LES MISÉRABLES
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LES MISÉRABLES
LES MISÉRABLES D’après Victor Hugo De et par Karine Birgé, Marie Delhaye COMPAGNIE KARYATIDES Mardi 10 et mercredi 11 mai 2016 • 20H THÉÂTRE D’OBJETS DÈS 9 ANS Revue de Presse Les Misérables a reçu le Prix de la Ministre de la Culture aux Rencontres de Huy 2015 ainsi que le coup de foudre de la presse. TÉLÉRAMA - Emmanuelle Bouchez - 14 septembre 2015 RUEDUTHEATRE.COM - Michel Voiturier - 14 juillet 2015 La Terrasse - Manuel Piolat Soleymat - 24 février 2015 Suricate Magazine - Daphné Troniseck 15 janvier 2015 La Première, émission "Entrez sans frappez" Catherine Makereel - 14 janvier 2015 Le Soir - Catherine Makereel, 13 janvier 2015 La Libre - Laurence Bertels - 13 janvier 2015 Toute l’oeuvre d’Hugo, avec la révolution de 1848 pour toile de fond (ses barricades et Gavroche au premier plan) en soixante-dix minutes chrono... Et un récit serré sur l’espace réduit d’une table qui fait volte-face, et dont les inversions rythment de manière foudroyante les changements de lieux et d’époques. Agnès Limbos, fondatrice de la compagnie belge Karyatides, s’était déjà mesurée à Carmen ou à madame Bovary. Ici, Jean Valjean et Javert, Cosette et Marius, devenus des figurines manipulées à vue par deux récitantes, sont proches de nous comme jamais. Et si la miniature renforçait les grands sentiments ? Un joyau à ne pas rater parmi la riche programmation de la biennale de Charleville... Emmanuelle Bouchez - 14 septembre 2015 Un hymne à la liberté équitable Coup de coeur Après Flaubert et « Madame Bovary », Mérimée et « Carmen » en théâtre d’objets, voici Victor Hugo. La magie reste la même. Et le propos, outre de donner envie de relire le roman, est de montrer l’importance du besoin de changement social qui anime les hommes du passé comme du présent. La fascination que provoquent les spectacles de la Cie Karyatides tient à plusieurs éléments. Sans doute d’abord la curiosité de retrouver une œuvre du passé, restée emblématique mais pas nécessairement lue. Ensuite la présence physique et vocale des deux comédiennes-manipulatrices dont le jeu est toujours juste. Enfin la vie que les objets posés, maniés avec délicatesse, deviennent de véritables créatures dotées d’une vie particulière. Certes, le condensé du livre laisse en premier lieu se révéler la structure élémentaire du livre d’Hugo. On comprend très vite qu’elle est celle du mélodrame, c’est-à-dire une succession de malheurs-bonheurs qui entraîne les personnages vers des souffrances de plus en plus insupportables, vers une déchéance contre laquelle ils luttent avec désespoir. Les musiques sentimentales de la bande son et un certain ton du récit en accroissent encore, sans excès, l’aspect caricatural. Mais cela n’empêche nullement l’émotion de s’installer. Une émotion qui n’est pas que spontanée car elle se nourrit des valeurs que l’écrivain cherche à défendre : une justice équitable, une instruction éveilleuse de conscience, la possibilité de la rédemption pour des coupables, l’avènement d’une démocratie généralisée. Un jeu issu de l’enfance Observer les petits personnages (notamment des santons sculptés en bois), les éléments de décor pour poupées enfantines, les objets plus ou moins symboliques qui s’installent ou s’éloignent, dégage une attention propice à s’attacher aux détails. Sous les éclairages ponctuels, minutieusement localisés, ils prennent des allures d’existence onirique perceptible. Comme dans les improvisations narratives ludiques des gosses, leur fiction s’apparente au réel. Ils sont manipulés avec une dextérité qui refuse de se transformer en virtuosité gratuite. Il y a sur le plateau miniature installé au centre du théâtre, une maîtrise singulière des gestes. Se matérialisent alors le bien, le mal, des sentiments divers. Ils ne sont pas troublés (ni les spectateurs) par les interventions de Karine Bergé et Marie Delhaye, grandeur nature, qui parlent, miment, gesticulent, sautent allègrement d’un rôle à un autre. La variété des trouvailles ne cesse de relancer la connivence entre salle et scène. Il faut avoir vu les révoltés sur une barricade être fauchés en plein élan par des cartouches en synchronisme parfait avec le bruit des balles d’une bande son toujours en accord avec les actes par ses bruitages. Il faut avoir couru à travers la campagne gelée lorsque l’inspecteur Javert poursuit Jean Valjean tandis qu’une astuce mécanique rend haletante la fuite des protagonistes. Il faut s’émerveiller du déplacement des maisons devenues les rumeurs colportées par les habitants. Agnès Limbos signe ici une de ses meilleures mises en scène de théâtre d’objets. On n’ira pas au bout des trouvailles qui émaillent chaque épisode. On y verra aussi le service rendu au duo porteur du projet en les incitant à jouer aussi sobrement une histoire susceptible de toucher les petits autant que les grands. Michel VOITURIER - 14 juillet 2015 La compagnie belge Karyatides transpose Les Misérables de Victor Hugo dans l’univers du théâtre d’objets. Leur démarche : « proposer des mythes de la littérature sur un petit plateau de théâtre ». Après Carmen et Madame Bovary, les membres de la Compagnie Karyatides (Karine Birgé et Marie Delhaye pour la conception et l’interprétation, Agnès Limbos pour la mise en scène) s’emparent aujourd’hui des Misérables. « Nous passons à la centrifugeuse les grandes œuvres pour en extraire des digests par une opération de stylisation vivifiante et novatrice, déclarent les artistes originaires de Belgique. Avec nos objets, nous voulons laisser la place à l’imaginaire, à l’évocation, à la métaphore, à ce qui reste d’âmes d’enfants en chaque spectateur. » Centrant leur adaptation théâtrale du roman de Victor Hugo sur les personnages de Jean Valjean, Javert, Fantine, Cosette et Gavroche, Karine Birgé et Marie Delhaye se sont attachées à suivre une triple orientation : l’intrigue policière, le mélodrame, l’engagement politique. Une triple orientation qui cherche à défendre l’idée d’un « théâtre populaire, visuel et poétique ». Manuel Piolat Soleymat - 24 février 2015 Ce grand classique de Victor Hugo publié en 1862, fait ici l’objet d’une représentation très originale racontée sous forme de conte par Karine Birgé et Marie Delhaye, deux actrices de la Compagnie Karyatides qui nous initient par la même occasion au théâtre d’objet. Elles nous racontent Les Misérables à l’aide d’une foule de statuettes très détaillées, que l’on peut admirer sur scène à la fin de la représentation, et représentant les héros ou anti-héros, selon le nom qu’on veut bien leur donner, de l’histoire. Cette pièce, qui est à la base un roman très long agrémenté d’un luxe de détails et de descriptions propre au Romantisme, courant artistique du début du XIXe siècle, est un protrait historique d’inspiration réaliste puisqu’il nous présente au moins trois grandes fresques : la fin de l’épopée Napoléonienne et la restauration de la monarchie jusqu’à l’émeute à Paris en juin 1832. Autrement dit, une période extrêmement trouble de l’histoire de France. Dans ce cas précis, l’œuvre de Victor Hugo a été découpée et synthétisée mais sans dénaturer l’essence même de l’œuvre et du message que son auteur à voulu nous transmettre : la justice sociale, les rapports entre dominants et dominés, le destin individuel ou collectif, les combats entre le bien et le mal, la misère sociale, le respect de la loi sociale opposé au respect de la loi morale, … Chaque scène est centrée sur un personnage spécifique qui s’ils ont tous un lien entre eux, n’en ont pas moins un destin propre et un message à livrer. La mise en scène est tellement bien réalisée qu’elle en devient magique. Il est rare en effet d’avoir des jeux de son et de lumière aussi pointilleux et millimétrés et qui complète aussi bien le jeu de scène où les actrices jouent les différents rôles tour à tour, autour d’une table qui forme une scène dans la scène, une mise en abîme de l’histoire dans l’Histoire. On y retrouve Jean Valjean le bagnard repenti, Fantine victime de l’injustice sociale, Cosette l’enfant maltraitée, l’inspecteur Javert à la poursuite de la vraie justice, et bien d’autres. Un superbe décor de la ville de Paris au XIXe siècle est peint sur une toile déployée comme fond de scène. La musique et les bruitages sont lancés à la seconde près… Il a certainement fallu énormément de travail de synchronisation en amont pour en arriver à ce niveau de perfection. La table qui est au centre de la scène est équipée d’un dispositif ingénieux pouvant rouler et permet à la planche centrale de tourner comme les ailes d’un moulin à vent. Tous ces détails rajoutent de la magie dans une pièce où les thèmes abordés sont sombres et tristes. La manière dont la pièce est travaillée est également très moderne notamment avec le porte-voix qui évoque nos propres manifestations faisant le lien avec le soulèvement de Paris en 1832. Cela nous interroge, nous rappelle que depuis le début du XIXe siècle et donc de l’époque de Victor Hugo, rien n’a vraiment changé : les injustices se multiplient, il y a de plus en plus de guerres et les gens meurent de faim par milliers. Un spectacle inédit et surprenant sur un grand classique de la littérature française ayant fait l’objet de nombreuses adaptations tant théâtrales que cinématographiques. On se demande un peu au début à quelle sauce on va être mangé, mais la magie de la scène fait le reste. Une jolie découverte. Daphné Troniseck Journaliste - Responsable littérature du Suricate Magazine - 15/01/2015 Les Misérables est un spectacle emblématique d’un art très à la mode pour le moment, le théâtre d’objet : art de la récup, art d’aller fouiller dans les brocantes, aux Petits Riens, aux puces, ou même dans ses tiroirs de cuisine ou dans son grenier pour dénicher l’objet qui va parler à l’imaginaire collectif et qui va raconter toute une histoire. (…) C’est un art hyper-inventif, dans une configuration intimiste qui se passe autour d’une table comme Les Misérables mis en scène par Agnès Limbos, qui est la pionnière du théâtre d’objet en Belgique. Elle a mis en scène Les Misérables pour la compagnie des Karyatides, qui réussit l’exploit incroyable de résumer toutes les deux mille pages du roman fleuve de Victor Hugo avec simplement cette table devenue champ de bataille, avec une vielle boîtes de biscuits qui s’ouvre sur l’auberge en miniature des Thénardier, avec des santons de Provence qui tout à coup deviennent le peuple aux abois de 1832 sur fond de barricades et de révolution, ou encore des tableaux de paysages pastoraux qui font défiler les courses poursuites de Javert et de Jean Valjean. C’est d’une inventivité folle. C’est un spectacle qui à coup sûr va séduire tous les publics et surtout les professeurs de français qui vont se ruer dessus pour faire aimer Victor Hugo à leurs élèves. Et c’est une idée géniale d’avoir utilisé ce théâtre des petits riens pour évoquer le destin des Misérables à une époque où, aujourd’hui encore, on peut se faire embarquer pour avoir voler une couque dans un magasin. Comme Jean Valjean, on peut risquer gros pour une bouchée de pain à une époque où la misère va galopante. Catherine Makereel, émission « Entrez sans frappez », La Première, 14/01/2015 LE THÉÂTRE SE DÉNICHE AUX PUCES Jouer Les Misérables avec des santons et des boîtes de biscuits, c’est le fabuleux défi des Karyatides C’est l’histoire d’un théâtre qui naît dans les marchés aux puces et les brocantes. Un théâtre qui ne se construit pas dans de grands ateliers de décors mais se fomente autour d’une table où figurines, vieux jouets, fourchettes et autres objets chinés sont retapés, au scalpel, pour donner chair à des légendes comme Carmen ou Madame Bovary. Et même carrément aux Misérables, dernière création de la compagnie Karyatides, qui réussit l’exploit d’incarner les 2.000 pages du roman-fleuve de Victor Hugo avec une table transformée en champ de bataille, une boîte de biscuits muée en auberge des Thénardier, des santons métamorphosés en peuple aux abois sur fond de révolution, une reliure de livre ancien déroulant l’exil de Jean Valjean et Cosette, des tableaux convoquant les paysages pastoraux de courses-poursuites sans fin. Ces Misérables vont faire le bonheur de tous les professeurs de français désireux d’aborder Hugo avec leurs élèves (dès 10 ans), mais aussi celui des adultes adeptes d’un univers romanesque et décalé dans son emballage fabuleusement recyclé. Entre les tournées, Karine Birgé et Marie Delhaye, actrices et têtes pensantes de Karyatides, écument les puces ou les Petits Riens. «Les santons qui sont au cœur des Misérables, nous les avons trouvés sur la place du Jeu de Balle, précise Karine Birgé. Ce sont des objets qui font référence à l’imaginaire collectif. Chacun en a vu chez une grand-mère ou une vieille tante. On ne s’intéresse pas à la valeur marchande des objets, mais à leur plastique, leur esthétique, leur matière. Pour Jean Valjean par exemple, on savait qu’il ne pouvait pas être en plastique. Il est taillé dans le bois.» Puis, c’est toute une armée de petites mains qui s’attelle à armer les santons de minuscules fourches et pelles, évoquant les barricades qui s’élevèrent dans Paris en 1832. (cette phrase m’ennuie un chouia vis a vis de Zoé, elle n’est pas une armée de petites chinoises…) Il s’agit aussi de repeindre certaines figurines, comme celles de Cosette et Marius, pour les rendre plus visibles de loin. Il aura fallu deux ans et demi et une dizaine de collaborateurs pour accomplir cet ingénieux bricolage, sur un thème plus que jamais d’actualité: l’injustice et l’inégalité sociale. «Il y a quelques jours au Delhaize, j’ai vu un homme qui avait l’air bien mal en point, se faire embarquer par la police pour avoir volé une couque. Aujourd’hui encore, comme Valjean, on risque gros pour une bouchée de pain.» Quoi de mieux que cet univers de «petits riens» pour raconter le destin de ces «misérables»? A une époque qui se rebelle enfin contre le règne de la surconsommation, le théâtre d’objets apparaît comme le porte-drapeau d’un art en résistance, plus contemporain que jamais, qui est à la culture ce que le recyclage ou le slow food sont à nos modes de vie: un modeste et grandiose pas de côté. Catherine Makereel, 13/01/2015 MISÉRABLES ET MÉLO À SOUHAIT Le Chef d’œuvre de Victor Hugo adapté en théâtre d’objet. Un défi magnifiquement relevé. Mégaphone en main, Karine Birgé ouvre le feu des Misérables. «C’est une Révolution que nous allons faire. Il n’y a qu’un seul principe. Que l’homme soit libre de son destin.» En toile de fond, Paris, le poumon du monde en cette date historique. L’actualité du roman emblématique de Victor Hugo résonne avec d’autant plus d’acuité qu’à l’heure où le spectacle des Karyatides commence, plus de quatre millions de Gavroche descendent dans les rues de la Ville Lumière pour devenir Charlie... Après avoir adapté avec délicatesse Madame Bovary et Carmen en théâtre d’objet, les Karyatides poursuivent leur exploration des classiques avec une aisance de plus en plus perceptible. Et on leur sait gré d’oser embrasser des monuments tels que Les Misérables ou deux mille pages résumées en une heure, sans être dénaturées pour autant, avec une table et quelques santons dénichés au marché aux puces ! Un vrai défi que les deux comédiennes Karine Birgé et Marie Delhaye relèvent de main de marionnettiste. Précédée d’une belle réputation, la compagnie des Karyatides bénéficie de tribunes aussi prestigieuses que le Théâtre de Liège ou le National et joue chaque fois plusieurs jours de suite en soirée ou en matinée, deux faits assez rares en jeune public pour être soulignés. Leur spectacle s’adresse bien sûr à tous et dimanche après-midi, à Liège, les adultes étaient plus nombreux que les enfants. Habillées de noir, manipulant à vue sur une table à dessin amovible qui permet de passer d’une scène à l’autre ou de jouer sur les effets travelling, les comédiennes sont relayées par l’écran cyclo qui habille le plateau. Au scalpel Ample, précis, romantique et engagé, le spectacle sonne juste de la première à la dernière confrontation entre Javert et Jean Valjean. Porté au début par l’inoubliable musique de Francis Lai composée pour Love Story et revue ici par Mancini, le spectateur se laisse guider par l’humanité et l’intelligence de cette adaptation. Félicie Artaud a taillé dans le texte de Victor Hugo au scalpel. Agnès Limbos, grande figure du théâtre d’objet, assure la fluidité d’une mise en scène de belle envergure. Spectaculaire également, le travail de régie contribue à donner au spectacle les accents cinématographiques qui lui vont si bien. Charnel bien que d’objet, le théâtre prend vie entre les mains des deux comédiennes qui interviennent, s’embrassent ou se serrent les mains pour souligner l’une ou l’autre scène. Puis il y a la force évocatrice des objets choisis : une chaîne et un gant noir, une église éclairée, deux chandeliers et la flamme vacillante de leurs bougies... Toute la magie du théâtre d’objet s’y retrouve. Tension dramatique Vient se greffer en outre une tension dramatique. Le matériau de départ était là. Encore fallaitil l’adapter judicieusement, ce qui fut fait tant en amont qu’en aval grâce à la justesse d’une interprétation saupoudrée d’accents mélo de Karine Birgé et Marie Delhaye qui prennent le temps de poser leurs mots et intentions oubliant les mille et une pages reléguées au bagne. Et même si d’importants épisodes, tels celui du couvent, ont été sacrifiés, tous les personnages de Jean Valjean à Javert, de Fantine aux Thénardier, de Cosette à Marius, sont réunis sur cette table carrée d’une belle efficacité. Comme ces « Misérables » émouvants et pertinents qui continueront à vivre tant que les hommes mourront de faim. Laurence Bertels, La Libre, 13/01/2015