3- le fonctionnaire de police et les victimes
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3- le fonctionnaire de police et les victimes
Examen professionnel Brigadier chef – Unité de valeur 1 d'un Etat républicain est incompatible avec la tenue de propos critiques à l'égard des institutions françaises, ou avec la manifestation publique de positions trop tranchées. Ses réflexions peuvent amener le policier à émettre des considérations sur son environnement professionnel. Un souci constant de retenue permet dans ces circonstances de ne pas porter atteinte aux obligations de discrétion et de secret professionnels. En raison de sa fonction, le policier peut se voir proposer par le public des avantages (réductions, cadeaux, etc.). Ces offres sont rarement désintéressées. L'intégrité l'incitera à les refuser poliment tout en expliquant que l'Etat le rémunère pour accomplir sa mission de service public. A l'inverse, le public ne tolérerait pas que le fonctionnaire de police use de sa qualité pour tenter d'obtenir un passe-droit ou une faveur pour lui-même ou pour autrui (policier en tenue qui ne respecte pas la file d'attente devant un guichet alors qu'il vient pour régler un problème personnel, etc.). Le "piège" du trafic d'influence Chargé d'une mission de service public, dépositaire de l'autorité publique, le policier peut être tenté de profiter de son statut et de ses relations pour son intérêt personnel. En acceptant, voire en sollicitant -sans droit- de la part du public, argent, biens ou promesses, pour abuser de son influence réelle ou supposée auprès des autorités compétentes dans le but de faire obtenir toute décision favorable, celui-ci commet l'infraction de trafic d'influence. Sans atteindre un tel degré de gravité, le fait pour un policier d'accepter, de la part d'un administré, cadeaux ou avantages quelconques, au terme de démarches qu'il aurait accomplies en sa faveur, peut aussi constituer un grave manquement au devoir de probité et de désintéressement. Toute intervention ayant permis l'obtention d'autorisations administratives ou "d'indulgences" peut ainsi déboucher sur une situation à risque. 3- LE FONCTIONNAIRE DE POLICE ET LES VICTIMES Le fonctionnaire de police est quotidiennement confronté à la détresse physique et morale des victimes. Elles attendent de lui aide et assistance. C'est l'occasion pour lui d'associer à son savoir faire professionnel ses qualités humaines. 3.1- Le premier contact Le premier contact avec la victime est déterminant, quels qu'en soient le lieu (au service, dans un lieu public ou privé, etc.) et les circonstances (réquisition, intervention spontanée, venue de la personne au service, appel téléphonique, etc.). Les attentes excessives, les renvois faussement motivés, les passe-droits à l'ordre d'arrivée au service d'accueil suscitent chez la victime autant de représentations négatives de l'image de son interlocuteur et de l'institution qu'il représente. La première attention est de montrer que l'on prend son cas en considération, qu'il paraisse mineur ou non, voire répétitif, et de rassurer, de réconforter aussi bien par des paroles (dédramatiser, etc.) que par des actes (offrir une couverture, un siège ; rechercher quelqu'un parlant la langue de la victime lorsqu'elle ne peut s'exprimer en français ; aviser les personnes que la victime souhaite voir informer, etc.). DFPN/SDE/Bureau des Activités Physiques et Professionnelles – GUIDE PRATIQUE DE LA DEONTOLOGIE – Réforme des corps et carrières – Brigadier Chef – Janvier 2007 -5- Examen professionnel Brigadier chef – Unité de valeur 1 Dans cet esprit, l'état physique ou émotionnel déficient de la victime, sa particulière vulnérabilité (personnes âgées, enfants, mineurs en fugue, malades, handicapés, etc.) inciteront le fonctionnaire de police à développer un sens de la relation humaine plus aigu et à adapter à cet état ses sollicitations professionnelles (savoir se déplacer ; laisser donner les soins à un blessé, lui laisser le temps de reprendre ses esprits avant de lui demander son identité ; solliciter l'intervention d'un collègue féminin, etc.). Ce soutien est apporté dans le souci du respect de la personne, de sa pudeur et de sa sensibilité. Comment manifester du respect envers une personne ? - en la traitant sans discrimination ou favoritisme tenant à son origine, sa religion, sa condition sociale, son âge, son sexe, etc. ; - en ne se permettant aucune familiarité dont le tutoiement est l'expression la plus irritante ; - en prenant en compte, lorsque cela est possible, la volonté de la victime majeure et lucide d'aviser ou non ses proches de son état ; - en employant un vocabulaire correct, sans dire des grossièretés ; - par la politesse et la courtoisie, la retenue dans les propos et l'absence de toute remarque désobligeante, même face à une personne agressive. La victime se trouvant dans une situation de dépendance vis à vis du fonctionnaire de police, c'est à lui qu'il appartient de prendre ou de proposer les moyens de préserver sa pudeur tant physique que morale (fournir de quoi masquer sa nudité, la soustraire à la curiosité, permettre l'expression d'un problème délicat dans la confidentialité, etc.). En présence d'une victime décédée, le respect et la décence continuent à s'appliquer lors de l'accomplissement d'actes de police, notamment au cours des manipulations du corps. Lorsqu'un personne doit être informée d'une atteinte à ses biens survenue à son insu (incendie ou cambriolage pendant son absence, etc.) ou d'une nouvelle grave concernant un proche, victime comme elle du même événement (cas du couple ayant un accident d'automobile dont l'un est blessé et l'autre décédé, etc.), la conscience du choc que cette annonce risque de provoquer suppose que l'information lui soit communiquée avec tact. L'assistance à la personne se complète du souci de présenter ses bien dès lors que les circonstances l'empêchent de les protéger elle-même (absence du propriétaire d'un lieu cambriolé, affaires laissées dans un véhicule accidenté dont l'occupant est emmené à l'hôpital, etc.). 3.2- Le recueil des déclarations (entretien/plaintes) A ce stade de la relation, le fonctionnaire de police s'emploie à obtenir de la victime les éléments nécessaires à la suite de l'affaire. Bien évidemment, ce qui a été exprimé dans les développements relatifs au "premier contact" se prolonge au cours de cette nouvelle phase, tout en s'enrichissant de données supplémentaires. Comme la tenue vestimentaire et le comportement, l'état des locaux dans lesquels travaille le fonctionnaire de police est une manifestation de la considération accordée à la victime. Le cadre dans lequel elle est reçue influe également sur l'image de son interlocuteur et sur celle de l'institution qu'il représente. Le policier doit donc se montrer particulièrement attentif à son environnement matériel. Il contribue à le maintenir dans un état convenable et décent (propreté, ordre, état du mobilier, absence de photographies pouvant choquer la pudeur ou la sensibilité). DFPN/SDE/Bureau des Activités Physiques et Professionnelles – GUIDE PRATIQUE DE LA DEONTOLOGIE – Réforme des corps et carrières – Brigadier Chef – Janvier 2007 -6- Examen professionnel Brigadier chef – Unité de valeur 1 Il s'abstient de montrer à la vue du public toute marque d'engagement personnel (objets ou affiches à l'effigie d'un parti politique, d'un mouvement philosophique ou religieux, etc.), et ne s'autorise que des touches de personnalisation modérées. Les déclarations de la victime revêtent un caractère très personnel, voire intime. Un cadre matériel préservant la confidentialité est donc parfois nécessaire. Au service et dans les lieux publics ou privés tels que des commerces, il pourrait s'agir d'un endroit où le public n'a pas librement accès. Sur la voie publique, un véhicule de service peut constituer un abri approprié. La protection de la confidentialité suppose également qu'il soit mis obstacle à la curiosité déplacée de certains collègues (fermer les portes de son bureau, faire sortir ceux dont la présence n'est pas utile, etc.). Bien souvent, la victime ressent le besoin de parler pour se soulager du traumatisme qu'elle a subi. Elle cherche une oreille attentive qu'elle trouvera auprès d'un fonctionnaire de police disponible, sachant l'écouter pour relater objectivement ses propos et n'émettant pas de jugement a priori. Néanmoins, le fonctionnaire de police, en restant professionnel, saura limiter son intrusion dans la vie privée de la victime au strict nécessaire. En sens inverse, cette confidentialité ne l'autorise pas pour autant à manquer au profit de la victime à ses obligations de discrétion et de secret professionnels (divulgation de la préparation d'une opération de police, révélation de dépôts de plainte pour des motifs identiques à ceux de la victime en indiquant les noms des autres plaignants, etc.) pas plus qu'elle ne lui permet de manquer à son obligation de réserve (commentaires divers sur les institutions, le pouvoir politique, etc.). Comment porter assistance à une victime ? - en intervenant ou en la recevant au plus vite ; - en se montrant disponible ; en lui consacrant le temps nécessaire et en restant à son écoute ; - en la réconfortant et la rassurant ; en se montrant prévenant et en mettant, si nécessaire et dans la mesure du possible, les moyens du service à sa disposition pour l'aider à résoudre ses problèmes immédiats ; - en traitant consciencieusement son affaire et en l'informant des suites ; - en veillant à sa protection et à celle de ses biens tant que la situation le nécessite ; - en la conseillant pour éviter le renouvellement des faits ; - en l'orientant vers les services sociaux susceptibles de l'aider ; au besoin, en alertant ces services. Le policier peut être tenté dans certains cas de ne pas accorder un intérêt égal au cas des victimes, notamment si ces dernières sont des personnes défavorablement connues du service ou coutumières d'appels pour des motifs futiles ou imaginaires. L'expérience montre que le fonctionnaire de police aurait tort de céder à ses a priori car certaines faits dénoncés peuvent s'avérer réels. Seul le résultat de son intervention et de ses investigations peut démontrer objectivement l'invraisemblance des allégations. 3.3- Le suivi L'assistance que la victime attend de la police ne s'arrête pas au moment où ses déclarations ont été recueillies. Loin de laisser la personne avec ses interrogations ou sa détresse, le fonctionnaire de police pourra lui prodiguer des conseils pour qu'elle ne se retrouve pas ultérieurement dans DFPN/SDE/Bureau des Activités Physiques et Professionnelles – GUIDE PRATIQUE DE LA DEONTOLOGIE – Réforme des corps et carrières – Brigadier Chef – Janvier 2007 -7- Examen professionnel Brigadier chef – Unité de valeur 1 une situation identique. Il lui indiquera quels autres services sont aussi en mesure de l'aider. Il mettra, si nécessaire, les moyens du service à sa disposition (la raccompagner chez elle, la laisser téléphoner lorsqu'elle est démunie,…). Au besoin, face à un cas de détresse, il prendra l'initiative d'alerter les services sociaux et les services d'aide aux victimes. La victime attend également un suivi professionnel et consciencieux de son affaire. Laisser apparaître son scepticisme quant aux résultats de l'enquête, omettre de donner les informations qu'elle est en droit d'attendre sur la suite de l'affaire, la recontacter pour des futilités, remettre des documents dont la présentation est peu soignée et, pire encore, ne pas donner à l'enquête toutes les chances de réussir… sont autant de comportements altérant ou trahissant la confiance de la victime. En outre, les déclarations de la victime peuvent l'exposer à des représailles de la part de ceux qu'elle met en cause. En pareille situation, l'appréciation de la réalité du risque encouru suggérera au fonctionnaire de police soucieux de la protection de la personne de prendre ou de conseiller des mesures adaptées (attirer l'attention des équipages de patrouille ou de police-secours sur le cas, contacter régulièrement la victime, lui conseiller de changer de domicile, etc.). Certains actes ultérieurs d'enquête tels que confrontation, présentation de suspects, retour sur les lieux d'infraction, reconstitution… sont susceptibles de provoquer un choc émotionnel chez la victime. La préparer à de tels actes, la prévenir à l'avance, lui expliquer le but et le déroulement de l'opération, la rassurer et l'emploi des moyens appropriés (glace sans tain) dans la mesure des possibilités contribueront à atténuer le choc. Le "piège" des cadeaux Certaines victimes tiennent absolument à manifester leur reconnaissance par des cadeaux. Il est parfois délicat de refuser cette marque de gratitude. N'ayant accompli que la mission qui lui est dévolue et pour laquelle il est rémunéré, le fonctionnaire de police, s'il veut concilier ce geste avec le désintéressement et le souci d'indépendance qui l'animent, ne peut alors qu'inviter le donateur à se tourner vers une œuvre d'intérêt général. 4- LE FONCTIONNAIRE DE POLICE ET LES AUTEURS D'INFRACTIONS La mission de police judiciaire a pour finalité de mettre les auteurs d'infractions à disposition de la justice. Pour la mener à bien, le fonctionnaire de police dispose d'importants pouvoirs parfois assortis de mesures coercitives. Le policier agit en auxiliaire loyal de la justice, seule chargée de prononcer la sanction, lorsqu'il veille à user de ces pouvoirs conformément à l'esprit dans lequel ils lui ont été attribués. 4.1- Le comportement général Le fonctionnaire de police est confronté à des infractions de gravité diverse, allant de la contravention au crime. Cependant, son comportement dans l'établissement des faits et dans ses rapports avec les personnes mises en cause repose sur des constantes. Dans l'établissement des faits Le policier est chargé de constater toute infraction portée à sa connaissance ou dont il est témoin et d'en informer la justice. DFPN/SDE/Bureau des Activités Physiques et Professionnelles – GUIDE PRATIQUE DE LA DEONTOLOGIE – Réforme des corps et carrières – Brigadier Chef – Janvier 2007 -8-