Problèmes posés par les stéroïdes anabolisants dans le domaine

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Problèmes posés par les stéroïdes anabolisants dans le domaine
Problèmes posés
par les stéroïdes anabolisants
dans le domaine des sports *
par le professeur Arnold H. Beckett,
membre de la commission médicale du ClO, professeur et responsable
du Département « Pharmacie » du Collége de Chelsea**
Le contrôle de l’usage des stéroïdes anabolisants a été effectué lors des Jeux
Olympiques de Montréal, en 1976. Avec l’accord de la commission médicale
du CIO et de huit Fédérations Internationales sportives, des échantillons
d’urine ont été prélevés, avant l’ouverture des Jeux, sur des concurrent sélectionnés au hasard parmi ceux de ces sports particuliers. Trois disqualifications
s’ensuivirent.
Pendant les Jeux, la commission exécutive du CIO a approuvé la proposition
de la commission médicale du CIO de soumettre au contrôle des stéroïdes
anabolisants, à la fin des Jeux, les échantillons prélevés au cours des Jeux
selon les procédures normales de sélection des contrôles de dopage traditionnels. Ces contrôles aboutirent à la disqualification de cinq nouveaux concurrents, dont plusieurs médaillés.
Les procédures de contrôle des prélèvements et des échantillons, de même que
celles utilisées au cours des vérifications sur le deuxième échantillon « B »
d’urine, sont sujettes très exactement aux mêmes procédures d’inspection et de
vérification que celles adoptées pour les contrôles « normaux » de dopage.
Sans aucun doute, il existe à l’heure actuelle des problèmes causés par le
long délai qui s’écoule inévitablement entre le moment du prélèvement des
échantillons d’urine et la fin du premier examen et de l’analyse de contrôle sur
l’échantillon « B », quand un grand nombre d’échantillons doivent être soumis
au contrôle des stéroïdes anabolisants. Les recherches en cours tendent à
raccourcir ce délai et à allonger la période s’écoulant entre l’interruption de
la prise des stéroïdes anabolisants et l’incapacité de détecter ces drogues
dans l’urine d’un concurrent désigné pour subir un contrôle de dopage.
Introduction
La rapide augmentation du poids qui intervient à la puberté est due à une augmentation de la sécrétion d’hormones stéroïdes
sexuelles, testostérone chez les garçons,
œstrogènes et progestérone chez les filles.
La production de testostérone confère aux
individus masculins une nature plus musclée
en favorisant I’utilisation des composés de
I’azote pour former des protéines organiques, dont les muscles (action anabolisante), et en se comportant comme une hormone mâle par les actions virilisantes qu’elle
exerce (action androgène). Son administration à des individus de sexe féminin provo* Exposé présenté au cours des « Journées de médecine sportive » organisées par la Solidarité
Olympique du ClO à Porto Alegre.
** Université de Londres, Manresa Road, Londres
SW3, Grande-Bretagne.
que I’apparition de caractéristiques masculines, soit le développement des muscles, la
croissance de poils, voix plus grave, peau
plus grasse.
La testostérone est un stéroïde (fig. 1); des
modifications chimiques du noyau peuvent
permettre de séparer partiellement I’action
anabolisante de I’action virilisante du
produit. L’hormone naturelle est métabolisée
en composants inactifs lorsqu’on I’administre par voie orale et doit donc être donnée par injections. L’addition d’un composant de substitution de type 17- α-alkyle
donne des composés comme par exemple la
méthyltestostérone (fig. 3) dont le métabolisme est moins rapide par voie orale et qui
sont donc actifs par cette voie. (On trouvera
à la fig. 3 quelques exemples de stéroïdes
anaboliquement actifs par voie orale.) Cette
modification entraîne également un certain
591
santes mais atténue les actions virilisantes.
Ces produits agissent par voie parentérale
(fig. 2) mais non orale tant que I’on n’y
introduit pas également le groupe 17-α-alkyle (exemples fig. 3).
Emploi en athlétisme
C’est dans les années 30 que I’on a signalé
I’action anabolisante de la testostérone sur
des animaux de laboratoire. Par la suite, on
a préparé les produits de synthèse indiqués
ci-dessus dans le cadre de la recherche de
médicaments dont I’action anabolisante
Testosterone
Fig. 1
degré de séparation entre les actions anabolisante et virilisante.
La modification du noyau A de méthyltestostérone abaisse fortement I’effet virilisant (fig.
3) et, pour autant qu’un groupe 17- α-alkyle
soit présent, ces produits administrés oralement sont actifs (exemples fig. 3).
L’élimination de la testostérone du groupe
19-méthyle (fig. 1) pour donner les 19-norstéroïdes (fig. 2) préserve les actions anaboli-
Anabolic Steroids Active Orally
Methyltestosterone
Methandienone
(Dianabol)
Anabolic Steroids Active
Stanazolol
(Stromba)
Methenolone o’enanthate Stanolone
(Androlone, Neodrol)
(Primobolan)
17 α-ethyl-4-estren-17ßol-3-one (Nilevar)
17 α-ethyl-4-estren-17ß-ol
(Orabolin)
Fig. 3
Testosterone
19-nortestosterone
Nandrolone phenylpropionate
R = OC (CH 2 ) 2 Ph (Durabolin)
Nandrolone decanoate
(Decadurabolin)
R = OC C 9 H 9
Fig. 2
592
serait intensifiée et I’action virilisante
diminuée; les « stéroïdes anabolisants » ont
été introduits en médecine pour retenir
I’azote organique dans le corps et constituer
des protéines chez des patients manquant
de poids.
Des athlètes, et surtout ceux participant à
des épreuves de lancer, ont commencé à en
faire usage vers la fin des années 50 pour
tenter d’améliorer leurs performances. Vers
1964 et aux Jeux Olympiques de Tokyo,
beaucoup d’informations ont circulé sur
I’abus de ces médicaments par les sportifs.
Un ancien champion olympique du marteau
déclarait en 1973 en audience devant une
sous-commission d’une commission du
Sénat des Etats-Unis: « Juste avant les Jeux
Olympiques de 1964 à Tokyo, il semblait
qu’autour de moi de plus en plus d’athlètes
absorbaient des steroïdes pour se préparer
aux compétitions, et I’on avait I’impression
de se placer dans une position nettement
désavantageuse en ne s’embarquant pas
dans le train de la médecine sportive. » A
I’époque, ce sont surtout les athlètes des
pays « pharmaceutiquement avaricés » qui
étaient en cause.
Depuis 1964, I’abus de stéroïdes anabolisants s’est rapidement étendu à de
nombreux pays et à presque toutes les disciplines sportives. On’ a par exemple signalé
récemment (Ljungovist 1975) qu’en Suède,
en 1973, 75% des lanceurs avaient recours
à ces médicaments, ainsi que 31% de la
totalité des athlètes ayant répondu au questionnaire.
Les stéroïdes anabolisants améliorent-ils les
performances?
Les informations sur I’amélioration effective
des performances par les stéroïdes anaboli-
sants sont contradictoires. A I’occasion d’essais avec des athlètes entraînés, O’Shea
(1971) Johnson (1972) ainsi aue Freed et
Ranks (1975) font état d’une amelioration
des performances lorsque ces médicaments
sont utilisés. Ces résultats sont en désaccord avec ceux de Fowler (1965) et de
Casner (1971) qui n’ont pas constaté d’amélioration lors d’études portant sur de jeunes
hommes en bonne Santé mais qui n’étaient
pas des athletes très entrain&. Les
stéroïdes anabolisants associés à un régime
riche en protéines font gagner du poids aux
athlètes, poids dû pour une bonne part à
une retention d’eau. Toutefois, comme la
masse et I’inertie interviennent dans les
disciplines de lancer, ce gain de poids peut
s’avérer avantageux.
Des athletes ont déclaré que les stéroïdes
anabolisants diminuaient la sensation de
fatigue et leur permettaient de s’astreindre à
des seances d’entraînement plus fréquentes
et plus dures. On signale également une
diminution des accidents en cours d’entraînement et une guérison plus rapide à la
suite de ces accidents. Une evaluation vraiment scientifique fait toutefois défaut.
II est possible que les effets adrénogènes de
ces médicaments sur le système nerveux
central donnent un certain avantage à ceux
STÉROÏDES ANABOLISANTS - MÉTHODE DE DÉTECTION
Préparation du conjugué
1. Former un dérivé stéroïde-3-(O-carboxyméthyle) oxime du stéroïde.
2. Former un mélange anhydride, puis lier à de I’albumine de sérum humain pour former
le conjugué.
lmmunisation
1. Faire du conjugué une émulsion et I’injecter à des lapins — voie sous-cutanée en
10 à 15 points dorsaux.
2. Procéder à un rappel après 6 semaines — voie sous-cutanée en 3 points dorsaux.
3. Contrôler un prélèvement de sang pris à I’oreille pour son titre et sa spécificité.
4. Récupérer le sang, laisser coaguler, tirer le sérum, ajouter de I’acide de sodium
pour la conservation et entreposer le produit, c’est-à-dire I’ANTISÉRUM, à 4°C jusqu’à
utilisation.
Préparation du marqueur radioactif
1. Former un anhydride mélangé au stéroïde-oxime.
2. loder I’histamine a I’iode maraud.
3. Conjuguer I’histamine au stéroïde-oxime en mélange avec I’anhydride.
4. Purifier le conjugué histamine-stéroïde marqué 125 l par chromatographie en couche
mince.
5. Diluer le produit à I’éthanol et I’entreposer sous forme de solution dans l’éthanol.
6. Pour I’ESSAI, prélever une partie de la solution, évaporer et redissoudre le produit dans
le tampon d’essai phosphate/albumine.
Fig. 4
593
qui les utilisent en les rendant plus agressifs
et plus compétitifs, par leur action euphorisante et insensibilisante face à la douleur.
Quels sont les effets secondaires et les
dangers de I’emploi des stéroïdes anabolisants?
Les effets secondaires des stéroïdes anabolisants sur les organes sexuels ont été
clairement déterminés sur des animaux.
Chez le rat, ils entraînent une réduction de
la spermatogénèse et exercent des effets
marqués sur les testicules et les organes sexuels annexes (Kincl 1965); plus récemment
Rogozkin (1975) a également constaté une
diminution de poids de la prostate, des
testicules et des vésicules séminaux ainsi
qu’une diminution de la sécrétion de ces
derniers chez le rat. La production de
testostérone et de gonadotrophine est
réduite par des doses importantes de
stéroïdes anabolisants chez les rats (Boris,
1969). II faut s’attendre à ce que les
stéroïdes anabolisants affectent les organes
sexuels chez I’homme; chez deux patients,
en absorbant à haute dose sous forme
d’oxyméthalone et de méthandrosténolone,
Harkness (1975) a pu mettre en évidence
une réduction de la production de testostérone et de gonadotrophine ainsi que certaines indications d’une perte de spermatogénèse.
Les stéroïdes anabolisants peuvent aussi
avoir des répercussions sur le foie. Sous
forme oralement active, ils manifestent une
toxicité pour cet organe et peuvent entraîner
la jaunisse (Wynn, 1975). L’absorption prolongée de stéroïdes anabolisants peut être
mise en rapport avec des tumeurs hépatiques allant jusqu’au cancer (Farrell, 1975).
On a signalé des cas de jaunisse, prostatisme, hypertension, hémorragie gastrointestinale, diminution mais parfois augmentation de la libido et oligospermie en liaison
avec I’emploi de stéroïdes anabolisants
(Freed et Banks, 1975). Lors d’études portant
sur 13 athlètes suivant un entraînement
intensif auxquels on a administré 10 et 25
mg par jour de méthandiénone, Freed (1975)
a constaté une forte incidence d’effets secondaires dont des migraines, hypertensions, troubles urinaires, élévations du taux
de cholestérol sérique et de transaminase
alanine. Les taux de cholestérol ont également monté, mais c’est peut-être un effet du
regime plus que des médicaments.
Wynn (1975) a signalé que les stéroïdes
anabolisants actifs par voie orale déclenchaient « une foule d’effets indésirables et
594
Testosterone
Norethandrolone
also ethylestrenol
17 α-methyl-testosterone
also methandienone
stanazolol
ozymetholone etc.
Radioimmunoassay of Anabolic Steroids.
Fig. 5
devraient être considérés comme des
produits très dangereux à n’employer que
sous stricte surveillance médicale, et auxquels n’accorder même en ce cas qu’une
place restreinte en thérapeutique ». Ils perturbent le métabolisme des hydrates de
carbone et des lipides et peuvent être soupçonnés d’accélérer l’évolution de I’athérosclérose génératrice d’affections et attaques
cardiaques et de troubles de la circulation
périphérique. Par exemple, la méthandiénone a provoqué chez dix sujets en bonne
santé une détérioration de la tolérance au
glucose associée à une baisse importante
de la teneur du sang en sucre à jeun; les
taux de triglycéride dans le plasma en circulation ont augmenté malgré une élimination plus poussée de triglycéride chez dix
femmes en bonne santé. Par contre, les stéroïdes anabolisants injectables ont peu
d’effets secondaires tant qu’on ne les
administre pas à haute dose, ce qui entraîne
chez les femmes une virilisation pouvant se
manifester par des troubles menstruels,
I’hirsutisme et une baisse de ton de la voix.
L’administration de stéroïdes anabolisants à
des enfants avant la puberté peut entraîner
un scellement prématuré des plaques
épiphysaires des os longs et un arrêt consécutif de la croissance. Bien que la masse
musculaire puisse être augmentée par
I’emploi inconsidéré de stéroïdes anabolisants associé à un régime riche en protéines, la résistance des tendons n’augmente
pas dans la même proportion et il peut en
résulter des déchirements de tendons lors
d’exercices vigoureux.
Conclusions sur I’efficacité et les dangers
de I’emploi des stéroïdes anabolisants par
les sportifs
Un colloque international sous l’égide de la
FIMS à Londres en 1975 sur les « Stéroïdes
anabolisants et le sport » est parvenu aux
conclusions suivantes:
1. L’action des stéroïdes anabolisants chez
des athlètes en bonne santé soumis à
I’entraînement n’est pas pleinement comprise. Des études font apparaître des
résultats contradictoires en matière de
mensurations corporelles, de mesures de
la force et d’amélioration des performances. Il semble toutefois que leur emploi
soit répandu dans certains sports. On
relève la difficulté des processus expérimentaux, surtout due à des considérations de déontologie.
2. Des études biochimiques révèlent des
effets secondaires des stéroïdes anabolisants tels qu’une insuffisance hypophysaire et des atteintes du foie et de la
prostate. Il convient de tenir compte par
ailleurs des effets psychologiques. L’augmentation de la masse musculaire par les
stéroïdes anabolisants est essentiellement due à une rétention d’eau.
3. Les méthodes de détection des stéroïdes
anabolisants, ainsi que des hormones se
présentant naturellement, sont efficaces,
et nous militons en faveur d’une multiplication des laboratoires d’analyse homologués en vue d’éliminer le recours aux
médicaments par les sportifs.
Ce colloque fut suivi d’une réunion de la
Commission technique de la FIMS à laquelle
assistaient des représentants de I’AGFI (Assemblée Générale des Fédérations Internationales) où furent entérinées les resolutions
suivantes:
1. La réunion, compte tenu des preuves apportées au Colloque de Londres (19.2.75)
et antérieurement, condamne la prescription de stéroïdes anabolisants par des
médecins à des personnes en bonne
Santé pratiquant des sports.
2. La réunion recommande aux Fédérations Internationales de mettre en œuvre
des méthodes efficaces, adaptées à chaque discipline sportive et tout au long de
l’année, pour lutter contre I’emploi des
stéroïdes anabolisants.
Détection des stéroïdes anabolisants
Il a été décidé de recourir à des méthodes
utilisant pour fluide biologique I’urine,
comme pour le contrôle du dopage pour
d’autres agents.
Un bon nombre de stéroïdes anabolisants
subissent chez I’homme un métabolisme
poussé et leurs conjugués, à savoir les
glucuronides ou sulfates de la drogue mère
Fig. 6
595
STÉROÏDES ANABOLISANTS - TIRAGE RADlOlMMUNOLOGlQUE
1. Verser I’antisérum dilué (0,3 ml) dans des éprouvettes en plastique refroidies à I’avance
(les anticorps se déposent sur les parois des éprouvettes).
2. Aspirer le contenu des éprouvettes, puis laver les éprouvettes avec le tampon
phosphate/albumine (0,3 ml).
3. Aspirer le tampon de lavage.
4. Verser alors dans ces éprouvettes 0,1 ml de tampon seul ou le prélèvement dans
l’éprouvette de titrage ou le témoin dans I’éprouvette de titrage.
5. Après 1 à 2 heures, verser dans chaque tube I’histamine 125 I stéroïde dans I’éprouvette
de titrage (0,1 ml). Mélanger le contenu et laisser reposer une nuit à 4° C.
6. Aspirer le contenu de chaque éprouvette et laver les éprouvettes à I’eau du robinet
(0,3 ml).
7. Aspirer I’eau de lavage et procéder au comptage des éprouvettes au spectromètre à
rayons gamma.
Fig. 7
et ses métabolites, sont rejetés dans I’urine
de préférence aux formes libres de ces
composés. Cependant, un faible pourcentage du médicament sous sa forme initiale
est excrété dans I’urine avec presque tous
les stéroïdes anabolisants.
La structure des stéroïdes anabolisants est
légèrement différente de celle des hormones
stéroïdes naturelles; on joue sur cette différence pour le dépistage et I’identification
définitive.
Tests de dépistage
Les techniques faisant appel à la radio-immunisation sont très sensibles; Brooks
(1975) et Sumner (1974) ont mis au point des
antisérums (fig. 4) présentant la spécificité
voulue pour diverses caractéristiques des
stéroïdes anabolisants.
Les anticorps appropriés ont été obtenus
par liaisons covalentes entre un stéroïde
anabolisant, (par ex. la 17-α -méthyltestostérone), et une protéine pure, et injection de ce
produit à des lapins. Les animaux ont fourni
des anticorps opposés à cette substance
étrangère; I’antisérum ainsi obtenu réagit
non seulement à la 17-α -méthyltestosterone
mais aussi à d’autres 17-α -stéroïdes tels
que méthandiénone, stanozolal et oxyméthalone (fig. 5), mais pas aux stéroïdes
anabolisants 17- α-éthyle. On a relevé une
faible réaction croisée avec la testosterone,
mais pas avec l’acétate de testostérone; en
passant par un dérivant approprié, on est
parvenu à rendre ce test spécifique pour les
stéroïdes 17-α-méthyle.
On a également produit des antisérums correspondant aux stéroïdes 17-α-éthyle avec
un antigène à base de noréthandrolone et
de protéines (fig. 5).
596
Récemment, des antisérums contre les 19nor stéroïdes injectables (fig. 2) ont pu être
mis au point (Brooks, communication
privée).
Cette méthode de dépistage (fig. 6) procède
par extraction d’un petit prélèvement d’urine
au dichlorométhane, lavage de l’extrait,
évaporation et séchage, acétylation des
produits, dissolution des substances acétylées en solution tampon et passage de la
solution au titrage radioimmunologique (fig.
7). A ce dernier stade, on fait appel à la
propriété qu’ont les anticorps de former un
enduit sur des éprouvettes en plastique, ce
qui permet une séparation rapide des stéroïdes libres et liés. On effectue finalement
le comptage sur les éprouvettes dans un
spectomètre à rayons gamma; ce comptage
donne les liaisons des éprouvettes témoin,
étalon et prélèvement d’après lesquelles on
effectue les calculs conformément à la
fig. 8.
Cette méthode est simple et très sensible
mais demande trois jours dans des conditions de travail normales. On ne I’envisage
que pour le dépistage car elle ne permet pas
d’identifier le stéroïde anabolisant présent
mais seulement sa catégorie.
Tests définitifs
Les tests définitifs font appel à la chromatographie gazeuse et à la spectrographie
de masse pour détecter la drogue mere et
ses métabolites dans I’urine (Ward, 1975).
En général, ce test n’est pratiqué que
lorsque le titrage radioimmunologique a
donné des résultats positifs.
On extrait les stéroïdes de I’urine à I’aide
d’une résine échangeuse d’ions qui sera
fractionnée et transformée en éthers de
triméthylsilyl avant analyse. Les spectres de
masse de la méthandiénone (« Dianabol ») et
de son principal métabolite dans l’urine sont
donnés à la fig. 9.
Ces déterminations demandent du temps et
exigent un materiel coûteux, mais le résultat
en est sans équivoque.
Application des règles anti-dopage aux
stéoïdes anabolisants
La prévention de l’usage non autorisé des
stéroïdes anabolisants pose un problème
different des autres stimulants. Ces derniers,
absorbés juste avant une compétition, donnent des résultats positifs dans des prélèveleurs grandes compétitions internationales.
Toutefois, cela nuirait certainement à leurs
performances à l’entraînement, et une interSTEROIDES ANABOLISANTS CALCUL DU TITRAGE
RADIOIMMUNOLOGIQUE
1. Nombre de comptages sur les éprouvettes de
(a) tampon
(anticorps+stéroïde marqué) Co
(b) échantillon
(échantillon + anticorps + stéroïde) Cs
(c) étalon
(échantillon + anticorps + stéroïde
marqué) CST
2 . Corrélation entre comptages sur base de
pourcentage.
3 . Tracé de CST/Co sur papier standard loglinéaire pour obtenir une courbe étalon.
4 . Lecture des quantités contenues dans
les échantillons d’après la courbe étalon
à l’aide du Cs/C o obtenu pour chaque
échantillon.
Fig. 8
ments d’urine effectués juste après l’épreuve. Par contre, un concurrent pourra prendre
des stéroïdes anabolisants pendant son
entraînement, puis cesser d’en absorber
deux ou trois semaines avant une épreuve;
un prélèvement d’urine au moment de
l’épreuve ne donnera pas forcément un
résultat positif, bien que le concurrent
puisse encore profiter de l’usage non autorisé de ces médicaments, au moins en termes
de poids.
Malgré ces problèmes et ceux que pose
l’analyse, l’IAAF a inclus les stéroïdes anabolisants dans sa liste des familles de médicaments interdits en 1970. Cette réglementation imposant l’identification de la substance ayant servi au dopage, il aurait fallu
recourir à la chromatographie gazeuse et à
la spectrographie de masse alors que,
malheureusement, tous les médicaments n’avaient pas été soumis à cette analyse pour
autoriser des tests définitifs. On ne pouvait
donc appuyer des decisions sur des résultats qui, pendant quelques années, n’en
étaient qu’au stade de la recherche.
En 1974, la commission médicale du CIO a
interdit l’emploi de stéroïdes anabolisants et
a commencé par définir un résultat positif
comme: « le fait de ne pas passer un test
d’absence de stéroïdes anabolisants dans
l’urine, mesurée par titrage radioimmunologique, effectué à l’aide de plusieurs antisérums employés de maniére selective selon
les structures des molécules des stéroïdes
anabolisants. » A l’époque, les méthodes de
chromatographie en phase gazeuse liquide,
alliée à la spectrographie de masse n’étaient
pas suffisamment au point.
En avril 1975, la commission médicale du
CIO a spécifié le titrage radioimmunologique pour le dépistage et rendu obligatoire
la preuve par la chromatographie liquide gazeuse et la spectrographie de masse pour
déterminer sans équivoque la structure du
stéroïde utilisé. Il a été convenu que le test
des stéroïdes anabolisants serait appliqué
aux Jeux Olympiques de 1976 à Montreal.
L’IAAF a encouragé ses organismes membres à pratiquer les tests antidopage relatifs
aux stéroïdes anabolisants lors des grandes
rencontres internationales. On a procédé à
ces tests lors des competitions de la Coupe
européenne, et des résultats positifs ont été
enregistrés.
Il reste admis que les athlétes pourraient
continuer à employer les stéroïdes anabolisants impunément à condition de cesser
d’en prendre deux ou trois semaines avant
597
ruption temporaire du traitement entraînerait un genre de dépression du système
nerveux central qui aurait tendance à
annuler tout bénéfice éventuel du recours
antérieur non autorisé aux stéroïdes.
Pourquoi interdire les stéroïdes
anabolisants?
Cette interdiction repose sur plusieurs raisons déontologiques:
1. L’emploi de médicaments est contraire
aux principes fondamentaux du sport qui
veulent que les concurrents mesurent
leur talent et leur force en fonction de
leurs aptitudes naturelles.
2. La compétition sportive doit se dérouler
entre concurrents et non entre pharmaciens et médecins se servant d’eux
comme de cobayes.
3. ll est contraire à la médecine d’administrer un médicament à une personne
en bonne Santé, sauf à des fins scientifiques et sur consentement donné en connaissance de cause.
Viennent s’y ajouter d’importantes raisons
d’ordre pratique:
1. Les stéroïdes anabolisants ont de nombreux effets secondaires, même administrés à dose unique. Les effets à long
terme de doses massives absorbées pendant de longues périodes peuvent avoir
de lourdes conséquences ne se révélant
éventuellement que bien des années
après I’abus de ces produits.
Fig. 9
598
2. Les cas signalés d’agressivité imputables
aux stéroïdes peuvent constituer un
risque pour les autres concurrents.
Payne notait en 1975 que « l’absorption de
stéroïdes exerce très certainement des effets
psychologiques dont les plus grands bénéficiaires sont les concurrents nerveux et médiocres qui y puisent soudain la confiance
leur permettant de sortir de leur médiocrité.
Cependant, la majorité des athlètes à qui
j’en ai parlé accepteraient les tests de tout
cœur s’ils pouvaient assurer qu’aucun
drogué au monde n’échappe à cette détection. Dans l’ensemble, les athlètes eux-mêmes veulent se débarrasser des stéroïdes. »
C’est aux hauts responsables des sports et
aux techniciens et médecins du contrôle du
dopage qu’incombe la lourde responsabilité
d’assurer que le sport soit libéré de cette
excroissance cancéreuse que représente le
recours aux stéroïdes anabolisants.
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