63 - Jésus se défend des Pharisiens et des scribes (Matt. 15.1-9)

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63 - Jésus se défend des Pharisiens et des scribes (Matt. 15.1-9)
63 - Jésus se défend des Pharisiens et des scribes
(Matt. 15.1-9)
Introduction
Un violon sur le toit »
Au début du XXème siècle, dans le quartier juif d'Anatevka, petite ville de Russie, Tévye est un
modeste laitier dont les trois préoccupations majeures sont caractéristiques de l'univers fermé dans
lequel il vit : assurer la subsistance de sa joyeuse famille, assurer sa descendance en cherchant de
bons maris à ses cinq filles capricieuses, et rassurer Dieu quant aux libertés qu'il prend vis à vis des
traditions et de la religion...(extrait du synopsis de la pièce- http://www.unviolonsurletoit.com)
Toute spiritualité qui se développe à partir d’un contenu révélé est en tension entre ce qui a été donné
et qui est immuable d’un côté, et les habitudes et les pratiques de l’autre. Les traditions ont parfois
tendance à devenir le centre, au détriment de la vérité immuable.
Jésus met en garde contre le danger de voir une tradition couvrir la révélation de l'Écriture.
Matthieu 15.1-9 :
« 1 Alors des pharisiens et des scribes vinrent de Jérusalem auprès de Jésus, et dirent :
2 Pourquoi tes disciples transgressent–ils la tradition des anciens ? Car ils ne se lavent pas les mains, quand ils prennent
leurs repas.
3 Il leur répondit : Et vous, pourquoi transgressez–vous le commandement de Dieu au profit de votre tradition ?
4 Car Dieu a dit : Honore ton père et ta mère ; et, Celui qui maudira son père ou sa mère sera puni de mort.
5 Mais vous, vous dites : Celui qui dira à son père ou à sa mère : Ce dont j’aurais pu t’assister est une offrande à Dieu, n’est
pas tenu d’honorer son père ou sa mère.
6 Vous annulez ainsi la parole de Dieu au profit de votre tradition.
7 Hypocrites, Esaïe a bien prophétisé sur vous, quand il a dit :
8 Ce peuple m’honore des lèvres, Mais son coeur est éloigné de moi.
9 C’est en vain qu’ils m’honorent, en enseignant des préceptes qui sont des commandements d’hommes. »
10
➡ Les 3 poisons mortels de la tradition.
Juger la spiritualité des autres (15.1-2)
« 1 Alors des pharisiens et des scribes vinrent de Jérusalem auprès de Jésus, et dirent: 2 Pourquoi tes disciples
transgressent-ils la tradition des anciens? Car ils ne se lavent pas les mains, quand ils prennent leurs repas. »
Jésus est en Galilée, au nord d’Israël.
•
Partout ou il passait, il guérissait les malades, il nourrissait la foule, il parlait avec une autorité qui
frappait ses auditeurs
•
Le bruit devait commencer à se répandre de tout ce que faisait Jésus, et nous avons vu que les
foules le suivaient pour en faire leur roi.
C’est dans ce contexte que des Pharisiens et des scribes vinrent de Jérusalem.
•
Les Pharisiens étaient des gens qui combattaient l’influence de la culture grecque et romaine sur
la vie d’Israël. C’était un mouvement conservateur spirituel au sein du judaïsme qui voulait garder
la spiritualité juive dans sa plus grande pureté.
•
Les scribes assumaient plusieurs fonctions dans la société. Ils étaient notaires et ils étaient
juristes. C’était des spécialistes de la Loi juive, c’est-à-dire du Pentateuque, les 5 premiers livres
de la Bible.
•
Il faut réaliser l’importance de ces personnages dans le judaïsme. Lorsque les prophètes ont
cessé d’exister en Judée, il fallait des enseignants capables de rappeler le peuple à l’ordre,
d’enseigner la Bible et d’arbitrer les conflits civils de la société.
Évangile selon Matthieu
Matthieu 15:1-9
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Le premier grand scribe dont parle la Bible c’est Esdras. Ecoutez comment la Bible parle de son
travail : « Car Esdras avait appliqué son coeur à étudier et à mettre en pratique la loi de l’Éternel et à
enseigner en Israël la règle et le droit » (Esdras 7:10).
•
Un petit mot. Pour vous qui exercez une quelconque responsabilité dans la vie de cette église, :
combien je souhaite que vous preniez appui sur ce verset !
•
Si vous enseignez les enfants, si vous enseignez des étudiants. Si vous ouvrez la bouche
pendant une réunion de maison, point de lumière, ou cellule de vie. Si vous parlez à vos propres
enfants, ou si vous conseillez quelqu’un sur les sentiers de la vie, mémorisez ce verset !
•
« Car Esdras avait appliqué son coeur à étudier et à mettre en pratique la loi de l’Éternel et à
enseigner en Israël la règle et le droit » (Esdras 7:10).
Le problème principal des pharisiens est résumé par ce que Paul dit de ses concitoyens en Romains
10:2 « Car je leur rends ce témoignage, qu’ils ont du zèle pour Dieu, mais sans connaissance. » Les
Pharisiens et les scribes avaient le souci profond de défendre la religion que Dieu avait donnée à leur
peuple par Moïse. Mais voici comment ils voulaient le faire :
•
En mettant une barrière autour de la Loi — comme on met une bordure d’accès au métro.
•
En donnant de plus en plus de précisions sur l’application de la Loi, en sorte que la Loi de Dieu
était enfouie sous des centaines de régulations, et ce sont ces régulations qui étaient devenues
centrales.
Ces hommes qui se voulaient les défenseurs de la droiture et de l’orthodoxie judaïque étaient devenus
les destructeurs de la Parole de Dieu. Terrible dérapage, qui guette toute église.
La réputation de Jésus devait être parvenue aux oreilles des responsables de Jérusalem, peut-être
même du sanhédrin, cette sorte d’assemblée nationale et de tribunal du pays. C’est une délégation
officielle, qui vient de Jérusalem, pour se faire une idée plus précise de ce qui se passe en Galilée.
Jean nous rapporte d’ailleurs cette préoccupation du Sanhédrin « Alors les principaux sacrificateurs et
les Pharisiens assemblèrent le sanhédrin et dirent : Qu’allons–nous faire ? Car cet homme fait
beaucoup de miracles » (11:47).
Et ils attaquent illico sur quelque chose qu’ils n’apprécient pas : « Pourquoi tes disciples
transgressent-ils la tradition des anciens ? » Quelques observations :
•
D’abord, leur système est devenu tellement complexe, qu’il faut un doctorat pour le connaître, et
pour naviguer sans souci sur les chemins qu’ils ont eux-mêmes tracés.
•
C’est comme les dispositions fiscales de nos jours : il faut des hommes formés pendant de
nombreuses années pour savoir que conseiller.
•
C’est un peu comme la distribution de tracts à Paris : je cite les propos d’un policier : « vous
avez le droit de le faire, mais si la police ne veut pas que vous le fassiez, elles vous arrêtera
pour des raisons secondaires — de façon tout à fait légale. »
•
En sorte qu’il leur est très facile de trouver quelque chose qui ne va pas.
•
Deuxièmement, Jésus n’est pas accusé ici de manquer de respect à la tradition des anciens. Car
si lui-même n’avait pas respecté cette tradition, ils l’auraient coincé avec plaisir. Il faut souligner à
quel point Jésus s’est efforcé de ne pas être une occasion de trouble. Jamais au mépris de la
vérité. Mais à plusieurs reprises, là où Jésus était dans ses droits — au moment du péage
d’entrée à Capernaüm par exemple — Jésus fait ce qu’il est socialement juste de faire. Jésus était
irréprochable, bien au-delà de ce qu’il lui était demandé. Cependant, la loi des hommes ne le
contraignait pas (Luc 11.37-41).
•
Troisièmement, les reproches sont adressés à Jésus, car un rabbin est jugé responsable de ses
disciples. A leurs yeux, les ‘fautes’ des disciples auraient dû être corrigées par Jésus, et en lui
demandant des comptes de cela, ils comptent bien percevoir et juger la mentalité de cet homme
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Évangile selon Matthieu
Matthieu 15:1-9
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dont on entend parler à Jérusalem. C’est un peu comme l'Église de Corinthe qui portait la
signature de Paul, et ce dernier avait parfois honte de cette église…
Venons-en à ce qui leur est plus spécifiquement reproché : « Pourquoi tes disciples transgressent-ils
la tradition des anciens ? Car ils ne se lavent pas les mains, quand ils prennent leurs repas. »
•
Transgresser : c’est-à-dire dépasser, se désintéresser de. En français tout simple, ce serait ‘se
ficher de’. Tes disciples ne prennent pas en compte la tradition !
•
Tradition : quelque chose qui est communiqué par préceptes, par enseignements. D’ailleurs le
mot est souvent traduit par celui « d’instruction »
•
Il ne faut pas voir dans le mot quelque chose d’uniquement négatif. Paul dit aux Corinthiens :
« Je vous loue de ce que vous vous souvenez de moi à tous égards, et de ce que vous
retenez mes instructions telles que je vous les ai données » (1 Corinthiens 11:2)
•
Le problème d’une tradition, ou d’un enseignement, c’est le problème de l’autorité : Qui a
l’autorité ultime ? C’est ainsi que Paul met en garde les Colossiens : « Prenez garde que
personne ne fasse de vous sa proie par la philosophie et par une vaine tromperie, s'appuyant
sur la tradition des hommes, sur les principes élémentaires du monde, et non sur Christ »
(Colossiens 2:8)
•
Le Judaïsme était conduit certes par la Bible, mais également par de nombreuses
considérations, transmises oralement, puis écrites au 2e siècle de notre ère. Ces écrits
devinrent le Talmud, qui comprend la tradition orale écrite (Mishnah) et divers explications de
ces textes (Gemerah). On parle ici de milliers de pages ! Des centaines et des centaines
d’instructions chargées de compléter les 613 commandements de la Torah !
•
laver les mains : Dieu a donné des instructions dans la loi à ce sujet :
•
Chaque fois que les sacrificateurs devaient entrer dans la tente du tabernacle, ils devaient se
laver les mains et les pieds, « afin qu’ils ne meurent pas » (Exode 30.17-21)
•
Chaque fois qu’un Israélite était en contact avec quelque chose ou quelqu’un d’impur, il devait
se laver les mains (Lév. 15). Et si vous connaissez ce qui est considéré comme impur, vous
réalisez que c’était une gymnastique incessante : une femme qui avait ses règles, un homme
qui avait un flux, un objet qui les aurait touchés, etc. etc.
•
Pour éviter l’impureté, la tradition avait donc établie :
Les ablutions suivantes restent en vigueur : l’immersion rituelle par les femmes après leur période menstruelle ou autre
sécrétion vaginale de sang, et après un accouchement ; la purification des ustensiles culinaires fabriqués par des nonJuifs ; l’immersion rituelle des prosélytes lors de leur conversion au judaïsme ; et l’ablution des mains avant de rompre le
pain […] qui exige un effort de l’individu qui doit verser l’eau sur sa main droite puis sur la gauche, à partir d’un récipient
à large ouverture, à bords lisses, contenant environ ¼ de log (env. 280 cl)
Et les pharisiens et les scribes sont mécontents de ce que les disciples ne respectent pas cette
vénérable tradition, établie quelques siècles auparavant. Ils rouspètent et se mettent à les juger… Et
c’est le 1er poison de la tradition. Avec une tradition en décalage avec ce que la Bible enseigne, on se
met à juger et à juger sur des critères secondaires. On se met à juger la paille quand on a une poutre
dans l’œil.
Bon, nous sommes en 2006, et à moins que vous soyez d’origine juive, il est probable que cette
question vous passe à quelques kilomètres au-dessus de la tête. Mais laissez-moi vous dire comment
une tradition peut naître et devenir une source de jugement.
•
Dans l’église où nous avons passé 1 année, 2 ou 3 responsables ont décidé de préparer un cours
sur la manière d’élever les enfants. C’était un mélange d’enseignements bibliques, et de
remarques empreintes de bon sens pour cadrer un enfant. Ce cours a eu un succès inimaginable,
et a été traduit en plusieurs langues, y compris en français sous le titre « élever les enfants selon
Dieu » que plusieurs ont suivi dans notre église.
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Jusque là tout va bien. Le problème c’est que les principes bibliques sont devenus moins
importants que les astuces du cours. Par exemple, le fait d’apprendre à un enfant à ne pas
interrompre la conversation de ses parents, mais à poser la main sur le bras d’un de ses parents,
pour lui signaler qu’il voudrait dès que possible lui dire quelque chose — est devenu un geste
distinctif de ceux qui avaient suivi le cours.
Quelques années plus tard, il y avait dans cette église, les Ezzoïtes (du nom de l’auteur du cours)
et les non-Ezzoïtes. Et les Ezzoïtes se caractérisaient pas des enfants relativement calmes, qui
posaient la main sur le bras de leurs parents quand ils voulaient les interrompre pour leur
demander quelque chose. Et chaque foi qu’un enfant un peu vif transgressait cette règle là, les
Ezzoïtes manifestaient leur mépris, et leur jugement.
Du coup, des règles humaines sont devenues des principes absolus supérieurs à tout — mêmes
aux principes bibliques.
Mais voyez-vous, l’éducation selon la Bible, ce n’est pas du clonage. Ce n’est pas que nos
enfants portent les cravates du pasteur, ni non plus qu’ils ne soient pas de tel ou tel genre. C’est
que nos enfants aiment Dieu, et aiment les autres. Qu’ils apprennent à craindre Dieu, pour qu’ils
apprennent à vivre avec discernement, qu’ils sachent se préserver de l’immoralité, qu’ils vivent de
la grâce de Dieu, qu’ils vivent en disciples de Christ !
Si mettre la main sur le bras d’un parent peut aider, comme une sorte de tuteur intermédiaire pour
comprendre la notion du respect des adultes et des parents, fort bien. Mais si c’est une loi, c’est
n’importe quoi.
Pour la fin de l’histoire, lorsque les anciens de l’église ont proposé à M. Ezzo de l’aider à corriger
son cours pour qu’il mette en avant l'Écriture et non les trucs et astuces, il a refusé. Il a quitté
l’église et a été discipliné selon les termes de Matthieu 18. Trop triste.
Il est très facile de mettre en avant des trucs et astuces, et des règlements humains. De développer
des normes extérieures ou habituelles de piété. Et ensuite de flinguer tous ceux qui n’obéissent pas à
ces règles. Quel jugement terrible risquons-nous de porter, lorsque nos jugements deviennent si
superficiels, et ne visent pas les cœurs…
Le 1er poison, c’est de juger la spiritualité des autres sur des critères artificiels…
Désamorcer la Parole de Dieu (15.3-6)
« 3 Il leur répondit : Et vous, pourquoi transgressez-vous le commandement de Dieu au profit de votre
tradition ? 4 Car Dieu a dit : Honore ton père et ta mère; et, Celui qui maudira son père ou sa mère
sera puni de mort. 5 Mais vous, vous dites : Celui qui dira à son père ou à sa mère : Ce dont j’aurais
pu t’assister est une offrande à Dieu, n’est pas tenu d’honorer son père ou sa mère. 6 Vous annulez
ainsi la parole de Dieu au profit de votre tradition. »
En bon rabbin, Jésus répond à la question par une question ! Et l’accusation du Christ est d’une
extrême gravité :
•
Il met en opposition d’un côté le commandement de Dieu et de l’autre la tradition des hommes.
•
Vous transgressez (Jésus reprend le même verbe qu’ils ont utilisé) le commandement de Dieu, au
profit d’une tradition. Vous préférez une tradition, instruction des hommes à ce que Dieu lui-même
a enseigné. Aberrant !
•
Le résultat d’une telle attitude est donné au verset 6 : « Vous annulez ainsi la parole de Dieu, »
c’est-à-dire que vous la videz de sa force.
•
C’est un peu comme si vous preniez un bâton de dynamite et que vous enleviez la poudre qui s’y
trouve… Comme un avion dont on aurait arraché les ailes… comme un chanteur sans corde
vocale… ou un pitbull sans mâchoire
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Évangile selon Matthieu
•
Matthieu 15:1-9
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Lorsqu’on remplace l’instruction de la Parole de Dieu au profit d’une parole des hommes, on
annule l'Écriture et sa puissance.
Et pour démontrer son jugement, Dieu donne un exemple :
•
D’un côté Dieu exige d’honorer son père et sa mère. Écoutez bien, les jeunes : respecter c’est-àdire = aimer profondément ; accepter leur autorité ; se conduire avec une certaine déférence. La
rébellion vaut le péché de divination, dit la Bible. Et un jeune qui méprise ses parents risque de
prendre la même pente qu’Absalom, qui est mort la tête coincée entre deux branches. Honorer à
l’époque, c’était aussi prendre soin matériellement de ses parents.
•
Mais pour ceux qui voulaient donner de l’argent au temple, les pharisiens et les scribes avaient
décidé qu’on pouvait échanger : le soutien au temple passait avant le soutien de la famille.
Jésus ne fait pas que répondre. Il contre-attaque !
•
Jésus cite les 10 commandements, et notamment le premier qui contienne une promesse (Eph
6.2) et qui fait office de charnière entre les commandements liés à Dieu et ceux liés aux hommes.
•
« Honore ton père et ta mère » (Exode 20.12). Vous savez ce que cela veut dire ? « Honore ton
père et ta mère » ! Vous savez ce que cela veut dire ? « Honore ton père et ta mère » ! Je le
répète ?!
•
Dans le cœur : un respect, une considération élevée. Que vous soyez enfant, adolescent,
jeune adulte, personne bien mûre… Honore .
•
Dans l’attitude : une réponse à leur directive, une expression d’acceptation de leur autorité,
jusqu’à la vie adulte.
•
Dans le soutien : une manière tangible de leur porter secours, surtout à l’époque où il n’y avait
aucune institution de soutien aux personnes âgées.
•
Mais devant cette instruction claire, une combine avait été trouvée : l’argent destiné à soutenir des
parents pouvaient être détourné au profit du Temple. La procédure se faisait ainsi : on déclarait
par vœu que le soutien des parents irait au temple. Et puis ce vœu pouvait être annulé de
diverses manières.
•
Cette façon de procéder permettait ainsi de se dégager moralement du devoir d’assistance avec,
certains le croyaient, la bénédiction de Dieu.
Je vous suggère ainsi que la tradition vient souvent du refus de l’homme à accepter la pensée de
Dieu. L’homme est par nature, rebelle aux instructions de Dieu. Il cherche donc des moyens de
contourner sa Parole — soit en laissant Dieu totalement de côté, soit en modifiant à son avantage,
cette Parole.
•
Cela rappelle un certain événement, qui a lieu dans un jardin, il y a de nombreuses années. Dans
ce jardin, un serpent s’est mis à parler et a dit : « Dieu a-t-il réellement dit ? »
•
Cela rappelle une autre scène, dans un désert, où Jésus Christ entend cette même voix lui
proposer de changer des pierres en pains, de faire un show près du temple, etc. Notamment en
utilisant la Bible !
Calvin a dit que l’homme était une usine à idoles (je paraphrase !). Il détrône l’autorité de Dieu, et lui
substitue la sienne. Je voudrais donner des exemples :
Un exemple tiré de l'Église orthodoxe sur les icônes :
Au sens le plus strict du mot, selon son étymologie grecque, l'icône est une image, une peinture : elle est faite sur un
panneau de bois. Les icônes sont placées dans les églises pour y recevoir la vénération des fidèles : le septième concile
oecuménique a explicité cette vénération, il ne s'agit pas d'une sorte d'idolâtrie, ni même d'une adoration de
l'image en elle-même. Cette image renvoie toujours à son modèle, et principalement à Jésus-Christ lui-même,
qui est l'icône de toutes les icônes, ainsi que le disait déjà l'apôtre Paul : il est l'icône du Dieu invisible , c'est lui seul
qui est susceptible de représenter la plénitude de la divinité, puisque le Père, source de toute divinité, ne peut ni ne doit
être représenté. Le Christ Jésus, quant à lui, est non seulement la Parole unique : il est aussi l'Image consubstantielle
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du Père, par qui l'invisible s'est rendu visible, aux yeux des hommes, permettant à ceux-ci de découvrir en lui l'image
parfaite de la condition des fils de Dieu […] dans la pratique quotidienne et dominicale des fidèles, les icônes sont des
moyens sensibles d'accéder à la contemplation de Dieu, comme à travers un miroir. [www.emonsite.com/orthodoxie2004/rubrique-1002030.html]
•
•
•
Qu’en pensez-vous ? C’est bien pensé comme système, n’est-ce pas ?
Mais il y a un gros problème : « Tu ne te feras pas de statue, ni de représentation quelconque de
ce qui est en haut dans le ciel, de ce qui est en bas sur la terre, et de ce qui est dans les eaux
plus bas que la terre. Tu ne te prosterneras pas devant elles, et tu ne leur rendras pas de
culte (Exode 20.4-5a) »
Peu importe la noblesse de la motivation. Cette tradition est hostile à Dieu.
On m’a demandé si je croyais que Jean-Paul II était chrétien. Fort heureusement, il ne m’appartient
pas de statuer sur ce sujet. Mais Jésus Christ dit une chose : nul ne peut servir deux maîtres à la fois.
Il n’y en a qu’un. Jésus affirme être le seul chemin qui mène à Dieu. L’apôtre Paul enseigne qu’il n’y a
qu’un seul médiateur, intermédiaire, entre Dieu et les hommes : le Christ Jésus homme (1 Tim 2.5).
L’homme ne peut passer que par Jésus Christ pour accéder au Père.
•
Or quel était le slogan de Jean-Paul II ? Totus Tuus Ego Sum Je Suis Tout à Toi (Marie.) Son
testament, commencé en 1979, est touchant, mais il révèle un attachement profond à Marie : « je
remets ce moment, comme tout le reste, entre les mains de la Mère de mon Maître : Totus Tuus
(tout à toi). Je laisse entre les mêmes mains maternelles tout et tous ceux auxquels ma vie et ma
vocation m'ont liés. Je laisse surtout l'Église entre ces mains, et aussi ma Nation et l'humanité
entière. »
•
Cette tradition se retrouve dans le Nouveau Catéchisme Catholique, dont je vous livre trois
extraits :
"Enfin, la Vierge immaculée, préservée par Dieu de toute atteinte de la faute originelle, ayant accompli le cours de sa vie
terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire du ciel, et exaltée par le Seigneur comme la Reine de l'univers" Article
#966, p. 254
"Après son Assomption au ciel, son [Marie] rôle dans le salut ne s'interrompt pas : par son intercession répétée elle
continue à nous obtenir les dons qui assurent notre salut éternel" Article #969, p. 255
"C'est pourquoi la bienheureuse Vierge Marie est invoquée dans l'Église sous les titres d'avocate, d'auxiliatrice, de
secourable, de médiatrice." Article #969, p. 255
•
•
Le titre de reine de l’univers est très gênant, car il est tellement proche des déesses païennes,
dont Jérémie reprochait le culte que les femmes lui vouaient (Jér 7 & 44).
Les hommes peuvent être les plus sincères, peuvent avoir les ambitions les plus nobles, mais à
partir du moment où c’est leur autorité qui compte, ils vident la Parole de Dieu de son autorité.
Et les Évangéliques, est-ce qu’ils ont des traditions qui détrônent l’autorité de la Bible ? Assurément !
•
Lorsque des hommes se croient prophètes, écrivent des livres ou s’expriment en public précédés
de « Ainsi parle L'Éternel, » ils créent immédiatement une double autorité : celle orale, de leur
prophétie, et celle révélée de la Parole de Dieu. Et qui voudrait s’opposer à la parole des
prophètes ?
•
Une autre chose qui me trouble, et je ne sais pas encore comment le définir. C’est une sorte de
rationalisation à grande échelle du comportement des hommes. Les psychologies modernes, de
plus en plus, libellent des comportements et des modes de pensées de façon médicale et neutre.
Dieu nomme comme péché certains comportements, mais les psychologues leur donnent un
autre nom. Et nous sommes tenus, je crois, en tant qu’évangéliques, dans notre volonté d’aider
ceux qui souffrent, d’échanger le témoignage de ce que Dieu dit contre ce que l’homme dit. Dans
ma propre lutte contre le péché, j’aime bien voir mes échecs comme le produit de mon
environnement. Mais Dieu m’encourage à les reconnaître comme ce qu’ils sont : des péchés. Et à
m’en repentir, et me relever, et m’entourer de frères qui prieront avec moi.
•
Est-ce qu’il y aurait d’autres formes de traditions chez les évangéliques ? On y arrive dans un
instant !
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Comprenez bien qu’il ne s’agit pas de définir des péchés plus grands dans l’une ou l’autre église de la
chrétienté. On ne parle pas non plus de notions d’interprétation assez fines qu’il faut débattre avec
sagesse et il existe des points de vues différents légitimes. Nous parlons ici de vastes principes qui
s’attaquent à l’autorité même de la Parole.
Dernière remarque, sous forme d’une question. Est-ce que Jésus se contredit lorsqu’il dit : « Celui qui
aime père ou mère plus que moi n’est pas digne de moi, et celui qui aime fils ou fille plus que moi
n’est pas digne de moi » (Matt 10.37) ? Ne fait-il pas comme les Pharisiens ? Absolument pas !
•
Les régulations halakhiques parlent d’un fils qui ne veut pas honorer ses parents — La phrase de
Jésus présuppose des parents qui s’opposent à la foi de leur fils.
•
Jésus Christ n’ajoute pas à la Loi. Il l’accomplit. Il incarne, en Serviteur de L'Éternel, l’ensemble
de la Parole qu’il a transmise à Moïse. Il est Maître et Roi, celui qui dit ce qui est droit de ce qui ne
l’est pas.
Créer une spiritualité de façade (15.7-9)
« 7 Hypocrites, Esaïe a bien prophétisé sur vous, quand il a dit: 8 Ce peuple m’honore des lèvres, Mais
son coeur est éloigné de moi. 9 C’est en vain qu’ils m’honorent, en enseignant des préceptes qui sont
des commandements d’hommes. »
La condamnation du Christ est sans appel : « hypocrites. »
•
Le terme désigne, en grec classique, un acteur. Quelqu’un qui agit extérieurement d’une certaine
manière, alors qu’à l’intérieur, son cœur dit l’inverse.
•
Aucun péché du Nouveau Testament n’est dénoncé avec plus de vigueur que celui-ci dans les
Évangiles. Le Dictionnaire Emmaüs dit : « Elle est le danger qui guette toute piété devenue
habitude, dans laquelle on a peu à peu perdu de vue la distinction entre l’authentique et
l’apparence. On se contente de la forme, tombant ainsi sous le jugement de Dieu »
Parce que ce péché est le plus sérieusement condamné, il faut bien le cerner :
•
Matthieu 6:2 Faire l’aumône en attirant la trompette.
•
Matthieu 6:5 Prier pour se montrer aux hommes.
•
Matthieu 6:16 Jeûner en montrant sa souffrance !
•
Matthieu 7:5 Juger la paille quand on a une poutre
•
Matthieu 23:13 Empêcher les gens d’entrer dans le royaume des cieux.
•
Matthieu 23:14 Prendre l’argent des veuves en utilisant la religion.
•
Matthieu 23:23 Majorer les commandements mineurs, et minorer les commandements majeurs (le
droit, la miséricorde et la fidélité)
•
Matthieu 23:25 Purifier selon les rites, sans gérer la rapine et l’intempérance.
De ces textes, on peut établir que deux aspects définissent l’hypocrisie :
•
Le jugement des autres sur des aspects secondaires alors qu’on ne vit pas selon Dieu
•
Le déséquilibre dans sa compréhension de l’essentiel.
Jésus prolonge son accusation en citant le prophète Esaïe qu’il applique à leur cas (29.13). Cela a dû
être un choc pour les pharisiens. Eux pensaient défendre la foi et la religion du Dieu d’Abraham. Mais
Jésus indique qu’ils ne faisaient que préserver ce que déjà Esaïe voulait qu’ils éliminent. Le judaïsme
selon Dieu était un judaïsme du cœur — on retrouve d’ailleurs l’expression de circoncision du cœur
dès le livre du Deutéronome « Vous circoncirez donc votre coeur et vous ne raidirez plus votre
nuque » (10:16)
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Évangile selon Matthieu
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La religion du cœur, c’est celle qui engage l’ensemble de l’être humain. Le cœur, c’est la volonté, les
pensées, le centre de la vie morale et spirituelle, l’être intérieur dans son ensemble. Non que les
manifestations extérieures ne soient pas importantes, mais elles procèdent du cœur. Si le cœur
marche selon l'Éternel, alors la vie extérieure s’accordera bien avec le cœur. A l’inverse, si le cœur est
ignoré, ce ne sont pas les prières publiques, les offrandes en argent, la participation au culte, qui
plairont à Dieu.
Lors d’un message, Spurgeon s’est exclamé : « je ne sais pas combien d’entre vous seriez encore
chrétiens s’il n’y avait pas de culte le dimanche ! » En d’autres termes, notre attachement personnel à
Christ est central à la vie chrétienne. Tout le reste (le culte, les prières, les ministères, etc.) sont des
moyens soit de donner à d’autres, soit de recevoir du Seigneur de quoi se fortifier dans la grâce.
Les traditions ou les formes ne sont pas nécessairement mauvaises. Mais elles sont dangereuses
lorsqu’elles masquent l’absence de vraie vie avec Dieu. La manière de célébrer le culte reflète une
tradition :
•
Lorsque l’église a démarré à l’hôtel Arcade… l’animateur parlait, demandait quels chants étaient à
chanter, et en fonction des demandes, les musiciens accompagnaient ces chants… puis il y avait
un message.
•
Notre forme actuelle : 5 à 7 chants, un temps de prière et puis un message . C’est déjà une
tradition — que la plupart des églises partagent. De toutes les injonctions que nous trouvons dans
le Nouveau Testament et qui concernent la vie d’une église, seules quelques-unes trouvent leur
expression au sein du culte.
•
Si nous prenons l’exemple que nous donne Actes : « Ils persévéraient dans l’enseignement des
apôtres, dans la communion fraternelle, dans la fraction du pain et dans les prières » (2.42).
•
L’enseignement des apôtres se retrouve dans la prédication
•
La communion fraternelle est rattachée aux groupes de maison
•
La fraction du pain se retrouve dans la célébration de la cène
•
Les prières = en partie au culte et en partie dans les groupes de maison.
La vie chrétienne, c’est vivre en Christ, avec Christ. Attention à ne pas confondre cette vie là, avec
celle plus extérieure ou publique de la vie d’assemblée, qui est commandée par Christ, mais comme
soutien de cette vie intérieure.
Conclusion
4 recommandations :
•
Toujours mettre en avant la Parole de Dieu bien interprétée.
•
Toujours mettre en avant le cœur à cœur avec Dieu.
•
Toujours être prêt à se remettre en question sur la Parole de Dieu. Cf. la discussion sur la
cène.
•
Distinguer les principes, des méthodes. L’une des critiques que j’entends le plus fréquemment
sur la vie de l’église c’est le manque de discipolat. On est tous d’accord que le Seigneur veut
former des disciples. Qu’il faut transmettre à des hommes fidèles le bon dépôt de la foi. Or, quand
les gens pensent à discipolat, ils pensent souvent à une méthode. Une méthode spécifique. Et si
une autre est utilisée, il ne pensent pas que cela réponde au besoin qu’ils ont identifié.
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Évangile selon Matthieu
Matthieu 15:1-9
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