L`église de Jublains avant 1878

Transcription

L`église de Jublains avant 1878
Auteur, titre et références du texte :
A. ANGOT, « L'église de Jublains avant 1878 », dans La Province du Maine, 1906, p. 102-104.
Mis en ligne par :
Archives départementales de la Mayenne
6 place des Archives — 53000 LAVAL, France
[email protected]
Date de première mise en ligne : 22 mai 2007.
Référence : FR-AD53-BN-0081
Texte relu par : Joël Surcouf
d’après un exemplaire conservé aux Archives départementales de la Mayenne
(cote : BC 76\1906\14).
D’autres textes sont disponibles
sur le site des Archives de la Mayenne :
http://www.lamayenne.fr/?SectionId=418
Abbé ALPHONSE ANGOT
L'ÉGLISE DE JUBLAINS
avant 1878.
Le dessin très fidèle que nous donne M. Julien Chappée de l'église de Jublains, la
représente telle qu'elle était à la veille de céder la place à une église neuve, encore
incomplète aujourd'hui de sa tour et de son clocher.
Celle-ci est exactement dans l'emplacement et dans l'orientation de la précédente.
Comme elle, elle recouvre les ruines des anciens thermes gallo-romains, dont on voit
tout le long de la côtière méridionale un rang de moellons et un cordon de briques
servant d'assises au mur de l'église.
En démolissant l'ancien édifice, on découvrit, chose bien plus extraordinaire, que le mur
et l'arcade séparant du transept la chapelle méridionale dont le dessin qu'on a sous les
yeux montre l'amorce, étaient une construction absolument intacte du monument galloromain.
Le massif de maçonnerie indiqué aussi devant le portail de l'église, et encore plus
apparent aujourd'hui, est également un reste des thermes, qui avaient beaucoup plus
d'étendue que l'église.
On trouvera tous ces détails reproduits fort heureusement dans des planches
lithographiées par les soins de M. Barbe au volume 45 du Congrès Archéologique de
France (p. 544 et suivantes).
Ajoutons encore un mot au sujet d'un autre débris des antiquités romaines qu'on vient
d'accoler à l'église actuelle de Jublains. On avait relevé au cours d'anciennes fouilles une
colonne cylindrique en granit, terminée en forme de cône allongé, dans laquelle on a cru
reconnaître la borne initiale de la cité des Diablintes, sans inscription parce qu'elle était
au centre. Cette opinion est très admissible. Le monolithe, haut de plus de deux mètres,
avait été dressé dans une propriété particulière. La Commission historique de la Mayenne
en a demandé l'érection au centre de la localité. On s'est rendu à cette requête, mais au
lieu de dresser la borne dans un lieu apparent, on l'a plaquée contre le mur de l'église
dans l'angle d'un contrefort, ligotée par des bandes de fer comme un infirme qui ne
pourrait plus se tenir debout.
Revenons à notre vieille église. La façade que nous présente le dessin est intéressante
avec son pinacle percé de deux baies où se balançaient les cloches. Cette disposition
était jusqu'au XVe siècle celle de la plupart de nos églises de campagne, qui remplacèrent
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alors généralement le pinacle, insuffisant pour une sonnerie un peu forte, par des flèches
et beffrois en charpente, couverts en ardoises. Mais bon nombre de vieilles églises
conservaient pourtant encore leur pinacle primitif il y a cinquante ans.
On remarquera le procédé qui avait été adopté à Jublains. Si nous décomposons la
façade, nous y voyons un mur droit terminé par un pignon à rampants appareillés, dont
la pointe surélevée forme le pinacle. Comme le mur de cette façade n'eût pas eu
l'épaisseur voulue pour l'installation des cloches, on le renforça par des contreforts
accostant la porte, puis montant jusqu'à ce qu'ils atteignent les rampants, et réunis alors
par un cintre formant voussure et permettant de donner au pinacle l'épaisseur suffisante.
Tout cet ensemble est intimement soudé au mur qu'il solidifie. Les deux contreforts ont
une assise plus forte et une saillie beaucoup plus prononcée depuis la base jusqu'aux
deux tiers de leur hauteur. A partir de là, ils subissent une réduction avec amortissement
en glacis.
Ce système de construction est fort pratique : il économise les matériaux et la main
d'œuvre, augmente la solidité, donne, quand il est bien exécuté, un cachet décoratif à
l'édifice, et à première vue satisfait l'esprit par son caractère rationnel.
La petite église de Deux-Evailles, à deux lieues de Jublains, avait une façade construite
dans le même système.
Celle d'Hambers, localité plus voisine encore de Jublains, a conservé cette même
ordonnance primitive, sauf que le pinacle a été flanqué par derrière d'une construction en
charpente, servant avec le pinacle lui-même de support à un beffroi. Le travail est mieux
exécuté, ce semble, qu'à Jublains.
A Deux-Évailles et à Hambers également, l'arc formant voussure au-dessous du pinacle
est en plein cintre ; à Jublains, il est brisé d'après le dessin ici reproduit, quoique les
deux baies destinées aux cloches soient romanes. Cela supposerait que ce système de
façade à pinacle en usage à l'époque romane, s'était conservé encore après l'apparition
de l'arc brisé, vers le milieu du XIIe siècle.
A. ANGOT.
Ancienne église de Jublains
(Dessin de M. Julien CHAPPEE).
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