De Toulouse à Osaka-Kobe Le pôle Cancer-Bio

Transcription

De Toulouse à Osaka-Kobe Le pôle Cancer-Bio
De Toulouse à Osaka-Kobe
Le pôle Cancer-Bio-Santé
veut rayonner large
Le pôle Cancer-Bio-Santé Midi-Pyrénées/
Limousin allie développement territorial et
rayonnement international à travers des projets
emblématiques comme le Cancéropôle de Toulouse.
«L
es pôles sont identifiés comme des outils de
développement économique territorial et,
à ce titre, ils sont invités à s’allier entre eux
pour optimiser leur rayonnement international », explique le Pr. Roland Bugat, président du pôle
Cancer-Bio-Santé (CBS), qui pense que les pôles de compétitivité peuvent réussir la quadrature du cercle : allier
dynamisme locorégional et rayonnement international.
« Il faut travailler l’enracinement territorial et simultanément l’international, poursuit-il. Montrer aux collectivités territoriales que nous avons un outil de développement économique et que nous pouvons nous allier entre
nous. La région s’inscrit dans une dimension européenne
et l’Europe dans une compétition internationale. Il y a de
plus en plus de directives européennes dans le monde de
la santé et il faut mettre en application ce qui s’impose
de facto aux Etats-membres. L’entité régionale et interrégionale dans l’enveloppe européenne est une manière
d’entrer dans la compétition mondiale. »
Roland Bugat quitte l’Inca
Responsable du département formation, le cancérologue toulousain
estime avoir rempli sa mission et souhaite se consacrer pleinement au
pôle Cancer-Bio-Santé qu’il préside, et en particulier à son volet toulousain, le Cancéropôle de Langlade. Pierre Fabre, Sanofi-Aventis et
GSK y côtoieront les équipes INSERM-CNRS et moult PME. L’hôpital – opérationnel en 2011 – sera un consortium exploité par plusieurs
opérateurs : Centre anticancéreux Toulouse-Midi-Pyrénées, CHU,
Etablissement français du sang, médecine libérale (via notamment le
réseau régional de cancérologie Oncomip). Il s’agit d’assurer l’innovation et le recours, tels que le prévoit la mesure 30 du Plan cancer.
« L’ensemble devra en partie s’autofinancer grâce à l’innovation générée
(par retour sur investissement), car elle ne pourra pas fonctionner que
sur le principe de la tarification à l’activité », a précisé Roland Bugat.
54
PHARMACEUTIQUES - JUIN/JUILLET 2008
PR. ROLAND BUGAT,
PRÉSIDENT DU PÔLE
CANCER-BIO-SANTÉ
(CBS).
Un « super cluster » national
La dimension internationale, le pôle CBS l’a acquise en
s’alliant avec les pôles lyonnais (Lyonbiopôle) et Alsacien
(Biovalley), pour constituer le Life Science Corridor France.
Dans ce cadre, chaque pôle négocie au nom des deux autres
avec un vis-à-vis prestigieux à l’étranger : Boston et San
Diego pour Lyon, le Canada pour Strasbourg, et OsakaKobe pour Toulouse. Le protocole signé en février avec le
Japon (Kansai Bio Promotion Council) souligne, qu’en tant
que « super-cluster », le LSC France associe « les ressources
et les acteurs de l’industrie, de la recherche, de l’enseignement et de la finance des trois pôles, de sorte qu’il fournit
un vaste éventail de compétences et d’excellence dans les
biotechnologies et la santé qui permet le développement de
programmes d’échanges entre acteurs similaires... »
Autre action à vocation transfrontalière, le pôle CBS organise avec le pôle d’Aquitaine (prod’Innov) et le pôle Languedoc-Roussillon (Orpheme) une Bio-région qui réunira
la Catalogne, les Baléares et le Pays Basque espagnol, sur le
mode d’Alsace Biovalley.
Avec 60 projets labellisés dont 31 financés à hauteur de
12 millions d’euros par des fonds publics, le pôle CBS se
situe dans la moyenne supérieure. Mais, comme le souligne
son directeur, Jean-Pierre Saintouil (cf. page suivante), 12
millions divisés par 31 projets, c’est peu. Le vrai carburant,
c’est le financement privé. C’est pourquoi le pôle a organisé
en mai dernier une rencontre fructueuse entre porteurs de
projets et financeurs privés, business angels ou même particuliers assujettis à l’ISF, puisqu’un volet de la loi TEPA permet à ces derniers de défiscaliser 75 % de 50 000 euros investis dans une entreprise innovante. A bon entendeur. n
Jocelin Morisson
Pôles de compétitivité Dossier
Jean-Pierre Saintouil, dg du pôle Cancer-Bio-Santé :
« Nous souhaitons
donc élargir notre positionnement »
Fort d’un rayonnement international déjà acquis,
le directeur général du pôle Midi-Pyrénées/
Limousin espère obtenir le statut de pôle.
Le pôle CBS a été audité. Comment l’avez-vous vécu ?
● Les pôles ont pris cette démarche de façon positive. Cela
permet de structurer l’action, de la chiffrer, d’établir des indicateurs, ce qui est bénéfique. L’exercice lui-même nous a
permis de prendre du recul, de réfléchir, de nous structurer
encore plus. La philosophie de cette évaluation porte davantage sur l’organisation des pôles et leur activité plutôt que
sur les résultats proprement car il est encore trop tôt pour
juger de projets santé, en particulier de développement de
médicaments, qui prennent plusieurs années. Il s’agit donc
plutôt de voir comment fonctionne le pôle, son organisation, les actions normées, tracées... Le nombre de projets
labellisés et surtout financés est un paramètre objectif.
Quelles sont vos attentes à l’issue de cet audit ?
● La démarche du Life Science Corridor est largement repérée à ce stade. Elle est appréciée et, je l’espère, va nous
permettre de changer de catégorie. Nous avons en effet un
statut de pôle « national » (versus « à vocation mondiale »,
ou « mondial ») qui nous a été attribué à l’origine. Nous
mettons en avant deux raisons pour changer de statut : le
Cancéropôle de Toulouse-Langlade sera un Biopark de référence au niveau mondial, et nous avons montré que nous
pouvions faire des choses dynamiques et intéressantes au
niveau international avec le Life Science Corridor France.
Ce changement de statut se traduirait par des financements
publics bien plus importants. Ce n’est pas un problème
d’ego mais d’efficacité et de positionnement. La deuxième
demande concerne le champ thématique du pôle. Le fait
d’avoir un positionnement « cancer » donne un avantage de
lisibilité, mais réduit le champ d’action des projets. Le premier « Gérontopôle » de France est en cours de réalisation à
l’Hôpital Universitaire Toulouse-Purpan. Or il existe deux
plans nationaux dans le domaine de la santé : le « Plan Cancer » et aussi un « Plan Alzheimer » (maladies neurodégénératives). Nous souhaitons donc élargir notre positionnement
pour accompagner ce projet là également. Des laboratoires
et des entreprises nous ont sollicités en expliquant qu’el-
les travaillent
dans d’autres
domaines que
JEAN-PIERRE SAINTOUIL
le cancer. Cela
SALUE LA DYNAMIQUE
a donc du sens
CRÉÉE PAR LES PÔLES.
d’élargir le positionnement du
pôle dans cette direction, car il s’agit d’un
autre projet structurant fort.
Le pôle CBS a-t-il créé une dynamique particulière ?
● C’est en effet assez étonnant de voir comment les différents acteurs locaux et régionaux, qui existaient avant les
pôles, s’impliquent dans la dynamique créée par les pôles.
Les collaborations se passent très bien car nous essayons de
conventionner entre nous, de délimiter nos compétences,
et d’éviter les doublons. Par exemple, pour les conventions
BIO San Diego et BIO Japan, nous avons organisé le déplacement des entreprises. Le pôle s’occupe du stand, de
l’organisation des rencontres d’affaires entre les entreprises,
la CRCI pour Bio San Diego et la CCI Tarbes pour Bio
Japan s’occupent de la prise en charge financière du déplacement des entreprises, des inscriptions et de la logistique.
L’idée est d’articuler nos actions. La dynamique des pôles
est sensible bien sûr au niveau du financement. Pourquoi
les investisseurs privés ont-ils répondu favorablement ?
Parce qu’ils ont bien compris que les pôles, au travers du
processus de labellisation des projets, sont là pour aider
des projets de qualité. Ce rôle de sélection et de premier
filtre est très important. Ainsi les business angels reconnaissent ne pas être en général des experts en santé et sont très
intéressés par l’expertise que peuvent apporter les pôles.
Propos recueillis par
Jocelin Morisson
55
JUIN/JUILLET 2008 - PHARMACEUTIQUES