels domaines d’accompagnement ils se manifestent, et s’ils ont
une incidence sur le fonctionnement des services. J’ai donc mené une enquête quantitative auprès des sept
SAVS pour personnes handicapées mentales du département du Doubs. Celle-ci a concerné leurs 109
usagers de 50 ans et plus.
Cette enquête m’a permis d’étayer l’hypothèse que, dans le cadre de l’accompagnement par nos services,
des besoins nouveaux surviennent effectivement chez les personnes handicapées mentales en lien avec le
vieillissement. Evalués quantitativement, ils se traduisent par une augmentation des interventions auprès
des bénéficiaires.
Pour compléter mon investigation, j’ai souhaité connaître plus précisément la nature de ces nouveaux
besoins : comment se manifestent-ils chez les usagers ? Quelles en sont les conséquences en termes
d’adaptation de l’accompagnement pour les professionnels ?
Dans le cas ou l’accompagnement se poursuit et se transforme, quelle est la valeur ajoutée des SAVS par
rapport à d’autres services d’aide à la personne ? Autrement dit, qu’est-ce qui légitime l’intervention des
SAVS pour les personnes handicapées mentales vieillissantes alors qu’il existe des réponses de droit
commun pour les personnes âgées (aide à domicile par exemple). Ainsi une enquête complémentaire
s’imposait.
La deuxième partie présente l’enquête qualitative par entretiens menée également dans des SAVS du
Doubs, auprès de 13 bénéficiaires et de leurs accompagnateurs respectifs. Nous verrons tout d’abord les
choix méthodologiques de cette enquête. Ensuite, à partir des résultats, nous analyserons les différents
6
Les personnes handicapées mentales
Nous avons distingué ce que le vieillissement a comme effets similaires avec la population globale ( sur la santé, le
mode de vie …), mais aussi ce qu’il a de spécifique pour les personnes handicapées mentales ( c’est un phénomène
évolutif, et qui a un effet cumulatif avec la déficience).
3
types de besoins liés au vieillissement.
Pour terminer, la troisième partie permet d’aborder un « inattendu » de l’enquête : la notion de crise
identitaire. Puis à partir des besoins repérés de préciser les adaptations, en cours ou envisageables, des
pratiques professionnelles et les compétences à développer pour les accompagnateurs.
4
Première partie
5
CHAPITRE 1
HANDICAP,
VIEILLESSE
ET
VIEILLISSEMENT :
leur
détermination dans notre société
Ces notions ont chacune leur propre histoire. Au cours du dernier demi-siècle, les personnes handicapées
et les personnes âgées ont fait l’objet de prises en charges qui se sont différenciées. Aujourd’hui, le
vieillissement des personnes handicapées, et plus particulièrement celui des personnes handicapées
mentales en SAVS, met en cause cette séparation. Nous allons essayer d’en comprendre les raisons en
approfondissant successivement les notions de handicap, de vieillesse et de vieillissement puis en
reprenant les quelques études portant sur le vieillissement des personnes handicapées mentales, ainsi que
les textes qui encadrent les pratiques professionnelles.
1.1. A propos du handicap
Dans les années 1950, la notion de handicap a été empruntée au domaine sportif (hippique). Elle témoigne
d’une discrimination positive au profit des personnes infirmes qui dorénavant commenceront à être
considérées comme des « ayant droit de la solidarité collective » et non plus comme des « malheureux que
le sort a marqué, devant émarger essentiellement à l’assistance publique si ce n’est à la charité
individuelle » (Henri-Jacques STIKER.2004).
Cet auteur nous fait remarquer que dans les années 1920, apparaissent en parallèle des mots défectifs (infirmes, in-capables, in-valides…), et les mots du retour (ré-adaptation, ré-insertion …). Ils permettent une
nouvelle approche de l’infirmité, tant dans les représentations sociales que chez les personnes concernées.
Les termes de handicap et handicapés en découlent.
De plus, ces vocables introduisent l’idée d’égalisation des chances dans la logique productiviste de la
société industrielle. Chacun va pouvoir ainsi participer à la compétition, redevenir performant grâce aux
compensations, à la rééducation… La culture intègre l’infirmité, permet d’apprivoiser la non-conformité
des personnes concernées en les re-situant face aux mêmes exigences que tout autre citoyen.
Le terme de handicap permet aussi de regrouper dans une même notion celle d’infirmité, exprimant un
point de vue sanitaire, et celle d’inadaptation, exprimant un point de vue social.
En France, ce processus conduit à la promulgation de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 dite « d’orientation
en faveur des personnes handicapées ».
6
1.1.1. La loi de 1975
Pour cette loi « la prévention et le dépistage des handicaps, les soins, l’éducation, la formation et
l’orientation professionnelle, l’emploi, la garantie d’un minimum de ressources, l’intégration sociale et
l’accès aux sports et aux loisirs du mineur et de l’adulte handicapé physiques, sensoriels ou mentaux,
constituent une obligation nationale ». La mise en œuvre se fait notamment par l’intermédiaire des
institutions sociales et médico-sociales qui se développent ; elles sont régies par une autre loi datant du
même jour. A noter qu’aucune barrière d’âge plafond n’est fixée.
Les personnes sont « reconnues handicapées » par deux commissions : la Commission Départementale de
l’Education Spéciale (CDES), pour les enfants et adolescents jusqu’à 20 ans et la Commission Technique
d’Orientation et de Reclassement Professionnel (COTOREP), pour les adultes. En fonction de la nature et
du degré de handicap, elles orientent les demandeurs vers les institutions adaptées. Bernard ENNUYER
(2005) nous fait remarquer que « le handicap est alors défini comme attribut de la personne sous forme
d’un déficit physique, sensoriel ou mental ». A ce moment, les efforts engagés par l’Etat français
s’inscrivent dans le développement de filières spécialisées. Ces orientations se construisent sur le plan
national parallèlement à une réflexion internationale.
1.1.2. La Classification Internationale du Handicap (CIH)
Le médecin britannique Philip WOOD, missionné par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS),
réfléchit à une nouvelle définition du handicap qui aboutit à la Classification Internationale Déficience,
Incapacité, Handicap (CIDIH) appelée en France Classification Internationale du Handicap (CIH). Celleci est adoptée par l’OMS en 1976 et publiée en anglais en 1980.
Le modèle est le suivant :
Maladie ===> déficience ===> incapacité ===> Handicap (désavantage social)
Les conséquences de la maladie sont définies ainsi (dans la CIH):
Déficience : dans le domaine de la santé, la déficience correspond à toute perte ou altération d’une
structure ou fonction psychologique, physiologique ou anatomique.
Incapacité : dans le domaine de la santé, une incapacité correspond à une réduction (résultat d’une
déficience), partielle ou totale, de la capacité d’accomplir une activité d’une façon ou dans les limites
considérées comme normales pour un être humain.
Handicap, ou Désavantage social : dans le domaine de la santé, le désavantage social pour un individu
donné résulte d’une déficience ou d’une incapacité qui limite ou interdit l’accomplissement d’un rôle
normal (en rapport avec l’âge, le sexe, les facteurs sociaux et culturels).
La classification de WOOD, limitée au domaine de la santé montre ses limites. aussi l’approche de la
notion de handicap continue-t-elle à évoluer dans le sens d’une prise en compte des facteurs sociaux dans
la production du handicap.
7
1.1.3. La Classification Internationale du Fonctionnement (CIF)
Dans les années 1990, les travaux de révision de la CIH s’organisent pour la recherche d’un consensus sur
une terminologie qui se veut internationale et sur une perception multidimensionnel du handicap prenant
mieux en compte l’environnement. La CIH est donc restée une référence internationale jusqu’au 21 mai
2001 où, par vote de l’assemblée mondiale de la santé, elle est remplacée par la Classification
Internationale du Fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF).
La CIF est articulée avec la Classification Internationale des Maladies 10ème version (CIM 10) de l’OMS
qui décrit et classe les pathologies, considérées comme une des composantes de la santé. Les autres
composantes appartiennent à la CIF :
- les fonctions (physiques ou mentales) et la structure corporelles qui peuvent être déficientes
- Les facteurs contextuels qui peuvent être environnementaux (physiques, culturels, dispositifs
sociaux…) ou personnels.
- Les activités et la participation à la vie sociale (marcher, faire ses courses, communiquer…). Une
personne peut être limitée dans sa capacité à réaliser certaines activités et restreinte dans sa
participation à la vie sociale du fait des autres composantes de la santé.
La situation de handicap est donc dans cette approche due à l’interaction entre ces différentes
composantes de la santé. Rappelons que pour l’OMS, la santé est « un état de bien-être physique, mental
et social complet et pas simplement l’absence de maladie ou d’infirmité ».
La CIF est venue répondre au besoin de l’OMS de perfectionner son classement international des
systèmes de santé. Pour François CHAPIREAU (2001), elle est aussi utilisable dans ses applications qu’il
définit ainsi : elle est un « outil de recherche, outil clinique, outil de politique sociale et outil
pédagogique ». Cette idée fait écho à la pensée de Christian ROSSIGNOL (2004) pour qui « la CIF » est
un outil destiné à classer des personnes qui constituent des clientèles actuelles ou potentielles des
professions
médicales,
paramédicales
et
médico-sociales
ainsi
que
celles
des
institutions
correspondantes ».
Ce résumé de l’évolution de la notion de handicap amène à considérer de plus en plus ce dernier à la
lumière des facteurs environnementaux, ceux-ci ayant une place « dans la production d’une situation de
handicap » (Patrick GUYOT. 2004). Aux facteurs médicaux et déficitaires propres à la personne viennent
se mêler des facteurs sociaux tels que l’accessibilité de l’espace public et les politiques sociales. Ainsi le
degré de handicap varie en fonction de l’importance de la déficience, de l’étendue des compensations
qu’elles ont acquises et des exigences de la vie sociale.
8
Ce sont les liens ou les interactions entre ces deux pôles (personnel et extérieur) qui déterminent « les
activités et la participation de la personne » (Bernard ENNUYER. 2005).
Cette nouvelle approche du handicap est à l’œuvre dans les revendications des associations et influe sur
les nouvelles politiques sociales et médico-sociales, notamment dans la loi « handicap » de 2005.
Dite « pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes
handicapées », cette loi donne la définition suivante du handicap : "constitue un handicap, au sens de la
présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son
environnement par une personne en raison d'une altération substantielle durable ou définitive d'une ou
plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou
d’un trouble de santé invalidant. » (Article 2, Art. L. 114 du CASF). Cette définition du handicap s’inspire
clairement de la CIF sans toutefois reconnaître pleinement le rôle des facteurs environnementaux.
La loi repose sur deux piliers pour lesquels elle met en place diverses dispositions :
- L’accessibilité sous toutes ces formes : scolarisation, emploi, bâtiments, voirie, transports…
- La compensation qui consiste par des aides individuelles (aides humaines, techniques,
aménagements du logement, aides animalières…) à compenser les conséquences du handicap.
Petit à petit le monde du handicap sort de son isolement. L’évolution perceptible au travers des textes
cités, sur la manière de considérer les personnes handicapées, leur permet de prétendre à un nouveau
statut. « Du statut d’éternel enfant, d’assisté ou d’incapable majeur, la personne handicapée, désormais
visible, vient s’inscrire de plein droit sur la scène sociale où elle réclame la citoyenneté qui lui revient et le
droit de vieillir au milieu de tous dans la dignité » (Bernard AZEMA et Nathalie MARTINEZ, 2005).
Ce modèle, en privilégiant la responsabilité individuelle une fois la compensation et l’accessibilité mises
en œuvre, est exigeant en terme d’autonomie. Pouvons-nous considérer que les aspirations et les
possibilités de décision des handicapés mentaux sont semblables à celles handicapés moteurs ou
sensoriels ? « L’importance récente donnée aux droits individuels ne risque-t-elle pas, si elle se cantonnait
au »fais-le toi-même et décide ce qui est bon pour toi », à se transformer en abandon social et perte de
solidarité collective ? » (Gérard ZRIBI 2005).
1.2. A propos de la vieillesse et du vieillissement dans notre société
1.2.1. Approche démographique
Les chiffres de la population française au 31 décembre 2006, mis à disposition par l’Institut National
d’Etudes Démographiques (INED. 2007), nous ont permis d’établir le graphique ci-dessous :
9
-1- Répartition par sexe et tranches d’âges de la population française de plus de 19 ans
25
20
15
10
5
0
FEMMES
HOMMES
(En centaine de mille)
Un complément d’étude nous montre que dans la population française :
En 1900 : les personnes âgées représentaient 13% de la population.
En 1995 : les personnes de : + de 60 ans étaient 11 millions (20% de la population)
+ de 75 ans étaient 4 millions
+ de 85 ans étaient plus de 1 million
En 2010 : les personnes de : + de 60 ans représenteront environ 22,8% de la population
+ de 75 ans représenteront environ 8,9% de la population
+ de 85 ans représenteront environ 2,5% de la population
en 2050 : les personnes de : + de 60 ans représenteront environ 33,7% de la population
+ de 75 ans représenteront environ 15,2% de la population
+ de 85 ans représenteront environ 6,9% de la population.
Ces dernières décennies, la société française, comme les autres sociétés occidentales, a vu sa structure
démographique subir d’importantes modifications. Cela se traduit par un renversement de la pyramide des
âges, avec une population d’aînés de plus en plus importante tant en nombre que rapportée à la population
jeune. Ce phénomène est lourd de conséquences et rend nécessaire une réflexion sur les incidences en
matière d’action sociale et médico-sociale.
10
1.2.2. Approche générale
Il nous parait utile de rappeler avec Patrice BOURDELAIS (1997) que « avant les années soixante,
vieillards et handicapés étaient regroupés sous un même ensemble de vocables : infirmes, invalides ou
handicapés ». Leurs besoins étaient l’objet d’une politique commune : l’assistance aux pauvres, que ce
soit en termes d’aides ou d’institutionnalisation (hospice). C’est le rapport LAROQUE (1962) qui « met
en évidence une vision négative du vieillissement » (Karine CHAUVIN.2003) et définit la vieillesse
comme « une catégorie d’âge sociale » : le 3ème âge. Les travaux de recherche des décennies suivantes ont
permis de montrer l’hétérogénéité de la population concernée tant du point de vue économique que de
celui du « processus d’entrée et d’expérience du handicap » (CHAUVIN).
La Prestation Spécifique Dépendance (PSD) va créer une nouvelle catégorie : le 4ème âge, qui rassemble
les problèmes de la vieillesse au travers d’une image déficitaire et de coût. Ajoutons que ces dernières
années est évoquée la notion de 5ème risque : la dépendance.
Le développement des classifications témoigne de la complexité à définir la vieillesse et traduisent la
mobilité de cette notion.
Pour mieux comprendre ce qui est en jeu dans son évocation, nous allons utiliser plusieurs angles
d’approche formulés sous forme de questions pour indiquer la relativité de leur présence et de leur
importance chez chaque individu.
La vieillesse : une question d’âge ?
L’entrée dans la vieillesse ou dans la catégorie des « Personnes Agées » est symbolisée par l’arrêt d’une
activité professionnelle ; nous pouvons donc la situer au moment de la retraite entre 60 et 65 ans. Cette
frontière de la soixantaine est aussi celle présente dans notre législation pour un certain nombre de droits7
(allocations, prises en charge spécialisées …).
Mais l’étendue de cette tranche d’âge et l’inégalité des situations a amené, à la suite d’études, à procéder à
un nouveau partage et à désigner « les personnes âgées dépendantes » comme participant d’un nouveau
groupe rejoignant une tranche d’âge des 80 ans et au-delà.
La vieillesse : Une question physiologique ?
Afin de compléter ce qui est dit plus haut du processus de vieillissement, nous ajouterons que la vieillesse
amène une fragilité physique, mais que celle-ci se manifeste de façon très hétérogène et avec une intensité
variable selon les personnes. Un autre élément est l’altération des traits et de l’apparence. Ces données
sont devenues dans notre société des critères dépréciateurs.
7
65 ans pour l’aide sociale ou 60 ans en cas d’inaptitude au travail
11
Mais les années (la maturation) permettent aussi l’accumulation de connaissances, utiles en terme de
mémoire collective et de lien entre les générations. Ces qualités sont davantage valorisées dans les
civilisations de culture orale.
La vieillesse : Une question économique ?
Une grande disparité caractérise la situation économique des personnes âgées pour qui, depuis le milieu
des années 80, le niveau de vie relatif a « rattrapé voire dépassé celui des actifs… » (Jean
FOUCART. 2003). Cette donnée alimente les représentations sociales d’une classe d’âge ayant de bonnes
ressources financières et tend à faire oublier toute une tranche de cette population bénéficiant des minima
sociaux.
La vieillesse : Une question de statut et de reconnaissance ?
Ceux-ci sont liés au rôle que l’individu joue dans la société : est-il producteur de gains ? Se rend-il utile ?
Les réponses conditionnent le regard qui est posé sur lui et lui permettent d’être reconnu, valorisé et
considéré par ses pairs. De plus, une place importante est accordée à l’image et comme nous l’avons dit,
celle-ci peut être fortement altérée par le vieillissement physiologique.
Ainsi pour certaines personnes, « l’avancée en âge génère une mise à mal du narcissisme » parce que « se
plaire à soi-même devient de plus en plus difficile » (Cécile AGUESSE. 2003).
La vieillesse : Une question relationnelle ?
Les changements de statut induisent inévitablement des modifications dans le réseau relationnel. Celui-ci
pourra et/ou devra être réorganisé, mais il risque souvent d’être réduit. S’y ajoute, avec le temps, la
disparition d’une partie de ses membres.
Jean FOUCART note, en lien avec la réduction des échanges avec l’extérieur chez les couples très âgés,
« la réduction de l’espace personnel » qui demande de redéfinir « la bonne distance conjugale ». Celle-ci
relève d’un équilibre à trouver entre deux tendances : celle de la fusion et celle de l’indépendance. Cet
équilibre peut aussi être mis en péril par des intervenants extérieurs, notamment dans le cas de la prise en
charge d’une dépendance pour l’un des membres du couple.
La vieillesse : Une question d’isolement et de solitude ?
La maladie et des ressources économiques faibles au sein d’un réseau relationnel pauvre sont les
conditions majeures pour créer une situation d’isolement. Et cela d’autant plus que ces personnes sont
souvent peu demandeuses envers les services sociaux. Ces situations rassemblent des facteurs importants
d’accélération du vieillissement.
Christian Van ROMPAEY (2003) précise la nuance avec le sentiment de solitude qui existe dans les
situations d’isolement, mais qui peut aussi se manifester chez les personnes entourées dont les relations
avec l’entourage sont insatisfaisantes.
12
La vieillesse : Une question de pertes ?
Celles-ci peuvent se situer dans trois registres qui peuvent se cumuler : il s’agit de la perte d’une relation
affective, d’un proche, puis de celle de fonctions physiques qui confronte aux limitations et aux
défaillances voire à une dépendance, et enfin les pertes sociales activées par l’entrée en institution.
La perte est liée au changement. Lorsque celui-ci est violent ou se surajoute à d’autres, il peut provoquer
une situation de crise. L’adaptation nécessaire peut être difficile à mettre en œuvre ; elle se manifeste par
l’acceptation du décalage entre l’avant et le présent et passe généralement par de nouveaux
investissements.
La vieillesse : Une question de dépendance ?
La dépendance peut prendre différentes formes :
- la « dépendance positive » (Julien Del FABRO. 2003) qui caractérise tout individu social, qui
concerne sa croissance pendant l’enfance, puis sa vie affective, ses activités, ses besoins
économiques, ses relations sociales dans leur ensemble. Elle est inévitable mais elle varie selon les
périodes de la vie.
- la dépendance des personnes vieillissantes qui se particularise par le fait qu’elle induit un
investissement obligé de l’entourage, éventuellement croissant et s’inscrivant dans la durée. S’y
joint la question du sens et de l’avancée inéluctable vers la mort.
- la dépendance qui instaure l’être dans un lien de transmission des générations et donc dans un
rapport au temps.
Se pose alors la question de notre rapport au temps et des raisons de la mise à distance puis plus
particulièrement celle du traitement de la dépendance de la personne âgée.
La vieillesse : Une question d’autonomie ?
L’autonomie consiste chez tout individu à un droit et à une capacité à l’autodétermination, à choisir sa vie
et notamment son lieu de vie. Son respect par les aidants et les professionnels amène ceux-ci, d’abord à
écouter, ensuite à construire avec la personne aidée, un plan d’action satisfaisant.
L’exercice de ce droit fondamental s’avère ardu face à des formes de vulnérabilité telles que la
dépendance ou la déficience mentale. Il nécessite donc une grande vigilance et une réflexion permanente.
Olivier de DINECHIN (2006) résume à la suite d’un rapport du Comité Consultatif National d’Ethique
(CCNE) trois niveaux du concept d’autonomie : l’autonomie d’action, l’autonomie de pensée et
l’autonomie de volonté. Il relève toute la complexité de cette question et les difficultés auxquelles les
professionnels seront confrontés dans chaque situation particulière.
13
Les différentes notions que nous venons d’aborder ne permettent pas, répétons le, de définir une catégorie
de personnes afin de les classer par rapport à une norme qui justifierait des interventions types. Au
contraire, elles soulignent toute la complexité des différentes combinaisons possibles et donc des réponses
à apporter dans le respect des individualités. Elles témoignent aussi de la réaction de la société face à une
période de la vie considérée comme inquiétante, posant de nombreux problèmes d’ailleurs relayés
médiatiquement.
En résumé nous pouvons dire que la notion de vieillissement implique celle du temps qui passe, d’une
chronologie, d’un mouvement inéluctable. Du point de vue biologique, il s’agit d’une évolution naturelle
qui concerne tout être vivant et qui par un ensemble de phénomènes modifie les fonctions et la structure
d’un organisme. Ce processus de vie a la même fin pour tous, mais il connaît un développement singulier
chez chaque individu. A cela s’ajoute une multitude d’influences qui vont conditionner cette évolution :
niveau de soins disponibles, caractères héréditaires, évènements, situation économique, situation affective
et relationnelle …
La prise en compte des personnes vieillissantes concerne ainsi plusieurs domaines dont le domaine
médical et le domaine social. Nous rejoignons alors la pensée de WOOD et l’idée fondamentale de la CIF
qui soulignent l’interaction entre le champ sanitaire (pathologie / déficience) et le champ social
(environnement).
Ainsi les notions de « vieux » et de « vieillesse » vont prendre des connotations en lien direct avec les
modèles de la société concernée. Nous allons donc tenter de préciser ce qu’il en est pour nous.
1.2.3. Approche sociologique
Le phénomène du vieillissement a amené, progressivement avec le temps, la construction de catégories :
les vieux, les personnes âgées, les retraités, le 3ème âge, le 4ème âge, qui sont à la fois le fruit de l’évolution
culturelle et le support de la réflexion et de l’organisation de la société à l’égard de cette population.
P. PIETQUIN (2003) nous confirme que « la signification donnée aux différentes étapes de la vie est
directement liée au modèle culturel de l’époque et du lieu dans lequel elle s’inscrit. La vieillesse (ou du
moins ce que nous nommons comme telle) ne fait pas exception à la règle ». Ainsi s’est construite une
vision globalisante et stéréotypée qui masque la diversité interne évidente de ce groupe.
Les classifications établies servent de référence pour les conduites adoptées et les valeurs défendues.
L’évolution culturelle s’est faite en lien avec l’évolution de la société. Nous sommes passés d’un
« modèle social de type industriel » avec des valeurs fondées autour du travail, de l’utilité sociale à un
nouveau modèle plus individuel, de réalisation de soi au travers de normes voire de performances, plus
proches de celles de la jeunesse que de celles de la vieillesse (santé, apparence physique, autonomie…).
Ainsi cette mutation ne va pas sans générer des tensions chez les « personnes vieillissantes » partagées, du
14
fait de leur âge, entre ces deux modèles. De plus dans les années 80 la crise économique et la politique de
l’emploi ont avancé l’âge de la « vieillesse professionnelle » (Patrick PIETQUIN (2003)), alors que
l’accroissement de l’espérance de vie sans incapacité continue à progresser grâce à l’amélioration
générale du niveau de santé. Nous pouvons noter là un paradoxe entre cette amélioration et la
représentation négative de la période post-professionnelle.
Nous pouvons toutefois affirmer que cette période peut provoquer des sentiments d’inutilité, de coût, de
peur de la déchéance physique ou mentale et qu’elle renvoie au cheminement vers la fin de vie, vers la
mort. Ce terme n’invite pas à s’y confronter volontiers. Une telle perception favorise des idées et des
comportements d’exclusion qui peuvent prendre le nom d’âgisme.
« L’âgisme est bien une forme d’hétérophobie à l’égard des plus âgés, puisqu’il souligne les différences
dues à l’âge, il stigmatise et marque la perte de ce qui a été …» (J.FOUCART. 2003). Comme le racisme,
il procède du refus de l’altérité, enferme dans des catégories, des stéréotypes, il engendre la
méconnaissance de l’autre et réduit de ce fait les échanges intergénérationnels. Cette attitude qui éloigne
toute différence pourtant source d’échange, de rencontre et de créativité est néfaste pour tous : personnes
âgées, population active, professionnels … Par exemple, cette considération est en partie responsable du
manque de formations proposées après un certain âge. Ceci bien qu’ « il a été prouvé que même les
personnes âgées ayant perdu le plus d’aptitudes sont capables, si on leur donne la possibilité, de regagner
un grand contrôle sur leur vie » (Alan WALKER 2003).
Pour J. FOUCART « accepter la différence des âges est impératif », car « figer un groupe dans une forme
discréditante signifie la mort sociale ». Nous pouvons conclure que malgré un discours globalisant, les
personnes âgées, au sens large, constituent un groupe social très hétérogène en termes de santé, de
mobilité, de statuts, de revenus … et donc de conditions de vie et de besoins.
1.2.4. Approche médicale
Le processus de vieillissement et ses effets ont été étudiés par les gériatres depuis les années 70 afin
d’établir des repères scientifiques de l’avancée en âge. Cette approche par le secteur médical a provoqué
une vision médicale du vieillissement, assimilé rapidement à une maladie porteuse de séquelles. Ces
dernières sont identifiables, évaluables à partir de « l’observation des pertes d’activités de l’individu ».
Cette orientation amène l’utilisation du terme de dépendance qui va se substituer à ceux d’invalidité et de
handicap et va s’imposer dans les années 80 comme repère commun pour qualifier l’évolution de l’état de
santé des personnes âgées. A partir de cette notion, validée par d’autres champs (politique, économique
…), les professionnels construisent des outils de mesure et notamment la grille AGGIR8. Elle doit
permettre d’évaluer à la fois l’état de dépendance des individus et leur besoin d’aide. Promue par le
8
Autonomie Gérontologique, Groupe Iso Ressource
15
secteur gérontologique, cette grille utilise des variables témoignant d’une représentation médicale du
handicap. Un examen des items retenus montre que par rapport à la CIH, ils correspondent au registre des
incapacités et uniquement au niveau corporel. Les variables sociales viennent les illustrer, mais ne sont
pas déterminantes. La grille valorise donc un modèle individuel, évaluant le niveau d’incapacités de la
personne âgée, considérant donc que celui-ci est un facteur intrinsèque à cette personne. Sa conception est
restrictive vis-à-vis de la définition de la santé, envisagée de façon plus globale et plus complète par la
CIH puis la CIF.
De manière plus générale, les différentes grilles et la place prise par les gériatres dans l’appréhension de la
question de la dépendance des personnes âgées ont permis à ces professionnels d’acquérir un véritable
pouvoir d’experts pour l’évaluation du besoin d’aide des personnes âgées dépendantes.
Cette définition médicale présente trois avantages majeurs : elle offre des moyens de mesure aux pouvoirs
publics, elle synthétise la vision de l’appréciation de la dépendance par l’observation d’activités de la vie
quotidienne de la part de nombreux professionnels, et enfin elle propose aux pouvoirs publics des outils
informatisés, faciles d’usage, aux informations riches et utilisables dans le cadre de la politique
gérontologique. Par contre, elle privilégie davantage la notion de dépendance que celle d’autonomie.
L’étude des notions de handicap et de vieillissement nous montre qu’elles recouvrent des réalités très
hétérogènes d’un individu à l’autre. Ainsi les réponses apportées aux personnes concernées nécessitent
d’être étudiées de façon individuelle pour être adaptées aux besoins particuliers. Néanmoins dans le cadre
d’un SAVS, les demandes correspondent aux besoins d’une population ayant des caractéristiques
identifiées. Pour ce qui nous concerne, il s’agit de personnes handicapées mentales, vivant en milieu
ordinaire et sollicitant notre accompagnement pour conserver ce mode de vie.
Nous allons donc continuer par la recherche de précisions concernant l’identification et les besoins de
notre population.
1.3. Le vieillissement chez les personnes handicapées mentales
Différentes études permettent de rassembler des données sur le phénomène récemment étudié du
vieillissement chez les personnes handicapées mentales. Elles en éclairent les manifestations et permettent
de dégager quelques orientations de travail pour les professionnels concernés.
1.3.1. Un phénomène évolutif
Les personnes handicapées connaissent depuis quelques décennies un gain sensible de leur espérance de
vie dans tous les pays développés. Elles subissent de la même façon les influences sociales et affectives
16
qui marquent sensiblement le processus de vieillissement. Celui-ci apparaît de façon superposable à celui
de la population globale, hormis chez les personnes porteuses de troubles génétiques ou moteurs. Alan
WALKER (2003) remarque toutefois que ces personnes sont classées beaucoup plus tôt dans la catégorie
des personnes âgées du fait du cumul de stéréotypes des deux population : « impuissance, dépendance,
besoin de soin » pour le handicap mental et « désengagement des rôles sociaux » pour l’avancée en âge.
Deux études, l’une écossaise l’autre australienne, montrent une influence du niveau intellectuel sur
l’espérance de vie : moins la déficience intellectuelle est importante, plus l’espérance de vie s’accroît. Par
ailleurs Thierry de THIBAULT et Daisy POPULAIRE (2003) rapportent qu’en l’absence de causes
organiques, les preuves du déclin intellectuel restent rares jusqu’à l’âge de 70 ans. D’autre part les
personnes atteintes d’une déficience légère ou modérée manifestent des capacités d’adaptation en
évolution jusqu’à l’âge de 40 ans. Celles-ci déclinent légèrement après l’âge de 50 ans. Par contre chez les
malades mentaux, il demeure une surmortalité massive par rapport à la population générale, liée à des
facteurs de risques spécifiques ainsi qu’à un moindre accès aux ressources de santé.
CARTER et JANCAR (1983) donnent, à propos de l’espérance moyenne de vie de handicapés mentaux,
les chiffres suivants :
En 1930 : 19,9 ans pour les hommes et 22 ans pour les femmes
En 1980 : 58,3 ans pour les hommes et 59,8 ans pour les femmes
GABBAÏ (2003), pour une population de personnes atteintes de déficience moyenne et légère et/ ou de
maladie mentale, note un âge moyen de décès à :
- 64,46 ans entre 1972 et 1979
- 70,23 ans entre 1980 et 1990
Ces deux études confirment l’idée que pour les personnes handicapées mentales, la longévité est liée à la
qualité des soins, des prises en charges successives, de l’harmonie de cette succession ainsi que des
composantes personnelles. « Comme en population générale, le gain de longévité se réalise avec une
meilleure santé chez les survivants de la cohorte » (B. AZEMA et N. MARTINEZ 2005).
1.3.2. Un effet cumulatif : de la déficience s’ajoute à la déficience
Toujours en se référant à B. AZEMA et N. MARTINEZ, nous pouvons dire que de manière générale, en
raison de leur handicap, ces personnes sont exposées à une moins bonne surveillance de leur santé et de
leur hygiène de vie. Ainsi les maladies chroniques invalidantes (cardio-vasculaires, musculo-squelettiques
ou atteintes sensorielles) observées dans la population générale comme faisant partie du processus de
vieillissement normal peuvent avoir un impact plus important chez les personnes handicapées du fait de
leur effet cumulatif avec les déficiences existantes. Les mêmes ralentissements et dysfonctionnements
progressifs face à une moindre capacité adaptative contribuent à les vulnérabiliser davantage.
17
Pour les mêmes raisons une attention particulière est attirée sur les risques de confusions entre des signes
de vieillissement et des épisodes morbides, notamment dépressifs.
La question du suivi de la santé prend ici tout son intérêt et explique la mise en évidence de l’importance
du milieu social et physique dans lequel vivent ces personnes.
Ces observations ont mis en évidence des points de vigilance et d’aide au suivi de la santé des personnes
handicapées.
Tout d’abord il s’agit de la négligence ou l’inattention à des besoins physiques et physiologiques tels que
le régime alimentaire, le non respect des rythmes, les troubles du sommeil, la santé bucco-dentaire, les
troubles sensoriels, des maladies dégénératives et spécifiquement le cancer, les troubles liés à la
ménopause et enfin les troubles mentaux évolutifs. Les problèmes posés sont bien sûr liés à l’ensemble du
processus dépistage-diagnostic-traitement qui se voit toujours complexifié du fait des déficiences et,
parfois, mis en échec. En effet, les difficultés, notamment d’expression et de communication, rendent les
démarches délicates, la qualité de l’adhésion au traitement incertaine alors que toutes deux conditionnent
l’efficacité des soins.
Ensuite, signalons les relations affectives. Les personnes handicapées mentales sont, ou se vivent, souvent
désinsérées par rapport à l’histoire passée et surtout présente de leur famille. L’étayage familial comporte
rarement une descendance et devient précaire du côté des parents éventuels eux-mêmes vieillissants. Elles
peuvent avoir besoin d’un soutien pour gérer au mieux les relations restées possibles. La majorité de ces
personnes handicapées sera confrontée à une solitude grandissante. Pour cette raison, les autres liens qui
auront pu être créés antérieurement seront à favoriser et à entretenir.
Un troisième point concerne les projets et les investissements correspondants aux besoins, aux souhaits et
aux rythmes de la personne. Ils sont indispensables car ils participent du bien-être, génèrent des
satisfactions, cultivent l’évolutivité et l’adaptation et sauvegardent la liberté et la dignité de l’individu. Ils
doivent être modulables dans le temps, en fonction de l’évolution de chacun.
Enfin, Bernard AZEMA et Nathalie MARTINEZ portent une attention particulière au passage de la vie
active à la retraite. Pour ces auteurs « la mise à la retraite peut être vécue comme une forme d’exclusion,
comme une perte de reconnaissance sociale pouvant aboutir à une véritable crise identitaire ». Le travail a
un rôle certain pour l’estime de soi du fait de la place sociale qu’il donne. De plus, de par la sédentarité
professionnelle, se sont créés parallèlement des « habitudes de vie », des « repères socio-spatiaux » et un
« ancrage affectivo-relationnel » qui structurent la vie globale des personnes handicapées mentales. Les
modifications, voire les ruptures ne sont pas sans répercussions sur le bien-être et l’existence. Elles
méritent donc d’être au cœur de l’accompagnement de ces personnes, pour les soutenir face à ces pertes
successives : leurs capacités, leur emploi, leur rôle social, leurs relations …
Ces observations permettent de dégager un certain nombre de besoins caractéristiques.
18
1.3.3. Des besoins spécifiques aux personnes handicapées mentales...
Nous citerons pour commencer, la préparation à l’interruption de la vie professionnelle. En raison de
l’importance de l’étayage que constitue l’activité professionnelle, les relations qui en dépendent et le
rythme qui lui est rattaché, le passage à la retraite mérite une préparation minutieuse. Il peut être
l’occasion d’une réflexion sur la question de l’âge. De nombreux travailleurs en ESAT sont appelés « les
jeunes ». Restituer la personne dans sa temporalité, dans son histoire » (T. de Thibault et D. Populaire
2003) lui permettra d’envisager la retraite comme une nouvelle étape. Justifiée par les raisons et dans le
temps, elle pourra être envisagée au travers d’un nouveau mode de vie, c'est-à-dire avec de nouvelles
orientations en terme de réseau relationnel, d’investissements et d’une nouvelle gestion du temps.
Faisant suite, il pourra être nécessaire d’aider à la gestion du temps. Un nouveau mode de vie, qu’il soit
lié à des modifications d’ordre professionnel, relationnel, affectif, d’habitat … peut être déstabilisant. Un
soutien, plus ou moins important, permettra de le restructurer plus confortablement en fonction des
nouveaux besoins, des habitudes antérieures et éventuellement des représentations de la personne.
Un troisième point est lié aux nouveaux apprentissages. Les changements dus à l’avancée en âge
impliquent des adaptations, qu’elles soient souhaitées, acceptées ou forcées. Afin de les positiver au
mieux, des propositions choisies peuvent être judicieuses. En font partie, par exemple, des informations
sur la compréhension du corps ou l’hygiène au sens large, une ouverture sur des activités socio-culturelles
intra mais aussi extra-institutionnelles : clubs du 3ème âge, ateliers de gymnastique, chorale …
Ce repérage, non exhaustif, basé sur l’écoute de la personne engendrera questionnements, adaptations et
innovations chez les acteurs de la mise en place de réponses. Les intérêts recherchés sont divers : créer
et/ou entretenir un réseau relationnel, se situer dans les générations, percevoir les difficultés éventuelles
liées à l’âge, faciliter leur compréhension et les aménagements possibles …
Dans ce contexte, les observations et les évaluations de l’entourage de la personne handicapée mentale ont
un intérêt particulier ; elles facilitent le repérage, enrichissent et précisent l’identification et la définition
des problèmes de santé éventuels. La fonction de médiation va à son tour trouver sa place pour le suivi de
la santé et le soutien aux personnes concernées. Cette fonction, partie inhérente aux missions des SAVS,
implique de fait un partenariat régulier avec, selon les situations, les familles, les professionnels des
ESAT ou des autres établissements ou entreprises employeurs, les services fréquentés par les personnes
vieillissantes, leurs soignants. Cette ouverture est appuyée par Ariane VIENNEY (2003) pour qui « il est
essentiel que nous luttions contre nos filières et institutions hermétiques liées à l’habitat et à la vie
sociale ».
Nous pouvons dire à nouveau que les personnes handicapées mentales vieillissantes ne forment pas une
catégorie de population présentant des caractéristiques homogènes induisant des réponses uniformes et
standardisées tout comme dans la population générale. D’ailleurs au-delà des besoins qui leurs sont
19
spécifiques, les personnes handicapées mentales vieillissantes présentes des besoins convergents avec
ceux de certaines personnes âgées dépendantes9. Il nous semble à ce titre utile d’en relever quelques-uns.
1.3.4. …mais aussi des besoins similaires à ceux des autres personnes âgées
La gérontologie générale française évolue dans le sens de la mise en place de formes de prise en charge au
plus près des « habitudes de vie antérieures des usagers « (Pascale ROUSSEL. 2003). Quitter son
domicile et entrer en institution n’étant envisagé que lorsque la perte d’autonomie et les problèmes
médicaux le nécessitent. Nous assistons à une « diversification très large des réponses à apporter »
(Gérard ZRIBI. 2003) sous la pression tant économique que de l’évolution des mentalités. Le maintien à
domicile se développe notamment grâce au renforcement des aides (aides ménagères, repas et soins à
domicile …), à la création de centres d’accueil de jour et à la médicalisation des foyers logements. Ces
mesures veulent répondre à la nécessité d’adaptations successives aux difficultés liées au vieillissement et
au respect du choix très largement exprimé par les personnes âgées de vivre chez elles. Elles évitent le
déracinement humain et physique.
L’aide médico-sociale, dans ce mouvement, tend à prendre en compte de façon de plus en plus affirmée
les souhaits des personnes. Leur implication dans les décisions prises est recherchée selon toute légitimité.
Nous venons de voir la prégnance de l’évolution de notre culture dans la manifestation des besoins
sociaux et dans les adaptations développées pour leur prise en compte. Nous allons compléter cette
perception par une approche du contexte dans lequel agissent aujourd’hui les professionnels des SAVS.
Nous aborderons donc les derniers textes juridiques concernant ces services et les personnes qui y sont
accompagnées, puis quelques-uns concernant les personnes âgées de façon générale. Construits à partir
des besoins évalués chez les usagers, et donc toujours susceptibles d’évolution, ces textes encadrent la
mise en œuvre des politiques sociales et médico-sociales.
1.4. Quelques repères législatifs et règlementaires
1.4.1. La loi n°2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale
Entre la fin des années 70 et les années 2000, le secteur social et médico-social s’est développé mais il est
resté face à des demandes non satisfaites : mixité, accueil de jour, petites unités de vie, nouvelles
problématiques … Il est constaté que les prises en charge sont longues et insuffisamment tournées vers
l’individu.
9
L’objet de cette étude n’étant pas la dépendance chez les personnes âgées, nous n’approfondirons pas cette notion
ici.
20
Toutefois, l’évolution des pratiques et leur adaptation à de nouveaux publics conduit à la création de
divers services « de suite » ou « d’accompagnement ».
Cette nouvelle loi a pour objectif de permettre une réponse adaptée aux besoins de chacun, « dans le
respect de l’égale dignité de tous les êtres humains » et en « garantissant un accès équitable sur
l’ensemble du territoire » (Article 3. Art.L.116-2 du CASF).
De nouveaux établissements et services sont reconnus, tels que les services d’accompagnement à la vie
sociale (SAVS), des établissements d’hébergement, éventuellement médicalisés et sans limite d’âge, ou
des structures expérimentales. Ces dernières peuvent soit délivrer « des prestations à domicile, en milieu
de vie ordinaire, en accueil familial ou dans une structure de prise en charge », soit assurer « l’accueil à
titre permanent, temporaire ou selon un mode séquentiel… » (Article 15. Art. L. 312-1).
Elle affirme des droits nouveaux ou mieux garantis à l’usager et à sa famille par une prise en charge ou un
accompagnement individualisé respectant son « consentement éclairé » (ou celui de son représentant
légal), et son « libre choix entre les prestations » proposées, ainsi que par sa participation directe à
l’élaboration et à la mise en œuvre de son projet.
Des garanties nouvelles sont créées au travers d’une charte, du livret d’accueil, du contrat de séjour ou
document individuel de prise en charge et du choix possible d’un médiateur (personne qualifiée) en cas de
différend avec la direction de l’établissement ou du service social ou médico-social .
Ces actions s’inscrivent dans les nouvelles modalités de planification médico-sociale et répondent à des
exigences d’évaluation que nous ne détaillerons pas ici.
Plus particulièrement, il nous faut souligner ici l’encadrement par un décret des
Services
d’Accompagnement à la Vie Sociale (SAVS) et des Services d’Accompagnement Médico-Social pour
Adultes Handicapés (SAMSAH) inclus dans les services cités au paragraphe 7 de l’article 15 cette loi.
1.4.2. Le décret n° 2005-223 du 11 mars 200510
Codifié dans la partie règlementaire du CASF, « relatif aux conditions d’organisation et de
fonctionnement » des SAVS et des SAMSAH, il précise leurs missions, la composition de leurs équipes
pluridisciplinaires, leur organisation et leur fonctionnement.
Les SAVS « ont pour vocation de contribuer à la réalisation du projet de vie des personnes handicapées
par un accompagnement adapté… ». Ils « prennent en charge des personnes adultes, y compris celles
ayant la qualité de travailleur handicapé… »
Les SAMSAH, associent à cette même vocation des prestations de soins.
10
Voir en annexe
21
Ces deux services interviennent sur décision de la CDAPH, « au domicile de la personne ainsi que dans
tous les lieux où s’exercent ses activités …. ». Les professionnels élaborent avec les usagers « un projet
individualisé de prise en charge et d’accompagnement » qui « tient compte de son projet de vie et des
préconisations » de la CDAPH.
Une « évaluation périodique des besoins de la personne » doit permettre de procéder « aux adaptations
nécessaires ». Des prestations complémentaires peuvent être fournies par des partenaires ayant conclu une
convention avec le service.
En complément, le législateur recense les différentes modalités de coordination des interventions entre les
services sociaux et médico-sociaux par le décret n° 2006-413 du 6 avril 2006 relatif aux différentes
formes de « groupements » possibles.
1.4.3. La loi n° 2005.102
La loi du 11 février 2005 dite « pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté
des personnes handicapées » comporte une centaine d'articles dont un grand nombre est codifié dans la
partie réglementaire de divers codes : Code de l'Action Sociale et des Familles, Code de la Santé
Publique, Code du Travail... Pour la population des personnes handicapées mentales vieillissantes
accompagnées par les SAVS, nous noterons plus particulièrement deux points : elle crée une nouvelle
institution, la MDPH, puis elle précise les modalités de fonctionnement de la CNSA.
La Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH)
Cette nouvelle structure, maillon important de la loi, est créée dans chaque département à compter du 1er
janvier 2006.
Guichet unique, elle a une mission d'accueil, d'information, d'accompagnement et de conseil auprès des
personnes handicapées et de leurs familles, ainsi que de sensibilisation de tous les citoyens au handicap.
Chargée d'organiser les équipes pluridisciplinaires d'évaluation, ainsi que la CDAPH, elle assure la
gestion d'un fonds départemental de compensation du handicap et abrite une équipe de veille de soins
infirmiers.
La MDPH est sollicitée par les personnes accompagnées par les SAVS concernant leurs demandes
d’accompagnement par un SAVS, de reconnaissance de leur qualité de travailleur handicapé, d’orientation
professionnelle ou d’aides en lien avec leur projet de vie. Celles-ci sont examinées par la CDAPH qui
prend des décisions relatives à l'ensemble des droits de la personne handicapée, sur la base de l'évaluation
réalisée par l'équipe pluridisciplinaire, des souhaits exprimés par cette même personne handicapée, (ou
son représentant légal) dans son projet de vie et du plan personnalisé de compensation.
La compensation est désormais établie comme un droit visant à répondre, pour une personne, aux
conséquences de son handicap, quels que soient l’origine et la nature de sa déficience, son âge ou son
22
mode de vie. Elle doit favoriser la pleine participation à la vie sociale et l'accès à la citoyenneté au travers
du principe d'égalité des droits et des chances. Elle consiste donc à répondre aux besoins de la personne.
Dans le cas des personnes handicapées vieillissantes, nous pouvons citer ceux d’aménagements du
domicile ou du cadre de travail, ceux d’aides de toute nature à la personne ou aux institutions pour vivre
en milieu ordinaire.
Les besoins de compensation de la personne handicapée figureront dans un plan personnalisé. Les besoins
sont évalués par l’équipe pluridisciplinaire, parallèlement à la demande de reconnaissance de handicap. Ils
donnent droit dans son aspect individuel à l'attribution de la prestation de compensation du handicap
(PCH). L'âge limite d'attribution de cette prestation est fixé à 60 ans, mais pour la population qui nous
concerne, elle fait l'objet avec l'APA, d'un droit d’option. Choix rendu possible du fait du bénéfice
antérieur de la prestation de compensation. Ces allocations doivent être harmonisées d'ici 2010. La loi
affirme ainsi la prise en charge du droit à compensation par la solidarité nationale.
Par ailleurs, les conditions d'attribution de l'AAH ne sont pas modifiées : cette allocation reste une
prestation subsidiaire. Selon la situation de la personne, elle peut se cumuler avec d’autres ressources : le
complément de ressources ou la majoration pour la vie autonome.
La Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie (Art. L 14.10 et suivants du CASF)
La Caisse Nationale de Solidarité pour l'Autonomie fut créée par la loi N° 2004 - 626 du 30 juin 2004
relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
Elle a pour mission, de "contribuer au financement de la prise en charge de la perte d'autonomie des
personnes âgées et des personnes handicapées dans le respect de l'égalité de traitement des personnes
concernées sur l'ensemble du territoire" et d’assurer un rôle d'expertise technique, de proposition, d'appui
dans les domaines de l'évaluation des besoins de compensation, et de programmation des réponses (APA,
Prestation de Compensation).
Le législateur a fixé les critères de répartition entre les départements des concours de la CNSA tant pour
le secteur du handicap que de celui des personnes âgées. Dans chacun des cas, cette répartition tiendra
compte du nombre de bénéficiaires des prestations concernées, de la population du département et de ses
ressources.
Nous venons de dessiner, au travers d’une brève synthèse des textes législatifs, un panorama des
principales institutions et des services concernés par notre étude, dans le seul secteur du handicap. Pour
parler des personnes handicapées vieillissantes, un complément s’impose par la présentation de services
du milieu ordinaire puis de l’APA.
23
1.4.4. Les services d’assistance à domicile
Ils font parties des services cités aux paragraphes 6 et 7 de l’article 15 de la loi 2002-2, mais les textes les
encadrant se trouvent dans le Code de l’Action Sociale et des Familles (CASF). Ces services sont
réglementés par le décret n°2005-1135 du 7 septembre 2005.
Ils sont au nombre de trois :
- les SSIAD, Services de Soins Infirmiers A Domicile qui ont une mission spécifique de soins
médicaux, sur prescription. Ils relèvent du champ sanitaire.
- les SAAD, Services d’Aide et d’Accompagnement à Domicile, appelés plus communément
services d’aide à la personne. Leurs prestations « s’inscrivent dans un projet individualisé d’aide et
d’accompagnement » et sont réalisées par « les aides à domicile » comme les auxiliaires de vie ou
les aides ménagères.
- les SPASSAD, Services Polyvalents d’Aide et de Soins A Domicile qui assurent des missions
regroupant celles des deux services précédemment nommés.
Le financement des prestations de ces services relève soit de l’assurance maladie soit de la personne ellemême. Pour faciliter leur accès par un maximum de personnes en ayant besoin, des aides ont été
organisées, dont la principale est l’APA.
1.4.5. L’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA)
La loi n°2001-647 du 20 juillet 2001 permet depuis le 1er janvier 2002, aux personnes âgées en perte
d’autonomie de percevoir l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA). Comme nous le disions, cette
aide financière permet d’avoir recours aux services compétents et nécessaires pour effectuer les actes de la
vie quotidienne.
Pour les personnes résidant à domicile, son octroi est soumis à une évaluation du niveau de perte
d’autonomie réalisée par une équipe médico-sociale du département, au moyen de la grille AGGIR11.
Cette évaluation constitue la base sur laquelle cette même équipe élabore un plan d’aide précisant les
besoins de la personne et, en conséquence, le montant de l’allocation.
Ce montant est fonction d’une part du groupe GIR dans lequel est classé la personne, ensuite des dépenses
réellement engagées parmi celles prévues dans le plan d’aide, puis de la participation restant à charge du
bénéficiaire en fonction de ses ressources.
Ces différents textes constituent le cadre juridique national12 dans lequel s’inscrivent les SAVS et leurs
11
Autonomie Gérontologique, Groupe Iso Ressource
12
Il convient de noter que le règlement départemental d’aide sociale (RDAS) peut préciser les règles relatives aux
établissements et services implantés dans le département, et sous la compétence du Conseil général.
24
professionnels. Il fait écho aux besoins identifiés chez les usagers.
1.5. Conclusion
Les notions de handicap et de vieillesse peuvent être traitées séparément pour leur compréhension, mais la
réalité du vieillissement des personnes handicapées nous contraint à réfléchir sur leur association et à la
prise en charge des personnes concernées. Que les besoins des personnes handicapées mentales soient
spécifiques ou convergents avec ceux des personnes âgées dépendantes, ils nécessitent un
« accompagnement collectif ou un traitement de l’environnement pour compenser les effets négatifs d’un
déficit de regard, de reconnaissance et de soutien qui constituent souvent des facteurs déterminants du
processus d’exclusion » (rapport de l’ODAS 2003).
On notera qu’une harmonisation des dispositifs de politiques publiques pour personnes handicapées et
personnes âgées dépendantes est en cours, préfigurée par la CNSA qui concerne les deux publics, et
prévue par la loi « handicap » de 2005.
Déjà cité à plusieurs reprises, le mot accompagnement figure dans de nombreux textes concernant les
personnes handicapées ou les personnes âgées. De plus il fait partie de la dénomination des services qui
servent de cadre de référence à notre étude. Il nous parait donc indispensable de nous pencher sur ce qu’il
recouvre.
25
CHAPITRE 2
L’ACCOMPAGNEMENT : de la théorie à la pratique
Utilisé dans de nombreux champs disciplinaires tels que la santé, la formation, les transports…le mot
« accompagnement » est devenu incontournable tant dans le monde du handicap que dans celui de la
vieillesse ou de l’exclusion.
La relation d’accompagnement est un outil fortement utilisé par le législateur : les lois du 2 janvier 2002
«rénovant l’action sociale et médico-sociale », du 4 mars 2002 « relative aux droits des malades » et du 11
février 2005 « relative aux personnes handicapées », l’ont inscrite dans le code de la santé et le code de
l’action sociale et des familles.
Avec Marie Odile BRUNEAU (1999) nous pouvons noter que la notion d’accompagnement se développe
dans le passage d’une société traditionnelle à une société individualiste pour pallier la perte des liens
communautaires et faire face à l’exclusion.
Dans ce mouvement de mutation, elle se révèle être contemporaine du phénomène d’individualisation
c’est à dire d’une attente plus grande concernant la singularité de la personne et le développement de son
autonomie. S’y ajoute la volonté d’aider l’usager soit à accéder comme citoyen à la reconnaissance et à
l’usage de ses droits soit à les maintenir.
Le contexte culturel ainsi précisé nous allons nous attacher à éclaircir ce que recouvre le terme
accompagner. Après une approche de la notion d’accompagnement nous présenterons quelques supports
pour le professionnel et terminerons par trois des raisons pour lesquelles il est mis en place.
2.1. L’accompagnement tel qu’on le définit
Nous trouvons l’idée d’un concept imprécis chez Claude MACQUET et Didier VRANCKEN (2006) qui
le relient à la multiplication des catégories de personnes auxquelles il s’adresse, et des dispositifs qui
l’utilisent. Pour eux, il renvoie à une conception plutôt « pragmatique » de pensée dans l’action.
Cependant, les auteurs repèrent deux idées centrales qui sont, d’une part, de considérer la personne
handicapée non plus comme « l’objet d’une catégorisation » mais comme « une personne » et, d’autre
part, de mettre cette personne « au centre du processus ». Après avoir identifié les ressources et les
compétences de la personne handicapée, l’intervenant se doit de les solliciter dans un accompagnement
individualisé. Parmi ces compétences, celle d’entrer en communication est primordiale.
26
Simultanément, est constaté le passage des politiques de prise en charge du « faire à la place de » dans
un « idéal adaptatif », à des politiques d’accompagnement du « faire avec » dans un « idéal actif ». Dans
ces nouvelles pratiques, la personne handicapée vit investie de la responsabilité de ses choix et de ses
actes. La valeur principale mise en avant est la confiance, confiance en soi, mais aussi en l’autre, car elle
est partie intégrante de la relation praticien-usager.
Le concept clé est le réseau qui environne la personne et que celle-ci devra pouvoir solliciter en cas de
difficulté. A cet effet, il doit être réseau de liens, de compétences et de savoir-faire. Son bon
fonctionnement est assujetti à la relation de confiance établie avec la personne afin qu’elle soit en mesure
de s’impliquer et de créer du lien. Dans un esprit de reconnaissance réciproque cette relation permet de
s’adapter au rythme et aux perspectives qui sont donnés par la personne accompagnée et d’éviter l’écueil,
sous prétexte de prise en charge, de l’anéantissement de l’être social. Roland Ramzy GEADAH (2000) y
ajoute l’idée de prendre soin dans une proximité-distance maîtrisée, permettant d’être touché mais non
troublé.
Maela PAUL (2004) nous propose dans son ouvrage une exploration sémantique de l’accompagnement.
L’évolution de ce terme au fil des siècles permet à l’auteur de dégager trois grandes idées dans son emploi
actuel : celle d’un ajout, puis celle d’un support, d’une protection asymétrique et enfin celle d’une
dynamique et d’un déplacement en commun. L’étude étymologique du mot ajout permet de repérer deux
principes simultanés : celui de réparation et celui d’alliance.
Nous trouvons ainsi associées l’idée de lien à celle d’étayage et de partage. Son application nécessite donc
au minimum deux personnes liées par une situation définie et temporaire, pour un cheminement partagé
où chacun, d’inégale puissance, a une place spécifique.
Afin de compléter la signification du nom, l’auteur nous propose de repérer les problématiques à l’œuvre
dans l’action d’accompagnement. Le « déploiement du sens littéral d’accompagner » permet d’élargir le
champ d’action selon trois dimensions :
- relationnelle : en se joignant à la personne, à une place modulable pour l’accompagnant au fil des
évènements ; c'est-à-dire qu’il peut aller avec elle de différentes manières : à côté, devant, derrière,
…son rôle étant de fournir les repères et les outils.
Le principe de similitude que contient cette dimension implique la primauté d’un accord, d’un
« ensemble » autour de la question de l’autre dont on peut rappeler qu’il est le seul auteur.
- temporelle : il s’agit d’aller au rythme de l’autre, de se synchroniser avec lui en respectant la place
de chacun. L’auteur relève un principe d’altérité, générateur de symétrie/dissymétrie : il y a l’un et
l’autre et les deux sont distincts.
- de spatialité : car il y a une idée de changement de place : pour aller où il va.
27
Ce mouvement implique un principe dynamique de transformation et donc une modification non pas
simplement de la situation de la personne accompagnée, mais surtout de son positionnement.
L’étymologie du mot compagnon (partager le pain) permet d’identifier pour l’accompagnant la qualité de
passeur et de celui qui partage. L’accompagnateur est celui qui aide à dépasser une étape. Quant au
partage il est celui d’une « nourriture », en vue d’élever, de permettre une évolution et de favoriser la
création. Dans cette situation de partage, deux existences distinctes occupent le même terrain,
construisent un espace commun: il n’appartient qu’à eux et il est mitoyen.
Pour une définition plus complète du mot accompagnement, il est utile de chercher ce que nous dit le
verbe accompagner. Il a de nombreux synonymes. Leur étude montre que l’idée d’accompagner se trouve
mise en opposition avec l’idée d’abandonner ou de délaisser. La qualité de la relation établie se trouve
ainsi mise en évidence dans une symbolique positive. Une notion supplémentaire est introduite : la
sollicitude, en opposition à l’indifférence. Il devient alors utile d’explorer le « champ sémantique
d’accompagner ».
Maela PAUL l’organise autour de trois synonymes du verbe accompagner, qui de ce fait participe de trois
dynamiques différentes :
- conduire : ce verbe contient lui-même trois idées : faire aller vers, avec soi, mais en étant à la tête
du mouvement. Il y a influence sur l’autre et donc exercice d’un pouvoir. Dans ce cas on trouve une
dynamique de progression selon une ligne de conduite.
- guider : il s’agit d’éclairer pour permettre le choix d’une orientation ; nous avons une dynamique
de développement.
- escorter : ce verbe introduit l’idée de protection apportée à autrui, considéré par conséquent en
position de faiblesse ou de difficulté. Cela implique un dynamique de construction ou de
rétablissement.
Ces trois « régions synonymiques » présentées dans leurs différences sont ensuite articulées entre elles
par des zones de recoupement identifiées sous les termes de surveiller, veiller sur et éveiller. L’idée de
veille en constituerait donc le noyau tout en étant implicite.
La notion d’accompagnement se révèle donc être une notion complexe, réciproque et
asymétrique, mettant en jeu des compétences et des responsabilités différentes. Pour
l’accompagnateur, il s’agit toutefois de ne pas confondre les inévitables risques à envisager, car
liés à la liberté de l’autre et à toute vie, avec les dangers qu’il doit identifier et éviter autant que
possible. Pour ce faire, en tant que professionnel, il bénéficie d’un certain nombre d’appuis que
nous allons maintenant présenter.
28
2.2. Quelques soutiens et repères de l’accompagnateur
Nécessaires à tout professionnel, ils sont ce qui garantit la qualité de la relation d’accompagnement en lui
permettant d’ajuster sa place. Nous allons les aborder au travers de 4 thèmes : le partenariat, différentes
figures relationnelles, une éthique commune, des compétences.
Cette diversité traduit des points de vue énoncés de places différentes qui se complètent dans la
perspective d’une approche plus globale.
2.2.1. Le partenariat
Pour Marie Odile BRUNEAU, le travail en partenariat ou en réseau est la meilleure garantie de réussite
face aux risques présents dans la fonction d’accompagnateur. Cela permet d’éviter « le piège de la relation
duelle qui est d’instaurer un lien de dépendance ». Le rôle de l’accompagnateur est de médiatiser les
relations sociales, qui permettront à la personne accompagnée de « trouver un entourage », puis de veiller
à la coordination de divers intervenants.
Pour Charles GARDOU (1997), le partenariat résulte de la réunion de professionnels aux fonctions
spécifiques, qui ne se superposent pas et encore moins ne se confondent, autour de la vulnérabilité des
personnes qu’ils accompagnent. Son but est de privilégier une approche globale de la personne au lieu
d’interventions compartimentées.
Nous percevons chez ces deux auteurs les avantages que présente le partenariat tant pour le professionnel
que pour l’usager. Il en est de même pour Jean Michel BELORGEY (1999) qui aborde la question du
partenariat comme l’une des « figures possible de la réciprocité ».
Dans un essai de définition, il apparaît que ce terme désigne celui qui joue avec, comme celui qui joue
contre, à la fois le coéquipier ou l’adversaire. L’expression partenaires sociaux a d’ailleurs différentes
utilisations. L’auteur en arrive à penser que ce qui fait avant tout le partenariat c’est l’accord sur la règle
du jeu. Ces deux pivots orientent la façon de penser le partenariat qui signifie alors :
- Tout d’abord, faire quelque chose ensemble, sur la base d’un accord minimal (les moyens) et sans
nécessaire égalité des forces. Le partenariat aide chacun à se positionner et permet des approches
différentes du fait des places différentes. Il implique d’accepter les différences et la concurrence, de
« sortir du narcissisme et du fantasme de toute puissance », de s’ouvrir à l’autre, d’évaluer les
divergences, les résistances et les opportunités. Les partenariats peuvent être multiples car construits
sur la complémentarité des acteurs.
- Puis, comme indiqué précédemment, établir un minimum de règle du jeu et veiller à son respect.
Dès lors, qui peuvent en être le(s) auteur(s) et le(s) garant(s) : un tiers ou les joueurs eux même ? Pour
Jean Michel BELORGEY les deux options peuvent être envisagées. Mais la meilleure garantie repose
dans les « partenariats réglés », c’est à dire déjà éprouvés.
29
Ainsi, nous pouvons considérer que le partenariat concerne, bien sûr, les relations entre professionnels,
mais peut aussi être une forme relationnelle de l’accompagnement. Cette possibilité amène l’idée que la
place accordée à l’usager oriente l’accompagnateur dans sa pratique. D’autres places ou représentations
de la personne accompagnée peuvent aussi lui permettre d’ajuster ses interventions.
2.2.2. Différentes figures relationnelles
Laurent BARBE (2006) examine différentes facettes de la relation entre structure et personne
accompagnée. Celles-ci au nombre de six peuvent se décliner comme suit :
L’usager comme objet d’une intervention professionnelle.
Cette figure est la plus évidente puisqu’elle s’établit entre un professionnel et une personne « en
difficulté ». La professionnalité implique des connaissances et de la technicité qui fondent les
compétences dans la spécialisation demandée. La relation s’appuie sur le besoin d’aide des usagers d’une
part et sur les principes qui l’encadrent d’autre part.
Des tensions peuvent apparaître lorsqu’il y a désaccord entre les intervenants sur la compréhension de la
situation, en fonction de l’adhésion de la personne aux interventions professionnelles. Dans ce cas, il peut
y avoir « danger éthique », c'est-à-dire un risque d’influence, de non respect de l’autonomie de l’usager.
L’usager comme sujet de droit.
Cette affirmation est désormais au cœur de nombreuses lois et règlements. Elle soumet chacun à une
même règle sociale supérieure (notamment la loi 2002-2). Cette figure relationnelle protège donc de
l’arbitraire. Elle donne un cadre de référence auquel il convient de s’adapter.
L’usager comme sujet politique.
Nous vivons en démocratie, cela implique un droit intangible pour chacun de s’exprimer et de participer à
la vie collective. Cette évidence devrait irriguer les modes de fonctionnement de l’action sociale en
général. Ceci passe par plus de concertation, par la mise en place d’instances de débat entre professionnels
et usagers, avec une attention particulière à la manière de donner accès aux informations nécessaires.
L’usager comme être social.
Cette figure amène le professionnel à positionner son travail d’accompagnement en fonction des
appartenances multiples, de l’identité plurielle de l’usager. Il s’agira d’accepter de jouer les rôles de
passeur, de médiateur, de négociateur. Ce positionnement est pris dans un équilibre à trouver entre les
informations nécessaires à l’exercice de la mission et le respect, la préservation, de l’intimité de l’usager.
L’usager comme figure fraternelle du prochain.
30
Cette figure relationnelle se situe en dehors du professionnel dans le sens où elle fait référence à des
valeurs ou principes supérieurs. (Droits le l’Homme, religion, désir de faire le bien de l’autre…). Dans
certains cas, elle peut amener à dépasser le cadre légal, faire agir au nom d’une simple humanité. Pour
autant, elle n’autorise pas à ne fonctionner qu’à la conviction. L’auteur note qu’il reste utile pour penser
l’action de se référer à la distinction établie par Max WEBER entre éthique de conviction (centrée sur la
validité de principe) et éthique de responsabilité (centrée sur la validité des effets).
Une façon d’éviter les dérives est de faire référence, en parallèle, aux autres figures relationnelles.
L’usager comme mystère.
Cette dernière figure évoque la nécessité de ne pas réduire la personne accompagnée à son symptôme et à
ses difficultés mais de lui laisser une part non dévoilée. Elle permet une attitude d’ouverture, d’accueil de
l’imprévu, de découverte, propice à l’expression et au développement de nouvelles potentialités.
Aucune de ces figures relationnelles n’est idéale pour penser la relation d’accompagnement, mais chacune
est porteuse de possibles et de limites. L’intérêt se trouve dans leur confrontation et dans le repérage de
leur place dans l’analyse du rapport à l’usager et de l’alliance passée avec lui. Laurent BARBE les définit
comme des « éléments pour une éthique relationnelle ».
Si nous définissons l’éthique comme « un questionnement sur la pratique », nous pouvons considérer
qu’elle est indissociable de la pratique d’accompagnement et qu’elle l’encadre.
Que peut-il en être de l’éthique en travail social ?
2.2.3. Une éthique commune
Pour Jacques LADSOUS (1999), ce terme définit une « espèce d’attitude commune » dans le but d’un
accord complexe. Pour ce faire, l’auteur ouvre quelques pistes :
Le retour aux origines
Le travail social est une mission de service public. Il nécessite de s’engager, de faire en sorte que « ceux
qui sont exclus ne soient plus objets de missions mais sujets et acteurs de missions ». Ce qui est de la
responsabilité des travailleurs sociaux.
Cela peut prendre forme tout d’abord au travers des textes, des logiciels professionnels qui, au lieu de
parler des personnes qui ont un handicap à partir de leurs déficiences ou incapacités, le feraient à partir de
leurs potentialités positives. Ensuite c’est dire que l’accompagnement est avant tout un partage et un
échange sans hiérarchie de rôle.
31
C’est aussi se rappeler que l’usager que nous accompagnons est une personne, un être singulier relié aux
autres par un lien qui fait qu’il appartient à du social, ce qui le rend solidaire et responsable.
Pour l’auteur il demeure une croyance importante, dans le fait qu’il existe dans tout homme un élan vital
qui le conduit dans le sens d’un développement.
Le sens de l’équipe
Le social est fondamentalement un travail d’équipe. Il nécessite des compétences différentes donc des
formations et des personnalités différentes. Chacun y a son rôle, sa fonction, d’importance équivalente au
sein d’une organisation. Ceci n’exclut pas une hiérarchie coordinatrice mais exige en premier lieu une
mise en commun entre les membres de l’équipe pour que fonctionne et s’exprime la pluridisciplinarité.
Le travail en équipe est aussi ce qui permet d’appréhender l’usager dans sa globalité, dans son unité. Le
travail morcelé ne permet pas à l’individu en difficulté de se retrouver.
De plus, cette référence multiple garantit la réalisation du travail d’accompagnement au-delà de l’absence
des « personnes » professionnelles. Les rôles peuvent être maintenus, des relais trouvés pour assurer la
continuité. Nul n’est irremplaçable.
La dialectique en action
Il est fait référence ici à la notion antique d’agora comme espace de débat. Espace de débat comme espace
de vie où il est possible d’échanger sur la perception réciproque de « qu’est ce qui est bon, qu’est ce qui
est mauvais » pour chacun, dans une tentative de réelle compréhension de l’autre et de sa pensée.
Le développement comme projet.
Le travail social ne s’inscrit pas dans la gestion mais dans le développement ; C'est-à-dire que l’impératif
premier est d’améliorer la situation des personnes et de les accompagner dans leur développement, dans
leur projet de vie. Les nécessités et qualités gestionnaires viennent au second plan comme moyen au
service de cette mission.
Pour cette mission, bénévoles et professionnels ont leur place à condition de faire preuve de compétences
ce qui « ne peut pas aller sans une certaine forme de qualification » et un « processus de formation
continuée ».
Ces différentes pistes développées nous permettent de comprendre comment une éthique commune donne
un sens à la pratique, comment elle peut servir de guide dans la construction des interventions du travail
social. Sa présence est sous jacente et constitutive de la façon dont s’établit la relation d’accompagnement
avec les personnes en vue de la réalisation de leur projet. En parallèle vient d’être soulignée la question
des compétences de l’accompagnateur déjà évoquée par d’autres auteurs et qui mérite d’être reprise.
32
2.2.4. Des compétences
Nous disions précédemment avec Jacques LADSOUS que la pratique prolongée du travail social nécessite
des compétences s’acquerrant au cours de formations et aboutissant à des qualifications.
En effet, la vie a la caractéristique de toujours avancer, de se développer, de provoquer des
changements…Ainsi les travailleurs sociaux sont obligés de s’adapter aux modifications du contexte et
doivent donc réajuster leurs savoirs influençant leur savoir faire et leur savoir être.
Nous retrouvons aussi ce besoin de compétences et de savoir énoncé par Roland Ramzy GEADAH. Il
demande à l’intervenant de mettre l’usager sur le chemin d’une solution à un problème qui parait crucial.
Cela implique connaissances et réflexion. Le professionnel doit aussi se remettre en cause afin de
s’adapter à tout moment à la situation. Il y a donc nécessité de s’armer de méthodologie fiable et de
rigueur particulière de la pensée.
Pour lui, ces qualités gagnent à être doublées d’un « optimisme réaliste », c'est-à-dire d’un centrage sur
les potentialités plutôt que sur les manques des personnes accompagnées, mais tempéré par les précisions
du savoir acquis
De même, Marie Odile BRUNEAU souligne que « la première exigence éthique de l’accompagnant c’est
d’être un professionnel compétent ». Cette compétence, en intégrant travail éducatif et relation d’aide, les
dépasse en les enrichissant de « la croyance dans les capacités de la personne accompagnée ». Ses
compétences lui permettent de décrypter et d’évaluer les besoins et les difficultés de chaque usager afin de
chercher avec lui les manières d’y répondre et les soutiens qui lui seront nécessaires. Ensuite, il doit le
guider dans ses choix en lui donnant un « avis d’expert » pour l’aider à prendre conscience des exigences
du réel et des limites dues à son handicap. Ceci tout en sachant la stimuler pour l’aider à activer et
développer ses potentialités. Enfin, c’est à lui de coordonner le réseau mis en place et de veiller à sa
cohérence.
Tout cela ne va pas sans risques. Risques que sa responsabilité lui impose de mesurer et de prendre de
façon éclairée car ils sont liés à la liberté de l’autre et aux incertitudes de toute vie. Dans ce cas,
accompagner dans une prise de risque ne veut pas dire mettre l’autre en situation de courir des dangers.
« Au bout du compte, empêcher le risque, c’est empêcher la vie. Il n’y a pas de vie sans risque, pas de
liberté non plus, parce que laisser quelqu’un faire un choix, c’est prendre un risque avec lui, lui faire
confiance, mais aussi lui donner le droit de se tromper et de revenir sur sa décision ».(Paulette
GUINCHARD-KUNSTLER. 2006)
Ces compétences présentent des exigences sur deux plans : professionnel et personnel. Le
professionnalisme s’appuie essentiellement sur les qualifications, le travail d’équipe et la formation
continue. Quant aux ressources personnelles elles sont propres à chacun. La nature de l’accompagnement
33
fait qu’elles sont fortement sollicitées et parfois même mises à l’épreuve. Il s’agit de trouver et de garder
la place juste du « savoir être » face aux projections, manipulations et autres exercices abusifs de pouvoir.
C’est la raison pour laquelle une autre exigence du travail d’accompagnement est d’accepter un travail sur
soi-même. Ce dernier point est évoqué à plusieurs reprises dans certains ouvrages13 ; il nous semble
inévitable de le noter, mais nous ne l’approfondirons pas dans notre réflexion actuelle.
Au travers de la pensée des différents auteurs rencontrés, nous avons maintenant une idée de ce qu’est
l’accompagnement et de la façon dont il existe. Sa raison d’être a été évoquée mais elle mérite que nous y
revenions.
2.3. L’accompagnement : pour quoi et quels intérêts le soutiennent ?
L’accompagnement tel qu’il s’est développé, répond à une demande forte et multiple. Nous aborderons ici
trois thèmes qui nous semblent refléter ses principaux objectifs.
2.3.1. Un soutien à l’identité
Pour Michel AUTES (2000), une priorité du travail social est « l’accueil de l’Autre », c'est-à-dire sa
reconnaissance comme sujet à partir de sa demande. Toute demande est avant tout demande de
reconnaissance. La réponse ne peut donc se situer que dans une relation de partage. Le grand risque avec
les politiques sociales libérales serait de traiter le besoin sans entendre la demande et par là de nier le
sujet.
Pour Maela PAUL, le contexte actuel définit l’individu comme acteur et sujet, et donc nécessairement
réfléchissant. Ainsi, les conditions d’intégration sont soumises à une nouvelle norme. La démarche
d’accompagnement a pour tâche de permettre à l’usager d’accéder à une posture « réflexive et
délibérante ».
Avec la modernisation de la société et donc la disparition d’une référence indiscutable pour tous, le
consensus devient le seul recours pour les sujets libres. Celui-ci constitue le ressort interactif de la « libre
discussion ». Maintenant, un homme « parlant et agissant » (terme de Paul RICOEUR) délibère sur des
choix de vie qui renvoient à un désir de conformité, avec un idéal de vie.
Restreindre la délibération au choix des moyens réduit cette conformité à une normalisation, ce que rien
ne justifie, et constitue une première impasse.
13
Marie Odile BRUNEAU, Roland Ramzy GEADAH ainsi que Claude MACQUET et Didier VRANCKEN dans
les textes et ouvrages cités en bibliographie.
34
Une deuxième impasse consiste à « substituer à une quête de sens », une « quête des possibles » comme
but à atteindre.
Ces impasses ne sont-elles pas sous-jacentes à l’accompagnement, parfois contraint à devoir « bricoler »
du désirable et du réalisable ?
2.3.2. La visée : l’autonomie
Maela PAUL constate le développement de l’utilisation du terme d’autonomie. Cette dernière est souvent
définie comme « capacité globale à subvenir à ses propres besoin, à assumer son « atomisation » (terme
de CASTORIADIS). Elle devient alors synonyme d’indépendance (financière et matérielle) et renvoie à
une conception instrumentale de l’homme. Son développement fait partie d’une nouvelle normalisation au
sens d’une injonction collective. D’ailleurs elle est amenée à se prouver et à se vérifier.
L’autonomie post-moderne nécessite d’être en capacité de décider ; ce qui, dans notre société aux repères
devenus plus flous, amène un certain nombre d’individus à solliciter de l’aide. Nous pouvons le traduire
par « autonomie assistée ».
Mais l’autonomie peut aussi être le fruit d’une réflexion critique et faire appel dans son exercice à l’usage
de la liberté. Celle-ci est liée à la liberté d’arbitrage passant par l’identification des contraintes et
l’interprétation des héritages culturels.
Ainsi l’accès à l’autonomie du sujet se travaillerait au travers d’un affranchissement de tout pouvoir
institutionnel ainsi que d’une « activité communicationnelle » consistant à réfléchir, délibérer, imaginer à
propos de l’ensemble du contexte relationnel.
Se pose dès lors la question de l’ambivalence du lien. La modernité a bousculé les repères sociaux.
L’éclatement de la norme en plusieurs modèles renvoie les individus à eux-mêmes en même temps qu’à
l’obligation de choix. Le délitement du lien social a donc provoqué la nécessité, pour les plus fragiles, de
la création de prestations d’aide sur fond de communication.
L’accompagnement se comprend donc par une réflexion sur l’ambivalence du lien à la fois source
d’aliénation et/ou d’autonomie. L’autonomie implique à la fois d’admettre les critères qui rendront une
décision valide aux yeux de la société et d’être en capacité de les justifier. Elle est donc simultanément
dépendance et non dépendance. De plus le lien d’accompagnement est ce par quoi l’accompagnateur
pourra travailler l’autonomisation.
Pour Alan WALKER (2003), la promotion de l’autonomie des personnes handicapées mentales passe tout
d’abord par la résistance aux stéréotypes sur le handicap et l’âge. Ensuite, elle passe par une approche
centrée sur la personne et ses aptitudes qui maintient des aspirations et des attentes, et non sur son
35
handicap. Pour terminer, elle passe par leur participation aux côtés de leurs aidants à l’organisation de
leurs vies.
2.3.3. L’inscription dans l’espace commun
Pour Roland Ramzy GEADAH, l’accompagnement ne se réalise vraiment qu’au nom d’un corps social,
d’une communauté de destin. La vie s’inscrit dans « l’être ensemble », dans « l’agir sur l’ensemble » et
« l’inter-réagir ». De par ses origines, l’accompagnement se voit assigner deux missions : rappeler les
mécanismes de la vie active en société au demandeur d’aide et stimuler chez lui l’envie de partager
l’existence de ses contemporains pour l’inscrire dans l’espace social. A partir de là pourra être travaillée la
citoyenneté.
Sylvie HENNION-MOREAU (2006), résumant plusieurs auteurs, souligne que les travailleurs sociaux ont
une fonction « d’intermédiaire » auprès des personnes en difficultés quant à la connaissance de leurs
droits et à l’exercice de ceux-ci. Différentes lois14 ont récemment réaffirmé ces droits, déjà inscrits dans
des textes plus anciens15, mais demeurés éloignés du secteur sanitaire et social. Les obligations de
l’accompagnateur dans ce domaine vont de pair avec l’évolution de la reconnaissance des usagers :
comme citoyens à part entière et non plus comme assistés.
Cette analyse nous montre que l’esprit de la Loi (des lois) est conforme aux nouveaux rapports humains
établis dans notre société, entre les individus eux-mêmes, et entre les individus et leur environnement. De
la même façon, l’accompagnement s’y est adapté en se centrant sur la personne, en ayant comme but la
construction et le soutien de l’identité des bénéficiaires, avec une perspective d’autonomie et dans le
respect de leur citoyenneté. Dans le cas des personnes vieillissantes, ce rôle suppose beaucoup de
vigilance face aux modifications des capacités qui pourraient entraîner vers la considération d’une
moindre autonomie des sujets.
2.4. Conclusion
Notre objectif consistait à clarifier la notion d’accompagnement tant au niveau de la définition que de ce
qu’elle recouvre dans la pratique.
Avec l’apport des auteurs, nous pouvons conclure que l’accompagnement s’inscrit bien dans l’évolution
des pratiques sociales, elles-mêmes inscrites dans une contexte sociétal et législatif donné.
14
15
Lois 2002.2 du 2 janvier 2002, 2002.303 du 4 mars 2002 et 2005.202 du 11 février 2005.
Dans le Code Civil, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés
fondamentales du 4 novembre 1950
36
Il contient les idées de passage, ensemble, dans le respect de la trajectoire incertaine de la personne
accompagnée, à partir d’une relation duelle de qualité construite sur l’écoute et l’échange.
Il nécessite, pour l’accompagnateur, un environnement ressource. Celui-ci est constitué par l’appartenance
à un réseau professionnel et par des compétences acquises et actualisées, le tout englobé dans une éthique.
Enfin, l’accompagnement a des visées d’autonomisation et de socialisation sur la base d’une
individualisation.
Cette approche nous a permis de préciser ce qui se joue à l’intérieur de l’accompagnement. Nous n’avons
qu’évoqué le contexte dans lequel il se développe, les normes auxquelles il fait référence et les exigences
extérieures auxquelles il est soumis. Mais nous percevons que le soutien à une évolution du sujet, auteur
de lui-même, n’est pas déconnecté de ce cadre. De même, la création ou le renforcement des liens sociaux
impliquent une adaptation aux normes sociales.
De ce fait, l’accompagnateur peut se trouver dans la situation paradoxale d’aide à la construction d’un
individu singulier et d’une normalisation dans la lutte contre l’exclusion.
Ce paradoxe peut paraître inhérent à la relation d’accompagnement.
Comment, dans ce cas, l’accompagnateur ajuste-t-il son intervention ? Comment le professionnel peut-il
être respectueux de la personne et respecter en même temps la demande qui lui est faite au travers de sa
mission ?
L’analyse plus formelle des réponses mises en œuvres sur le terrain en fonction des besoins évalués va
permettre de compléter notre réflexion.
37
CHAPITRE 3
DES
BESOINS
LIES
AU
VIEILLISSEMENT
DES
BENEFICIAIRES, DANS LES SAVS DU DOUBS ?
Notre recherche bibliographique nous a permis de mieux caractériser les personnes handicapées mentales
vieillissantes, et de rendre compte des multiples facettes de la notion d’accompagnement. L’affinement de
la compréhension des conséquences du vieillissement des bénéficiaires des SAVS passe maintenant par
une étude de terrain.
Nous avons choisi de mener dans un premier temps une enquête quantitative. Notre objectif est de repérer,
d’une part, si de nouveaux besoins apparaissent véritablement en lien avec le vieillissement, et, d’autre
part, comment les professionnels adaptent leur pratique face à ces nouveaux besoins.
Qu’entendons-nous ici par besoin ?
Pour le Petit Robert le besoin est « une exigence née de la nature ou de la vie sociale » et avoir besoin de,
c’est « éprouver, voir la nécessité, l’utilité de. »
Dans cette étude, les besoins correspondent à deux points de vue. Tout d’abord à celui des bénéficiaires
(besoins ressentis) au travers de ce qu’ils en disent, de ce qu’ils expriment comme leur étant nécessaire.
Ces besoins peuvent concerner des aspects aussi différents que la santé ou les loisirs, correspondant ainsi
à la définition donnée par le dictionnaire cité ci-dessus. Ensuite ils correspondent à l’évaluation que
peuvent en faire les professionnels (besoins évalués). Celle-ci peut se calquer sur celle exprimée par les
bénéficiaires, mais elle peut aussi la compléter. Dans les deux cas, la satisfaction des besoins tend à
préserver au mieux le bien être de la personne, y compris son autonomie et son indépendance.
Dans cette recherche, nous nous centrons sur les besoins des bénéficiaires des SAVS âgés de plus de 50
ans. Les besoins exprimés concernent essentiellement une aide à la gestion de leur vie quotidienne dans
ses différentes dimensions : santé, logement, budget… nous pouvons les traduire en « besoins d’aides
humaines ». La question de leur positionnement dans la pyramide de Maslow reste ouverte.
38
3.1. Présentation de l’enquête quantitative
Notre enquête porte sur l’ensemble des SAVS pour personnes handicapées mentales du département du
Doubs. Nous avons adressé notre questionnaire aux 7 services qui nous ont tous répondu. Sur les 114
usagers de plus de 49 ans déclarés, 109 fiches individuelles ont pu être enregistrées et traitées.
Pour chaque service, notre questionnaire (voir en annexe) comporte deux parties : une fiche service et des
fiches individuelles.
La fiche service16 nous renseigne sur le service : sa date d’ouverture, la composition de son équipe de
terrain, la répartition par tranches d’âge de 5 ans de la population accueillie et les mouvements éventuels
(entrée, sortie) de personnes de 50 ans et plus durant les 3 dernières années.
La fiche individuelle17 concerne chaque usager de 50 ans ou plus. Elle
aborde, d’une part, les
interventions du service à son égard, par domaine d’accompagnement, dans leur fréquence et leur
évolution durant les 2 dernières années, et, d’autre part, les partenariats dans leur diversité, leurs
modifications et leur coordination ou non par le service.
Le traitement de ces fiches nous permet, après la présentation des services, d’analyser la nature et la
fréquence des interventions effectuées auprès des usagers concernés, puis, les partenariats activés par les
accompagnateurs et, enfin, de mesurer la coordination existante.
Le département du Doubs regroupe 7 SAVS pour « personnes handicapées mentales », qui couvrent
l’ensemble du territoire départemental depuis 1998. Cette couverture est le fruit d’une politique
départementale conjuguée avec des demandes de création de SAVS de la part d’institutions. Les
négociations menées aboutissent à l’ouverture de nouveaux services pour les zones de Valdahon,
Morteau, Maîche et Baume-les-Dames, rattachés aux structures existant localement : publique pour le
premier et privées (ADAPEI) pour les trois autres.
Il n’y a pas de création dans les trois zones urbaines, mais un renforcement des services existants de
Pontarlier (1977), Montbéliard (1981) et Besançon (1984). Pour ces derniers, la politique départementale
a laissé la possibilité d’établir des conventions partenariales avec les institutions demandeuses de ce type
de service et situées dans le périmètre d’intervention défini.
Faisant suite à cette organisation, le Conseil Général a souhaité que les SAVS utilisent une trame
commune pour établir leur rapport d’activité. Le travail réalisé et l’accord trouvé permettent aujourd’hui
de se référer à des domaines identiques dans l’accompagnement proposé par chaque service.
16
cf fiche en annexe
17
cf fiche en annexe
39
Cette homogénéité nous a permis de construire un questionnaire compréhensible par tous les
professionnels auxquels il s’adressait. Il n’était en effet pas envisageable, pour cette étape de notre travail
de se rendre sur le terrain pour récolter les données. Celles-ci sont donc déclaratives et leur analyse a pu
être complétée par quelques précisions demandées par téléphone. Nous avons donc tenté de collecter des
informations aussi explicites que possible concernant notre problématique, sur notre unité géographique et
politique.
3.2. Analyse des « fiches service »
3.2.1. L’équipe des professionnels de l’accompagnement
-2- Répartition des « professionnels de terrain » des SAVS du Doubs
Autres (M.E. et E.T.S.)
7%
Psychologues
2%
Animateurs socioculturels
8%
Conseillères en
économie sociale et
familiale
19%
Educateurs spécialisés
58%
Assistants de services
sociaux
6%
Ce graphique nous montre une présence majoritaire de professionnels ayant une formation « d’éducateur
spécialisé ». En effet, les équipes ont souvent été composées sur la base de services éducatifs, proches de
celles des institutions du monde du handicap (19 ETP) : éducateurs spécialisés, éducateur technique
spécialisé, moniteur éducateur et psychologue) dont elles font partie. Puis elles se sont ouvertes aux autres
professions du social, que l’on rencontre davantage dans les services sociaux de secteur ou dans l’action
sociale de façon plus globale (9,5 ETP : conseillères en économie sociale et familiale, assistants de service
social et animateurs socioculturel). Cette pluridisciplinarité permet une diversification des approches ainsi
40
que des apports réciproques de connaissances et de savoir-faire, propices à une adaptation élargie aux
différentes situations d’accompagnement. De plus, elle facilite la création des partenariats.
-3- Composition des équipes par SAVS
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
MD
P
MU
ME
V
BD
Educateurs spécialisés
Assistants de services sociaux
Conseillères en économie sociale et familiale
Animateurs socio-culturels
Psychologues
Autres (M.E. et E.T.S.)
B
(Chaque équipe=1)
Les équipes les plus diversifiées sont aussi celles des équipes les plus nombreuses : Montbéliard (MD),
Pontarlier (P) et Besançon (B).
3.2.2. Le nombre d’accompagnement par équivalent temps plein (ETP)
De façon globale ce chiffre est établi par le département selon deux modèles :
- environ 25 pour les services les plus anciens, qui se sont progressivement développés et qui se situent en
zone urbaine ou l’autonomie est facilitée par l’accès aux moyens de transport, aux services …
- environ 15 pour les services crées en 1998, plus jeunes, plus petits et situés en zone rurale ce qui amène
davantage de déplacements plus lointains.
41
3.2.3. La population accueillie par les services d’accompagnement
Analyse par service :
-4- Tableau récapitulatif du nombre d’usagers accueillis par les SAVS du Doubs
HOMMES
MD
P
MU
ME
FEMMES
V
Moins de 25 ans
39
1
1
1
1
De 25 à 29 ans
22
4
1
3
2
De 30 à 34 ans
23
1
1
2
De 35 à 39 ans
24
7
2
De 40 à 44 ans
25
7
De 45 à 49 ans
16
De 50 à 54 ans
BD
B
MD
P
MU
ME
TOTAL
V
BD
B
MD
P
MU
ME
V
BD
B
18
61
17
1
0
3
2
13
36
56
2
1
1
4
2
31
97
3
12
47
17
3
2
4
2
13
41
39
7
1
5
6
5
25
88
1
0
19
47
15
4
1
0
2
0
9
31
38
5
2
2
3
0
28
78
1
3
2
8
47
16
0
1
1
2
1
8
29
40
7
3
2
5
3
16
76
0
1
6
3
4
46
9
6
2
0
1
2
4
24
34
13
2
1
7
5
8
70
10
0
2
2
10
40
15
5
4
3
2
3
32
31
15
4
5
4
0
13
72
16
6
1
4
1
9
37
12
4
3
2
1
3
25
28
10
4
6
2
0
12
62
De 55 à 59 ans
5
6
3
1
2
3
20
8
2
1
2
0
2
15
13
8
4
3
2
0
5
35
De 60 à 64 ans
1
1
2
0
2
1
7
3
1
1
1
6
1
4
2
1
3
0
2
13
1
1
2
1
1
1
1
4
0
1
1
2
1
0
1
6
Plus de 64 ans
Total
171
43
12
16
20
8
84
354
109
29
12
12
17
7
57
243
280
72
24
28
37
15
141
597
% plus 49 ans
13%
30%
58%
38%
25%
0%
15%
19%
18%
34%
33%
50%
18%
0%
12%
21%
15%
32%
46%
43%
22%
0%
14%
19%
En grisé, population sur laquelle porte l’enquête par fiches individuelles (chapitre suivant)
Nous constatons une forte hétérogénéité dans la répartition par âge de la population des différents SAVS.
Les personnes de 50 ans et plus représentent une proportion qui varie entre 0% et 48% de la population
globale du service pour une moyenne de 19% sur l’ensemble des services.
Pour les deux services dont le pourcentage est le plus élevé (Morteau et Maîche), nous avons calculé que
l’âge moyen à l’entrée au service des personnes actuellement âgées de plus de 49 ans est respectivement
de 52 et 53 ans. Il s’avère que ces personnes furent prioritaires à l’ouverture en 1998. Les sorties étaient
attendues par les foyers, et des familles étaient demandeuses d’un soutien en relais des parents.
Un troisième service créé en 1998 (Valdahon), donne une moyenne d’âge à l’entrée de la population
étudiée qui est équivalente, mais dans ce cas, ces personnes ne représentent que 0,2.% de l’effectif total.
Le quatrième service créé en 1998 (Baume les Dames) reçoit des personnes qui ont toutes moins de 45
ans.
Pour les trois services les plus anciens, nous obtenons une moyenne d’âge à l’entrée, pour les personnes
de 50 ans et plus, comprise entre 30 et 40 ans. Effectivement peu de personnes arrivent à plus de 50 ans :
14 dans les 10 dernières années pour les 3 services confondus.
42
Analyse globale
-5- Population globale accueillie par les SAVS du Doubs en 2006
70
60
50
40
30
20
10
0
M
ns
oi
de
25
s
an
De
25
à
29
s
an
De
30
à
34
s
an
De
35
à
39
s
an
De
40
à
44
s
an
De
45
à
49
s
an
De
FEMMES
50
à
54
s
an
De
55
à
59
s
an
De
à
60
64
s
an
us
Pl
de
65
s
an
HOMMES
Nous observons que l’ensemble des services reçoit une majorité d’hommes : 59% sur le total de la
population. La comparaison de ce graphique avec celui présenté au premier chapitre sur la population
française, met en évidence une sur-représentation des hommes ainsi qu’un déficit dans les tranches d’âges
des plus de 60 ans. Cette dernière apparaît très clairement dans le schéma suivant.
-6- Population des SAVS : pourcentage des usagers de 50 à 59 ans et de 60 ans et plus
De 50 à 59
ans
16%
60 ans et plus
3%
Moins de 50
ans
81%
43
L’écart existant se réduira dans les années à venir. L’analyse par tranches d’âge montre un effectif faible
de personnes de plus de 60 ans (3%), mais il s’intensifie rapidement dans les tranches précédentes. En
effet les personnes de 50 ans et plus représentent 18% de la population globale accueillie ; si nous y
ajoutons progressivement les tranches précédentes, nous obtenons 31% de personnes ayant 45 ans et plus,
et 43% de personnes de plus de 39 ans.
Ces chiffres confirment ceux du « rapport de Monsieur Paul BLANC » (2006) sur l’évolution de la
structure par âge des établissements pour personnes handicapées constatant qu’en moins de 20 ans, l’âge
médian y a augmenté d’une dizaine d’année et qu’un quart des personnes avait en 2001 plus de 43 à 48
ans selon les structures.
Cette observation pose une question d’ordre quantitatif quant à la capacité d’accueil des établissements et
services puis d’ordre qualitatif quant à la prise en charge des conséquences du vieillissement.
Parmi ces conséquences nous pouvons tout d’abord noter la situation professionnelle, représentée dans le
graphique ci-dessous.
-7- Situation professionnelle des personnes de 50 ans et plus accueillies dans les SAVS du Doubs
Tem ps partiel
9%
Retraite
26%
Tem ps plein
52%
Sans em ploi
13%
Dans la population que nous étudions, les 18 personnes de plus de 59 ans sont en retraite ainsi que 11
autres ayant entre 56 et 59 ans. Nous constatons aussi que 10 personnes de moins de 60 ans sont à temps
partiel, dont 8 entre 50 et 55 ans. Par ailleurs 13 personnes sont déclarées sans emploi, mais nous n’avons
pas d’indication sur les motifs.
L’analyse fait apparaître une majorité de femmes parmi les travailleurs à temps partiels (6 pour 10) ainsi
que chez les retraités de moins de 60 ans (7 pour 11). Par contre les personnes sans emploi sont
majoritairement des hommes (9 pour 13).
44
3.2.4. Entrées et sorties en 2004, 2005 et 2006
Au cours des 3 dernières années, nous comptons 4 entrées et 4 sorties qui ont concerné 7 personnes. Les
entrées se font généralement avant l’âge de 50 ans, et peu de personnes sont réorientées après cet âge. La
plus grande longévité explique le peu de décès, aucun durant cette période. Le vieillissement de la
population fait donc bien partie de la réalité des SAVS.
Nous allons maintenant nous pencher sur l’étude de l’accompagnement qui est mis en œuvre par les
professionnels pour les usagers des tranches d’âge que nous avons définies.
3.3. Analyse des « fiches individuelles »
Rappelons que ce travail se base sur les 109 fiches enregistrées, concernant les usagers ayant 50 ans et
plus, et accompagnés par les 7 SAVS du Doubs.
Nous allons tout d’abord présenter, par domaine d’accompagnement, la fréquence des interventions et leur
évolution sur les deux dernières années que nous complèterons par l’étude des partenariats et la
présentation des besoins de coordination.
Notons que pour apporter plus de précision à l’enquête, nous avons créé un domaine d’accompagnement
que nous avons intitulé « vie sociale post-professionnelle ». Nous voulions tenter d’identifier s’il existe
des besoins spécifiques liés à la retraite. La forme questionnaire ne semble pas avoir convenu pour une
bonne prise en compte de cet ajout.
3.3.1. Fréquence et évolution des interventions par domaine d’accompagnement pour les personnes
de 50 ans et plus en 2005 et 2006
Nous avons essayé de rassembler des informations sur le contenu des accompagnements et sur son
évolution au cours des deux dernières années. Celle-ci nous parait pouvoir être mise en lien avec le
phénomène de vieillissement. Nos observations porteront donc plus particulièrement sur les domaines où
les interventions sont signalées comme étant en hausse.
45
-8- Fréquence et évolution de l’accompagnement par domaine d’intervention
Evolution sur les deux
Fréquence de l'intervention
Plusieurs
Une fois
dernières années
Une fois
Une
fois par
par
par
fois par
Quotidien
semaine
semaine
quinzaine
mois
Autre
Stable
1
8
41
26
21
6
63
5
35
0
2
9
7
32
46
52
8
36
Logement
2
1
9
14
27
19
48
3
21
66%
Administratif
0
2
13
15
45
15
74
3
13
83%
Gestion du budget
0
1
7
13
43
16
67
3
10
73%
Transports
0
0
2
4
9
32
42
1
4
43%
Loisirs et vacances
0
1
2
4
21
52
56
2
22
73%
Emploi
1
0
4
9
16
31
34
1
26
56%
1
0
2
3
7
8
7
0
14
Vie quotidienne
Santé et suivi
médical
Vie sociale postprofessionnelle
En
En
baisse hausse
% personnes
concernées
94%
88%
19%
Il apparaît d’emblée que les professionnels interviennent pour presque tous les usagers (103) dans le
domaine de la vie quotidienne, et ce, de façon amplifiée ces deux dernières années pour le tiers d’entre
eux. Le même nombre de personnes bénéficie d’un accroissement des interventions dans le domaine de la
santé et du suivi médical qui, lui, concerne 96 personnes.
Une différence entre ces deux domaines d’accompagnement apparaît dans le rythme. Pour la vie
quotidienne il est donné comme très régulier et majoritairement hebdomadaire. De ce fait près de la moitié
des usagers (50) bénéficient d’une intervention au moins une fois par semaine.
Dans le domaine de la santé et du suivi médical, les interventions sont également régulières pour près de
la moitié des personnes, mais majoritairement de façon mensuelle. Pour les autres, nous pouvons penser
qu’elles sont plus épisodiques. En effet, en fonction de l’autonomie des personnes ou des autres soutiens
dont elles bénéficient, les actions consistent en des entretiens d’informations ou de conseils, en des prises
de rendez-vous, des bilans périodiques avec les médecins ou en accompagnements plus ou moins
fréquents chez les praticiens. Ces deux dernières actions permettent d’assurer la compréhension des
explications médicales, le suivi des démarches et traitements ainsi que la transmission des informations
nécessaires aux partenaires concernés.
Nous noterons également une hausse des interventions dans le domaine de l’emploi pour près du quart de
la population globale, mais plus du tiers de la population active (67 personnes).
46
Des tris ont été réalisés à partir de ces données. Nous avons choisi de nous intéresser aux trois domaines
pour lesquels la hausse du nombre d’interventions apparaît le plus fort : la vie quotidienne, la santé et
l’emploi ; nous y ajoutons le logement, étroitement lié à la vie quotidienne. Nous obtenons alors 66
personnes concernées par une hausse dans au moins un des domaines d’accompagnement sélectionnés.
Le tri à partir du domaine de la santé, montre une hausse simultanée dans les autres domaines pour :
- 18 personnes dans le domaine de la vie quotidienne (51%)
- 13 personnes dans le domaine de l’emploi (50%)
- 14 personnes dans le domaine du logement (66%)
Une hausse du nombre d’interventions dans le domaine de la santé correspond donc pour la moitié au
moins des personnes concernées à une hausse dans les trois autres domaines. Cet élément semble
révélateur d’un accroissement des besoins d’accompagnement.
Les autres tris réalisés ne permettent pas d’établir de corrélation entre une hausse dans ces quatre
domaines et l’âge, la situation professionnelle ou le sexe. Ils ne font que mettre en correspondance,
logiquement, un renforcement ou une création de partenariat dans le même domaine d’accompagnement,
ce que nous allons voir au paragraphe suivant.
En effet, les chiffres que nous venons de donner traduisent l’activité globale évaluée par les
accompagnateurs. Celle-ci peut avoir lieu en relation simple avec les usagers, mais aussi dans le cadre
d’un partenariat avec d’autres intervenants, extérieurs aux SAVS. A ce titre, l’étude des partenariats
existants, renforcés ou créés nous a semblée susceptible de donner des indications complémentaires sur
l’existence de besoins spécifiques ou non des personnes handicapées mentales vieillissantes.
3.3.2. L’existence, le renforcement ou la création des différents partenariats en 2005 et 2006
La présentation du questionnaire à ce sujet a permis que des partenaires soient cités dans différents
domaines, sans restriction. Ainsi certains partenariats apparaissent d’emblée très centrés dans leur
domaine, alors que d’autres sont cités dans plusieurs domaines et méritent d’être regroupés. Nous les
avons donc étudiés tout d’abord par domaine pour conclure par une analyse plus globale. Pour la
construction des graphiques, nous n’avons retenu que les partenaires cités plus de 5 fois, afin d’obtenir
une représentation minimale de 5%. Trois graphiques illustrent ce paragraphe, les autres sont donnés en
annexe.
47
-9- Le partenariat dans le domaine de la santé
0,800
0,700
0,600
0,500
0,400
0,300
0,200
0,100
0,000
m
Fa
il l
e
é
G
l
ra
né
te
is
Sp
ia
éc
te
li s
P
i
ch
sy
re
at
Se
Existant
Renforcé
e
ic
rv
de
in
so
s
Em
o
pl
u
ye
r
Créé
(Population totale=1)
Les données les plus significatives de l’importance du partenariat apparaissent d’emblée et très clairement
dans le domaine de la santé, pour le médecin généraliste et les spécialistes. En effet le partenariat existe
déjà pour de nombreux usagers, de plus il est noté comme renforcé pour 12 d’entre eux, avec le médecin
généraliste et pour 11 avec les médecins spécialistes. Il est créé pour 10 personnes avec les différents
intervenants médicaux.
-10- Le partenariat dans le domaine
- 11- Le partenariat dans le domaine
du budget
administratif
0,400
0,700
0,350
0,600
0,300
0,500
0,250
0,400
0,200
0,300
0,150
0,100
0,200
0,050
0,100
0,000
es
Fa
qu
m
i ll
e
Ba
n
u
te
ra
Cu
Cu
r
at
eu
ro
u
Fa
m
il l
tu
te
u
r
e
0,000
Existant
Renforcé
Existant
Créé
rs
ou
u
te
tu
Se
r
es
ic
rv
Renforcé
ad
m
i
s
tif
ra
st
i
n
créé
( Population totale =1)
Considéré en fonction du nombre d’usagers concernés, le partenariat avec les curateurs apparaît en
48
deuxième position, dans le domaine du budget. Mais nous devons noter aussi son importance dans le
domaine administratif. C’est un partenariat très majoritairement stable et préexistant dans ces tranches
d’âge.
Dans le domaine de l’emploi, le partenariat concerne moins d’usagers que dans les domaines précédents ;
mais sachant que 29 d’entre eux sont en retraite et 13 sans emploi, la proportion des travailleurs concernés
par des relations avec l’employeur est importante (près de 80%). Il est aussi noté un renforcement pour 14
personnes.
Dans le domaine du logement, il s’effectue principalement avec les bailleurs, mais en lien étroit avec les
curateurs pour les personnes sous protection juridique. Nous notons l’intervention de services pour
l’aménagement du logement. Des informations complémentaires seraient nécessaires pour en comprendre
les raisons.
Le partenariat dans le domaine des loisirs et vacances est souhaité par beaucoup d’usagers qui ont besoin
d’interlocuteurs avertis pour les aider à organiser leur temps libre et bénéficier d’activités de loisirs
adaptées. Il existe pour environ la moitié d’entre eux et a été créé pour 10 autres personnes. Les
intervenants dans ce domaine se voient particulièrement sollicités par et pour les personnes en baisse
d’activité professionnelle.
Dans le domaine de la vie quotidienne, nous notons que les aides ménagères et auxiliaires de vie
interviennent auprès de 31 personnes (dont 5 répertoriées dans le domaine du logement) dont 6 pour
lesquelles l’intervention est renforcée depuis 2 ans et 12 pour lesquelles elle a été créée. Des difficultés
liées à la santé et à l’âge peuvent être évoquées.
C’est dans ce domaine que nous constatons la présence la plus importante de la famille, mais celle-ci
intervient dans les 7 domaines, notamment aussi dans celui des loisirs et du logement. Il s’agit là
essentiellement d’un partenariat existant.
De façon globale, tous domaines confondus, nous notons un renforcement du partenariat pour 36 usagers
(33%), selon une fourchette de 1 à 7 partenaires par personne. Les diverses moyennes (d’interventions
renforcées) effectuées sur l’ensemble de la population et par tranches d’âge ne montrent pas d’évolution
spécifique à l’une d’elles. Par contre calculées sur le nombre des personnes concernées dans chacune
d’elles, nous obtenons un renforcement des actions partenariales un peu plus important dans la tranche 5054 ans : 3,0 par personne, puis 2 à 2,5 dans les tranches suivantes.
La création d’un partenariat intervient quant à elle pour 37 usagers (34%), dont 15 déjà concernés par un
renforcement. La moyenne (d’interventions créées par personne concernée) la plus élevée est observée
pour les 2 personnes de plus de 64 ans (3,5), sinon elle est de 1,5 dans les tranches 55-59 ans et 60-64
ans puis de 1,9 dans la tranche 50-54 ans.
49
Les institutions pour personnes âgées apparaissent dans des relations créées, pour 5 personnes. Elles sont
un interlocuteur assez récent, mais ce sujet ne peut pas à ce stade de notre enquête être davantage
approfondi.
Nos différents tableaux montrent des partenariats nombreux dans les domaines d’intervention les plus
denses. Ils confirment l’hétérogénéité des situations en mettant en évidence des différences notables entre
les usagers, quelle que soit la tranche d’âge à laquelle ils appartiennent. Toutefois, sachant que l’effectif
de chacune d’elle décroît lorsque l’âge progresse, nous avons calculé, pour chaque tranche, la proportion
de personnes concernées par un renforcement ou une création de partenariat. Les courbes suivantes en
sont l’illustration.
-12- Pourcentage par tranches d’âge des partenariats renforcés, créés, renforcés et créés
0,45
0,40
0,35
0,30
0,25
0,20
0,15
0,10
0,05
0,00
50/54
55/59
60/64
Renforcé
Créé
65 et plus
R+C
(Part dans la tranche d’âge)
Ce schéma met en exergue les personnes pour qui il y a eu un alourdissement de l’accompagnement, soit
par renforcement des interventions partenariales (en bleu) soit par création (en rouge), sachant qu’il y a
cumul des deux pour une partie d’entre elles (jaune).
Nous constatons un accroissement lié à l’âge, jusqu’à 64 ans. L’analyse précédente pourrait nous inciter à
penser qu’alors un certain nombre de partenariats nécessaires sont en place. Pour autant, étant donnée la
taille de notre échantillon, cette observation nécessiterait d’être approfondie.
Cette étude nous montre aussi que le volet du partenariat est une donnée incontournable de
l’accompagnement en SAVS. Consécutivement elle nous a amené à soulever la question de la
coordination.
50
3.3.3. La coordination
Dans cette partie, le questionnaire avait pour but principal de quantifier le nombre d’usagers pour qui une
coordination était nécessaire soit entre lui-même et un partenaire, soit entre différents partenaires
intervenant autour d’une même situation. Une réponse complémentaire nous permet d’identifier
d’éventuels autres coordinateurs.
-13- Les différents types de coordination
58%
5%
16%
21%
Usagers - Partenaires
Sans coordination
Partenaires - Partenaires
Usagers - Partenaires - Partenaires
Nous avons obtenu :
- 17 usagers (16 %) pour qui une coordination n’est pas nécessaire (dont 6 dans un même service).
- 90 usagers (84 %) pour qui une coordination est nécessaire, dont :
*22 entre l’usager et les partenaires
*5 entre les partenaires uniquement
*63 entre l’usager et les partenaires ainsi qu’entre les partenaires. Pour ceux-ci sont aussi
donnés comme coordinateurs possibles, 5 fois le curateur, 2 fois l’employeur et 1 fois la
famille.
Concernant les personnes handicapées mentales vieillissantes, nous constatons que la coordination fait
partie des besoins repérés, dans une majorité des accompagnements. La densité de cette mission étant
directement liée au nombre d’intervenants et au rythme de leurs interventions, il nous parait judicieux
d’analyser, d’interroger et d’essayer de comprendre la part prise par cette mission dans la pratique des
professionnels, notamment pour les situations dont nous venons de mettre en évidence l’évolution.
51
3.4. Conclusion et hypothèse
La faible représentativité de notre échantillon et l’absence de comparaison avec un groupe témoin
d’usagers de moins de 50 ans rendent nos résultats incomplets. Néanmoins, nous pouvons en tirer
quelques conclusions indicatives :
Cette enquête quantitative nous montre, dans les SAVS enquêtés, une augmentation en
cours de la population des tranches d’âges au-dessus de 50 ans.
Pour les usagers actuellement âgés de 50 ans et plus, nous remarquons:
- Une densification de l’accompagnement pour environ un tiers d’entre eux, notamment
dans les domaines de la santé, de la vie quotidienne et de l’emploi.
- Une hausse simultanée de l’accompagnement dans le domaine de la santé et dans
d’autres domaines.
- le renforcement ou la création de partenariats, en particulier avec les professionnels du
secteur médical, mais aussi avec les employeurs et les aides ménagères.
- Une coordination avec les partenaires pour la majorité des usagers. Son intensité n’a
pas été mesurée, mais nous pouvons avancer l’hypothèse qu’elle est en lien avec
l’évolution du recours au partenariat.
Notre enquête, en rassemblant des informations sur l’ensemble du département, nous donne quelques
éléments de réponse de manière quantitative. Il est effectif que de nouveaux besoins apparaissent avec le
vieillissement des personnes handicapées mentales. Nous les avons repérés au travers de l’intensification
de l’accompagnement pour une partie d’entre eux. Nous avons identifié les domaines à l’intérieur
desquels ils nécessitent un accroissement des interventions (santé, vie quotidienne…) et des partenariats
(santé, emploi….).
On peut, à partir des recherches présentées dans cet écrit et des éléments de l’enquête quantitative,
formuler l’hypothèse suivante :
Les besoins des personnes handicapées mentales de plus de 50 ans suivies par les SAVS ne
nécessitent
pas simplement un
surcroît
d’heures
d’accompagnement
mais une
forme
d’accompagnement spécifique obligeant les professionnels de SAVS à repenser leur pratique, à
acquérir de nouveaux savoirs, et à renforcer leur partenariat avec, notamment, le secteur sanitaire
et, probablement, aussi avec le secteur gérontologique.
Une enquête qualitative par entretiens va nous permettre d’étayer cette hypothèse.
52
Deuxième partie
53
CHAPITRE 1
METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE ET DEROULEMENT
DES ENTRETIENS
1.1. Objectif de l’enquête
L’enquête quantitative m’a permis de repérer des modifications dans l’accompagnement, par les SAVS,
des personnes handicapées mentales de plus de 50 ans. Tout d’abord, il se densifie, notamment en lien
avec la question de la santé. Puis, il nécessite le renforcement ou la création de partenariats ainsi que la
coordination entre ces partenaires.
Cette étude a validé les observations éparses faites par les professionnels de terrain et a précisé leurs
contours. La recherche par questionnaire m’a donné des résultats pour l’ensemble de la population
concernée dans le département du Doubs. Cette échelle présente une unité pour la lecture sociopolitique
et une diversité géographique, du fait qu’elle couvre des zones tant urbaines que rurales.
Cette méthode m’a permis, en toute logique, d’obtenir des réponses aux questions que je me posais.
Toutefois elle ne m’a pas renseignée précisément sur la teneur de l’évolution des besoins des usagers de
cette tranche d’âge. Je n’ai eu d’indications ni, sur les souhaits ou les (non)projets de ces personnes pour
les périodes de fin d’activité professionnelle et de retraite, ni, sur leurs attentes en matière
d’accompagnement.
De même, du point de vue des services, je n’ai pas pu discerner les points sur lesquels avait porté
l’adaptation aux nouveaux besoins ou ceux sur lesquels elle serait souhaitée.
L’objectif de ma recherche qualitative était donc d’affiner mes résultats, de trouver des éléments de
compréhension qui en donnent le sens, et de repérer quelques orientations prises par les SAVS dans leur
accompagnement des personnes handicapées mentales vieillissantes, puis de dégager les nouveaux
besoins liés à ces adaptations nécessaires.
1.2. Choix de la méthode
Les résultats attendus concernaient les besoins liés au vieillissement des usagers des SAVS à deux
niveaux : celui des personnes elles-mêmes et celui de l’accompagnement du fait de la nécessité
d’adaptation. Nous allions avoir besoin d’informations émanant à la fois des bénéficiaires et des
professionnels. En même temps, sachant que la caractéristique principale de la population concernée est
54
la déficience intellectuelle, une inquiétude portait sur la fiabilité des informations recueillies auprès
d’elles, dans le temps et sur leur contextualisation. Un complément d’information devait donc être
recherché auprès des professionnels.
Il devenait incontournable de nous adresser à des personnes appartenant à chacune des deux catégories.
En fonction de la population concernée, et notamment de ses difficultés face à la lecture et à l’écriture,
j’ai éliminé la possibilité d’une investigation par questionnaire écrit et j’ai choisi de procéder à une
enquête par entretiens individuels. Je souhaitais bien sûr vérifier les résultats de l’enquête quantitative,
mais il s’agissait également d’établir un climat de confiance pour permettre une expression suffisamment
libre sur les thèmes sélectionnés et pour que surgisse éventuellement de l’imprévu.
Une trame me permettrait de collecter les réponses aux questions que je me posais, sans diriger de façon
trop contraignante le discours des personnes. Celles-ci ne devaient pas se sentir prisonnières d’un
question-réponse, mais avoir la possibilité d’être écoutées dans leur logique de pensée et de discours.
Ainsi l’ordre dans lequel les thèmes allaient être abordés serait à la convenance de mes interlocuteurs. Du
fait de ma pratique professionnelle, cet élément me paraissait nécessaire pour faciliter l’expression, voire
éviter d’éventuels blocages.
J’ai donc choisi de procéder par entretiens semi directifs. Cette démarche qui « soumet le questionnement
à la rencontre, au lieu de le fixer d’avance» (Alain BLANCHET et Anne GOTMAN 1992) répond à ces
exigences.
Allions-nous les recevoir ensemble ou séparément ?
En fonction du cadre que je me suis fixé pour ces entretiens, ceux-ci ne pouvaient être qu’individuels;
nous avons donc choisi de procéder à une série d’entretiens parallèles. Cette méthode permet de garantir
la confidentialité à chaque interlocuteur.
1.3. Choix des interlocuteurs
J’ai déterminé des critères de sélection des personnes que j’allais rencontrer, afin que celles-ci soient
représentatives de la diversité de la population concernée :
- mixité hommes-femmes
- travailleurs et personnes en retraite
- éventail entre « 50 ans » et « plus de 64 ans »
- répartition entre milieu urbain et milieu rural
Très rapidement il fut évident que pour garantir la confidentialité et éviter les interférences entre ma
fonction d’enquêtrice et mon statut d’accompagnatrice, mon enquête ne pouvait pas être menée sur le lieu
55
de ma pratique professionnelle.
Puis en fonction de la dispersion géographique et de la proportion des bénéficiaires des zones urbaines et
rurales, j’ai décidé de m’adresser à deux services en milieu urbain ainsi qu’à un service en milieu rural.
Chaque responsable de ces trois services a été le destinataire d’un courrier18 explicatif de ma demande
puis, à la suite d’une rencontre présentant ma démarche, a servi d’intermédiaire auprès de ses usagers et
de leurs accompagnateurs pour obtenir des accords d’entretiens. Ma demande était que les usagers
pressentis par les équipes soient représentatifs, par leur situation, des questions qui se posent à elles
concernant notre problématique. Les rencontres pouvaient avoir lieu, soit au SAVS, soit à domicile, selon
le choix des personnes rencontrées.
1.4. Le guide d’entretien19
Il était, dans sa trame, commun à tous les enquêtés mais il n’a pas été utilisé de la même manière avec les
usagers qu’avec les professionnels. En effet, avec les bénéficiaires, il a été un support discret à
l’entretien. Par contre en direction des accompagnateurs, il fut enrichi de questions précises et renommé
« étude de situation »20. Il fut envoyé au responsable de chaque service qui en a assuré la transmission.
Ainsi ces entretiens furent plus structurés et ont répondu plus systématiquement à tous les items.
Ce guide a été construit à partir des domaines d’accompagnement utilisés dans l’enquête quantitative, qui
servent de références au niveau départemental pour les sept SAVS accompagnant des personnes
handicapées mentales. Puis, avec l’éclairage de la CIF (Classification Internationale du Fonctionnement),
nous l’avons enrichi de données contextuelles. Rappelons que cette classification adopte une approche
situationnelle du handicap ; celui-ci résultant d’une interaction entre des facteurs personnels et des
facteurs environnementaux. Cette appréhension demande d’avoir une perception globale de la situation
des bénéficiaires afin de décrypter les mécanismes qui la constituent. Elle propose une analyse construite
de façon élargie, prenant en compte le temps (l’histoire de la personne) et l’espace (son réseau relationnel
et celui des professionnels).
Ainsi j’ai défini sept grands thèmes qui permettent d’identifier la personne, ses conditions de vie
personnelle, professionnelle, le contexte environnemental au sein duquel elle vit, puis si ces données ont
évolué au cours des dernières années, de quelle façon, pour terminer avec les perspectives d’avenir.
Ce guide d’entretien permet de considérer la personne dans une trajectoire et prend en compte le
caractère évolutif de sa situation. Le double entretien étend la collecte des données, du fait des positions
18
En annexe
19
En annexe
20
En annexe
56
complémentaires des interlocuteurs. Il permet d’avoir des regards différents sur les faits.
1.5. Déroulement des entretiens
Les trois services contactés ont répondu favorablement à ma demande. Pour deux services la présentation
de ma recherche a eu lieu avec le chef de service, pour le troisième elle s’est faite en présence de
l’équipe.
Chaque responsable m’a confirmé que le choix des usagers susceptibles d’être interrogés s’est fait en
fonction de leur représentativité des questions soulevées autour du thème du vieillissement. Toutefois une
légère sélection s’est faite autour de la capacité à fournir un discours audible.
J’ai mené 13 entretiens avec des usagers et le même nombre avec leurs accompagnateurs.
La population des usagers interrogée se répartit ainsi :
- 5 femmes et 8 hommes
- 6 personnes retraitées, 6 personnes en activité professionnelle (plus de 50 ans) et 1 personne en
invalidité complète
- 5 travailleurs à plein temps et un à mi-temps
Mon identité et les objectifs de mon enquête ont été énoncés avec quelques nuances selon qu’ils
s’adressaient aux usagers ou aux accompagnateurs :
-
pour les accompagnateurs, cette enquête faisant suite à celle de l’an dernier. Les professionnels
avaient déjà connaissance de ma démarche. Les entretiens se sont, de fait, inscrits dans des
relations entre collègues, tout en sauvegardant l’aspect de la recherche par le respect de la
confidentialité et le centrage sur la situation concernée, à partir du guide transmis.
-
Pour les usagers, j’étais une inconnue. Face à eux, je me suis présentée comme suivant une
formation dans une autre région, en omettant d’indiquer ma profession. Ceci afin d’éviter au
mieux les interférences avec ma fonction d’accompagnatrice dans un autre SAVS, et de me
protéger autant que possible de réflexes de reproduction d’un entretien de type professionnel.
L’enquête fût présentée comme outil servant exclusivement à la réalisation d’un document de
recherche sur la façon dont s’organise la vie pour les personnes de plus de 50 ans, accompagnées
par un SAVS ainsi que sur leurs projets d’avenir.
Pour chaque entretien après avoir recueilli la confirmation de l’assentiment de l’enquêté, je
redéfinissais les conditions de l’entretien et de son utilisation. Je garantissais à chaque personne
l’anonymat, je lui demandais confirmation de son accord pour l’enregistrement, puis je fixais la
57
durée de l’entretien à environ une heure, modulable par l’intéressé.
La garantie de confidentialité établie à ce moment ne m’a pas autorisée à transcrire un entretien
en annexe. Les professionnels auraient été à même de reconnaître le bénéficiaire concerné.
Les entretiens avec les bénéficiaires et ceux avec les professionnels se sont alternés en fonction des
disponibilités de chacun, sans priorité des uns par rapport aux autres.
1.5.1. Les entretiens avec les usagers
Suite à la possibilité de choix du lieu de la rencontre, deux personnes ont souhaité me recevoir à leur
domicile.
Ma présentation faite, la personne était amenée à s’exprimer sur l’organisation de sa vie actuelle, puis en
fonction des informations, j’élargissais le discours sur le passé et l’avenir. Le choix des questions posées
et des relances se faisait en référence à la grille d’entretien
Parfois le début d’entretien fut hésitant ; pour certaines personnes l’entrée en matière a nécessité
quelques questions précises, donnant un cadre peut-être plus rassurant. Puis le discours se faisait plus
fluide. La difficulté a consisté à me maintenir dans mon rôle d’enquêteuse et de ne pas dévier dans celui
de professionnelle de l’accompagnement.
M’appuyant sur la méthode choisie, des entretiens semi-directifs, et sur mon expérience professionnelle,
j’ai privilégié un déroulement d’entretien qui utilise la progression de la personne dans son discours ;
toute interruption pouvant rompre la fluidité de l’échange et l’accès au mode de pensée de mon
interlocuteur.
Si la plupart du temps les relances ont permis d’obtenir des réponses à mes questions, il est arrivé que je
me trouve face à un défaut de mémorisation ou d’évaluation ou alors face à ce que j’appellerai soit des
impossibilités de verbalisation soit des stratégies d’évitement. Le complément d’entretien auprès des
professionnels confirmait alors son utilité dans la perspective de l’analyse.
Concernant l’utilisation du guide, j’ai été amenée après quelques entretiens à accentuer ma vigilance sur
deux points. Tout d’abord sur une écoute plus fine des relations familiales, puis sur une attention
particulière aux réponses concernant l’avenir. Ces dernières provoquant parfois un retour systématique
sur le passé, ou restant sur une non réponse, j’ai, d’une part, alterné le mot « projet » avec le mot
« imaginer », et, d’autre part, questionné les représentations du grand âge.
En fin d’entretien, la plupart des personnes ont manifesté de la satisfaction, voire du plaisir à avoir parlé
de leur vie. Certains ont proposé une autre rencontre. La durée des entretiens a varié entre 35 minutes et 1
heure 15, la majorité se situant aux environ de 45 minutes.
58
1.5.2. Les entretiens avec les professionnels
Comme je l’ai dit plus haut, ils se sont déroulés selon le plan donné par l’ « étude de situation ». Ils ont
ainsi permis de répondre à tous les items, mais sans exclure d’autres informations sur le sujet.
Ainsi, à partir d’une situation donnée, les échanges se sont prolongés par une réflexion plus générale et
ont offert l’occasion de témoigner du questionnement du service ou des projets et actions en cours.
59
CHAPITRE 2
ANALYSE DES RESULTATS DE L’ENQUETE
2.1. Caractéristiques des personnes enquêtées
La retranscription des 26 entretiens m’a permis de rassembler de nombreuses informations sur le mode de
vie et les besoins des bénéficiaires constituant notre échantillon, ainsi que sur l’accompagnement mis en
place au sein des trois SAVS qui les accueillent.
Ces informations concernent plusieurs domaines de la vie des personnes, de façon différente pour chacune
d’entre elles
Afin de rendre compte de façon synthétique d’un maximum de données, je les ai rassemblées dans le
tableau récapitulatif présenté ci-dessous :
E1
E2
E3
50
54
55
59
60
64
ESAT 1/2
temps
Mariée
Célibataire
Enfants
Invalidité
2
ans
Veuve
Enfants
Curateurfamille; aide à
domicile;
médecins;
loisirs
32 ans
Aide à domicile;
infirmière;
médecins;
administration
Environ
15 ans
Curateur; aide à
domicile;
médecins;
maison de
retraite
32 ans
60
Réseau relationnel
Aides au quotidien
Partenaires médicaux
Coordination SAVS
avec …
Ancienneté SAVS
Situation familiale
Ancienneté retraite
Emploi
Tranche d’âge
-14- Tableau récapitulatif des caractéristiques et des formes d’accompagnement des 13 bénéficiaires
Spécialistes
CHU; CMP
Mari;
curateur;
famille;
aide à
domicile
Famille; loisirs
ADAPEI;
quartier
Spécialistes
CHU;
médecin
psychiatre,
médecin
généraliste
Infirmière,
aide à
domicile;
enfants;
SAVS
Enfants;
ADAPEI
Hôpital de
jour
Infirmière;
aide à
domicile;
enfant;
curateur
Enfants; hôpital
de jour
60
64
2
ans
E5
65
69
6
ans
E6
55
59
2
ans
E7
65
69
3
ans
E8
65
69
6
ans
E9
55
59
Entreprise
adaptée
E10
55
59
Milieu
ordinaire
E11
50
54
ESAT
Divorcé
Célibataire
Réseau relationnel
Aides au quotidien
Partenaires médicaux
Coordination SAVS
avec …
Ancienneté SAVS
Situation familiale
Ancienneté retraite
Emploi
Tranche d’âge
E4
38 ans
Curateurfamille;
médecins;
infirmière;
établissements
de retraite
14 ans
Curateur;aide à
domicile; loisirs
ADAPEI
Psychiatre
Aide à
domicile;
SAVS
Curateurfamille;
SAVS
Parents,
cousins;
quartier; loisirs
ADAPEI
Infirmière;
médecin
psychiatre,
spécialistes;
généraliste;
dentiste
Infirmière;
aide à
domicile;
famille
Frère-curateur
Voisinage;
loisirs ADAPEI
Célibataire
Plus de
10 ans
Curateur;
médecin; loisirs
Psychologue;
médecin
généraliste
Célibataire
Depuis
la
retraite
Médecins;
loisirs ADAPEI
Spécialistes
CHU
SAVS
Fratrie; loisirs
ADAPEI;
connaissances
Marié
10 ans
Aide à domicile;
médecin;
curateur
Médecin
généraliste;
dentiste
Aide à
domicile;
SAVS
Voisinage;
loisirs milieu
ordinaire
Célibataire
25 ans
Employeur;
médecins
Spécialistes
SAVS
Connaissances;
loisirs ADAPEI
32 ans
Employeur; aide
à domicile;
curateur
Aide à
domicile;
voisinage
Village ; loisirs
milieu ordinaire
32 ans
Curateur; loisirs
ADAPEI
Curateur;
famille
Famille; loisirs
ADAPEI;
quartier
SAVS
Soeur
Célibataire
Marié
E12
55
59
ESAT
Célibataire
E13
55
59
ESAT
Célibataire
Curateur;
partenaires pour
l’achat et
Environ l’aménagement
20 ans
du logement
8 ans
Employeur;
médecin
Selon les
besoins
Fratrie ; ADAPEI
L’analyse des données collectées nous permet de dégager quelques grands types de besoins chez les
bénéficiaires. J’utilise ici le termes de « type » de besoins dans le sens où cela correspond à un support de
classification des données collectées. Le choix des besoins identifiés n’a pas de référence théorique
particulière. Toutefois, la terminologie que j’ai retenue rejoint, à la fois, celle utilisée par les SAVS pour
identifier leur pratique (cf l’enquête quantitative) et celle utilisée dans les grilles d’évaluation par les
CDAPH (la grille GEVA).
61
Les trois types de besoins identifiés sont les suivants:
- les besoins en matière de soutien à la santé et de suivi médical
- les besoins en matière de vie quotidienne
- les besoins en matière de suivi de la situation de travailleur
Cette classification m’a permis d’organiser et d’affiner la compréhension, d’une part, des besoins des
personnes enquêtées, et, d’autre part, des adaptations nécessaires en termes d’accompagnement. Très
logiquement ces dernières dépendent des premiers, mais de façon spécifique selon les personnes. Chaque
bénéficiaire ayant des demandes particulières, il nécessite des prestations individualisées de la part du
SAVS et de ses partenaires.
A nouveau, une grande hétérogénéité caractérise l’ensemble des situations21 pour chaque type de besoins.
J’ai alors construit un tableau permettant de faire apparaître une évaluation de l’intensité des besoins
exprimés à partir d’un indicateur : la densité du nombre d’interventions d’accompagnement selon la
typologie définie, et pour chaque bénéficiaire. Quelle est la pertinence de cet indicateur ? Nous avons
postulé que les interventions répondent à un besoin et que leur nombre y est proportionnel. Par ailleurs les
informations collectées permettent plus précisément de dénombrer les interventions que d’évaluer leur
durée. De plus, pour les professionnels, l’intensité de l’accompagnement utilise globalement cet indicateur
qui est considéré comme représentatif.
Cette évaluation est donc le résultat de la synthèse des informations collectées auprès du bénéficiaire luimême et auprès du professionnel référent de son accompagnement.
La lecture du tableau m’a alors permis, dans une quatrième colonne d’identifier le type de besoins
prépondérant pour chaque personne.
21
Je rappelle que le fait d’avoir eu deux interlocuteurs pour me parler d’une même personne, m’a amenée à parler de
« situation ». Je faisais alors la distinction entre mes deux sources d’informations. L’analyse m’amène à utiliser
l’ensemble des données sur la situation d’un bénéficiaire sous son identité, qu’il soit l’auteur ou non des
informations.
62
-15- Tableau des catégories de bénéficiaires
en fonction de l’intensité de l’accompagnement, par domaine
Vie
quotidienne
Santé
E5
+
+
Q+S
E3
+
++
S
E4
+
++
S
E9
=
+
E6
+
+
Q+S
E7
+
+
Q+S
E8
+
+
Q+S
E2
++
++
S
E1
++
++
+
S
E11
=
=
=
E
E12
=
=
=
E
E10
+
=
+
T
E13
=
=
=
E
Travail
Catégories
+
T
+ : besoins importants
++ : besoins très importants
= : besoins stables
La quatrième colonne du tableau ci-dessus, m’oriente alors vers le repérage de quatre groupes de
personnes, caractérisés par le type et l’intensité des besoins prépondérants.
Sur cette base, je définis alors quatre catégories de bénéficiaires :
-
« S » où les bénéficiaires ont des besoins en matière de soutien à la santé et de suivi médical
prépondérants et conséquents. Nous trouvons ici deux personnes en invalidité, l’une complète et
l’autre à 50%, ainsi que deux retraités pour qui la teneur du suivi médical est à l’origine d’une
orientation vers une maison de retraite.
-
« Q.S » où les bénéficiaires ont des besoins qui ont évolués à la fois dans le domaine de la vie
quotidienne et dans celui du maintien de la santé. Les quatre bénéficiaires de cette catégorie sont
en retraite. Depuis cette date, leur accompagnement s’est ajusté à un accroissement de ces deux
types de besoins
63
-
« T » où les bénéficiaires ont des besoins prédominants en matière de suivi de leur situation de
travailleur. Les deux personnes concernées sont en situation d’emploi. Des aménagements de
poste ont été nécessaires et la retraite est en perspective.
-
« E » où les besoins des bénéficiaires apparaissent comme relativement stables. Cette catégorie
rassemble trois bénéficiaires, en situation d’emploi et pour qui l’accompagnement a peu évolué
ces trois dernières années.
Cette répartition est une construction qui rassemble dans une même catégorie des individus concernés
prioritairement par un même critère, défini préalablement. Elle est utile à mon analyse, mais ne traduit pas
l’ensemble de la réalité des personnes. Elle ne signifie pas une étanchéité du type de besoin identifiant la
catégorie, avec les autres types de besoins. Nous verrons qu’ils sont, au contraire, souvent en lien les uns
avec les autres, notamment dans le cas de problèmes de santé.
L’influence des difficultés de santé sur les besoins d’accompagnement dans les autres domaines que celui
de la santé faisait partie des conclusions de mon enquête quantitative. Je l’ai à nouveau constatée au
travers des entretiens.
La constitution des catégories nous montre d’ailleurs que les besoins en matière de santé sont primordiaux
pour quatre personnes et associés pour quatre autres. Nous verrons aussi que la situation complexe des
quatre bénéficiaires de la catégorie « S » met en évidence ces interdépendances entre les types de besoins.
Leur analyse apportera, de plus, un éclairage pour celle des catégories suivantes. Cet enchaînement est à
l’origine de l’ordre de classement de mes quatre catégories, tel que nous l’avons présenté ci-dessus.
64
2.2. Près d’un tiers des bénéficiaires nécessitent un accompagnement
E1
E2
E3
E4
50
54
55
59
60
64
60
64
ESAT
1/2
temps
2
ans
2
ans
Réseau relationnel
Aides au quotidien
Partenaires
médicaux
Coordination SAVS
avec …
32 ans
Curateurfamille; aide à
domicile;
médecins;
loisirs
Spécialistes
CHU; CMP
Célibataire
Enfants
32 ans
Aide à
domicile;
infirmière;
médecins;
administration
Spécialistes
CHU;
Infirmière,
médecin
aide à
psychiatre, domicile;
médecin
enfants; Enfants;
généraliste
SAVS
ADAPEI
Veuve
Enfants
Curateur; aide
à domicile;
médecins;
Environ
maison de
15 ans
retraite
Infirmière;
aide à
domicile; Enfants;
enfant;
hôpital
de jour
curateur
Divorcé
CurateurInfirmière;
famille;
médecin
médecins;
psychiatre, Infirmière;
infirmière;
spécialistes;
aide à
établissements généraliste; domicile;
Frèrede retraite
dentiste
38 ans
famille
curateur
Mariée
Invalidité
Ancienneté SAVS
Situation familiale
Ancienneté retraite
Emploi
Tranche d’âge
prioritairement pour le suivi de leur santé
Hôpital de
jour
Mari;
curateur; Famille;
famille;
loisirs
aide à
ADAPEI;
domicile quartier
-16- Tableau récapitulatif de la situation des bénéficiaires de la catégorie « S »
Cette catégorie regroupe quatre bénéficiaires dont les besoins prédominants concernent le soutien à la
santé et le suivi médical. Pour ces quatre personnes, la situation médicale a une incidence importante sur
l’organisation de leur vie.
65
2.2.1. Besoins principaux : maintien de la santé et suivi médical
Pour ces quatre bénéficiaires, les dernières années furent marquées par un accroissement important des
besoins en matière de suivi médical. Ceux-ci ont généré une augmentation du temps d’intervention, mais
aussi, une diversification des actions du fait des partenariats à construire.
Tous sont concernés par la question des soins psychiatriques. Une période de rupture (santé, statut
professionnel) a provoqué un grave déséquilibre, ou accentué un état préexistant. Chacun nécessite un
suivi régulier par un médecin psychiatre.
L’analyse plus détaillée nous en donne l’illustration :
Deux femmes ont subit une recrudescence de leurs problèmes de santé qui a abouti, à 51 ans pour l’une et
52 ans pour l’autre, à une prise en charge au titre de l’invalidité. Pour la personne qui travaille à mi-temps,
la ménopause a été citée comme facteur déclencheur de l’accentuation d’une déficience sensorielle et de
la fragilité psychologique qui l’a accompagnée. Pour la deuxième de ces femmes, à un équilibre
psychique déjà précaire, se sont ajoutées diverses maladies organiques évolutives.
Si le lien a été fait dans le premier cas entre l’aggravation d’une déficience, une nouvelle fragilité et la
ménopause, nous constatons également cette correspondance dans le deuxième cas.
Sans généraliser, mais en m’appuyant sur d’autres expériences professionnelles, je soulignerai la
particularité de cette période pour la population féminine.
Pour elle, la densification de
l’accompagnement médical est manifeste à ce moment.
« vers les autres (autres médecins que son généraliste), je demande qu’on m’emmène, pour
qu’ils expliquent mieux, et qu’ils puissent mieux m’expliquer après »(E2)
Cette remarque vaut pour ces deux personnes, qui ont de lourdes pathologies organiques. Mais beaucoup
ont exprimé de façon similaire leur difficulté à expliquer des symptômes, ainsi que le besoin d’une oreille
complémentaire et d’une mémoire pour reprendre le discours des médecins. En effet, après une
consultation il est souvent nécessaire de traduire et ré-expliquer les informations reçues.
L’accompagnateur compense alors la déficience sous deux principales facettes : langagières face à des
professionnels non aguerris et cognitives pour transmettre des informations adaptées et comprendre celles
de l’interlocuteur. De plus, ces déficits génèrent un sentiment d’insécurité qui demande à son tour d’être
pris en compte.
Pour les deux autres bénéficiaires de cette catégorie, les besoins médicaux sont essentiellement d’ordre
psychiatrique et se sont accrus depuis le passage à la retraite, il y a deux ans. Ces deux personnes sont
dans l’incapacité de gérer leur solitude et leur nouveau rythme de vie, et elles l’expriment ainsi:
« ça va très mal, … j’ai du mal à me plaire toute seule »(E3)
« un peu perdu, voila, … il me manque une activité, par contre on a moins de stress »(E4)
66
A cela, peuvent s’ajouter des considérations personnelles concernant les traitements:
« Je fais attention à ce que je fais parce que les docteurs ils appuient les doses, … des fois un
peu moins, parce que s’il fallait les écouter tous ces spécialistes … » (E4)
Quant aux conséquences, elles nous sont données par les professionnels :
« depuis la retraite, il est totalement désorganisé par rapport à l’hygiène de vie, aux rythmes »
« … ne s’alimente plus correctement, se laisse complètement aller … sa santé s’est beaucoup
dégradée en 2 ans»
Le maintien du bien-être et la sécurité de ces personnes sont mis en péril. L’ajustement des interventions
aux exigences croissantes de ces situations devient de plus en plus difficile :
« on met des béquilles en place en attendant la maison de retraite, pour qu’il ne se mette pas en
danger , tout en restant à domicile»
Dans ces quatre situations, les SAVS ont été très impliqués dans l’accompagnement vers les soins et leur
suivi, qu’ils soient physiologiques ou psychologiques. Ils sont intervenus à différents niveaux : la
vigilance sur l’état de santé, le suivi et/ou l’organisation de la prise des traitements médicamenteux, la
médiation entre les personnes et les référents médicaux (médecins spécialistes, médecin généraliste,
infirmière …) et la coordination entre ces différents partenaires. Le partenariat établi a permis le maintien
à domicile jusqu’à maintenant, mais l’évolution des pathologies et les réponses à apporter font sentir les
limites de ces services.
Pour trois personnes, une réorientation est envisagée, voire en cours de réalisation pour l’une d’entre elles.
Compte tenu de leur âge et de l’offre existante sur le territoire, les choix se font en direction
d’établissements pour personnes âgées : foyers logements ou maisons de retraite.
La personne qui travaille encore a retrouvé un équilibre qui ne remet pas en cause, actuellement, le
maintien à domicile. Sa santé est stabilisée et les aides apportées lui permettent de s’organiser de façon
satisfaisante. Pour elle, il faut noter la place indispensable des aidants : mari, fratrie, auxiliaire de vie…
De fait, les questions de la santé, de sa prise en compte, de la nature des répercussions sur la vie
quotidienne sont en lien étroit avec le contexte de vie. Alors qu’en est-il pour ces quatre personnes ?
2.2.2. Besoins associés : vie quotidienne et …
Nous remarquons, dans ce domaine, l’intervention d’au moins trois personnes au domicile pour la
réalisation des tâches de la vie quotidienne: une aide à domicile et une infirmière, ainsi que la famille pour
trois d’entre-eux et le SAVS pour la quatrième.
Le passage de l’infirmière au domicile pour la préparation des piluliers, est en lien direct avec
l’importance de la médication, et la difficulté des trois personnes de la gérer.
67
L’intervention d’une aide à domicile est nécessaire pour assurer, selon le temps disponible, l’entretien du
linge et de l’appartement. Les accompagnateurs notent un déclin par rapport à l’hygiène, aux repas, au
ménage… Il est certain que le travail impliquait une régulation au niveau de l’hygiène et des repas ainsi
qu’un rythme de vie qui ont disparu. Pour les personnes en retraite, le financement personnel ne permet
pas une augmentation des heures d’intervention qui s’avèrerait profitable.
Par contre, la prise en charge financière d’heures au titre de l’invalidité, permet aux deux personnes
concernées de bénéficier d’un soutien complémentaire autour de l’alimentation et pour quelques courses.
Pour elles, le passage à la retraite nécessitera de reposer la question du financement des aides existantes.
L’équilibre actuel est lié à l’intensité du soutien établi.
« J’espère que ça va continuer comme ça … j’ai un bel appartement, je m’y plais, j’en suis
fière, … je voudrais en profiter encore un petit peu » (E2)
La comparaison de ces deux types de situation montre ce qu’elles ont en commun : un besoin important
de présence pour l’organisation des tâches quotidiennes et leur réalisation. Faute de quoi la personne peut
se trouver en grande difficulté. La forte intrication des besoins en matière de santé et de vie quotidienne
nécessite de considérer les deux domaines conjointement. D’ailleurs si les uns se plaignent de la solitude,
les autres disent, en parlant de la relation à l’aide à domicile :
« Ca permet de discuter … » (E1)
Il y a ainsi une notion qualitative qui se joint à une notion quantitative. Il y a la question des tâches
effectuées, mais aussi celle du
contexte. Je veux parler de la nature du lien qui s’établit avec
l’intervenante et de ses effets. Il est dit concernant E1 :
« Pendant un an ça s’est super bien passé, c’était toujours la même … le changement a été
difficile, ça s’est ressenti »
La bonne entente avec l’aide à domicile apporte déjà la satisfaction d’une relation privilégiée qui se noue.
Ensuite cette intervention, si elle est suffisante en terme de durée, permet de s’investir dans des
occupations qui prennent de l’intérêt. E1 trouve du plaisir à prendre le temps de cuisiner, de demander des
conseils… Ces expériences positives vont permettre de nouveaux investissements, source de reconstruction22. Ce phénomène est exprimé clairement à propos de cette situation, mais il apparaît aussi
dans d’autres. Sa lisibilité et son effectivité sont proportionnelles au temps de présence de la personne
aidante et à sa permanence.
Sur le même registre, dans cette catégorie, nous constatons la nécessité d’interventions complémentaires
conséquentes. Elles sont assurées par la famille et/ou le curateur et, enfin, par le SAVS pour la personne
qui n’a pas de protection juridique et pour qui le service en « fait office ».
22
Cours de Jacky RIGAUX sur la souffrance.
68
« Je peux compter sur ma famille, elle m’aide beaucoup … ceux qui sont seuls ils ont personne
pour discuter, alors ils ont besoin du service, tandis que moi on est deux » (E1)
« J’ai bien ma famille, mais … ils ont assez à faire à eux, ils veulent pas … » (E4)
« Je comptais beaucoup sur elle (sa fille), elle m’emmenait partout … je ne la vois plus » (E3)
« J’ai le petit, j’ai ma p’tite fille, ma belle fille, le service, c’est bon » (E2)
Pour terminer, nous noterons que le rapprochement de ces quatre personnes est fonction de l’intensité des
besoins qu’elles manifestent. Nous voyons ici que les possibilités de prise en compte, et l’appréciation des
relations aidantes présente une disparité.
La pérennité et les limites de ces différents appuis participent aussi de la nécessité d’envisager ou non une
orientation vers une autre prise en charge.
Y aurait-il d’autres solutions ? On peut penser qu’un SAMSAH pourrait répondre plus longtemps aux
besoins de ces personnes, du fait de la présence de personnel médical dans l’équipe des accompagnateurs.
On pourrait aussi imaginer des structures innovantes qui proposeraient des appartements regroupés autour
d’un lieu ressource.
2.2.3. … suivi de la situation de travailleur
Une seule personne de cette catégorie est encore en situation de travail. Nous allons voir les
conséquences, dans ce domaine, des besoins importants dans les deux autres que nous venons de détailler.
Mais nous parlerons aussi de l’expérience du départ en retraite des deux bénéficiaires concernés de cette
catégorie, qui pourra nous éclairer dans l’analyse des catégories suivantes. Concernant la personne en
invalidité complète, le SAVS s’est fortement mobilisé dans un partenariat avec l’employeur autour des
aménagements de postes successifs, avant de passer aux démarches de demande d’invalidité.
Les problèmes de santé de E1 ont commencé par provoquer plusieurs arrêts maladie dans les deux ans qui
ont précédé la déclaration de son invalidité. Le partenariat avec l’employeur a permis d’ajuster le temps
de travail et le poste de E1 à l’évolution de sa maladie et à ses moindres capacités de travail.
Pour elle, le travail à mi-temps :
« ça s’est fait tout naturellement …je me sens bien, moins fatiguée … tant que je peux
travailler, je continuerai »(E1)
Pour les professionnels, E1 a pu tirer profit de cette répartition du temps :
« Elle fatigue moins avec le mi-temps, et a pu décrocher d’avec l’ESAT »
69
Cette remarque fait écho à ce que nous disions précédemment concernant son « accrochage » avec son
aide à domicile qui lui a permis d’investir d’autres formes de reconnaissance et de satisfactions. Sans
doute, cela simplifiera-t-il le passage à la retraite, car des pistes sont ouvertes. D’ailleurs E1 fait partie des
quelques personnes qui peuvent parler de ce qu’elles feront quand elles ne travailleront plus.
Ceci nous amène à la question de la préparation et de la décision du départ en retraite.
E4, qui a toujours travaillé à plein temps, a eu la possibilité de prendre sa retraite à 59 ans.
« 40 ans de travail, je commençais à en avoir assez … j’avais plus envie de continuer» (E4)
Il a donc décidé de faire valoir ses droits.
Le SAVS n’était pas favorable à ce départ en retraite, même s’il reconnaissait que le travail n’était pas
valorisant pour E4. Il aurait préféré le préparer davantage à l’absence d’activité.
C’est d’ailleurs ce que E4 regrette :
« j’aurais pas dû partir si tôt que ça … pour un homme, vaut mieux avoir un travail que de
rester comme ça … par contre on a moins de stress » (E4)
La situation précédente nous fait penser que, peut-être, une proposition de temps partiel aurait pu convenir
à chacun. A la fois à E4 pour moins fatiguer et au SAVS pour l’aider à réorganiser ses journées.
Quant à E3, son référent, en accord avec les paroles de E3 me signale que :
Sa « mise à la retraite s’est fait très rapidement, de façon administrative ». Elle ne l’a pas
acceptée, et « à la fin, elle n’allait plus travailler »
Parlant de son travail, elle utilise encore le présent, et me dit :
« j’aime mon boulot » (E3)
Sans doute eu-t-il fallu préparer davantage ce départ, mais comment ? Combien de temps avant ? Le peu
d’expérience des SAVS à ce sujet apporte plus de questions que de réponses.
Nous allons continuer notre réflexion au fil des catégories suivantes.
Cette catégorie nous a présenté des personnes qui ont en commun des besoins en matière de soutien à la
santé et de suivi médical qui sont prioritaires et déterminants. L’analyse de ces besoins fait apparaître la
diversité des actions nécessaires à mettre en œuvre pour y répondre, ainsi que les limites des missions et
des compétences des SAVS face à l’évolution des situations.
Pour les quatre bénéficiaires, le SAVS remplit à la fois des fonctions de veille, de soutien personnel, de
médiation et de coordination avec les différents partenaires du suivi médical et de la vie quotidienne.
70
Ces observations nous rappellent les notions développées par Maela PAUL autour du verbe
accompagner : conduire, guider et escorter qui s’articulent autour de l’idée de veille23. Nous voyons
qu’elles sont ici pleinement exploitées, jusque dans leurs limites du fait de la spécificité des besoins et des
missions du SAVS. En effet le maintien de conditions de vie satisfaisantes et sécurisées risquant de ne
plus être assuré pour trois personnes, les professionnels travaillent à l’orientation de ces personnes vers
une prise en charge institutionnelle. Pour la quatrième personne, le maintien à domicile n’est pas remis en
cause, du fait de la présence régulière d’aidants.
L’existence, la nature et l’évolution récente de ces besoins étant posées, pouvons-nous dire qu’elles sont
liées au vieillissement ?
Rappelons que chez deux femmes, la pathologie s’est amplifiée autour de la cinquantaine, et que pour les
deux autres personnes, ce fut à partir de la retraite. Dans le premier cas, l’âge est la cause directe. Dans le
deuxième cas, nous dirons que c’est la fin de l’activité professionnelle ; pour autant celle-ci est bien en
lien avec l’âge.
2.3. Pour près d’un tiers des personnes, l’évolution des besoins a lieu
simultanément dans deux domaines : vie quotidienne et santé
Sont concernés par une prédominance de ces catégories de besoins que j’ai associées, quatre bénéficiaires
retraités depuis deux à six ans. Chacun a construit, avec plus ou moins de difficultés, un nouveau rythme
de vie. Parallèlement, la santé est devenue plus fragile et ces personnes demandent plus de suivi dans ce
domaine. Mais, globalement, elles parviennent à s’organiser et elles ont des activités qu’elles choisissent.
23
Première partie
71
Réseau relationnel
Aides au quotidien
Partenaires
médicaux
Coordination
SAVS avec …
Ancienneté SAVS
Situation familiale
Ancienneté retraite
Emploi
Tranche d’âge
-17- Tableau récapitulatif de la situation des bénéficiaires de la catégorie « Q S »
65
69
Curateur;aide
à domicile;
6
loisirs
ans Célibataire 14 ans
ADAPEI
E6
50
59
Plus
de 10
2
ans Célibataire ans
Curateur;
médecin;
loisirs
E7
60
64
Depuis
la
3
ans Célibataire retraite
Médecins;
loisirs
ADAPEI
Spécialistes
CHU
SAVS
Fratrie; loisirs
ADAPEI;
connaissances
6
ans
Aide à
domicile;
médecin;
curateur
Médecin
généraliste;
dentiste
Aide à
domicile;
SAVS
Voisinage;
loisirs milieu
ordinaire
E5
E8
65
69
Marié
10 ans
Psychiatre
Aide à
domicile;
Voisinage;
SAVS
loisirs ADAPEI
Parents,
cousins;
Psychologue; Curateurmédecin
famille; quartier; loisirs
généraliste
SAVS
ADAPEI
2.3.1. Besoins principaux : vie quotidienne et …
Pour les quatre bénéficiaires, le SAVS apporte son aide dans ce domaine sous différentes formes.
Premièrement, il participe aux courses une à deux fois par mois. Il y a à cela plusieurs raisons.
Tout d’abord, cette démarche est l’occasion de faire le point sur la liste des achats nécessaires et donc
d’assurer une veille par rapport aux produits qui sont consommés ou non. Ceux-ci peuvent être de nature
alimentaire, mais aussi d’hygiène et d’entretien. Il est certain que pendant toute la vie professionnelle,
l’ESAT était attentif à la prise d’un repas équilibré chaque jour, et informait le SAVS en cas de problème
d’hygiène. A la retraite, cette vigilance tierce et régulière disparaît.
Ensuite, cette démarche offre un cadre propice à l’échange d’informations sur le quotidien ainsi qu’à la
transmission de conseils.
« le plus gros je fais avec elle, pour le ménage, les grosses choses … elle conseille … ça va plus
vite, j’ai pas de voiture. » (E5)
Enfin, comme le dit E5, et ce n’est pas anodin pour elle, il y a la question du transport des courses.
Effectivement, celles-ci sont devenues plus importantes depuis la retraite, pour des personnes dont la
72
motricité est moins aisée, qui n’ont pas de voiture et habitent relativement loin des magasins de grande
surface.
Un deuxième point concerne la mise en place d’une aide à domicile au moment du passage à la retraite
pour trois de ces bénéficiaires. Cette intervention a été supprimée pour l’un d’entre eux pour des raisons
financières, mais une reprise est à l’étude. L’aide à domicile apporte le soutien nécessaire pour pallier les
manques liés à la fin de la vie professionnelle dont nous venons de parler ci-dessus.
« ça la tenait d’aller au travail, elle faisait attention à se tenir propre, maintenant elle se
néglige un peu, elle a besoin qu’on lui dise … » (professionnel)
Mais elle est aussi la possibilité d’une relation individuelle, régulière et structurante. Elle devient un
nouveau repère. Il est évident que son intervention doit s’inscrire dans les projets du bénéficiaire, au-delà
des normes personnelles, et dans l’obligation d’assurer sa sécurité.
« Ils ont eu la même pendant des années, maintenant avec la remplaçante, il y a plus de
décalage entre ce qu’elle veut et ce qu’eux veulent de leur vie chez eux »
De ce fait, nous comprenons l’importance de la permanence de cette personne, ainsi que de la
coordination avec le SAVS.
Troisièmement, nous remarquons que, dans cette catégorie, les bénéficiaires ont un réseau relationnel
étendu au delà de la famille et du SAVS. Tous ont des loisirs, que ce soit au sein de l’ADAPEI ou en
milieu ordinaire. Pour une personne, le réseau constitué de relations de voisinage pré-existantes s’est
renforcé. Pour les autres, il est le fruit d’une construction visant à occuper le temps libéré et à compenser
la perte relationnelle du lieu de travail.
« C’est depuis que je suis en retraite que je vois du monde. Avant, quand je travaillais, je vivais
là-bas pratiquement. Maintenant je vois des dames que j’ai connues en retraite. Tout le monde
me connais, vu que je sors tout le temps » (E5)
« Tous les matins je vais boire mon café avec ... Je suis pas souvent chez moi, parce que je
donne des coups de mains aux voisins … et je suis souvent avec ma femme. J’aime encore bien
rendre service aux gens, depuis l’âge de 14 ans … j’ai toujours fait comme ça» (E8)
Pour E8 et E5, les relations établies reposent sur des services rendus dans le voisinage, et souvent, à des
personnes âgées. De plus, ils y trouvent une reconnaissance certaine. L’investissement dont le travail était
l’objet a été déplacé sur ces nouvelles activités. Pour E8, qui avait déjà des contacts, ce déplacement s’est
opéré facilement. Mais pour E5, qui a du trouver et construire ces nouvelles occupations, la transition a
été plus longue et douloureuse. C’est à ce prix qu’elle a trouvé son nouvel équilibre.
« Elles sont contentes de me voir, elles sont pas seules. Je pense qu’elles m’aiment bien. » (E5)
73
Si J se satisfait de sa vie de couple et des relations au sein de son village, les autres, célibataires, cherchent
un autre complément.
« je me sens de plus en plus seul maintenant, ça commence à me peser … je suis toujours tout
seul, il n’y a personne … » (E7)
Ainsi, dans l’un des SAVS, nous pouvons noter la création, à la demande des bénéficiaires, d’un club de
retraités, auquel beaucoup d’entre eux participent régulièrement. Des sorties touristiques sont organisées
ainsi que diverses animations. D’autre part, le SAVS anime pour eux un groupe de parole.
Ces innovations font parties des adaptations mises en place ces dernières années. Parallèlement, une aide
est apportée pour l’inscription à des activités en milieu ordinaire : club informatique, club du troisième
âge …
Ces réponses ont une action à deux niveaux. Elles proposent une activité qui passe le temps, qui occupe,
mais elles sont aussi un médiateur relationnel et socialisant.
« On fait plein de choses, ça fait du bien. Comme on n’a pas de voiture on profite » (E5)
E6 parlant du club informatique en milieu ordinaire :
« ça permet d’écrire, (avec le correcteur orthographique), je suis au journal … je connais pas
leur nom, mais rien qu’en se voyant » (E6) termine-t-il avec émotion.
La question de l’univers affectif de chacun est ici soulevée. Pour notre population, tout un pan des critères
de ce qui donne le sentiment de « réussir sa vie »24 est peu présent.
« ce que j’ai toujours regretté c’est de ne pas avoir une descendance directe … j’ai pas fait ma
vie » (E7)
François de SINGLY constate également que « l’essentiel de la vie semble être devenu l’existence
affective, émotionnelle, amoureuse »25.
La proportion de personnes de 50 ans et plus ayant une descendance est faible, et celles vivant en couple
sont peu nombreuses. Les citations qui précèdent (dans cette catégorie ainsi que dans la précédente)
traduisent la place de ces liens familiaux et du vide qui est ressenti par les personnes chez qui ils font
défaut.
Les solutions proposées seront alors investies si elles fournissent, au moins partiellement, des moyens
dont chacun voudra ou pourra s’emparer pour faire face à ses frustrations, et à sa souffrance.
24
Claude DUBAR dans la crise des identités cite une enquête sur la signification de « réussir sa vie ». les réponses
n’abordent très majoritairement que deux thèmes : l’emploi (« avoir un emploi bien payé, qui me plaise, stable, .. »)
et la famille (« avoir une famille qui m’aime et que j’aime … »)
25
Dans le même ouvrage C. DUBAR cite cet auteur dans individualisme et lien social.
74
Les diverses demandes d’aide participent à la fois des besoins liés au handicap, par sa compensation, et au
maintien de l’autonomie par la facilitation et le respect des choix de chacun. Les réponses apportées sont
un support à la réorganisation de la vie quotidienne.
Nous avons relevé ce que le passage du statut de travailleur à celui de retraité génère comme
modifications organisationnelles et relationnelles. Maintenant nous allons voir ce que ce phénomène a
comme conséquences dans le domaine de la santé.
2.3.2. … maintien de la santé et suivi médical
Les quatre bénéficiaires ont un suivi médical qui ne répond ni à un état de crise ni à un problème de santé
évolutif, comme dans la catégorie précédente. Il nécessite néanmoins un accompagnement qui a évolué
ces dernières années, car le maintien de la santé est devenu fragile. Cette fragilité est commune à tous,
mais les raisons en sont différentes. Je relève deux tendances, une plutôt psychique et l’autre plutôt
organique. Naturellement, elles peuvent être combinées.
Pour deux personnes, un soutien psychologique existe. Il a été mis en place au moment du passage à la
retraite, qui a provoqué une forte déstabilisation. Un nouvel équilibre a été trouvé et chacune a
progressivement géré seule ce suivi.
Le partenariat s’est allégé, mais le SAVS a maintenu sa vigilance. Ainsi, en raison du décès très récent
d’un parent pour E6, le contact avec le psychologue a été repris.
Nous n’avons jusqu’ici pas encore abordé la question du deuil. Pour Nancy BREITENBACH (1999), elle
fait aussi partie de « l’héritage du vieillissement ». « Atteignant une longévité proche de celle de la
population générale, les personnes handicapées mentales ont d’importantes chances maintenant de
survivre à leurs parents. Elles peuvent en outre voir des pairs décéder ». Et si, dit-elle l’idée que « les
vieillissants deviendraient un jour des mourants » est acquise, la nécessité de les accompagner en tant que
« survivants » reste à développer. Il s’avère nécessaire d’accompagner les personnes déficientes
intellectuelles dans leur travail de deuil.
Si celui-ci n’est pas fait, il prive la personne de moyens, tirés de l’expérience, pour affronter un nouveau
travail de deuil lors des inévitables pertes à venir.
Face à cette prise de conscience, je constate au travers de mon expérience une orientation privilégiée vers
des professionnels tels que les psychiatres ou les psychologues. Y aurait-il d’autres formes d’aide
possibles ? Lesquelles ? Dans quel contexte ? Les questions restent ouvertes.
75
Quelques en soient les raisons, nous pouvons dire que la valeur du partenariat avec les soignants réside
dans la spécificité de l’aide qu’il apporte mais aussi dans sa capacité à s’adapter à la fluctuation des
besoins.
Chez les deux autres personnes les besoins sont davantage liés au vieillissement physiologique: problèmes
dentaires, d’arthrose, de suivi d’une intervention chirurgicale suite à une pathologie liée à l’âge, problème
de chutes et des peurs consécutives …
« depuis que j’ai eu ce problème, que je me suis cassé la figure dans les escaliers, je me méfie
…je ne suis plus sûr de moi du tout … j’ai peur que ça revienne … ça a tout arrêté » (E7)
Outre le suivi des problèmes en cours de traitement, avec les bénéficiaires de cette tranche d’âge (ils ont
ici plus de 60 ans), les SAVS sont confrontés à la prise en compte de symptômes nouveaux ou qui
s’accentuent du fait du vieillissement. Le partenariat médical devient alors globalement plus dense et
l’accompagnement davantage centré sur ce domaine.
« Nous en avons de plus en plus le souci médical, car c’est quelqu’un qui ne se préserve pas
beaucoup … il y a une dégradation physique … j’appelle toutes les semaines pour demander
comment ça va … sinon il attend (pour aller chez le médecin) … besoin d’appuyer de plus en
plus … il y a plus de partenariat avec le généraliste » (un professionnel)
L’objectif étant de maintenir la santé et de prévenir d’atteintes plus graves, le rôle de médiation et de
coordination entre les différents intervenants prend une place croissante dans l’accompagnement. Mais
cette remarque traduit aussi la nécessité d’alerter les personnes sur la prise en compte des dégradations de
la condition physique et sur les modifications à apporter aux habitudes de vie. Cette prise en compte peut
se concrétiser par ce que nous avons appelé « les nouveaux apprentissages26».
L’idée est que les changements dus à l’avancée en âge impliquent des adaptations, qu’elles soient
souhaitées, acceptées ou forcées. Afin de les positiver au mieux, des propositions choisies peuvent être
judicieuses ; par exemple : informations sur la compréhension du fonctionnement du corps et des
phénomènes de vieillissement, informations sur le thème de l’hygiène, ouverture sur diverses activités :
ateliers de gymnastique, d’équilibre, …
Dans le département du Doubs des organismes tels que l’IRV27 ou l’URCAM28 sont des lieux ressources
pour la connaissances des actions proposées en direction des personnes âgées, ainsi que pour la
construction de nouveaux partenariats.
26
Première partie, à propos des besoins spécifiques aux personnes handicapées mentales.
27
Institut Régional du Vieillissement
28
Union Régionale des Caisses d’Assurance Maladie
76
2.3.3. Besoins secondaires : suivi de la situation de travailleur
Les bénéficiaires de cette catégorie étant tous retraités, une analyse dans cette rubrique s’avère sans objet.
Cependant la réflexion de l’un deux m’a interrogée :
« Je me plaisais bien au travail … j’y serais encore si ç’avait pas été la retraite … tant qu’on
travaille on ne se rend pas compte, c’est après que … » (E5)
Recueillie lors de mes premiers entretiens, cette citation a orienté mon attention, pour les interviews
suivantes, sur la question de la préparation des travailleurs à leur changement de statut, d’organisation de
leur vie …
2.4. Pour une minorité de notre échantillon (mais un tiers des travailleurs), les
besoins concernent essentiellement le suivi dans l’emploi
E9
E10
55
59
55
59
Entreprise
adaptée
Milieu
ordinaire
25 Employeur;
Célibataire ans médecins Spécialistes
Employeur;
aide à
32
domicile;
Célibataire ans
curateur
Réseau relationnel
Aides au quotidien
Partenaires médicaux
Coordination SAVS
avec …
Ancienneté SAVS
Situation familiale
Ancienneté retraite
Emploi
Tranche d’âge
-18- Tableau récapitulatif de la situation des bénéficiaires de la catégorie « T »
SAVS
Connaissances;
loisirs ADAPEI
Aide à
domicile;
voisinage
Village ;
loisirs milieu
ordinaire
Nous trouvons ici deux personnes pour qui les interventions du SAVS se font majoritairement en relation
avec l’employeur, ou dans le cadre de la préparation de la fin de l’activité professionnelle. Pour chacune
la question de la retraite a déjà été posée.
Si leur point commun est la prise en compte de leur prochain départ à la retraite, un positionnement
contraire les sépare à ce sujet. Mais pour le SAVS, ces contradictions alimentent le même questionnement
de l’accompagnement à cet important changement à la fois de statut et de mode de vie.
77
L’exposé du point de vue de chacun sur son statut de travailleur puis sur les conséquences en matière de
vie quotidienne, nous amènera à une tentative de compréhension des enjeux liés à cette période de
transition.
2.4.1. Besoins principaux : suivi de la situation de travailleur
Pour une meilleure compréhension, j’ai choisi de présenter les deux situations successivement :
Voyons tout d’abord la situation de E10 :
E10 est employé dans une grande entreprise depuis un peu plus de 25 ans. Depuis trois ans il occupe un
poste « emploi protégé »29, mais sans aménagement du temps. Sa demande de temps partiel n’a pas été
acceptée. E10 dit qu’il « commence à fatiguer » et trouve que le travail est « plus fatiguant » ces dernières
années. Ayant entendu parler de la possibilité, pour les travailleurs d’ESAT, de prendre leur retraite à
partir de 55 ans, il en a fait la demande. Mais le statut de son poste ne lui donne pas accès à cette
possibilité :
« Encore 6 ans à travailler, normalement … je pense gagner 1 an si je peux … m’arrêter le plus
vite possible » (E10)
Parallèlement, E10 tire encore des bénéfices de son travail. Tout d’abord financiers, car il n’hésite pas à
faire des heures supplémentaires :
« Quand ils ont besoin de moi, ils me demandent … les heures sup. ça me donnera des sous de
plus pour partir » (E10)
Mais aussi de la satisfaction :
« Les gars m’aiment bien, c’est bien » (E10)
Et son ancienneté dans l’usine lui donne une expérience reconnue ; on lui confie certaines missions que
ses collègues ne peuvent pas remplir.
E10 est donc quelqu’un qui est dans une dynamique positive par rapport à la retraite. Il apprécie la
reconnaissance que lui apporte son travail, mais elle n’est pas essentielle pour lui. Il a déjà des projets
pour sa période de retraite, qui sont dans le prolongement de sa vie actuelle. Ces données seront abordées
dans le paragraphe suivant, à propos de la vie quotidienne.
Du point de vue du SAVS, durant ces dernières années, l’accompagnement de E10 a représenté des
démarches de trois types : de partenariat avec l’employeur, de démarches administratives, et, bien
entendu, de soutien auprès de E10.
29
Qui demande une reconnaissance de Travailleur Handicapé par la CDAPH
78
Tout d’abord, le partenariat existant avec l’employeur a été renforcé. La fatigabilité manifestée par E10 a
été prise en compte dans les changements de postes opérés. Mais l’aménagement du temps n’étant pas
envisageable le suivi reste important. Il s’agit à la fois du maintien de la santé, de l’évolution des tâches,
de la pose des congés, et de la gestion des heures supplémentaires du fait de la grande disponibilité de
E10.
Ensuite, la volonté de E10 d’arrêter de travailler a du être étudiée auprès des services compétents, de
même que la possibilité de la réduction du temps de travail.
Enfin, ces différents évènements ont été l’occasion de démarches communes et d’échanges sur l’avenir.
E10 voyait surtout les avantages de la retraite :
« Moins de fatigue, moins debout … on se lève à l’heure qu’on veut … » (E10)
Par contre les professionnels, ont approfondi avec lui ce qui, de leur point de vue, peut poser problème :
« L’oisiveté, la baisse des revenus, la perte des contacts et la récupération par le village »
Pour ces raisons, le SAVS ne voit pas d’urgence au départ à la retraite. E10 bénéficie d’une bonne
intégration dans son environnement, mais elle reste fragile. Actuellement, la situation de travail participe
du maintien à l’équilibre établi.
Cette situation met en évidence différents points du contenu de l’accompagnement pour une personne en
fin de carrière, prête à étudier les possibilités qui lui sont offertes.
A l’opposé, E9 a la possibilité de prendre sa retraite mais il s’y refuse.
« Ca fait plus de 40 ans que je travaille, pour m’arrêter ça va être dur … je les plains ceux qui
travaillent pas » (E9)
Il reconnaît qu’il fatigue, des soucis de santé le gênent, mais l’inactivité l’inquiète beaucoup.
Après plusieurs années en milieu ordinaire, il est revenu à l’ADAPEI sur un poste d’Entreprise Adaptée,
car « physiquement, ne pouvait plus ». Son poste continue à être aménagé :
« Comme j’ai des problèmes de santé, ils m’ont dit de me ménager » (E9)
Il sait aussi que les professionnels ont compris son besoin de « bouger », et me transmet ce qu’ils
pensent :
« … faut pas le laisser sans rien faire, il n’aime pas » (E9)
Toutes ces appréciations sont confirmées par l’échange avec son référent.
« E9 ne veut pas quitter son travail pour ne pas être seul chez lui » dit-il, « on sent qu’il
manque quelque chose ».
Mais quelle solution trouver pour qu’il ne « s’ennuie » pas.
79
Repousser l’échéance permet ainsi de gagner du temps pour chacun.
Une demande de temps partiel a été faite, mais il n’a pas été accordé par la Caisse de retraite dont il
dépend. Donc du côté de l’employeur le travail de partenariat perdure pour continuer à adapter le poste.
Mais, concernant cette personne, un autre phénomène m’a frappée lors de l’entretien. La question du
travail et de la retraite prochaine ramenait inévitablement et de façon répétée à des souvenirs de sa vie de
jeune adulte, voire de son enfance. Il y avait comme une impossibilité de penser le temps postprofessionnel, un effet de mur qui renvoyait vers le passé. Cette observation n’est pas sans faire écho aux
situations précédentes où la fin de l’activité professionnelle a provoqué ce que j’appellerai « une crise », à
l’origine, pour plusieurs personnes des catégories précédentes, de soins psychologiques ou psychiatriques.
Nous savons30, et avons confirmé ci-dessus, que l’activité professionnelle constitue un étayage important
en terme de rythme, d’activité et de relations. Pour ces raisons, son interruption mérite une préparation
minutieuse et suffisamment anticipée. Quelques pistes peuvent être retenues.
Tout d’abord une réflexion sur l’âge, permettant aux personnes de se situer à la juste place dans les
générations : on n’est plus jeune à 55 ans. Ce constat implique aussi un travail sur des regrets ou des
frustrations possibles : la majorité des bénéficiaires de notre population n’ont pas d’enfants, tous n’ont pas
une vie de couple … alors que ces critères font partie des normes en vigueur dans notre société.
Ensuite, envisager la retraite comme une nouvelle étape ; c’est une réalité individuelle nouvelle pour
chaque bénéficiaire ; je dirai que c’est aussi une nouveauté pour les professionnels qui vont y faire
référence dans les projets de vie des personnes qu’ils accompagnent. Cette étape est justifiée pour les
mêmes raisons que pour tout un chacun dans la population globale, et sera envisagée au travers d’un
nouveau mode de vie : nouvelle gestion du temps, nouveaux investissements, modification du réseau
relationnel, adaptation aux éventuels problèmes médicaux.
Enfin, encourager et soutenir précocement des investissements qui pourront être renforcés le moment
venu et permettront de contrebalancer la perte du statut de travailleur. Nous avons pour exemples les
situations, vues précédemment, de E8 et de E1.
Ce débat vient dans la rubrique des besoins en matière de situation professionnelle, car il est directement
lié à l’investissement des bénéficiaires dans leur statut de travailleur. Mais nous voyons qu’il prend appui,
nécessairement, sur la réalité de la vie quotidienne.
Nous allons voir ce qu’il en est pour E10 et E9.
30
Première partie
80
2.4.2. Besoins complémentaires : vie quotidienne et …
Il n’y a pas d’évolution marquée des besoins des deux bénéficiaires dans ce domaine. Mais l’analyse de
l’existant apporte des éléments de compréhension sur leur façon de se projeter dans la période de retraite.
JE10 est propriétaire de sa maison qu’il a construite dans son village natal. Avec l’aide du SAVS, il y
apporte actuellement des modifications en prévision de l’avenir où il aura moins de revenus : installation
d’une douche, rénovation du système de chauffage …
Depuis plusieurs années, il bénéficie d’une aide mise en place par le SAVS pour des courses mensuelles,
sinon il fait seul ou s’arrange avec le voisinage.
Il a toujours gardé son réseau au sein de son village et de ceux environnants. Ainsi, il fait partie de
plusieurs clubs d’activités (pétanque, foot, pêche …), part en vacances tous les ans avec le même
organisme, mais, surtout, entretient de bonnes relations avec le voisinage à qui il donne de nombreux coup
de mains. Il trouve ainsi sa place et de la reconnaissance. Il sait qu’il ne s’ennuiera pas, et projette de
continuer à profiter de tout cet environnement, à son rythme.
En ce qui le concerne, l’organisation actuelle de la vie quotidienne répond à ses besoins, elle le satisfait et
il n’envisage aucune modification à court terme.
Quant à E9 son autonomie implique peu d’interventions du service dans ce domaine. Pour la même
raison, il participe peu aux loisirs proposés.
Par contre, son réseau relationnel est très restreint :
« J’aime pas être embêté et puis moi j’aime pas embêter les autres » (E9)
Il ne fait donc partie d’aucun club et n’est pas intégré dans son quartier. Il participe sporadiquement à
quelques sorties proposées par le SAVS, sans intérêt pour le groupe constitué.
De ce fait le SAVS, au travers de l’accompagnement individualisé occupe une grande place, et la relation
qu’il entretient depuis 25 ans avec son référent est très importante.
Au vu de ce descriptif, nous percevons qu’il manque des appuis pour construire un projet de retraite. De
plus les éléments qui apparaissait avec nostalgie durant notre entretien croisent très peu ce qui caractérise
son contexte de vie : ville/campagne, appartement en « bloc »/maison avec jardin, isolement/communauté
villageoise, …
Il habite dans un immeuble de zone urbaine, alors que ses racines sont du côté de la campagne et de la
nature.
Les besoins exprimés à propos de ces deux situations sont peu importants et stables. Ainsi, les
interventions du SAVS ou des autres intervenants n’ont pas changé ces dernières années.
81
Par contre, nous avons des questions par rapport à l’avenir, et en lien avec la situation professionnelle que
nous venons d’évoquer.
2.4.3. … soutien à la santé et suivi médical
Le tableau nous permet de repérer que E10 ne manifeste pas de besoin particulier dans ce domaine, ce qui
lui fait me dire :
« Y’a les visites du travail » (E10)
sinon, il contacte son médecin en fonction des problèmes courants éventuels. Le SAVS n’assure pas de
coordination, mais reste attentif.
Pour E9, la coordination s’intensifie du fait de symptômes liés au vieillissement : rhumatismes, trous de
mémoire. L’accompagnement s’avère alors parfois nécessaire pour les rendez-vous auprès des
spécialistes.
Toutefois, le suivi avec le généraliste n’a pas besoin d’être médiatisé.
Cette catégorie nous a permis d’aborder le thème du suivi dans l’emploi pour notre population de
personnes de plus de 50 ans. Il est constitué d’actions diverses, telles que l’éclaircissement de la question
administrative, l’étude des différentes possibilités d’aménagement du poste ou du temps de travail, la
prise en compte des projets des personnes et des exigences des employeurs, l’étude de la modification des
ressources …
La réflexion nous a alors permis de dégager quelques points de questionnement :
-
quel est le positionnement de la personne par rapport à son âge et à sa génération ?
-
quel est son investissement dans le statut de travailleur ?
-
comment inscrit-elle les évènements dans son parcours de vie ?
-
quels appuis a-t-elle construits pour le présent et l’avenir, à partir de son expérience personnelle?
Ces questions ne se veulent pas exhaustives, mais reprennent les éléments qui me sont apparus les plus
stratégiques pour compléter l’accompagnement des travailleurs handicapés vers la fin de leur vie
professionnelle.
Pensée à partir de cette catégorie de bénéficiaires, car elle centre le sujet, cette réflexion s’élargit aussi aux
autres catégories. Je pense notamment à celle que nous allons aborder maintenant et qui regroupe des
bénéficiaires pour qui aucun changement dans le mode de vie n’est prévu à court terme.
82
2.5. Pour près d’un quart des bénéficiaires, il n’est pas noté d’augmentation
E11
50
54
E12
55
59
E13
55
59
ESAT
ESAT
ESAT
Marié
32 ans
Curateur; loisirs
ADAPEI
Curateur;
partenaires pour
l’achat et
Environ l’aménagement
Célibataire 20 ans
du logement
Célibataire
8 ans
Employeur;
médecin
Selon
les
besoins
Réseau relationnel
Aides au quotidien
Partenaires médicaux
Coordination SAVS
avec …
Ancienneté SAVS
Situation familiale
Ancienneté retraite
Emploi
Tranche d’âge
des besoins
Curateur;
famille
Famille;
loisirs
ADAPEI;
quartier
SAVS
Soeur
Fratrie ;
ADAPEI
-19- Tableau récapitulatif de la situation des bénéficiaires de la catégorie « E »
Cette quatrième catégorie regroupe trois bénéficiaires, en activité professionnelle, sans modification
significative des besoins ces deux dernières années. L’accompagnement est resté équivalent d’une année à
l’autre.
Le tableau présente davantage l’hétérogénéité des trois situations que des points communs. Effectivement,
nous voyons apparaître la spécificité de chaque accompagnement, ainsi que les aides et les partenariats
mis en place qui s’en trouvent diversifiés.
Mais le mode de construction de mes catégories est basé, d’une part, sur l’évolution des besoins, et
d’autre part, sur un classement, en fonction de l’intensité de ces besoins. Ces personnes ont donc en
commun la non-intensification de leurs besoins, et la non-priorité d’un besoin commun par rapport aux
autres.
Toutefois, l’enquête a été l’occasion de quelques interrogations dans les différentes catégories de besoins.
83
2.5.1. Besoins en matière de maintien de la santé et de suivi médical
Ces trois personnes ne font l’objet d’aucune pathologie physiologique lourde. Nous voyons plutôt ici des
soucis courants liés à l’âge :
« J’ai du cholestérol et de l’hypertension … » (E11)
« J’ai arrêté la tapisserie parce que les yeux et le dos … » (E12)
La question soulevée est celle de la détection des signes de vieillissement de la prévention.
Notre population n’est pas toujours en mesure de faire part des petits dysfonctionnements, de prendre en
charge la surveillance nécessaire, ou de gérer la modification des conduites à tenir. La déficience
intellectuelle complique la reconnaissance et l’accompagnement de ces évolutions ordinaires.
Actuellement le suivi des pathologies citées est bien pris en compte médicalement. Mais leur traitement
relève aussi d’une prévention par l’hygiène de vie qui est du domaine de la vie quotidienne.
Un deuxième axe de prévention concerne la réponse aux informations et convocations de dépistage pour
les femmes et les hommes qui ont passé 50 ans. La difficulté peut être d’aller faire des examens, sans être
malade. A propos de E12, une professionnelle constatait :
« c’est difficile avec elle, elle ne veut pas prendre de rendez-vous. Pas de mammographie ni de
suivi gynécologique depuis 5 ans … », la ménopause : « on n’en a jamais parlé »
Cela implique que les personnes comprennent le sens de ces indications, qu’elles les situent dans le
fonctionnement de leur corps, et dans les modifications qu’il subit avec le temps. Nous en revenons à la
nécessité d’un accès aux informations et à des connaissances dont nous avons parlé plus haut.
Sur les mêmes bases, le repérage des signes de vieillissement pourra être facilité. Si l’accompagnement
leur en donne les moyens, ces personnes auront une meilleure capacité à identifier leurs difficultés, à avoir
les mots pour le dire et à oser en parler.
Mais si nous parlons de connaissances pour les bénéficiaires, il en va de même pour les professionnels des
SAVS dont la formation intègre peu de données sur ce thème.
Des connaissances minimales de base permettent des échanges argumentés, des observations ciblées,
parfois des investigations plus précises pour conseiller les démarches utiles ou nécessaires.
Il s’agit d’anticiper autant que faire se peut le repérage des troubles et de les situer dans le déroulement de
la vie et de ses étapes. Le partenariat éventuel établi avec les médecins généraliste est alors un bon
support.
2.5.2. Besoins en matière de vie quotidienne
De façon globale, chacun se plait chez soi et l’organisation actuelle de la vie courante convient.
84
Nous noterons cependant qu’une personne a demandé des travaux d’aménagement de sa salle de bain, par
anticipation des problèmes de mobilité liés à l’âge.
En terme de prévention, les conduites alimentaires sont un sujet qui mobilise souvent les équipes des
SAVS. Comme nous l’avons vu plus haut, l’accompagnement pour les courses alimentaires est souvent
l’occasion de conseils. Une autre forme d’aide est pratiquée dans l’un des services, sous forme d’ateliers
de cuisine et de conseils diététiques, conduits par un membre de l’équipe, qui a une formation de
Conseillère en Economie Sociale et Familiale. Celle-ci me faisait remarquer que sa formation est un atout
supplémentaire pour sa sensibilité à certaines questions concernant l’hygiène de vie et pour le
développement de pratiques de soutien, à l’intention des usagers : apport de conseils sur l’alimentation en
individuel ou en groupe, animation de cours de cuisine …
Concernant leurs loisirs, ces personnes s’appuient sur le SAVS pour leur organisation.
2.5.3. Besoins en matière de suivi de la situation de travailleur
Dans ce domaine également, aucun besoin particulier n’est signalé. Les paroles que j’ai entendues
témoignent de la place du travail pour ces personnes.
« c’est la coutume maintenant pour moi, l’usine ; depuis le temps que j’y suis (33 ans) … ils
sont contents mes chefs … je sais à peu près tout faire … dans les jeunes, il n’y a que moi »
(E11)
« Ne reste qu’une médaille à avoir : le gros or, va être dure à avaler car on sait que c’est la
dernière … ne plus voir les collègues ça va être très très dur) (E12)
Comme d’autres auparavant, E11 et E12 mettent en valeur leur savoir-faire et leur disponibilité. Ces
qualités fondent leur reconnaissance par leurs responsables, comme par leurs pairs. Ce regard des autres
participe à leur construction personnelle et à leur estime de soi.
Nous retrouvons ici les notions, développées par différents auteurs31, de « dépendance positive » et de
« reconnaissance sociale ». Leur enracinement fortement majoritaire dans le statut de travailleur peut être
une cause de refus de départ à la retraite ou de forte déstabilisation.
On peut penser que la précocité de ce repérage chez les travailleurs pourrait permettre de les aider à
trouver d’autres sources de reconnaissance et ainsi de prévenir certaines difficultés telles que celles
présentées par exemple dans les situations de E3, E5, E4 ou E9.
Par contre les situations de E1, E8 et E10 nous ont montré qu’un report ou un glissement d’investissement
est possible.
31
Julien Del FABRO, Bernard AZEMA et Nathalie MARTINEZ en première partie
85
A la lumière des analyses ci-dessus, il pourrait être proposé que les dernières années de vie
professionnelle soient l’occasion d’échanger sur les modalités de ce départ. Je veux parler des conditions
administratives, financières, des exigences de l’employeur, le tout mis en regard avec les projets des
personnes.
En parlant du temps de travail ou des perspectives:
(le temps plein) « tant que je peux … c’est le médecin qui va décider » (E12)
« Le mi-temps, j’y ai pensé … je ne me suis pas renseigné … lui demander avant pour voir
qu’est-ce qu’elle (la curatrice) en dit … oui ça me ferais du bien de me reposer un peu » (E11)
« même s’ils me la donne pas, je m’arrête ; j’ai assez travaillé … de toutes façon à l’ESAT ils
sont pas d’accord que je travaille deux ans de plus » (E13)
Ces paroles traduisent davantage une soumission aux décisions d’ « autres » qu’une concertation entre les
différents partenaires.
Quant aux professionnels, ils confirment que cela se traite déjà avec l’employeur ou le curateur :
« à certains moments, je trouve qu’il est fatigué … le mi-temps n’a pas été évoqué avec lui pour
l’instant …il ne le demande pas …il faut voir au niveau de ses revenus »
La question des revenus a déjà été évoquée (E10). Pour certains (les salariés du milieu ordinaire), elle
peut modifier les conditions de vie matérielles qui sont alors à prévoir et peut-être à réorganiser. Ceci
relève d’un partenariat étroit avec les curateurs puisque tous les travailleurs interviewés bénéficient d’une
protection juridique, et une large majorité sur l’ensemble de la population des SAVS. Dans le cadre de
l’accompagnement, cela peut aussi nécessiter des démarches auprès des services administratifs pour, par
exemple, obtenir des projections de revenus ou établir des relevés de carrière.
Puis il y a toutes les informations concernant les droits et contraintes des travailleurs à approfondir, à faire
connaître aux intéressés pour leur permettre un choix.
Enfin il reste le travail de partenariat avec les employeurs qui existe souvent et se renforce en cas d’étude
d’aménagement du poste, de démarches administratives ou de suivi concernant la santé. Soulignons à
nouveau le rôle majeur de la médiation et du partenariat que jouent les SAVS.
La particularité de cette catégorie s’inscrivant plutôt du côté de la régularité, fait penser un peu à une
période de latence. Pour autant il n’est pas évident quelle soit suivie d’une crise importante. Mais
l’analyse des catégories précédentes nous montre que de nombreuses adaptations aux divers besoins liés
au vieillissement seront nécessaires. Cette connaissance peut être une force pour prévenir, dès que
possible, certains risques de déstabilisation future.
86
2.6. Conclusions de l’analyse
La répartition des bénéficiaires dans les quatre catégories en fonction de l’intensité de leurs besoins et de
la prédominance d’une catégorie de besoins par rapport à une autre (santé, vie quotidienne et travail), nous
a permis d’avoir un échantillonnage de ces divers besoins.
Pour chaque catégorie de bénéficiaires, commençant par la catégorie des besoins les plus conséquents
nous avons terminé par celle des moins prégnants, voire ce qui, non identifié encore en terme de besoin,
pourrait bénéficier d’une prévention.
L’analyse des situations a permis de détailler la nature de ces besoins : soins du corps ou du psychisme,
accompagnement dans les démarches, veille ou vigilance, informations, médiation avec les intervenants,
coordination entre ces intervenants qui deviennent partenaires des professionnels …
Elle nous a aussi montré en quoi ils sont liés au vieillissement et en quoi ils sont similaires à ceux de la
population globale ou spécifiques à notre population (personnes handicapées mentales de plus de 50 ans).
Présentant les réponses apportées par les SAVS, nous avons vu parallèlement les implications pour les
professionnels en termes de compétences, d’adaptation, d’innovations, dans les limites des missions du
service et des possibilités offertes par le contexte institutionnel.
La synthèse de ces différents éléments fait l’objet du tableau ci-après :
87
Catégories de
besoins
Santé
Vie quotidienne
Situation/Travail
Prestations mises en
oeuvre
Points qui ont soulevé ma
réflexion
Compensation du
manque d'activité et
de la disparition des
repères;
Proposition d'autres
sources de
reconnaissance;
Accompagnement chez les
médecins;
Organisation du suivi des
soins et traitements;
Interventions accentuées du
SAVS auprès des
bénéficiaires et des
partenaires;
Aides à domicile;
Partenariats renforcés ou
créés;
Orientation vers des maisons
de retraite;
Quelle préparation au
changement de rythme de
vie?
Quelles solutions
intermédiaires entre le SAVS
et la maison de retraite?
Anticipation de la nécessité
d'objets d'investissements
alternatifs;
Quel financement pour les
interventions à domicile
lourdes chez les retraités;
Soutien pour le
transfert de
l'investissement sur
le travail vers
d'autres objets;
Courses avec le SAVS;
Aides à domicile;
Médiation avec les
intervenants;
Recherche et soutien pour la
mise en place de loisirs
adaptés;
Partenariat avec les
prestataires de loisirs;
Vigilance médicale et
partenariat avec les
soignants;
Partenariat avec le secteur
des personnes âgées;
Le travail sur "l'histoire de vie";
La cessation progressive
d'activité;
Les ajustements et le
renforcement des partenariats
avec le secteur des personnes
âgées;
Partenariat avec l'aide à
Soutien à propos du
domicile;
changement de
Médiation avec les artisans;
statut et de mode de
Médiation et coordination
vie;
avec le secteur médical selon
Médiation avec les
la demande;
services
Médiation et partenariat avec
administratifs/retraite;
l'employeur;
Médiation avec
Médiation pour les
l'employeur;
démarches administratives;
Vigilance sur l'existence
d'objets d'investissement hors
activité professionnelle;
Réflexion et soutien autour du
parcours de vie;
Catégories de
bénéficiaires
S
Médiation;
Coordination entre
les soignants;
Aide pour le suivi des
soins et traitements;
Aide pour le maintien
de la santé;
QS
Aide pour le maintien
de la santé;
Accompagnement du
deuil;
Aide pour la
compréhension et la
prise en compte des
effets du
vieillissement;
Coordination avec les
soignants;
T
E
Aide pour le maintien
du bien-être;
Aide pour la gestion du
quotidien: alimentation,
tâches ménagères,
temps libre …;
Aide pour les tâches
ménagères;
Permanence et
adaptation des
intervenants;
Soutien pour les loisirs;
Coordination avec
l'aide à domicile
Soutien autour de la
prise en compte des
troubles liés au
vieillissement;
Aide pour la réalisation
de travaux
d'aménagement de
l'habitat;
Coordination avec
l'aide à domicile;
Soutien pour le suivi
des campagnes de
dépistage;
Aide pour la
compréhension et
l'appropriation de
conduites de
prévention de
certaines maladies;
Aide pour la
compréhension, le
repérage et la prise
en compte des
troubles liés au
vieillissement;
Aide pour la réalisation
de travaux
d'aménagement de la
salle de bain;
Aide pour la
modification des
conduites alimentaires;
Veille ;
Partenariat avec
l’employeur
Atelier cuisine;
Vigilance pour le suivi des
traitements;
Soutien pour la gestion des
loisirs;
-20- Synthèse des conclusions de l’enquête qualitative
88
Amélioration des
connaissances de notre
population sur les
changements physiologiques
et les troubles liés au
vieillissement;
Préparation progressive au
passage à la retraite;
Troisième partie
89
DES BESOINS EMERGENTS ET DES PRATIQUES QUI
S’ENRICHISSENT
Au travers de cette analyse, nous avons pu constater l’existence de nombreux besoins liés au
vieillissement des bénéficiaires. Nous avons aussi soulevé des points de questionnement sur des
phénomènes particuliers.
L’un d’eux retient particulièrement mon attention car je l’ai perçu dans ma pratique professionnelle. Il a
été évoqué par mes collègues, mais surtout, il m’a été transmis massivement lors de certaines interviews
avec les bénéficiaires. Je veux parler des liens qui sont faits entre la façon de penser l’avenir et des
expériences antérieures appartenant essentiellement à la vie affective, souvent dans leur aspect
douloureux.
Rapidement, au fil des entretiens avec les bénéficiaires, j’ai le sentiment que la façon de parler de la
retraite, la possibilité de se projeter ou la manière de le faire dépendent de leur histoire. En évoquant les
projets possibles, plusieurs personnes font des allers et retour avec leur vie de jeune adulte voire de leurs
souvenirs d’enfance.
«Quand j’étais jeune, je ne comprenais rien du tout, je ne pensais pas, je me laissais vivre
… c’est quand on vieillit qu’on se dit qu’est-ce qu’on a fait comme conneries » (E5)
« Je ferai du crochet, j’adore le crochet, c’est ma maman qui m’a appris … » (E12)
«Je vais peut-être trouver une petite maison, avec un petit jardin, il y en avait trois chez moi,
ma maman … » (E9)
Pour trois personnes, le questionnement sur l’avenir aboutit de façon répétée à un retour nostalgique sur le
passé et à une impossibilité à s’engager dans une réponse sur le futur :
« j’y pense pas non, je vis au jour le jour » (E5)
« je sais pas, on peut rien dire … c’était quand même mieux avant que maintenant » (E9)
« au début ça allait (il y a plus de 20 ans), j’avais mes enfants, et puis …si seulement je pouvais
mourir demain » (E3)
Je suppose que quelque chose se passe autour des relations affectives anciennes, qu’elles soient familiales,
conjugales ou amicales. Leur nature et la façon dont elles ont évolué influent sur la manière d’aborder les
changements dans l’organisation de sa vie. Les personnes qui auraient conservé des relations
satisfaisantes seraient mieux armées pour organiser ou au moins faire face à la recherche du nouvel
équilibre à trouver en fonction des changements dus au vieillissement.
90
Je suis alors plus attentive à la façon dont les interviewés me relatent leur histoire de vie, et aux liens
qu’ils font entre le passé et le présent. Cela m’amène aussi à questionner davantage les professionnels sur
les liens familiaux des bénéficiaires, ce qu’ils en savent et éventuellement s’ils y font référence dans leur
travail d’accompagnement et, éventuellement, comment.
La suite des entretiens confirme que vivre ou envisager cette période de rupture correspondant à la fin de
l’activité professionnelle, réveille ou ravive des souvenirs, fait écho à des crises douloureuses parfois
enfouies depuis de nombreuses années.
« Des projets j’en ai jamais bien faits, je vivais avec mes parents, alors j’étais la p’tite gâtée.
Après ça a été très dur quand ils sont morts. Je me suis retrouvée sans travail, sans argent. Il a
fallu partir. Alors ça a été très dur déjà là. … » (E5)
« j’ai perdu mon mari, et puis on m’a foutu dehors … avant, ma fille j’allais chez elle … ma
maman à la maison de retraite … » (E3)
« ils m’ont beaucoup rendu malade, des trucs de famille, j’en ai assez … » (E7)
« elle a perdu sa mère très jeune, elle n’en avait jamais parlé jusque là … »(un professionnel)
Ces souvenirs ressurgissent à un moment de nouvelle fragilité. Pour certaines personnes, ils semblent se
surajouter au déséquilibre présent et bloquer leurs capacités à en construire un nouveau. Pour d’autres, un
passé difficile ou les diverses expériences peuvent au contraire servir de moteur :
« … j’aime encore bien rendre service aux gens, depuis l’âge de 14 ans … j’ai toujours fait
comme ça … j’ai vécu dans la misère, si je prends une femme c’est pas pour la rendre
malheureuse … » (E8)
« quand je serai en retraite, je continuerai les activités … continuer pour pas se refermer sur
soi » (E1)
« j’ai réussi à élever comme il faut mes deux enfants, c’est le principal ; ma mère elle me
prenait tout, et puis elle est partie … Pour moi, je trouve que c’est une bonne chose de préparer
ma retraite comme ça … il ne faut pas attendre le dernier moment, parce que après, si je me
retrouve loin, mes enfants comment ils viendraient voir leur mère » (E2)
Le premier constat est donc que cette tranche de vie (plus de 50 ans), qui est caractérisée par des données
objectives telles que l’âge, la situation par rapport à l’emploi, ou l’état de santé, est aussi à appréhender au
regard du vécu des personnes. Le ressenti des évènements et les souhaits pour l’avenir s’enracinent dans
les expériences, et ainsi les décisions seront prises ou acceptées en fonction des émotions induites. Aux
besoins d’accompagnement dans les domaines cités, s’ajoutent des besoins plus complexes d’aide à
l’inscription du vieillissement et de ses conséquences dans la trajectoire personnelle de chacun. L’objectif
de l’accompagnateur sera de permettre à chaque bénéficiaire de se préparer à faire face aux divers
changements de sa situation et à prendre en compte les nouvelles contraintes pour éviter de les subir.
91
Nous percevons alors la nécessité pour les professionnels d’avoir des connaissances adaptées pour faire
face aux états de crise éventuels ou pour les anticiper.
Ma réflexion et mes recherches m’ont orientées vers l’approfondissement de la notion de « crise
d’identité », qui a été traitée par Claude DUBAR (2000).
Pour l’auteur, les crises renvoient à l’idée d’une rupture d’équilibre ; elles peuvent être pensées comme
des perturbations de la relation entre les éléments structurants de l’identification. Le changement de
normes, de terminologie provoque une déstabilisation des repères et des systèmes symboliques antérieurs.
Alors le fonctionnement psychique et la subjectivité sont remis en question.
Lorsque « l’identité statutaire précédente vient d’être détruite, invalidée par autrui, qu’on ne peut être rien
d’autre, il ne reste que l’identité primitive », celle qui vient des liens familiaux, communautaires … Pour
l’individu, ne subsiste que son passé et ses racines.
Ainsi toute crise identitaire renvoie à ces liens « premiers » de l’existence, provoque un retour aux sources
pour combler le vide engendré par la perte. Celles-ci, correspondant à la relation avec la mère puis la
famille et le groupe d’origine, sont revivifiées par la nostalgie.
Mais si la crise implique « le double risque de repli communautaire et de fuite de soi », elle implique
aussi « une double opportunité, celle de nouveaux liens sociaux et personnels et d’un nouveau souci de
soi ». La chute ne peut être surmontée que par la clarification des relations entre l’ancienne et la nouvelle
identité. Le rôle de l’accompagnateur est alors de « servir d’intermédiaire entre les anciennes identités en
faillite et les nouvelles en gestation » et ainsi de permettre la reconstruction identitaire. Celle-ci se fera à
partir de nouvelles références, de nouveaux repères, d’une « nouvelle définition de lui-même et donc des
autres et du monde ». En conséquence, elle va consister à gérer d’une part de nouvelles relations avec les
autres, et d’autre part la continuité de son histoire : passé, présent et avenir.
L’identité personnelle est un processus qui compte l’appropriation de ressources, la construction de
repères, un apprentissage expérientiel … qui peut permettre de rebondir, grâce aux crises dépassées.
Toujours en mouvement, elle peut être soutenue par différents supports.
Tout d’abord, nous avons vu que sur les treize bénéficiaires enquêtées, huit ont un suivi auprès d’un
psychiatre ou d’un psychologue. L’objectif est de donner à ces personnes un lieu de parole privilégié.
Raconter sa vie implique d’argumenter le fait que son histoire personnelle a un sens, c'est-à-dire une
direction et une signification. Le tout étant rendu compréhensible par autrui.
La même logique est à l’origine de la mise en place des groupes de parole pour les retraités, dans l’un des
SAVS. Pour les mêmes raisons, cet exercice personnel peut représenter des risques pour certaines
personnes. S’ils sont estimés trop importants, d’autres méthodes devront être trouvées et proposées :
pratiques artistiques par exemple.
92
Ensuite l’accès des bénéficiaires à différentes informations (diététique, troubles du vieillissement, statut
professionnel …), et à des activités adaptées peut permettre l’acquisition de connaissances et de savoirsfaire, favoriser le développement de nouveaux investissements et donner l’accès à des choix. Certains
points font partie de l’accompagnement individualisé (échanges, démarches …) ou des activités
développées de façon collectives (cuisine).
La réflexion se poursuit au sein des SAVS, afin de proposer de nouvelles prestations ou de nouveaux
partenariats adaptés aux nouveaux besoins, notamment en lien avec le secteur des personnes âgées.
Ces supports sont proposés et mis en œuvre par divers professionnels. Au sein des SAVS, concernant
l’accompagnement des personnes vieillissantes, les compétences se sont développées bien souvent au
travers de l’expérience. En général, en termes de professionnalisation, les éducateurs spécialisés sont
formés pour faire progresser des jeunes. Même lorsqu’ils accompagnent des adultes, ils se situent dans
une logique d’apprentissages ou de maintien des acquis. Ce phénomène est semblable pour les assistant(e)
s de service social ou les conseillères en économie sociale et familiale qui constituent aussi les équipes.
Pour mémoire, je rappelle que l’enquête quantitative nous donnait la constitution des équipes des SAVS
du Doubs.
Avec le temps, il s’agit d’accepter certaines limites inévitables, ce qui peut entrer en contradiction avec
son identité professionnelle. L’accompagnement est moins celui des acquis que celui de la « déprise ».
De plus, l’avancée en âge des bénéficiaires va confronter les accompagnateurs au soutien de ces personnes
dans des deuils éventuels, mais peut-être aussi dans leur fin de vie.
Cette nouvelle étape de la vie fait courir un risque « d’abandon par anticipation » de la part des
accompagnateurs qui pourraient estimer « que ce n’est plus la peine de mobiliser des efforts puisque la
réparation du handicap n’est plus possible et la vieillesse est sans recours »32. Il convient alors de
regarder différemment les personnes handicapées mentales : non plus comme des « jeunes » éternels, mais
comme des adultes et des « aïeuls potentiels ».
Toutefois, l’acceptation des limites et de leur accentuation doit aussi être l’occasion de la recherche
permanente de solutions qui maintiennent l’autonomie33, en dépit de l’éventuelle progression de la
dépendance. Pour cette raison, l’accompagnement des personnes handicapées mentales vieillissantes
relève de compétences qui se croisent avec celles des professionnels du secteur des personnes âgées. La
multiplication des partenariats établis par les SAVS permet progressivement son enrichissement.
A la suite de l’évolution des compétences des professionnels, les besoins liés au vieillissement de la
population des SAVS provoquent la recherche de nouvelles solutions institutionnelles. En effet, l’analyse
des besoins des bénéficiaires de la catégorie « S » a mis en évidence les limites de l’accompagnement par
32
Nancy Breitenbach. Une saison de plus.
33
Thématique développée dans la première partie
93
ce type de service. Afin d’assurer leur sécurité, ces personnes sont orientées vers les maisons de retraite
du milieu ordinaire. Toutefois nous percevons bien que d’autres possibilités plus adéquates seraient
nécessaires. Cette idée est accentuée par l’obligation du fait de la loi,34 de proposer des réponses
individualisées en matière de prise en charge.
Les personnes que nous accompagnons sont habituées à leur autonomie et souhaitent généralement
maintenir leur mode de vie, même si leurs besoins s’intensifient et nécessitent une aide plus régulière et
plus soutenue que celle apportée et coordonnée par les SAVS. C’est dans cet esprit que j’ai évoqué plus
haut deux autres formes d’accompagnement : celle des SAMSAH qui associent aux prestations des
SAVS, des prestations de soins, et celle de structures innovantes basées sur le regroupement géographique
d’appartements individuels. Ce type de projet a été proposé au schéma départemental du Doubs. Une
création est en cours d’élaboration par une association du département. L’idée est d’allier un maintien à
domicile, avec un soutien de proximité par différents professionnels dont les qualifications et les temps
d’intervention restent à définir. Cet accompagnement se situerait entre celui des SAVS, devenu inadéquat,
et celui des établissements, pas encore nécessaire dans sa totalité mais choisi par défaut. Il pourrait faire
penser à celui des foyers logements, mais il se laisse la possibilité d’être plus éclaté et proposera des
prestations plus adaptées à la déficience intellectuelle ; il recevra donc un public plus jeune et plus
fortement porteur de handicap.
Mes questions de professionnelle, associées à mes impressions d’enquêtrice ainsi qu’à la réflexion sur la
crise identitaire m’amènent à répondre que nous pouvons parler de besoins émergents. La question de la
construction identitaire de personnes handicapées mentales n’est qu’effleurée, au travers du repérage de
crises. Nous avons parlé essentiellement de celle survenant chez certains bénéficiaires au moment de la fin
de l’activité professionnelle. Mais au-delà de la perte du statut professionnel et du vieillissement qui
apparaissent comme des composantes majeures de cette crise, les causes en sont plus complexes. Leur
étude pourrait être l’objet d’une autre enquête.
Néanmoins, face aux nouveaux besoins identifiés, nous pouvons noter une constante adaptation des
réponses apportées. Celle-ci s’appuie sur les diverses compétences des professions représentées.
Toutefois, le vieillissement n’a pas fait partie du contenu de formation de ces professionnels. Cette
carence est compensée de diverses manières.
Tout d’abord par la formation continue : participation à des groupes de réflexion, à des colloques ou des
stages sur ce thème, qui sont de plus en plus nombreux
Ensuite par le partenariat qui, nous l’avons vu, se développe. Il est établi avec des services d’aide et de
soins à domicile, des médecins, et, ce qui est plus récent, en direction de structures relevant du secteur des
personnes âgées.
34
Loi 2002-2 présentée dans la première partie
94
Arrivés au terme de l’analyse des besoins liés au vieillissement chez les personnes handicapées mentales,
et des conséquences en matière d’accompagnement, nous pouvons formuler, de façon synthétique et non
exhaustive cette confirmation de notre hypothèse :
Au-delà d’une intensification de l’accompagnement, le vieillissement des personnes handicapées mentales
nécessite également de:
- former les professionnels sur le phénomène du vieillissement et son accompagnement
- renforcer leurs connaissances sur la construction identitaire et sa dynamique, ainsi que sur la
prévention et l’accompagnement des crises
- proposer et développer de nouvelles réponses institutionnelles
- construire des partenariats avec les différents secteurs d’intervention pouvant compléter
l’accompagnement de ces bénéficiaires qui passent du monde du handicap à celui des
personnes âgées.
95
CONCLUSION GENERALE
Cette étude avait pour point de départ des observations et des questionnements concernant
l’accompagnement par les SAVS des personnes handicapées mentales vieillissantes. Nous en avons
dégagé deux axes de réflexion. Tout d’abord, il s’agissait d’identifier les besoins en lien avec l’avancée en
âge, pour les bénéficiaires de ces services. Ensuite, nous avons souhaité repérer les adaptations mises en
œuvre par les professionnels ainsi que les exigences, en termes d’accompagnement, pouvant émaner de
ces nouveaux besoins. Notre recherche nous a permis de contextualiser cette réflexion et d’y apporter des
précisions au travers des données de deux enquêtes.
Dans un premier temps, au travers d’une étude bibliographique, nous constatons que les notions de
handicap et de vieillesse évoluent parallèlement à la société qui les définit et que ce mouvement influence
les orientations et la mise en œuvre des politiques sociales et médico-sociales. Les textes législatifs et
règlementaires cités en sont l’expression de même que le développement de services tels que ceux
évoqués. C’est également dans cette mouvance que le terme d’accompagnement est apparu et a été
largement adopté.
L’étude du vieillissement chez les personnes handicapées mentales nous montre pourquoi ce phénomène
est récent, bien que les auteurs s’accordent à penser que la déficience mentale n’influe pas sur la
longévité. En nous référant à la structure par âge de la population française, il est intéressant de faire des
projections pour les années à venir. Il est évident que les tranches d’âge de la vieillesse vont voir leurs
effectifs continuer à augmenter pour la population que nous avons étudiée. En conséquence, la question
des besoins tant d’ordre quantitatif que qualitatif se pose dès à présent.
Dans un deuxième temps, les enquêtes, sur le département du Doubs, nous donnent une approche
quantitative puis qualitative des nouveaux besoins. Ils sont repérés dans trois grands domaines
d’accompagnement et se déclinent avec une intensité très variable selon les bénéficiaires.
Les besoins en matière de maintien de la santé et de suivi médical s’échelonnent depuis une simple
vigilance à l’égard de la personne pour le maintien de sa santé, jusqu’à l’accompagnement chez les
médecins, la coordination entre ces différents partenaires et l’organisation du suivi des soins et des
96
traitements. L’étude de la situation de trois bénéficiaires nous a permis d’évoquer les limites des
interventions du SAVS dans ce domaine.
Les besoins en matière de vie quotidienne se manifestent sous diverses formes qui se combinent de
différentes manières selon les personnes. Nous avons parlé de besoins d’interventions de soutien en
termes d’échanges, d’aide pour certaines démarches, de médiation avec les intervenants (aide à domicile,
référents pour les loisirs, curateurs, …) et de mise en place d’actions collectives.
Les besoins en matière de suivi de la situation de travailleur ne concernent que sept bénéficiaires.
Selon leur âge et leurs difficultés par rapport à l’emploi, leurs besoins en termes de médiation avec
l’employeur, de démarches administratives ou de préparation au passage à la retraite varient de manière
significative.
L’analyse permet de préciser dans quelle mesure ces besoins sont liés au vieillissement. Elle nous montre
que, dans notre population, les processus ou les signes du vieillissement sont proches de ceux relevés
dans la population globale. En revanche, leur repérage est moins aisé et leurs conséquences sont plus
délicates à traiter.
Sur ce point également, l’action des professionnels tend à organiser la compensation du handicap au
travers de l’accompagnement personnalisé. Celui-ci est bien le cadre adapté pour apporter le soutien
nécessaire à chacun : pouvoir repérer, nommer, comprendre, accepter, traiter les troubles liés au
vieillissement, s’y adapter … puis assurer la
médiatisation et la coordination avec les nouveaux
partenaires.
Nous avons aussi constaté que cette nécessaire adaptation aux nouveaux besoins des personnes
handicapées mentales vieillissantes est toujours en réflexion et en construction. Elle se manifeste par la
multiplication des interventions et par leur diversification, du fait de la proposition de nouvelles
prestations ou de l’établissement de nouveaux partenariats. Nous avons aussi pointé la nécessité de
réfléchir à de nouvelles formes de prise en charge compte tenu du nombre encore restreint des possibilités
d’orientation offertes aux personnes qui nécessitent un accompagnement dépassant les missions du SAVS
et parfois insuffisamment adapté dans les autres structures.
Un dernier point mérite d’être précisé, il concerne la méthodologie. Celle-ci laisse apparaître ses limites :
absence d’un groupe témoin et utilisation de données déclaratives notamment, mais elle a aussi permis de
mettre en lumière des éléments peu développés dans les supports d’enquête. Effectivement, nous étions
centrés sur les besoins d’aides pour les actes de la vie quotidienne, et sur les réponses apportées. Les
données recueillies ont nourri leur analyse et leur compréhension. Mais parallèlement, les bénéficiaires
ont fortement exprimé des besoins d’un autre ordre : estime de soi, appartenance, reconnaissance. Chaque
service développe, face à cela, diverses formes d’accompagnement. Celles-ci font partie des missions
spécifiques aux SAVS, et peuvent de façon globale être considérées être considérées comme leur plusvalue par rapport à d’autres services intervenant dans le secteur des personnes âgées. Certes, les personnes
97
handicapées sont amenées à passer, administrativement, du monde du handicap au monde des personnes
âgées. Pour autant, leur bien-être et le respect de leur autonomie nécessiteront toujours un
accompagnement spécialisé. Son exercice gagnera à la poursuite du travail de collaboration entre les
différents professionnels et les décideurs du secteur social et médico-social.
98
Décret n° 2005-223 du 11 mars 2005 relatif aux conditions d'organisation et de
fonctionnement des services d'accompagnement à la vie sociale et des services
d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés
NOR: SANA0424257D
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre des solidarités, de la santé et de la famille,
Vu le code de l'action sociale et des familles, notamment son article L. 312-1 ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de l'éducation ;
Vu le décret n° 2002-194 du 11 février 2002 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de
la profession d'infirmier ;
Vu l'avis de la section sociale du Comité national de l'organisation sanitaire et sociale en date
du 9 septembre 2004 ;
Vu la saisine du conseil de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie en date du 15
novembre 2004,
Décrète :
Article 1
La sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre Ier du livre III du code de l'action
sociale et des familles est complétée par un paragraphe 10 ainsi rédigé :
« Paragraphe 10
« Services d'accompagnement à la vie sociale
et services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés
« Sous-paragraphe 1
« Services d'accompagnement à la vie sociale
« Art. D. 312-155-5. - Les services d'accompagnement à la vie sociale ont pour vocation de
contribuer à la réalisation du projet de vie de personnes adultes handicapées par un
accompagnement adapté favorisant le maintien ou la restauration de leurs liens familiaux,
sociaux, scolaires, universitaires ou professionnels et facilitant leur accès à l'ensemble des
services offerts par la collectivité.
« Art. D. 312-155-6. - Les services mentionnés à l'article D. 312-155-5 prennent en charge
des personnes adultes, y compris celles ayant la qualité de travailleur handicapé, dont les
déficiences et incapacités rendent nécessaires, dans des proportions adaptées aux besoins de
chaque usager :
« a) Une assistance ou un accompagnement pour tout ou partie des actes essentiels de
I
l'existence ;
« b) Un accompagnement social en milieu ouvert et un apprentissage à l'autonomie.
« Art. D. 312-155-7. - Dans le respect du projet de vie et des capacités d'autonomie et de vie
sociale de chaque usager, les services définis à l'article D. 312-155-5 organisent et mettent en
oeuvre tout ou partie des prestations suivantes :
« a) L'évaluation des besoins et des capacités d'autonomie ;
« b) L'identification de l'aide à mettre en oeuvre et la délivrance à cet effet d'informations et
de conseils personnalisés ;
« c) Le suivi et la coordination des actions des différents intervenants ;
« d) Une assistance, un accompagnement ou une aide dans la réalisation des actes quotidiens
de la vie et dans l'accomplissement des activités de la vie domestique et sociale ;
« e) Le soutien des relations avec l'environnement familial et social ;
« f) Un appui et un accompagnement contribuant à l'insertion scolaire, universitaire et
professionnelle ou favorisant le maintien de cette insertion ;
« g) Le suivi éducatif et psychologique.
« Les prestations énumérées au présent article sont formalisées dans le cadre du dispositif
mentionné au quatrième alinéa de l'article L. 311-4.
« Art. D. 312-155-8. - Les prestations énumérées à l'article D. 312-155-7 sont mises en oeuvre
par une équipe pluridisciplinaire comprenant ou associant tout ou partie des professionnels
suivants :
« a) Des assistants de service social ;
« b) Des auxiliaires de vie sociale ;
« c) Des aides médico-psychologiques ;
« d) Des psychologues ;
« e) Des conseillers en économie sociale et familiale ;
« f) Des éducateurs spécialisés ;
« g) Des moniteurs-éducateurs ;
« h) Des chargés d'insertion.
« Sous-paragraphe 2
« Les services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés
« Art. D. 312-155-9. - Les services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés
ont pour vocation, dans le cadre d'un accompagnement médico-social adapté comportant des
prestations de soins, la réalisation des missions visées à l'article D. 312-155-5.
« Art. D. 312-155-10. - Les services définis à l'article D. 312-155-9 prennent en charge des
personnes adultes handicapées dont les déficiences et incapacités nécessitent, en sus des
interventions mentionnées à l'article D. 312-155-6, et dans des proportions adaptées aux
besoins de chaque usager :
« a) Des soins réguliers et coordonnés ;
« b) Un accompagement médical et paramédical en milieu ouvert.
« Art. D. 312-155-11. - Le projet individualisé d'accompagnement comprend, en sus des
prestations mentionnées à l'article D. 312-155-7, tout ou partie des prestations suivantes :
« a) La dispensation et la coordination de soins médicaux et paramédicaux à domicile ou un
accompagnement favorisant l'accès aux soins et l'effectivité de leur mise en oeuvre ;
« b) Un accompagnement et un suivi médical et paramédical en milieu ordinaire de vie, y
compris scolaire, universitaire et professionnel.
Les prestations mentionnées au présent article sont formalisées dans le cadre du dispositif
II
mentionné au quatrième alinéa de l'article L. 311-4.
« Art. D. 312-155-12. - Les prestations mentionnées à l'article D. 312-155-11 sont mises en
oeuvre par une équipe pluridisciplinaire comprenant, en sus des personnels mentionnés à
l'article D. 312-155-8, tout ou partie des professionnels suivants :
« a) Des auxiliaires médicaux régis par le livre III de la quatrième partie du code de la santé
publique ;
« b) Des aides-soignants.
« L'équipe pluridisciplinaire comprend ou associe dans tous les cas un médecin.
« Sous-paragraphe 3
« Dispositions communes
« Art. D. 312-155-13. - Les services définis aux articles D. 312-155-5 et D. 312-155-9
prennent en charge et accompagnent des personnes adultes handicapées de façon permanente,
temporaire ou selon un mode séquentiel, sur décision de la commission mentionnée à l'article
L. 146-9.
« Les prestations correspondantes sont délivrées au domicile de la personne ainsi que dans
tous les lieux où s'exercent ses activités sociales, de formation, y compris scolaire et
universitaire, et ses activités professionnelles, en milieu ordinaire ou protégé, ainsi que, le cas
échéant, dans les locaux du service.
« Art. D. 312-155-14. - Les services mentionnés aux articles D. 312-155-5 et D. 312-155-9
sont autonomes ou rattachés à l'un des établissements ou services mentionnés aux 5° et 7° du I
de l'article L. 312-1.
« Tout service mentionné à l'alinéa précédent, autonome ou rattaché à un établissement, doit
disposer de locaux identifiés permettant d'assurer son fonctionnement, d'organiser les
prestations et de favoriser la coordination des personnels.
« Ces locaux peuvent être organisés sous forme de plusieurs antennes.
« Art. D. 312-155-15. - L'usager de l'un des services mentionnés aux articles D. 312-155-5 et
D. 312-155-9 participe, avec l'équipe pluridisciplinaire mentionnée aux articles D. 312-155-8
et D. 312-155-12, à l'élaboration de son projet individualisé de prise en charge et
d'accompagnement. Ce projet tient compte de son projet de vie et des préconisations de la
commission mentionnée à l'article L. 146-9.
« Art. D. 312-155-16. - Le service doit être doté des personnels mentionnés aux articles D.
312-155-8 et D. 312-155-12, dont le nombre et la qualification sont appréciés en fonction de
la qualification du service, de sa capacité, de ses objectifs et de ses modalités d'organisation et
de fonctionnement, tels qu'ils ont été définis dans le projet de service.
« En outre, l'équipe pluridisciplinaire de chaque service peut comporter, en tant que de besoin
et dans le respect du projet de service, tout professionnel susceptible de concourir à la
réalisation de sa mission.
« L'ensemble des intervenants susmentionnés participent à la réalisation du projet
individualisé de prise en charge et d'accompagnement de la personne adulte handicapée.
« Art. D. 312-155-17. - Les membres de l'équipe pluridisciplinaire des services mentionnés
aux articles D. 312-155-5 et D. 312-155-9 possèdent les diplômes ou les titres à finalité
professionnelle nécessaires à l'exercice de leurs compétences.
« Les personnels mentionnés aux articles D. 312-155-8 et D. 312-155-12 peuvent être salariés
du service ou de la structure à laquelle il est rattaché ou exercer en libéral lorsqu'ils sont
habilités à pratiquer ce mode d'exercice. Dans ce dernier cas, les professionnels libéraux
concluent avec la personne morale gestionnaire une convention précisant notamment
III
l'engagement du professionnel libéral à respecter le règlement de fonctionnement et le projet
de service, ainsi que les modalités d'exercice du professionnel au sein du service visant à
garantir la qualité des prestations.
« Sans préjudice des dispositions de l'alinéa précédent, des conventions fonctionnelles
peuvent être passées, avec des personnes physiques ou morales intervenant dans les secteurs
social, médico-social et sanitaire proches du domicile de la personne adulte handicapée, pour
la réalisation de prestations complémentaires ou de proximité.
« Art. D. 312-155-18. - Lorsque le service défini aux articles D. 312-155-5 ou D. 312-155-9
intervient sur un lieu de formation ou de travail, une convention, signée par la personne
handicapée, est passée pour la durée de l'intervention avec la personne physique ou morale de
droit public ou privé responsable de l'établissement accueillant la personne handicapée ou
employant celle-ci.
« Cette convention précise les conditions d'intervention du service, la liste des personnels
amenés à intervenir auprès de la personne handicapée avec leur qualification et leur statut,
ainsi que leurs modalités d'intervention sur les lieux où s'exercent l'activité de formation, y
compris scolaire et universitaire, et l'activité professionnelle.
« Dans le respect des dispositions de l'article L. 311-3 ainsi que des attributions et des
contraintes de chacun, la coopération entre le service d'accompagnement à la vie sociale ou le
service d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés et la personne physique ou
morale de droit public ou privé visée au présent article doit permettre :
« a) D'informer l'ensemble des personnes composant l'environnement de la personne
handicapée des besoins de celle-ci ;
« b) D'identifier les difficultés susceptibles de survenir et de définir les actions permettant d'y
mettre fin ou de les éviter ;
« c) De conduire une évaluation périodique des besoins de la personne handicapée afin de
procéder, le cas échéant, aux adaptations nécessaires.
« Art. D. 312-155-19. - Les services mentionnés aux articles D. 312-155-5 et D. 312-155-9
doivent satisfaire aux conditions techniques d'organisation et de fonctionnement prévues par
le présent paragraphe dans un délai de trois ans à compter de la publication du décret n° 2005223 du 11 mars 2005 relatif aux conditions d'organisation et de fonctionnement des services
d'accompagnement à la vie sociale et des services d'accompagnement médico-social pour
adultes handicapés. »
Article 2
Le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, le
ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, le ministre de l'emploi,
du travail et de la cohésion sociale, le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le ministre de l'agriculture, de
l'alimentation, de la pêche et de la ruralité, la ministre déléguée à l'intérieur et la secrétaire
d'Etat aux personnes handicapées sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution
du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 11 mars 2005.
IV
Enquête sur l'accompagnement des personnes handicapées
mentales de 50 ans et plus par les SAVS du Doubs en 2006
Fiche Service
Nom du service :
Année
d'ouverture :
Adresse :
Téléphone :
Mél :
L'équipe :
Qualification des professionnels
Educateurs spécialisés
Assistants de services sociaux
Nombre (en ETP)
Conseillère en économie sociale et
familiale
Animateurs socio-culturels
Psychologues
Autres (à préciser)
Autres (à préciser)
Nombre d'accompagnements par ETP:
Les bénéficiaires :
Population totale accompagnée par le service
Hommes
Moins de 25 ans
De 25 à 29 ans
De 30 à 34 ans
De 35 à 39 ans
De 40 à 44 ans
De 45 à 49 ans
De 50 à 54 ans
De 55 à 59 ans
De 60 à 64 ans
De 64 à 69 ans
De 70 à 74 ans
De 75 à 79 ans
Plus de 79 ans
Total
V
Femmes
Total
Les entrées dans le service des usagers de 50 ans et
plus en 2004, 2005 et 2006
Utiliser le numéro identifiant créé sur la fiche individuelle
Pour chaque personne, plusieurs choix sont possibles (utiliser une numérotation croissante de 1 à x
par ordre décroissant d'importance)
Origine de la demande d'accompagnement
Identifiant
Usager Famille Curateur
Tuteur
ESAT
Autre
employeur
EA
MO
Autre
service
Lequel?
Autre
origine
Lequel?
Prestations contenues dans la demande d'accompagnement
Identifiant
Nommer les prestations attendues
Commentaires
VI
Les sorties du service pour les usagers de 50 ans et plus en 2004, 2005 et
2006
Utiliser le numéro identifiant créé sur la fiche individuelle
Pour chaque personne, cocher la case décès ou indiquer le type de structure qui a pris votre relais
Identifiant
Décès
Type d'accueil suivant
Les demandeurs du changement de structure
Pour chaque personne, plusieurs choix sont possibles (utiliser une numérotation croissante de 1 à x par ordre
décroissant d'importance)
Identifiant
Usager
Famille
Service
Autre
Qui?
Les causes du changement de structure
Pour chaque personne, plusieurs choix sont possibles (utiliser une numérotation croissante de 1 à x par ordre
décroissant d'importance)
Identifiant
Comportements
à risques
Suivi de
la santé
Solitude
Commentaires:
VII
Autres
Lesquels?
Enquête sur l'accompagnement des personnes handicapées mentales de 50 ans
et plus par les SAVS du Doubs en 2006
Fiche individuelle
Homme
Femme
Numéro identifiant pour ce premier questionnaire
(de 1 à x selon le nombre de personnes concernées)
Année de naissance
Année d'entrée au service
Sortie en 2006
Oui
Non
Protection juridique
Oui
Non
Temps
partiel
Retraite
Sans
emploi
Temps de travail
Temps
plein
Les interventions par domaine d'accompagnement
Cochez les domaines et la fréquence moyenne des interventions
Evolution sur les deux
dernières années
Fréquence de l'intervention
Quotidien
Plusieurs
fois par
semaine
Une fois
par
semaine
Une fois
Une fois
par
quinzaine par mois
Vie quotidienne
(pratique et
relationnelle)
Santé et suivi médical
Maintien dans le
logement
Administratif
Gestion du budget
Transports et moyens
de communication
Loisirs et vacances
Emploi
Vie sociale postprofessionnelle (si
différente de celle
extra-professionelle)
Autre
Autre
Observations:
VIII
Autre
Stable
En
baisse
En
hausse
Les différents partenariats
Indiquez, pour chaque domaine, le partenariat existant
Utilisez les lettres suivantes:
E pour existant, stable
R pour renforcé en 2005 et 2006
C pour créé en 2005 et 2006
Autre:…………………..
Autre:…………………..
Institution pour personnes âgées
IX
Employeur
Autre
Taxi
Autre
Sociétés de transport
Vie sociale postprofessionnelle (si
différente de celle
extra-prof.)
Banques
Emploi
Services administratifs
Gestion du budget
Transports et
moyens de
communication
Loisirs et
vacances
Curateur ou tuteur
Administratif
Services pour l'aménagement intérieur
Logement
Bailleurs
Service de soins
Psychiatre/psychologue
Médecin spécialiste
Médecin généraliste
Organisme pour les vacances
Organisme pour les loisirs
Famille
Auxiliaire de vie
Aide ménagère
Vie quotidienne
(pratique et
relationnelle)
Santé et suivi
médical
La coordination des différents intervenants
Oui
Non
Selon les
domaines
Une coordination est-elle nécessaire ?
Entre l'usager et les intervenants
Entre les partenaires
Si oui, assurez-vous cette coordination ?
Si non, existe-t'il une autre possibilité de coordination?
Si la fonction de coordination est assurée par d'autres personnes et services, pouvezvous les énumérer?
Commentaires:
X
Employeurs
6%
22%
72%
Existant
Renforcé
Créé
-12- Le partenariat dans le domaine de l’emploi : avec les employeurs
Logement
0,350
0,300
0,250
0,200
0,150
0,100
0,050
0,000
F
am
ill
e
Ba
e
ill
ur
s
Se
es
ic
v
r
r
Cu
Existant
e
at
Renforcé
XI
s
ur
ou
u
te
tu
créé
r
Ba
u
nq
es
-13- Le partenariat dans le domaine du logement
Loisirs et vacances
0,400
0,350
0,300
0,250
0,200
0,150
0,100
0,050
0,000
m
Fa
il l
e
an
rg
O
m
is
es
de
rg
O
Existant
l
rs
si
i
o
m
is
an
es
de
s
ce
n
ca
va
ur
te
a
r
Cu
Renforcé
ou
r
eu
t
tu
Créé
-14- Le partenariat dans le domaine des loisirs et des vacances
Vie quotidienne
0,350
0,300
0,250
0,200
0,150
0,100
0,050
Existant
tu
te
u
r
e
i ll
m
ro
u
Fa
at
eu
ai
il i
Cu
r
Au
x
Ai
d
e
m
re
én
de
ag
èr
vi
e
e
0,000
Renforcé
XII
créé
-15- Le partenariat dans le domaine de la vie quotidienne
Besançon, le 12 janvier 2008
Agnès BOREY
Tel. personnel:
Tel. professionnel :
e.mail :
SAVS de
Bonjour,
En mai-juin 2007, je vous ai sollicité pour répondre à une enquête concernant
l’accompagnement des personnes handicapées mentales de 50 ans et plus. La participation des
7 SAVS concernés dans le département du Doubs m’a permis de remarquer pour cette
population :
- une densification de l’accompagnement pour environ un tiers d’entre eux, notamment
dans les domaines de la santé, de la vie quotidienne et de l’emploi.
- Une hausse simultanée de l’accompagnement dans le domaine de la santé et dans
d’autres domaines.
- Le renforcement ou la création de partenariats, en particulier avec les professionnels du
secteur médical, puis avec les employeurs et les aides ménagères.
- Une coordination avec les partenaires pour la majorité des usagers. Son intensité n’a pas
été mesurée, mais nous la savons en lien avec l’évolution du partenariat.
Cette brève enquête quantitative semble donc étayer l’hypothèse que le vieillissement, chez
les personnes handicapées mentales accompagnées par les SAVS, génère des besoins
nouveaux.
Je souhaite maintenant, par une enquête qualitative, déterminer la nature de ces nouveaux
besoins : d’une part ceux concernant les personnes handicapées mentales elles-mêmes et
d’autre part, ce qui en est la conséquence, ceux concernant l’accompagnement proposé. Je fais
l’hypothèse que les professionnels, s’adaptant à chaque situation, sont amenés à faire évoluer
leur accompagnement et que celui-ci s’ouvre à de nouvelles formes, nécessite de nouveaux
savoirs ainsi qu’une diversification des partenariats …
Je sollicite donc à nouveau votre aide pour cette enquête complémentaire.
Afin de recueillir les informations nécessaires à une analyse, j’ai choisi de faire quelques
études de situations. J’utilise le terme situation car je souhaite pouvoir travailler, non
XIII
seulement avec les données concernant les personnes elles-mêmes, mais aussi avec des
données contextuelles.
La lecture se fera en référence à la CIF, et intègrera la notion de « projet de vie ».
Pour ces raisons, que nous pourrons approfondir si vous le souhaitez, mon enquête nécessitera
deux types d’enregistrements : celui d’un ou deux entretiens que je mènerai avec chaque
bénéficiaire, puis un autre d’un professionnel de votre service qui me permettra de récolter
des données plus précises sur la trajectoire de la personne, les projets en cours ou envisagés et
les spécificités développées dans l’accompagnement pour y répondre.
Les éléments ayant trait à la trajectoire de vie sont pour moi ceux qui relèvent de son histoire
tant familiale, sociale que de sa dépendance ou non par rapport aux institutions. Ceux aussi
qui influencent son mode de vie et ses choix, ceux qui trop faibles ou n’ayant pas été valorisés
pénalisent la construction de la période de la retraite.
Il sera intéressant pour moi de faire correspondre les souhaits des personnes avec les projets
évoqués, ceux mis en place et de repérer les raisons des choix qui ont été faits (faisabilité,
compétences utilisées chez chacun, disponibilités diverses, limites rencontrées …)
Auprès de vos bénéficiaires, je me présenterai en tant que personne venant de l’université de
Dijon et faisant une étude sur l’accompagnement des personnes de 50 ans et plus. Je leur dirai
que je cherche à comprendre comment se passe leur vie, quels sont les éventuels changements
survenus ces dernières années, et comment ils envisagent les années à venir.
Vous trouverez ci-joint, à titre indicatif, le document qui me servira de guide pour les
entretiens de récolte des informations auprès des professionnels. Je vous laisse le soin de le
compléter au gré des besoins relatifs à chaque situation, en attendant notre rencontre
prochaine.
Je reste à votre disposition pour toute précision complémentaire, et vous remercie encore pour
votre précieuse collaboration.
Cordialement,
XIV
GUIDE D’ENTRETIEN
1. IDENTIFICATION
Madame
Mademoiselle
Monsieur
Année de naissance
Situation professionnelle :
- Salarié depuis l’année …
- Ouvrier d’ESAT depuis l’année …
- Retraité depuis l’année …
Types de revenus :
- Salaire
- Rémunération garantie (ESAT)
- AAH
- APA
- Autres, à préciser :
Situation familiale :
Célibataire
Marié
Concubin
Séparé, divorcé, veuf
Vit seul :
Si non, autres personnes vivant au foyer et leur lien de parenté
- Existence d’une famille
Protection juridique :
Aucune
Curatelle
Si curatelle ou tutelle, gérée par :
Famille
organisme de tutelle
Tutelle
Privé
Date d’entrée au SAVS
2. LOGEMENT
XV
Type de logement
A préciser
Urbain
Statut:
Locataire
Rural
Semi-urbain
Propriétaire
Autre, à préciser
Aménagements du logement :
- déjà réalisés
Etude, initiative, coordination : qui ?
- à envisager :
Lesquels ? demande, étude, décision, coordination : qui ?
Déménagement à envisager :
Si oui, pourquoi ? demande, étude, décision, coordination : qui ?
Positionnement et antécédents /logement
/mobilité
3. CONTEXTE ENVIRONNEMENTAL
Accessibilité des services (commerces, banque, coiffeur …) :
- Oui (seul), pour lesquels ?
- Non, pourquoi ?
- Avec difficultés, lesquelles et pour quels services ?
Les habitudes de vie par rapport à ces services ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui,
quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement.
Accessibilité des soins (médecins, kiné….) :
- Oui (seul), pour lesquels ?
- Non, pourquoi ?
- Avec difficultés, lesquelles et pour quels soins ?
Les habitudes de vie par rapport à ces services ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui,
quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement.
Transports :
Véhicule personnel
Si oui, quel type ?
Transports en commun :
- Inexistants
- Existants
- Utilisés
- Non utilisés, pourquoi ?
XVI
Autres moyens de transport utilisés
Les habitudes de vie par rapport à ces services ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui,
quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement :
Intégration sociale
- loisirs : milieu ordinaire ou SAVS
- existence de relations dans le milieu ordinaire ?
- habitudes de vie/milieu ordinaire
/SAVS
4. PARCOURS PROFESSIONNEL
Personne encore en activité :
Si oui, quelles sont les perspectives ?
Descriptif du parcours (non)professionnel des 20 dernières années :
Quelle est l’importance du travail ?
Le poste de travail a-t-il été aménagé ?
Si oui, quand, pourquoi ?
Le temps de travail a-t-il été aménagé ?
Si oui, quand et pourquoi ?
Interventions du SAVS auprès de l’employeur
Si oui, lesquelles, quand, pourquoi, à quelle fréquence ?
5. SITUATION MEDICALE
Difficultés de santé ?
Si oui – lesquelles ?
- depuis quand ?
- quelles en sont les conséquences ?
Comment et par qui ces difficultés sont-elles actuellement prises en compte (spécialistes,
SAVS, famille, …) ?
Ces difficultés sont-elles amenées à évoluer ? Quelles sont les perspectives ?
Y a t il une coordination médicale? Par qui ?
XVII
6. VIE DOMESTIQUE
- besoin d’une aide ménagère d’une auxiliaire de vie ou d’autres intervenants. Pour quelles
tâches ?
- gestion des repas (fabrication, conservation, courses …)
- gestion des traitements médicamenteux
- gestion du linge (entretien, achat…)
- hygiène de vie
- gestion des imprévus
- réseau relationnel
Les habitudes de vie dans ce domaine ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui, quelles
en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement ?
« Le vieillissement » : qu’est-ce que cela évoque ?
7. L’AVENIR
7.1. Les points d’appuis ou faiblesses
Quels sont les éléments du parcours de vie qui alimentent les choix ainsi que les projets ?
Quelle (in)dépendance/SAVS ?
7.2. Quelles projections pour les années à venir ?
XVIII
ETUDE DE SITUATION
2. IDENTIFICATION
Madame
Mademoiselle
Monsieur
Année de naissance :
Situation professionnelle :
- Salarié depuis l’année :
- Ouvrier d’ESAT depuis l’année :
- Retraité depuis l’année :
Types de revenus :
- Salaire
- Rémunération garantie (ESAT)
- AAH
- APA
- Autres, à préciser :
Situation familiale :
Célibataire
Marié
Concubin
Séparé, divorcé, veuf
Vit seul :
- Oui
- Non, dans ce cas préciser le nombre de personnes vivant au foyer et leur lien de parenté :
- Existence d’une famille
Protection juridique :
Aucune
Curatelle
Tutelle
Si curatelle ou tutelle, gérée par :
Famille
organisme de tutelle
Privé
XIX
Date d’entrée au SAVS :
2. LOGEMENT
Type de logement :
Domicile personnel
Autre, à préciser :
Urbain
Statut:
Locataire
Institution pour personnes âgées
Rural
Semi-urbain
Propriétaire
Autre, à préciser
Aménagements du logement :
*déjà réalisés :
- Non, sans objet
- Oui, quand et lesquels :
Etude, initiative, coordination : qui ?
*à envisager :
- Non, sans objet
- Oui, lesquels et dans quels délais :
Demande, étude, décision, coordination : qui ?
Déménagement à envisager :
- Non
- Oui, pourquoi :
Demande, étude, décision, coordination : qui ?
Positionnement et antécédents /logement
/mobilité
3. CONTEXTE ENVIRONNEMENTAL
Accessibilité des services (commerces, banque, coiffeur …) :
- Oui (seul), pour lesquels :
- Non, pourquoi :
- Avec difficultés, lesquelles et pour quels services:
XX
Famille d’accueil
Les habitudes de vie par rapport à ces services ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui,
quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement :
Accessibilité des soins (médecins, kiné….) :
- Oui (seul), pour lesquels :
- Non, pourquoi :
- Avec difficultés, lesquelles et pour quels soins:
Les habitudes de vie par rapport à ces services ont-elles évolué ces dernières années ? Si
oui, quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et
l’accompagnement :
Transports :
Véhicule personnel :
- Non
- Oui, quel type
Transports en commun :
- Inexistants
- Existants
- Utilisés
- Non utilisés, pourquoi :
Autres moyens de transport utilisés :
Les habitudes de vie par rapport à ces services ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui,
quelles en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement :
Intégration sociale
-loisirs : milieu ordinaire ou SAVS
-existence de relations dans le milieu ordinaire ?
-habitudes de vie/milieu ordinaire
/SAVS
XXI
4. PARCOURS PROFESSIONNEL
Personne encore en activité :
- Non
- Oui, quelles sont les perspectives :
Descriptif du parcours (non)professionnel des 20 dernières années :
Quelle est l’importance du travail pour cette personne ?
Le poste de travail a-t-il été aménagé ?
- Non
- Oui, quand, pourquoi :
Le temps de travail a-t-il été aménagé ?
- Non
- Oui, quand, pourquoi (âge, fatigabilité, perte de compétence …):
Interventions du SAVS auprès de l’employeur :
- Non
- Oui, lesquelles, quand, pourquoi, à quelle fréquence :
5. SITUATION MEDICALE
Difficultés associées à la déficience intellectuelle :
- Non
- Oui, lesquelles (mobilité, équilibre psychique, addiction, communication …), depuis
quand et quelles en sont les conséquences :
Comment et par qui ces difficultés sont-elles actuellement prises en compte (spécialistes,
SAVS, famille, …) :
Ces difficultés sont-elles amenées à évoluer ? Quelles sont les perspectives ?
Y a t il une coordination médicale? Par qui ?
XXII
Quelles sont les limites repérées dans le suivi médical par le SAVS ?
6. VIE DOMESTIQUE
-besoin d’une aide ménagère d’une auxiliaire de vie ou d’autres intervenants. Pour quelles
tâches ?
-gestion des repas (fabrication, conservation, courses …)
-gestion des traitements médicamenteux
-gestion du linge (entretien, achat…)
-hygiène de vie
-gestion des imprévus
-réseau relationnel
Les habitudes de vie dans ce domaine ont-elles évolué ces dernières années ? Si oui, quelles
en sont les raisons et les incidences pour le projet de vie et l’accompagnement :
« Le vieillissement » : est-ce une notion abordée par cette personne ou avec elle? Pour quelles
raisons ? Comment ?…
7. L’AVENIR
7.1. Les points d’appuis ou faiblesses de la personne
Quels sont les éléments du parcours de vie de cette personne qui, à votre avis, alimentent les
choix de la personne ainsi que les projets évoqués et mis en place (habitudes personnelles ou
familiales, sources de satisfaction, évènements marquants, intégration dans l’environnement,
changements dans la situation personnelle ou environnementale…)?
Quelle (in)dépendance/SAVS
7.2. L’évolution pressentie des besoins pour les années à venir
- pour la personne
- dans l’accompagnement en termes de compétences, de partenariats, de préparation à la
période post-professionnelle …
7.3. Informations complémentaires
Afin de permettre à cette personne un déroulement de sa vieillesse qui allie à la fois ses
souhaits et sa protection, auriez-vous des propositions complémentaires à formuler ?
XXIII
ANNEXES
Décret n° 2005-223 du 11 mars 2005 ……………………………………………Pages I à IV
ENQUETE QUANTITATIVE
Fiche service …………………………………………………………………………..Pages V à VII
Fiche individuelle ……………………………………………………………………..Pages VIII à X
GRAPHIQUES COMPLEMENTAIRES
Partenariat dans le domaine de l’emploi : avec les employeurs ………………………. Page XI
Partenariat dans le domaine du logement ……………………………………………. Page XI
Partenariat dans le domaine des loisirs et vacances …………………………………... Page XII
Partenariat dans le domaine de la vie quotidienne ……………………………………. Page XII
ENQUETE QUALITATIVE
Courrier ………………………………………………………………………………..Pages XIII à XIV
Guide d’entretien …………………………………………………………………….Pages XV à XVIII
Etude de situation …………………………………………………………………Pages XIX à XXIII
GLOSSAIRE
ADAPEI : Association Des Amis et Parents d’Enfants Inadaptés
CDAPH : Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées
CHU : Centre Hospitalier Universitaire
CIF : Classification Internationale du Fonctionnement
CMP : Centre Médico-Psychologique
ESAT : Etablissements et Services d’Aide par le Travail
IRV : Institut Régional du Vieillissement
SAMSAH : Service d’Aide Médico-Sociale pour Adultes Handicapés
SAVS : Service d’Accompagnement à la Vie Sociale
URCAM : Union Régionale des Caisses d’Assurance Maladie
BIBLIOGRAPHIE
Livres et revues :
AGUESS C. (2003), La vieillesse : entre respect et âgisme, in Doc’Animation en gérontologie n°13,
octobre-décembre 2006.
AUTES M. (2000), in Actes des 14èmes journées nationales de formation, M.A.I.S.
AZEMA B. et MARTINEZ N. (2005), Les personnes handicapées vieillissantes : espérances de vie et
de santé ; qualité de vie. Une revue de la littérature, in Revue Française des Affaires Sociales n°2,
avril-juin 2005.
BARBE L. (2006), Une autre place pour les usagers ? Intervenir dans le secteur social et médicosocial, La Découverte, Paris.
BELORGEY JM. (1999), Actes des 13èmes journées nationales de formation, M.A.I.S.
BLANCHET A. et GOTMAN A. (2005), L’enquête et ses méthodes, Collection 128
BOURDELAIS P. (1997), in CHAUVIN K. (2003), le vieillissement des personnes handicapées
mentales, Editions ENSP ZRIBI G., et SARFATY J.
BREITENBACH N. (1999), Une saison de plus (Handicap mental et vieillissements), Desclée de
Brouwer
BRUNEAU M.O. (1999), Comprendre et accompagner les parents avec une déficience intellectuelle,
Gaëtan Morin, Europe.
CARTER et JANCAR (1983), in WEBER G., « Vieillir avec un handicap mental : perspectives de la
recherche », in ZRIBI G. et SARFATY J., le vieillissement des personnes handicapées mentales,
Editions ENSP.
CHAPIREAU F. (2001), La classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la
santé, in Gérontologie et société n°99.
CHAUVIN K. (2003), « Personnes « handicapées âgées » et personnes « âgées handicapées » ? sur la
construction sociale d’une différence et ses effets », in ZRIBI G. et SARFATY J. le vieillissement
des personnes handicapées mentales, Editions ENSP.
DE DINECHIN O. (2006), « Vulnérabilités et décisions au regard du comité consultatif national
d’éthique », in Ethique, décision et personnes vulnérables, Reliance n°20.
DEL FABRO J. (2003), Le grand âge et la dépendance, in Vieillesse et exclusion sociale, Pensée
plurielle n°6, 2003/2.
DUBAR C. (2000), La crise des identités, PUF
ENNUYER B. (2005), Dépendance et handicap, définitions, évaluations et politiques publiques, in
Bulletin d’information du CREAI Bourgogne n°246, mars 2005.
FOUCART J. (2003), La vieillesse : une construction sociale, in Vieillesse et exclusion sociale,
Pensée plurielle n°6, 2003/2.
GABBAÏ P. (2003), « L’accompagnement dans la vieillesse : l’exemple de la Fondation John-Bost »,
in ZRIBI G. et SARFATY J., le vieillissement des personnes handicapées mentales, Editions
ENSP.
GARDOU (C et collaborateurs), (1997), Professionnel auprès des personnes handicapées. Le
handicap en visages, (4), Eres.
GEADAH R.R. (2000), Actes des 14èmes journées nationales de formation, M.A.I.S.
GUINCHARD-KUNSTLER P., RENAUD M.T. (2006), Mieux vivre la vieillesse, Les Editions de
l’atelier, Paris. »
GUYOT P. (2003), « Avancée en âge : de la construction d’une problématique à l’élaboration de
réponses adaptées », in ZRIBI G. et SARFATY J. le vieillissement des personnes handicapées
mentales, Editions ENSP.
GUYOT P. (2004), La problématique des personnes handicapées âgées. Un révélateur des limites des
politiques sociales catégorielles. in Gérontologie et société n°110.
HENNION-MOREAU S. (2006), in Vie sociale 2006-1.
LADSOUS J. (1999), in Actes des 13èmes journées nationales de formation, M.A.I.S.
MACQUET C., VRANCKEN D. (2006), Le travail sur soi, Vers une psychologisation de la société ?,
Editions Belin.
PAUL M. (2004), L’accompagnement : une posture professionnelle spécifique, l’Harmattan.
PIETQUIN P. (2003), « Vieillesse, mutation sociale et modèle culturel », in Vieillesse et exclusion
sociale, Pensée plurielle n°6, 2003/2
ROSSIGNOL C. (2004), La « classification internationale du fonctionnement ». Démarche normative
et alibi scientifique. Pour une clarification de l’usage des concepts. in Gérontologie et société
n°110.
ROUSSEL P. (2003), « Les handicapés âgés ont-ils une place dans le système médicosocial
français ? », in ZRIBI G. et SARFATY J., le vieillissement des personnes handicapées mentales,
Editions ENSP.
STIKER H.J. (2004), Ages et handicaps, in Gérontologie et société n°110.
THIBAULT T. et POPULAIRE D. (2003), « Notion de retraite et projet pédagogique adapté », in
ZRIBI G. et SARFATY J. le vieillissement des personnes handicapées mentales, Editions ENSP.
Van ROMPAEY C. (2003), Solitude et vieillissement, in Vieillesse et exclusion sociale, Pensée
plurielle n°6, 2003/2.
VIENNEY A. (2003), « Evolution et aménagement des lieux de vie », in ZRIBI G. et SARFATY J., le
vieillissement des personnes handicapées mentales, Editions ENSP.
WALKER A. (2003), « L’impact des politiques économiques et sociales sur les personnes
handicapées mentales âgées : autonomie ou dépendance ? » in ZRIBI G. et SARFATY J., le
vieillissement des personnes handicapées mentales, Editions ENSP.
ZRIBI G. et SARFATI J. (2003), le vieillissement des personnes handicapées mentales, Editions
ENSP.
Textes et documents :
CIF : Classification Internationale du Handicap, 2001
Décret n°2005-223 du 11 mars 2005.
Décret n°2005-1135 du 7 septembre 2005.
Enquête HID (Handicap, Incapacité, Dépendance), 1999
Loi 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d’autonomie des personnes
âgées et à l’allocation personnalisée d’autonomie (A.P.A.).
Loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale.
Loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la
citoyenneté des personnes handicapées.
Rapport de l’ODAS (Observatoire national De l’Action Sociale décentralisée), 26 novembre 2003.
Rapport de MONSIEUR Paul BLANC, Sénateur des Pyrénées-orientales (2006), Une longévité accrue
pour les personnes handicapées vieillissantes : un nouveau défi pour leur prise en charge.
NOM : BOREY
PRENOM:
Agnès
DATE DU JURY: 5 et 6 février 2009
FORMATION : Diplôme Supérieur en Travail Social
TITRE :
Le vieillissement des personnes handicapées mentales vivant à
domicile: un défi pour les SAVS
RESUME :
Ces dernières années, les Services d’Accompagnement à la Vie Sociale (SAVS) pour
personnes handicapées mentales voient une partie importante de leurs usagers arriver à
l’âge de la retraite. A l’image de la population globale, ces personnes bénéficient d’un
allongement de leur espérance de vie et souhaitent le plus souvent maintenir leur mode de
vie en milieu ordinaire.
Les SAVS se trouvent alors confrontés à une nouvelle problématique: quels sont les besoins
d’accompagnement générés par le vieillissement des personnes handicapées mentales et
en quoi ces besoins transforment-ils les pratiques des professionnels ?
Ces questions nous ont conduit à approfondir tout d’abord la notion de handicap puis les
notions de vieillesse et de vieillissement, et enfin celle d’accompagnement. Leur étude nous
montre que leur perception et leur prise en compte progressent en lien avec l’évolution de la
société.
Du point de vue de l’histoire des politiques sociales, le monde des personnes handicapées
et celui des personnes âgées se sont développés dans une relative ignorance réciproque
jusque dans les années 80. Chacun avait construit parallèlement sa propre politique sociale
catégorielle correspondant à sa culture.
Depuis lors, les personnes handicapées bénéficient d’une longévité nouvelle qui bouscule
les pratiques et les représentations. Elles atteignent et dépassent l’âge de la retraite ; elles
intègrent ainsi le monde des personnes âgées. Ce passage d’un monde à l’autre force les
limites de chaque politique catégorielle et impose la nécessité d’établir des passerelles.
Ensuite, une réflexion autour du terme accompagnement permet d’en préciser le sens et la
traduction dans les pratiques professionnelles. Ces dernières s’inscrivent dans un soutien à
la construction du sujet et à sa socialisation.
A la suite de cette recherche bibliographique, deux enquêtes menées auprès des
bénéficiaires et des professionnels des SAVS du Doubs situent les besoins dans trois
domaines: la santé, la vie quotidienne et la situation professionnelle. Ces besoins génèrent
non seulement une densification des interventions mais aussi une nouvelle adaptation des
pratiques. Celle-ci passe par l’acquisition de nouveaux savoirs et le renforcement des
partenariats, notamment avec les services permettant le maintien à domicile et avec le
secteur gérontologique.
NOMBRE DE PAGES : 98
VOLUME ANNEXE : 0
CENTRE DE FORMATION : IRTESS de DIJON