RSE chez BATA un management entre utopie et

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RSE chez BATA un management entre utopie et
RSE chez BATA: un management entre utopie et pragmatisme
Patricia David
Maître de Conférences,
ESDES – RECHERCHE Université catholique de Lyon
[email protected]
Résumé
La mise en avant dans les discours des managers de l’efficacité supposée de la RSE dans la
gestion des entreprises ne pourrait-elle pas être rapprochée de ce que l’on pourrait désigner
comme une nouvelle « Utopie managériale » ? S’agit-il d’un phénomène nouveau ou de la
résurgence des modèles de gestion paternalistes traditionnels ?
Nous nous intéresserons dans cette communication à l’émergence de trois « nouveaux »
questionnements dans le management des entreprises à savoir la responsabilité, l’éthique et
le risque, qui nous amèneront vers la question suivante : La RSE pourra-t-elle être
appréhendée comme un ensemble de démarches proactives participant à la prévention et
gestion de risques au sein des entreprises ?
La rapide revue de la littérature nous a permis d’identifier ce que certains auteurs
considèrent comme une des premières manifestations de la RSE, à savoir un management
global de l’entreprise, qui a effectué pendant plusieurs décennies un passage entre l’utopie et
la gestion pragmatique, un passage qui a transformé un atelier artisanal de cordonnerie en
une entreprise multinationale.
Mots-clés : Utopie, Gestion du risque, Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE),
Management global, Firme Bata, Zlin
Introduction
Cette communication a pour objectif de tenter d’apporter un éclairage à la question de
l’apparition et de l’intégration de la préoccupation de « la gestion responsable » dans les
stratégies managériales, à partir d’une analyse historique de l’évolution d’une entreprise dans
un espace géographique spécifique, à savoir la Tchécoslovaquie, qui est devenue l’un des
pays participant à la création de ce que l’on pourrait appeler les « Nouvelles Europes ».
En effet, il nous semble que si de nombreux travaux concernant le Développement Durable et
la Responsabilité Sociale des Entreprises ont été consacrés aux entreprises situées aux USA
ou en Europe de l’Ouest, (Capron, Draperi, 2000, Ballet, de Bry, 2001, Pasquero, 2004), la
gestion des entreprises dans ce que l’on appelle communément les PECO n’a pas fait l’objet
d’étude spécifique, à l’exception des travaux de P.Koleva et alii..
C’est pourtant dans cet espace géographique qu’une entreprise industrielle mondialement
connue a pu se développer dès la fin du XIX° siècle sur les bases d’un management original,
qui pourrait être considéré comme une nouvelle utopie managériale. La petite ville morave de
Zlin dans laquelle a été créé en 1884 l’atelier de production qui devait se transformer par la
suite en une firme transnationale est devenue un véritable « laboratoire d’expérimentation »
permettant la matérialisation des principes fondateurs du management paternaliste. (Ballet, de
Bry, 2001).
1
Le projet de Tomas Bata semble être déterminé par le refus obstiné de la « path
dependence »1, à savoir l’influence de l’environnement de l’Empire Austro-hongrois finissant
d’une part et d’autre part, sur la recherche et l’expérimentation pragmatique de modèles de
management allogènes, notamment français et anglo-saxons, intervenant aussi bien au niveau
interne que dans les environnements socio-économiques de l’entreprise.
Cette approche volontariste, basée sur la critique du préexistant au niveau sociétal n’est pas
très éloignée des projets et réalisations du mouvement utopiste, notamment en ce qui concerne
Fourier, Owen, Godin, avec toutefois une différence fondamentale sur laquelle il faudrait
s’interroger.
En effet, là où les utopistes « socialisants » tentaient d’appréhender et utiliser l’entreprise
comme une « microsociété expérimentale » destinée à apporter des facteurs participant à
améliorer et changer la société du XIX° siècle, Bata avait pour objectif premier, sinon
exclusif, de faire progresser durablement sa firme. La mise en place de son modèle innovant
de management d’entreprise a abouti dans un premier temps à la création d’une « isola », un
espace-ville centré et concentré sur la production Bata. Son projet de management global de
l’entreprise se rapprocherait dans ce sens des modèles paternalistes d’inspiration anglosaxonne, notamment de Carnegie, Heinz, sans oublier Henry Ford.
Nous pourrions nous demander si « le système Bata » créé au XIX siècle et développé dans la
première moitié du XX°, ne pourrait pas être considéré comme une tentative de la mise en
place d’un type de « RSE pragmatique/utopique ». En effet, il nous semble que la volonté
d’une maîtrise globale de l’environnement socio-économique de la production dépasse la
vision entrepreneuriale pragmatique pour se rapprocher d’un concept utopique de création
d’une entreprise idéale, destinée à pallier les manques et inconvénients de la société globale :
la création de « Bata-ville », expérimentale a ainsi été destinée à dépasser ces limites
géographiques pour essaimer sur plusieurs continents.
Nous retrouvons dans ces stratégies managériales et les outils formalisés dès le début du XX°
siècle, les outils de management RSE élaborés depuis une vingtaine d’années au sein des
grandes firmes internationales. Par ailleurs, le questionnement philosophique de Thomas Bata
concernant les finalités d’une entreprise et son rôle dans la société pourrait être rapproché de
la problématique RSE actuelle, appréhendée comme « un champ de questionnement à la fois
éthique, social et politique ». (Rouban, 1990).
Pour apporter quelques éléments de réponse à nos questions, nous allons présenter dans un
premier temps un rapide survol historique des approches utopiques de la « bonne
gouvernance globale» ayant pour objectif les transformations des sociétés qui ont vu leur
émergence.
Dans une deuxième partie nous nous interrogerons, à partir d’une présentation rapide d’une
entreprise tchèque sur les contours du « Modèle Bata », construction hybride à partir des
modèles managériaux successifs, apportés et expérimentés par le créateur et unique
propriétaire de la firme. Nous avons choisi cet exemple de management, à la fois ancien et
1
Le concept de path-dependence souligne le rôle du passé et des conditions s initiales dans la détermination des
trajectoires nationales. Il apparaît comme un des concepts clés de l’approche évolutionnaire des institutions.
Arthur, 1989 ; North, 1990 ; David, 1985 ; Aguilera&Dabut, 2005, Koleva, Rodet-Kroichvili, Vercueil et alii,
2006)
2
actuel pour sa présence prédominante dans les discours des managers tchèques étudiés dans
les enquêtes qualitatives que nous avons réalisées au cours de l’année 2007 – 2008 en
République tchèque. En effet, l’analyse de contenu des discours des managers des vingt
entreprises étudiées fait apparaître que « la success story » de l’entreprise de Bata serait
devenue depuis le changement intervenu en 1989 et plus encore suite aux processus successifs
de privatisation une référence qualitative pour les dirigeants des entreprises tchèques. Le
management de Tomas Bata et de son fils serait perçu et assimilé à un « idéal type » de la
RSE.
Cet exemple d’un « manager/fondateur » qui a dès la fin du XIX° siècle mis en place une
stratégie cohérente de gestion de son entreprise en développant les outils de management qui
pourraient préfigurer les éléments constitutifs de la Responsabilité Sociale de l’Entreprise
pourrait à notre avis nous apporter des éléments de réponse concernant le positionnement
contemporain de la RSE.
1
Responsabilité Sociale des Entreprise : héritière des mouvements utopistes ?
Aujourd’hui, la RSE ne serait plus appréhendée comme une “mode managériale
”supplémentaire, un moyen de communication ou un mythe (Capron, Quairel-Lanoizelée,
2000), mais comme un ensemble d’outils participant à la résolution de préoccupations
concrètes auxquelles les gestionnaires des entreprises doivent faire face dans un
environnement complexe et incertain. L’historique de l’émergence de la RSE aux Etats-Unis
et en Europe de l’Ouest met en évidence sa progression conceptuelle et sa complexification
dans le temps.
1.1
RSE participant à l’émergence d’un «capitalisme vertueux » ?
La nécessité de resituer dans l’histoire les manifestations de ce que l’on appelle aujourd’hui la
RSE participe à notre avis à la clarification du rôle qu’elle pourrait jouer dans la gestion des
entreprises. Un éclairage historique sommaire pourrait, nous semble-t-il participer à la mise
en évidence de la logique de l’évolution des relations entre les activités économiques et les
sociétés, « d’éclairer la question de leur « encastrement » (Granovetter, 2000).
Certains auteurs font remonter les origines de ce concept dans l’histoire, notamment en se
référant aux travaux de Max Weber (1967) (Pasquero,2004), et en signalant le rôle joué dans
son émergence par les religions protestante et catholique avec les références à la doctrine
sociale de l’Eglise (Acquier, Gond, Igalens, 2005). La notion de responsabilité d’entreprise a
ainsi intégré successivement des éléments constitutifs de cercles de responsabilité de plus en
plus étendus (David, 2004).
Dans ce sens, le management responsable avec la RSE demanderait aux managers de déplacer
la finalité de leurs entreprises du niveau de la recherche exclusive du profit vers des stratégies
plus globales, plus complexes, nécessitant pour certaines dans un premier temps des
investissements importants sur le plan humain, social et environnemental.2
2
Commission de la Communauté Européenne, Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des
entreprises, Livre vert, 18.07.2001
3
Concept relativement récent en Europe, la RSE se développe aujourd’hui pour être
appréhendée comme « sagesse conventionnelle des milieux des affaires » (Starck, 1993). Le
questionnement concernant les facteurs permettant à une entreprise de « pérenniser » son
existence fait partie des stratégies des managers élaborées en vue de « maintenir et
développer, dans la durée, le potentiel de création de valeur à l’égard des différentes parties
prenantes, en cultivant les interdépendances avec l’environnement, sans toutefois sacrifier
l’autonomie de l’entreprise » (Martinet & Reynaud, 2004).
Parmi des multiples définitions de la RSE, nous proposons la suivante : « Le concept de la
responsabilité sociale des entreprises signifie que celles-ci décident de leur propre initiative de
contribuer à améliorer la société et rendre plus propre l’environnement. (...) Un nombre
croissant d’entreprises très diversifiées affirment de reconnaître leur responsabilité sociale
dans le devenir sociétal et considèrent celle-ci comme une réelle composante de leur identité.
Cette responsabilité s’exprime vis-à-vis des salariés et plus généralement, de toutes les parties
prenantes, concernées par l’entreprise et pouvant influer sur sa réussite. »3
Nous avons constaté (tableau n°1) que « la construction » du concept de la RSE s’est
effectuée dans la durée (sous de formes plus ou moins latentes et multiples) et ne peut pas être
dissociée des transformations de la société industrielle. Elle ne peut non plus être dissociée
des demandes sociétales, résultantes des transformations de la société, des bouleversements
économiques, politiques et sociaux des XIX° et XX° siècles.
Aujourd’hui, selon J.Pasquero, la préoccupation de la RSE accompagnerait étroitement le
mouvement de la mondialisation, « se mondialiserait », véhiculée par trois éléments, la
recherche de l’équilibre entre l’individualisme triomphant et l’émergence de la demande
sociétale, les répercutions des technologies sur les conditions de vie en société et enfin la
recherche de nouvelles formes de la gouvernance, notamment au sein des entreprises.
La progression forte de valeurs individualistes accompagnant le processus d’un certain retrait
de l’Etat dans la gestion sociétale, processus déterminant la transformation socio-économique
d’après 1989 des sociétés des PECO, induirait l’émergence de « la loi d’airain de la
responsabilité », (Davis, Blomstrom ,1966) qui aboutirait à la progression de l’exigence de
responsabilisation individuelle au sein de la société globale.
Le deuxième élément participant à la progression de la RSE résulterait de l’accélération de la
progression technologique imposant à la société globale la recherche de solutions dans les
domaines de l’éthique (la biogénétique), de la gestion de l’environnement ou de la gestion des
ressources naturelles, ainsi que la progression de la prise de conscience collective des
répercutions des activités humaines sur le devenir de la société humaine dans sa globalité.
Enfin, le troisième élément participant à la dynamisation de la notion de la RSE et à sa
« mondialisation » concernerait les répercutions lourdes de la mondialisation sur les
environnements socio-économiques des entreprises qui induiraient la nécessité de la mise en
place de nouvelles solidarités et la remise en question de modes de gouvernance préexistants.
3
Cette nouvelle approche sensibilise les managers à ce que certains auteurs appellent le contexte des « 3P »
(People, Planet, Profit), c’est-à-dire au développement durable et nécessite des efforts quelquefois considérables
mais justifiés et potentiellement rentables à moyen et long terme
4
Tableau 1 : Eléments constitutifs du modèle synthétique « RSE moderne » selon
Pasquero, 2004
FINALITE DE LA RSE
ORIGINES
EXEMPLES
Gestion efficace : durable et
innovante
Philanthropie
Economie classique
XIX° siècle
Progression de la compétence
technique
Mécénat d’entreprise
Sollicitude (caring)
Respect des lois du travail
Début XX° siècle : éthique des affaires,
philanthropie paternaliste
Limitation des nuisances,
Gestion des externalités
Réceptivité sociale (Social
Responsiveness) : gestion du
changement
« Rectitude » éthique : Respect
des normes sociales,
Années 1960
Années 1970
Années 1990 Généralisation des « Codes de
bonne conduite »
Social reporting /accountability
Années 2000: Société responsable = Société
transparente
Participation “citoyenne”
Programmes d’habilitation
(empowerment) socioéconomique
Années 2000 : « Mise en évidence de la
contribution des entreprises dont l’action
« fait la différence ».
Gestion « humaniste » des
RH :, valorisation des
personnels
Sensibilisation à
l’environnement
Gestion sociétale, gestion
prévisionnelle des
compétences
Développement d’une culture
organisationnelle globale
basée sur l’excellence
Triple Bottom Line (Triple
bilan: économique, social,
écologique)
« Engagement » proactif
IDEAL, OBJECTIF ou
REALITE
Ce tableau synthétique de l’émergence du modèle de la RSE participe à la lisibilité des
pratiques socialement responsables des entreprises confrontées à la gestion des
« risques/management» auxquels les managers des entreprises se trouvent confrontés.
La RSE jouerait ainsi le rôle d’un astrolabe, permettant à l’entreprise de naviguer dans les
écueils de la société globalisée, en évitant les risques. Après une phase de doutes concernant
la validité du concept de la RSE, il semblerait que les grandes entreprises ont adopté la
réflexion éthique et l’ont intégré dans leurs stratégies du développement, avec les références,
sinon les actions liées aux principes du Développement Durable.
Pour J.J.Rosé, la RSE « s’affirme comme une réponse à l’excès de pouvoir des
multinationales ». Elle aurait pour objectif de chercher à conjuguer la mondialisation et le
dialogue social. Il semblerait que nous serions en présence d’un « nouveau paradigme du
management des entreprises, fondé sur la mise en place de nécessaires contrepouvoirs que
sont les stakeholders. (Rosé, 2003).
Le référentiel de la RSE aurait ainsi acquis une légitimité qui conférerait à un véritable mythe
managérial, une pierre de Rosette participant à la traduction des questionnements de la société
globale, à travers les parties prenantes des entreprises. Le passage rapide d’une phase de doute
et de remise en question de la validité de la RSE vers la phase de l’acceptation plus ou moins
inconditionnelle de ce que l’on pourrait classer comme « Utopie mobilisatrice » (Pasquero ,
2004) pose un certain nombre de questions. Nous avons donc décidé de nous intéresser à la
dimension utopique de la RSE, à travers une rapide approche historique, en interrogeant le
concept même de l’utopie.
5
1.2
1.2.1
Rapide retour sur les utopies
Utopies « universalistes » : Hors la dimension espace/temps ?
Les grands bouleversements socio-économiques, la confrontation aux changements annulant
les cadres référentiels et induisant des incertitudes ont été toujours accompagnés par
l’émergence de travaux philosophiques et/ou littéraires proposant sous différentes formes de
nouvelles formes de gouvernances permettant d’apporter des solutions aux situations de
crises.
Les travaux des premiers utopistes connus avaient pour objectif de tendre un miroir à la
société et de proposer des esquisses d’une société idéalisée, utopique. Le retour vers la réalité
permettait de mesurer l’écart existant entre la réalité et l’idéal vers lequel il fallait s’orienter.
C’est ainsi que Platon a proposé à son époque un Etat idéal, une organisation sociale
harmonieuse, ayant pour objectif le bonheur, individuel et collectif. Cette vision, avec son
incontestable dimension universaliste a posé des fondations d’un courant utopique
transcendant des époques et des sociétés (Ricœur, 2005).
1.2.2
Utopies « contestataires » : Espace imaginaire
La recherche d’une société idéale s’est poursuivie, particulièrement dans des périodes de
grandes crises sociales et économiques, résultantes des transformations fondamentales des
sociétés. C’est ainsi que l’œuvre fondatrice de Thomas More, « Utopie », qui a donné le nom
au courant qui devait mener des critiques sociétales et propositions utopiques vers la demande
et la mise en place de réformes socio-économiques fondamentales a été créée au moment de la
remise en question des certitudes géographiques par les découvertes de Christophe Colombe,
Amerigo Vespucio, et les suivants.
L’ouverture des océans du monde a permis, grâce à la progression des technologies liées à la
navigation de déplacer la recherche de la société idéale vers la terre. En effet, la majorité des
œuvres utopiques publiées à la suite de l’Ile idéale, Utopie de Thomas More vers les espaces
terrestres, espaces qui sans pouvoir être localisés (le mot utopie résultant d’une synthèse de
deux mots grecs : nulle part et espace, lieu du bonheur), permettaient une matérialisation du
concept de la société idéale, ayant pour objectif de participer au bonheur de ses citoyens.
Il nous semble intéressant de remarquer que le concept du travail en tant qu’un moyen
d’épanouissement des individus apparait dans les écrits utopiques dès ce moment là. Les
travaux d’Erasme, Hertzer, et par la suite de Campanella (Cité de soleil, 1623) et Francis
Bacon (1622) et sa Nouvelle Atlantis s’inscrivent dans la recherche identique d’amélioration
de la société permettant à l’individu de se réaliser en vue de l’amélioration de la société
globale.
1.2.3
Utopies « expérimentales » : Entreprise comme espace d’expérimentation
Les œuvres littéraires que nous avons regroupé sous la dénomination lapidaire « utopies
contestataires » ont servi de référence à la réflexion de St.Simon, Fourier et Owen, au cours
du XVIII et début du XIX° siècle. Avec l’avènement de la révolution industrielle, les
demandes de transformation de la société globale, se déplacent vers l’entreprise qui
deviendrait ainsi l’outil de la transformation de la société. L’organisation et la gestion de
l’entreprise jouerait le rôle du vecteur de l’innovation et de l’amélioration des conditions du
6
travail ainsi que de la vie sociale. L’espace de production deviendrait l’espace
d’expérimentation d’un système idéal (idéalisé), participant à la mise en place d’un
environnement dans lequel l’harmonie individuelle participerait à l’émergence de l’harmonie
collective selon St.Simon.
Nous retrouvons à ce niveau les préoccupations concernant la recherche des conditions
optimales de la vie dans la société, avec notamment la recherche de protection des salariés
contre différents types de risques : tant les risques liés aux conditions de travail que ceux liés
à leurs conditions de vie.
Il nous semble important de souligner le déplacement d’axe des problématiques traitées. Les
projets utopiques précédents se situaient dans une approche idéalisant la transformation
globale de la société, avec un changement dont les acteurs agissant devaient être les
dirigeants, et cela sur la base d’une prise de conscience des limites du fonctionnement
préexistant de la société et de l’acceptation d’un nouveau modèle de gouvernance.
Avec les projets utopiques que nous avons désignés de façon provisoire, « les
expérimentations », le changement attendu et nécessaire de la société environnante s’enracine
dans l’espace de travail, dans l’entreprise qui prendrait ainsi la dimension d’un espace
d’expérimentation sociale dont l’ensemble de la société pourrait par la suite bénéficier.
Les résultats de l’expérimentation pourraient prendre une valeur d’exemple efficient, qui
pourrait être transféré dans d’autres espaces de production, avant d’être généralisé. Nous
constatons à travers l’analyse des différents projets décrits et des expérimentations
l’émergence d’un positionnement de la ville ou l’entreprise idéale qui occulte les institutions
environnantes préexistantes et notamment la place de l’Etat. Les raisons de ce constat
devraient être étudiées dans la suite que nous souhaiterions donner à cette communication.
L’exemple de Phalanstère de Fourier nous permet d’illustrer nos propos. Ce regroupement
d’environ 1500 personnes devait être autonome tant sur le plan de la production que sur celui
de la consommation. Les conditions optimales du logement devaient participer à la qualité de
la vie. Le travail devait être appréhendé comme un moyen d’intégration dans le groupe et de
progression individuelle. L’égalité entre les genres conditionnait la réussite du projet collectif.
L’accent a été mis, comme dans les projets utopiques précédents sur la qualité de l’éducation
de l’ensemble de la population, assurée au sein du Phalanstère. Un système innovant de
protection sociale devait compléter le dispositif.
De multiples tentatives de création de Phalanstère ont été mises en place, toutes ont échouées,
la première dès 1832 en France, mais également en Algérie et surtout aux USA, nouveau
pays, pays de tous les rêves, de toutes les utopies. Les explications de ces échecs successifs
sont multiples, mais nous ne pouvons pas les présenter dans le cadre de cette première
communication.
Malgré le constat d’échec, la place de Fourier dans l’histoire des réformes sociales n’est pas
discutable. Nous pourrions peut-être oser de comparer son œuvre et son engagement aux
expérimentations réalisées pendant des siècles par les alchimistes, à la recherche de l’or ou de
la pierre philosophale. Leurs recherches n’ont pas abouti au résultat escompté, mais ont
permis de poser des bases de la chimie moderne. Fourier pourrait ainsi être comparé à un
« alchimiste social » qui a contribué au passage des projets utopiques de l’amélioration de la
société vers les réformes sociales et les réalisations pragmatiques.
7
Nous pourrions citer ici O.Wilde : « Le progrès est une Utopie réalisée ». Et nous pourrions
ajouter …réalisée et durable, car les expérimentations utopiques ont été dans leur majorité
« limitées dans le temps et dans l’espace ». Pour illustrer nos propos, nous rappellerons
brièvement New Harmony, l’expérience initiée aux USA en 1825 par un contemporain de
Fourier, l’industriel britannique Owen, qui a investit plus de 200 000 dollars de l’époque.
Cette expérience de création d’une « cité idéale » positionnée autour d’un espace de
production a durée environ trois ans. Les principales raisons de l’échec résultaient du
décalage entre le projet théorique initial et les réalisations concrètes sur le terrain. La volonté
utopique de mettre en pratique une gestion égalitaire au sein d’un groupement humain non
préparé à ce type d’expérience a abouti à la désorganisation générale de la production,
absence de productivité et des conflits entre les membres de la communauté. Malgré des
multiples tentatives, les expériences ayant pour objectif la mise en place d’une communauté –
oasis idéalisée dans un « océan » de capitalisme du XIX° siècle n’ont pas obtenu de succès
escompté. La logique de la transformation progressive du système social environnant à partir
de l’action individuelle, par des cercles d’influence successifs s’est révélée inopérante,
utopique.
1.2.4
Utopies « pragmatiques » Entreprise comme véhicule d’un projet entrepreneurial
individuel ?
Nous présenterons ci-après très schématiquement ce que M.Capron (2002) appelle l’utopie
sociale adaptée, le Familistère de Jean-Baptiste Godin. Cette transposition pragmatique des
idéaux des « socialistes utopiques » et particulièrement de Fourier, nous intéresse
principalement à deux niveaux. Premièrement, en tant que l’exemple d’une réalisation à
l’origine utopique qui c’est pérennisée dans le temps, contrairement aux expérimentations
précédentes.
L’approche entrepreneuriale de Godin a apparemment accompagné son projet
d’expérimentation utopique et a permis à son entreprise de passer du XIX° au XX° siècle.
Godin devrait-il être considéré comme « pionnier d’un nouveau management » qui aurait
expérimenté le management participatif ? (Capron, 2001).
La pérennité du projet de Godin pourrait s’expliquer par son approche globale de la
problématique de la question sociale, qui intégrait d’une part ses préoccupations
entrepreneuriales et d’autre part apportait des solutions innovantes aux problématiques « hors
travail », notamment en ce qui concerne le logement des salariés.
La construction du Familistère avec ses équipements en avance sur son temps mettait à
disposition des familles des logements salubres, accompagnés par des équipements tels que
des magasins ou le théâtre.
Les équipements favorisant le travail des femmes ont également étaient créés avec la mise en
place des structures d’accueil pour les enfants de tout âge, avec la nourricerie, « le
pouponat », « le bambinat » accueillant des enfants âgés de 15 jours à 6 ans, et ensuite l’école
pour tous. Nous ne pouvons pas présenter l’ensemble de ce projet dans le cadre de cette
communication, mais nous soulignons l’importance et la modernité de telles mesures.
8
La philosophie qui les soutenait, basée sur l’importance de l’éducation s’inspirait largement
des projets utopiques, tout en se positionnant dans une perspective de pragmatisme éclairé.
Toutefois, la vision résolument « collectiviste » de l’éducation et de la vie en communauté ne
devrait pas, nous semble-t-il être idéalisée.
En effet, elle comportait une dimension importante du contrôle social exercé au sein même de
la communauté, avec les dérives qui apparaissent en filigrane dans tout groupe organisé,
fermé, dans toute « citadelle assiégée ». Nous pouvons ainsi citer des tentatives de création
des « cités idéales », apparaissant outre Atlantique dès le XVII° siècle avec les groupes
protestants, mais également les expériences des diverses tentatives communautaires utopiques
des XIX° et XX° siècles.
La volonté de transformer la société à partir de la transformation du cadre de vie et plus
particulièrement de la ville réapparait dans les utopies révolutionnaires d’après 1918, avec le
mouvement urbanistique et sociologique « Changer la ville, changer la vie » en URSS, mais
également avec le groupe de Le Corbusier. Cette forme d’utopie apparaît également sous une
forme « atténuée », en filigrane dans le projet de Bata que nous allons examiner dans la
deuxième partie de notre communication. Toutes ces initiatives visent une acculturation des
populations concernées, une homogénéisation de la culture de référence.
C’est le deuxième niveau du projet global, la construction et la gestion de Familistère que
nous allons présenter de façon un peu plus approfondie. Comme nous l’avons vu
précédemment, les projets ou/et les réalisations utopiques se référaient à une vision
mobilisatrice et unificatrice du devenir sociétal, qui devait jouer le rôle d’une référence de
« vivre et travailler ensemble » proposée comme exemple à la société d’accueil environnante.
L’exemple de « Familistère nous semble présenter l’exemple matérialisé le plus abouti d’un
projet de maîtrise globale de la vie économique et sociale d’un groupe, maîtrise exercée par
un individu, utopiste éclairé, mais dont les idéaux sont fortement « encastrés » dans la société
environnante.
L’architecture choisie pour le Familistère intégrant les logements impressionne à la fois par sa
monumentalité et son enfermement. Organisée autour d’une cour ovale, la bâtisse délimite
deux espaces clairement perceptibles, interne, répondant aux différents besoins de la
communauté et externe. Ces deux espaces se répondent mutuellement, signifiant la protection
d’une part et d’autre part, le rejet de l’extérieur, des autres, de ceux ne faisant pas partie des
choisis, « des élus ».
Malgré le progrès incontestable des logements, avec des équipements exceptionnels pour
l’époque de la construction, les coursives communes participent à un fonctionnement de la
communauté induisant l’obéissance à la règle commune et les modes de vie intégrant une
dimension de la surveillance réciproque.
En effet, toutes les portes sont visibles, en partie vitrées, ce qui permet de suivre les
déplacements de chacun ainsi qu’ »un suivi personnalisé » de la vie sociale. Cette logique
implicite pourrait être rapprochée de la logique de la gestion sociale globale, « surveiller et
punir » (Foucault, 1975).
Cette approche s’inscrit très clairement dans le courant de la gestion paternaliste des
entreprises qui caractérise le management du XIX° et le début du XX° siècle.
9
Pour illustrer nos propos, nous les avons regroupés en quatre grands groupes les approches
utopiques que nous avons pu identifier que nous présenterons sous forme de tableau
récapitulatif.
Tableau 2 : Utopies de référence
Utopies idéalistes
Utopies
contestataires
Approche
comparative
Existant/
Souhaitable
1478-1535
Critique sociétale
Utopies
expérimentales
Approche pragmatique
Passage de l’Utopie
vers la Réforme
1771 - 1858
Critique sociétale
1817 - 1888
Critique sociétale
Souhait
Changement
Proposition d’un
« idéal »
Proposition d’un
modèle alternatif
Entreprise : outil de
transformation de la
société globale
Platon République
Thomas More :
Utopia
St. Simon, Fourier,
Owen : Approches
théoriques et les
réalisations non
abouties
Entreprise :
Modèle référentiel
de « bonnes
conditions de vie,
privées et
professionnelles »
Jean-Baptiste
Godin
Approche
philosophique
427 - 347
Critique sociétale
Phalanstère,
Nouvelle Harmonie
National Equitable
Labour Exchange
Création des
Collectivités
ELITE
ELITE
Communautarisme
Utopies réalisées
Approche
pragmatique
Utopie
paternaliste
Empirisme
1894 -1939
Paternaliste
« messianique »
« Bâtisseur du
futur » ? (Capron,
2000)
Familistère de
Guise
Forteresse
Protection
Enfermement
Management
« participatif »
« Surveiller et
punir » ?
Passer de l’utopie rêvée à l’action selon la proposition de Draperi, rendre possible « un autre
monde », changer le monde ? Ces aspirations ne sont pas nouvelles, loin s’en faut. Ce qui
nous apparait comme « nouveauté utopique » c’est la recherche de l’entreprise idéale qui
aurait rejoint la recherche utopique de la société idéale et de la cité idéale.
Pour conclure de façon provisoire, plusieurs constats peuvent être avancés. Les différentes
utopies ont été élaborées sur la base de critique des sociétés environnantes. Elles ont en
commun la recherche de la société idéale, organisée sur la base d’un « bon gouvernement ».
Les éléments constitutifs de la société utopique portent sur l’organisation égalitaire de la
société, l’égalité entre les genres, la disparition des conditions du travail opprimantes.
Cette relecture trop rapide des manifestations de l’Utopie à travers l’histoire nous apporte un
certain nombre d’informations nous orientant vers « l’imaginaire industriel » (Le Goff, 1995)
dans le management des entreprises. L’utopie d’hier et d’aujourd’hui seait elle en train de
devenir la réalité de demain ?
10
2
Matérialisation d’un projet individuel utopique : Transformations d’un atelier
artisanal en une firme internationale
Nous présenterons dans notre deuxième partie l’exemple de l’entreprise Bata. Si à notre avis,
elle s’inscrit dans le courant qui déterminait la gestion paternaliste du XIX° siècle, sa
progression et plus particulièrement sa transformation, en une firme transnationale nous
semble résulter de la mise en place d’un système de management innovant. Thomas Bata a
réussi de « greffer » sur un modèle de management fondamentalement paternaliste et
pragmatique, des modèles allogènes, étrangers à la culture locale de management. Le transfert
a réussi dans un premier temps, avec sous l’influence de l’histoire et de la politique la
délocalisation et l’abandon du territoire d’ancrage originel.
2.1
Les racines locales du projet managérial Bata
Le management paternaliste est apparu, comme dans l’ensemble de l’Europe dans les
entreprises des territoires de Bohême et Moravie au cours de la deuxième moitié du XIX°
siècle avec la progression de l’industrialisation. Le contexte spécifique des territoires faisant
partie de l’Empire Austro-hongrois explique la prédominance de la dimension pédagogique
dans les politiques sociales des entrepreneurs.
En effet, nous retrouvons dans les actions mises en place dans le domaine de la santé des
salariés, par la construction des dispensaires et des hôpitaux, des améliorations des conditions
de travail et la mise en place des systèmes d’assurance maladie et de fonds de retraites les
références au modèle de mangement paternaliste européen et anglo-saxon.
Toutefois, une dimension déterminante apparaît à l’analyse des réalisations de V.A.Lana
(1850), J. Liebig (1855), J. Waldes (1895). La dimension pédagogique, omniprésente dans les
utopies que nous avons pu rapidement présenter précédemment constitue un socle commun
d’une importance très significative, liée à la spécificité de l’environnement social et politique
des entreprises de l’empire austro-hongrois. Elle est fondée sur la revendication et la mise en
évidence des spécificités des cultures nationales émergentes, à la recherche de légitimité.
L’ensemble d’initiatives et de réalisations très diverses a pour l’objectif affiché la progression
professionnelle des salariés. C’est ainsi que nous retrouvons un ensemble d’institutions
pédagogiques financées par les entrepreneurs. Un deuxième objectif concerne la volonté de
dépasser l’amélioration du niveau général de qualification des salariés, dans le cadre d’un
enseignement professionnalisant , e valorisant l’enseignement basé sur la connaissance de
l’histoire nationale, la littérature et l’apprentissage des langues européennes, avec l’accent mis
sur la langue tchèque, l’allemand étant la langue officielle de l’Empire.
Cette situation a persistait dans les grandes entreprises industrielles jusqu’à la fin de la
première guerre mondiale en 1918 qui a vu l’éclatement de l’empire et la création de la
Tchécoslovaquie.
Les premières approches rationnelles du management des entreprises sont apparues dans un
premier temps dans les grandes entreprises industrielles, comme par exemple dans les aciéries
Vitkovice. P. Kupelwiesner, le PDG de l’entreprise a instauré entre 1876 et 1893 un des
premiers systèmes participant à la mise en place d’une politique sociale de gestion du
personnel, avec comme but affiché de permettre aux salariés de participer à l’émergence d’un
sentiment d’appartenance à l’entreprise et d’une volonté consciente de « construire l’avenir
11
ensemble ». (Myska, 1997). L’ensemble des actions entreprises, basé sur la recherche de la
qualité du processus de recrutement intégrait notamment la réorganisation du système de
rémunération et la participation aux résultats des salariés.
Il nous semble évident que ces différentes initiatives, même si elles intégreraient l’éthique
personnelle des entrepreneurs et leur volonté affichée d’améliorer les conditions de vie et de
travail de leurs salariés, avaient comme but ultime et prioritaire la progression et la pérennité
des entreprises.
L’un des exemples les plus aboutis de l’intégration du courant de l’éthique pragmatique dans
la gestion des entreprises était représenté par la firme Bata. L’analyse de ce modèle de
management nous semble apporter deux types d’enseignement.
D’une part, il apparaît que les différentes actions mises en place ont eu dès le début pour
objectif de protéger la progression de l’entreprise des risques clairement identifiés, à l’interne
et à l’externe, tant sur le plan de la gestion de l’ensemble des ressources (humains ou
matériels), que vis-à-vis de la concurrence.
D’autre part, si une première lecture pourrait nous amener à faire un rapprochement
mécanique avec l’expérience utopique de Godin, l’utopie pragmatique de Bata s’est
développée progressivement dans le XX° siècle, avec un management très conscient de la
réalité du marché concurrentiel.
Là où l’enfermement de la forteresse du « Palais social » a ancré l’expérience utopique de
Godin dans le XIX siècle, l’ouverture du projet de la ville Zlin de Bata a permis à l’entreprise
de quitter son territoire d’origine pour entrer à travers la planète dans le XXI° .
2.2
Bata le précurseur de la gestion des risques
L’analyse des documents et ouvrages réalisés par le fondateur de la firme nous permet de
mettre en évidence sa volonté affirmée de l’identification de différents types de risques ainsi
que la progression de l’élaboration des stratégies participant à leur résolution.
Nous avons décidé de présenter schématiquement cet exemple de management global des
risques qui a contribué à la transformation d’un atelier artisanal de production de chaussures
en une firme transnationale par un management « résolument volontariste ».
L’entrepreneur T. Bata a ainsi progressivement intégré la stratégie de la gestion des risques
dans la stratégie générale du développement de son entreprise.
La mise en place d’un système global de management lui permettait non seulement de
maîtriser l’ensemble du processus de production et de la distribution, mais lui apportait
également la maîtrise de l’environnement social et politique de son entreprise.
La spécificité de cette approche consiste à notre avis dans la précocité de moment de son
introduction dans la gestion de la firme, dès la fin du XIX° siècle.
12
Tableau 3 : Différents types de risques pris en compte dans la firme Bata/stratégies d’évitement
Risques liés au marché
Risques liés aux environnements
internes
Risques liés aux environnements
externes
Positionnement sur les
marchés/connaissance de la
concurrence
Gestion des ressources humaines :
qualité de recrutement, prévention
du départ des collaborateurs « clé »
Changement de l’environnement
institutionnel (Etat, Europe,
monde)
Concurrence locale, européenne,
mondiale
Conditions du travail / %
d’accidents du travail, % de
maladie professionnelles
Qualité de la production
Equilibre produit/prix
Qualité de relations avec les
acteurs locaux
Productivité
Absence ou présence des activités
de mécénat
Capacité d’innovation, R&D
Absence ou manques de gestion
optimale de biens immatériels
Modification de la démographie
Fort investissement sur les jeunes
Variation de taux de monnaies
Gestion inadaptée des générations
et/ou de la multi culturalité
Qualité de l’enseignement et de la
formation professionnelle
gestion adaptée de la veille
concurrentielle
Absence d’une stratégie de gestion
prévisionnelle de risques
Connaissance et mise en
application des principes du DD et
de la RSE
Image de l’entreprise
Absence de management
stratégique ou stratégies inadaptées
aux marchés
Absence ou stratégies inadaptées
d’investissement
Image de marque
2.3
Répercutions environnementales de
l’activité de l’entreprise
Historique de la firme Bata, son parcours et son environnement
Nous nous intéresserons dans notre contribution à une entreprise dont le parcours nous semble
apporter un éclairage spécifique sur le rôle que pourrait jouer la RSE dans la gestion des
risques au sein de l’entreprise. Pour ce faire, nous allons présenter rapidement dans un
premier temps « la généalogie » de cette entreprise morave qui en 100 ans d’existence a réussi
le passage d’un atelier artisanal, employant 2 personnes, profondément enraciné dans son
territoire d’accueil vers une entreprise innovante sur tous les plans, et notamment en portant
très rapidement son effort sur l’exportation de sa production, stratégie inhabituelle dans le
contexte économique et social de ses débuts, vers la fin du XIX° siècle.
2.4
Processus d’émergence du courant « Management éthique » dans la firme de Tomas
Bata
Nous pouvons observer trois phases principales dans la mise en place du système de
management au sein de la firme, qui correspondent chacune à un ensemble de stratégies
élaborées pour répondre aux besoins du développement de l’entreprise où à un risque mettant
en danger la survie de l’entreprise.
Première phase : La création de l’entreprise 1894
Au moment de la création de l’entreprise Bata à Zlin, la production de la chaussure dans
l’empire austro-hongrois était concentrée au niveau des unités artisanales dans quelques
centres de productions, notamment en Moravie. La famille Bata créé un atelier indépendant de
fabrications de chaussures, avec les deux frères propriétaires, ouvriers, le dispositif de
13
production étant complété par une équipe de dix ouvriers travaillant à leur domicile. Une
première « innovation » dans le domaine de la gestion du personnel est mise en place, avec
l’installation d’une durée de travail réglementée, identique pour l’ensemble de salariés d’une
part et d’autre part de payement hebdomadaire des ouvriers, procédures inhabituelles dans le
contexte environnant. En 1895 l’entreprise employait 10 salariés et 40 ouvriers « à domicile ».
Il est intéressant de remarquer l’importance que jouait le recrutement « familial », avec
l’intégration des membres de la famille élargie qui a caractérisé la progression de l’entreprise.
Ce type d’organisation participait à la progression économique de l’entreprise, avec pour
moteur la forte confiance réciproque des membres de la famille. , mais également à la sécurité
de chacun des membres de la famille (Arrègle, Durand, Very, 2004).
Cette première phase a donc été marquée par un management de type « familial », l’héritage
culturel de l’environnement de l’entreprise naissante. La première crise était le résultat de ce
type de management, également lié au manque d’expérience des membres de la famille.
L’analyse de l’échec a abouti à la recherche et ‘intégration de collaborateurs dont les
compétences commerciales participeraient au développement de la firme, sans toutefois
renoncé complètement à l’organisation familiale de la firme.
Deuxième phase : Transformation de l’atelier de production en entreprise T&A.Bata
1900 : Innovations industrielles/Innovations managériales
Une innovation technologique fondamentale a posé les fondements de l’entreprise Bata : la
création d’un nouveau produit intégrant l’utilisation du tissu en complément du cuire ce qui a
considérablement réduit le coût du produit final, ainsi que la durée de fabrication.
L’investissement dans les équipements industriels performants de production a par ailleurs
participé à l’augmentation de la productivité. Bata a ainsi réussi de créer un nouveau marché
sur le territoire de l’ensemble de l’empire et dépasser ces concurrents. La progression
commerciale de l’entreprise a permis la construction d’une première usine qui employait plus
de 100 salariés.
Une deuxième innovation qui a définitivement marqué la progression de l’entreprise se situe
au niveau du management. T.Bata a effectué deux séjours aux USA, le premier en 1904 et le
deuxième en 1911. Ces deux expériences au cours desquelles il a travaillé comme ouvrier
chez Ford ont eu pour résultat le transfert dabs son entreprise des théories de management de
Taylor et des principes d’organisation du travail de H. Ford.
La nouvelle organisation de la production a eu pour conséquence une spectaculaire
augmentation de la productivité. La firme Bata est ainsi devenue une référence industrielle et
le développement de ces unités de production est accompagné par l’augmentation du nombre
de salariés qui dépasse 5000 personnes.
Toutefois, une novelle crise s’annonce dès 1918, résultat de la fin de la guerre, la disparition
de l’Empire austro-hongrois et la création d’un nouvel Etat indépendant, la Tchécoslovaquie.
Ces différents bouleversements politiques et institutionnels ont eu des répercutions
fondamentales sur l’environnement socio-économique que nous ne pouvons pas analyser dans
cette communication. La firme était confrontée à une nouvelle et profonde crise, non
seulement économique, mais sociale. La société dans son ensemble cherchait un nouveau
cadre référentiel et les entreprises créées dans le système politique précédent devaient adapter
leur management ou disparaître
14
Troisième phase : Développement national et international de la firme : Introduction du
concept du management global
Les stratégies de résolution de la crise ( induite par des bouleversements évoqués
précédemment) mises en place par T. Bata intégraient tant la dimension interne qu’’externe de
l’entreprise. Dès 1921, une politique de création de filiales a été lancée en Hollande, au
Danemark, en Angleterre ; en Suisse, Allemagne, France et Yougoslavie, et par la suite dans
le reste du monde.
Bata a été parmi les premiers à s’intéresser aux territoires que l’on nomme aujourd’hui « les
pays émergents ». A la recherche de la main d’œuvre bon marché d’une part et d’autre part,
des marchés, il a créé les entreprises en Afrique, aux Indes, en Asie. Abandonnant
définitivement l’approche utopique idéalisée de la gouvernance de l’entreprise, qui a
caractérisé les deux premières phases du développement de l’entreprise, le
manager/propriétaire de la firme intègre/impose sa philosophie managériale basée sur les
principes fordiens.
L’entreprise occupe rapidement une situation dominante sur le marché européen de l’industrie
de la chaussure, avec des méthodes commerciales et managériales directement transférées du
management anglo-saxon.
En paraphrasant Charles Wilson (« Ce qui est bon pour General Motor est bon pour
l’Amérique »), nous pourrions avancer le slogan mobilisateur de Bata« Ce qui est bon pour
Zlin, est bon pour le monde ».La recherche constante de la productivité a eu pour résultat
l’apparition des conflits sociaux au sein de la société et le rejet des principes l’organisation du
travail inspirés par Taylor.
La confrontation entre les syndicats montant en puissance et la direction de l’entreprise, loin
de se transformer en « conflits traditionnels » a abouti à la mise en place d’une politique
sociale globale inédite.
C’est à partir de 1922, que le concept du management global non seulement de l’entreprise,
mais de son territoire d’accueil apparait et se matérialise. Après une première défaite aux
élections municipales, T. Bata devient pour la première fois le maire de Zlin, ce qui a pour
conséquence la transformation en profondeur de la région , organisée tout autour de « Bataville », construite et managée selon les modèles américains de Pullman, de Pittsburg de
Carnegie ou en France de Michelin.
Espace urbain de la ville de Zlin est profondément transformé pour devenir « City of
Functionalism »participant activement à la progression de la firme, à son image et au service
de son développement (Kafka, 2008). L’expansion de l’entreprise nécessitait non seulement la
construction de plus en plus importante des bâtiments de production, mais également des
services complémentaires, notamment dans le domaine de recherche et développement. Un
Institut de recherche travaillant sur la qualité et l’absence de nocivité des matériaux de
fabrication a été créé dès 1926, avec le développement progressif des laboratoires et
problématiques traités, notamment dans le domaine des technologies innovantes ; avec 330
salariés en 1937.
15
La croissance de l’entreprise a eu comme résultat une augmentation très significative du
nombre des salariés d’une part et d’autre part du nombre d’habitants. La ville qui a drainé la
population de la région d’accueil a passé ainsi de 5000 habitants en 1923 à 37 000 en 1932.
Bata a fait appel aux meilleurs architectes et urbanistes de l’époque, (Le Corbusier est
également consulté) pour l’aménagement de la ville permettant à la fois d’exprimer la
philosophie de la firme et de participer à la satisfaction des besoins des salariés. La
construction des maisons individuelles en accession à la propriété et destinées aux salariés
participe à ce projet qui a abouti à l’un des premiers exemples abouti et durable de « cité
jardin » des utopistes anglais des XIX° et XX° siècles. La création et financement des
logements ne constituaient qu’un des éléments de la politique sociale de Bata, s’intégrant dans
son approche globale de gestion de l’entreprise au sein de la ville.
Nous avons regroupé dans le tableau suivant les principaux éléments constitutifs de la
politique sociale pour illustrer les outils utilisés par cet entrepreneur, non pas ou pas
uniquement pour « protéger la population de la misère et apporter le bonheur dans la vie des
ouvriers »,(Bata, 1905), mais également pour « …démontrer dans notre pays que le travail
acharné peut apporter des résultats pour chacun et faire de notre firme l’une des premières au
monde ! »(Bata, 1923).
Tableau 4 : Politique sociale de Bata
Création des équipements et institutions Création et gestion des institutions et
internes
équipements externes (ville et région)
Système de rémunération directement lié au
rendement individuel
Système de primes : participation aux résultats (positif
et négatifs) du groupe de production
Système d’assurance maladie et vieillesse
Ouvertures de comptes d’épargne pour les salariés
Création de l’Ecole « professionnalisante »
Crèches et écoles maternelles
Logements (maisons individuelles)
Hôpital
Magasins réservés aux employés
Dispensaires et cabinets dentaires
Restauration collective
Dons aux nouveaux nés, aux jeunes mariés
Banque + Création d’un fond de l’aide sociale
Equipements scolaires
Grands magasins : Palais de services
Equipements culturels (cinémas, théâtres)
Equipements sportifs, piscines
Organisation et financement des manifestations
culturelles et sportives
Construction de « Ecole Masaryk »
Achat/don/ transformation du Château de Zlin en
centre culturel municipal
Cette volonté de maîtrise globale de l’environnement social interne et externe de l’entreprise
complétait la recherche de la maîtrise de l’ensemble du processus de production, depuis la
production des matières premières, notamment avec l’achat des élevages du bétail en
Argentine, jusqu’à la construction et la gestion des centres de distribution des produits finis.
2.5
Management Bata, un projet entrepreneurial ou une forme de RSE utopique ?
Le système global de management mis en place par T. Bata au sein de l’entreprise lui a
permis de gérer et de résoudre les crises successives auxquelles son entreprise s’est trouvée
confrontée. L’intégration des modèles de gestion « venus d’ailleurs », allogènes, et leur
hybridation dans un contexte de culture locale traditionnelle a participé à la réussite de
16
l’entreprise ainsi qu’à son développement à l’international, préfigurant le marché global du
XXI°siècle.
Toutefois, et malgré la progression de l’entreprise qui a continué après la disparition de son
fondateur en 1932, les conditions de vie au sein de l’entreprise et l’augmentation du niveau de
vie des salariés de la firme Bata, qui sont par la suite devenues une légende pendant les 40 ans
du régime socialiste qui a suivi le transfert de l’entreprise vers Canada, nous pouvons nous
demander dans quelle mesure cette approche, l’œuvre d’un individu ne pourrait pas être
qualifiée comme une démarche utopique.
Nous pouvons nous interroger sur « la transférabilité » d’un concept de management
positionné comme un outil universel permettant d’apporter la solution adéquate à tout type de
risque, dans tout type d’entreprise, dans chaque société, dans tous les contextes économiques,
politiques et historique. Il nous semble que si le modèle Bata que nous avons présenté
rapidement dans notre communication a indiscutablement intégré les éléments constitutifs de
la RSE, telle que nous la connaissons depuis une vingtaine d’années en Europe, il serait
utopique d’appréhender ce concept de façon mécanique.
En effet, dans quelle mesure un tel système de management aussi inventif et innovant qu’il
soit, était il suffisant pour assurer la pérennité et la progression de l’entreprise, aujourd’hui
encore très présente sur les marchés mondiaux ?
Il nous semble que la pérennité de l’entreprise qui a vu apparaître un système de management
global aussi performant devrait reconnaitre le rôle joué par la qualité de la structure
d’enseignement général et professionnalisant mis en place au sein de l’entreprise.
Loin de jouer un rôle de partage utopique de connaissances, ou de symbole de « l’ouverture
du monde » participant à l’émancipation de la classe ouvrière, comme cela été le cas pour les
expériences du XIX° ainsi que du début du XX° siècle, le système d’enseignement dans le
modèle Bata été basé sur une volonté pragmatique de transfert de connaissances, techniques,
mais également appartenant à la culture générale.
La connaissance de la géographie et de l’histoire participait de façon concrète à la découverte
et la mise en place de systèmes multiculturels de management des équipes et l’élargissement
des marchés au niveau mondial. L’apprentissage de langues étrangères, proposé ou imposés
aux salariés s’inscrivait dans une logique identique.
Le fait de mettre un système d’enseignement structuré et complet, basé sur l’interconnexion
de l’enseignement théorique et de l’expérimentation et l’application constante des concepts
sur le terrain, dans l’usine, dans les réseaux de distribution, auprès des clients au centre de
stratégie de management de l’entreprise a participé à notre avis à la pérennité de ‘entreprise
Bata. Ce modèle très moderne de l’éducation « a produit » des générations des professionnels
qui ont participé et participent encore à la transmission et la mise en application des éléments
constitutifs d’un modèle de la RSE « pragmatique ».
17
Conclusion
Nous n’avons pas pu répondre réellement à notre question concernant la dimension utopique
de la RSE en tant que outil efficace de la gestion des risques rencontrés par les entreprises.
Toutefois, nous avons pu, à notre avis, à la suite des travaux des auteurs qui s’intéressent à
l’ancrage des racines du concept de la Responsabilité Sociale de l’Entreprise dans l’histoire,
confirmer la nécessité d’une étude approfondie dans ce domaine.
En effet, l’analyse rapide de l’exemple de la firme Bata nous a démontré la complexité des
mécanismes présents et agissant selon des logiques déterminées non seulement par les
environnements socio-économiques et politiques des entreprises, mais également et à notre
avis fondamentalement, par le poids de l’histoire de leurs territoires d’accueil. Ce travail reste
à faire et nécessiterait à notre avis une approche pluridisciplinaire.
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TURCOTTE M.F., SALMON A. (dir.) (2005), “Responsabilité sociale et environnementale de
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19
Introduction ............................................................................................................................................................. 1
1
Responsabilité Sociale des Entreprise : héritière des mouvements utopistes ? ............................................... 3
1.1
RSE participant à l’émergence d’un «capitalisme vertueux » ? ............................................................. 3
1.2
Rapide retour sur les utopies ................................................................................................................... 6
1.2.1
Utopies « universalistes » : Hors la dimension espace/temps ?...................................................... 6
1.2.2
Utopies « contestataires » : Espace imaginaire ............................................................................... 6
1.2.3
Utopies « expérimentales » : Entreprise comme espace d’expérimentation.................................... 6
1.2.4
Utopies « pragmatiques » Entreprise comme véhicule d’un projet entrepreneurial individuel ? .... 8
2
Matérialisation d’un projet individuel utopique : Transformations d’un atelier artisanal en une firme
internationale......................................................................................................................................................... 11
2.1
Les racines locales du projet managérial Bata ...................................................................................... 11
2.2
Bata le précurseur de la gestion des risques .......................................................................................... 12
2.3
Historique de la firme Bata, son parcours et son environnement .......................................................... 13
2.4
Processus d’émergence du Management éthique dans la firme de Tomas Bata.................................... 13
2.5
Management Bata, un projet entrepreneurial ou une forme de RSE utopique ?.................................... 16
Conclusion ............................................................................................................................................................ 18
Bibliographie......................................................................................................................................................... 18
20

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