Ainsi soient-ils, de père en fils, de père en fille

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Ainsi soient-ils, de père en fils, de père en fille
27 OCT 14
Quotidien
OJD : 40558
Surface approx. (cm²) : 258
N° de page : 22
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THEATRE
Ainsi soient-ils,
de père en fils,
de père en fille
Stéphanie deau adapte le roman d'Éric Remhardt
le Moral des ménages. Sa mise en scène, subtile,
sublime le jeu de Mathieu Amalric et Anne-Laure Tondu
'est comme une petite mu- phose a vue, par un simple chansique de nuit entêtante, en
gement de costume, le port d'un
voûtante, inquiétante Des masque, des modulations de voix
mots jaillissent, se cognent, titubent, Elle se révèle une partenaire à la
prêts à en découdre avec le passe, hauteur de Mathieu Amalric dont
la monotonie de la vie, la grisaille, la force et la fragilite, la violence et
l'humiliation, le pavillon de ban
la douceur accompagnent ses de
lieue Manuel Carsen (Mathieu placements imperceptibles, souliAmalric, si rare au theâtre) déverse gnent les tensions interieures,
sa bile avec parcimonie, a mots alimentent sa petite entreprise de
comptes, ressassant une histoire cruauté Car il a le sale rôle, Amalric,
familiale dont il voudrait effacer a le méchant de l'histoire comme
jamais les traces de sa memoire dans les westerns, dont on entend
II y a la le pere, commercial de son parfois des mesures Stephanie deau
etat, figure centrale et obsessionnelle a su trouver le juste équilibre dans
du fils, la mère, femme au fojer, le une direction d'acteurs précise et
fils Entre ces trois subtile Sa mise en
la, se noue une rescene tend a l'épure,
Tout
en
tensions
lation complexe
jouant sur des ton
faite de soumission, intérieures,
dus noir au blanc qui
de rancœur, de si
séquencent les
lences.de non dits Mathieu Amalric scènes et font pro
gresser la dramatur
Chaque soir, le
incarne ce
même rituel legra
gie Elle a su aller a
l'essentiel du roman
tm de courgettes, les mauvais fils qui
plaintes du pere, les
d'Eric Remhardt,
rebuffades de la sera à son tour
resserrant l'intrigue
mere qui s'échouent
au plus pres dans un
sur la table en For- un père étrange. travail d'orfèvre
Son plateau est vide
mica bleu Le fils
assiste sans mot dire a ces scènes dc superflu ct plein d'essentiel Au
qui se reproduisent à l'identique mur, sont projetés des dessins au
Son impuissance a modifier le cours fusain de Blutch, des traits noirs,
des choses et une certaine tendance brouillés, troubles comme la me
moire de Manuel Carsen dont les
a l'egoisme nourriront son amer
nime, son mépris a l'égard du mo
souvenirs sont confus, obsession
dele paterne], et plus généralement nels, autodestructeurs Au fond,
de la classe moyenne dont il ne veut sur des portants, des habits suspendus déclinent toute une palette
plus etre l'incarnation II sera chan
teur, maîs un chanteur raté Lui qui de couleurs, nuancier improbable
qui pourrait symboliser les couleurs
voulait rompre avec l'atavisme fa
milial est pris au piège, renouant dè la vie que Carsen ignore,
avec le sentiment d'échec et d'hu- délibérément
muiation du pere Jusqu'au f ace a
Le Moral des menages tient ses
face final avec sa propre fille qui le promesses On y éprouve le mystere,
fera quitter la scene
la cruauté, la complexité des rapports humains dans un monde inTout passe par le corps
sensible aux êtres, aux reves Voila
des acteurs
un spectacle qui vous poursuit, bien
Comment faire \ibrer une écriture apres la représentation Le jeu sur
de papier, faire danser, respirer les le fl! des acteurs, l'intuition et la
mots ' Ici, tout passe par le corps vision du roman, transpose avec
des acteurs Mathieu Amalric in- grâce sur la scène par la metteuse
carne ce mauvais fils qui sera a son en scene, participent de cet instant
tour un pere étrange Anne Laure de grace théâtral •
Tondu se glisse dans toutes les fi
MARIE-JOSE SIRACH
gures féminines qui traversent le
récit avec une grace et une puissance Au Théâtre de la Bastille a Paris
épatantes Femme-objet, femme jusquau 31 octobre
fantasmee, femme castratnce, puis du 3 au 20 decembre
femme-enfant, elle se metamor- Reseivations 0143 5742 14
C
BASTILLE2
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