7 Distributions tempérées

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7 Distributions tempérées
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7 DISTRIBUTIONS TEMPÉRÉES
7
Distributions tempérées
7.1
L’espace de Schwartz
On note S l’espace vectoriel des fonctions ϕ ∈ C ∞ (R) telles que
|ϕ(j) (x)| ≤ Cmj (1 + |x|)−m
pour tout m, j ∈ Z+ , x ∈ R,
où Cmj > 0 est une constante. Soit
pmj (ϕ) := sup |ϕ(j) (x)|(1 + |x|)m ,
m, j ≥ Z+ .
x∈R
On dit qu’une suite {ϕk } ⊂ S converge vers ϕ ∈ S si
pmj (ϕk − ϕ) → 0
pour tout m, j ≥ Z+ .
Soit
X
d(ϕ, ψ) :=
2−(m+j)
m,j≥0
pmj (ϕ − ψ)
.
1 + pmj (ϕ − ψ)
Lemme 7.1. Le suite {ϕk } converge vers ϕ ssi
d(ϕk , ϕ) → 0
quand k → ∞.
(7.1)
Démonstration. Supposons que ϕk → ϕ dans S. Soit ε > 0 une constante
quelconque. Alors pour tout entier N ≥ 1 il existe K = K(N, ε) ≥ 1 tel que
pmj (ϕk − ϕ) ≤ ε
pour 0 ≤ m, j ≤ N et k ≥ K.
(7.2)
On a
′
d(ϕk , ϕ) ≤
X
2−(m+j)
0≤m,j≤N
≤ε
X
2
0≤m,j≤N
X
pmj (ϕk − ϕ)
pmj (ϕk − ϕ)
2−(m+j)
+
1 + pmj (ϕk − ϕ)
1 + pmj (ϕk − ϕ)
−(m+j)
+
′
X
2−(m+j) ≤ 4ε + 22−N .
En choisissant N = Nε ≥ 1 suffisamment grand, on obtient
d(ϕk , ϕ) ≤ 5ε
pour k ≥ K(ε, Nε ).
Réciproquement, si la convergence (7.1) a lieu, alors pour tout m, j ≥ 0
pmj (ϕk − ϕ)
→0
1 + pmj (ϕk − ϕ)
quand k → ∞,
d’où on conclut que pmj (ϕk − ϕ) → 0 quand k → ∞.
Lemme 7.2. L’espace D(R) est dense dans S, c’est-à-dire, pour tout ϕ ∈ S il
existe une suite {ϕk } ⊂ D(R) qui convegre vers ϕ dans S.
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7 DISTRIBUTIONS TEMPÉRÉES
Démonstration. Soit ϕ ∈ S et χ ∈ D(R) une fonction telle que χ(x) = 1 pour
|x| ≤ 1. Il est facile à vérifier que la suite ϕk (x) = χ(x/k)ϕ(x) converge vers ϕ
dans S.
Le résultat suivant est une conséquence immédiate de la définition de l’espace S
et de sa topologie.
Proposition 7.3.
entier j ≥ 1.
(i) La dérivation ϕ 7→ ϕ(j) est continue dans S pour tout
(ii) Soit a ∈ R∗ et b ∈ R. Alors l’application ϕ 7→ ϕ(ax + b) est continue
dans S.
(iii) Soit a ∈ C ∞ (R) une fonction telle que
|a(j) (x)| ≤ Cj (1 + |x|)mj ,
x ∈ R,
(7.3)
où Cj et mj sont des constantes. Alors la multiplication ϕ 7→ aϕ est
continue dans S.
7.2
L’espace des distributions tempérées
Définition 7.4. Soit f : S → R (ou C) une fonctionnelle linéaire. On dit
que f est une distribution tempérée si f est continue pour la topologie de S,
c’est-à-dire, si ϕk → 0 dans S, alors f (ϕk ) → f (ϕ). On note S ′ l’espace des
distributions tempérées.
Définition 7.5. On dit que la suite {fk } ⊂ S ′ converge vers f dans S ′ si
fk (ϕ) → f (ϕ) quand k → ∞ pour tout ϕ ∈ S.
Il est claire que S ′ ⊂ D′ (R) et cette injection est continue.
Théorème 7.6. Une fontionnelle linéaire f : S → R appartient à S ssi il existe
un entier p ≥ 0 et une constnte C > 0 tels que
|f (ϕ)| ≤ Ckϕkp ,
où
(7.4)
p
X
(j)
p
|ϕ (x)| .
kϕkp := sup (1 + |x|)
x∈R
j=0
La démonstration de ce résultat est analogue à celle de la proposition 2.3.
Corollaire 7.7. Soit f ∈ D′ (R) une distribution vérifiant (7.4) pour toute
fonction ϕ ∈ D(R). Alors f admet un unique prolongement continu sur S.
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7 DISTRIBUTIONS TEMPÉRÉES
Démonstration. Soit ϕ ∈ S et {ϕk } ⊂ D(R) une suite telle que ϕk → ϕ dans S.
Alors l’inégalité (7.4) implique que
|(f, ϕk − ϕn )| ≤ C kϕk − ϕn kp → 0 quand k, n → ∞.
Donc, la suite (f, ϕk ) converge. On définit une fonctionnelle f˜ : S → R par
(f, ϕ) = lim (f, ϕk )
k→∞
pour ϕ ∈ S,
où {ϕk } ⊂ D(R) est une suite quelconque convergeant vers ϕ. Il est facile à
vérifier que f˜ ∈ S ′ et que la restriction de f˜ à D(R) est confondue avec f .
Exemples 7.8. (a) Soit f ∈ L1loc (R) tel que
Z
|f (x)|(1 + |x|)−m dx < ∞,
R
où m ≥ 0. Alors f ∈ S ′ . Remarquons que L1loc (R) 6⊂ S ′ . Par example, ex ∈
/ S′.
(b) Soit f ∈ D′ (R) tel que supp f ⋐ R. Alors f ∈ S ′ . Plus précisement,
on peut construire f˜ ∈ S ′ tel que f˜|D(R) = f . De plus, une telle distribution
tempérée est unique.
Proposition 7.9.
(i) Soit f ∈ S ′ . Alors f (j) ∈ S ′ pour tout j ≥ 0.
(ii) Soit f ∈ S ′ , a ∈ R∗ et b ∈ R, alors f (ax + b) ∈ S ′ .
(iii) Soit f ∈ S ′ et a ∈ C ∞ (R) une fonction vérifiant (7.3). Alors af ∈ S ′ .
Démonstration. Nous allons établir seulement la propriété (i). La démonstration
de (ii) et (iii) est analogue.
D’après le théorème 7.6, pour tout ϕ ∈ D(R), on a
|(f (j) , ϕ)| = |(f, ϕ(j) )| ≤ Cp kϕ(j) kp ≤ Cp kϕkp+j .
En appliquant le corollaire 7.7, on conclut que f (j) ∈ S ′ .
7.3
Convolution des distributions tempérées
Théorème 7.10. Soit f, g ∈ S ′ et supp g ⋐ R. Alors f ∗ g ∈ S ′ et
(f ∗ g, ϕ) = f (x), (g(y), η(y)ϕ(x + y)) pour tout ϕ ∈ S,
(7.5)
où χ ∈ D(R) est une fonction égale à 1 dans un voisinage de supp g.
Démonstration. D’après le corollaire 7.7, il suffit de montrer que
|(f ∗ g, ϕ)| ≤ Cp kϕkp
pour tout ϕ ∈ S,
(7.6)
où f ∗ g désigne la fonctionnelle définie par le membre de droite dans (7.5).
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7 DISTRIBUTIONS TEMPÉRÉES
Soit ψ(x) = (g(y), χ(y)ϕ(x + y)) et supp χ ⊂ [−R, R]. Alors ψ ∈ C ∞ (R) et
ψ (j) (x) = (g(y), χ(y)ϕ(j) (x + y)).
Comme g ∈ D′ (R), il existe une constante C > 0 et un entier m ≥ 0 tels que
|ψ (j) (x)| ≤ C kχ(y)ϕ(j) (x + ·)kC m (R) ,
d’où on conclut que
kψkp ≤ CR,p kϕkp+m
pour tout p ≥ 0.
Comme f ∈ S ′ , on voit que
|(f ∗ g, ϕ)| = |(f, ψ)| ≤ C kψkp ≤ C ′ kϕkp+m .