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Rapport d’activité 2010
Des recherches
d’excellence
La science au service du développement
Six programmes de recherche
1 Risques naturels et climats 2 Gestion durable des écosystèmes du Sud
3 Ressources et accès à l’eau 4 Sécurité alimentaire dans le Sud
5 Sécurité sanitaire 6 Développement et mondialisation
\ 12 \ 13
Institut de recherche pour le développement
La science au service du développement
Depuis plus de 65 ans, l’IRD agit pour améliorer les
conditions de vie des populations vulnérables et favoriser
l’autonomie des communautés scientifiques dans les pays
du Sud. Aujourd’hui, la recherche pour le développement
s’envisage à travers d’étroits partenariats Nord-Sud.
Les sociétés, la santé, l’environnement et les ressources
constituent les trois champs d’étude à travers lesquels l’IRD
s’attache à relever les grands défis du développement.
Explorer les terrains du Sud
Coopérer pour le Sud
Désert sahélien, régions volcaniques, fonds marins, forêts
tropicales humides, glaciers andins, mégapoles… les milieux
physiques et les sociétés explorés par les chercheurs de
l’IRD sont multiples. Si plusieurs équipes interrogent les
transformations actuelles des systèmes socio-écologiques,
l’émergence de pathologies nouvelles et les problèmes
de nutrition dans différentes régions du monde, d’autres
s’intéressent aux mouvements de population et aux
recompositions urbaines, en se penchant par exemple sur
les évolutions des périphéries des grandes métropoles
en termes d’infrastructures, de gouvernance et d’espace.
Villes, patrimonialisation, questions identitaires, lutte contre
les maladies infectieuses comptent parmi les facettes de la
question du développement qui sont au cœur de l’agenda
des recherches en sciences sociales et en santé. À travers
l’océan mondial, des campagnes permettent chaque année
d’observer les écosystèmes, de mesurer les paramètres
physico-chimiques de l’environnement et de repousser ainsi
un peu plus loin les limites de la connaissance. Sur une
douzaine de points clés de l’Atlantique tropical, un réseau de
surveillance météo-océanique, en temps réel, a ainsi été mis
en place. Autre initiative conduite en haute mer : la campagne
de marquage des gros poissons, réalisée dans le cadre du
projet européen MADE1 dont la finalité est de réduire les effets
négatifs des pêcheries sur les écosystèmes marins. Les terres
encore inexplorées suscitent aussi un grand intérêt pour les
scientifiques.
Le dispositif de recherche de l’Institut a continué d’évoluer
dans une dynamique de rapprochement avec les universités
et les autres organismes de recherche. Ainsi, le processus
d’UMRisation est désormais généralisé avec 95 % d’unités
mixtes. Au 1er mai 2011, l’IRD comptait 58 unités dont 3
internationales. Afin de mettre en œuvre la programmation
et la politique d’investissement de la flotte océanographique
française, l’unité mixte de service FOF2 a été créée en
partenariat avec le CNRS, l’Ifremer et l’Institut polaire français
Paul-Émile-Victor.
Outre son engagement dans les UMR, l’IRD a pleinement pris
part à l’évolution actuelle du paysage national de la recherche,
notamment en devenant membre des pôles de recherche et
d’enseignement supérieur. Déjà associé à deux alliances
Aviesan sur les sciences de la vie et de la santé - Ancre sur
la recherche pour l’énergie, l’Institut a participé à la création
de l’Alliance nationale de recherche pour l’Environnement
(AllEnvi) dont la mission est d’organiser une meilleure
synergie des acteurs de la recherche sur les problématiques
scientifiques liées à l’alimentation, à l’eau, au climat et aux
territoires. L’IRD participe aussi aux travaux de l’alliance
Athena dédiée aux sciences humaines et sociales.
1
2
MADE : Mitigating ADverse Ecological impacts of open ocean fisheries.
Flotte océanographique française.
L’expédition Lengguru-Kaimana 2010
Hydroécologie / Maroc.
L’expédition Lengguru-Kaimana associant une cinquantaine de scientifiques français et indonésiens
a été coorganisée par l’IRD dans le nord de la Papouasie occidentale, l’une des régions du monde les
moins bien connues d’un point de vue biologique, archéologique et géographique. Cinq sites répartis
sur le pourtour du massif de Lengguru ont été étudiés en vue de retracer l’histoire géologique du lieu,
d’expliquer la diversification des habitats et d’établir une première évaluation de la biodiversité, de
surface et souterraine. Résultat d’un inventaire préliminaire effectué par les biologistes de l’expédition,
la découverte de nouvelles espèces de poissons incluant une espèce cavernicole, d’insectes, de
chauves-souris, de crustacés et de gastéropodes. Un vaste champ de recherche a également été
ouvert par les archéologues et les paléontologues sur les voies de dispersion et d’échange des
peuples anciens. La mission Lengguru-Kaimana 2010 marque le début d’une étroite collaboration
franco-indonésienne sur l’étude des milieux karstiques. Le réseau scientifique aujourd’hui constitué
se destine à développer des programmes de grande envergure, notamment dédiés aux mécanismes
de structuration et de régulation de la biodiversité au sein des massifs karstiques intertropicaux.
Rapport d’activité 2010
Dans le cadre du programme Investissements d’avenir géré
par l’ANR, l’IRD a répondu conjointement à plusieurs appels
à projets. Il est désormais partenaire de trois « équipements
d’excellence » (équipex), 15 « laboratoires d’excellence »
(labex) et un « institut hospitalo-universitaire » (IHU).
Les partenariats engagés en métropole sur les questions de
sécurité alimentaire ont trouvé un écho au plan international.
La première édition de la Conférence mondiale sur la recherche
agricole pour le développement s’est tenue à Montpellier, ville
retenue pour accueillir le siège du consortium du CGIAR3.
Le succès de la candidature française est le résultat d’une
mobilisation forte des établissements scientifiques, de
l’agglomération montpelliéraine, de la Région LanguedocRoussillon et des ministères concernés. L’ensemble de ces
acteurs avait mandaté la fondation Agropolis International,
dont l’IRD est membre fondateur, pour coordonner et porter la
candidature de Montpellier.
près de 750 scientifiques et dont l’IRD est l’une des douze
institutions partenaires.
Faire avancer la connaissance
par les publications
L’évolution du nombre de publications reflète le dynamisme
des équipes de recherche. Le nombre d’articles publiés par
les chercheurs de l’IRD a progressé d’environ 7 % et atteint
1 640 dont 1 320 référencés dans le Web of Science et près
de 320 autres articles recensés dans la base Horizon en
sciences humaines et sociales. Si l’on considère le périmètre
de l’ensemble des UMR, la production représente plus de
3 000 articles. En sciences humaines et sociales, le nombre
de publications augmente régulièrement : plus de 400 articles,
près de 400 chapitres d’ouvrages, 67 ouvrages et 75 directions
d’ouvrages.
Parmi les autres collaborations, il faut souligner la participation
déterminante de l’Institut à la création du pôle Eau, pôle
de compétitivité à vocation mondiale dont l’objectif est de
mieux gérer les ressources et les usages contraints par les
changements globaux. Ce pôle pourra notamment s’appuyer
sur les compétences de l’Institut languedocien de recherche
sur l’eau et l’environnement, qui rassemble à Montpellier
Le taux de copublication avec des institutions du Sud de 44 %
est en légère augmentation. Les copublications concernent
principalement le Cameroun, le Sénégal, le Brésil, le Burkina
Faso, l’Afrique du Sud, la Thaïlande et le Bénin. La progression
est particulièrement notable en Afrique de l’Ouest, en Afrique
du Nord et en Asie Pacifique.
ARTICLES IRD RÉFÉRENCÉS
PUBLICATIONS EN SCIENCES HUMAINES ET
SOCIALES (BASE HORIZON)
(WEB OF SCIENCE)
La part des publications réalisées dans les UMR et les UMI est
maintenant de 84 %, alors qu’elle était de 70 % en 2009 et
de 58 % en 2008. Chaque chercheur contribue en moyenne à
2 publications par an et parmi les 771 chercheurs, ingénieurs
et techniciens ayant publié, près de 14 % ont signé plus de
cinq articles.
C’est ainsi que l’IRD agit avec les Suds pour développer
des recherches d’excellence centrées sur l’homme et ses
relations à l’environnement.
Expédition Lengguru / Papouasie.
3
Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale.
Contacts [email protected]
[email protected]
ÉVOLUTION DES COPUBLICATIONS AVEC LE SUD
250
1 600
400
1 400
1 247
1 380
200
1 116
1 200
913
1 000
800
La visibilité des publications est importante : 62 % des articles
figurent dans des revues à facteur d’impact élevé dans leur
catégorie et plus de 10 % dans des revues d’excellence. Ainsi,
12 articles ont été publiés dans Emerging Infectious Diseases,
9 dans Clinical Infectious Diseases, 8 dans Remote Sensing
of Environment, 6 dans Journal of Hydrology, 5 dans PNAS,
5 dans Plos Pathogens, 4 dans Nature, 4 dans The Lancet,
3 dans Science.
599
622
679
726
300
1 011
150
760
200
100
600
100
400
50
200
0
0
2001
2002
20003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
0
2008
2010
Articles
Chap. d’ouvrages
2009
Ouvrages
2010
Dir. d’ouvrages
2008
2009
2010
Afrique de l’Est, australe, océan Indien
Afrique de l’Ouest et centrale
Afrique du Nord, Moyen-Orient
Amérique latine
Asie, Pacifique
\ 14 \ 15
Institut de recherche pour le développement
Risques naturels
et climats
Les événements naturels extrêmes (séismes, tsunamis, éruptions volcaniques, glissements de terrain…)
surviennent au Nord comme au Sud. Mais face à leurs conséquences souvent désastreuses, la vulnérabilité
des personnes et des infrastructures est plus prégnante encore pour de nombreux pays des Suds.
L’étude de ces aléas et de ces risques constitue donc un enjeu prioritaire pour l’IRD et ses
partenaires. Complétant la description de ces phénomènes et l’analyse des processus
physiques à l’œuvre, la surveillance et la modélisation permettent d’avancer dans la
prévision, l’alerte précoce et la prévention. Ces activités intègrent la perception des
risques par les populations, la compréhension des vulnérabilités sociétales et
l’analyse des politiques publiques en matière de défense civile et de gestion
des crises.
Dans le même esprit, la variabilité et les impacts du changement climatique
occupent une place centrale dans l’agenda des mondes scientifique et
politique. La mise en œuvre en zone tropicale de systèmes d’observation
in situ et par télédétection des dynamiques atmosphériques, océaniques
et continentales et de leurs interactions vise à décrire et à modéliser ces
phénomènes. Favorisant notre compréhension des processus en jeu, ces
approches permettent de mieux prédire la variabilité climatique régionale,
d’affiner les scénarios du changement climatique et d’en préciser les
conséquences à différentes échelles
40
CHERCHEURS
5,4
MILLIONS
D’EUROS
97
ARTICLES
Glissement de terrain / Bolivie.
Rapport d’activité 2010
Comprendre les séismes dans la région andine
Tremblements de terre et éruptions volcaniques
touchent régulièrement la région andine, faisant de très
nombreuses victimes et produisant d’énormes dégâts
matériels. Après le séisme de Pisco au Pérou en 2007, un
événement sismique très puissant a, une nouvelle fois,
frappé le Chili en février 2010. Les chercheurs de l’IRD
et leurs partenaires étudient depuis plusieurs années le
fonctionnement de cette zone de subduction où la plaque
océanique de Nazca plonge sous la plaque continentale
sud-américaine, afin de mieux cerner les probabilités
de récurrence de ces séismes, leur localisation et leur
magnitude.
Les tremblements de terre sont des phénomènes complexes
qui restent impossibles à prévoir. Dans la région de Pisco, une
équipe franco-américano-péruvienne1 a, grâce à l’installation
d’un réseau de stations GPS, caractérisé l’intégralité du cycle
sismique, offrant un éclairage nouveau sur le fonctionnement
des failles et les mécanismes physiques en jeu. À défaut de
pouvoir annoncer les séismes, ces avancées permettent de
dire où auront lieu les prochains grands évènements et quelle
en sera l’intensité. Sous l’angle des sciences sociales, une
enquête très minutieuse a été menée dans l’une des zones
les plus touchées en partenariat avec des acteurs péruviens
et une ONG italienne. Les chercheurs ont ainsi montré la
Mesures géodésiques / Chili.
grande vulnérabilité des populations défavorisées, à la fois
les plus concernées par la destruction de leur logement et
rencontrant le plus de difficultés pour intégrer le processus
de reconstruction.
Au Chili, des chercheurs de l’IRD et leurs collègues chiliens et
allemands ont mené une série d’observations durant un mois
après le séisme et ont reconstitué la carte des soulèvements
et affaissements du sol le long de la côte, montrant une zone
de rupture s’étalant sur 500 kilomètres. Ces recherches
suggèrent que le tremblement de terre a libéré une grande
partie de l’énergie stockée dans la plaque occidentale sudaméricaine depuis près de 170 ans. Accumulation puis
relâchement de contraintes sont les caractéristiques du cycle
sismique dont les périodes sont données par les observations
historiques. En se détendant, la plaque est remontée sur son
bord provoquant une élévation de la zone côtière jusqu’à
2,5 mètres et entraînant par endroits une avancée du
littoral jusqu’à 500 mètres. À l’intérieur des terres, elle s’est
affaissée, faisant descendre les terres de près d’un mètre. Le
désastreux séisme aurait ainsi permis de relâcher une grande
partie de l’énergie accumulée au niveau de ce segment de
la zone de subduction chilienne. Ce qui pourrait expliquer
l’absence à ce jour de forte réplique, fait assez rare pour des
séismes d’une telle magnitude.
Chili
Au Chili, comme à Pisco, les
principales zones de déplacement
pourraient correspondre aux lieux où
les plaques se bloquent, phénomène qui
semble se répéter d’un événement à l’autre.
Cette observation laisse entrevoir la possibilité
d’identifier les zones à fort potentiel sismique, à l’opposé
de zones où les plaques glissent sans frottement, donc sans
risque de séisme.
Contact [email protected]
Publication Science
1
Dans le cadre d’une convention entre l’Instituto Geofísico del Perú (IGP)
et l’IRD.
Subduction / Chili.
LE PARTENAIRE
Le département
de géologie de
l’université du Chili
Ce département travaille
sur les risques naturels, les
ressources en métaux précieux,
la géothermie et la tectonique
des Andes. Depuis une
vingtaine d’années, une étroite
collaboration a été développée
avec l’IRD sur des sujets
d’intérêt commun et a permis la
formation de douze docteurs en
sciences de la terre. Des études
géologiques, géophysiques
et géomorphologiques sont
notamment menées dans le
cadre du programme conjoint
« Évolution géodynamique et
tectonique de la chaîne des
Andes ».
Contact
Brian Townley,
Chef du département de géologie
[email protected]
http://www.geologia.uchile.cl/
\ 16 \ 17
Institut de recherche pour le développement
Climat et santé : le cas de la dengue
LE PARTENAIRE
Le Centre de
prévision du temps
et des études
climatiques de
l’Institut national
de recherches
spatiales du Brésil
existe depuis plus de dix ans.
Il a pour mission d’élaborer
et de diffuser les prévisions
météorologiques, et de modéliser
les phénomènes atmosphériques
en s’appuyant sur l’analyse des
données satellitaires qu’il produit.
Ses recherches couvrent un
grand nombre de thématiques
comme l’hydrologie de surface,
la pédologie ou les interactions
végétation-atmosphère.
La collaboration avec l’IRD porte
sur le changement climatique, ses
conséquences sur l’environnement
et la santé, et sur les stratégies
d’adaptation dans les domaines
de l’agriculture, du développement
rural, de la production hydroélectrique, du transport fluvial et de la
gestion des ressources en eau et
des zones humides. Ces recherches
s’inscrivent notamment dans le
cadre de projets européens, CLARIS,
CLARIS-LPB et plus récemment
DEEPER dont il coordonne la
participation brésilienne.
Contact
Dr Caio Augusto dos Santos Coelho,
chercheur attaché
[email protected]
Par l’influence qu’il exerce sur
les populations d’insectes vecteurs,
le climat joue un rôle important dans
le développement de maladies comme la
dengue. Chaque année, celle-ci affecte environ
cent millions de personnes et cause 25 000 décès,
essentiellement dans les zones tropicales et subtropicales.
Mieux connaître les facteurs climatiques agissant sur
cette arbovirose1 constitue ainsi un enjeu majeur pour de
nombreux pays du Sud. Un programme pluridisciplinaire a
été lancé à cette fin par l’IRD et ses partenaires au Brésil2
et dans le Pacifique sud3.
Au nombre de quatre, les virus de la dengue se sont répandus,
durant la dernière décennie, dans plus de cent pays de la
ceinture tropicale et subtropicale. Ils figurent parmi les virus
les plus fréquemment transmis à l’homme par des arthropodes. La
distribution spatiale de cette maladie virale émergente reflète
celle de son vecteur principal, le moustique Aedes aegypti. En
l’absence de vaccin, le seul véritable moyen de lutte contre la
dengue demeure le contrôle des vecteurs. Afin de comprendre
comment le climat agit sur la propagation de la maladie, l’IRD
et de nombreux partenaires se sont associés dans le but de
produire un indice de risque climatique qui pourrait être utilisé
de façon opérationnelle par les pays concernés.
Dengue : zones à risque.
L’observation a permis la collecte et l’évaluation des données
entomologiques mais aussi l’homogénéisation, dans le
temps et selon les pays, des données historiques relatives
aux épidémies de dengue en vue de constituer un référentiel
exploitable. Par la modélisation épidémiologique, sur la base
des lois régissant la croissance de l’insecte et l’évolution
du virus dans celui-ci, en fonction du climat (température
de surface, humidité relative, précipitations), la densité de
moustiques femelles « infectantes » c’est-à-dire capables
de transmettre le virus a été évaluée. Puis, tenant compte
des relations entre l’homme et le vecteur via un indice
couramment utilisé en épidémiologie, des cartes de risque
épidémique ont été élaborées à partir de données climatiques
actuelles et futures. Il est ainsi montré qu’un nombre de jours
important, en début d’année, avec une température supérieure
à 32 °C et une humidité relative supérieure à 95 % favorise le
développement de la maladie.
À l’horizon 2100, les zones concernées pourraient s’étendre
vers le nord et vers le sud, au-delà des limites géographiques
aujourd’hui identifiées. Dans les pays déjà touchés par la
dengue, le risque pourrait s’accroître ce qui traduit, dans le
modèle, une accélération de la circulation du virus.
Si ces résultats ouvrent la voie à une meilleure connaissance
globale de l’effet du climat, il reste à montrer que ce type
de modèle permet aussi d’analyser régionalement les
dynamiques saisonnières et interannuelles des épidémies.
Mieux comprendre l’influence de phénomènes comme
El Niño et l’oscillation australe dans les pays du Pacifique sudouest permettraient, à terme, la mise en œuvre de mesures de
prévention efficaces.
Contacts [email protected]
[email protected]
Publication Climatic Change
1
Maladie virale transmise par l’intermédiaire d’un arthropode.
Université fédérale du Rio Grande do Norte (Natal-RN), Université fédérale
de Campina Grande et université d’État du Paraíba (Campina Grande-PB),
Institut national de météorologie (São Paulo), Institut national de recherches
spatiales (Cachoeira Paulista-SP).
3
CNRS, Météo France, Institut Louis Mallardé, Institut Pasteur de NouvelleCalédonie, université de Nouvelle-Calédonie, Direction des affaires sociales
et de la santé, Nouvelle-Calédonie.
2
Récolte de moustiques / Bolivie.
Rapport d’activité 2010
Gestion durable
des écosystèmes du Sud
Les écosystèmes terrestres et aquatiques tropicaux assurent l’essentiel de leur subsistance aux populations
et aux sociétés des Suds. Leur richesse et leur diversité, restant parfois encore à décrire, sont à la base de
ces ressources. Mais ces milieux subissent une forte pression anthropique qui, en se surajoutant
aux effets du changement climatique, contribue à la dégradation de l’environnement.
En étudiant les agrosystèmes, les écosystèmes aquatiques (marins, littoraux et
continentaux) et la biodiversité en zone tropicale, les scientifiques de l’IRD et
leurs partenaires développent des approches visant à maintenir la viabilité des
biotopes et de leurs usages. Ils apportent ainsi des réponses aux grands défis
mondiaux dans des domaines emblématiques : récifs coralliens, aquaculture,
forêts tropicales humides, désertification, usages des sols, résistance des
plantes à la sécheresse… Participant aux inventaires de la biodiversité,
ils développent la connaissance scientifique et favorisent une gestion
durable des écosystèmes en préconisant par exemple la préservation via
la mise en place d’aires protégées ou des changements d’usages et de
comportements
122
CHERCHEURS
22,4
MILLIONS
D’EUROS
261
ARTICLES
Grenouille / Costa Rica.
\ 18 \ 19
Institut de recherche pour le développement
Protéger les lagons de Nouvelle-Calédonie
LE PARTENAIRE
La Direction de
l’environnement
de la province Sud
de la NouvelleCalédonie compte, parmi
ses missions, l’acquisition des
connaissances sur les milieux
littoral, récifal et lagonaire, la
préservation et la protection de
ces écosystèmes, la gestion du
dossier Patrimoine mondial de
l’humanité et la valorisation des
actions provinciales engagées
en faveur de la sauvegarde de
l’environnement marin. Depuis
2006, le service de la mer, en
charge de ces activités, s’appuie
sur l’expertise des scientifiques
de l’IRD en vue de mettre en
œuvre une gestion responsable
de ces milieux naturels. Les
chercheurs interviennent
également dans le cadre
d’actions de sensibilisation
auprès des usagers, à propos
de l’intérêt écologique des
mangroves, la biodiversité des
récifs coralliens, etc.
Contact
Dr. Christophe Chevillon,
directeur du service de la mer
[email protected]
La Nouvelle-Calédonie abrite
le deuxième plus vaste lagon corallien
de la planète, classé depuis 2008 au
Patrimoine mondial de l’Unesco. Dotée
d’une biodiversité unique, l’île recèle par
ailleurs l’un des plus grands gisements de nickel au
monde. L’extraction du minerai, au cours du XXe siècle, a
triplé par endroits l’apport de sédiments au milieu marin.
Afin de comprendre le fonctionnement des lagons et de les
préserver, des chercheurs de l’IRD et leurs partenaires1 ont
mené, pendant près de dix ans, un ambitieux programme
pluridisciplinaire dans le cadre du « Programme national
environnement côtier » (PNEC).
Comme dans la plupart des milieux insulaires, les liens
culturels et économiques avec la mer sont particulièrement
forts en Nouvelle-Calédonie. La richesse de ses écosystèmes
marins suscite un vif intérêt chez les scientifiques qui
contribuent, depuis plus de 50 ans, à une meilleure
connaissance des récifs coralliens. Novateur par son
approche pluridisciplinaire, le chantier calédonien du PNEC
a été mené de 1999 à 2007. Composition physicochimique
des eaux et des sédiments marins, courants responsables de
la dispersion des apports continentaux, ciguatera, habitats et
peuplements marins, effets des contaminants métalliques sur
Lagon / Nouvelle-Calédonie.
les êtres vivants, etc., le but des recherches menées est de
mieux connaître les lagons néo-calédoniens, à la fois dans
leur structure et leur fonctionnement, et d’évaluer l’impact
des activités humaines. Les chercheurs ont, par exemple,
retracé l’histoire sédimentaire du lagon grâce à des séries de
mesures sur les particules qui s’accumulent sur le fond. Outre
l’influence des événements climatiques extrêmes, comme
les épisodes de fortes pluies tropicales et les cyclones, ces
études montrent le rôle important de l’hydrodynamisme,
c’est-à-dire de l’ensemble des mécanismes de déplacement
des masses d’eau (courants, houle, marées, turbulences),
dans la distribution et le devenir des particules et des
métaux contenus dans les sols. Un atlas des courants et une
cartographie des temps de résidence des eaux dans le lagon
ont ainsi été établis et sont autant d’outils qui pourront être
utilisés en vue d’une gestion intégrée de la zone. D’autres
résultats ouvrent la voie à de nouvelles recherches dans le
cadre du GOPS2, en particulier, sur l’effet des phénomènes
atmosphériques sur la circulation océanique du proche large.
Le bilan des connaissances ainsi réalisé s’adresse tant aux
chercheurs et aux étudiants qui se consacrent à ce milieu,
qu’aux spécialistes d’autres zones lagonaires de l’océan
mondial. Au-delà des perspectives scientifiques, ces travaux
favorisent une prise de conscience de la part des décideurs
politiques et des exploitants miniers. Modes opératoires
moins destructeurs sur le terrain, bassins de rétention pour
les effluents, revégétalisation des zones altérées, etc. : les
industriels mettent désormais en place un certain nombre
de mesures afin de limiter l’érosion des sols et la pollution
du lagon. Tout l’enjeu pour les acteurs locaux est de concilier
objectifs de développement grâce à la première activité
économique de l’île et protection de ce lieu unique, joyau de
la biodiversité marine.
Contacts [email protected] [email protected] - [email protected]
Publication Numéro spécial du Marine Pollution
Bulletin
1
Ces travaux ont été réalisés principalement par des équipes de l’IRD,
du CNRS, de l’Ifremer, de l’EPHE, des universités de Nouvelle-Calédonie,
de France métropolitaine et d’outre-mer et étrangères, dans le cadre du
Programme national environnement côtier (PNEC) et avec le soutien du
Programme néo-calédonien ZoNéCo.
2
Grand observatoire de l’environnement et de la biodiversité terrestre et
marine du Pacifique sud.
Biodiversité marine / Nouvelle-Calédonie.
Rapport d’activité 2010
La transition agraire en Indonésie
Les agroforêts à hévéa de l’île de Sumatra, en
Indonésie, sont des écosystèmes riches d’une biodiversité
exceptionnelle. Ces forêts domestiques, enrichies en
espèces d’intérêt commercial, apportent aux agriculteurs
une source diversifiée de revenus, combinant le plus
souvent ressources autoconsommées et produits de rente.
Des chercheurs de l’IRD et leurs partenaires ont étudié leur
fonctionnement et leur évolution alors que s’opère, depuis
les années 1990, une transition sans précédent vers des
monocultures d’hévéa et de palmier à huile.
Jusqu’à la fin du XIXe siècle, l’île de Sumatra était presque
entièrement recouverte de forêts. Cette ressource naturelle a
tout d’abord été valorisée par la chasse et la cueillette puis
associée à la culture sur brûlis du riz pluvial. La révolution
industrielle en Europe et en Amérique du Nord a généré une
forte demande en caoutchouc naturel. En réponse à cette
opportunité commerciale, les agriculteurs ont introduit des
plants d’hévéa dans leurs essarts, au milieu du riz pluvial. Les
agroforêts à hévéa étaient nées.
Après avoir connu une expansion jusque dans les années 1990,
les agroforêts ont amorcé un déclin au profit de plantations
monospécifiques d’hévéa et de palmier à huile. Afin de
favoriser la gestion durable de ces nouvelles « mosaïques
paysagères », des chercheurs de l’IRD et leurs partenaires se
sont associés dans le cadre d’un projet financé par l’Agence
suisse pour le développement et mené conjointement avec
le Cifor1 et l’IcraF2, dans cinq pays d’Asie et d’Afrique. Leur
objectif : apporter une expertise sur les agroforêts en termes
socio-économiques et biophysiques et étudier les possibles
mécanismes de récompense pour services environnementaux
rendus par ces écosystèmes. Quatre années de recherche
ont permis de comparer les associations paysagères et de
concevoir un outil d’étude des paysages complexes accessible
via internet. En Indonésie, les chercheurs constatent l’absence
de pression sociale pour maintenir les agroforêts. Du paysan
au gouvernement en passant par le secteur industriel, tous
les acteurs indonésiens du secteur agricole s’entendent pour
développer les plantations monospécifiques, en particulier
le palmier à huile. Ce choix s’explique par un revenu bien
supérieur à celui de la riziculture ou des agroforêts. À cet
avantage, s’ajoutent, pour le palmier, une faible demande
en main-d’œuvre et des cycles de production plus courts
que ceux de l’hévéa. L’attachement sentimental ou culturel
aux systèmes agroforestiers, moins rentables, est un luxe
que les populations locales ne peuvent s’offrir. Pourtant, les
agroforêts disposent de nombreux atouts. Outre la sécurité
qu’elles apportent face aux crises économiques grâce à la
diversification des revenus agricoles, elles constituent des
écosystèmes intermédiaires entre les
plantations et les forêts, susceptibles
de jouer le rôle de zone tampon
autour des parcs nationaux. Mettre au
point des mécanismes de paiement pour
services environnementaux et valoriser ainsi la
biodiversité, telle est la piste explorée par les équipes de
recherche pour favoriser une transition agraire durable au
bénéfice des populations indonésiennes.
Contacts [email protected]
[email protected]
Publication Ecology and Society
1
2
Centre international de recherche en foresterie.
Centre mondial d’agroforesterie.
LE PARTENAIRE
Le Cifor,
centre international
de recherche en
foresterie
Créé en 1993, le Cifor est
une institution de recherche
internationale, située à Bogor
en Indonésie. Son objectif est
d’œuvrer pour la conservation
des forêts tropicales et
l’amélioration des conditions de
vie des populations. Il fait partie
des quinze instituts que regroupe
le CGIAR, consortium mondial
de la recherche agricole pour
le développement. Ses travaux
et son expertise viennent en
appui à la décision en matière de
gestion des forêts tropicales en
Asie, en Afrique et en Amérique
latine. Depuis une quinzaine
d’années, le centre accueille
des chercheurs de l’IRD sur des
thématiques d’intérêt commun.
L’un d’entre eux a assuré, entre
2009 et 2011, la direction d’un
des trois grands programmes du
Cifor.
Contact
http://www.cifor.cgiar.org/
[email protected]
Palmiers à huile / Indonésie.
Récolte du latex / Indonésie.
\ 20 \ 21
Institut de recherche pour le développement
Ressources
et accès à l’eau
Dans les pays du Sud, l’accès et le partage de l’eau représentent un enjeu fondamental. 2,6 milliards de
personnes ne bénéficient pas d’une eau de qualité. Sous l’effet du changement global, les ressources en eau
à usage domestique et agricole font l’objet de pressions et de compétitions croissantes. Le devenir
de ces ressources et leur accessibilité suscitent une inquiétude sociétale de plus en plus vive
qui se traduit parfois par des conflits. Le déploiement de systèmes d’observation, in situ
et satellitaires, permet le suivi de la dynamique hydrologique de surface et souterraine
sur un ensemble de terrains allant des zones sahélo-soudaniennes aux glaciers
tropicaux.
À partir de bilans quantitatifs et qualitatifs, d’une modélisation adéquate
et d’une meilleure compréhension des processus et des mécanismes en
œuvre, il est possible de proposer des modes de gestion des ressources
en eau à l’échelle des bassins versants et des hydrosystèmes. Intégrées
au sein de politiques publiques, ces propositions débouchent sur une
gestion à la fois plus durable et plus équitable, et donc socialement plus
acceptable
141
CHERCHEURS
26,3
MILLIONS
D’EUROS
247
ARTICLES
Accès à l’eau / Inde.
Rapport d’activité 2010
Neige et gestion de l’eau au Maroc
LE PARTENAIRE
La neige constitue une importante ressource en eau
pour les pays montagneux du pourtour de la Méditerranée.
Au Maroc, le Haut-Atlas concentre une large part des
précipitations, notamment sous forme de neige, et joue
le rôle de château d’eau pour les plaines agricoles en
contrebas. Fragilisée par la baisse des précipitations, cette
ressource est aujourd’hui menacée par l’augmentation
de la consommation. Il est ainsi devenu indispensable de
suivre le couvert neigeux du massif, grâce notamment
à l’imagerie satellitaire, afin de proposer une aide à la
décision aux gestionnaires locaux de l’eau.
La plaine du Tensift est représentative des problèmes
de gestion des zones arides et semi-arides du pourtour
méditerranéen. Les chercheurs étendent actuellement leurs
travaux au nord et à l’est de la Méditerranée afin de suivre,
grâce à la télédétection satellitaire, l’évolution de la ressource
issue de la fonte des neiges, en liaison avec le fonctionnement
des bassins hydrologiques.
Contacts [email protected]
[email protected]
Publication International Journal of Applied Earth
Observation and Geoinformation
1
Université Cadi Ayyad (UCAM) et unité mixte de recherche CESBIO (CNESCNRS-IRD-UPS).
2
Ce travail a été réalisé dans le cadre de la thèse de doctorat d’Abdelghani
BOUDHAR « Télédétection du manteau neigeux et modélisation de la
contribution des eaux de fonte des neiges aux débits des oueds du
Haut-Atlas marocain » - université Cadi Ayyad, faculté des sciences et
techniques de Marrakech.
5 km
Dans la région du Tensift, en aval des monts du Haut-Atlas,
le développement agricole et socio-économique exerce une
pression qui impose des règles d’utilisation rationnelle et
une meilleure prévision saisonnière. Dans cette perspective,
un vaste projet de collaboration a associé, dès 2002, des
organismes d’enseignement supérieur et de recherche1 et
des gestionnaires tels que l’Agence du bassin hydraulique
du Tensift et l’Office régional de mise en valeur agricole du
Haouz. Ce partenariat se traduit notamment par le programme
SUDMED, sur la gestion intégrée de l’eau agricole dans la
région. Grâce à des images du satellite SPOT-VEGETATION,
les scientifiques ont cartographié les zones enneigées de
la chaîne montagneuse. Ils ont ainsi analysé les variations
spatio-temporelles de la couverture neigeuse sur le HautAtlas de 1998 à 2005, révélant d’importantes fluctuations
d’une année sur l’autre en termes d’enneigement2 : extension
des manteaux, durée et nombre d’épisodes de précipitations
solides et de fonte au cours de la saison hivernale. Ces
variations ont des conséquences directes sur le débit des
oueds et la disponibilité de la ressource à la saison sèche.
Pour compléter ces observations globales, l’équipe de
recherche exploite également des images de plus haute
résolution (10 m). Les perspectives scientifiques offertes par
ces nouvelles données apparaissent très prometteuses pour
affiner le suivi de la dynamique des manteaux neigeux. Les
défis qui attendent les gestionnaires sont d’autant plus grands
que le changement climatique fait redouter une baisse non
seulement des précipitations totales, mais surtout solides, qui
représentent une réserve stockée pendant l’hiver et disponible
pendant l’été en période d’étiage.
21 mars
Chaîne de l’Atlas / Maroc.
3 avril
Fonte des neiges / Maroc.
Le partenaire :
le laboratoire
Géoressources faculté des
sciences et
techniques du Guéliz,
université Cadi
Ayyad, Marrakech,
Maroc
Ce laboratoire mène des travaux
dans le but de contribuer à une
gestion durable et intégrée des
ressources naturelles dans les
milieux arides et semi-arides. Il
a notamment pour ambition la
mise en place d’une recherche
interdisciplinaire concernant la
ressource en eau dans la région
du Tensift/Al Haouz ainsi que la
valorisation et le transfert des
résultats en termes d’outils de
gestion et d’aide à la décision. En
collaboration avec l’unité CESBIO
de Toulouse, ce laboratoire a
créé la jeune équipe CREMAS
associée à l’IRD, dont l’un des
principaux axes de recherche
concerne l’hydrologie de
montagne et le suivi du manteau
neigeux : modélisation pluie/
débit, mesure de l’érosion,
caractérisation des aquifères.
Le partenariat engagé se traduit
également par le co-encadrement de doctorants sur ces
thématiques.
Contact
Prof. Lahoucine Hanich,
[email protected]
\ 22 \ 23
Institut de recherche pour le développement
Eau, agriculture et pauvreté en Afrique de l’Ouest
LE PARTENAIRE
L’Autorité du bassin
de la Volta1 couvre six
pays : le Bénin, le Burkina Faso,
la Côte-d’Ivoire, le Ghana, le
Mali et le Togo. Créée en 2007,
cette structure de coordination
a été progressivement mise en
place depuis 2004 pour assurer
la gestion de l’eau à l’échelle
du bassin. Par ses réunions
régulières, l’Autorité permet une
concertation sur la planification
de l’utilisation des ressources
alors qu’un observatoire gère
et met en commun les bases
de données hydrologiques.
La synthèse multidisciplinaire
et les documents réalisés
dans le cadre du projet de
bassin contribuent à l’avancée
des connaissances utiles à
l’amélioration des conditions de
vie des populations.
Au Sahel, la productivité de
l’eau agricole est faible : la quantité de
céréales produite avec un mètre cube
d’eau est dix fois moindre que dans la
Beauce, le grenier de la France. Ce contexte
a conduit, dans le cadre d’un Challenge Programme
« Eau et Alimentation », à lancer des recherches internationales au niveau des grands bassins hydrologiques.
Une analyse multidisciplinaire des relations entre eau,
production agricole et pauvreté a été réalisée à l’échelle
de bassins versants. Deux d’entre eux, ceux de la Volta
et du fleuve Niger, ont été étudiés sous la coordination de
chercheurs de l’IRD. Dans ces bassins, aux conditions
climatiques proches, l’agriculture vivrière est essentiellement
pluviale : elle ne permet de cultiver que durant la saison des
pluies dans les zones le plus au nord. Le reste de l’année,
les paysans sont contraints à un exode saisonnier vers
d’autres pôles d’activités et les terres demeurent inexploitées.
Mieux prévoir les pluies en début de saison pour favoriser le
démarrage des cultures est un premier facteur de progrès.
La cartographie des zones agro-climatiques montre par
ailleurs une forte variabilité spatiale des précipitations avec
un net gradient d’aridité croissante du sud vers le nord. Dans
le bassin de la Volta, l’évolution de la pluviométrie dépend
du déplacement saisonnier de la zone de convergence
intertropicale, séparant la mousson de sud-ouest, chaude et
humide, de l’Harmattan, vent saharien très sec de nord-est.
Plusieurs recommandations ont été émises, notamment la
mise en place de dispositifs de collecte d’eau de pluie visant
à réduire les pertes par évapotranspiration dans des régions
où près de 90 % des précipitations retournent à l’atmosphère.
L’aménagement de petits barrages permet ainsi de développer
l’irrigation à l’échelle locale, de partager équitablement la
ressource et d’introduire des cultures de contre-saison.
L’analyse des apports et des usages de l’eau (prélèvement
pour la consommation directe, production hydroélectrique…)
contribuent à une meilleure compréhension globale du
fonctionnement de ces bassins. Mais au-delà de la promotion
de solutions techniques, la gouvernance de la ressource en
eau par des politiques volontaristes et la concertation entre
pays au niveau régional s’imposent également.
les situations de transition ou de stade industriel, les autorités
couvrent de plus larges zones et peuvent jouer un rôle majeur
pour éviter l’apparition de poches de pauvreté, corriger
des inégalités entre groupes sociaux ou encore préserver
l’environnement.
À l’échéance 2050, le défi majeur sera de fournir une eau
domestique de qualité et de développer une production agricole
permettant de répondre aux besoins d’une population qui
pourrait doubler ou tripler d’ici là. La prévention des maladies
liées à l’eau est également un enjeu de développement.
Contacts [email protected] [email protected] - [email protected]
Publication Water International
L’efficience des politiques publiques dépend largement de
contraintes socio-économiques, et donc de la position de
la région dans le gradient de développement : dominance
agricole, de transition ou industrielle. Pour les bassins de
la Volta et du Niger, qui se situent essentiellement au stade
agricole, le rôle des autorités locales est prépondérant par
rapport à celui des institutions nationales ou de bassin. Dans
1
Une structure semblable existe au niveau du
bassin du fleuve Niger, l’Autorité du bassin du
Niger.
Contact
Dr. Charles A. Biney,
directeur exécutif
[email protected]
Maraîchage / Burkina Faso.
Bassin de la Volta.
Rapport d’activité 2010
Sécurité alimentaire
dans le Sud
L’insécurité alimentaire, en particulier en Afrique, demeure une entrave majeure au développement de régions
entières, tandis que les perspectives agricoles mondiales et les ressources halieutiques semblent se dégrader.
Tensions sur les prix, concurrence des plantes agroénergétiques, acquisitions des terres dans les
pays les plus pauvres, surpêche, sont autant de phénomènes qui prennent une ampleur
particulière en étant couplés à une croissance démographique soutenue.
Pour répondre à ces enjeux, les recherches s’inscrivent dans une perspective
d’amélioration des rendements tout en maintenant la fertilité des sols. À cet effet,
une meilleure connaissance scientifique en biologie et physiologie végétales
permet d’accélérer la sélection variétale et d’identifier les plantes les plus
adaptées aux climats et aux sols. Des projets innovants de lutte contre les
déprédateurs de cultures complètent ces efforts.
L’élimination de la faim et des différentes formes de malnutrition, dans
une optique de gestion raisonnée des ressources naturelles et des
pêches, mobilise sciences de l’environnement et sciences sociales. La
vulnérabilité alimentaire reste un problème majeur notamment dans les
régions du Sahel. Les chercheurs identifient alors les populations les plus
fragiles, repèrent les mécanismes politiques et sociaux à leur origine et
accompagnent les différents acteurs comme les ONG ou les pouvoirs
publics. C’est à ces conditions que les politiques gouvernementales en
matière de sécurité alimentaire se révèleront à la fois adaptées aux besoins
et pérennes
147
CHERCHEURS
26
MILLIONS
D’EUROS
238
ARTICLES
Récoltes / Burkina Faso.
\ 24 \ 25
Institut de recherche pour le développement
Améliorer la riziculture africaine
LE PARTENAIRE
Le Ciat, centre
international
d’agriculture
tropicale, est l’un des
quinze instituts internationaux
que fédère le CGIAR. Il développe
ses activités à Cali, en Colombie,
sur de nombreuses plantes
tropicales d’intérêt pour
l’Amérique latine et l’Afrique.
Depuis 1995, les collaborations
avec l’IRD se sont traduites
par la présence continue de
chercheurs de l’Institut au Ciat
sur des thématiques telles que la
bactériose du manioc, la fertilité
des sols tropicaux, la génétique
et la génomique fonctionnelle
du riz. Les recherches sur le riz
s’inscrivent désormais au sein
du programme GRiSP qui vise
à harmoniser les recherches
au niveau mondial en associant
des centres de recherche
internationaux (Irri3,AfricaRice,
Ciat), un grand nombre
d’institutions au Sud et plusieurs
institutions au Nord (IRD et Cirad
en France, Jircas4 au Japon).
Contact
Joe Tohme,
Chef du département
agrobiodiversité du Ciat
[email protected]
http://www.ciat.cgiar.org
La sécurité alimentaire au
Sud repose en grande partie sur la
culture de variétés adaptées à leur
environnement dans un contexte de
changement climatique. Par croisement avec
des espèces sauvages ou des variétés traditionnelles,
il est possible de rendre les plantes plus résistantes à la
sècheresse, à la salinité des sols ou encore aux maladies
et aux insectes ravageurs. Afin de faciliter l’amélioration
variétale du riz en Afrique, des chercheurs de l’IRD ont
imaginé la création de ponts entre les deux espèces de
riz cultivé. Ce projet fait l’objet d’une collaboration
internationale, soutenue par le Challenge programme
« Generation » du consortium mondial de la recherche
agricole pour le développement (CGIAR).
Particulièrement bien adaptée au stress hydrique et aux
agents pathogènes, l’espèce africaine de riz Oryza glaberrima
a été utilisée pour créer les variétés Nerica à partir de
croisements avec O. sativa, l’espèce d’origine asiatique
la plus communément cultivée dans le monde. Distribués
en Afrique par AfricaRice1 depuis les années 2000, les riz
Repiquage du riz / Mali.
Nerica ont été obtenus au prix d’un long effort de sélection
dû à la stérilité induite par les croisements interspécifiques.
C’est dans ce contexte que le projet iBridges (Interspecific
Bridges) a été lancé avec le soutien du CGIAR. Les recherches
menées par l’IRD ont ciblé le gène S1, précédemment identifié
comme l’un des déterminants clés de cette stérilité, dont une
cartographie très précise a été réalisée en partenariat avec le
Ciat, centre international d’agriculture tropicale. En s’appuyant
sur les travaux de séquençage du génome de toutes les
espèces de riz (projet OMAP, Tucson, Arizona), les chercheurs
ont déchiffré chez O. glaberrima un fragment chromosomique d’environ un million de bases autour du gène S1.
L’ensemble de ces résultats a conduit à l’élaboration d’un
modèle génétique qui explique la stérilité des descendances
interspécifiques et qui ouvre la voie à des recherches sur
les gènes impliqués. À partir de l’analyse de cette séquence
génomique, des marqueurs ont été développés et faciliteront
la sélection génétique. L’identification des rares individus
fertiles dispense ainsi des nombreuses étapes jusqu’alors
nécessaires au croisement entre espèces. Ces avancées
posent les jalons d’une création variétale utilisant plus
largement la biodiversité naturelle des riz africains. Elles sont
le fruit d’une étroite collaboration, depuis 2005, avec le Ciat
et AfricaRice ainsi qu’avec plusieurs organismes nationaux
de recherche agronomique en Afrique, notamment l’Institut
d’économie rurale, au Mali, et l’Institut de l’environnement et
des recherches agricoles, au Burkina Faso. Le projet iBridges
se poursuit dans le cadre du GRiSP2, nouveau programme du
CGIAR, lancé à Hanoi fin 2010, au sein duquel l’IRD assurera
le pilotage de certains axes de recherche, notamment celui
portant sur les croisements interspécifiques.
Contacts [email protected]
[email protected]
Publication Genetics
1
Centre du riz pour l’Afrique (http://www.africaricecenter.org).
Global rice science partnership.
International Rice Research Institute.
4
Japan International Research Center for Agricultural Sciences.
2
3
Génétique du riz.
Rapport d’activité 2010
Impact des filières de production d’anchois
péruviens
La pêcherie d’anchois du Pérou utilise la plus
grande flotte industrielle nationale au monde ciblant une
seule espèce de poissons. Elle en prélève en moyenne
six millions de tonnes par an. Ces anchois sont presque
exclusivement destinés à la production de farine et
d’huile. Malgré l’existence d’une flottille artisanale capable
d’approvisionner les marchés locaux, seul un pour cent des
captures totales est consacré à la consommation humaine
directe. Dans un pays où la sous-nutrition affecte un quart
de la population, cette situation constitue un paradoxe
qu’étudient des chercheurs de l’IRD et leurs partenaires
péruviens.
La farine et l’huile produites à partir de poissons entrent
principalement dans la composition d’aliments pour
animaux. Du point de vue énergétique, cette filière longue de
transformation qui, en outre, nécessite un transport important
de marchandises, est moins efficace pour fournir protéines et
acides gras que la consommation directe de poissons. Du fait
de ses taux de captures très élevés, la pêcherie péruvienne
d’anchois présente toutefois une efficacité remarquable en
termes d’énergie consommée et d’impact environnemental
associé (émissions de gaz à effet de serre, acidification, etc.).
Il reste à savoir dans quelle mesure cet avantage compense la
longueur du processus de production.
Un nouveau programme de recherche sur les impacts
environnementaux et socio-économiques liés à l’exploitation
de l’anchois péruvien a été lancé en 2009 par l’IRD et
l’Imarpe, rejoints par de nombreux autres partenaires
académiques (universités), industriels et associatifs. L’objectif
du programme est de quantifier et comparer les filières
longues et courtes, d’un bout à l’autre de la chaîne. Une
première analyse économique souligne le plus grand profit
que permet de dégager la filière huile-farine, stimulée par
la demande croissante du secteur aquacole. Cette tendance
est confortée par la surcapacité actuelle des usines. Sur
les aspects environnementaux, une étude comparée des
filières, reposant notamment sur l’analyse de cycle de vie,
montre que la consommation d’énergies fossiles constitue
de loin le premier impact, suivi par l’usage de peintures
anti-incrustantes et de métaux pour la construction des
équipements. Ces premiers résultats conduisent d’ores
et déjà les scientifiques à encourager des pratiques plus
respectueuses de l’environnement : remplacement du fuel
lourd par du gaz naturel dans les usines de transformation,
utilisation de peintures moins riches en cuivre et en étain,
limitation des rejets liquides et solides en mer, etc.
scénarios d’exploitation et les
impacts des productions aquacoles.
In fine, c’est l’ensemble des filières
qui sera modélisé afin de suggérer des
orientations en matière de politique publique
dans une perspective de développement durable.
La méthodologie ainsi développée pourra être transposée à
d’autres produits de la mer ou agricoles.
Contact [email protected]
Publication Globec International Newsletter
Les prochaines études concerneront les deux extrémités des
filières : les flux d’énergie dans l’écosystème selon différents
LE PARTENAIRE
L’Imarpe
- Instituto del mar
del Perú a pour mission d’étudier l’environnement marin et sa biodiversité,
d’évaluer les ressources et de
fournir des informations et recommandations pour la prise de
décision sur la pêche, l’aquaculture et la protection du milieu
marin afin de contribuer activement au développement du
Pérou. Cet organisme qui dépend
du secteur pêcherie du ministère
de la Production collabore intensivement avec l’IRD depuis plusieurs années pour l’évaluation
et la gestion des stocks exploités
via des études écologiques et
d’océanographie physique.
Des outils de représentation et
d’analyse des données ainsi que
des modèles ont été mis au
point conjointement. Un colloque
international a été co-organisé
en 2006 et un master en sciences
de la mer a été lancé en 2010
avec l’appui du laboratoire mixte
international DISCOH
(Dynamiques du système du
courant de Humboldt).
Contact
Renato Guevara,
directeur scientifique de l’Imarpe
[email protected]
Pêche / Pérou.
Anchois / Pérou.
\ 26 \ 27
Institut de recherche pour le développement
Sécurité sanitaire
et politiques de santé
L’amélioration de la santé de la mère et de l’enfant et la lutte contre les principales maladies infectieuses
occupent une place prépondérante dans les Objectifs du millénaire pour le développement et constituent le
cœur de métier de l’IRD en matière de santé.
Sida, paludisme et tuberculose, et en particulier leur transmission périnatale, ont des
répercussions majeures sur le développement des pays du Sud. La pauvreté favorise
en outre les maladies négligées comme la leishmaniose, la maladie de Chagas,
les trypanosomoses ou l’onchocercose. Les maladies dites « de civilisation »
(cancers, maladies cardio-vasculaires, diabète…), prépondérantes dans
les pays du Nord, prennent une place de plus en plus importante dans la
morbidité des pays en développement. Les pandémies, notamment virales,
qui pourront émerger dans la zone intertropicale, rendent nécessaire le
déploiement de moyens de veille épidémiologique et de diagnostic.
C’est dans ce contexte que les chercheurs de l’IRD, en partenariat avec
leurs homologues du Sud et dans un abord pluridisciplinaire, travaillent
à la surveillance, à l’élaboration d’outils de diagnostic performants et
adaptés, aux traitements et aux moyens de lutte, voire à l’éradication
de certaines pathologies. La réussite de ces projets s’envisage à travers
une étroite collaboration avec les sciences humaines et une approche
écosystémique de la santé, proposant des démarches viables et applicables
dans les contextes locaux
151
CHERCHEURS
28,7
MILLIONS
D’EUROS
465
ARTICLES
Prévention du Sida / Togo.
Rapport d’activité 2010
Carences nutritionnelles au Vietnam
Le Vietnam, pays en émergence, est confronté
au double problème des malnutritions : la prévalence du
surpoids connaît une augmentation rapide alors que les
carences en micronutriments et le retard de croissance
persistent. La prévention dans ce domaine relève de la
responsabilité de l’Institut national de nutrition de Hanoi
(INN) avec lequel l’IRD collabore depuis plus d’une dizaine
d’années.
femmes, les chercheurs ont montré que la supplémentation
intermittente préventive en fer et acide folique, en moindre
quantité, quelques mois avant et au cours de la grossesse,
a un meilleur impact sur la santé de la mère et de l’enfant
que les pratiques actuelles d’apport à fortes doses pendant la
grossesse. Ces recherches ont contribué à la recommandation
récente de l’OMS sur le traitement préventif des femmes en
âge reproductif.
La majorité des recherches développées conjointement
vise à évaluer l’impact des interventions menées auprès
des populations les plus à risques que sont les femmes en
âge de procréer, les nourrissons et les jeunes enfants. Ces
actions concernent principalement l’apport de suppléments
et l’enrichissement d’aliments en micronutriments, l’objectif
principal étant de définir des stratégies pérennes appropriées
dans un contexte où les populations disposent de ressources
limitées.
D’autres études ont évalué l’impact de l’enrichissement en
micronutriments d’aliments destinés à l’ensemble de la
population (nuoc mam) ou à des groupes spécifiques tels
que les jeunes enfants et les scolaires. Ces interventions ont
permis d’améliorer significativement l’état nutritionnel des
populations cibles et ont démontré qu’au Vietnam, plusieurs
micronutriments autres que le fer étaient impliqués dans
l’anémie. Ces résultats amènent à repenser la nature des
actions mises en œuvre. L’étude d’efficacité des aliments
de complément au lait maternel, produits au Vietnam dans
le cadre du projet Fasevie associant l’INN, l’université
de médecine de Hanoi, l’IRD et le GRET1, a montré que la
consommation régulière de ces aliments protège le nourrisson
de la carence en fer et diminue la prévalence de retard de
croissance.
Un des enseignements les plus récents a été de démontrer
que les doses de suppléments recommandées par les
organisations internationales sont dans certains cas trop
élevées et entraînent parfois des effets secondaires néfastes.
Ainsi, dans le cadre d’une étude réalisée sur des jeunes
Ces recherches ont donné lieu
à deux nouveaux financements
internationaux pour la mise en œuvre
d’interventions à l’échelle des districts
et des provinces. Les travaux actuellement
en cours en Asie du Sud-Est (Vietnam, Cambodge)
concernent des questions non encore résolues comme
l’inefficacité des supplémentations en vitamine A des femmes
allaitantes, le rôle de la vitamine A dans l’absorption du fer et
l’enrichissement du riz en micronutriments. La question de
l’interaction entre carences en micronutriments et maladies
chroniques non transmissibles telles que l’obésité constitue
un thème important de recherche pour l’avenir.
Contact [email protected]
Publications Journal of nutrition,
Food and Nutrition Bulletin
1
Groupe recherche et d’échanges technologiques.
LE PARTENAIRE
L’Institut national
de nutrition de
Hanoi est un établissement
public vietnamien placé sous la
tutelle du ministère de la Santé.
Ses missions recouvrent la
surveillance et la recherche dans
le domaine de l’alimentation. Il
est chargé d’assurer la sécurité
sanitaire des populations
et réalise l’évaluation des
propriétés nutritionnelles et
fonctionnelles des aliments.
L’Institut mène également des
campagnes de sensibilisation en
vue notamment de lutter contre
les carences en micronutriments
et la malnutrition de la mère
et de l’enfant. Initié en 1995,
le partenariat avec l’IRD s’est
renforcé au fil des ans et se
traduit par le développement
d’études conjointes et le
coencadrement d’étudiants
vietnamiens et français
(doctorats et masters).
Contact
Dr Le Thi Hop,
directrice de l’INN
[email protected]
Fabrication de nouilles / Vietnam.
Alimentation d’enfants / Vietnam.
\ 28 \ 29
Institut de recherche pour le développement
Paludisme : le gorille à l’origine de la maladie
LE PARTENAIRE
L’Institut de
recherches médicales
et d’études des
plantes médicinales
du Cameroun (IMPM).
Le laboratoire de virologie de
l’IMPM, fruit d’un partenariat
avec l’IRD et le Centre de
recherche sur les maladies
émergentes et réémergentes,
coordonne toutes les activités
ayant trait à la recherche sur
les primates et l’étude du risque
d’émergence de nouvelles
infections au Cameroun. Situé
dans l’enceinte du ministère
de la Recherche, ce laboratoire
est accrédité par l’OMS pour la
surveillance de la résistance aux
anti-rétroviraux. Depuis 1994, les
équipes de recherche conduisent
des projets collaboratifs tant
dans le domaine de la recherche
clinique, avec l’évaluation des
premiers traitements génériques
contre le sida, que dans celui
du risque d’anthropozoonose,
comme l’illustre la découverte du
réservoir simien du HIV-1.
Contact
Dr Eitel Mpoudi Ngole,
responsable du laboratoire de
virologie IRD/Cremer/IMPM
[email protected]
http://www.minresi.net/minresi/
index2.php?cat=impm
Le paludisme est la maladie
parasitaire la plus répandue dans le
monde. Il affecte 250 à 500 millions
de personnes chaque année, tuant
plus d’un million d’entre elles, dont 90 %
en Afrique, le plus souvent de jeunes enfants.
Alors que de nombreux progrès ont été faits au cours
des dernières décennies en termes de traitement et de
prévention, un consortium international de chercheurs,
dont une équipe de l’IRD et de l’université Montpellier1
vient de montrer, pour la première fois, que le gorille, le
plus grand des primates, est un réservoir animal de la
maladie, transmise à l’homme par les moustiques du
gernre Anopheles.
Le gorille est à l’origine de l’infection de l’homme par
le parasite Plasmodium falciparum, responsable de la
forme la plus courante du paludisme. Cette découverte
réfute de précédentes études, qui avançaient déjà une
origine simienne, mais chez le chimpanzé ou le bonobo.
P. falciparum avait récemment été détecté chez le gorille
par des chercheurs du CNRS et de l’IRD2, mais l’origine de
cette infection restait à clarifier. Les scientifiques viennent de
démontrer la concordance génétique quasiment parfaite entre
les microorganismes décelés chez le grand singe et ceux qui
Moustique du genre Anopheles.
infectent les humains. Grâce à une technique de séquençage
du génome appelée single genome amplification, ils ont
identifié et caractérisé les séquences de l’ADN du parasite
présent dans des échantillons fécaux d’animaux sauvages.
Cette méthode de haute précision leur a également permis
de prouver que c’est le gorille qui a contaminé les humains,
et non l’inverse.
Autre découverte aux conséquences importantes pour la
santé publique : les gorilles constituent un réservoir animal
du parasite. L’équipe de recherche a analysé plus de
2 700 échantillons fécaux de chimpanzés et gorilles sauvages,
collectés sur 57 sites en Afrique centrale subsaharienne,
du Cameroun à la République démocratique du Congo, en
passant par la République centrafricaine. Cette méthode non
invasive, mise au point il y a dix ans par l’équipe de l’IRD et
ses partenaires de l’université d’Alabama, a permis de réunir
du matériel génétique en quantité, sans pour autant perturber
cette espèce protégée. Les résultats des analyses fécales
sont inattendus : l’infection à Plasmodium est très répandue
chez les gorilles de l’Ouest (Gorilla gorilla), avec des taux de
prévalence de 32 à 48 %, voire plus de la moitié des individus
contaminés dans certaines communautés. Ces résultats
n’indiquent pas si le parasite déclenche une maladie telle que
le paludisme, mais ces singes porteurs pourraient constituer
des foyers de contamination humaine. Ces travaux posent
ainsi un nouveau défi à la lutte contre la maladie. Compte
tenu des contacts hommes/singes de plus en plus nombreux
en Afrique centrale, notamment du fait de la déforestation
massive et des mouvements de population qui s’ensuivent,
l’existence d’un réservoir de P. falciparum chez le gorille
présage une éradication du fléau encore plus difficile.
Contacts [email protected]
[email protected]
Publication Nature
1
Ces travaux ont été réalisés en collaboration avec plusieurs équipes en
particulier de l’université d’Alabama aux États-Unis, du Sanger Institute
Malaria Programme au Royaume-Uni et du projet Prévention du sida au
Cameroun.
2
PRUGNOLLE et al. Proceedings of the National Academy of Sciences of the
United States of America, 2010, 107 (4), p. 1458-1463.
Gorille / Cameroun.
Rapport d’activité 2010
Développement
et mondialisation
Les multiples facettes de la question du développement rural et urbain des Suds, dans un contexte de
mondialisation et de changement global, sont au cœur de l’agenda des recherches en sciences humaines
et sociales. Si plusieurs équipes interrogent les transformations actuelles et le devenir des systèmes
socio-écologiques dans différentes régions du monde (Maghreb, Afrique subsaharienne, Asie),
d’autres s’intéressent aux mouvements de population en se penchant par exemple sur
les évolutions des périphéries des grandes métropoles en termes d’infrastructures, de
gouvernance et d’espace. Des travaux portent par ailleurs sur les déterminants et
les conséquences des migrations sur les sociétés et leur environnement ainsi que
sur les recompositions territoriales et identitaires qu’elles engendrent.
Fondées sur des études comparatives au niveau régional, ces recherches
suscitent un intérêt croissant par le dialogue qu’elles favorisent entre les
acteurs de la société. Les grandes priorités auxquelles elles répondent :
développement et gouvernance, vulnérabilités, inégalités et croissance,
lutte contre la pauvreté, frontières et dynamiques sociales et spatiales,
sont largement illustrées par les travaux sur la décentralisation, les
migrations, les politiques publiques, les faits religieux et la valorisation
des patrimoines locaux
176
CHERCHEURS
27,6
MILLIONS
D’EUROS
570
ARTICLES ET
OUVRAGES
École primaire / Vietnam.
\ 30 \ 31
Institut de recherche pour le développement
Biodiversité et patrimoine culturel au Brésil
LE PARTENAIRE
L’Instituto do
Patrimônio Histórico
e Artístico Nacional
est une institution qui relève du
ministère brésilien de la Culture.
Il a signé en 2009, Année de la
France au Brésil, une convention
de coopération technique avec
l’IRD dans le but de développer
des actions conjointes visant
la préservation des systèmes
agricoles traditionnels, et de
renforcer les liens entre recherche
et application au développement.
La France et le Brésil ont, de fait,
des acquis complémentaires
dans le domaine de la valorisation
des productions localisées. Plus
orientés vers les indications
géographiques dans le cas de la
France, ces acquis sont davantage portés par la dimension
culturelle de ce patrimoine et
une législation sur l’accès à la
biodiversité et aux connaissances
traditionnelles associées, dans le
cas du Brésil. Cette collaboration
a donné lieu à l’organisation
conjointe du séminaire francobrésilien Patrimoine culturel
et systèmes agricoles tenu à
Brasília en 2009.
Contact
Ana Gita de Oliveira,
[email protected]
www.iphan.gov.br
La préservation des ressources
phytogénétiques a longtemps été pensée
en termes de conservation, principalement
dans des banques ex situ. Ce n’est que
récemment qu’une plus grande attention a
été accordée aux systèmes agricoles traditionnels,
porteurs d’une part importante de l’agrobiodiversité. Dans
un contexte de changement climatique et de globalisation,
une meilleure compréhension des bases écologiques et
socioculturelles de ces systèmes s’impose. Comment
assurer la continuité des processus d’innovation et
d’expérimentation à l’origine d’une diversité biologique
construite et maintenue par l’homme ? Tel est l’objet des
recherches conduites par l’IRD et ses partenaires dans la
région du Rio Negro au Brésil.
Par la mise en place d’un instrument innovant, l’enregistrement
d’un bien au patrimoine immatériel de la nation, le Brésil ouvre
des pistes pour valoriser les ressources biologiques et les
savoirs remarquables liés aux agricultures traditionnelles. En
novembre 2010, l’Institut du patrimoine historique et artistique
national1 a reconnu le Système agricole traditionnel du Rio
Negro, en Amazonie centrale. Ce sont 21 biens culturels qui
ont été enregistrés depuis 2000 mais c’est la première fois
Rio Negro / Brésil.
qu’une telle inscription fait explicitement référence à la notion
de système et qu’elle concerne un bien à la fois biologique
et culturel.
Cet enregistrement résulte d’une synergie entre recherche
scientifique, politiques publiques et populations locales. Il
s’est appuyé sur le programme Pacta2 qui associe l’IRD et
l’Unicamp3, une organisation non gouvernementale,
l’Institut Socio Environnemental, l’Iphan et trois associations
amérindiennes, l’Association des communautés indigènes du
Moyen Rio Negro, la Fédération des organisations indigènes
du Rio Negro et l’Association indigène de Barcelos. Les
connaissances acquises sur ce système agricole concernent
les savoirs et pratiques associés à la gestion de l’espace, la
diversité des plantes cultivées, en particulier celle des maniocs
amers, la culture matérielle, principalement des objets de
vannerie, qui découle de ces productions et le patrimoine
alimentaire. Les recherches menées ont ainsi participé à
la reconnaissance de ce bien collectif. S’il n’assure pas de
protection au sens juridique du terme, cet enregistrement
entraîne cependant l’application de mesures de conservation
et de valorisation définies d’un commun accord entre la
population locale, via ses associations représentatives, et
l’Iphan. L’enjeu de ces actions est de maintenir vivant un
patrimoine partagé par les vingt ethnies qui vivent le long du
Rio Negro et de ses affluents. Cet instrument, qui s’inscrit
dans la logique de conventions élaborées par l’Unesco en
2003 et en 2005, permet de préserver la biodiversité agricole
en prenant en compte l’interdépendance et la dynamique
des facteurs biologiques, écologiques, socioculturels et
économiques.
Contacts [email protected]
[email protected]
Publication Colloque Innovation and sustainable
development in agriculture and food
1
Iphan.
Populations, agrobiodiversité et connaissances traditionnelles associées.
3
Universidade estadual de Campinas.
2
Pâte de manioc / Brésil.
Rapport d’activité 2010
Périphéries urbaines : des territoires
convoités
Au contact de deux mondes, le rural et l’urbain,
les périphéries des villes du Sud ont connu de profondes
transformations depuis quelques décennies. Avec
l’explosion des mégapoles et l’évolution de leur rôle dans
la mondialisation, elles sont devenues des espaces très
disputés. La comparaison des dynamiques engagées dans
plusieurs agglomérations d’Afrique, d’Asie et d’Amérique
latine contribue à une meilleure connaissance de ces
lieux singuliers et met en lumière l’action primordiale des
politiques publiques dans l’aménagement et la gestion de
ces territoires.
Les approches scientifiques ayant trait aux mutations
périurbaines ont elles-mêmes profondément évolué. Dans les
années 1960 et 1970, les franges ont souvent été analysées
comme de simples extensions de la ville ou des zones rurales
en voie d’absorption, sans identité propre. Ce point de vue
s’est modifié à partir des années 1980 : le dépassement
de l’idée d’une coupure radicale entre le rural et l’urbain a
conduit à percevoir ces périphéries comme des espaces
singuliers et dynamiques. Avec la métropolisation, liée au rôle
des villes dans la mondialisation, d’autres interrogations ont
surgi autour des notions d’aggravation des ségrégations et
de fragmentation.
Le programme de recherche Perisud1 porte sur six agglomérations très diverses, tant sur le plan géographique que
Urbanisation / Shanghai.
du point de vue économique et politique : Shanghai, Mexico,
Lima, Le Cap, Hanoi et Abidjan. L’analyse des logiques
nouvelles dans lesquelles les périphéries sont entrées montre
que, même là où l’urbanisation a ralenti, elles bénéficient
d’une croissance forte grâce au jeu des redistributions
de population à l’intérieur de l’agglomération alors que les
centres connaissent une augmentation démographique plus
faible, voire une diminution. En outre, les franges urbaines sont
utilisées et en partie recréées par des populations hétérogènes :
aux classes populaires, s’ajoutent et se juxtaposent des classes
moyennes et aisées, dans des quartiers voisins mais mieux
équipés. Les activités rurales qui subsistent sont parfois
dynamisées par la présence du marché urbain et d’infrastructures de transport. Ces zones, où les concurrences se
font de plus en plus vigoureuses, deviennent le théâtre de
conflits entre différents groupes, par exemple, à Abidjan, entre
promoteurs immobiliers ou acquéreurs individuels et autorités
coutumières.
Dans un tel contexte, le rôle que peuvent jouer les politiques
nationales et locales revêt une grande importance. Le Cap,
ville engagée dans une démarche promotionnelle, préserve
ainsi ses espaces verts et valorise son cadre. En Chine et au
Vietnam, l’État est très présent et continue à imposer des
zonages et une règlementation stricte sur l’usage des terres alors
qu’à Abidjan, à Mexico et à Lima, les politiques ne guident que
LE PARTENAIRE
L’université San
Marcos de Lima
peu l’expansion de l’agglomération et ses modalités. Un point
commun cependant : le déficit en matière de gouvernance
favorise des dynamiques centralisatrices au plan politique et
administratif et l’émergence de conflits de compétence entre
les différentes instances en place.
Contacts [email protected]
[email protected] - [email protected]
Publications Atlas de Mexico, Paris, Éditions
Autrement / Les métropoles des Suds vues de leurs
périphéries, Grafigéo
1
Facultad Latinoamericana de Ciencias Sociales (Mexique) ; Universidad
Nacional Mayor de San Marcos à Lima (Pérou) ; Académie des sciences
agricoles à Hanoi (Vietnam) ; East China Normal University à Shanghai
(Chine) ; University of Fort Hare (Afrique du Sud) ; Université d’AbidjanCocody (Côte d’Ivoire).
Bogota / Colombie.
(Universidad Nacional Mayor
de San Marcos), fondée au
XVIe siècle, est une université
publique qui accueille plus de
30 000 étudiants et joue un
rôle important dans le dispositif
universitaire péruvien. L’école
de géographie de l’université
San Marcos collabore avec
l’IRD depuis de nombreuses
années. Entre 2005 et 2008,
un programme de recherche
commun a porté sur les
dynamiques territoriales liées
à la réforme foncière. Cette
collaboration a été étendue
dans le cadre du master de
géographie et d’aménagement
du territoire, avec un financement
Prefalc, programme régional
de coopération actuellement
financé par le ministère de
l’Enseignement supérieur et de la
Recherche, et l’IRD. Six étudiants
de ce master participent aux
travaux de Perisud et bénéficient
ainsi d’une formation à et par la
recherche.
Contact
Alicia Huamantinco,
professeur de géographie
à l’université San Marcos de Lima
[email protected]

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