Fiche d`actualité scientifique n°418 - Polynésie

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Fiche d`actualité scientifique n°418 - Polynésie
Actualité scientifique
Scientific news
N° 418
Décembre 2012
Actualidad cientifica
La perliculture,
l’or noir de la Polynésie française ?
Deuxième ressource
économique de Polynésie
française, après le tourisme,
la culture de la perle noire
doit faire face depuis les
années 2000 à une crise
majeure. Surproduction,
chute des prix, baisse de
© IRD/B. Bourgeois
l’activité qui avait dynamisé
de nombreux atolls
éloignés… En réponse, les
chercheurs de l’IRD et leurs
partenaires1 aident à
maintenir et pérenniser le
Les perles noires de Tahiti sont réputées pour leur beauté et leur perfection.
secteur.
En particulier, les
scientifiques ont étudié
depuis 2008 le lagon de
l’atoll Ahe, au nord de Tahiti.
Ils ont notamment piloté des
études sur les ressources en
plancton disponibles pour
nourrir les huîtres perlières et
sur la circulation des eaux du
lagon.
Ces travaux contribuent aux
outils décisionnels destinés
aux éleveurs, pour une
exploitation durable du
« trésor de Tahiti ».
La culture de la perle noire constitue aujourd’hui la
deuxième activité économique de Polynésie française, après le tourisme. Pourtant, la jeune industrie2
a connu une crise majeure au début des années
2000. Le prix du gramme de perle a chuté, passant
de 100 à moins de 5 dollars US en 25 ans. Surproduction, désorganisation des circuits commerciaux
en sont responsables. La perliculture est aujourd’hui
dans une phase de récupération et tente de rétablir
l’équilibre entre l’offre et la demande. À la fois totalement dépendantes de l’écosystème « lagon » et
ayant un fort impact sur celui-ci, les fermes perlicoles
doivent faire face à de multiples contraintes.
Pérenniser le secteur
Quelles sont les meilleures conditions d’exploitation
pour optimiser la capacité et la qualité de production ? La qualité et la taille d’une perle sont liées à l’attention que portent les producteurs au cycle de
culture, mais l’environnement de l’élevage reste
déterminant. Pour définir les conditions optimales en
fonction de l’environnement lagonaire, des chercheurs de l’IRD et leurs partenaires1 ont mené depuis
2008 un vaste programme de recherches sur l’atoll
d’Ahe, situé à 500 km au nord-est de Tahiti. Le lagon
d’Ahe couvre 145 km² et comptait près de 80 concessions perlicoles en mai 2012.
Le lagon d’Ahe et la perliculture
Afin d’évaluer les ressources alimentaires disponibles pour les huîtres perlières du Pacifique Sud,
appelées Pinctada margaritifera, les chercheurs ont
étudié les variations spatio-temporelles des communautés planctoniques du lagon pendant une année et
leurs utilisations par les huîtres. Résultat : les
mollusques retiennent moins de 1 % de la production
primaire du lagon, c’est-à-dire de matière organique
végétale. En effet, cette dernière est constituée à
80 % d’organismes de très petite taille, inférieure à
2 micromètres, que les huîtres assimilent mal.
POUR EN SAVOIR PLUS
Par ailleurs, le réseau trophique planctonique a été
caractérisé, grâce à l’usage de techniques encore
jamais utilisées en milieux d’atolls, et grâce aux
nombreux partenaires du projet. Enfin, l’étude et la
modélisation de la circulation des eaux ont permis de
comprendre comment les conditions environnementales influencent la dispersion des larves d’huîtres et
donc pourquoi certaines zones du lagon sont plus
propices que d’autres à la collecte des naissains, les
huîtres juvéniles.
Une faible pollution chimique
L’impact écologique de l’industrie perlière demeure
peu connu. Des milliers d’huîtres ont été artificiellement introduites dans plusieurs lagons. Des éponges,
anémones et autres espèces invasives épibiontes,
autrement dit vivant sur d’autres organismes tels que
les huîtres, ont été importées par la même occasion,
augmentant le risque sanitaire. Les populations
humaines autour des fermes peuvent aussi polluer le
lagon. Mais les travaux des chercheurs sur l’atoll
Contacts
d’Ahe n’ont mis en évidence aucun signe direct de
Serge ANDREFOUET, chercheur à l’IRD
Tel. : (687) 26 10 00
[email protected]
Unité Biocomplexité des écosystèmes
coralliens de l’Indo-Pacifique - CoRéUs 2
contamination chimique du milieu ou d’eutrophisation, c’est-à-dire de prolifération d’algues due à un
apport excessif de matières nutritives3 qui asphyxie
les eaux.
Adresse
IRD
BP A5
98848 Nouméa cedex
Nouvelle-Calédonie
Les travaux sur l’atoll d’Ahe permettent de mieux
comprendre l’environnement lagonaire en relation
avec le métier de perliculteur, ce qui doit permettre à
Loïc CHARPY, chercheur à l’IRD
[email protected]
UMR Institut méditerranéen d’océanologie MIO (IRD / Aix-Marseille Université/ CNRS)
moyen terme d’améliorer les performances techniques et économiques de la perliculture en Polynésie.
Références
ANDRÉFOUËT SERGE, CHARPY LOÏC, LO-YAT A.,
LO C. Recent research for pearl oyster
aquaculture management in French
Polynesia. IN : ANDRÉFOUËT SERGE (ED.),
CHARPY LOÏC (ED.). Ahe atoll and pearl oyster
aquaculture in the Tuamotu archipelago.
Marine Pollution Bulletin, 2012, 65
(10-12), P. 407-414. ISSN 0025-362X
fdi:010056900
Rédaction DIC – Gaëlle Courcoux
La naissance de la perliculture
La culture de la perle noire en Polynésie française a modifié en profondeur les paysages et le mode de vie de milliers
d’habitants de l’archipel des Tuamotu, employant jusqu’à 7 000 personnes4. Jusqu’au milieu du 20e siècle, les huîtres
P. margaritifera sauvages étaient récoltées uniquement pour leur nacre. Parfois, une perle naturelle était découverte. La
première greffe a été réalisée en 1961. La première exploitation perlière a vu le jour en 1968. Les deux décennies suivantes
ont vu l’activité économique croître progressivement, la perle noire accédant au statut de gemme de grande qualité sur le
marché de la bijouterie mondial. A la fin des années 1980, l’archipel connaît une ruée vers la perle noire, avec des milliers
de Polynésiens mais aussi d’étrangers venant travailler dans ces contrées éloignées, avant de voir son déclin à l’aube du
21e siècle.
Mots clés
Perle noire, huître, lagon,
Polynésie française
1. Ces travaux ont été réalisés en partenariat avec la Direction des Ressources marines en Polynésie française, l’Ifremer, le
CNRS et les universités de Polynésie française, de Lille1, de Caen, de la Rochelle et Aix-Marseille.
2. Comparé à l’industrie des perles blanches et dorées en Asie et en Australie, vieille de plus de cent ans, la culture de la perle
noire, développée seulement dans les années 1960, est relativement récente.
3. Essentiellement du phosphore et de l’azote issus des activités humaines.
4. La Polynésie compte 250 000 habitants.
* LE SAVIEZ-VOUS ?
Coordination
Gaëlle COURCOUX
Direction de l’information
et de la culture scientifiques pour le Sud
Tél. : +33 (0)4 91 99 94 90
Fax : +33 (0)4 91 99 92 28
[email protected]
www.ird.fr/la-mediatheque
Dès l’âge de 2 à 3 ans, les huîtres perlières sont greffées avec une petite bille de nacre issue de la coquille
de bivalves d’eau douce, le « nucléus », et un morceau de manteau interne d’huître, le « greffon ». Pendant
18 mois, une perle va se former et grossir autour du nucléus à partir de la nacre du greffon.
Indigo,
photothèque de l’IRD
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Les huîtres P. margaritifera sont greffées pour donner la « perle noire de Tahiti ».
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