Du classique au numérique….l`outil au service du traducteur
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Du classique au numérique….l`outil au service du traducteur
Du classique au numérique….l’outil au service du traducteur Aline Maurel et Sawsan Salloum École de traduction et d’interprétation – Université d’Ottawa Nous remercions les étudiants du cours de stylistique comparée de l’Université d’Ottawa de la session d’hiver 2011 qui ont accepté de participer à cette recherche et d’en publier les résultats. La Loi sur les langues officielles, qui s’applique à toutes les institutions fédérales du Canada, est la source d’innombrables débouchés dans le secteur de la traduction. Située au cœur de la capitale nationale, l’Université d’Ottawa, institution bilingue, a fondé en 1971 l’École de traduction et d’interprétation, qui offre une vaste gamme de programmes permettant de préparer les étudiants pour le marché du travail : deux programmes de baccalauréat, en français et en anglais, ainsi qu’une option trilingue comprenant l’espagnol; trois programmes de maîtrise : en traduction juridique pour francophones, en interprétation de conférence et en traductologie; et un programme de doctorat en traductologie. La proximité des institutions de l’administration fédérale facilite l’accès au monde professionnel pendant les études (stages, régime coop), mais également la recherche d’un emploi à la fin de celles-ci. Créé en 1934, le Bureau de la traduction (BT) est le plus important employeur de langagiers professionnels au Canada. Le BT permet au gouvernement du Canada de fournir aux Canadiens des services dans la langue officielle de leur choix. Centre d'expertise fédéral en matière de traduction, de révision, d'interprétation et de localisation Web et multimédia, le BT est par ailleurs l’autorité de normalisation linguistique et terminologique de la fonction publique. On lui doit également la création de TERMIUM Plus, la banque de données terminologiques et linguistiques du gouvernement du Canada. Bien que le Bureau de la traduction demeure un employeur incontournable dans le secteur de la traduction, il n’en reste pas moins que les cabinets et entreprises privées de traduction se multiplient pour répondre à la demande croissante provenant des secteurs autant public que privé. La question qui se pose est de savoir si les traducteurs formés à l’Université d’Ottawa sont aptes à affronter le milieu de travail. Sont-ils outillés pour le faire? Peuvent-ils combiner aisément théorie et pratique? Et surtout sont-ils en mesure de se servir des nouvelles technologies pour effectuer leur recherche et accélérer leur travail? Comment se passe la transition de la salle de classe au service de traduction? Ce sont là quelques questions qui ont suscité et inspiré notre enquête sur les outils technologiques dont dispose aujourd’hui le traducteur professionnel. Est-il encore possible de nos jours de se contenter des dictionnaires et des ouvrages de référence classiques? Les outils en ligne sont-ils devenus indispensables? Il convient de mentionner qu’en situation d’examen les étudiants n’ont pas accès à Internet et doivent donc recourir strictement aux outils conventionnels. Cet état de chose ne correspond pas, par conséquent, à la réalité du milieu de travail où le traducteur dispose sur son ordinateur des banques de données, internes et externes, et des lexiques et glossaires utiles outre le fait qu’il a accès à tous les moteurs de 1 recherche pour faire sa recherche documentaire sans quitter son poste de travail et souvent en un temps record. Pour tenter d’apporter des éléments de réponse quant à savoir si l’utilisation des outils technologiques dans une salle de classe est pertinente, nous présenterons dans cet article les résultats de deux expérimentations: la première est effectuée en salle de classe et la deuxième est une analyse de deux échantillons rédigés par des étudiants. Mais avant de présenter ces études, les conclusions auxquelles elles-ont mené et finalement nos observations de professeures de langue et de traduction, nous parlerons de la traduction d’un point de vue théorique. Considérations théoriques sur la traduction Dans notre École de traduction et d’interprétation de l’Université d’Ottawa, nous envisageons la traduction comme étant un acte de communication. Dans une perspective communicationnelle et interprétative, la traduction a comme objet de prédilection le vouloir dire du locuteur et non pas le dire au sens strict du terme. Elle est envisagée comme un processus et non pas comme un résultat, on parle donc de l’opération traduisante. Les énoncés à rendre dans la langue de traduction appartiennent à un contexte, à une situation d’énonciation et ne peuvent être traduits qu’en fonction de leur contexte. L’étape d’interprétation des idées opérée par le traducteur est incontournable dans l’opération traduisante. La théorie interprétative de la traduction tient tout texte pour lettre morte si on le limite à ses seules composantes linguistiques. La compréhension de son sens nécessite absolument qu’on aille au-delà du niveau linguistique, en tenant compte de divers éléments extra-linguistiques. L'objet n'est pas de rendre le sémantisme des mots et des phrases en appliquant un décodage systématique d'un système linguistique dans un autre. La traduction d’un texte compris ne vise pas l’obtention de « correspondances » linguistiques, telles qu’on peut les trouver dans un dictionnaire, mais bien d’« équivalences » dans la langue d’arrivée. La traduction interprétative est la seule digne d’être appelée traduction : « J’englobe sous l’appellation traduction linguistique la traduction de mots et la traduction de phrases hors contexte et je dénomme traduction interprétative, ou traduction tout court, la traduction des textes » (Lederer, 1994 : 15). Nous constatons qu’il s’agit d’une reprise de Seleskovitch : « Les théories de la traduction qui se situent au seul plan de la langue sont condamnées à aboutir dans une double impasse. D’une part, inéluctablement, elles doivent constater que tôt ou tard la transposition des significations se heurte à une impossibilité – les exemples en abondent dans la littérature – d’autre part, elles devront constater, si elles se penchent sur les résultats de traductions réalisées par transposition des significations que, si correctement que celles-ci aient été cernées en langue, elles n’assurent pas pour autant avec certitude la transmission des messages ». (Seleskovitch, 1984 :92). Pour réaliser l’équivalence, le traducteur d’abord lecteur doit se représenter la scène qu’il lit, en ressentir l’émotion, transcender la langue pour parvenir au vouloir dire de l’auteur et le réexprimer en une autre langue avec le savoir-faire dont il dispose. Les équivalences sont des 2 libertés à l’égard de la lettre et non du vouloir dire de l’auteur. Amparo Hurtado-Albir (1990) dit que la fidélité doit être au vouloir dire de l’auteur, à la langue d’arrivée et au lecteur : « Ce triple rapport de fidélité au vouloir dire de l’auteur, à la langue d’arrivée et au destinataire de la traduction est indissociable. Si l’on ne reste fidèle qu’à un seul de ces paramètres et qu’on trahit les autres, on ne sera pas fidèle au sens » (Hurtado-Albir 1990 : 118) La traduction telle que nous la voyons se situe donc au niveau du discours, elle est acte de communication, elle sert à transmettre un sens et non à restituer des mots, la fidélité est avant tout envers le récepteur de la traduction. Elle est interprétative parce que le message, contenu dans le texte de départ, est la priorité. Plus la technicité du texte augmente, plus la recherche du sens pour un traducteur néophyte non spécialiste devient difficile. Elle implique un travail intellectuel, une recherche documentaire de la part du traducteur comme étape inéluctable qui précèdera la réexpression en langue d’arrivée. Confronté à une difficulté de compréhension, le traducteur, lorsqu’il ne trouve pas dans le dictionnaire monolingue ou bilingue une solution au problème en question, mobilise ses forces pour trouver une solution à l’énigme posée par le texte. Il interroge les spécialistes mais il opère avant toute autre chose une recherche documentaire : « Or la démarche mise en œuvre pour effectuer la traduction d’un texte technique va bien au-delà de la recherche de termes ou de tournures, elle exige une compréhension du texte. Certes la terminologie joue un rôle important dans la traduction d’un texte technique, mais elle n’en est qu’un aspect auxiliaire et ne saurait en être l’objet principal. Les vrais problèmes de la traduction technique ne sont pas tant d’ordre lexical que notionnel, d’où la nécessité de procéder à une recherche documentaire de nature à éclairer le traducteur sur le sujet traité » (Durieux, 1990 : 669). Pour Durieux (1990), la recherche documentaire est une condition nécessaire dans les deux phases sémasiologique et onomasiologique de la traduction. Elle cite, en 1990, parmi les sources à consulter par le traducteur les ouvrages de synthèse du type « Que sais-je », l’encyclopédie, les manuels et les revues spécialisés et la consultation des spécialistes en dernier recours. La recherche documentaire s’avère nécessaire pour le traducteur débutant comme pour le confirmé, dans la langue de départ comme dans la langue d’arrivée. « On remarque que, menée dans la langue de départ ou dans une langue tierce, la recherche documentaire joue un rôle clé dans la phase sémasiologique qui doit aboutir à l’appréhension du sens du texte. Menée parallèlement dans la langue de départ et dans la langue d’arrivée, cette démarche étaye non seulement la phase sémasiologique, mais aussi la phase onomasiologique, puisqu’elle fournit en même temps que les éléments de compréhension la terminologie et la phraséologie pertinentes » (Durieux, 1990 : 672). Expérimentation en salle de classe : traduction d’un texte à difficulté moyenne La première expérimentation que nous présentons ici consiste en une traduction d’un texte de 191 mots de difficulté moyenne de l’anglais vers le français tiré du National Geographic. Le texte traite de la pollution par le bruit au fond de l’océan et son influence sur les animaux marins. Aucun indice concernant la provenance du texte ou le thème général du texte n’a été donné à 3 l’avance aux étudiants. Nous nous sommes assurées que les dictionnaires bilingues (le Robert & Collins, le Harrap’s et le Larousse) répertorient tous les mots contenus dans ce texte et sont donc capables de résoudre les difficultés relatives au lexique. Cela est-il suffisant pour une traduction de qualité? Ce texte contient un nombre de difficultés qui peuvent être regroupées sous trois grandes rubriques : les difficultés provenant d’un fonctionnement métaphorique, les difficultés terminologiques et les ambigüités sémantiques. Nous avons donc demandé aux étudiants du cours de stylistique comparée, qui sont majoritairement des étudiants francophones de troisième année, de traduire ce texte en une heure et vingt minutes. Dans cette classe, un groupe (21 sujets) avait un ordinateur portable et par conséquent avaient accès à l’internet et au correcteur orthographique, tandis qu’un autre groupe (14 sujets) traduisait à la main avec les outils classiques (dictionnaires monolingues et/ou bilingues). Voici le texte de départ, objet de notre enquête : “The deep is dark, but not silent; it’s alive with sounds. Whales and other marine mammals, fish, and even some invertebrates depend on sound, which travels much farther in water than light does. The animals use sound to find food and mates, to avoid predators, and to communicate. They face a growing problem: Man-made noise is drowning them out. “For many of these animals it’s as if they live in cities,” says marine scientist Brandon Southall, former director of the National Oceanic and Atmospheric Administration’s (NOAA) ocean acoustics program. Two years ago the problem made it to the U.S. Supreme Court, in a case that might have been called U.S. Navy v. Whales. The Court’s decision protected the right of naval vessels to test submarine-hunting sonar systems, whose intense sound pulses have been linked to several mass whale strandings. But the Navy is not the lone villain. Oil company ships towing arrays of air guns fire round-the-clock fusillades loud enough to locate oil buried under the seafloor—and also to be heard hundreds of miles away. Undersea construction operations drive piles into the seafloor and blast holes in it with explosives”. Leslie Allen – The National Geographic Bilan La lecture des traductions des étudiants a montré que, dans le groupe qui a fait la traduction à la main, près de 20% n’ont pas réussi à terminer le texte et ont remis une traduction partielle. Lenteur ou découragement? La qualité du français : Sur le plan de la qualité de la langue, nous observons dans le groupe qui a traduit à la main que 20% ont produit un texte qui contient plusieurs fautes de langue, 7% ont fait une traduction de très mauvaise qualité linguistique et 53% ont fait une traduction de bonne qualité linguistique. 4 En définitive, la qualité du français chez les personnes ayant traduit à la machine s’avère nettement meilleure. Toutefois, en dépit de l’utilisation du correcteur orthographique par ces sujets, plusieurs fautes de langues sont restées dans leurs textes. Les difficultés : En examinant les solutions proposées par les étudiants aux difficultés provenant d’un fonctionnement métaphorique, aux difficultés terminologiques et aux ambigüités sémantiques nous observons : - Les métaphores Alive with sounds : dans le groupe sans outil comme dans l’autre, les traductions de ce segment métaphorique ont été créatives (peupler, animé, regorger, grouiller, habiter, retentir, etc.). Round the clock : cette métaphore figée a été rendue par d’autres images en français dans les deux groupes, il y a parfois omission mais beaucoup de ressemblance dans les deux groupes. Drowning out : la traduction du groupe équipé d’un ordinateur s’est relevée meilleure : moins de faux-sens, contre-sens et omission. Le groupe ayant utilisé le dictionnaire bilingue a fait une reprise massive des deux verbes « étouffer » et « couvrir » qui sont répertoriés sous drown out alors que les traductions du groupe avec ordinateur dénotaient davantage de créativité : noyés dans un océan de bruits, se faire inonder par les sons d’origine humaine, les sons causés par les hommes brouillent leurs signaux, etc. - La terminologie Sound pulses : la machine a fait varier les équivalents de pulses (bruits, impulsions, ondes, signaux, vibrations) alors que les dictionnaires ont uniformisé les traductions avec une majorité de « vibrations ». Inversement Seafloor : la machine a uniformisé les équivalents choisis avec une majorité de « plancher océanique », fiche de Termium plus, alors que les sujets qui ont travaillé avec les dictionnaires classiques ont offert une panoplie de variantes libres (fond marin, sol marin, fond de la mer, etc.). Le même scenario se reproduit pour naval vessels et pour whale strandings où les termes proposés par les sujets ayant consulté les banques de données sont plus exacts et moins fantaisistes. Pour marine scientist nous retrouvons une uniformité différentielle, le premier proposant « scientifique marin » et le deuxième « spécialiste des sciences de la mer ». - groupe L’ambigüité sémantique Submarine hunting sonar systems a été compris de plusieurs façons : certains ont compris submarine comme un nom : il s’agit alors des systèmes de chasse dont sont équipés les sous5 marins, ou des systèmes de détection de sous-marins (ceci est la bonne réponse). Pour d’autres, il s’agit des systèmes de chasse sous la mer (submarine comme adjectif). La banque de données TERMIUM Plus, répertorie sonar mais ne résout pas cette situation d’ambigüité. Seule une recherche documentaire et un savoir encyclopédique antérieur sur les systèmes de détection peuvent aider le traducteur sans ses choix. Drive piles and blast holes : ce segment qui parle de l’opération d’installation des pieux au fond des mers admet deux interprétations possibles. Dans quel ordre se déroule cette opération? Estce qu’on enfonce les pieux et puis on dynamite? Ou bien on pose de la dynamite pour pouvoir enfoncer les pieux? Nous remarquons que les étudiants qui ont su résoudre ces deux cas d’ambigüité avaient accès à l’Internet et ont réussi par conséquent à proposer des traductions sémantiquement valables. S’ils sont allés chercher sur Internet des informations qui puissent confirmer leurs hypothèses, ils ont probablement pu lire dans Wikipedia (ce qui est le plus simple et non le plus attesté) sous pile driver : “The initial start up of the hammer requires the piston (ram) to be raised to a point where the trip automatically releases the piston, allowing it to fall by gravity. As the piston falls, it activates the fuel pump, which discharges a metered amount of fuel into the ball pan of the impact block. The falling piston also blocks the exhaust ports, and compression of fuel trapped in the cylinder begins. The compressed air exerts a pre-load force (approx. 44,000 lbs. or 20,000 kg.) to hold the impact block firmly against the drive cap and pile. At the bottom of the compression stroke, the piston strikes the impact block, atomizing the fuel and starting the pile on its downward movement. In the instant after the piston strikes, the atomized fuel ignites, and the resulting explosion exerts an even greater force on the already moving pile, driving it further into the ground. The reaction of the explosion rebounding from the resistance of the pile drives the piston upward. As the piston rises, the exhaust ports open, releasing the gases and force of the explosion into the atmosphere. After the piston stops its upward movement, it again falls by gravity to start another cycle”. Remarques Cette étude nous montre le taux de popularité dont jouit la banque terminologique TERMIUM Plus auprès de nos étudiants en traduction, ce qui reflète l’intégration de la composante technologique dans notre cursus universitaire. Ce recours à TERMIUM Plus a homogénéisé la terminologie retrouvée dans les traductions des étudiants qui ont accès à l’ordinateur. La traduction des métaphores a montré le cas inverse : une panoplie de propositions inventives. Il ne fait aucun doute que l’outil informatique est indispensable aux futurs traducteurs et leur offre un filet de sécurité. Après leur recherche terminologique, ils peuvent valider des hypothèses de sens, vérifier l’exactitude de leur choix terminologique, consulter des références en ligne, compter des occurrences, et pour terminer, passer leur texte fini au crible d’Antidote, le correcteur orthographique et grammatical français recommandé à la population étudiante francophone. 6 Expérimentation avec le correcteur Antidote : deux textes rédigés par deux étudiants, l’un francophone et l’autre anglophone Comme en fait état le site druide.com, Antidote réunit en un tout cohérent un correcteur de nouvelle génération, douze grands dictionnaires et onze guides linguistiques. Ces multiples ouvrages interagissent intelligemment pour aider à explorer tous les aspects d'une question linguistique. Antidote est de plus accessible directement à partir du texte par un simple clic sur un bouton ou dans un menu. Nous pouvons lire également dans le site que d'un seul trait, le correcteur d'Antidote souligne toutes les fautes, de l'accent oublié à l'accord difficile, de la virgule malvenue au pléonasme bête. On pointe sur une erreur d’orthographe, de grammaire ou de typographie et la correction ainsi que des explications sont proposées; il suffit de cliquer pour approuver. De plus la fonction Révision permet de réviser les répétitions, les charnières logiques ou les tournures délicates grâce aux filtres intelligents qui surlignent les passages pertinents. Ce logiciel est sans doute le plus complet jusqu’ici pour peaufiner les textes et s’avère un précieux outil pour le traducteur. La première étude de cas prend comme exemple un texte rédigé par un étudiant francophone. Cidessous figurent les deux versions du texte : la version remise par l’étudiant, suivie de la version filtrée par le correcteur Antidote. Texte 1 « Je me suis lever ce matin avec lenteur car je ne voulais pas aller à l’école aujourd’hui. Ma mère s’est précitée dans ma chambre pour me tirer par les oreilles et me forcer à assister aux cours. De plus, je n’avais pas fait mes devoirs, je devais alors subir les conséquences de mon professeur ou entendre ma mère gueuler. J’etais vraiment pris entre deux feux. Dans mon quartier c’est très difficile, on ne peut communiquer avec ses prochains sans les provoquer car il n’existe que le dialogue du métal. En sortant de la maison j’ai pris l’autobus qui m’amenait chez un de mes potes à l’insu de ma mère. J’ai toujours eu l’habitude d’aller chez Ismaël pour me réfugier du monde car il comprenait tout. Il fumait beaucoup plus que moi mais je ne l’en aimait pas moins pour autant. Arrivé chez lui il m’a invité à venir fumer avec lui, c’était comme ca qu’on commençait nos journées. Je n’étais jamais le seul à aller chez lui. Je me retrouvais toujours avec Ismaël, Nasrine et Cédric. On fumait tous ensemble pour ensuite laisser nos paroles extasiées s’enchainer au microphone, car nous sommes tous les quatre rappeurs. Le rap est notre passion, donc il faut y aller fort. Cédric a toujours été bête, dans ses paroles comme dans ses actions. Si une personne avait l’audace de l’énerver, Cédric laissait cette personne près du décès, donc pour lui calmer, il faillait toujours lui dire de se rappeler de la fois où la police lui avait appréhendé ». 7 Qu’observons-nous? Antidote détecte les erreurs des formes verbales (lever, aimait), les erreurs de ponctuation, signale les accents manquants, les erreurs orthographiques (ca) et relève les termes familiers (gueuler, potes). En revanche, il ne relève pas l’emploi erroné des pronoms objet (lui calmer, lui avait appréhendé), et ne repère pas le barbarisme « faillait », ni l’impropriété « précitée ». La deuxième étude de cas prend comme exemple un texte rédigé par une étudiante anglophone. Voici de nouveau les deux versions du texte : la version remise par l’étudiante, suivie de la version filtrée par le correcteur Antidote. Texte 2 « L’article de Marie-France Bazzo est très intéressant puisqu’elle présente plusieurs questions quant à l’évolution d’une langue et les éléments qui influencent la qualité du parler. Le dialecte d’une langue évolué inclusivement chaque année dans une manière très simplifie et en biais d’une culture qui favorise une penser simple et une communication qui est populaire et directe. Il 8 me semble aussi que le média et les grandes influences de notre société ne s’intéressent pas à la conserver comme une langue structurée et sovereigne au pays. Selon moi le problème est sociolinguistique et c’est un effort collectif qui doit transformer la langue dans un sens plus positif en lieu que des phrases plus simples et rudimentaires ». Qu’observons-nous? Antidote relève les erreurs de ponctuation, souligne le nom propre comme mot inconnu et relève également le barbarisme « sovereigne ». En revanche, il ne détecte ni les formes verbales incorrectes (évolué, simplifie, une penser) ni ne relève les erreurs de locutions (en biais de, en lieu que). Nous constatons après analyse des deux versions corrigées par Antidote que le correcteur n’est pas toujours conséquent. Par exemple, les formes verbales incorrectes ne sont pas nécessairement repérées. Il y a donc lieu de rester vigilant, autrement dit de n’apporter que les corrections pertinentes et de faire une relecture approfondie afin d’éliminer toute erreur non détectée par le correcteur. Ajoutons qu’ Antidote comporte d’autres fonctions d’aide à la rédaction, notamment la fonction Révision qui permet de rehausser la qualité du style (cette fonction repère entre autres les répétitions, les verbes ternes et met en garde contre la longueur des phrases). Autre atout non négligeable, Antidote offre un accès direct aux guides et dictionnaires, ce qui permet un gain de temps considérable. En somme, le correcteur intelligent Antidote est à l’évidence un outil très valable et un précieux allié pour le rédacteur. Toutefois, celui-ci ne doit en aucun cas laisser le correcteur décider; il lui faut exercer son jugement quant aux corrections et suggestions proposées et surtout ne pas omettre la sacro-sainte étape qu’est la relecture finale. 9 Conclusion générale Qu’il s’agisse des bases de données, des lexiques, des glossaires ou des correcteurs, il est clair que les outils technologiques, aussi judicieux et indispensables soient-ils, ont leurs limites et que le traducteur demeure l’élément fondamental dans l’activité de traduction. Lui seul décide du mot juste selon le contexte et de la qualité du style, lui seul est l’artisan du produit final. Le traducteur doit tirer profit des avantages innombrables que lui procurent les outils technologiques et utiliser à bon escient les pistes suggérées par le correcteur tout en restant vigilant pour ne pas se laisser piéger par les lacunes inévitables que comportent ces technologies. De plus, les banques terminologiques, aussi explicatives soient-elles, ne peuvent se substituer à l’essentiel travail de recherche documentaire en amont. Comme l’a illustré le texte à l’étude, on ne peut dissiper l’ambigüité de certains passages dans le texte de départ qu’en effectuant des recherches dans le domaine. Il n’en reste pas moins que le traducteur du XXIe siècle n’a jamais été mieux outillé. Il lui reste à choisir les outils les plus pertinents dans un souci d’efficacité et de qualité. Bibliographie http://ngm.nationalgeographic.com/2011/01/big-idea/noisy-ocean http://www.druide.com/antidote.html http://www.btb.gc.ca/ http://www.termiumplus.gc.ca/tpv2alpha/alpha-eng.html?lang=eng Durieux, Ch. (1988), Fondement didactique de la traduction technique, Paris, Didier Erudition. Durieux, Ch. (1990), « La recherche documentaire en traduction technique » Meta, vol.35 no 4, 1990, p.669-675. Hurtado Albir, A. (1990), La notion de fidélité en traduction, Paris, Didier Erudition. Lederer, M. (1994), La traduction aujourd’hui, Paris, Hachette. Seleskovitch, D. et M. Lederer (1984), Interpréter pour traduire, Paris, Didier Erudition. 10