Dépistage actif des cas - International Union Against Tuberculosis
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Dépistage actif des cas - International Union Against Tuberculosis
INT J TUBERC LUNG DIS 5 (7): 611-618 © 2001 IUATLD Dépistage actif des cas : comprendre le fardeau de la tuberculose en Afrique du Sud rurale P. M. Pronyk,* B. Joshi,* J. R. Hargreaves,* T. Madonsela,* M. A. Collinson,* O. Mokoena,* S. M. Tollman,* H. P. Hausler† * Department of Community Health, University of the Witwatersrand, Medical School, Parktown, Johannesburg ; † Directorate HIV/AIDS and STDs, Department of Health, Pretoria, South Africa ________________________________________________________________RESUME CADRE : Site de surveillance démographique et de santé d'Agincourt dans la province du Nord de l'Afrique du Sud rurale. OBJECTIF : Apprécier avec précision la charge de la tuberculose dans un sous-district rural où l'on connaît une prévalence élevée du virus de l’immunodéficience humaine. SCHEMA : On a combiné les données des enregistrements de tuberculose avec celles provenant d'un système des surveillance démographique et de santé actuellement en cours pour décrire la charge de la tuberculose dans une collectivité bien définie. Des cas non diagnostiqués de tuberculose active à bacilloscopie positive ont été détectés dans la collectivité parmi les tousseurs chroniques identifiés par les chefs de famille au cours d'une interview de recensement à passage unique. RESULTATS : L'incidence de la tuberculose hospitalisée dans la population des résidents permanents (n=56.566) a été de 212/100.000 années/personne au cours de l'année 1999. La prévalence ponctuelle moyenne des tuberculoses détectées (toutes formes) parmi les patients âgés de plus de 10 ans a été de 133/100.000 ; elle atteignait 81/100.000 pour la tuberculose pulmonaire à bacilloscopie positive. Il y a lieu de comparer ceci avec une prévalence ponctuelle de 16/100.000 maladies à bacilloscopie positives décelées lors d'un dépistage actif. CONCLUSION : A chaque neuf cas de tuberculose pulmonaire à bacilloscopie positive traités à n'importe quel moment, correspondent deux cas de maladie non diagnostiqués dans la collectivité. Cette enquête révèle que la charge de tuberculose non diagnostiquée est modeste parmi les résidents d'un sous-district rural d'Afrique du Sud. MOTS CLE : tuberculose ; épidémiologie ; Afrique du Sud ; dépistage actif ; surveillance de la tuberculose LES METHODES utilisées pour apprécier le fardeau véritable de la tuberculose (TB) dans les pays en développement sont imprécises.1 Dans de nombreux contextes, on a recouru à des enquêtes tuberculiniques chez des enfants non vaccinés pour déterminer le risque annuel d'infection tuberculeuse (RAIT).2 Cette donnée permet d'estimer la probabilité pour un individu d'être infecté par Mycobacterium tuberculosis dans le courant d'une année donnée. Suivre le RAIT au fil du temps est un moyen utile pour assurer le suivi des succès des efforts de la lutte antituberculeuse. 3 Dans les pays qui bénéficient d'un système de surveillance bien établi, les données de déclaration sont considérées comme fiables et donc préférables.4 Pour qu'une telle information reflète l'incidence avec exactitude, l'accessibilité des services médicaux et la qualité de la tenue des dossiers doivent être de très bon niveau. Dès lors, dans beaucoup de pays, ces données peuvent sousestimer sérieusement le fardeau de la maladie.1 On considère que l'Afrique du Sud bénéficie d'un des systèmes de déclaration les plus fiables dans la région d'Afrique sub-sahariene.4 Les estimations actuelles situent l'incidence annuelle de la maladie à 339/100.000 habitants.5 A l'échelle mondiale, l'Afrique du Sud occupe la douzième place en terme de nombre absolu de cas TB identifiés chaque année. 6 L'impact de l'épidémie du virus de l'immunodéficience humaine (VIH) sur l'escalade des taux de TB en Afrique a été bien documenté.7,8 Actuellement en Afrique du Sud, les taux d'accroissement d'infection par le VIH sont parmi les plus rapides du monde. Les données nationales basées sur la surveillance clinique prénatale en Auteur pour correspondance : Dr Paul M Pronyk, Health Systems Development Unit, Department of Community Health, University of the Witwatersrand, P O Box 2, Acornhoek, South Africa 1360. Tel: (+27) 13 797 0076. Fax: (+27) 13 797 0082. e-mail: [email protected] [Traduction de l'article "Active case finding—understanding the burden of tuberculosis in rural South Africa" Int J Tuberc Lung Dis 2001; 5 (7): 611-618.] 2 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease 1999 situe la prévalence du VIH à 22,4%.9 On estime qu'en Afrique du Sud, 48% des patients TB sont co-infectés par le VIH.10 La présence de formes sub-cliniques de la maladie, de symptômes atypiques et de tuberculoses à bacilloscopie négative a elle aussi augmenté de façon significative chez les individus co-infectés, conduisant à des retards potentiels dans les dépistage des cas.1 L'objectif de cette étude est de décrire avec précision le fardeau de la tuberculose dans un contexte rural d'Afrique du Sud grâce à la combinaison d'une stratégie de dépistage actif des cas (DAC) et d'une analyse des enregistrements hospitaliers en liaison avec les données d'une enquête démographie et santé (EDS) fiable. Les objectifs spécifiques ont été 1) d'estimer l'incidence et la prévalence de la tuberculose hospitalisée parmi une population soigneusement décrite dans une zone dont on connaît la prévalence élevée du VIH ; 2) estimer dans cette population, la prévalence de la tuberculose pulmonaire à bacilloscopie positive nonhospitalisée ; et 3) décrire le «véritable» fardeau de la tuberculose active dans cette population. MATERIEL ET METHODES Cette recherche a été revue d'un point de vue éthique et approuvée par le Comité pour la Recherche (Médicale) de l'Université de Witwatersrand (Afrique du Sud) sur les Sujets Humains. Cadre et population L'étude s'est déroulée dans le sous-district d'Agincourt, dans la Région Bushbuckridge de la province du Nord en Afrique du Sud, près de la frontière orientale du pays avec le Mozambique. La région est une zone rurale avec une population fixée et dense composée de 21 villages couvrant 38 km sur 16 km à ses points les plus éloignés. Il n'existe que peu de routes bitumées. L'eau est obtenue à partir de puits communaux ou dans les rivières et l'électricité est progressivement installée dans la région. Les services de santé sont disponibles sous forme de six formations de soins de santé primaires qui réfèrent à trois hôpitaux desservant l'ensemble de la région, deux se trouvant à 20 km du sous-district. Les réfugiés du Mozambique qui se sont installés eux-mêmes représentent environ 29% de la population. Les services de tuberculose sont structurés autour des trois hôpitaux publics. Tous les patients TB sont hospitalisés et enregistrés au moment du diagnostic. Depuis 1996, une nouvelle politique nationale a mis en route la gratuité des services de soins de santé primaires. Alors qu'il existe des honoraires peu élevés pour l'admission à l'hôpital, il n'y a pas de frais pendant la durée du traitement de la TB. Dans la région, on a noté une lente progression de l'introduction de praticiens privés exigeant des honoraires pour le service rendu. Dès lors, il est extrêmement rare qu'un patient n'ait pas été enregistré et ait été traité pour TB en dehors du système de santé gouvernemental. En 1998, la séroprévalence VIH était de 19,1% dans la région (intervalle de confiance [IC] 95% 10,7-27,5).9 Les données des «autopsies verbales» lors du recensement pour l’EDS effectué en 1997 ont situé le VIH/SIDA et la TB comme les troisième et quatrième causes plus importantes de décès parmi les adultes âgés de 15 à 49 ans, n'étant dépassés que par les accidents et la violence.11 De plus, les données du recensement ont également révélé un accroissement des taux de mortalité parmi les femmes en âge de reproduction, accroissement considéré comme attribuable aux décès dus au VIH/SIDA et à ses complications. Toutefois, l'épidémie n'a pas encore atteint son acmé dans la province et beaucoup d'infections prévalentes sont susceptibles d'avoir été acquises récemment.13 Dépistage actif des cas de tuberculose Le sous-district est le point focal pour les activités du Programme de Santé et de Population d'Agincourt (PSPA) gère dans la région l’enquête démographie et santé (EDS) depuis 1992. L’EDS recourt à un recensement annuel et à une mise à jour des événements spéciaux de toutes les familles dans le sous-district ainsi qu'à une évaluation par «autopsie verbale» de tous les décès signalés.11,12,14 On a créé, pour chaque village du sous-district, un plan détaillé des familles ; leur composition démographique est connue. Cette information est mise à jour à chaque phase de recensement.15 Au cours du cinquième recensement annuel du Programme de Santé et de Population d'Agincourt, mené de juillet à septembre 1999, on a demandé aux chefs des 10.542 familles visitées d'identifier les sujets qui avaient présenté une toux pendant plus de 3 semaines. Cette question de dépistage a été posée à l'occasion des interviews du recensement qui durent entre 30 et 60 minutes. La formation des enquêteurs du recensement a consisté en un atelier de 3 heures sur la TB et la toux chronique comme symptôme principal, suivi par des réunions hebdomadaires avec les dirigeants du recensement au moment de sa réalisation sur le terrain. Les individus identifiés comme «tousseurs chroniques» ont été revus le lendemain par un Dépistage actif des cas de tuberculose en Afrique du Sud rurale travailleur de terrain «TB». Ces travailleurs avaient bénéficié de 2 jours de formation pour le dépistage actif des cas, l'inclusion des critères, le recueil des expectorations et l'établissement des dossiers. Une aide supplémentaire sur le terrain a été assurée par une équipe médicale accompagnant le travailleur de terrain TB pendant ses visites à domicile à raison d'une fois par semaine. Ont été éligibles les suspects de TB, âgés de plus de 10 ans, et qui n'étaient pas traités pour TB à ce moment là. Au cours de ces visites, on a confirmé l'existence d'une toux chronique parmi les sujets préalablement identifiés. On a également identifié tous les autres tousseurs présents dans la famille. Après avoir donné un consentement verbal informé, les personnes interviewées ont été priées de fournir sur le champ un échantillon d'expectoration, et on leur a montré comment recueillir deux échantillons supplémentaires le jour suivant, tôt le matin. Des visites répétées ont été organisées dans toutes les familles pour recueillir les échantillons d'expectorations des cas potentiels. Deux échantillons ont été envoyés pour examen microscopique et un pour culture. On a refait une visite dans 2% des familles où un tousseur chronique n'avait pas été identifié afin de confirmer l'absence de tousseur chronique ; aucun tousseur chronique supplémentaire n'a été identifié au cours de ces visites. Analyse des cas enregistrés de tuberculose En Afrique du Sud, une loi exige que les cas de tuberculose soient déclarés au Département de la Santé. Les cas sont documentés dans les registres de TB tenus à l'hôpital sous la responsabilité des coordinateurs régionaux «TB». Les registres contiennent des renseignements sur le nom, l'âge, le sexe, l'adresse et la date d'enregistrement des cas de TB, à côté de détails cliniques incluant le diagnostic final, les résultats de la bacilloscopie et de la culture ainsi que les détails du traitement et son résultat. Les données ont été recueillies entre le 31 décembre 1998 et le 31 décembre 1999 dans les registres TB des trois hôpitaux desservant la population d'Agincourt. Un investigateur familier du site de l'étude a identifié dans les registres TB tous les patients qui avaient donné une adresse sur le terrain d'action d'Agincourt. Le village de résidence a été obtenu pour plus de 99% des enregistrements. Les registres ont alors été examinés une seconde fois par un investigateur et un volontaire de la zone locale dans le but d'identifier les autres adresses correspondant au site de l'étude et qui n'avaient pas été repérés antérieurement. Des patients ont pu indiquer des adresses en donnant comme référence 3 des points de repère locaux plutôt que le nom du village et ce second tour a été important pour l'identification de tous les cas TB du site de l'étude. Un contrôle croisé des registres et leur évaluation minutieuse ont permis de s'assurer que les nouveaux cas individuels de TB n'avaient pas été enregistrés plus d'une fois. Méthodes de laboratoire Les échantillons ont été recueillis et transportés au laboratoire local de la région pour l'examen microscopique. Des échantillons différents ont été recueillis pour la culture et transportés sur glace, dans un délai de 48 heures, au laboratoire de référence pour la culture (Institut d'Afrique du Sud pour la Recherche Médicale, Johannesburg). L'examen microscopique a été réalisé au moyen de la coloration conventionnelle de Ziehl-Neelsen sur des échantillons non concentrés. Les frottis positifs ont été quantifiés selon les standards de l'UICTMR. Les lames positives ont été confirmées par un second lecteur et le laboratoire de référence a relu 10% des lames négatives. Les échantillons destinés à la culture ont été décontaminés par la soude caustique à 4% et inoculés ensuite sur deux tubes de milieu de Löwenstein enrichis en glycérol. On a incubé les cultures à 37°C pendant 8 semaines et identifié M. tuberculosis grâce à la réaction de polymérase en chaîne avec des amorces spécifiques du complexe M. tuberculosis. 16,17 Analyse statistique L'information recueillie dans les registres et au cours du dépistage actif des cas a été combinée aux données de la plate-forme EDS afin d'évaluer avec précision l'incidence et la prévalence de la tuberculose parmi la population du sous-district d'Agincourt pendant l'année 1999. Pour le calcul de l'incidence et de la prévalence, on a utilisé comme dénominateur la population «permanente» (de facto) du sous-district pendant l'année 1999. Ce chiffre exclut tous les sujets résidents qui auraient été absents du terrain d'action pendant plus de 6 mois l'année précédente. Un travail préalable dans la région avait identifié cette donnée comme une valeur limite adaptée pour identifier un grand nombre d'individus, surtout des jeunes hommes, qui travaillaient loin de chez eux pendant une grande partie de l'année. On ne connaît pas bien le comportement de recours aux soins de ces «travailleurs migrants» mais ces sujets sont susceptibles de n'avoir pas été chez eux au moment du programme DAC et de n'avoir pas été enregistrés comme TB dans le district car ils avaient eu le plus de risque de tomber malades pendant qu'ils étaient loin de chez eux. Ils étaient 4 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease par conséquent peu susceptibles d'être représentés dans le dénominateur ni dans le numérateur pour le calcul de l'incidence/prévalence. On a estimé que chacun des sujets de la population permanente identifiés au cours du recensement représentait 1 personne/année à risque (PAAR) pour l'année calendrier 1999. Cette estimation est vraisemblablement précise puisque la tuberculose est relativement rare en termes absolus et puisqu'on sait que l'équilibre de la population est approximativement constant dans cette population (M Garenne, 1999, données non publiées). Puisque les hospitalisations pour tuberculose sont réparties uniformément au cours de l'année 1999, la prévalence ponctuelle moyenne des cas de TB en traitement peut être estimée comme égale à l'incidence de tuberculose X la durée du traitement. La durée moyenne du traitement a été estimée à partir d'une analyse des données recueillies dans les registres TB pour tous les patients enregistrés dans un des hôpitaux régionaux au cours de 1999. La méthodologie DAC fournit des mesures comparables de la prévalence ponctuelle des cas de tuberculose à bacilloscopie positive, à un moment donné, dans la collectivité parmi la population permanente du sous district âgée de plus de 10 ans. On a calculé les intervalles de confiance à 95% grâce à la distribution binomiale exacte. RESULTATS Etude de la population Les caractéristiques de la population de l'étude identifiée au cours de la cinquième série de l’EDS à Agincourt sont décrites sur la Figure. La population totale (66.840 personnes) du sousdistrict se répartissait en 21 villages et 10.542 familles représentant une taille moyenne de 6,34 pour une famille. Au total, 38% des hommes et 14% des femmes âgés de 18 à 59 ans avaient été absents du domicile pendant plus de 6 mois l'année précédente. La population permanente, d'où l'on a considéré que provenaient les cas de TB de cette étude, comportait 85% de la population totale (n = 56.566). Le dépistage actif s'est focalisé sur la population permanente âgée de plus de 10 ans (n = 38.251). Cas de tuberculose enregistrés Au cours de l'année 1999, on a enregistré 1.107 hospitalisations pour TB dans les trois hôpitaux qui desservent une population régionale totale d'environ 500.000 habitants. Parmi ces cas hospitalisés, 120 (10,8%) étaient des sujets de la zone du sous-district d'Agincourt (Tableau 1). Les hospitalisations pour TB se sont réparties uniformément au cours de l'année, avec un léger Population Pyramide, Agincourt Field Site, 1999 90+ Male Female Permanent population 80-84 Migrant population 70-74 Age 60-64 50-54 40-44 30-34 20-24 10-14 0-4 5000 4000 3000 2000 1000 0 1000 2000 3000 4000 Figure Pyramide de population pour la population du sous-district d'Agincourt, 1999 5000 Dépistage actif des cas de tuberculose en Afrique du Sud rurale Tableau 1 Caractéristiques des 120 admissions pour tuberculose parmi les résidents du sous-district d'Agincourt en 1999 Hospitalisés avec tuberculose No. d’hospitalisations janvier-mars avril-juin juillet-septembre octobre-décembre Patients de sexe masculin Cas de TB pulmonaire Résultats de l'expectoration pour les TB pulmonaires Résultats disponibles Cas à bacilloscopie positive Données de la population Population totale Population permanente Tous patients 120 34 23 36 27 68 (57%) 18 4 5 6 3 8 (44%) 102 30 18 30 24 60 (59%) 104 (87%) 9 (50%) 95 (93%) 75 2 73 49 (65%) 1 (50%) 48 (66%) 66 840 56 566 10 ans 19 158 18 315 5 Tableau 2 Dépistage actif des cas (DAC) de tuberculose à bacilloscopie positive par identification des tousseurs chroniques âgés de plus de 10 ans parmi la population permanente du sous-district d'Agincourt >10 ans 47 682 38 251 surcroît de sexe masculin. Dans la population âgée de plus de 10 ans, 93% des cas étaient des tuberculoses pulmonaires et parmi celles dont le résultat de l'expectoration était disponible, 66% étaient positives à la bacilloscopie. Dépistage actif des cas Les résultats de l'étude du dépistage actif des cas sont détaillés au Tableau 2. Des données sur la présence ou l'absence de toux chronique sont disponibles pour 38.127 membres de la population permanente d'Agincourt (99,7%) pendant 10 ans. La question de dépistage posée par l'équipe de terrain EDS et l'investigation complémentaire faite par l'équipe de terrain TB ont identifié 600 personnes (1,6%) signalant une toux depuis plus de 3 semaines. Lors de la répétition de la question par l'équipe de terrain de TB, 189 (31,5%) ne correspondaient pas à la définition du cas de tousseur chronique, 22 (3,7%) étaient sous traitement à ce moment là et 23 (3,9%) n'ont pas été confirmés comme tousseurs chroniques pour d'autres raisons. On a disposé des résultats des frottis d'expectoration pour 340 (92,9%) des 366 cas suspects confirmés de TB. Six cas (cinq hommes et une femme) de maladies à bacilloscopie positive ont été identifiés parmi les tousseurs chroniques repérés grâce au procédé «DAC». Chez trois d'entre eux, les échantillons d'expectoration ont été recueillis directement sur le terrain, alors que trois autres échantillons ont été obtenus à l'hôpital après des visites répétées de Population permanente totale Population permanente totale > 10 ans Population permanente > 10 ans (statut de la toux connu) Tousseurs chroniques identifiés Ne correspondent pas à la définition de toux chronique Traités pour TB Pas trouvés par l'équipe TB Décédés avant l'arrivée de l'équipe TB Autres Tousseurs chroniques confirmés Echantillons d'expectoration recueillis Résultats disponibles Cas du DAC Frottis et/ou culture positifs Ratio des tousseurs chroniques/cas TB à bacilloscopie positive 56 566 38 251 38 127 600 (1,6%) 189 (31,5%) 22 (3,7%) 4 (0,7%) 1 (0,2%) 18 (3,0%) 366 366 (100%) 340 (92,9%) 6 (1,8%) 61:1 l'équipe du DAC au domicile d'un tousseur chronique. Les patients identifiés par le DAC ont un délai de 28 semaines entre l'observation des symptômes (toux) et le diagnostic ; avant d'être identifiés par l'étude DAC, la plupart avaient recouru au service de santé où leur affection n'avait pas été diagnostiquée comme TB. Le fardeau de la tuberculose active dans le sous-district d'Agincourt Les données du fardeau de la tuberculose sont présentées au Tableau 3. Le taux d'incidence annuel de la tuberculose détecté parmi la population du sous-district d'Agincourt est de 212 cas/100.000 en 1999 (IC95% 176-254). La prévalence ponctuelle de la tuberculose traitée à un moment donné était de 92/100.000 (IC95% 69121). Parmi la population âgée de plus de 10 ans, la prévalence ponctuelle moyenne de la tuberculose pulmonaire à bacilloscopie positive hospitalisée était de 73 cas/100.000 (IC95% 49106). Le dépistage actif des cas a révélé une prévalence de 16/100.000 (IC95% 6-34) cas de tuberculose pulmonaire à bacilloscopie positive dans la collectivité, parmi les gens âgés de plus de 10 ans. On ne dispose pas d'information concernant la TB chez les individus plus jeunes et la méthodologie utilisée ne visait pas à identifier la TB non-pulmonaire ou à bacilloscopie négative. Les données actuelles mettent en évidence que pour neuf cas de tuberculose à bacilloscopie posi- 6 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease Tableau 3 Le fardeau de la tuberculose parmi la population permanente du sous-district d'Agincourt en 1999 Tous les patients n (95%CI) Données de la population Population totale 66 840 Population permanente 56 566 Patients TB ayant été traités par le système de santé Tous les cas Incidence/100 000 PAAR 212 (176-254) Durée moyenne du traitement* 5.2 mois Prévalence ponctuelle moyenne des 92 (69-121) TB traités/100.000 Cas pulmonaires Incidence/100 000 PAAR 184 (150-223) Durée moyenne du traitement 5.3 mois Prévalence ponctuelle moyenne des 81 (60-108) TB traités/100.000 Prévalence ponctuelle moyenne parmi 53 (36-76) les patients à bacilloscopie positive/100.000 Patients TB dans la collectivité (DAC) — Prévalence ponctuelle de la TB (maladie pulmonaire à bacilloscopie positive) dans la collectivité/100.000 — Prévalence ponctuelle estimée de la TB (tous les cas) dans la collectivité/100.000 Ratio des cas détectés à bacilloscopie — positive/les cas dans la collectivité >10 ans n (95%CI) 10 ans n (95%CI) 47 682 38 251 19 158 18 315 267 (220-324) 5.2 mois 115 (84-154) 98 (58-155) 4.9 mois 38 (15-79) 248 (201-304) 5.3 mois 110 (79-148) - 73 (49-106) - 16 (6-34) - 29 (14-51) - 73 : 16 4.5 : 1 - PAAR = personne-année à risque : DAC = dépistage actif des cas tive traités à un moment donné, il est probable qu'il y a en outre deux cas de TB active à bacilloscopie positive dans la collectivité. DISCUSSION Pendant 1999, le taux d'incidence des cas de tuberculose hospitalisés parmi la population permanente du sous-district d'Agincourt a été de 212 cas/100.000. Ce chiffre est plus élevé que celui de la Province du Nord, estimé à 106/100.000.10 Cette différence peut résulter en partie de différences dans le mode de déclaration, mais peut aussi refléter la prévalence plus élevée du VIH dans la région de l'étude (19% dans la région comparés à 11,4% dans la province). De plus, la région de l'étude est disproportionnellement pauvre et très peuplée par comparaison aux autres régions rurales de la province et ceci peut contribuer à un fardeau plus lourd de la maladie. Une grande force de l'estimation générée dans cette étude réside dans la plate-forme EDS qui fournit un chiffre de dénominateur précis pour la population permanente de la région du sousdistrict. Toutefois, on doit considérer que la présence d'un programme de recherche active dans la collectivité peut avoir affecté la connaissance de problèmes de santé comme la tuberculose et influencé dès lors le comportement de recours au soins de la population. Le PSPA n'avait pas mené de travaux antérieurement sur la tuberculose dans cette région. De plus, la proportion de cas régionaux de TB en provenance d'Agincourt était très similaire au rapport de sa population régionale (10,8% vs 11,3%), ce qui suggère peu de différences dans la mise en évidence passive des cas. Dès lors, il semble peu probable que l'activité EDS ait biaisé sérieusement les résultats de cette étude. L'hypothèse selon laquelle les cas de TB proviendraient de la population permanente (non migrante) ne reflète pas totalement la complexité des profils de migration, un phénomène important dans la population actuelle. Dans cette étude, on ne sait pas dans quelle mesure les migrants sont représentés parmi les cas TB identifiés à l'hôpital mais on a postulé que les sujets absents de leur domicile depuis longtemps n'étaient susceptibles de figurer de manière significative ni dans le numérateur, ni dans le dénominateur de notre étude. Si cette hypothèse est correcte, les chiffres présentés pour la prévalence et l'incidence doivent refléter avec précision la présence de la maladie parmi la population de facto. Il peut aussi exister des limitations dans les données du numérateur pour les cas déclarés si les données du registre TB sont imprécises ou si les patients ont été hospitalisés ou suivis en dehors de la région. Toutefois, connaissant les profils d'utilisation du service de santé, il est peu probable qu'une Dépistage actif des cas de tuberculose en Afrique du Sud rurale proportion significative de cas en traitement ait échappé au dépistage dans le contexte de cette étude. On admet également que l'estimation de la durée du traitement utilisée dans ces analyses pour générer les chiffres de prévalence ponctuelle peut être inexacte malgré le fait que nous pensons que les données du registre sont relativement précises. L'adhésion au traitement est un phénomène complexe et il n'est pas bien décrit par une «moyenne» unique pour la durée du traitement. Toutefois, ce chiffre est utile pour permettre une comparaison des estimations du fardeau de la tuberculose pour la population générée dans les deux parties de l'étude. Les données concernant la prévalence ponctuelle ont été présentées pour comparer les nombres de patients traités pour TB par le système de santé et ceux atteints d'une TB non diagnostiquée dans la collectivité. Notre travail a mis en évidence que pour neuf membres de la population permanente traités pour TB pulmonaire à bacilloscopie positive, il est probable qu'il y a chaque fois dans la collectivité deux cas non diagnostiqués de TB pulmonaire. Il est important de noter que les cas identifiés par le DAC avaient souvent toussé pendant une longue période et ont pu contribuer de façon disproportionnée à la durée de la contagiosité dans la collectivité. En outre, ces tousseurs avaient souvent déjà cherché à obtenir un traitement pour leur affection chez un pourvoyeur de santé reconnu. Dès lors, il semble que le délai avant la présentation au service de santé et le délai diagnostic peuvent être un facteur important contribuant à la présence de cas de tuberculose non diagnostiqués dans cette collectivité. Lors d'un travail ultérieur, nous avions investigué les délais avant la présentation et avant le diagnostic chez les patients hospitalisés dans cette région. 18 La possibilité de généraliser les résultats de ce travail à d'autres régions dépend d'un nombre de facteurs biologiques et sociaux qui définissent largement la vulnérabilité d'une population vis à vis de la tuberculose. A l'intérieur même de l'Afrique du Sud, les taux de développement social varient fort de province à province, comme le fait la prévalence de l'infection VIH—de moins de 10% dans le Western Cape à plus de 30% dans le KwaZulu Natal. Alors que l'Afrique du Sud est considérée comme un pays à revenus moyens, le niveau de développement humain y est très variable. Les provinces urbaines et plus riches (Gauteng ou le Western Cape) ont un index de développement humain (IDH) similaire à celui de pays comme le Venezuela ou le Mexique— considérés par le Programme de développement des Nations Unies comme des régions à 7 développement humain élevé. Inversement, les observations de ce travail dans la Province du Nord sont susceptibles d'être plus comparables à des pays qui connaissent un niveau de développement humain plus faible et une prévalence de VIH elle aussi similaire—tels que le Lesotho, le Zimbabwe, la Namibie ou le Mozambique.19 Il est important de souligner les différences méthodologiques dans l'appréciation des points forts et des limitations d'une approche particulière du DAC. Dans cette étude, le dépistage actif des cas s'est centré sur une unique question de toux chronique et sur un interrogatoire non répété des chefs de famille pour permettre d'insérer efficacement le travail dans le recensement du EDS en cours. Des données en provenance du Kenya qui recourt à diverses stratégies de DAC ont suggéré que cette méthode était la plus efficace pour l'identification des cas actifs dans la collectivité.20 Une revue des patients externes de l'hôpital a montré que la présence d'une perte de poids et/ou d'une toux depuis 1 à 12 mois était d'une sensibilité particulière.21 Dans d'autres pays, les stratégies pour identifier les suspects de TB ont été très différentes et ont comporté un interrogatoire multiple des aînés ou des chefs de village, des enquêtes parmi les chefs de famille, le dépistage des contacts des patients enregistrés et des suspects de TB ainsi que des messages publics radiodiffusés.19-22 On a utilisé une série de méthodologies de triage comportant le test à la PPD, le cliché thoracique ou la surveillance des symptômes principaux incluant la toux (de 2 à 4 semaines), les hémoptysies, la perte de poids et/ou un état de faiblesse généralisée.20-26 Les approches d'échantillonnage sont variables : il s'agit d'approches basées sur la population ou de schémas en grappes.24,25 Des modalités de diagnostic comme le cliché thoracique, l'évaluation des frottis d'expectoration et le recueil d'expectoration pour culture ont toutes été utilisées.25 Malheureusement les investigateurs n'ont pas différencié de manière suffisante les patients qui avaient déjà été identifiés par le service de santé et ceux qui avaient échappé antérieurement au diagnostic. Le ratio des cas actifs et des tousseurs chroniques sur la population échantillonnée a des implications significatives en terme de coût et de faisabilité des programmes de DAC. Sur base de nos données, 1,6% des individus ont été identifiés comme suspects de TB grâce à la question posée aux chefs de famille concernant la toux chronique. Ce chiffre est faible comparé aux observations en provenance d'études conduites en Papouasie Nouvelle Guinée (22%),27 au Kenya et en Ouganda (5%),20,28 en Birmanie (4,1%),29 ou à Singapour 8 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease (2,5%).30 Dans notre étude, le ratio des suspects de TB sur les cas à bacilloscopie positive était 61:1— un rendement supérieur à celui signalé dans la littérature, qui cite généralement un ratio de 100 suspects par cas.20,31 Alors que le dépistage pour une toux chronique n'est pas susceptible de laisser échapper des cas atteints d'une maladie à bacilloscopie positive,24 l'arrivée du VIH a incité à faire appel à un protocole de dépistage plus complet pour détecter la maladie à bacilloscopie négative.32 Vu la prévalence relativement élevée du VIH dans la population de notre étude, il est dès lors possible que notre méthodologie ait sousestimé le fardeau des maladies actives. Les stratégies existantes pour la lutte antituberculeuse mettent l'accent sur la détection des cas parmi les individus symptomatiques qui se présentent au service de santé et sur l'achèvement du traitement grâce à la thérapie de courte durée directement observée (DOTS).33 Les critiques argumentent toutefois que cette approche a été développée bien avant l'ère du VI/SIDA et qu'elle ne tient pas compte de l'épidémiologie dynamique de la tuberculose liée au VIH.34 Dans les contextes à haute prévalence, particulièrement ceux d'Afrique sub-saharienne, le fardeau des cas de TB a augmenté de 200 à 300% au cours de la dernière décennie.35 Même les pays qui bénéficient de programmes-modèle DOTS comme la Tanzanie, la Thaïlande ou le Botswana ont été témoins d'un accroissement de la transmission de la TB, en grande partie comme conséquence des taux élevés de co-infection par le VIH.34,36,37 De Cock et Chaisson signalent que vu la prévalence croissante de la TB active non diagnostiquée chez les personnes séropositives pour le VIH, les stratégies de DAC devraient être considérées comme un moyen d'interrompre la transmission présente. Ils plaident en faveur de cette approche «dans toutes les situations où sont concentrées des personnes infectées par le VIH» tels les hôpitaux et les prisons et se posent la question d'une application plus répandue dans les zones où la prévalence VIH est la plus élevée, particulièrement parmi les membres de la famille des patients TB co-infectés par le VIH.34 Dans une revue de quatre approches-modèle du dépistage actif des cas, Murray et Salomon concluent que couplé à une stratégie DOTS efficace, le DAC peut réduire la mortalité de la tuberculose d'un quart à un tiers au cours des quelques décennies à venir et peut offrir d'énormes avantages aux régions à haute prévalence comme l'Afrique sub-saharienne.31 Dans cette étude, une question unique posée aux chefs de famille a identifié une charge modérée de TB non diagnostiquée dans une collectivité rurale d'Afrique du Sud où la prévalence du VIH est élevée. On ne sait pas dans quelle mesure ces individus servent de réservoir à la transmission survenant dans la collectivité. En outre, dans quelle mesure une réduction du retard avant la consultation influencerait-elle les dynamiques de transmission dans la collectivité ? Dans les pays industrialisés, les stratégies DAC ont été abandonnées en grande partie en raison du fait que si de telles interventions permettaient de diagnostiquer les cas actifs à un stade plus précoce, la plupart des sujets auraient néanmoins consulté les services de santé, ce qui aurait permis le diagnostic.38 Cette étude a détecté six cas de tuberculose non diagnostiqués antérieurement dans une population de 56.666 habitants. Pendant qu'ils contribuaient de façon disproportionnée à la durée de la contagiosité dans la collectivité, la plupart d'entre eux avaient consulté les services de santé à un moment donné pendant leur maladie. Dès lors, dans le contexte d'Afrique du Sud qui bénéficie d'une infrastructure de services de soins de santé primaires relativement bien développée, il semble peu probable que vu les ressources nécessaires à la mise en œuvre de campagnes de DAC efficaces, cette technique s'avère un moyen d'un bon rapport coût-efficacité pour réduire le fardeau de la tuberculose dans les populations. Remerciements Nous exprimons notre reconnaissance à l'Institut d'Afrique du Sud pour la Recherche Médicale et en particulier au Dr L Blumberg et à Mr A Meerholz pour leur aide dans ce travail. Les Drs M Thoroughgood et P Godfrey-Faussett de la London School of Hygiene and Tropical Medicine et le Dr Garenne du Centre pour la Population et le Développement à Paris ont fourni des conseils techniques et des appuis substantiels. Jonathan Grasko, Stefan Gerber, Spencer Pool, Gary Fine, Mark Flemming et Peter Kane de WITS University Medical School ont aidé au recueil des données. Nous voulons aussi faire état de la participation du Département Régional de la Santé Bushbuckridge, du Département de la Santé de la Province du Nord et du Département National de la Santé d'Afrique du Sud pour leur apport et leur implication continue dans ce travail. Cette étude a été soutenue financièrement par le Département pour le Développement International (Royaume Uni) et l'Organisation Mondiale de la Santé. Références 1 2 3 4 5 Grange J M. The global burden of tuberculosis. In: Porter J D H, Grange J M, eds. Tuberculosis—an interdisciplinary perspective. London: Imperial College, 1999: pp 3-32. Styblo K, Meijer J, Sutherland I. The transmission of tubercle bacilli, its trend in a human population. Tuberculosis Surveillance Unit, Report No. 1, Bull Int Union Tuberc 1969; 42: 95-104. Sutherland I. On the risk of infection. Bull Int Union Tuberc Lung Dis 1991; 66 (4): 189-191. Dolin P J, Raviglione M C, Kochi A. Global tuberculosis incidence and mortality during 1990-2000. 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