Infestation par le petit coléoptère des ruches

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Infestation par le petit coléoptère des ruches
CHAPITRE 2.2.5.
INFESTATION PAR LE PETIT COLÉOPTÈRE
DES RUCHES
(Aethina tumida)
RÉSUMÉ
Le petit coléoptère des ruches, Aethina tumida Murray 1867 (Coleoptera : Nitidulidae), est un
parasite destructeur des colonies d’abeilles mellifères. Les adultes et les larves se nourrissent du
couvain, du miel et du pollen, entraînant la mort du couvain, la fermentation du miel et la
destruction des cadres, avec souvent pour résultat l’effondrement total du nid et la désertion des
abeilles. Le petit coléoptère des ruches peut être un grave problème dans les mielleries où les
cadres, le miel et la cire stockés sont des lieux d’alimentation et de multiplication possibles. Le
développement nécessite de 3 à 12 semaines selon la température et la disponibilité de la
nourriture. En volant, les petits coléoptères adultes infestent rapidement les colonies.
Identification de l’agent pathogène : une infestation par Aethina tumida peut être mise en
évidence soit indirectement par l’intermédiaire des dommages importants occasionnés aux colonies
ou directement par l'intermédiaire des œufs, des larves et des adultes. Un diagnostic précoce peut
être fait après ouverture de la colonie en cherchant des coléoptères adultes sur le plateau de la
ruche ou dissimulés dans les rayons. Des acaricides et des insecticides sont actuellement
employés pour tuer les coléoptères et les larves présents à l’intérieur comme à l’extérieur de la
ruche. Des pièges peuvent être utilisés pour mettre en évidence les coléoptères.
Épreuves sérologiques : aucune épreuve sérologique n’est applicable.
Spécifications applicables aux vaccins et aux produits biologiques à usage diagnostique :
aucun produit biologique n’est disponible.
A. INTRODUCTION
Le petit coléoptère des ruches, Aethina tumida Murray, Coleoptera : Nitidulidae (17), est originaire de l’Afrique
Subsaharienne (12) mais a été introduit aux États-Unis (1996), en Égypte (2000) et en Australie (2002) (18). Il a
été introduit au Canada en 2002 mais ne s’y est pas établi ; il y a été réintroduit en 2006, mais on n’a pas
déterminé s’il s’y était établi. Aethina tumida peut se disséminer par le vol, les apiculteurs transhumants ou le
transport des produits infestés de la ruche (13, 18). Des larves et des œufs d’A. tumida ont été identifiés dans des
cages à reines importées au Portugal (2004), mais toutes les colonies d’abeilles furent immédiatement détruites
(comm. pers.). Dans son territoire d’origine, on le considère habituellement comme un parasite mineur et sa
reproduction est plus facile dans les colonies faibles et stressées ou dans des ruches récemment désertées (18).
Cependant, dans les nouvelles zones d’infestation, il peut endommager considérablement les colonies des sousespèces d’abeilles mellifères européennes (3, 11, 13, 18).
1.
Cycle de vie
Les femelles d’A. tumida s’accouplent dans la colonie (plus de 1 000 coléoptères adultes peuvent pénétrer dans
une colonie [11]) et pondent plusieurs œufs en paquets caractéristiques dans les petites fissures, dans les
cellules ou dans le couvain operculé (9, 15, 18). Les larves naissent après 1 à 6 jours et se nourrissent de pollen,
de miel et de couvain d’abeille comme les adultes (15, 18, 22). Des coléoptères adultes peuvent également être
nourris par des abeilles ouvrières par trophallaxie (8). Le développement larvaire dure de 8 à 29 jours (selon la
disponibilité de la nourriture et la température [8, 15, 18, 22]), en fonction du moment où elles atteignent la phase
mobile (15) et migrent dans le sol pour la métamorphose, la plupart du temps à proximité de la ruche (21). La
métamorphose prend 2 à 12 semaines selon la température et l’humidité du sol (7). Les jeunes adultes quittent le
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sol et peuvent voler sur de longues distances (>10 km) pour rechercher de nouvelles colonies à parasiter,
accomplissant de ce fait le cycle de vie d’A. tumida.
Les raisons de la différence apparente d'impact du petit coléoptère des ruches entre son territoire d’origine et les
nouveaux territoires infestés ne sont pas bien comprises (3). Elles peuvent inclure des différences
comportementales quantitatives entre les sous-espèces africaines et européennes d’abeilles mellifères, des
différentes techniques apicoles et des différences climatiques (3, 13, 18).
Les coléoptères adultes peuvent survivre jusqu'à 6 mois. Les femelles peuvent pondre environ 1 000 œufs au
cours de leur vie (15).
Bien que les dommages dus aux adultes soient relativement mineurs, ils peuvent toutefois causer la désertion de
la colonie (6). Si elle n’est pas empêchée par les abeilles (9, 19), la croissance larvaire (plusieurs centaines ou
milliers d’individus) est habituellement associée à la fermentation du miel, cause des dégâts importants aux
cadres et provoque souvent l’effondrement complet des rayons (12). Des pertes économiques peuvent également
être associées aux infestations de coléoptères dans les mielleries. Les conditions environnementales
généralement liées aux mielleries, telles que les hautes températures et l’humidité, fournissent les conditions
optimales pour le développement des coléoptères. Une faible reproduction cachée peut également se produire
dans les débris ou sur les plateaux des ruches sans aucun signe de dommages visibles pour l'apiculteur (22).
B. TECHNIQUES DE DIAGNOSTIC
1.
Identification de l’agent pathogène
Le premier signe d’une infestation par A. tumida est la présence dans la colonie (fig. 1) de coléoptères adultes :
longueur environ 5 mm et largeur environ 3 mm, les femelles sont légèrement plus longues que les mâles (10),
leur couleur va du brun foncé au noir (plus claire peu de temps après l’éclosion). Pendant les visites de colonies,
les adultes évitent la lumière du soleil, se cachent et on peut les observer courant pour se dissimuler dans les
coins ou d’une façon caractéristique sur les cadres. Des adultes peuvent être confondus avec d’autres
coléoptères de la même famille, qui peuvent également être associés aux colonies (par exemple Cychramus
luteus [20]).
Fig. 1. Aethina tumida adulte. Photo de N. Ruppert.
a)
Œufs, larves et pupes de petit coléoptère
Les œufs sont blancs en forme de haricot (environ les 2/3 de la taille d’un œuf d’abeille mellifère) et pondus
en paquets (jusqu’à 210) dans des fissures, sur le plateau de la ruche, sur les cadres et dans le couvain
operculé (9). Les larves sont blanchâtres, souvent couvertes d’une fine couche gluante, mesurent jusqu’à
1,2 cm long (phase mobile) et ont trois paires de pattes et d’épines dorsales. On peut trouver les larves
creusant les cadres (15) ou dans les débris (23). L’infestation larvaire est typiquement associée à une odeur
putride (par exemple orange en décomposition). Les larves mobiles laissent souvent des traînées à
l’intérieur et en dehors de la colonie. On peut trouver de telles larves et pupes mobiles (blanchâtres, environ
5 mm de long et 3 mm de large) dans de petits cocons de métamorphose à une profondeur de 1 à 20 cm
dans le sol, généralement à proximité des colonies (< 180 cm, [21]).
b)
Examen des colonies
Lors de la visite des colonies d’abeilles pour rechercher A. tumida, un examen de la ruche peut fournir une
première indication de l’infestation. On peut observer des coléoptères adultes cachés dans les cellules et
dans les débris. Pour commencer l’examen de la colonie, on enlève le chapeau de la ruche et on le retourne
sur le sol à côté de la ruche. On enlève le corps de ruche et les hausses (dans le cas de colonies doubles)
et on les place sur le chapeau précédemment retourné. On place le plateau sur le dessus de la pile.
Quelques minutes plus tard, on enlève les différentes parties et on recherche les petits coléoptères à
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l’intérieur du chapeau retourné. Les rayons sont ensuite examinés un par un pour rechercher les adultes, les
larves et les œufs. Par temps frais, les adultes ont tendance à rester près ou dans la grappe d’abeilles. En
période plus chaude, on peut trouver les petits coléoptères plutôt sur le plateau ou sur les cadres de rive.
c)
Examen des colonies par piégeage
Un diagnostic plus simple est possible en employant des cartons ondulés. De tels cartons permettent aux
petits coléoptères de se cacher dans les plis du carton sans que les abeilles puissent y entrer. On peut les
placer sur le plateau. Pour détecter les petits coléoptères, placer un morceau de carton ondulé (15 × 15 cm),
en enlevant une des parties lisses pour mettre à nu les ondulations, le côté ondulé vers le bas. Le recouvrir
d’une plaque de bois pour ajuster le dessous des cadres sur le plateau. Laisser le carton dans la colonie au
maximum 3 jours, puis l’enlever et rechercher les coléoptères adultes et les larves. Des acaricides peuvent
être employés pour tuer les adultes des cartons. Les débris et toutes les zones auxquelles les abeilles n’ont
aucun accès devraient également être examinés soigneusement.
2.
Épreuves sérologiques
Aucune épreuve sérologique n’est disponible ni applicable pour un diagnostic en routine au laboratoire.
3.
Traitement
Dans les pays infestés par A. tumida, le contrôle est particulièrement axé sur des traitements chimiques avec des
acaricides et des insecticides (1, 2, 11). Des acaricides, non-toxiques pour les abeilles, sont employés pour tuer
les adultes dans des pièges à l’intérieur des colonies (11). De même, des insecticides sont employés par
aspersion sur le sol pour tuer les larves et les pupes mobiles (1, 2). De tels traitements comportent des risques à
la fois de résistance du parasite au pesticide et de résidus dans les produits de ruche (18). D’autres possibilités
de contrôles plus acceptables sont modérément efficaces jusqu’à présent (3, 13, 14, 18) et actuellement à l’étude
(3-5, 13, 14, 16).
C. SPÉCIFICATIONS APPLICABLES AUX VACCINS
ET AUX PRODUITS BIOLOGIQUES À USAGE DIAGNOSTIQUE
Aucun produit biologique n’est disponible.
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LECTURE COMPLÉMENTAIRE
Une publication de la FAO, « Honey bee diseases and pests: a practical guide », W. Ritter & P. Akratanakul
(eds). Agricultural and Food Engineering Technical Report No. 4. FAO, Rome, Italie, 42 pp. ISSN 1814-1137
TC/D/A0849/E, est disponible gratuitement à l’adresse internet suivante :
http://www.fao.org/WAICENT/faoINFO/AGRICULT/ags/subjects/en/industFoodAg/pdf/AGST_techrep_4.pdf
*
* *
NB : Il existe plusieurs Laboratoires de référence de l’OIE pour les maladies des abeilles (se reporter à la liste de
la partie 3 de ce Manuel Terrestre ou consulter le site internet de l’OIE pour une liste actualisée : www.oie.int)
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