From Roubaix to Boston

Transcription

From Roubaix to Boston
© Collection personnelle Y. Furneaux
FROM ROUBAIX
TO BOSTON
Rencontre
avec l’actrice
Yvonne
Furneaux
Par Isabelle Baudelet
« Il a déposé sa lettre juste sous le nez
du monde entier, comme pour mieux
empêcher un individu quelconque de
l’apercevoir…
Il avait eu recours à l’expédient le plus
ingénieux du monde, le plus large, qui
était de ne pas même essayer de la cacher. »
Allan Edgar Poe, La lettre volée, 1844.
(Boston 19 janvier 1809- Baltimore 7 octobre 1849)
Il est des actrices dont on vous fait découvrir le
nom et dont les films au titre improbable n’ont été
vus par personne ; il y a celles que l’on croit connaître
fort bien mais dont on vous révèle un jour les secrets
d’une vie cachée et insoupçonnée ; celles dont on
ne saura jamais si elles se sont suicidées ou si elles
furent assassinées ; il y a les stars qui ont fait la une
de tous les journaux il y a longtemps, bien longtemps, mais tombées dans l’oubli aujourd’hui.
Et il y a Yvonne Furneaux, l’évidence. Elle est là, devant les yeux du monde entier, tout le monde la voit,
mais on ne sait plus. Accordons-nous simplement un
peu de temps pour vraiment la regarder.
Je vais être très honnête, la première fois que j’ai entendu son nom, comme pour vous sans doute, j’avais
l’impression de ne pas la connaître. J’apprends alors
avec surprise qu’elle est née à Roubaix et fut actrice de
cinéma. Je n’ai aucun autre indice mais il n’en fallait pas
plus pour aiguiser ma curiosité et chercher à remonter
le fil à partir du lieu où je vis.
La lettre volée d’Edgar Allan Poe est l’histoire d’une
lettre compromettante qu’un préfet de police hautement qualifié, en charge de la récupérer, n’a pas retrouvée. Des mois de perquisitions minutieuses et pourtant
elle se trouvait tout simplement exposée au regard de
tous, dans l’hôtel particulier de celui qui s’en était emparé.
Comme dans cette nouvelle, si vous procédez à des
recherches mécaniques ou des approches scientifiques
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Cinq siècles de congrégations religieuses
pour aller à la rencontre d’Yvonne Furneaux, vous risquez aussi de rester bredouille.
Si vous ouvrez une encyclopédie du cinéma à la lettre
F, vous y trouverez : De Funès, Fureur de vivre, puis : Fury.
Pas d’Yvonne Furneaux (encyclopédie Boussinot). Dans
le lexique d’un ouvrage de référence sur le cinéma britannique Trente ans de cinéma britannique 1940-1975,
après Fox Edward, Fox James, nous passons à Geeson
Judy. Geeson Judy ! Soupir. Pas d’Yvonne Furneaux non
plus. Il est vrai que c’est écrit par des Français : Raymond
Lefebvre et Roland Lacourbe, et vous connaissez peutêtre ce mot absurde de Jean-Luc Godard : « Les Anglais
ont fait ce qu’ils font toujours dans le cinéma : rien ». Oublions.
Le site de l’IMBd (Internet Movie Database), promesse
impressionnante d’une base de données cinématographiques sur internet ? A en croire ses informations,
Yvonne Furneaux serait née en 1928 à Lille et vivrait en
Suisse aujourd’hui.
Wikipédia ? « Yvonne Furneaux, actrice française. »
Eh bien non. Yvonne Furneaux n’est pas une actrice
française. Cela commence bien. Alors quoi ? Comme
dans La lettre volée, la clef se trouve dans la simplicité.
Une lettre, oui, tout simplement lui écrire from Roubaix to Boston. Pourquoi pas ?
En m’adressant à Yvonne Furneaux par l’intermédiaire
de son fils Nicholas Natteau, je ne me doutais pas que
j’aurais la chance d’une formidable rencontre ni surtout
de l’entendre en personne, pleine de vitalité, répondre
avec franchise et humour aux questions que je lui posais.
Son fils Nicholas s’est fait, avec une grande gentillesse,
mon intermédiaire pour mener l’entretien. Cela a donné
lieu à un enregistrement audio le 11 décembre 2013 à
Boston. Un document précieux, un éclairage sur une artiste dont les rôles extraordinairement variés ont composé de nombreux films qui restent dans la mémoire
du cinéma anglais, italien et français aujourd’hui. A cela
s’est ajouté l’envoi par Nicholas Natteau d’un entretien
avec Yvonne Furneaux filmé par lui-même, destiné à un
documentaire italien de Gianfranco Mingozzi pour la
chaîne de télé RAI SAT en 2009 : “Noi che abbiamo fatto
la Dolce Vita” ( Nous qui avons fait la Dolce Vita.)
Yvonne Furneaux s’appelle en réalité Yvonne Elisabeth
Scatcherd. Furneaux, son pseudonyme d’actrice, est le
nom de sa mère. Elle est née le 11 mai 1926 à Roubaix,
Au centre, le père de l’actrice, qui travailla à Roubaix durant l’entre-deux guerres.
© Collection personnelle Y. Furneaux
rue Mimerel, mais elle est anglaise. Son père Joseph
Scatcherd avait été nommé directeur de la Lloyd Bank
de la ville.
Elle est anglaise et a épousé un Français : Jacques Natteau, directeur de la photographie pour le cinéma. Un
Français, né à Constantinople en 1920 et pilote dans
la RAF pendant la Seconde Guerre mondiale. Ils vivent
entre Paris, Londres et Poggio Catino, proche de Rome,
avant de s’installer à Boston. Tiens Boston : le lieu de
naissance d’Edgar Poe !
Quels voyages ! De quoi brouiller les pistes. Pas étonnant que les encyclopédies ne puissent pas figer ces
êtres doués d’une aussi grande mobilité. Et pourtant,
oui, Yvonne Furneaux, actrice anglaise, est bien là devant nos yeux de spectateurs de cinéma.
Tout est arrivé par hasard. Elle avait alors environ seize
ans. Après avoir vécu à Roubaix, elle a rejoint l’Angleterre
avec sa famille et voilà que ses professeurs décidèrent
d’organiser une pièce de théâtre sur les sœurs Brontë.
Elle reçut le rôle de Charlotte et sa meilleure amie celui
d’Emily. Ce fut la révélation : le plaisir de jouer, le succès
de la pièce. « Voilà ce que je voulais faire dans la vie ». « I
knew it ».
Vous êtes fan des films du bel Errol Flynn ? Yvonne Furneaux lui sauve la vie dans Le Vagabond des mers (The
master of Ballantrae, 1953) et se trouve à nouveau à ses
côtés dans L’Armure noire (The dark avenger, 1955).
Vous êtes un inconditionnel des films d’horreur cultes,
parfois plus drôles que terrifiants, comme ceux de la
maison de production londonienne : la Hammer Films
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Federico Fellini mime le rôle d’Emma pour Yvonne Furneaux. © Collection personnelle Yvonne Furneaux.
Dernière séance de maquillage et dernières instructions avant la scène de la voiture. © Collection personnelle Yvonne Furneaux
Production, particulièrement en vogue des années cinquante aux années soixante-dix ? Vous la verrez dans le
personnage d’Isobel Banning, vêtue de rouge s’enfonçant dans les marécages au bras de la terrible momie,
dans « La malédiction des pharaons » ou « The Mummy »
(1959).
fallu néanmoins entrer dans le rôle. Sa formation à l’Académie des arts dramatiques de Londres lui avait appris
à savoir jouer tous les rôles même les plus éloignés de
sa personnalité : « Vous devez vous plier au personnage,
quel qu’il soit ».
La fiancée d’Edmond Dantès (alias Louis Jourdan dans
la version de Claude Autant Lara du Comte de Monte
Cristo) ? C’est elle également. Vous vous souviendrez
sans doute : Mercédès, le mariage champêtre interrompu, le désespoir de la fiancée, l’arrestation du futur
comte de Monte-Cristo, le château d’If, la vengeance…
La sœur de Catherine Deneuve dans Répulsion de Roman Polanski ? La fiancée de Marcello Mastroiani dans
La Dolce Vita de Federico Fellini, palme d’or du festival
de Cannes 1960 ? Yvonne Furneaux.
Mais, il est vrai que dans La Dolce Vita, ce n’est pas elle
que la pellicule aura fixée se baignant éternellement,
dans la fontaine de Trévi. Ah le bain d’Anita Ekberg !
Voilà comment une scène, devenue mythe photographique, aspire presque le film entier et remplit pour
toujours les ouvrages sur le cinéma. De l’eau en cascade
et sous l’œil de Neptune s’il vous plaît, esthétique noir
et blanc irréprochable, superbe robe d’un noir intense,
inutile de couvrir de musique, non, surtout pas : le bruit
de la fontaine suffit, c’est parfait, Marcello qui préférait
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regarder de loin finit par la rejoindre, le visage penché
d’Anita Ekberg, des lèvres qui s’approchent, Marcello et
Sylvia…
Mais non, finalement ils ne s’embrassent pas. L’eau se
tarit. Ils sortent simplement trempés de la fontaine au
petit matin. C’est un film sur l’ennui, le désenchantement, les interrogations sur le sens de l’existence, la folie
des médias et on garde en mémoire un arrêt sur image
dans la fontaine de Trévi.
Pendant ce temps Yvonne Furneaux qui joue Emma,
la fiancée de Marcello pleure au téléphone, tente de se
suicider. On la voit l’entourant de soins maternels, lui
donner à manger alors qu’il conduit : une banane, un
œuf cuit dur… Si mange ! Mastique bien ! Il mange. Il
mastique bien. De cette même voiture, en pleine nuit,
Marcello exaspéré, la chasse violemment… et revient la
chercher à l’aurore.
Cette scène est restée gravée dans la mémoire
d’Yvonne : « the greatest scene is the scene of the car ».
Pourtant ce ne fut pas le rôle le plus facile de sa carrière.
Elle se souvient que Federico Fellini cherchait, pour le
rôle d’Emma, une personne qui soit à la fois Anna Magnani et Sylvana Mangano. Encore impressionnée, elle
raconte modestement qu’elle fit de son mieux pour être
« suffisamment italienne ». « I was not bad after all ! » résume-t-elle en riant. Non, elle ne fut pas mal du tout ! Il a
Mais elle connaît ses limites. Elle a par exemple en
tête un rôle qu’elle aurait aimé jouer, celui d’Ophélie
dans Hamlet mais dans lequel elle ne s’est jamais vue
entrer physiquement, estimant qu’elle n’aurait pas été
crédible :« I don’t look a victim of that type », affirme-t-elle
non sans humour !
Et puis, il fallait suivre les exigences très pointues de
Fellini qui souhaitait orchestrer chaque expression,
chaque mouvement. Lorsque l’on est dirigé à ce point,
il n’est pas simple de réussir à faire passer un souffle vivant, une vérité dans un personnage.
Se sentait-elle proche du personnage d’Emma de La
Dolce Vita ? Il lui est difficile de répondre : elle n’a jamais
vécu de telles situations dans la vie. Il y a d’ailleurs eu
débat entre elle et Jacques Natteau, son époux, qui
est totalement tombé amoureux d’Emma/Yvonne Furneaux, convaincu que ce personnage lui ressemblait
tout à fait.
« Je n’ai pas pu dire le contraire, mais bien sûr que ce
n’était pas moi », assure-t-elle encore aujourd’hui.
Yvonne Furneaux et Federico Fellini et… les gants blancs.
© Collection personnelle Yvonne Furneaux
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From Roubaix to Boston
Rencontre avec l’actrice Yvonne Furneaux
Il faut la voir camper le rôle de Momina, petite reine
dans son groupe d’amies, alternant avec facilité les faux
semblants de l’amitié attentionnée et la cruauté hypocrite. Ce fut plus facile car, contrairement au personnage
d’Emma, Momina représente une figure très superficielle. Et puis la direction d’Antonioni était plus simple.
Mais de tous les personnages extrêmement différents
qu’elle ait joués, celui qui lui semble le plus éloigné de
sa vraie personnalité c’est celui d’Isobel Banning dans
La malédiction de la momie. Elle tient le double rôle de
la princesse égyptienne Anaka, et de la femme de l’archéologue John Banning. L’histoire, vous la devinez : un
tombeau de princesse égyptienne, des archéologues
profanateurs, une momie qui doit se venger à travers
les siècles. Avec ce rôle, elle entre dans la longue liste
culte des « Hammer girls », les actrices qui ont participé
aux films d’horreur de la maison de production londonienne. «Je ne suis pas si passive, non vraiment ce n’est pas
du tout ma tasse de thé ! » s’exclame-t-elle en riant. Mais
elle a, en revanche, gardé toute son admiration pour
son partenaire à l’écran : Peter Cushing. Un acteur d’un
« grand professionnalisme » qui a porté le film.
Yvonne Furneaux complaisante, comme beaucoup
d’acteurs aujourd’hui, sur tous les partenaires, tous les
metteurs en scène qu’elle a connus ? La grande famille
des comédiens qui s’aiment forcément beaucoup ? Pas
vraiment. Avec la plus grande des franchises, en toute
tranquillité, elle a accepté de donner son avis sur les
acteurs qu’elle a rencontrés.
Elle a côtoyé des partenaires plutôt « hautains »
comme : Laurence Olivier (The Beggar’s opéra, L’opéra des
gueux, Peter Brook, 1953), ou plus tard Vittorio Gassman
(Au nom du peuple italien, Dino Risi, 1971) ; des personnalités particulières comme Errol Flynn qui « buvait tout
le temps », « he was drinking all of the time » ; d’autres
franchement « médiocres » comme Christopher Lee ou
Maurice Ronet, pourtant charmant mais « he was comme
une planche » dit-elle en français, tout le contraire d’Anthony Perkins qui fut un « merveilleux acteur », très « naturel, très vrai », dans Le Scandale (1967), un thriller de
Claude Chabrol.
Du côté des femmes ? Catherine Deneuve ? « She was
a blond !!! » Et de se souvenir que Roman Polanski, très
Yvonne Furneaux et Anthony Perkins sur le tournage de Le Scandale de Claude Chabrol en 1967. © Collection personnelle Yvonne Furneaux
Yvonne Furneaux, Marcello Mastroiani, Anita Ekberg et… ses gants blancs. © Collection personnelle Yvonne Furneaux
Parmi ses souvenirs les plus forts, concernant La Dolce
Vita, il y a la projection du film à Vérone devant un parterre plein à craquer de spectateurs. Toutes les actrices
du film devaient monter sur scène : Anita Ekberg, Magalie Noël, Anouk Aimée, Nico etc. Quand ce fut son tour,
elle se souvient des incroyables applaudissements. Elle
fut acclamée plus que les autres, preuve que son personnage était finalement de loin le plus attachant, sans
doute le moins factice et permettait, selon elle, une
identification plus facile pour le spectateur.
Alors sur les plateaux de tournage on imagine déjà
une rivalité entre les deux actrices. Yvonne Furneaux et
Anita Ekberg : la femme adulée, la femme délaissée. Pas
du tout. A ma question lui demandant de quelle actrice
rencontrée au cours de sa carrière elle garde le souvenir
le plus fort, Yvonne Furneaux me répond sans hésiter :
Anita Ekberg , «a delightful person ». Pourquoi ? Un soir,
alors qu’Yvonne Furneaux était très ennuyée d’avoir
perdu ses gants blancs, Anita Ekberg lui donna spontanément les siens, geste d’amitié dans ce monde si particulier, qu’elle n’oubliera pas. « I will never forget it ».
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Beau souvenir également de Marcello Mastroiani, « un
être à la fois simple et charmant » qui avait une grande
facilité d’acteur : « he does it so easily ». Elle se souvient
que, pour la scène de la voiture, elle avait demandé à
Fellini de pouvoir la jouer en anglais (au lieu du français), car la difficulté était de démarrer directement dans
une colère extrême et elle se sentait plus à l’aise dans
sa langue natale. Fellini lui accorda aisément mais elle
oublia d’en parler à Marcello Mastroiani. Celui-ci n’eut
pas pour autant l’air surpris et elle rit encore aujourd’hui
de son naturel parfait à jouer la scène malgré cela.
Federico Fellini reste le réalisateur inoubliable de toute
sa carrière: « précis, doux, compréhensif, très humain. »
Quelques années auparavant, elle était déjà un personnage clef dans le film de Michelangelo Antonioni,
Femmes entre elles (Le Amiche,1955), Lion d’argent à la
Mostra de Venise. Adapté d’une nouvelle de Cesare Pavese, ce film dessine le portrait impitoyable des mœurs
de la haute bourgeoisie de Turin, empoisonnée par
l’égoïsme et l’oisiveté. Yvonne Furneaux s’en souvient
comme d’un rôle plus facile que celui de La Dolce Vita.
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Dossier
Elle connaît bien la mécanique de l’oubli, particulièrement dans le cinéma. Barry Lindon (Stanley Kubrick,
1975) fait partie de ses films préférés, il demeure très
connu aujourd’hui mais elle en aime beaucoup un
autre qui lui semble injustement ignoré : Onegin, un
film américano-britannique de Marthe Fiennes sorti en
1999, adapté du roman d’Alexandre Pouchkine. « Un film
si merveilleux, je ne comprends pas que personne ne l’ait
vu ».
Et quand elle pense à ceux et celles qu’elle a admirés,
des acteurs comme Marius Goring (acteur britannique
1912-1998), ou Valentina Cortese (actrice italienne née
en 1923) elle demande sans pouvoir répondre :
« Qui se souvient d’eux aujourd’hui ? Qui connaît encore
leur nom ? »
Nous, nous connaissons le nom d’une petite fille prénommée Yvonne Elisabeth Scatcherd, anglaise née à
Roubaix, qui aimait se promener au parc de Barbieux.
Elle devint l’actrice Yvonne Furneaux.
Sources et remerciements :
Yvonne Furneaux, Maurice Ronnet Le Scandale, Claude Chabrol, 1967. © Collection personnelle Yvonne Furneaux.
« brillant » et avec qui elle a aimé travaillé au cours du
tournage de Répulsion (1965), ne lui pardonnait rien
mais pardonnait tout à Catherine Deneuve. Ah ! sa préférence pour les blondes !
Elle se moque gentiment de Louis Jourdan, qui joue
le comte de Monte Cristo dans le film de Claude Autant
Lara, qu’elle qualifie de « just a pretty boy ».
Il faut dire que c’est sur ce tournage qu’elle rencontre
en 1961 l’homme de sa vie : Jacques Natteau (19202007). « L’homme le plus extraordinaire qu’elle ait jamais
rencontré et qu’elle ne pourra jamais oublier. »
Il est entré dans sa loge au moment des essayages. Il
la trouva inquiète de la façon dont on allait filmer son
visage. Ce fut alors une réplique digne des grands films :
« Relax, I know how to photograph you »
Il est impossible de résumer brièvement une carrière
aussi ouverte à cette diversité incroyable de personnages, virevoltant entre le cinéma britannique, américain, italien, français. Des années cinquante aux années
soixante dix, Yvonne Furneaux est passée des films
d’aventure américains aux péplums italiens avec Mark
Forest, du kistsch culte britannique au grand art d’Anto-
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Site de l’Encinémathèque,
article sur Yvonne Furneaux
très complet par Yvan Foucart /
Documents collection personnelle Yvonne Furneaux / Entretien avec Yvonne Furneaux :
interview d’Isabelle Baudelet,
réalisée et enregistrée à Boston
par Nicholas Natteau le 11 décembre 2013 / Entretien filmé le
26 mars 2009 par Nicholas Natteau pour le documentaire Noi
che abbiamo fatto la dolce vita de Gianfranco Mingozzi.
nioni et Fellini, des succès français de Chabrol et Autant
Lara au cinéma de Polanski, et puis osa un dernier rôle
en 2006 : celui de Lucie Rommel dans le documentaire
réalisé par son fils Nicholas Natteau : Rommel et le complot contre Hitler. Ce documentaire vise à raconter comment Erwin Rommel se retrouve impliqué dans le complot contre Hitler en juillet 1944 et à éclairer le dilemme
vécu par un homme écartelé entre l’obéissance aux
ordres et sa conscience.
Merci à Yvan Foucart. Merci
à Evelyne Gronier qui a eu la
bonne idée de mener l’enquête
sur un vitrail, rue Mimerel, dans
la maison d’enfance d’Yvonne
Furneaux.
Yvonne Furneaux à la fin de l’interview réalise qu’elle
aurait encore tant de choses à me dire. Et moi que j’aurais encore tant de choses à écrire.
Elle vit aux Etats-Unis mais, aujourd’hui encore, elle se
dit que si l’Angleterre lui a tout appris, l’Italie, qui lui est
si chère, lui a tout donné.
Elle garde néanmoins une grande distance avec son
métier d’actrice. Quand je lui demande quelle vision de
la vie le cinéma lui a apporté, sa réponse est simple, sans
appel, très courte: « absolument aucune. ». J’entends son
fils Nicholas Natteau rire devant sa franchise immédiate,
je ris en même temps en écoutant l’enregistrement.
Yvonne Furneaux et Jacques Natteau dans leur château de Poggio Catino, près
de Rome. © Collection personnelle Yvonne Furneaux
Enfin, j’adresse un immense
merci à Nicholas Natteau et
Yvonne Furneaux qui furent
d’une incroyable gentillesse
et ont permis l’écriture de cet
article.
Yvonne Furneaux au parc de Barbieux. © Collection personnelle Yvonne Furneaux
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