1 Grégory Gaultier Squash Entretien : Paris, Janvier 2009 En

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1 Grégory Gaultier Squash Entretien : Paris, Janvier 2009 En
Grégory Gaultier
Squash
Entretien : Paris, Janvier 2009
En italique, Matthieu Benoît, coach et kiné de Grégory Gaultier
2 – Les débuts
Pourquoi le squash ? Pourquoi ce sport plutôt qu’un autre ?
Mes parents avaient un club : j’ai débuté à l’âge de quatre ans. En rentrant de l’école, je
rentrais sur les courts. L’avantage, c’est que l’on peut jouer seul, je tapotais donc la balle seul
au début.
As-tu pratiqué d’autres sports ?
Je suis assez polyvalent, mais, en compétition, je n’ai pratiqué que le squash.
À quel moment t’es-tu rendu compte que tu avais des possibilités, ou un talent, même
parmi des enfants qui avaient commencé le squash tôt ?
Dès mes premières compétitions. J’ai participé à mes premiers championnats de France très
jeune, à l’âge de huit – neuf ans. J’ai rencontré des jeunes de mon âge et il y avait une très
grosse différence entre le numéro deux français et moi, puisqu’il ne marquait quasiment
aucun point dans le match. J’ai été repéré tôt, à l’âge de huit ans, par quelqu’un qui s’occupait
de moi deux week-ends par mois. C’était un très bon entraîneur, qui est maintenant entraîneur
national. La fédération a fait en sorte que je puisse faire très tôt des compétitions en senior, ce
qui est beaucoup pus dur maintenant. À l’âge de onze – douze ans, ce n’est pas trop
recommandé de jouer avec les seniors.
C’est l’âge auquel tu as commencé à jouer en senior ?
Oui, c’était plus qu’un triple surclassement. Maintenant, c’est limité à un double
surclassement. Pour moi, c’était idéal de pouvoir me confronter à l’élite régionale ou française
senior.
À cet âge-là, à douze ans par exemple, à quelles compétitions participais-tu ? Aux
compétitions régionales ?
Oui, à douze ans, j’étais le meilleur de la ligue en senior, qui comprenait l’Alsace, la Lorraine
et la Franche-Comté.
À douze ans ?
À douze ans. Les meilleurs joueurs étaient classés dans les cinquante premiers français. En
gagnant ces championnats de ligue, il est possible de jouer les championnats de France. Lors
de ce premier tournoi, j’avais terminé dix-neuvième. Le meilleur devait être numéro 20
français, donc j’étais dans les quarante meilleurs Français à cette époque.
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C’était déjà tout tracé…
Oui, je savais que j’avais de bonnes capacités. La fédération m’a pris en charge pour les
tournois juniors internationaux, où j’étais aussi surclassé.
À quel âge ?
J’ai commencé à dix – onze ans, dans les catégories moins de quatorze ans. C’est sûr que j’ai
pris des raclées au début, puis j’ai appris sur le tas. Je savais que j’étais un des meilleurs de
ma génération.
La progression était naturelle ?
Oui, j’étais le meilleur Français dans ma catégorie. Au niveau international, un ou deux
joueurs de mon âge étaient plus forts que moi. Je suis parti à Aix-en-Provence à l’âge de
treize ans, pour rejoindre une structure mise en place par la fédération, avec un entraîneur
national, en sport – études. Je m’entraînais tous les jours, avec de meilleurs partenaires,
puisque c’était l’élite française, junior et senior. J’ai rattrapé les adversaires internationaux qui
me battaient jusqu’alors.
Et ces adversaires, les retrouves-tu sur le circuit maintenant ?
L’un d’entre eux était très fort, un Espagnol. Il a arrêté à cause de problèmes d’adducteurs. Je
l’ai battu pour la première fois à quinze ans, mais il me mettait vraiment des raclées. C’était le
meilleur joueur mondial dans notre catégorie. Nous jouions le British Open, le tournoi le plus
réputé, et il gagnait à chaque fois, même en face d’adversaires qui avaient un an d’avance sur
lui. C’était vraiment….
… La star ?
Oui. J’ai fini par le battre. Trois ans après, il a arrêté, pour des problèmes d’adducteurs, peutêtre à cause de la croissance. En dehors de lui, je retrouve les meilleurs de ma génération, et
de celles qui ont précédé, dans le top cinq – top huit mondial.
Tu as donc commencé très jeune…
Oui, j’ai démarré puisque mes parents avaient le club ; j’y ai pris goût. Je jouais tous les jours,
je me jetais sur les courts. Quand les courts étaient pleins, j’attendais. Les adultes
s’occupaient un peu de moi. Je n’ai pas vraiment réfléchi sur les raisons. À l’école, j’étais
assez bon dans les autres sports, mais je ne me suis jamais vraiment penché sur autre chose.
J’ai commencé très tôt la compétition.
Tu ne t’es pas dit à un moment, à l’adolescence par exemple : « Tiens, je vais peut-être
essayer un autre sport » ?
Non, jamais. J’ai toujours été dans les meilleurs ; j’ai toujours essayé de gagner des titres. Il y
a toujours des périodes de doutes, des moments où je stagnais un peu. Dès que cela revenait,
un mois plus tard, je n’y pensais plus. Pendant les mauvaises périodes, j’ai pu avoir envie de
tout foutre en l’air, mais jamais je n’ai voulu essayer autre chose.
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Tes parents avaient un club de squash. Quel était leur niveau ?
Ils n’avaient pas de niveau particulier. Le copain de ma mère avait une grosse entreprise de
chauffage sanitaire. Des amis avaient un club de squash dans les Vosges. Ils ont monté cela
pour que ma mère ait une occupation : elle a tenu le club pendant sept ou huit ans, puis ils ont
revendu l’affaire. Je suis parti à Aix.
C’est plutôt bien tombé.
C’est sûr que tous les meilleurs athlètes commencent jeunes. C’est le moment où l’on apprend
le plus vite.
En dehors de ce club, quel est le rôle de tes parents dans ta pratique et ton succès dans le
squash ?
Ils ne m’ont jamais poussé ou forcé à faire des tournois. Ils ont vu que j’aimais cela. Ils m’ont
ensuite accompagné sur mes compétitions, mes premiers championnats de France. Ils m’ont
aidé financièrement au début, avec la fédération. Ils avaient plus un rôle de soutien qu’autre
chose.
Ils t’ont ni retenu ni poussé ?
Oui, ils m’ont laissé faire. Ils m’ont laissé le choix de partir à Aix-en-Provence, parce que la
fédération a mis en place une structure pour moi, grâce à mes résultats en junior. C’était le
DTN de l’époque (Albert Médina) qui avait eu cette idée. J’ai pris ma décision et mes parents
étaient pour, même si ce n’est pas facile de laisser son gamin à treize ans, à 800 kilomètres.
Le suivi scolaire était très bien encadré là-bas, et mes parents connaissaient bien l’entraîneur,
ce qui les rassurait. Ils savaient également que le squash, c’était ma vie, même si j’étais très
jeune. Ils m’ont donné ma chance et cela a fonctionné.
Y a -t-il une autre personne de ta famille qui t’a aidé ou qui a représenté un support ?
Pas vraiment. Mes parents jouaient un peu mais pas trop. Mon cousin et mon demi-frère
jouaient pour le fun. Ils ont fait quelques compétitions, sans plus. J’ai plus été soutenu par le
meilleur joueur du club : à l’époque, il a commencé à m’entraîner.
Et au niveau des entraîneurs ? Tu as été pris en charge par un entraîneur à Aix…
C’est l’entraîneur national maintenant, André Belost. À l’origine, il était entraîneur d’un gros
club à Strasbourg. Dans l’année, il organisait des stages d’entraînement, auxquels
participaient certains membres du club. Je participais à ces stages, avec les adultes. C’est
comme cela que nous nous sommes rencontrés ; ensuite, j’allais chez lui pour m’entraîner.
D’autres entraîneurs ont joué un rôle, pour franchir un cap ?
C’est sûr qu’à cet âge, je partais un week-end, j’apprenais un tas de choses et je jouais
différemment sur les autres compétitions. J’apprenais vite. J’ai toujours été un bon élève ; j’ai
toujours écouté les conseils que l’on me donnait ; je faisais les exercices que l’on me donnait
à faire. J’intégrais vite ce que l’on me disait.
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En général, pour les jeunes très forts, il existe un moment-charnière, qui correspond à
un choix, celui d’y aller vraiment à fond, peut-être en sacrifiant d’autres choses. Pour
toi, ce moment-là, c’est à Aix ?
C’est même avant. Quand j’étais petit, j’avais toujours pour but d’être numéro un dans mon
sport.
À quel moment t’es-tu dit : « Ce sera le squash et rien d’autre » ?
Toujours. J’ai suivi mes études, mais c’est sûr que le squash a toujours été ma priorité devant
mes études, même si cela se passait bien à l’école. Je ne me suis pas posé de questions en fait.
Dès le début…
(N.d.A. : rappel, en italique, Matthieu Benoît, coach et kiné de Grégory Gaultier)
… Grégory a toujours été sur une pente ascendante.
À un certain niveau, on progresse toujours, mais moins vite. Mais, tout jeune, la progression
est rapide. Jusqu’à vingt-deux ans, j’étais en progression constante.
Quels sont les moments qui te paraissent avoir le plus confirmé ton choix, peut-être à
l’instant des victoires ?
C’est lié aux objectifs que je me fixe. Cela confirme les investissements réalisés, les
entraînements quotidiens, quatre ou cinq heures par jour. J’évite de faire l’idiot avec les
potes... Derrière, gagner un tournoi comme le British Open ou les championnats du Monde,
c’est la récompense. Je ne pense même pas aux heures passées à l’entraînement ; c’est
quelque chose de naturel ; c’est ce que j’aime faire et c’est pour atteindre un but : arriver au
top. C’est vrai que je n’aime pas trop regarder en arrière. Même après une grosse victoire, je
suis content sur le moment et cela repart tout de suite. Nous avons tellement de tournois dans
l’année, tous très importants, parce qu’ils comptent pour le classement mondial. Le seul vrai
moment de plaisir, c’est quand j’ai gagné le dernier point, quand je lève les bras, les dix
secondes qui suivent, la remise des prix et le soir même, autour d’une table avec les amis.
Mais dès le lendemain, je dois me replonger dans l’entraînement, avec un autre objectif en
tête. Les victoires sont les seuls moments gratifiants… Je me dis que je suis fier de ce que j’ai
fait. Et encore, ce n’est pas trop mon caractère d’être fier ou content. J’ai toujours été strict
envers moi-même.
Tu es plutôt tourné vers l’avenir ?
Oui. Il y a plein de titres à gagner. Je dois foncer, sans s’arrêter sur un truc en particulier.
(À Grégory Gaultier) Oui, je pense que tu fonctionnes comme cela.
Je n’aime pas m’éterniser.
Il rebascule tout de suite sur l’objectif suivant.
Sinon, on joue comme un fifre sur les tournois suivants. On pense aux victoires passées, et la
motivation est moins présente aux entraînements. J’essaie de basculer dès le lendemain.
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Ensuite, cela dépend si j’ai deux ou trois jours de repos… Mais nous avons tellement de
tournois avec peu de temps de récupération.
Prochaine lettre :
Grégory Gaultier
3 – Le sport en général (partie 1).
© Loïc Henry / 2009 – 2010.
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