VantagePoint - Tapestry Networks

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VantagePoint - Tapestry Networks
RÉSEAU CANADIEN
DES COMITÉS D’AUDIT
VantagePoint
Le 22 octobre 2012
TAPESTRY NETWORKS, INC · WWW.TAPESTRYNETWORKS.COM · +1 781 290 2270
Leçons à tirer de la récente course aux procurations au Canadien Pacifique
Les membres du Réseau canadien des comités d’audit (RCCA) se sont réunis à Toronto le 12 septembre
2012 pour analyser les leçons à tirer de la course aux procurations qu’a récemment connue le Canadien
Pacifique (CP). Lors des communications préparatoires à cette réunion, les membres du RCCA ont affirmé
avoir suivi avec beaucoup d’intérêt cette course aux procurations et souhaiter pouvoir discuter entre eux des
leçons à en tirer. Le présent document résume les principales observations issues de cette réunion ainsi que
les points de vue exprimés par certains membres avant ou après celle-ci 1.
La liste complète des participants à la réunion figure à l’annexe 1, à la page 12.
Sommaire
Les membres du RCCA ont examiné l’affaire de la course aux procurations au CP, et plus particulièrement
la façon dont le conseil d’administration de l’entreprise a réagi face au défi lancé par un investisseur activiste.
Leurs discussions ont porté sur quatre grands thèmes :
 Amélioration de l’évaluation de la performance, grâce à l’application de mesures bien
définies et à l’expérience dans le secteur (page 3)
À la lumière des risques inhérents à la contre-performance d’une entreprise, les membres du RCCA se
sont montrés très inquiets quant aux méthodes utilisées par les conseils d’administration pour évaluer la
performance en général. Chacun y est allé de plusieurs propositions, notamment l’application d’une
quantité raisonnable de mesures de la performance, le dosage judicieux de mesures absolues et de mesures
relatives, la prise en compte de mesures non financières, l’orientation axée sur les éléments que la
direction peut contrôler, l’établissement d’un échéancier approprié et la vérification des données utilisées.
Les membres du RCCA ont aussi souligné l’importance pour les administrateurs de détenir une
expérience sectorielle leur permettant de poser à la direction des questions portant précisément sur le
secteur d’activité de l’entreprise et d’évaluer les réponses recueillies. L’annexe 2, à la page 13, présente une liste
de questions que devraient se poser les membres des comités d’audit et les autres administrateurs.
 Nécessité pour le conseil d’administration de maintenir un dialogue permanent sur la
performance du chef de la direction et d’avoir la volonté de passer à l’action lorsqu’il y a lieu
(page 5)
Les membres du RCCA ont fait observer qu’il peut se révéler très difficile de reconnaître les situations où
la performance du chef de la direction pose problème. Ils ont discuté des diverses façons dont le conseil
d’administration dans son ensemble en vient à être saisi de tels problèmes, après qu’un ou deux
administrateurs s’en sont d’abord inquiétés. Ils ont aussi convenu que le président du conseil joue un rôle
essentiel dans la relation que le conseil d’administration entretient avec le chef de la direction, notamment
sur le plan des communications. Deux membres du RCCA ont cité en exemples des cas où le président
1
La publication VantagePoint reflète l’utilisation par le RCCA de la version modifiée des règles de Chatham House, en vertu desquelles le nom de
ses membres et les liens qui les unissent à leur société sont de notoriété publique, la paternité des propos tenus au cours des réunions n’étant toutefois
pas attribuée à des personnes ou à des sociétés.
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du conseil a su influer sur les relations entre les administrateurs ainsi que sur celles entre le conseil
d’administration et le chef de la direction, notamment au moment de prendre la décision de destituer ce
dernier ou d’élaborer un plan d’amélioration de sa performance.
 Nécessité pour le conseil d’administration de connaître le point de vue des actionnaires
(page 7)
Reconnaissant que l’activisme des actionnaires est probablement un phénomène qui gagne en
importance, les membres du RCCA ont discuté de la façon la plus efficace d’interagir avec les parties
prenantes dans ce contexte. Ils ont convenu qu’il fallait que les conseils d’administration soient au fait des
principales idées circulant parmi les actionnaires, certains indiquant que des conseils d’administration
confient volontiers à des consultants spécialisés la réalisation d’enquêtes indépendantes visant à sonder
l’opinion des investisseurs. La question de savoir si le conseil d’administration doit intervenir directement
ou non auprès des actionnaires fait l’objet de divergences de vues parmi les membres du RCCA. «Nous
n’avons rien à perdre en prenant contact avec eux», a toutefois fait valoir l’un d’eux.
 Importance de la culture dans la façon qu’a le conseil d’administration de réagir au
changement (page 9)
Les membres du RCCA se sont penchés sur la façon dont les administrateurs abordent les changements
importants, peu importe qu’ils en soient les initiateurs ou qu’il s’agisse de changements amorcés par
d’autres. Ils ont convenu qu’un débat sain et un dialogue ouvert sont essentiels pour que le conseil
d’administration puisse travailler efficacement. Ils ont aussi fait remarquer que les conseils d’administration
doivent être ouverts aux changements qui leur sont proposés, même lorsqu’il s’agit de propositions
émanant de l’extérieur.
Contexte de la course aux procurations au CP
Sur le plan de la performance, le CP a commencé dès 2008 à accuser un retard sur les cinq autres chemins de
fer de classe I en Amérique du Nord 2. En octobre 2011, lorsque la société de placement Pershing Square a
annoncé qu’elle allait se porter acquéreur de 12,2 % des actions du CP 3, celui-ci a rapidement cherché à
rétablir la confiance du marché dans son conseil d’administration, son équipe de leadership et ses orientations
stratégiques. En décembre de la même année, le conseil d’administration du CP a désigné deux nouveaux
administrateurs afin de rehausser son niveau d’expérience dans l’industrie ferroviaire 4. Il a aussi rencontré en
entrevue Bill Ackman, fondateur et chef de la direction de Pershing Square, à qui il a alors offert un poste
d’administrateur 5. M. Ackman a refusé cette offre, indiquant que la signature d’une entente de confidentialité
et de moratoire comme condition préalable à sa nomination lui paraissait inacceptable 6. Dans les jours qui
Scott Deveau, «Tale of Two Railways: Why CP May Never be CN», Financial Post, 21 janvier 2012.
Pershing Square Capital Management, Schedule 13D (Washington, DC: Securities and Exchange Commission, 18 octobre 2011).
4
Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée, Avis de convocation à l’assemblée annuelle des actionnaires et Circulaire de sollicitation de procurations
de la direction (Canadien Pacifique, 22 mars 2012), pp. 21 à 23.
2
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5
6
Ibid.
Ibid.
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ont suivi, M. Ackman et le président du conseil du CP, John Cleghorn, se sont livrés à un échange de lettres
ouvertes, qui s’est soldé par la suspension des communications et rencontres en privé.
Le 24 janvier 2012, Pershing Square s’est engagée dans une course aux procurations, proposant alors la
candidature de cinq aspirants administrateurs en vue de l’élection du conseil d’administration prévue dans le
cadre de l’assemblée annuelle des actionnaires du 17 mai, où elle a fini par en faire élire sept 7. Pendant toute
la durée de la course aux procurations qui a suivi, le conseil d’administration du CP a publiquement soutenu
le plan de redressement stratégique de l’entreprise ainsi que sa mise en œuvre par le chef de la direction, Fred
Green, tandis que Pershing Square alléguait que Hunter Harrison, ex-chef de la direction de la Compagnie
des chemins de fer nationaux du Canada (CN), devait être désigné comme remplaçant de M. Green 8.
En avril dernier, les résultats du sondage mené auprès d’investisseurs institutionnels représentant 45 % des
actions en circulation du CP ont révélé que 94 % des actionnaires étaient favorables aux propositions de
changement mises de l’avant par Pershing Square 9. Finalement, les principaux investisseurs du CP et plusieurs
cabinets d’experts-conseils spécialisés en procurations ont annoncé publiquement qu’ils appuyaient les
candidats au poste d’administrateur proposés par Pershing Square, évoquant la piètre performance du CP
comparativement à ses pairs comme facteur ayant motivé leur décision 10.
Le 17 mai 2012, plusieurs heures avant la tenue de l’assemblée annuelle, six administrateurs, dont
MM. Cleghorn et Green, ont décidé de retirer leur candidature. Lors de l’assemblée, M. Ackman a déclaré :
«Nous sommes arrivés dans un esprit de paix, et je suis heureux d’affirmer que nous avons retrouvé cet état
d’esprit 11.»
Tous les candidats proposés par Pershing Square ont été élus au conseil d’administration du CP et, moins de
deux mois plus tard, M. Harrison a été recruté comme nouveau président et chef de la direction. Une
description plus détaillée des événements associés à l’affaire du CP figure à l’annexe 3, à la page 14, tandis que l’annexe 4, à la
page 22, présente une liste des membres du conseil d’administration du CP avant et après la course aux procurations.
Amélioration de l’évaluation de la performance, grâce à l’application de mesures bien
définies et à l’expérience dans le secteur
La contre-performance du CP comparativement à ses pairs a été à l’origine d’un débat sur les difficultés
inhérentes à l’évaluation de la performance. «La contre-performance du CP a donné à un investisseur
activiste l’occasion de se manifester, a expliqué l’un des membres du RCCA. La performance de l’entreprise
était en deçà des attentes depuis trop longtemps, et son plan d’action n’était pas crédible.» Les membres du
RCCA ont convenu qu’il était essentiel de déterminer un ensemble approprié de mesures de la performance,
malgré la difficulté de l’exercice. Nombre d’entre eux ont affirmé que les administrateurs bénéficiant d’une
Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée, Avis de convocation à l’assemblée annuelle des actionnaires et Circulaire de sollicitation de procurations
de la direction (Canadien Pacifique, 22 mars 2012), p. 25.
8
Ibid., pp. 27-28.
9
Scott Deveau, «Teachers’ Backs Ackman’s Plan for CP», Financial Post, 7 mai 2012.
10
Ibid.; Brent Jang et Jacquie McNish, «CPPIB Backs Pershing Square in CP Proxy Row», Globe and Mail, 11 mai 2012; Scott Deveau, «CP Blasted
by Proxy Advisor ISS», Financial Post, 3 mai 2012; Scott Deveau, «Glass Lewis Backs Ackman in CP Rail Fight», Financial Post, 9 mai 2012.
11
Scott Deveau, «Fred Green Resigns as CP Rail CEO», Financial Post, 17 mai 2012.
7
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expérience sectorielle ont beaucoup à offrir sur les plans de l’interprétation et de l’évaluation de la
performance de l’entreprise et de la direction.
Importance pour les administrateurs de définir et d’appliquer un ensemble approprié de
mesures de la performance
Les membres du RCCA ont débattu de la question des mesures de la performance, exprimant une variété de
points de vue quant à savoir lesquelles sont les plus appropriées. Certains ont convenu que le cours de
l’action était une mesure clé de la performance. «Jusqu’à un certain point, on peut toujours chercher des
justifications, mais la performance relative de l’entreprise, dont rend compte le cours de l’action, est une
mesure objective avec laquelle il faut bien composer», a fait remarquer l’un d’eux. «Il importe de suivre
l’évolution du cours de l’action; il n’y a pas de meilleure mesure de la performance», a fait valoir un autre
membre du RCCA. Par ailleurs, certains membres ont souligné la nécessité de recourir à de multiples
mesures de la performance. «On ne saurait faire reposer l’évaluation de la performance du chef de la direction
que sur le cours de l’action de l’entreprise, mais il s’agit assurément d’une composante de la performance,
surtout à la longue», a avancé un président de comité d’audit. Abondant dans le même sens, l’un de ses pairs
a formulé le commentaire suivant : «Le rendement total pour les actionnaires est assurément une bonne
mesure de la performance, mais il n’en révèle peut-être pas suffisamment sur la situation de l’entreprise.»
Si les membres du RCCA conviennent que les mesures de la performance dépendent généralement du
secteur d’activité, voire de l’entreprise, ils s’entendent néanmoins sur les propositions générales que voici :
 Application d’une quantité raisonnable de mesures de la performance – «Nous avons
commencé par appliquer 70 mesures de la performance, puis avons réduit ce nombre à 12 pour diverses
divisions de la société», a relaté l’un des membres du RCCA.
 Dosage judicieux de mesures absolues et de mesures relatives – «Dans mon entreprise, nous
sommes partis de zéro pour établir nos mesures de la performance, a affirmé l’un des membres du RCCA.
Grosso modo, elles se répartissent également entre les mesures relatives à nos pairs et les mesures
absolues.»
 Prise en compte de mesures non financières – «Beaucoup de données empiriques démontrent que
le cours des actions n’est pas un indicateur fidèle de la valeur réelle de l’entreprise», a fait remarquer l’un
des membres du RCCA. L’un de ses pairs a renchéri ainsi : «Les mesures financières sont des indicateurs
décalés; elles découlent de décisions prises il y a longtemps». «Les mesures non financières peuvent
s’avérer particulièrement importantes lorsqu’elles se rapportent aux facteurs stratégiques», a fait valoir un
autre membre du RCCA.
 Orientation axée sur les éléments que la direction peut contrôler – «Il convient d’évaluer
l’entreprise en la comparant à un groupe de pairs pertinent, a expliqué l’un des membres du RCCA. Il se
peut qu’elle affiche une bonne performance alors que tout le secteur d’activité se porte bien. Le succès de
l’entreprise ne rend donc pas nécessairement compte de l’efficacité de sa stratégie. Et le contraire est tout
aussi vrai.» «Est-il possible que les mesures que nous utilisons éliminent l’effet de la marée montante
soulevant toutes les embarcations?», s’est interrogé un autre membre.
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 Établissement d’un échéancier approprié – «La direction avait élaboré une formidable stratégie qui
suscitait beaucoup d’enthousiasme, a relaté l’un des membres du RCCA. C’était une excellente stratégie,
mais le conseil d’administration considérait que sa mise en œuvre progressait trop lentement. Après en
avoir parlé avec la direction, nous avons pu accélérer les choses et parvenir à nos fins plus rapidement.»
 Vérification des données utilisées – «Dans mon entreprise, les indicateurs de la performance clés
qu’utilisent les analystes sont examinés par les auditeurs internes, car leur définition n’est pas généralement
reconnue, et le conseil d’administration a l’obligation d’en comprendre le fonctionnement», a expliqué
l’un des membres du RCCA.
Les membres du RCCA ont souligné que les conseils d’administration devraient vérifier régulièrement
quelles sont les mesures utilisées, de façon à en assurer la pertinence en tout temps. «Dans les conseils
d’administration auxquels je siège, la question est débattue chaque année, a affirmé l’un d’eux. Il n’arrive pas
souvent que nous changions nos mesures; mais les cibles, elles, le sont.»
Les administrateurs ayant de l’expérience dans le secteur d’activité de l’entreprise sont un plus
pour le conseil d’administration
Les membres du RCCA soutiennent que les administrateurs bénéficiant d’une expérience dans le secteur
d’activité de l’entreprise peuvent interpréter plus efficacement la performance de celle-ci, de même que celle
de la direction. L’un d’eux a fait la mise en garde suivante : «Lorsqu’aucun administrateur n’est en mesure de
bien cerner la réalité de l’entreprise, il en découle un certain problème de dépendance. Comment le conseil
d’administration peut-il critiquer l’équipe de direction ou ses décisions si sa connaissance du secteur d’activité
de l’entreprise est insuffisante?» «J’ai déjà siégé à un conseil d’administration dont aucun membre ne
connaissait quoi que ce soit au secteur d’activité de l’entreprise, a relaté un autre membre du RCCA. C’est
ce qui a donc poussé le conseil d’administration à recruter trois nouveaux administrateurs. Chacun d’eux
était spécialisé dans la gestion de l’un des trois principaux risques de l’entreprise.» L’un de ses pairs a décrit en
ces termes la valeur que représente pour le conseil d’administration le recrutement d’un spécialiste du secteur
d’activité de l’entreprise : «C’était un peu comme si nous avions mis la main sur un lingot d’or. La
performance du conseil d’administration s’est améliorée par la suite, et le degré de confiance envers la
direction a augmenté, tout ça parce que nous comptions désormais en nos rangs un administrateur capable de
poser les bonnes questions et de juger de la qualité des réponses fournies.»
Nécessité pour le conseil d’administration de maintenir un dialogue permanent sur la
performance du chef de la direction et d’avoir la volonté de passer à l’action lorsqu’il y a
lieu
À la lumière du refus du conseil d’administration du CP de remplacer M. Green au poste de chef de la
direction, les membres du RCCA se sont penchés sur les difficultés auxquelles font face les administrateurs
qui doivent composer avec un chef de la direction inefficace. «On peut facilement destituer un chef de la
direction qui s’avère être une belle crapule, a allégué l’un des membres du RCCA. Toutefois, ce n’est
généralement pas le cas.» «Quand le chef de la direction est en face de vous, vous voulez lui donner sa juste
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chance, a affirmé un autre membre. Ce n’est pas facile de savoir à quel moment il faut laisser tomber et lui
faire savoir que sa chance est passée.»
L’un des membres du RCCA a souligné qu’il n’est pas toujours évident de savoir quand ou comment il
convient de soumettre à l’ensemble du conseil d’administration un problème touchant le chef de la
direction : «Je ne crois pas qu’il y ait nécessairement un événement déclencheur. Un beau jour, on finit par
prendre conscience du problème. Un administrateur peut se demander s’il est le seul à s’en préoccuper. Il
invite alors l’un de ses pairs à prendre un verre et en profite pour vérifier si tous deux voient les choses de la
même façon. Peu à peu, l’idée qu’il y a un problème fait son chemin.»
Les membres du RCCA ont admis que le conseil d’administration joue un rôle essentiel dans la relation qu’il
entretient avec le chef de la direction, notamment sur le plan des communications. L’un d’eux a évoqué
l’expérience vécue dans son entreprise, alors que le président du conseil refusait de reconnaître l’importance
du problème avec le chef de la direction et les aspects les plus graves s’y rattachant. «Je me souviens qu’une
discussion enflammée a eu lieu un jour au sein d’un conseil d’administration auquel je siégeais, mais j’ignore
quel message au juste le président du conseil a finalement livré au chef de la direction.» Par ailleurs, un autre
membre du RCCA a insisté sur l’importance de disposer d’un plan de relève clair, que le président du
conseil est généralement chargé de superviser : «Il faut que le conseil d’administration puisse compter sur une
solution de rechange l’assurant de ne pas avoir à composer avec un chef de la direction inefficace. Je ne crois
pas que le conseil d’administration du CP avait songé à une telle solution de rechange.»
Deux membres du RCCA ont évoqué des exemples de présidents de conseil ayant influé sur les relations
entre les administrateurs de leur entreprise ainsi que sur celles entre le conseil d’administration et le chef de la
direction :
 La décision de destituer le chef de la direction – «Le nouveau chef de la direction d’une entreprise
auprès de laquelle j’agissais comme administrateur avait atteint presque tous les objectifs organisationnels
fixés pour l’exercice, a relaté l’un des membres du RCCA. À n’en juger que d’après la performance
annuelle de l’entreprise, il n’y aurait pas eu lieu de s’inquiéter. Toutefois, puisqu’il avait entendu de
plusieurs administrateurs que quelque chose n’allait pas, le président du conseil a décidé de tenir à
l’extérieur de l’entreprise une réunion du conseil d’administration à laquelle la direction n’était pas invitée
et dont elle n’avait pas non plus été mise au courant. Il a alors demandé aux administrateurs comment ils
voyaient l’entreprise dans cinq ans. Il leur a ensuite demandé de définir les compétences que le chef de la
direction devait avoir pour pouvoir réaliser les objectifs avancés. Les membres du conseil d’administration
ont finalement été appelés à comparer les compétences du chef de la direction en poste avec celles
s’avérant nécessaires à l’atteinte de ces objectifs. À la fin de la réunion, la décision de destituer le chef de la
direction a été prise à l’unanimité. Cette décision a été motivée moins par son problème de performance
que par son incapacité à réaliser les objectifs établis.»
 Élaboration d’un plan d’amélioration de la performance du chef de la direction – «Dans mon
entreprise, nous nous sommes demandé comment nous pouvions aider le chef de la direction à devenir le
plus efficace possible, a relaté l’un des membres du RCCA. Le président du conseil a rédigé un mémo
résumant les commentaires des administrateurs, puis il l’a passé en revue avec nous, avant d’en faire part
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au chef de la direction. Nous procédons maintenant ainsi chaque trimestre. Il s’agit d’un message positif,
dans lequel nous soulignons les points forts du chef de la direction et les aspects à améliorer, dans un
contexte de grande transparence.»
Nécessité pour le conseil d’administration de connaître le point de vue des actionnaires
Dans une lettre qu’il a récemment adressée aux investisseurs de Pershing Square, M. Ackman a souligné que
l’importance de la victoire écrasante remportée à l’issue de la course aux procurations au CP n’était pas passée
inaperçue au sein des conseils d’administration des entreprises canadiennes et américaines. Il a rappelé qu’un
actionnaire activiste du CP d’origine américaine avait alors obtenu l’appui massif des actionnaires canadiens
et américains dans le cadre d’une campagne contre le prestigieux conseil d’administration de cette entreprise
canadienne emblématique – forte capitalisation. Le succès de la démarche engagée alors au CP démontre
qu’aucune entreprise contre-performante ne peut résister aux changements nécessaires proposés par un
investisseur à long terme crédible 12.
Bien des membres du RCCA ont avancé que l’activisme des actionnaires et d’autres vecteurs de changement
gagnent probablement en importance au Canada, bien qu’il s’agisse encore d’un phénomène isolé pour le
moment. «Jusqu’à ce que survienne cette affaire au CP, il y avait longtemps que l’on n’avait pas vu au
Canada une telle empoignade, a fait remarquer l’un d’eux. Et je crois que ce n’est pas fini; ce n’est que le
début.» «Si les projections actuelles annonçant la léthargie des marchés sont justes, les investisseurs vont se
mettre à la recherche de nouvelles façons de gagner de l’argent, a expliqué un autre membre du RCCA. Je
crois donc qu’il y aura d’autres affaires du genre.» Les membres du RCCA ont discuté de l’importance pour
les conseils d’administration de connaître les principaux actionnaires et d’échanger avec eux.
Importance d’obtenir un éclairage indépendant sur ce que pensent les investisseurs
Les membres du RCCA ont parlé de divers moyens permettant au conseil d’administration de se tenir au fait
de l’évolution de l’opinion des investisseurs. «Il faut que le conseil d’administration puisse régulièrement
sonder les investisseurs pour savoir ce qu’ils pensent réellement, a affirmé un président de comité d’audit. Il
importe qu’il puisse entretenir des relations satisfaisantes avec un bon groupe d’investisseurs, de façon à ce
que les administrateurs ne soient pas obligés de s’en tenir seulement à l’information filtrée par la direction.»
Un autre membre du RCCA prévient que, malgré des échanges réguliers avec les actionnaires, la direction
peut faire la sourde oreille et amener le conseil d’administration à mal interpréter leur état d’esprit.
Les membres du RCCA ont décrit plusieurs approches utilisées par leur conseil d’administration pour
favoriser une meilleure compréhension du point de vue des principaux investisseurs :
 Sondages indépendants auprès des investisseurs – L’un des membres du RCCA a fait valoir qu’il
était avantageux de confier à des consultants spécialisés le mandat de réaliser des sondages indépendants
auprès des investisseurs : «Les résultats des sondages sont ensuite présentés au conseil d’administration, les
12
Bill Ackman aux investisseurs de Pershing Square, lettre du 12 juin 2012. Voir également Steven M. Davidoff, «How Ackman Won in the Fight
Over Canadian Pacific», Dealbook (blogue), New York Times, 17 mai 2012 : «According to Factset Sharkrepellent, 36 percent of all activist
campaigns so far this quarter have been against companies with a market capitalization of more than [US]$1 billion.»
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consultants lui communiquant alors les commentaires recueillis, qui doivent être portés à la connaissance
des administrateurs.»
 Communications des analystes – Les membres du RCCA ont fait observer que la simple prise de
connaissance des communications des analystes permet de recueillir énormément d’informations sur la
façon dont le marché perçoit une entreprise, son équipe de leadership et ses orientations stratégiques.
 Synthèses des rapports des analystes – Certains membres du RCCA ont dit recevoir une synthèse
des rapports des analystes au lieu de tous les rapports pertinents, lesquels, globalement, peuvent
représenter une quantité d’information considérable. «Je reçois un condensé des plus récents rapports des
analystes, qui présente l’information importante qui en a été tirée, a expliqué l’un d’eux. Je recueille ainsi
des points de vue que la direction respecte, pas seulement ceux avec lesquels elle est d’accord. Si les
analystes ont des critiques à formuler, je dois le savoir. Qu’ont-ils au juste à reprocher à l’entreprise?»
 Webémission de la Journée des investisseurs – «Les administrateurs n’ont généralement pas
l’occasion de participer à la Journée des investisseurs, a fait remarquer l’un des membres du RCCA.
J’adore avoir la possibilité de visionner la webémission de l’événement. Je peux passer tout de suite à la
période des questions et écouter ce que les investisseurs ont à dire.»
Intervention du conseil d’administration auprès des principaux investisseurs
Étant donné que l’insatisfaction des actionnaires risque d’entraîner des conséquences graves, bien des
membres du RCCA ont insisté sur l’importance pour le conseil d’administration d’échanger avec eux,
s’agissant pour lui du moyen le plus direct d’arriver à comprendre leur vision des choses, sans filtrage de
l’information. L’un des membres a souligné l’avantage d’avoir des échanges réguliers avec les actionnaires :
«En cas de problème, on ne s’adresse pas à de simples étrangers.» Un autre membre du RCCA a néanmoins
lancé l’avertissement suivant : «Vous avez beau passer énormément de temps à discuter avec les actionnaires,
s’ils refusent de vous croire, vous n’êtes pas plus avancés. Je crois que c’est ce qui s’est produit au CP.»
La question de savoir si le conseil d’administration doit intervenir directement auprès des principaux
actionnaires de l’entreprise ou s’il revient plutôt à la direction de le faire a suscité des divergences de vues
entre les membres du RCCA. «Le président du conseil doit connaître les investisseurs institutionnels clés, a
fait valoir l’un d’eux. Souvent, l’équipe de direction considère que cette tâche lui est dévolue. Il est pourtant
souhaitable d’éviter de rencontrer les investisseurs pour la première fois alors qu’il y a un problème.» Par
ailleurs, un autre membre du RCCA a mentionné la subtilité de la distinction entre le rôle de représentant
des actionnaires et l’initiation d’échanges directs avec eux : «La plupart des administrateurs ne s’adressent pas
aux investisseurs publiquement, ni même en privé, sauf en de très rares circonstances. En prévision de telles
circonstances, il faut que le conseil d’administration se dote d’une politique claire et qu’il désigne
son porte-parole 13.»
13
Pour en apprendre davantage à cet égard, consultez le document suivant de Tapestry Networks (en anglais seulement) : «ViewPoints: Advancing
Board-shareholder Engagement», 2012.
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Importance de la culture dans la façon qu’a le conseil d’administration de réagir au
changement
Les membres du RCCA se sont également penchés sur le processus de mise en œuvre des changements, en
examinant notamment le rôle du président du conseil dans la culture du conseil d’administration, la qualité
des échanges entre les administrateurs et la diversité des réactions aux propositions de changement. Beaucoup
ont signalé que la nature personnelle de leurs relations avec la direction et avec les autres membres du conseil
d’administration pouvait éventuellement représenter un obstacle au changement. En outre, des membres du
RCCA ont donné à entendre que les relations entre des administrateurs siégeant à un même conseil
d’administration, ou même à des conseils d’administration différents, pouvaient nuire au changement. Par
exemple, lorsqu’il a cherché à obtenir l’appui des investisseurs institutionnels ou à recruter des aspirants
administrateurs acceptant de figurer sur sa liste de dissidents, M. Ackman a déclaré ceci : «L’un des candidats
potentiels que j’ai approchés m’a carrément dit qu’il côtoyait certains des administrateurs en poste au
Toronto Club, qu’il les connaissait et qu’il ne pouvait pas décemment se présenter contre eux 14.» «Les gens
sont jugés d’après leurs fréquentations», a tout simplement rétorqué l’un des membres du RCCA.
Un débat sain et des communications franches sont la marque d’un conseil d’administration
efficace
Dans leur examen des réactions du conseil d’administration face au changement, les membres du RCCA se
sont concentrés sur les points suivants :
 Le rôle essentiel du président du conseil dans le façonnement de la culture du conseil
d’administration – Les membres du RCCA ont discuté du rôle de modérateur du président du conseil
dans le contexte de discussions difficiles et de son rôle dans la définition du ton donné par le conseil
d’administration. «Il incombe au président du conseil d’établir les règles du jeu, car tous les
administrateurs sont au service des mêmes actionnaires, a expliqué l’un de leurs pairs. C’est aux présidents
de comité et au président du conseil de veiller à la bonne circulation de l’information, tout en se
montrant réceptifs.» «La séparation du rôle de président du conseil et de celui de chef de la direction
facilite les choses, a souligné un autre membre du RCCA. Le président du conseil joue en effet un rôle
essentiel dans l’influence qu’il exerce sur les administrateurs.» Tandis qu’il évoquait le rôle crucial du
président du conseil dans les relations entre le conseil d’administration et la direction, un président de
comité d’audit a souligné que les relations et la dynamique des communications dépendent également de
lui. Plusieurs membres du RCCA ont fait remarquer que le président du conseil agit souvent comme
agent de liaison entre le conseil d’administration et le chef de la direction. «Au besoin, il peut faire figure
d’arbitre entre la direction et le conseil d’administration, a affirmé l’un d’eux. Il peut aussi véhiculer les
messages importants entre les deux.»
 La valeur de la dissidence – Les membres du RCCA ont débattu des vertus d’un débat sain entre les
membres du conseil. «Les discussions doivent être axées sur les problèmes et faire fi des traits de
personnalité», a souligné l’un des membres du RCCA. Un autre membre a indiqué : «Tous les votes
14
Scott Deveau, «Corporate Culture Shift Underway after CP Rail Proxy Fight», Financial Post, 11 mai 2012.
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n’ont pas à être forcément unanimes. Les abstentions et les votes négatifs sont acceptables, en autant qu’ils
donnent lieu à des explications, et que les votes affirmatifs soient également justifiés.» «En l’absence de
toute opposition, la quête d’un débat sain en prend pour son rhume», a soutenu l’un de ses pairs. «Tous
les conseils d’administration ont besoin d’un dissident dans leurs rangs, a allégué un président de comité
d’audit. D’après mon expérience, ça ne les dérange pas de se démarquer ou de faire partie de la minorité.»
L’un de ses pairs s’est dit du même avis, «en autant que le débat ne devienne pas dysfonctionnel».
Les administrateurs doivent être ouverts aux points de vue de l’extérieur
Selon les membres du RCCA, des intervenants externes agissent parfois comme catalyseurs, évaluateurs et
validateurs du changement. Toutefois, d’après l’un d’eux, «la publicisation aussi rapide du débat est l’un des
facteurs qui ont empêché l’affaire du CP de prendre une autre tangente qui aurait pu provoquer une
polarisation des deux parties». Un autre membre du RCCA a souligné que l’arrivée d’un investisseur activiste
proposant des changements provoque, dans un premier temps, une réaction de colère : «Pour reconnaître
que l’activiste puisse avoir raison, le conseil d’administration doit être fort. Les bons activistes s’assurent que
leurs idées s’appuient sur des fondements solides. On risque gros en décidant de les ignorer.» «Il faut vraiment
écouter et comprendre les idées que défend un activiste, a avancé un président de comité d’audit. Il y a lieu
de se demander si le changement proposé tient la route. Il importe alors d’obtenir l’avis d’un tiers, car le
conseil d’administration n’a pas un regard objectif.» «Lorsque, comme dans le cas du CP, un tiers donne son
avis quant à la personne qui devrait exercer les fonctions de chef de la direction, je vois mal que le conseil
d’administration puisse donner d’emblée son assentiment, a soutenu un autre membre du RCCA. Je crois
que ce sont les investisseurs institutionnels qui ont fait la différence en ratifiant les changements proposés par
M. Ackman. Ils ont blâmé le conseil d’administration de ne pas avoir constaté les problèmes de performance
et de ne pas avoir pris les mesures nécessaires.»
Quant à la façon dont un administrateur doit décider s’il peut oui ou non continuer de siéger à un conseil
d’administration ébranlé par un événement perturbateur, l’un des membres du RCCA a tenu les propos
suivants : «Une responsabilité fiduciaire, une obligation envers la personne morale de l’entreprise, échoit à
chaque administrateur, même lorsqu’il n’apprécie pas particulièrement les nouveaux arrivants au sein du
conseil d’administration.» Un autre membre du RCCA a convenu que la qualité des relations entre les
administrateurs est un facteur déterminant : «La question qu’il faut se poser en tant qu’administrateur, c’est
dans quelle mesure on est à l’aise de travailler avec les autres membres du conseil d’administration. Les aspects
intangibles de l’appartenance au conseil d’administration sont ce qu’il y a de plus important à prendre
en compte.»
Conclusion
Bien que les événements entourant l’affaire du CP aient permis de cerner un certain nombre d’enjeux ayant
servi de tremplin pour aborder les leçons générales à en tirer, l’un des membres du RCCA a fait valoir qu’«il
est difficile de se prononcer sans avoir participé aux délibérations ayant eu lieu au CP». Les membres du
RCCA ont profité de la réunion pour discuter des méthodes efficaces d’évaluation de la performance, des
difficultés liées à un chef de la direction contre-performant, de la prise en compte des vues des principaux
actionnaires et du processus d’instauration de changements importants, de même que de la façon de réagir à
Leçons à tirer de la récente course aux procurations au Canadien Pacifique
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DES COMITÉS D’AUDIT
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ces changements. «Il est si facile de prendre des habitudes, a conclu l’un d’eux. L’affaire du CP a eu l’effet
d’un véritable coup de semonce. Nous avons pris conscience qu’une grande entreprise canadienne
traditionnelle pouvait être entraînée dans un véritable cauchemar.» Les membres du RCCA sont tombés
d’accord sur le fait que la course aux procurations au CP n’est pas un événement isolé et qu’il s’agit d’un
signe avant-coureur de la montée de l’activisme au Canada. L’un d’eux a alors lancé la question suivante :
«Dans un contexte où les actionnaires prennent de plus en plus de place, quel doit être le rôle du conseil
d’administration?»
Au sujet du présent document
Le Réseau canadien des comités d’audit (RCCA) est un groupe de présidents de comités d’audit de grandes sociétés qui se sont
engagés à améliorer la performance des comités d’audit et à promouvoir la confiance envers les marchés des capitaux. Le
réseau est organisé et dirigé par Tapestry Networks, avec le soutien d’Ernst & Young, et représente l’engagement permanent
de l’entité à favoriser l’efficacité et la bonne gouvernance des conseils d’administration.
La publication VantagePoint est publiée par Tapestry Networks afin de favoriser les discussions de fond en temps opportun au
sein du conseil d’administration sur les choix auxquels les membres du comité d’audit, les dirigeants et leurs conseillers font
face alors qu’ils s’évertuent à s’acquitter de leurs responsabilités respectives envers les investisseurs. Le principal mérite de la
publication VantagePoint réside dans le fait qu’elle aide toutes les parties prenantes à préciser leur propre point de vue éclairé
sur les enjeux importants de ce genre. Tous ceux et celles qui la reçoivent sont invités à la mettre à la disposition des membres
de leur propre réseau. Plus les administrateurs, les membres de la direction et leurs conseillers prendront systématiquement
part au débat, plus la valeur qui en découlera pour tout le monde sera importante.
Les points de vue exprimés dans le présent document n’engagent que la responsabilité de Tapestry Networks et ne reflètent pas nécessairement
l’opinion individuelle des membres du réseau ou des participants à ses réunions, ni le point de vue de leurs sociétés affiliées ou celui d’Ernst & Young.
Pour obtenir un avis particulier, veuillez consulter vos conseillers. Ernst & Young désigne l’ensemble des sociétés membres d’Ernst & Young Global,
chacune étant une entité juridique distincte. Le présent document a été préparé par Tapestry Networks, qui en détient tous les droits d’auteur. Son
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Leçons à tirer de la récente course aux procurations au Canadien Pacifique
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Annexe 1 : Participants à la réunion du RCCA
Les membres suivants du RCCA ont participé à la réunion :
 John Caldwell, IAMGOLD
 Denis Desautels, Bombardier
 Michel Labonté, Metro
 Eileen Mercier, Teekay
 Tom O’Neill, Banque Scotia, Nexen et Loblaw
 Jane Peverett, EnCana
 Barb Stymiest, George Weston Limited
Les membres suivants ont pris part aux discussions avant ou après la réunion :
 Bill Anderson, TransAlta Corporation et Gildan Activewear
 Peter Case, Fortis
 Marc Courtois, Groupe TVA
 David Leslie, Enbridge
 Bill Shurniak, Husky Energy
 Stuart Smith, Groupe Altus
 Bob Steacy, Domtar et Cineplex Galaxy
Les associés d’Ernst & Young Canada suivants ont participé à la réunion :
 Tom Kornya, associé directeur, Certification
 Eric Rawlinson, associé directeur, Grand Toronto
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Annexe 2 : Questions que doivent se poser les membres des comités d’audit et les autres
administrateurs
?
Comment le conseil d’administration doit-il s’y prendre pour évaluer la performance de l’entreprise?
Outre le rendement total pour l’actionnaire, quelles sont les mesures absolues et les mesures relatives
facilitant cette évaluation?
?
Dans quelle mesure le conseil d’administration devrait-il s’approprier les mérites de la bonne
performance de l’entreprise? Dans quelle mesure devrait-il être blâmé pour la contre-performance de
l’entreprise?
?
Dans quelles circonstances le conseil d’administration peut-il décider que le moment est venu de
procéder à un changement au sein de l’équipe de direction et comment procède-t-il pour ce faire?
?
Quelle approche votre entreprise adopte-t-elle pour engager un dialogue avec ses investisseurs
institutionnels et ses autres parties prenantes (cabinets d’experts-conseils spécialisés en procurations,
leaders de la collectivité, ONG, etc.)? Son approche varie-t-elle selon le groupe de parties prenantes?
Quelles sont les questions que les investisseurs et les autres parties prenantes posent à votre entreprise
relativement à sa gouvernance, à sa performance et à d’autres sujets de cet ordre?
?
Quelle quantité de renseignements sur les actionnaires le conseil d’administration devrait-il recueillir?
À quelle fréquence ces renseignements devraient-ils être mis à jour?
?
Quels sont les avantages et les inconvénients associés à l’exercice par le conseil d’administration d’un
rôle proactif dans les échanges entre les actionnaires et les parties prenantes? Quels sont les
administrateurs les mieux placés pour intervenir et sur quelles questions?
?
Chacun des membres du conseil d’administration devrait-il contribuer à la création d’un
environnement confortable tant pour les administrateurs en poste que pour les nouveaux
administrateurs, auquel cas, comment convient-il de s’y prendre?
?
Quelles pratiques particulières permettent aux administrateurs d’accroître leur influence? Dans quelle
mesure cette influence repose-t-elle sur la personnalité et dans quelle mesure repose-t-elle sur des
facteurs objectifs tels que la connaissance du secteur d’activité et l’expérience qui y a été acquise?
?
Pourquoi faut-il souvent qu’un intervenant externe agisse comme catalyseur du changement?
Leçons à tirer de la récente course aux procurations au Canadien Pacifique
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Annexe 3 : Chronologie détaillée de la course aux procurations au Canadien Pacifique
C’est en 1881 que le Canadien Pacifique (CP) a été fondé pour permettre la construction de la première
ligne de chemin de fer transcontinentale du Canada. En 1885, le dernier crampon de cette ligne de chemin
de fer a été installé à Craigellachie, en Colombie-Britannique 15. Plus d’un siècle plus tard, le CP est devenu
une entreprise canadienne emblématique qui exploite plus de 22 500 kilomètres de voies ferrées reliant
Vancouver à Montréal, de même que divers centres industriels des États-Unis.
Toutefois, à partir de 2008, le CP a commencé à accuser un retard sur les cinq autres chemins de fer de
classe I en Amérique du Nord
(Norfolk Southern, Burlington
Northern, CSX, Union Pacific
et la Compagnie des chemins de
fer nationaux du Canada) 16. Le
graphique ci-contre indique que
le ratio d’exploitation du CP –
qui correspond au total des
charges d’exploitation exprimé
en pourcentage des produits
(plus ce pourcentage est bas,
mieux c’est) – n’a pas progressé
au même rythme que celui de
ses pairs 17.
Bien que le CP soit souvent
comparé à la Compagnie des
chemins de fer nationaux du Canada (CN), les deux entreprises font face à des défis uniques. «C’est une
erreur de sous-estimer les différences entre l’infrastructure du CP et celle du CN, a déclaré Ed Harris,
ex-chef de l’exploitation du CN, puis du CP. Beaucoup plus étendue que celle du CP, l’infrastructure
ferroviaire du CN a été financée par les contribuables canadiens. Le CN bénéficie donc de beaucoup plus de
latitude sur le plan opérationnel 18.» «Une grande partie du trafic ferroviaire du CP dans la région de
Vancouver passe par le col Rogers, un passage dangereux exposé aux avalanches et où des accumulations de
neige annuelles de cinq mètres ne sont pas inhabituelles, a rappelé un commentateur. La topographie du lieu
présente des difficultés telles que des dénivelés importants, des voies givrées et des goulots d’étranglement 19.»
«Des six grands transporteurs ferroviaires, le CP compte parmi les plus régionalisés, a expliqué un autre
commentateur. Il est voué à dépendre de la demande mondiale de produits de base ainsi que des conditions
climatiques et topographiques les plus difficiles parmi celles auxquelles sont exposés les principaux chemins
15
Canadien Pacifique, Survol historique, page Web consultée le 1er octobre 2012.
Scott Deveau, «Tale of Two Railways: Why CP May Never Be CN».
17
Ibid.
18
Ibid.
19
Tom Slee, «The Little Engine That May Not», MSN Money, 9 mai 2012.
16
Leçons à tirer de la récente course aux procurations au Canadien Pacifique
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de fer de l’Amérique du Nord, en raison de la concentration de ses activités dans les Prairies et dans la
province au relief accidenté de la Colombie-Britannique 20.»
En juin 2011, le CP a organisé une rencontre d’investisseurs à l’occasion de laquelle il a dévoilé un plan de
redressement pluriannuel ayant notamment pour objectif d’abaisser son ratio d’exploitation de façon à ce
qu’il s’établisse entre 70 et 75 dans un délai de trois à quatre ans 21. Malgré l’annonce d’un plan de
redressement, la performance du CP par rapport à celle de ses pairs n’a pas empêché Pershing Square Capital
Management de considérer que l’entreprise présentait un potentiel d’investissement attrayant 22. Le 28 octobre
2011, Pershing Square a annoncé publiquement s’être portée acquéreur de 12,2 % des actions du CP au
cours du mois précédent 23. Ce jour-là, le cours de l’action du CP a clôturé à 63,80 $ CA 24.
David Olive, «CP Rail Activist Bill Ackman Won’t Deliver on His Promises to Turn CP Around: Olive», Toronto Star, 17 mai 2012.
Allan Dowd, «CP Rail Stresses Long-Term View after Weather Woes», Canada.com, 13 juin 2011.
22
Scott Deveau, «Corporate Culture Shift Underway after CP Rail Proxy Fight».
23
Pershing Square, Schedule 13D.
24
«Canadian Pacific Railway Limited (CP.TO) – Toronto», Yahoo! Finance, 28 octobre 2011.
20
21
Leçons à tirer de la récente course aux procurations au Canadien Pacifique
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Historique de Pershing Square – Faits pertinents
Avant d’investir dans le CP, Pershing Square a tenté à diverses reprises d’insuffler des changements
dans la gouvernance d’autres entreprises :
 En mai 2006, M. Ackman a déclaré publiquement qu’il considérait Canadian Tire comme étant l’une
de ses meilleures idées d’investissement, indiquant qu’il avait déjà rencontré Tom Gauld, qui venait
alors d’être nommé chef de la direction de la société 25. Même si le conseil d’administration de
Canadian Tire avait pris connaissance du conseil stratégique de M. Ackman, il ne l’a jamais suivi, et
il n’avait pas à le faire. Martha Billes, la fille du fondateur de Canadian Tire, détenait 61,4 % des
droits de vote de l’entreprise, et le principal actionnaire institutionnel a affirmé alors ne pas croire
que les changements proposés par Pershing Square allaient dans le sens de l’intérêt supérieur des
actionnaires à long terme 26.
 En 2009, Pershing Square s’est engagée dans une course aux procurations contre le détaillant
américain Target, cherchant ainsi à faire élire cinq candidats au conseil d’administration de
l’entreprise, en plus de proposer une restructuration de celle-ci ainsi que la monétisation d’une
grande partie de son portefeuille immobilier. Target avait engagé un dialogue permanent actif
avec Pershing Square à partir de 2007, lorsque celle-ci y a investi pour la première fois. Souhaitant
dissuader les actionnaires de voter pour les dissidents figurant sur la liste des candidats à un poste
d’administrateur, Target s’est présentée comme une entreprise qui, même si elle devait composer
avec la récession qui battait alors son plein, affichait une solide performance à long terme, tandis
qu’elle a dépeint Pershing Square comme un fonds de couverture ne cherchant qu’à doper à court
terme la valeur de son investissement. Outre la soixantaine de communications que Target et
Pershing Square ont adressées à la presse écrite et à la SEC au cours de la période de deux mois sur
laquelle s’est échelonnée cette course aux procurations, Target a eu recours à divers médias pour
communiquer son message aux investisseurs, dont son site Web consacré à l’assemblée annuelle.
Elle a finalement réussi à remporter le défi lancé par Pershing Square 27.
Suite à la page suivante
National Post, «Canadian Tire Gets a Nod in New York», Canada.com, 25 mai 2006.
National Post, «U.S. Hedge Fund Kicks the Tire», Canada.com, 4 juillet 2006.
27
Bass, Berry & Sims, «Shareholder Activist Developments: The Target-Pershing Square Proxy Fight», Corporate and Securities Law Alert,
3 juin 2009.
25
26
Leçons à tirer de la récente course aux procurations au Canadien Pacifique
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RÉSEAU CANADIEN
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Historique de Pershing Square – Faits pertinents (suite)
 En octobre 2010, Pershing Square a annoncé avoir acquis une participation de 16,5 % dans le
détaillant J.C. Penney, Vornado Realty Trust annonçant pour sa part s’être portée acquéreur d’une
participation de 9,9 % dans l’entreprise 28. En janvier 2011, J.C. Penney a offert à Steven Roth, de
Vornado Realty Trust, et à M. Ackman de siéger à son conseil d’administration 29. En novembre
2011, après que M. Ackman soit entré en contact pour la première fois avec Ron Johnson, exdirecteur de la division du commerce de détail d’Apple, J.C. Penney a recruté celui-ci comme chef
de la direction. Un peu plus de six mois après la mise en œuvre de la stratégie de redressement
proposée par
M. Johnson, en juin 2012, Michael Francis a démissionné en tant que président du Conseil de
J.C. Penney, et le titre de l’entreprise a perdu plus de 10 % de sa valeur en une seule journée 30.
Néanmoins, M. Ackman s’est dit toujours aussi convaincu du bien-fondé de la stratégie de
J.C. Penney 31.
Selon le Financial Post, Pershing Square s’est montrée intéressée par le CP lorsque l’un de ses associés a pris
connaissance de l’insatisfaction grandissante des investisseurs à l’égard de l’entreprise. À l’été 2011, lors d’une
réunion d’un groupe sélect de gestionnaires de portefeuilles prestigieux invités à discuter des possibilités
offertes dans le secteur des transports, un investisseur s’est dit frustré que le conseil d’administration du CP
n’ait pas mis à la porte le chef de la direction de l’entreprise, M. Green 32. Un gestionnaire de portefeuilles
présent à la réunion a affirmé que cet investisseur était dégoûté de constater que le chef de la direction était
un parfait incapable et qu’il souhaitait donc voir un activiste s’en mêler en exerçant des pressions sur le
conseil d’administration pour qu’il adopte les mesures qu’il aurait dû prendre il y a longtemps 33. D’autres
investisseurs du CP se sont joints à cet investisseur, provoquant une vague d’hostilité à l’égard du conseil
d’administration en place, ce qui a fait dire à ce gestionnaire de portefeuilles que l’on s’entendait
généralement sur le fait qu’il était temps qu’un activiste «mette de l’ordre dans la boîte» 34.
En octobre 2011, M. Cleghorn, président du Conseil du CP, a eu deux conversations téléphoniques avec
M. Ackman, qui a alors proposé des modifications importantes à la haute direction du CP 35. Au cours des
deux mois qui ont suivi, des représentants de Pershing Square, dont M. Ackman, ont eu une dizaine
d’entretiens en privé avec MM. Cleghorn et Green, ainsi qu’avec d’autres membres du conseil
Michael J. De La Merced, «J.C. Penney Gives Board Seats to Roth and Ackman», DealBook (blogue), New York Times, 24 janvier 2011.
Ibid.
30
Lisa Du, «Bill Ackman Says JC Penney’s Marketing Strategy Wasn’t Working, but He Still Believes in Ron Johnson», Business Insider,
19 juin 2012.
28
29
31
Ibid.
32
Deveau, «Corporate Culture Shift Underway after CP Rail Proxy Fight».
33
Ibid.
34
Ibid.
35
Canadien Pacifique, «Avis de convocation à l'assemblée annuelle des actionnaires et Circulaire de sollicitation de procurations de la direction»,
pp. 17-18.
Leçons à tirer de la récente course aux procurations au Canadien Pacifique
17
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d’administration. Ils ont alors discuté notamment de la proposition de Pershing Square de remplacer
M. Green par l’ex-chef de la direction du CN, M. Harrison, ainsi que de ses allégations voulant que celui-ci
soit en mesure de ramener le ratio d’exploitation du CP au niveau de celui du milieu des années 1960 d’ici
2015 36. Au cours de ces pourparlers, le conseil d’administration du CP s’est réuni régulièrement pour évaluer
la proposition de Pershing Square, y compris l’aptitude de M. Harrison à diriger le CP 37.
En décembre 2011, afin de rehausser le niveau d’expérience sectorielle au sein du conseil d’administration, le
CP a intégré en ses rangs Tony Ingram et Ed Harris, qui ont été nommés au comité de la sécurité, de
l’exploitation et de l’environnement, lequel supervise la mise en œuvre du plan pluriannuel 38. Également en
décembre 2011, le conseil d’administration du CP a eu avec M. Ackman une entrevue dans le cadre de
laquelle il lui a offert un poste d’administrateur, offre que M. Ackman a refusée en indiquant que la signature
d’une entente de confidentialité et de moratoire comme condition préalable à sa nomination lui paraissait
inacceptable 39. C’est peu après que les négociations et les pourparlers ont été rendus publics.
Signes avant-coureurs connus de la course aux procurations
Le 30 décembre 2011, le Globe and Mail a annoncé que Pershing Square avait l’intention d’œuvrer en
faveur du remplacement de M. Green par M. Harrison, soulignant que certains membres du conseil
d’administration du CP avaient exprimé avec enthousiasme leur appui au recrutement de ce dernier 40.
Au cours de la semaine qui a suivi, MM. Cleghorn et Ackman se sont livrés à un échange de lettres
ouvertes, qui s’est soldé par la suspension des communications et rencontres en privé. C’est alors que la
menace de course aux procurations est devenue plus concrète.
 Le 3 janvier 2012, M. Cleghorn a envoyé à M. Ackman une lettre ouverte dans laquelle il rectifiait
des allégations présentées dans les médias, en soulignant qu’aucun administrateur du CP ne s’était
montré enthousiaste à l’égard de M. Harrison et n’avait cherché à le rencontrer, et que le CP
pouvait compter sur une solide équipe de direction ainsi que sur un conseil d’administration
indépendant 41.
 Ce jour-là, M. Ackman a réfuté les allégations de M. Cleghorn, en déclarant par écrit que celui-ci
l’avait appelé le 2 novembre pour lui demander d’organiser une rencontre avec M. Harrison 42. Dans
cette lettre, après avoir souligné que le CP affichait la pire performance, M. Ackman a poursuivi en
déclarant avoir l’intention d’en faire l’une des sociétés de chemins de fer les plus performantes
Canadien Pacifique, «Avis de convocation à l'assemblée annuelle des actionnaires et Circulaire de sollicitation de procurations de la direction»,
pp. 19-22.
37
Ibid.
38
Ibid., pp. 20-21.
39
Ibid., pp. 20-21.
40
Jacquie McNish et Brent Jang, «CP’s Activist Investor Eyes Former CN CEO Hunter Harrison», Globe and Mail, 30 décembre 2011.
41
Boyd Erman, «Back off: The Full CP Letter to Ackman», Globe and Mail, 3 janvier 2012.
42
Boyd Erman, «Ackman Fires Back at CP: The Full Letter», Globe and Mail, 3 janvier 2012.
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Leçons à tirer de la récente course aux procurations au Canadien Pacifique
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d’Amérique du Nord, grâce à une série de transformations culturelles et opérationnelles devant
commencer par la désignation d’un nouveau leader 43.
 Le matin du 4 janvier, M. Ackman a fait parvenir à M. Cleghorn un courriel désormais célèbre dont
l’objet s’intitulait «War and Peace» (Guerre et paix) et dans lequel il menaçait de «transformer
cette escarmouche en un hiver nucléaire 44.» Après avoir relaté les tractations entre Pershing Square
et le CP, M. Ackman a conclu en déplorant l’état de la situation ainsi que les accusations publiques
selon lesquelles il aurait fait des déclarations mensongères et trompeuses 45.
 «La plupart des administrateurs souhaitent prendre les mesures qui s’imposent, mais, dans un
contexte où des actionnaires activistes passent par les journaux pour arriver à leurs fins, il devient
très difficile de prendre les bonnes décisions», a fait valoir un gestionnaire de
capital-investissement 46.
Le 9 janvier 2012, M. Ackman a annoncé que Pershing Square avait l’intention de s’engager dans une course
aux procurations visant à faire élire des administrateurs favorables à des changements à la haute direction du
CP 47. Le 24 janvier, Pershing Square a annoncé le nom des cinq candidats à un poste d’administrateur qu’elle
entendait proposer en vue de l’élection du conseil d’administration prévue dans le cadre de l’assemblée
annuelle des actionnaires du CP du 17 mai dernier 48.
Le 6 février, Pershing Square a tenu à Toronto – à l’intention des investisseurs du CP, des analystes et des
médias – une rencontre de type réunion au sommet à l’occasion de laquelle M. Harrison a déclaré que le CP
présentait un grand potentiel et que d’énormes possibilités lui étaient offertes. Selon M. Harrison, les
difficultés de l’entreprise tenaient à son incapacité à exécuter sa stratégie, et le moment était venu pour elle
de procéder aux transformations requises sur le plan de la culture organisationnelle 49.
À la réunion des investisseurs du CP qui a eu lieu en mars dernier, M. Green a déclaré que, sous sa direction,
les améliorations entamées au CP allaient se poursuivre, tandis que M. Harrison ne réussirait qu’à faire fuir les
clients 50. Il a alors affirmé que les expéditeurs devaient pouvoir voter également, que leur poids électoral
variait selon leur part de marché et que Claude Mongeau et le CN avaient ouvert les bras à ces clients
lorsqu’il s’est agi d’appliquer un modèle de transformation organisationnelle très différent de celui mis en
œuvre par le dernier leader en place 51.
Boyd Erman, «Ackman Fires Back at CP: The Full Letter», Globe and Mail, 3 janvier 2012.
«War of Words: The E-mails That Touched off a Battle at CP», Globe and Mail, 16 janvier 2012.
45
Ibid.
46
Simon Avery, «Two Views on Bringing Change to CP Rail», Globe and Mail, 30 mars 2012.
47
Canadien Pacifique, Avis de convocation à l'assemblée annuelle des actionnaires et Circulaire de sollicitation de procurations de la direction, p. 21.
48
Ibid., p. 22.
49
Allison Martell et Pav Jordan, «CEO Hopeful Vows to Shake Up Canadian Pacific», Reuters, 6 février 2012.
50
Allison Martell and Nicole Mordant, «CP Rail’s Green Shows Critics He Can Talk Tough Too», Toronto Sun, 27 mars 2012.
51
Ibid.
43
44
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DES COMITÉS D’AUDIT
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Tout au long de la course aux procurations, le conseil d’administration du CP a ouvertement soutenu le plan
de redressement et sa mise en œuvre par M. Green 52. En plus d’avancer que ce plan pluriannuel était une
réussite et qu’il avait été mis en œuvre par «une équipe de direction dynamique agissant sous la supervision
du conseil», le CP a soutenu qu’il avait été «examiné et évalué par un cabinet d’experts-conseils indépendants
hautement qualifiés dans le secteur ferroviaire dont le conseil avait retenu les services 53.» Il a alors prévenu les
investisseurs qu’«un changement à l’équipe de la haute direction nuirait sérieusement à la poursuite de la mise
en œuvre fructueuse» de la stratégie de redressement du CP et que M. Harrison n’était pas «le meilleur
candidat pour le Canadien Pacifique 54.» Néanmoins, en avril 2012, les résultats du sondage mené auprès
d’investisseurs institutionnels représentant 45 % des actions en circulation du CP ont révélé que 94 % des
actionnaires étaient favorables aux propositions de changement mises de l’avant par Pershing Square 55.
Le 3 mai 2012, Institutional Shareholder Services (ISS) a publiquement recommandé aux actionnaires du CP
de voter en faveur des candidats proposés par Pershing Square, en raison des lacunes persistantes du conseil
d’administration sur le plan du leadership, de son manque ahurissant de responsabilisation à l’égard des
résultats, de même que du degré élevé de roulement des membres de la haute direction, l’entreprise ayant
recruté successivement cinq chefs de l’exploitation et trois chefs des finances au cours des six dernières
années 56. Le CP a réagi en qualifiant de superficielle l’analyse d’ISS et en exhortant les actionnaires à protéger
leur investissement sans courir le risque de compromettre l’avenir de l’entreprise en permettant que se
produisent les perturbations que ne manquerait pas d’entraîner l’accession au conseil d’administration des
sept candidats proposés par Pershing Square 57.
Le 7 mai, plusieurs semaines avant l’assemblée annuelle 2012, le Régime de retraite des enseignantes et des
enseignants de l’Ontario a annoncé publiquement son soutien aux candidats proposés par Pershing Square.
La contre-performance historique relative du CP, le succès obtenu par M. Harrison dans la mise en œuvre
d’un plan pluriannuel semblable, l’absence de preuves convaincantes que la nomination de ce dernier soit
préjudiciable pour le CP et la probabilité que le maintien du statu quo s’avère plus dommageable que les
changements attendus à la direction de l’entreprise sont les raisons ayant mené à cette prise de position 58.
Le 9 mai, le cabinet d’experts-conseils spécialisés en procurations Glass, Lewis & Co. a également accordé
publiquement son appui aux candidats proposés par Pershing Square, alléguant que la course aux
procurations allait permettre au CP de redresser la situation sur les plans de l’exécution et de la culture
organisationnelle 59.
Deux jours plus tard, l’Office d’investissement du Régime de pensions du Canada a aussi annoncé qu’il
appuyait les candidats proposés par Pershing Square, soulignant en être venu à la conclusion qu’il fallait du
Canadien Pacifique, Avis de convocation à l'assemblée annuelle des actionnaires et Circulaire de sollicitation de procurations de la direction,
pp. 27-28.
53
Ibid., p. 27.
54
Ibid., p. 28.
55
Scott Deveau, «Teachers’ Backs Ackman’s Plan for CP».
56
Scott Deveau, «CP Blasted by Proxy Advisor ISS», Financial Post, 3 mai 2012.
57
Canadien Pacifique, «Canadian Pacific Responds to ISS Recommendation», communiqué de presse, 3 mai 2012.
58
Scott Deveau, «Teachers’ Backs Ackman’s Plan for CP».
59
Scott Deveau, «Glass Lewis Backs Ackman in CP Rail Fight» .
52
Leçons à tirer de la récente course aux procurations au Canadien Pacifique
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RÉSEAU CANADIEN
DES COMITÉS D’AUDIT
VantagePoint
changement au CP et que, malgré les progrès récents ayant apparemment été accomplis au chapitre de
l’exploitation, les propositions de changement de Pershing offraient de meilleures probabilités d’améliorations
durables à long terme 60. En outre, British Columbia Investment Management a annoncé son intention de
voter en faveur de quatre des candidats proposés par Pershing Square et de neuf des administrateurs siégeant
déjà au conseil, mais de retirer son appui à six administrateurs en poste, dont MM. Green et Cleghorn 61.
Le 17 mai, plusieurs heures avant l’assemblée annuelle, six administrateurs, dont MM. Cleghorn et Green,
ont décidé de retirer leur candidature. Lors de l’assemblée, M. Ackman a déclaré : «Nous sommes arrivés
dans un esprit de paix, et je suis heureux d’affirmer que nous avons retrouvé cet état d’esprit 62.» Ce jour-là, le
cours de l’action du CP a clôturé à 76,51 $ CA 63.
Tous les candidats proposés par Pershing Square ont été élus au conseil d’administration du CP, et moins de
deux mois plus tard, M. Harrison a été recruté comme nouveau président et chef de la direction.
Actuellement, le cours de l’action du CP s’établit autour de 81 $ CA – ce qui représente une augmentation
de près de 70 % depuis la date à laquelle Pershing Square a commencé à investir dans l’entreprise – tandis que
le cours de l’action du CN a progressé d’environ 30 % pendant la même période 64.
60
Jang et McNish, «CPPIB Backs Pershing Square in CP Proxy Row».
Ibid.
62
Scott Deveau, «Fred Green Resigns as CP Rail CEO».
63
«Canadian Pacific Railway Limited (CP.TO) – Toronto», Yahoo! Finance, 17 mai 2012.
64
«Canadian Pacific Railway Limited (CP.TO), Canadian National Railway (CNR.TO), and S&P 500 – Toronto», Yahoo! Finance, 23 septembre
2011 – 28 septembre 2012.
61
Leçons à tirer de la récente course aux procurations au Canadien Pacifique
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Annexe 4 : Membres du conseil d’administration du Canadien Pacifique
Membres au 1er septembre 2011
Membres au 1er septembre 2012
(Les personnes dont le nom figure en
italiques sont des membres dont le mandat
a été reconduit.)
John Cleghorn (président du Conseil)
Bill Ackman
Tim Faithfull
Gary Colter
Richard George
Paul Haggis (président du Conseil)
Fred Green (président et chef de la direction)
Hunter Harrison (président et chef de la
direction)
Krystyna Hoeg
Paul Hilal
Richard Kelly
Krystyna Hoeg
John Manley
Richard Kelly
Linda Morgan
Rebecca MacDonald
Madeleine Paquin
John Manley
Michael Phelps
Anthony Melman
Roger Phillips
Linda Morgan
David Raisbeck
Madeleine Paquin
Hartley Richardson
Hartley Richardson
Stephen Tobias
Leçons à tirer de la récente course aux procurations au Canadien Pacifique
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