Les moyens à mettre en œuvre par l`Etat pour une meilleure gestion

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Les moyens à mettre en œuvre par l`Etat pour une meilleure gestion
Les moyens à mettre en œuvre par l’Etat pour une meilleure
gestion du parc immobilier utilisé par les services de
l’Etat : l’expérience française
Par: Guy Corréa (*) et Stéphanie Fournier (**)
(*) Administrateur Civil, Chef du Bureau Missions Domaniales, Agence France Domaine
(**)Inspectrice Principale du Trésor Public, Chef de Section au Bureau Missions Domaniales,
Agence France Domaine
En France, la politique immobilière de l’Etat comporte des aspects multiformes et concerne
de nombreux segments. Il peut ainsi être cité la participation au développement de l’offre de
logements sociaux, l’augmentation de l’offre de logements pour les étudiants ou la
mobilisation du foncier public. Nous allons plus particulièrement nous attarder sur la gestion
du parc immobilier de l’Etat utilisé par ses services.
Depuis 2005, un nouvel élan a été insufflé à la politique immobilière de l’État en France. Il
repose sur la mise en place d’une stratégie claire visant à une gestion immobilière
performante, dans le contexte de la Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) et
de la restructuration des services de l’Etat.
Concrètement, il s’agit de :
-
Traduire au plan immobilier les différentes réformes de l’Etat en facilitant leur réalisation
(réorganisation de l’administration territoriale de l’Etat, réforme de la carte judiciaire,
fusion des services des impôts et du Trésor, etc.) ;
-
Réduire la dépense immobilière : le Gouvernement français s’est fixé comme objectif de
doter l’État d’un parc immobilier plus resserré et mieux adapté à ses missions ;
-
Moderniser le parc immobilier dans une perspective de développement durable.
La modernisation de la gestion immobilière constitue un chantier majeur de la réforme de
l’État. Elle participe à l’augmentation de sa performance et contribue, par une rationalisation
du parc immobilier de l’Etat, à la maîtrise des finances publiques.
La stratégie mise en place se décline autour de plusieurs axes : amélioration de la
gouvernance de la gestion immobilière et de la connaissance du parc immobilier de l’Etat,
mise en place de différents dispositifs (schémas pluriannuels de stratégie immobilière,
conventions d’utilisation, loyers budgétaires, etc.) permettant une meilleure utilisation et une
gestion plus performante du parc et, enfin, amélioration des outils juridiques, financiers et
techniques.
1. L’amélioration de la gouvernance a clarifié le rôle du propriétaire et celui des
occupants en matière immobilière.
La segmentation des rôles en matière immobilière entre de multiples acteurs ministériels ne
permettait pas la mise en œuvre d’une politique immobilière de l’Etat rationnelle et
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dynamique.
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Aussi, la responsabilité de représenter l’Etat-propriétaire et de définir les orientations de la
politique immobilière de l’Etat a été confiée au ministre du budget, chargé du Domaine. Dans
cette fonction, il est assisté au plan administratif par le service France Domaine de la
direction générale des finances publiques.
Au plan local, le ministre chargé du Domaine est représenté par le préfet, assisté par la
direction régionale ou départementale des finances publiques, dans laquelle un responsable
de la politique immobilière de l’Etat a été identifié, qui vient compléter les actions du service
local du domaine.
Corrélativement, les attributions des ministères gestionnaires en matière immobilière ont été
sensiblement réduites et un directeur immobilier a été nommé au sein de chaque ministère.
Enfin, outre le contrôle exercé par le Parlement, deux structures spécifiques ont été mises en
place :Composé de parlementaires et de professionnels de l’immobilier, le Conseil de
l’immobilier de l’Etat (CIE) veille au bon avancement de la nouvelle politique
immobilière de l’Etat et formule des recommandations au ministre chargé du Domaine
pour améliorer la gestion du parc immobilier. Il examine également les projets de
stratégie immobilière présentés par les administrations ou les opérateurs de l’État, tant
au plan national que local.
· La Commission pour la qualité et la transparence des opérations immobilières de l’Etat
(CTQ) a pour mission de veiller à ce que les opérations immobilières (cessions,
acquisitions, prises à bail) s’effectuent conformément à la réglementation domaniale en
vigueur et de s’assurer de l’optimisation des produits de cession. Elle est composée de
hauts fonctionnaires (Conseil d’État, Cour des Comptes, Inspection Générale des
Finances).
2. L’amélioration de la connaissance du parc immobilier constitue un préalable
indispensable à la modernisation de la gestion immobilière.
Un constat a été effectué très rapidement : grande hétérogénéité du parc immobilier,
connaissance insuffisante des données techniques sur le parc, mauvais niveau d’information
sur les conditions d’utilisation ou d’entretien des immeubles.
Or, une parfaite connaissance du patrimoine immobilier (inventaire physique exhaustif,
évaluation du parc) est nécessaire pour la mise en place d’une stratégie immobilière
optimisée.
Ainsi, France Domaine a lancé, dès 2003, un chantier de mise à jour de l’inventaire physique
du parc immobilier de l’Etat. Ce recensement a servi de base pour établir l’inventaire
comptable de l’Etat, imposé par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du
1er août 2001.
Le chantier se poursuit par des opérations de fiabilisation technique et juridique des données
(surfaces, nature des locaux, qualité d’entretien du parc, etc.). Par ailleurs, différents audits
des immeubles ont permis d’améliorer encore la connaissance du parc.
Au 31 décembre 2010, le parc immobilier de l’État, occupé directement par ses services ou
confié à ses opérateurs, est estimé à un total d’environ 106 milliards d’euros.
3. La réalisation des schémas pluriannuels de stratégie immobilière vise à une
meilleure organisation immobilière des administrations.
Pour permettre à l’Etat de disposer de solutions lui permettant d’arbitrer, pour faire face à
ses besoins et valoriser son patrimoine immobilier, entre les acquisitions, les cessions, les
constructions et les prises à bail ainsi que d’intégrer les besoins d’entretien, il a été décidé
de mettre en place des schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI).
Cet outil d’amélioration immobilière nécessite un important travail préalable de recensement
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Desdiagnostic)
Finances Basil
et d’évaluation des bâtiments
(volet
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se poursuit par des propositions
d’évolutions sur cinq ans (acquisitions, cessions, regroupements, déménagements) qui
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doivent permettre au parc immobilier de chaque administration de mieux répondre aux
besoins fonctionnels des occupants, comme aux objectifs de rationalisation immobilière
(volet stratégique).
Aujourd’hui, tous les SPSI départementaux ont été élaborés et 325 opérateurs, dont ceux
gérant un patrimoine immobilier important, ont produit des schémas immobiliers, respectant
notamment le ratio de surface de 12 m² par agent.
La mise en œuvre des SPSI se traduit par une réduction du nombre de sites, mais
également des surfaces occupées par l’Etat.
4. Au-delà de la restructuration du parc immobilier de l’Etat, plusieurs dispositifs
concourent à l’amélioration de la gestion de ce parc.
1°) Des « quasi-baux » publics sont désormais passés entre l’Etat-propriétaire et les
administrations utilisatrices.
Les procédures d’affectation des immeubles domaniaux aux services de l’Etat et de remise
en dotation au profit des établissements publics nationaux, qui accordaient aux occupants de
nombreuses prérogatives normalement dévolues au propriétaire, ont été remplacées, depuis
2009, par des conventions d’utilisation, temporaires et révisables, définissant les droits et
obligations des parties, à conclure entre l’Etat-propriétaire et l’administration occupante pour
chaque immeuble domanial.
Pour les immeubles de bureaux, ces conventions fixent le ratio d’occupation à atteindre sur
la durée de la convention, la cible fixée par le Gouvernement étant de 12 m2/agent.
Les conventions font l’objet d’un examen périodique pour analyser la pertinence de
l’implantation, le respect des conditions d’occupation et notamment des engagements de
performance immobilière, etc.
2°) Des loyers dits budgétaires, correspondant aux loyers de marché, sont payés par les
ministères pour l’occupation des immeubles de bureaux de l’État.
Les conventions d’utilisation servent de support à ces loyers budgétaires.
Le dispositif vise à responsabiliser les services bénéficiaires de locaux domaniaux sur le coût
de leur installation immobilière pour l’Etat et à les inciter à rationaliser le parc immobilier en
liaison avec les SPSI. Il favorise le regroupement des ministères et la mutualisation au sein
des services de l’État.
Ces loyers sont indexés et un dispositif financier de sanction-intéressement a été mis en
place pour inciter les administrations à réduire les surfaces occupées et pour pénaliser celles
qui s’y refusent.
3°) Une véritable politique d’entretien des bâtiments de l’Etat a été engagée.
Avant 2009, l’entretien constituait la principale lacune de la politique immobilière de l’Etat.
Les travaux étaient insuffisamment planifiés et financés. L’entretien était le plus souvent
curatif, par défaut d’entretien préventif.
Depuis cette date, les crédits d’entretien du patrimoine immobilier de l’Etat sont préservés,
au sein d’un programme budgétaire spécifique, placé sous la responsabilité de France
Domaine et doté de crédits prélevés sur les budgets similaires des ministères.
Une politique interministérielle d’entretien a été mise en œuvre, dès 2010, au plan régional,
sous l’autorité des préfets de région, appuyés par les services locaux du Domaine et du
ministère de l’écologie. Des plans pluriannuels régionaux d’entretien seront établis à compter
de 2011.
4°) Le service du Domaine rend désormais un avis circonstancié sur les projets immobiliers
(acquisitions, prises à bail) poursuivis
par les
services
deFuleihan
l’Etat et les opérateurs.
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Finances
Basil
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Outre un volet avis financier « classique », l’avis du service du Domaine doit désormais
comporter, pour les immeubles de bureaux, un avis au titre de la politique immobilière.
Ce dernier porte sur l’analyse des critères suivants : localisation géographique,
regroupement des sites, évolution des surfaces occupées, limitation du nombre de bureaux
individuels, comparaison des dépenses d’entretien (avant et après les travaux).
Pour les services de l’Etat, les opérations immobilières locales sont conduites d’un bout à
l’autre par le représentant de l’Etat-propriétaire, en liaison avec l’administration occupante.
5°) Les procédures de cession des immeubles de l’Etat ont été rénovées dans un souci de
transparence, d’efficacité et de rapidité.
Désormais :
· les cessions sont effectuées sur appel d’offres et peuvent être opérées alors même
que l’immeuble est occupé ;
· les cessions ont été sécurisées : la commission pour la transparence et la qualité des
opérations immobilières de l’Etat se prononce sur les conditions de réalisation des
ventes les plus conséquentes.
L’Etat veille, d’autre part, à ses intérêts patrimoniaux, en insérant dans les actes de cession
des clauses de sauvegarde permettant le partage des plus-values qui seraient
ultérieurement réalisées par l’acquéreur.
Enfin, un programme pluriannuel prévisionnel des opérations de cession de l’Etat a été
présenté en 2010. Il précise, à destination du marché et des collectivités locales, le
calendrier de cession de plus de 1 700 immeubles, répartis sur l’ensemble du territoire et de
nature très diverse.
5. La nouvelle politique immobilière s’accompagne de la mise en place de nouveaux
outils juridiques, financiers et techniques.
· La partie législative du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P)
est entrée en vigueur le 1er juillet 2006. La partie réglementaire sera très
prochainement publiée. Il s’agit de moderniser les processus, d’optimiser les
interventions des acteurs, de rationaliser les circuits et de simplifier les méthodes.
· Un compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’Etat » a été
créé en 2006. Placé sous la responsabilité du propriétaire, il retrace les opérations de
recettes et de dépenses afférentes aux cessions immobilières. La création du
programme budgétaire 309 « Entretien du patrimoine immobilier de l’Etat », en 2009,
sanctuarise les crédits d’entretien du propriétaire.
· Les inventaires physique et comptable du parc immobilier de l’Etat sont, depuis 2009,
tenus dans le module immobilier du système d’information budgétaire et financière de
l’Etat (Chorus). Ce module sera, le moment venu, complété par des fonctionnalités
avancées de gestion de l’immobilier.
6.
La nouvelle politique immobilière est étendue aux opérateurs de l’Etat.
La stratégie de réduction des surfaces et des coûts immobiliers s’applique désormais
également aux opérateurs de l’Etat. La composition du parc immobilier qu’ils utilisent était
ignorée jusqu’à une date très récente. Conformément aux décisions du Gouvernement et
aux demandes du Parlement, les opérateurs ont été tenus de déclarer les immeubles qu’ils
occupent. Ce parc a été recensé en 2009.
Le parc des opérateurs a, par ailleurs, fait l’objet de travaux d’évaluation détaillés, qui se
sont, pour la plupart d’entre eux,
achevés
début 2010.
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Cette identification de la valeur des biens permettra d’appliquer des loyers aux immeubles
mis par l’Etat à la disposition des opérateurs (soit la moitié du parc des opérateurs), à
compter de 2012.
Enfin, la démarche des SPSI a été étendue aux opérateurs de l’Etat en 2010.
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